3. Editorial
VOUS AVEZ DIT TRANSITION ?
Pendant des millénaires, l’homme a vécu en harmonie avec
la nature….
La révolution industrielle d’abord, puis la démographie
galopante et la course au profit sont venues mettre en péril
cet équilibre fondamental.
Aujourd’hui, les crises conjuguées - économiques, climati-
ques, sociales, financières, énergétiques - nous prouvent que le
système est arrivé à son paroxysme et qu’il est urgent d’agir…
Voir plus loin, voir plus large
Remettre l’humain au cœur des enjeux environnementaux, économiques et sociaux,
réconcilier l’homme avec son milieu naturel, placer la sécurité, la responsabilité et l’éthi-
que, à tous les niveaux, chez tous les acteurs et dans tous les métiers, semble être la
seule voie de salut.
Cette nouvelle approche a un nom : le développement durable. Son objectif : répondre aux
besoins des générations présentes sans menacer la qualité de vie, voire la survie des suivan-
tes. Limiter les impacts de l’homme sur la nature. Assurer la paix sociale, la prospérité géné-
rale par un partage plus équitable des bénéfices du progrès. Voir plus loin, voir plus large.
La transition verte et vertueuse
Il est donc grand temps de tirer les conséquences des insuffisances du système actuel
et d’engager la formidable révolution de « l’économie verte et de l’éradication de la
pauvreté », celle que se fixe notamment le sommet de RIO et que les dysfonctionne-
ments exigent : changement climatique, déclin de la biodiversité, érosion des sols et
désertification, aggravation de la pollution, mais aussi financiarisation outrancière, et
aggravation de la pauvreté et des inégalités au niveau mondial.
Les Entreprises sont au cœur du système de production/consommation. Elles ont donc
un rôle primordial à jouer dans la mise en œuvre de cette inéluctable transformation.
Mais par quoi commencer ? Dans quels domaines agir ? Sur quels instruments se baser ?
Comment mesurer ses progrès ? Comment les communiquer ? Comment et avec qui ?
Suivez le guide
Riche en informations, en références, en adresses, ce guide pratique doit être une boîte à
outils, un vivier de pistes et de conseils pratiques, destiné à aider les sociétés, petites ou
grandes, à se profiler comme des entreprises novatrices et dynamiques, qui auront su trou-
ver le juste équilibre entre les impératifs économiques, sociaux et environnementaux.
Nous espérons qu’il saura, comme PRODURABLE, les 28 & 29 mars 2012, remplir sa
mission : ouvrir la voie à un engagement des entreprises vers un développement…vert
et vertueux.
Cécile Colonna d’Istria
Directrice de la publication
TODDAY
En partenariat avec :
www.produrable.com
NewDDeal 2012 1
4. L’autre regard sur
l’économie et la société
CHAQUE MOIS, ALTERNATIVES ECONOMIQUES C’EST :
> Le suivi complet de l’actualité économique et sociale
en France, en Europe et au niveau international
> Des enquêtes et des entretiens pour vous
informer de tout ce qui bouge, sans oublier pour autant
ce qui ne change pas, ou pas assez vite
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afin de faire le tour des questions qui font débat
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5. SOMMAIRE
Répertoire des annonceurs par ordre alphabétique 5
Avant-propos 7
L’essentiel du développement durable de la RSE 9
A la une en 2012 : RIO + 20 10
Les fondamentaux 12
Le développement durable de quoi parle-t-on ? 12
La dimension sociale et sociétale 14
La dimension environnementale 15
La dimension économique 16
L’éthique et la gouvernance 18
Les premiers pas 20
Quel rôle pour l’entreprise ? 20
Faire rimer efficacité et responsabilité sociale 21
Pourquoi se lancer dans un programme de développement durable 23
Conseils pratiques pour démarrer votre programme 24
La méthode 25
Aller plus loin 26
Comment piloter une démarche RSE de manière crédible 26
ISO 26000 : La norme hors norme 28
Les bonnes pratiques 31
Environnement 32
RSE / Gouvernance 34
Social 37
Les acteurs clés du changement 39
Institutionnels et Associations professionnelles 39
Conseil / Stratégie / Organisation 47
Finance / Gouvernance – Audit / Certification 65
Communication / Média – Marketing / Innovation 73
Formation / Emploi – Social RH 89
Green IT / Management environnemental 99
Clés de recherche rapide : index et panorama 105
Index par personne 106
Index par activité 109
Panorama détaillé des prestataires 112
NewDDeal 2012 3
7. REPERTOIRE DES ANNONCEURS
A WAY TO WAKE UP PRODUCTIONS 78
A2 CONSULTING 48
AAVANA 101
ABILIS ERGONOMIE 49
AEDD 4
AFNOR GROUPE 69
ALTERNATIVES ECONOMIQUES 2
BIOVIVA DÉVELOPPEMENT DURABLE 50
BNP PARIBAS 67 et 2eme de couv.
BSR - BUSINESS FOR SOCIAL RESPONSIBILITY 44
BUREAU VERITAS CERTIFICATION 72
BUSINESS WIRE 79
CHARTE COLIN MAILLARD 95
CIWF FRANCE 45
CREAWA STUDIO D’ÉCO DESIGN GRAPHIQUE PRINT ET WEB 80
CSR EUROPE 41
DECISIONS DURABLES 30
DNV BUSINESS ASSURANCE 71
ECO-LOGISM 51
ECOETHIC 52
ECOLE DE MANAGEMENT STRASBOURG 92
EMCO2 SOLUTION 102
ERNST YOUNG - ENVIRONNEMENT ET DÉVELOPPEMENT DURABLE 53
ESCP EUROPE 91
ETHICITY 54
FMF TALENTS 93
FRESH CORNER 96
GINGKO 21 88
GONDWANA BIODIVERSITY DEVELOPMENT 103
GREENOVIA 55
GRIMALDI FORUM MONACO 75
INSTITUT DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DES RELATIONS INTERNATIONALES (IDDRI) 56
INSTITUT RSE MANAGEMENT 57
INTERTEK RDC 58
ISEADD 94
LA CABANE BLEUE 81
LABORATOIRES EXPANSCIENCE 4eme de couv.
LB QUALITATIVE RESEARCH 82
LE RESEAU DE L’IMAGE 83
LES JARDINS DE GALLY 87
MHJ CONSEIL - NOUVELLE RH 97
NEOPLANETE 6
NOVETERRA 59
PARTA DIALOGUE 98
PLUMES DE PUB 84 et 3eme de couv
RED ON LINE 104
RÉSEAU CHEDD 43
RUMEUR PUBLIQUE 77
SIDIESE 85
SUSTAINWAY 60
THE GREEN COMMUNICATION 61
THE NATURAL STEP FRANCE 62
UTOPIES 63
WHAOU EFFECT 46
YOUPHIL 8
NewDDeal 2012 5
8. 239:)%9 %46Ç7 4%6-7
0% ;) 6%(-3 7´-278%00) ª 0=32
0I QEK PI UYSXMHMIR IR PMKRI PE ;IF VEHMS
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3XE :(%5$',2/21LQGG
9. AVANT-PROPOS
La responsabilité sociétale de l’entreprise
devient une véritable exigence
Aujourd’hui, près de 75 % des entreprises parlent de déve-
loppement durable. Elles ont compris l’intérêt de l’appro-
che et se la sont appropriées en construisant des démar-
ches de progrès. La crise que nous traversons, tellement
globale, tellement systémique, tellement mondiale, ne fera
que renforcer ces actions car elle remet en cause profondé-
ment un système qui a vu la finance prendre le dessus sur
Crédit photo : Photothèque Groupe La Poste
l’économie. Cette crise réinterroge la responsabilité de tous
les acteurs et notamment des entreprises.
Ma conviction est qu’avec cette crise, la responsabilité
sociétale de l’entreprise, est non seulement un choix, mais
devient une véritable exigence.
Cette responsabilité nous pousse à avoir une attitude
totalement ouverte et respectueuse vis-à-vis de toutes les
parties prenantes. C’est traiter le client avec respect et considération. C’est avoir une attitude
d’employeur responsable vis-à-vis de nos collaborateurs et collaboratrices. C’est inciter nos
fournisseurs à nous accompagner dans notre démarche de développement durable. C’est
enfin avoir une politique forte en faveur de l’environnement.
A notre niveau, nous prenons des engagements ambitieux. Le Groupe La Poste possède la
première flotte de France et le plus grand parc immobilier de France. Quand on sait que le
transport et le bâtiment sont les deux principales sources de pollution d’émissions de CO2,
nous ne pouvons que nous sentir responsables.
Nos actions de réductions, mises en place depuis plusieurs années, avec notamment notre
engagement en faveur du véhicule électrique, la formation de 60 000 facteurs et factrices à
l’éco-conduite, ou encore plus récemment avec le lancement de la Lettre Verte, trouvent leur
complément aujourd’hui dans une démarche de compensation carbone globale qui permet-
tra au Groupe La Poste de viser une neutralité carbone totale.
Les nouveaux services, que nous proposons dorénavant autour de la mobilité durable avec
nos filiales Greenovia ou Mobigreen, ou encore notre activité en faveur de la collecte et du
recyclage du papier usagé via notre offre Valora, sont également des exemples de l’engage-
ment de notre Groupe en faveur d’un développement durable.
Tous ces engagements nourrissent la confiance dans le Groupe La Poste. La pérennité de
La Poste, et au-delà, de toute entreprise, n’est assurée que si elle crée de la valeur ajoutée écono-
mique, sociale et environnementale à long terme en la co-construisant et en la partageant avec
l’ensemble de ses parties prenantes. Quoi de plus naturel donc pour Le Groupe La Poste que
d’être partenaire de cette 5ème édition de Produrable qui offrira, j’en suis sûr, de nombreuses
idées pour œuvrer à « une transition vers une économie verte et vertueuse ».
Jean-Paul Bailly,
Président Directeur Général du Groupe La Poste
NewDDeal 2012 7
12. A LA UNE en 2012
Rio+20 : vers une économie verte et une meilleure gouvernance
RIO+20 : une occasion que Rendre la transition possible qui précède est essentiel pour toutes les
le monde ne peut pas laisser économies, mais vaut tout particulière-
passer Vingt ans après le Sommet de Rio, le ment pour les pays en développement,
monde est toujours confronté à deux qui ont la possibilité de renforcer leur
En juin 2012, le monde entier aura le grands défis liés entre eux : satisfaire les économie grâce à la gestion durable de
regard tourné vers Rio de Janeiro, où, aspirations à une vie meilleure d’une po- leur capital naturel.
vingt ans après le premier «Sommet de pulation mondiale qui devrait augmen-
la Terre», les chefs d’État et de gouver- ter de plus d’un tiers d’ici 2050 et alléger La transition vers l’économie verte sup-
nement assisteront à la Conférence des les pressions sur l’environnement, qui, pose également le recours à des solu-
Nations unies sur le développement du- si rien n’est fait, compromettront la ca- tions à faible intensité de carbone et
rable1 (CNUDD ou «Rio+20»). pacité du monde à répondre à ces aspi- efficaces sur le plan de l’utilisation des
rations. ressources, ainsi que l’intensification
La conférence Rio+20 constitue une oc- des efforts pour promouvoir des modes
casion unique pour le monde interdé- Pour relever ces défis, il ne s’agit pas tant de consommation et de production du-
pendant qui est le nôtre de voir réaffirmé de ralentir la croissance que de promou- rables. Tous ces impératifs requièrent la
l’engagement politique en faveur du dé- voir le bon type de croissance. Certaines mise en place de cadres réglementaires
veloppement durable. Lors de la confé- raisons impérieuses commandent de re- idoines, l’adoption de mesures d’incita-
rence, les participants évalueront les penser fondamentalement le modèle tra- tion fortes en faveur des marchés et de
progrès accomplis et chercheront des ditionnel du progrès économique : revoir l’innovation, la mobilisation des ressour-
solutions aux lacunes dans la mise en à la marge un système économique qui ces financières ainsi que la promotion de
oeuvre et aux nouveaux défis. Les tra- encourage l’utilisation inefficace du ca- l’esprit d’entreprise et de la participation
vaux tourneront autour de deux thèmes pital naturel et des ressources ne suffira du secteur privé. Ils supposent égale-
liés entre eux, à savoir «l’économie verte pas à induire le changement nécessaire. ment une valorisation correcte du capital
dans le cadre du développement durable Nous avons besoin d’une économie qui naturel et, plus généralement, une révi-
et de l’élimination de la pauvreté» et «le puisse assurer croissance et développe- sion de la manière dont nous mesurons
cadre institutionnel du développement ment, tout en permettant d’améliorer le la croissance et le progrès.
durable». bien-être humain, d’offrir des emplois dé-
cents, de réduire les inégalités, de lutter Source : Commission Européenne
La conférence Rio+20 peut marquer le contre la pauvreté et de préserver le capi-
début, au niveau mondial, d’une transi- tal naturel dont nous dépendons tous.
tion accélérée et approfondie vers une
économie verte, c’est-à-dire une écono- Ce type d’économie, une économie verte,
mie qui génère de la croissance, crée des constitue un moyen efficace de promou-
emplois et permet d’éradiquer la pauvre- voir le développement durable, d’éradi-
té par des investissements dans le capi- quer la pauvreté ainsi que de répondre
tal naturel dont dépend la survie à long aux nouveaux défis et de remédier aux
terme de notre planète et la préservation lacunes existant dans la mise en oeuvre.
de celui-ci. Elle peut aussi constituer la Pour passer à une économie verte, il est
première étape de la nécessaire réforme nécessaire de préserver les actifs que
de la gouvernance internationale en ma- constituent les ressources naturelles
tière de développement durable. clés et d’investir dans ce domaine. Ce
NewDDeal 2012 10
13. A LA UNE en 2012
RIO+20 : la France soutient la création d’une Organisation
mondiale de l’Environnement
Changement climatique, déclin de la biodi- 1. Il est nécessaire de créer le pilier Etats membres de l’Union européenne
versité, érosion des sols et désertification, environnemental qui manque à la gou- (27), les Etats membres de l’Union
aggravation de la pollution… La communau- vernance mondiale du développement africaine (54), une quinzaine de pays
té internationale doit se donner les moyens durable. Le développement durable de la région « Europe » des Nations
de répondre à ces défis en renforçant la repose sur trois piliers, économique, unies (de l’Islande à l’Asie centrale),
gouvernance mondiale de l’environnement, social et environnemental, or le pilier ainsi que des pays asiatiques (Népal,
aujourd’hui trop fragmentée et inefficace. environnemental est aujourd’hui éclaté Thaïlande, Malaisie) ou latino-améri-
Le Sommet qui se tiendra à Rio du 20 au 22 en plus de 500 accords multilatéraux, cains (Chili et Uruguay). Jamais le sou-
juin, 20 ans après le Sommet de la Terre de fragmentaires et cloisonnés. tien n’a été aussi fort, sur les différents
1992, sera une occasion unique pour y par- continents et dans des pays aux ni-
venir. Pour sa part, la France souhaite qu’une 2. Le changement climatique, la perte de veaux de développement différents. Ce
organisation mondiale de l’environnement biodiversité, l’érosion des sols et la déser- soutien démontre non seulement qu’il
soit décidée à « Rio + 20 ». Le système onu- tification, les pollutions diverses s’accélè- y a consensus sur la fragmentation du
sien actuel ne prenant pas suffisamment en rent. Or en l’absence d’instance multilatérale système, mais aussi que de nombreux
compte le rôle de la société civile, acteur clé forte, les tensions sur les ressources risquent pays sont prêts à décider d’une réfor-
du développement durable. de se résoudre d’Etat à Etat, et ce au détri- me ambitieuse.
ment des plus faibles.
Pour une réforme ambitieuse 3. Sur certains sujets, comme les forêts En quoi ce projet renforce-t-il
de la gouvernance internatio- ou les océans, les questions environ- la gouvernance du développe-
nale de l’environnement nementales nécessitent une approche ment durable?
plus cohérente. Une OME doit marquer le
Pour le Ministère de l’Ecologie, du Déve- début d’une prise en compte intégrée de ces Il n’y a pas d’opposition entre les di-
loppement durable, des Transports et du questions, en liaison avec les autres organi- mensions sociale, économique et envi-
Logement, « Rio+20 est une occasion uni- sations concernées. ronnementale du développement dura-
que d’aboutir à une réforme simple, efficace, ble. Ce débat a été tranché il y a 20 ans
pragmatique, et en même temps ambitieuse, 4. Il est devenu nécessaire, tant d’un avec la déclaration de Rio, qui énonce
de la gouvernance internationale de l’envi- point de vue de démocratie globale que que « la protection de l’environnement
ronnement. Il est temps en 2012 de tirer les d’efficacité, d’associer l’ensemble des doit faire partie intégrante du proces-
conséquences des insuffisances du système Etats à la gouvernance internationale de sus de développement » (principe 4).
actuel, en ayant une voix mondiale forte sur l’environnement. Le Programme des Na-
l’environnement, garante d’une expertise tions unies pour l’environnement (PNUE) Le programme des Nations unies pour le
reconnue au sein des Nations Unies ». a été créé il y a 40 ans, alors que l’envi- développement (PNUD), dans son Rap-
ronnement était un sujet international port sur le développement humain de
Le prochain sommet des Nations Unies sur nouveau et que l’on pouvait confier à un 2011, souligne le lien indissociable exis-
le développement durable aura lieu à Rio groupe limité de pays le soin d’en trai- tant entre la durabilité environnemen-
de Janeiro en Juin 2012. Ce grand rendez- ter. Le Conseil d’administration du PNUE tale et l’équité sociale. Il relève ainsi que
vous mondial sur le développement dura- compte 58 Etats seulement. Cela n’est les cas de malnutrition dans le monde
ble sera l’occasion de recréer l’élan civique plus justifiable aujourd’hui. Depuis 40 sont dus pour moitié à des facteurs en-
et l’engagement politique suscité par le ans, de nombreuses tentatives d’amélio- vironnementaux. Il indique également
Sommet de la Terre en 1992. La conférence ration marginale du système ont échoué. que dans les années à venir, les facteurs
sera structurée autour de deux thèmes : Or jamais les coûts de l’inaction n’ont été environnementaux devraient accroître
• ’économie verte dans le cadre du dé-
l aussi importants. Il est donc temps de les prix des denrées alimentaires de 30
veloppement durable et de l’éradica- construire une réponse multilatérale cré- à 50%. Il souligne enfin qu’au niveau
tion de la pauvreté dible. Pour être pragmatique, la réforme mondial, les arrangements relatifs à la
• e cadre institutionnel du développe-
l proposée bâtit sur l’existant, c’est-à-dire gouvernance affaiblissent fréquemment
ment durable. le PNUE, qui a son siège à Nairobi. la voix des pays en développement et
excluent les groupes marginalisés.
Pourquoi une organisation Une OME est-elle possible à Si Rio+20 n’aboutit pas à la création
mondiale de l’environnement Rio+20 ? d’une OME, ce sommet aura manqué
serait-elle la solution (OME) ? une occasion de renforcer le dévelop-
Plus de 100 pays se sont déjà pronon- pement durable.
Rio+20 doit déboucher sur une décision fa- cés officiellement en faveur d’une orga-
vorable à une OME pour quatre raisons : nisation de type OME, notamment les Source : Commission Européenne
NewDDeal 2012 11
14. LES FONDAMENTAUX
LE DÉVELOPPEMENT DURABLE : DE QUOI PARLE-T-ON ?
Le développement durable est devenu « Un développement qui réponde aux sations (RSO), dont les principaux ob-
un concept « fourre-tout » que chacun, besoins du présent sans compromet- jectifs restent : équité sociale, préser-
entreprise, salarié, syndicat, consom- tre la capacité des générations futures vation de l’environnement et efficacité
mateur, client, fournisseur, État, en à répondre aux leurs ». économique.
résumé les parties prenantes, s’appro- Sur le plan macroéconomique, deux
prie en fonction de ses intérêts, voire concepts sont inhérents à cette no-
en l’instrumentalisant. tion : La Responsabilité Sociale
L’erreur la plus courante et en même • Le concept de « besoins », et plus
des Entreprises (RSE)
temps la plus équivoque consiste à particulièrement des besoins essen-
assimiler le développement durable à tiels qu’ont les plus démunis, à qui il Tous les siècles précédents ont
l’écologie. convient d’accorder la priorité. connu, sous des formes différentes,
La confusion la plus grande règne • Les limites que l’état de nos techni-
la corruption, l’exploitation des in-
donc autour de la définition du déve- ques et de notre organisation sociale dividus (esclavage, servage), les «
loppement durable et de ses termes impose à la capacité de l’environne- Affaires » (faillite de Law, scandale
dérivés. ment à répondre aux besoins actuels de Panama, pour rappeler les plus
Il ne s’agit pas d’un concept nou- et à venir. connues). L’histoire nous apprend
veau, ni d’un effet de mode, il repose que, de l’antiquité à nos jours, les
sur des bases solides tant historiques Les 3 objectifs associés du développe- rapports commerciaux ont connu
que conceptuelles (cf. J. Ballet et F. ment durable sont : bien des vicissitudes.
de Bry, L’entreprise et l’éthique, Le • L’égalité sociale (People).
Seuil, 2001). • La préservation de l’environnement
La RSE, dont le moteur principal est
Les latins font appel à leurs ancêtres (Planet). l’éthique, se définit selon le « Livre
philosophes et à leurs économistes • L’efficacité économique (Profit).
Vert » de la Commission européenne
du 18ème et 19ème siècle, les anglo- comme : « Être socialement responsa-
saxons à l’utilitarisme, mais ils se Ces objectifs sont également identifiés ble signifie non seulement satisfaire
rejoignent sur un point : aujourd’hui, dans un triptyque célèbre, les 3 P : Peo- pleinement aux obligations juridiques
quel que soit le niveau, micro ou ple, Planet, Profit. Le développement applicables, mais aussi aller au-delà et
macroéconomique, aucune organisa- durable de l’humanité doit passer par investir « davantage » dans le capital
tion ne peut le négliger sans prendre le meilleur équilibre possible entre les humain, l’environnement et les rela-
des risques majeurs, tant sur le plan « 3P ». tions avec les parties prenantes ».
social qu’environnemental et écono- Le développement durable, concept La RSE signifie donc que l’entreprise
mique. Des exemples récents (Enron, planétaire, devient au niveau micro- doit non seulement se soucier de sa
Erika, Worldcom, Nike, Société géné- économique le développement des rentabilité financière et de sa crois-
rale …), nous montrent que cette né- entreprises socialement responsables sance, mais aussi de ses impacts envi-
gligence a un coût pour l’entreprise, (RSE), et plus globalement des organi- ronnementaux et sociaux. Elle ne doit
non seulement en termes financiers
(baisse des cours de bourse, des pro-
fits, …) mais également en termes
de réputation vis-à-vis de ses parties 3 piliers
Préservation
prenantes.
Responsabilité
environnementale
Le développement
durable contemporain :
de la macroéconomie à la Viable Vivable
microéconomie Durable
Responsabilité Responsabilité
Même si le concept a une histoire, économique Equitable sociale
une définition, celle du rapport Brunt-
land (du nom de la Présidente de
la commission, la Norvégienne
Gro Harlem Brundtland), semble ad- Efficacité Equité
mise aujourd’hui par la communauté
internationale :
NewDDeal 2012 12
15. LES FONDAMENTAUX
pas produire dans n’importe quelles
conditions sous prétexte de faire des Un peu d’histoire …..
bénéfices. Elle doit rester éthique. L’activité économique a longtemps été considérée comme immorale ou amorale.
Le Code d’Hammourabi (2000 av. J.C.) témoigne du souci de son rédacteur
L’éthique, hypothétique et relative, de moraliser les affaires en réglementant strictement les échanges tant sur le
nous dit ce qui est bon et mauvais plan commercial que financier. Aristote critique l’économie de richesse (chré-
en fonction de notre jugement, elle matistique) dans son aspect téléologique. La richesse n’est pas une fin soi,
répond à la question « Comment vi- elle doit être un moyen au service de l’Homme.
vre ? » alors que la morale, impérative Juristes, mais aussi moralistes, les romains critiquent violemment le luxe et
et absolue, répond à la question « Que l’attrait de l’argent.
dois-je faire ? ». Aujourd’hui, la morale Ce mépris pour la richesse se porte sur le travail qui la produit. Seuls les es-
s’efface devant l’éthique non pour des claves ou les étrangers peuvent travailler à sa production.
raisons philosophiques ou conceptuel- Au cours du Moyen-âge, les nobles et les corporations jouèrent un rôle déter-
les, mais pour des raisons médiatiques. minant dans les rapports entre la morale et l’économie : les premiers en n’exer-
La morale est qualifiée de ringarde, de çant aucune activité économique (dérogeance), les seconds en faisant peser
conformiste ; sa connotation en fait un une forte contrainte sociale sur les relations économiques grâce à une sévère
terme au « cachet victorien, suranné réglementation (limitation de la concurrence, forte hiérarchie, loyauté et solida-
et répressif ». Existe-t-il une éthique rité entre ses membres, …). Avec la survenance du protestantisme, la réussite
universelle ou plusieurs éthiques (une économique devient un signe de la grâce divine, à condition qu’elle s’appuie
pour les affaires, une pour les salariés, sur la ténacité et l’esprit d’ascèse (Max Weber). L’appartenance à cette religion
une pour le consommateur, …). apparaît, en affaires, comme un « certificat de qualification éthique ».
L’ambiguïté se lève si on distingue A la fin du 18ème siècle, l’économie libérale, placée sous le signe d’une mo-
l’éthique universelle de l’éthique appli- rale utilitariste (J. Bentham), se substitue à l’économie de l’Ancien régime.
quée, considérée comme s’appuyant L’homme recherche alors son bonheur à travers la maximisation de ses plai-
sur les principes de la première tout sirs et la minimisation de ses peines.
en les adaptant à des contextes parti- Devant les conséquences sociales du libéralisme sauvage et de son cortège
culiers. Le mot anglo-saxon « ethics », de misères ouvrières (logements insalubres, malnutrition, salaires insuffi-
ne faisant aucune distinction entre la sants, journées de travail longues et pénibles, absence d’assurances socia-
morale et l’éthique, s’est imposé sur le les …), l’éthique renoue avec l’économie à travers le catholicisme social, le
plan international. socialisme et le communisme. Elle se traduit notamment par l’exercice d’un
paternalisme entrepreneurial qui subsistera sous des vocables divers jusqu’à
nos jours. La Déclaration universelle des Droits de l’Homme de 1945 marque
Le cercle vertueux une étape importante dans cette réhabilitation de la morale à travers notam-
du développement durable ment le respect de la dignité humaine.
Ainsi, plus qu’un effet de mode, la « RSE » dans l’entreprise demeure un phé-
En considérant que le Développement nomène récurrent sous des vocables divers : l’éthique de cette fin de siècle,
durable, décliné sous le vocable RSE, c’est le paternalisme qui débute dans les années 1850 ; c’est l’Etat-providence
constitue des objectifs sur le plan mon- à partir de 1936, renforcé depuis 1945 ; c’est l’entreprise citoyenne des années
dial, national et organisationnel, il ne 80, l’entreprise éthique, voire l’entreprise durable.
peut être atteint que s’il s’appuie sur
une bonne gouvernance, elle-même
résultat d’une éthique de la responsa-
bilité, qui est la condition nécessaire Dans l’optique du développement dura- éthiques et de la garantie du dialogue
au bon fonctionnement de ce cercle ble et de la RSE, la bonne gouvernance avec les parties prenantes.
vertueux. résulte notamment du respect des nor- Le concept de parties prenantes peut
mes et de certains principes (principes être compris de manière plus ou moins
La gouvernance se définit comme « le de précaution, de prévention, de coo- large : réduit aux relations entre l’orga-
système par lequel les entreprises sont pération, de transparence …), de l’en- nisation et ses actionnaires (sharehol-
dirigées et contrôlées » (Rapport Ca- gagement et de l’exemplarité de ses ders) ou élargi aux relations entre l’or-
dbury, 1992). dirigeants, de l’élaboration de codes ganisation et ses stakeholders.
NewDDeal 2012 13
16. LES FONDAMENTAUX
LA DIMENSION SOCIALE ET SOCIÉTALE
Le respect des droits de l’homme, en Le dirigeant possède une fonction mo- Dans un souci de cohérence logique et
tout premier lieu le respect de la dignité rale dans l’entreprise, qui joue un rôle d’harmonie affective, l’individu tente
humaine, constitue le fondement même fondamental en créant la confiance de réduire, voire de faire disparaître
des relations sociales dans l’entreprise. indispensable à sa survie. La perfor- cette dissonance.
mance de l’organisation à long terme L’équité sociale tente ainsi d’établir un
La gestion des personnes est sans dépendra de sa valeur personnelle, no- équilibre entre les attentes du salarié,
aucun doute le domaine du manage- tamment de ses principes éthiques et ses performances, et la rentabilité de
ment dans l’entreprise où la RSE ap- de sa faculté à donner l’exemple. l’entreprise. De nombreux exemples
paraît comme incontournable. Concer- apparaissent ainsi dans le cycle de vie
nant tant les rapports entre l’entreprise Si l’entreprise affirme son rôle éthique, du salarié.
et ses salariés que les rapports entre les chefs doivent certes montrer l’exem-
les salariés entre eux et les salariés et ple, mais il ne leur appartient pas de
leur environnement, elle est au centre s’ériger en directeurs de conscience, La RSE et le cycle de vie du
des contradictions entre les logiques détenteurs des valeurs universelles, salarié
économiques et les logiques sociales, mettant ainsi l’exemplarité au service
mais elle est en même temps la che- de la manipulation. L’équité sociale ne concerne pas unique-
ville de la politique de motivation et ment les rapports entre le salarié et son
d’implication du personnel. Les diri- Quels sont les critères d’un compor- entreprise, il concerne également les
geants eux-mêmes ont des pratiques tement exemplaire ? L’honnêteté, la autres parties prenantes, notamment
contradictoires, considérant les sala- franchise, le sens de l’intérêt général, le les rapports avec les sous-traitants,
riés tantôt comme une variable d’ajus- charisme, la cohérence personnelle … Il avec les fournisseurs, avec les clients.
tement, tantôt comme un avantage peut se définir de manière positive, « Je Du recrutement au départ du salarié,
compétitif, ou encore comme un enjeu fais ce que je dis, je dis ce que je fais » la RSE concerne tous les aspects de
idéologique. ou de manière négative : « Faites ce que son cycle de vie dans l’entreprise, no-
je dis, ne faites pas ce que je fais ». Il tamment : recrutement, rémunération,
La violation des droits de l’homme, sous tend à légitimer l’autorité du chef, corol- formation, climat social, harcèlement,
des formes diverses (harcèlement moral laire du pouvoir qui lui est donné par sa discrimination, stress, alerte éthique,
et sexuel, non-respect de la vie privée des place dans la hiérarchie de l’entreprise. organisation du travail, licenciement,
individus, …), est à l’origine des princi- Théorie du processus, l’équité est l’une démission ou départ à la retraite.
paux conflits éthiques. des explications de la satisfaction, de
la motivation et de l’implication du sa- Si la liberté de l’entreprise doit s’exer-
« Tous DRH », tel est le titre d’un ouvra- larié. Elle repose sur l’idée que les sa- cer dans un cadre, la France oscille
ge collectif, sous la direction du Pro- lariés attendent que leurs apports dans entre la soft law, avec la mise en place
fesseur JM. Peretti, qui nous démontre le travail (compétence, expérience, spontanée de chartes éthiques et le res-
que la gestion des ressources humai- temps, obéissance …) soient récom- pect volontaire de normes facultatives
nes n’est pas l’apanage de la fonction pensés équitablement. (SA8000, ISO9000, ISO 14000, GRI, …)
correspondante dans l’entreprise, et la hard law caractérisée par des obli-
mais qu’elle concerne tous les niveaux Symétriquement, l’employeur attend gations légales (cf. Code du travail) tel-
et toutes les fonctions. Si l’équité so- qu’en échange l’employé fournisse un les que : le bilan social, rendu obliga-
ciale est l’un des objectifs de la RSE, effort qui lui paraisse équitable. Le sa- toire par la loi de 1977, puis le Rapport
elle ne peut se construire qu’à partir de larié effectue des comparaisons avec sur l’égalité professionnelle, instauré
l’exemplarité et de la justice. d’autres employés dans l’entreprise, par la loi Roudy en1983 et complété ré-
qui exécutent soit le même travail, soit cemment par la loi Génisson en 2001 ;
un travail hiérarchiquement inférieur enfin la loi sur les Nouvelles Régula-
Exemplarité et justice ou supérieur, et également avec des tions Économiques en 2002 qui impo-
salariés d’autres entreprises. se notamment aux entreprises cotées
« Le poisson pourrit par la tête » dit le d’établir annuellement un rapport so-
proverbe chinois. Cette citation exprime Ces comparaisons le conduisent à dé- cial et environnemental.
la nécessité pour le dirigeant, mais aus- terminer son comportement au travail.
si pour tous les responsables à quelque Qualifiée de « dissonance cognitive »
niveau que ce soit, d’être exemplaires. au sens de Festinger (1957), cette si-
Cette exemplarité doit être au cœur de tuation différenciée se définit comme
l’équité sociale, elle constitue le fonde- « un état de malaise psychique dû au
ment de la confiance des salariés dans fait que l’on est partagé entre deux ou
leurs supérieurs hiérarchiques. plusieurs idées contradictoires ».
NewDDeal 2012 14
17. LES FONDAMENTAUX
LA DIMENSION ENVIRONNEMENTALE
Le monde a changé. Nous prenons len- autant le penser extérieur à elle, car nité, mais seulement certains aspects
tement conscience des défis environ- considérer l’homme comme autonome de celle-ci relatifs à la technicité, les
nementaux que l’Homme doit relever reviendrait à nier la nature. La nature rapports de pouvoirs n’étant pas remis
dans les années à venir. que nous connaissons est le reflet de en cause.
l’état actuel de la science. A l’opposé, les écologistes orien-
Les richesses ne sont réparties ni tent leurs analyses d’un point de vue
équitablement ni harmonieusement L’écologie promeut l’idée d’une wilder- scientifique dans le but de promouvoir
entre les peuples, les ressources sont ness absolue qui doit évoluer sans la une société plus juste, c’est-à-dire en
déséquilibrées entre les pays produc- trace indélébile de l’homme. La wilder- meilleure relation avec la nature. Ils
teurs du Sud et les consommateurs ness établit indirectement que l’hom- sont en rupture avec la technocratie.
du Nord, la biodiversité disparaît, la me est mauvais pour la nature. Face à
pollution et le gaspillage augmen- cette vision de la nature sauvage, la re- Ces distinctions établies, il n’en de-
tent, les biens et les denrées sont cherche de l’écologie scientifique tente meure pas moins que la question entre
mal distribués, il y a de plus en plus de remédier aux perturbations naturel- l’homme et la nature reste entière.
de pauvres et de chômeurs, beau- les par l’action humaine. Le glissement C’est seulement à l’aube des temps
coup d’enfants n’ont pas accès à la sémantique entre nature, environne- modernes qu’apparaît l’idée carté-
connaissance et sont exploités, les ment et écologie peut de ce fait se per- sienne de l’homme comme « maître et
intérêts publics sont confrontés aux cevoir par l’acceptation progressive de possesseur de la nature », pliant la na-
intérêts privés, et bien sûr la fracture l’homme en leur sein. ture à sa propre rationalité. La science
Nord-Sud s’accentue, parmi beau- Le mot écologie inventé par Haeckel moderne s’entend d’abord comme un
coup d’autres déséquilibres … en 1866, prend une dimension scien- processus de domination du monde. Il
tifique, puis à l’avènement du 21ème s’agit alors pour elle d’améliorer la na-
siècle devient un enjeu global. ture ; c’est dans cette orientation que
Nature, environnement, prend place l’écologie. Longtemps, elle
écologie « Environnement » est un mot relation- n’avait été qu’un décor, un fond. A pré-
nel signifiant ce qui environne, il dési- sent, une des figures par excellence de
Peut-on parler indifféremment de la gne toujours le milieu comme référent, la nature est le paysage, c’est-à-dire la
nature, de l’environnement et de l’éco- mais cette fois, son champ d’applica- nature qui mérite d’être regardée.
logie ? Les relations entre ces trois no- tion relève de la biologie et renvoie au La maîtrise de la nature débouche
tions ne sont pas simples. La nature est système. Mais il ne faut pas se tromper sur une contradiction de fond : si l’on
notre environnement, mais tout envi- sur l’enjeu véritable de ce terme. En ef- est « maître et protecteur », on peut
ronnement n’est pas naturel. De même, fet, c’est la sphère du politique qui s’en aussi bien se déclarer « maître et sac-
si l’écologie est la science des rapports accapare. cageur ». En réponse à la question de
entre les êtres vivants et leur milieu, Dès lors, l’environnement devient la la crise écologique, nous pouvons dire
l’écologie n’est-elle pas la science de protection de la nature et la gestion des qu’elle ne concerne pas tant la nature
l’environnement ? risques. que la question des changements dans
L’écologie est une science de la nature On peut par conséquent affirmer que nos façons de gérer le vivant. Ceci im-
et en faire la science de l’environnement l’environnement renvoie à la respon- plique qu’il y a crise de notre représen-
serait donner le pouvoir aux sciences sabilité générale définie comme celle tation de la nature.
de la nature sur ces questions. Or, le dé- de l’Etat. Ce n’est que dans les années Autrement dit, la crise environnemen-
bat traitant de cet aspect a été de mettre quatre vingt que ce terme s’impose tale est une crise de paradigme, donc
en cause la domination naturaliste sur unanimement dans le domaine scien- une crise du sens. Une réorientation
les questions d’environnement et d’af- tifique. de nos valeurs est donc indispensable
firmer que l’environnement était une pour repenser la nature. Repenser la na-
question sociale. Bien sûr, cette analyse En substance, on peut affirmer que si ture ne veut pas pour autant signifier se
est rapide et donc schématique. la rationalité scientifique fait de l’envi- la réapproprier. Or, le réductionnisme
ronnement la conception hiérarchique cartésien, auquel notre système de pen-
Le terme le plus disputé est sans du monde, c’est le politique qui en fait sée est attaché, nous impose un dua-
conteste celui de nature. Effectivement, le référent incontournable. lisme environnemental du type « maître
il ne se réfère pas seulement à la des- En contre point au pouvoir politique, et possesseur » ou « maître et protec-
cription, mais reste chargé de valeur, les environnementalistes et les écolo- teur ». Il s’avère donc que cette stérile
de telle sorte que les scientifiques s’en gistes se sont structurés au devant de opposition ne débouche pas sur une
méfient en préférant évoquer le terme la scène sociale (greenpeace, wwf, …). troisième voie reflétant la complexité
d’environnement. Penser l’homme En effet, les environnementalistes ne de notre rapport au monde. C’est ainsi,
différent de la nature n’est pas pour discutent pas sur le fond de la moder- et en ce sens, qu’il y a crise.
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18. LES FONDAMENTAUX
LA DIMENSION ÉCONOMIQUE
Le mode de croissance qui a prévalu Dans une étude de la Banque mondiale
Le concept de «capabilité»
jusqu’alors, fondé sur le profit à court intitulée « La croissance est bonne pour
En fait, l’approche par les capabilités
terme au bénéfice d’une minorité nous les pauvres », l’accent est mis sur l’ac-
tire son origine de l’observation des
conduit vers une impasse. Pour répon- célération de la croissance en faisant
conséquences des famines surve-
dre à cet échec, le développement du- confiance aux processus de redistri-
nues en Inde, au Bengale, en 1943.
rable prône un développement capable bution par capillarité et en négligeant
La famine n’est due ni au manque
de répondre aux besoins de tous les toute mesure de redistribution.
de nourriture, ni à une quelconque
hommes, et de préserver les équilibres
catastrophe naturelle. Les greniers
écologiques, sociaux, économiques, y Bien sûr, de nombreux économistes ont
sont pleins alors que les gens meu-
compris dans le long terme. En bref, de contesté cette conception, se refusant
rent de faim. La famine est surtout
construire une communauté viable. à considérer que toute augmentation
la conséquence d’une déchirure du
du revenu accroît automatiquement
lien social et d’un manque d’accès
et de manière proportionnelle le bien-
à la nourriture disponible. C’est le
Approche économique être des populations. Ils ont proposé
défaut de « droits d’accès » (« en-
standard du développement d’autres visions du développement
titlements ») qui importe, plus que
comme le « développement basé sur la
la production, la disponibilité ou le
Pour les économistes libéraux, crois- satisfaction des besoins essentiels », le
prix des biens. Cette vision permet
sance économique et développement « développement endogène basé sur
de ne plus aborder le problème de
sont intimement liés. C’est la croissan- l’amélioration du capital humain », ou
la famine sous l’angle exclusif de
ce économique des pays du Nord qui a le « développement participatif ».
l’économique, mais de considérer
permis leur industrialisation, considérée
aussi les dimensions politiques et
comme la finalité du développement. Toutes ces approches visent à redon-
sociales qui jouent un rôle dans la
Le modèle de croissance repose essen- ner de l’importance aux dimensions
capacité à se procurer de la nourri-
tiellement sur l’accumulation du capital humaines et sociales du développe-
ture.
et la réalisation d’investissements pro- ment. Parmi celles-ci, Amartya Sen
Sur la base de cette expérience,
ductifs. Cette vision s’est traduite par propose un cadre d’analyse nouveau,
Amartya Sen élargit son raisonne-
la mise en œuvre de programmes de préconisant le renforcement des capa-
ment à l’ensemble des possibilités
planification du développement stan- bilités des personnes comme moyen et
d’utiliser des ressources que ren-
dardisés, souvent similaires de par leur finalité du développement. Cette vision
contre une personne pour mettre en
principe d’accumulation du capital et de a inspiré la mise en œuvre à partir de
valeur ses propres capacités et ainsi
représentation linéaire des étapes de la 1990, de politiques de « développe-
mener la vie qu’elle souhaite vivre.
croissance économique. ment humain » par le Programme des
L’ensemble de ces capacités définit
Selon une telle vision, toutes les socié- Nations Unies pour le Développement
le concept de capabilité, qui retrace
tés doivent passer par un processus de (PNUD).
ce qu’elle est ou serait capable de
développement en cinq étapes : l’éco-
faire, d’être et de devenir.
nomie traditionnelle, les conditions
préalables au démarrage, le décollage, Un nouveau regard :
la maturité et la consommation de Le dévéloppement humain tisfaction retirée de la consommation
masse. de ces biens. Il est mis sur la capabilité
Pour Amartya Sen, la finalité du déve- des personnes, c’est-à-dire sur la façon
ce cadre, la pauvreté est due à l’accès loppement ne se situe pas dans l’ac- dont elles fonctionnent pour améliorer
insuffisant aux biens de consomma- cumulation de biens, notamment de leur bien-être, et, plus généralement,
tion à cause d’un niveau de revenu capital. Il faut plutôt améliorer les ca- la qualité de leur vie. Il y a, de fait, une
faible. La croissance économique, en pabilités des personnes, ce qui a pour équation fondamentale, ou fonction de
augmentant le revenu par habitant, effet d’étendre leurs libertés réelles conversion, qui permet de convertir la
permet alors de réduire la pauvreté. d’agir et de devenir ce qu’elles souhai- dotation en ressources d’une personne
Les institutions financières internatio- tent être (« beings and doings »). On donnée, en un certain nombre de fonc-
nales, Fond monétaire international peut toutefois se demander comment tionnements qui retracent sa capabilité.
(FMI) et Banque mondiale, appuient une telle approche peut permettre de Les ressources disponibles sont des
leurs interventions sur cette vision du repenser le modèle économique du dé- biens de consommation, des biens du-
développement. Elles mettent l’accent veloppement. rables, des biens publics, des biens pre-
sur la croissance économique qui, en miers, mais aussi des droits politiques,
se propageant naturellement par ca- L’accent n’est plus uniquement mis sur économiques ou sociaux qui permettent
pillarité (« trickle down effect ») tou- la production de biens et sur les reve- l’accès à ces biens et font que, sur cette
che toutes les couches de la société. nus qui en découlent, ni sur la seule sa- base, les personnes peuvent accroître
NewDDeal 2012 16
19. LES FONDAMENTAUX
leurs potentialités (capital humain, capi- Cependant, cette approche présente Cependant l’approche par les capabili-
tal social, réseaux, …). Tout cela consti- aussi des limites. tés permet d’aborder le problème de la
tue la dotation des personnes. Tout d’abord, son opérationnalisation soutenabilité du développement sous
Ensuite, en fonction de ses caractéris- demeure difficile, car si les fonction- un jour nouveau, en considérant qu’un
tiques personnelles (le fait d’être un nements effectivement réalisés sont développement ne peut être durable
homme ou une femme, handicapé ou facilement observables et mesurables, que s’il promeut les capabilités de la
pas, d’un âge donné, etc.) et des op- l’observation de la capabilité poten- génération présente sans compromet-
portunités sociales, économiques ou tielle d’une personne est compliquée tre les capabilités des générations à
environnementales, chaque personne à imputer. Ensuite, l’accent mis sur les venir. Ceci pose la question de la distri-
peut convertir sa dotation en fonction- capabilités individuelles des agents ne bution équitable au sein d’une même
nements. rend pas bien compte des interactions génération et entre les générations et
Des fonctionnements qui sont effecti- et des relations sociales qui permettent ouvre la voie à la recherche des condi-
vement réalisés, ou potentiellement l’action collective. Une action collective tions qui font qu’un développement
réalisables et qui ont tous pour finalité qui engendre des capabilités collecti- soit socialement durable.
de réaliser ce qu’une personne aspire à ves dont on perçoit mal le lien avec les
être ou à faire. capabilités individuelles. On attend d’un tel développement qu’il
accroisse les potentialités et les capa-
A travers la combinaison de ses fonc- Enfin, si l’amélioration de la capabilité cités d’une génération donnée, tout
tionnements, l’individu devient capa- permet d’accroître la liberté des person- en facilitant leur transfert de manière
ble d’un certain nombre de choses. La nes, elle implique aussi un accroisse- équitable à la génération suivante.
capabilité d’une personne représente ment de la responsabilité personnelle Ceci afin de garantir à toutes les géné-
alors l’ensemble des fonctionnements pour respecter les obligations sociales rations, présentes comme futures, une
effectifs ou potentiels qu’elle est capa- auxquelles les personnes font réguliè- amélioration équitable de leurs capabi-
ble, ou serait capable, d’accomplir sur rement face … une dimension qui est lités de bien-être.
la base de ses caractéristiques propres peu prise en compte dans l’analyse.
et des opportunités ou contraintes éco-
nomiques, sociales et environnemen-
tales qu’elle rencontre. Cette capabilité
résulte de son aptitude à transformer Rapport Stiglitz : mesurer la croissance autrement
des ressources de toutes sortes en
fonctionnements. La Commission Stiglitz, du nom de son président Joseph Stiglitz, est née
d’une proposition de Nicolas Sarkozy le 8 janvier 2008. Elle est officiellement
Le fait, pour une personne, de devenir intitulée « Commission sur la mesure des performances économiques et du
plus « capable » la rend aussi plus li- progrès social ». Le but de cette commission est de développer une « réflexion
bre dans ses choix effectifs face aux sur les moyens d’échapper à une approche trop quantitative, trop comptable
contraintes de la vie ou de la société. de la mesure de nos performances collectives » et d’élaborer de nouveaux
La capabilité devient alors assimilable indicateurs de richesse renseignant sur le progrès social et le bien-être des
à la liberté d’agir et d’être, à une épo- individus.
que donnée, dans une société donnée.
Elle constitue ainsi autant un moyen Le rapport formule 12 recommandations. Trois principes sont retenus : la
qu’une fin du développement. Dans prise en compte des ménages dans l’analyse économique, la mesure de la
ce cadre, la croissance peut se faire qualité de vie et le développement durable.
plus par l’amélioration des fonction- Le PIB est la mesure de la production nationale, il donne une moyenne sur la
nements et, plus généralement, des situation française et masque ainsi les disparités individuelles. Le rapport pro-
capabilités ou libertés des personnes, pose d’analyser les revenus et la consommation en fonction des catégories
que par l’augmentation de la quantité d’individus et non plus d’une moyenne nationale.
de biens disponibles. Pour l’analyse de la situation des ménages, il préconise de prendre en compte
le patrimoine et les activités non marchandes, par exemple l’activité domes-
C’est en ce sens que l’approche de tique et les loisirs alors que le PIB mesure essentiellement la production mar-
Amartya Sen est fortement innovante : chande.
elle met l’accent sur les fonctionne- Le rapport établit également une distinction entre évaluation du bien-être pré-
ments, effectifs et potentiels, des per- sent et l’évaluation de la soutenabilité, c’est-à-dire de sa capacité à se main-
sonnes et sur leur capacité d’acteur. tenir dans le temps (capital naturel, physique, humain, social transmis aux
Elle considère plus les potentialités des générations à venir).
personnes que leur revenu ou richesse La commission estime qu’outre ces indicateurs objectifs, il conviendrait de
accumulée, ce qui apporte un nouveau procéder à des mesures subjectives de la qualité de vie (perception du bien-
regard au développement économique être, du bonheur, inquiétude…).
et rend le modèle de développement Enfin, le rapport prône la création d’indicateurs monétaires de développe-
orthodoxe inadapté aux contraintes du ment durable permettant de mesurer les ressources naturelles.
monde actuel.
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20. LES FONDAMENTAUX
L’ÉTHIQUE ET LA GOUVERNANCE
Le développement durable, la respon- sont dirigées et contrôlées » (rapport l’entreprise en termes non seulement
sabilité sociale de l’entreprise, ne peu- Cadbury, 1992). Dans l’optique du Dé- économiques, mais sociaux et affectifs
vent être atteints que s’ils s’appuient veloppement Durable ou de la RSE, (fidélité, loyauté, confiance). Il résulte
sur une bonne gouvernance, elle-mê- une bonne gouvernance résulte no- seulement de promesses perçues in-
me résultat d’une éthique de la res- tamment du respect des normes et de dividuellement comme telles par les
ponsabilité qui constitue la condition certains principes (principe de précau- deux parties.
nécessaire au bon fonctionnement de tion, de prévention, de concertation, de
ce cercle vertueux (Ethique-Gouver- transparence …), de l’engagement et
nance-Développement Durable). de l’exemplarité de ses dirigeants, de Morale, éthique et déontologie
l’élaboration de codes éthiques et de
Une bonne gouvernance ne peut se la garantie du dialogue avec les parties Faut-il parler de morale, d’éthique ou
concevoir que dans un système intégré prenantes … encore de déontologie ? Adossée sur
de management qui implique la conver- un code social qui s’impose à tous, la
gence de tous les systèmes. Ce mécanisme du cercle vertueux dans morale est impérative et absolue, elle
Les préoccupations en matière de gou- l’entreprise peut être compris de ma- nous dit ce qui doit être en distinguant
vernance d’entreprise ont véritablement nière plus ou moins large : réduit aux le bien et le mal en fonction de ce qui
émergé au cours des années 1990. relations entre l’entreprise et ses ac- est conforme. Elle répond à la ques-
tionnaires (shareholders) ou élargi aux tion « Que dois-je faire ? ». Fondée
Les raisons ne manquent pas pour ex- relations entre l’entreprise et ses par- sur la liberté de jugement et d’action,
pliquer le besoin croissant de prendre ties prenantes (stakeholders). résultat de l’expérience, l’éthique est
en compte la dimension éthique dans hypothétique et relative, elle nous dit
la gouvernance des grandes entrepri- Les définitions des parties prenantes ce qui est bon et mauvais en fonction
ses : (ou parties intéressées) de l’entreprise de notre jugement, elle répond à la
• l’accroissement (et surtout la média-
sont nombreuses, nous les définirons question : « Comment vivre ? ». Quant
tisation) de scandales impliquant les comme des individus ou des groupes à la déontologie, elle se définit comme
dirigeants ; d’individus qui peuvent affecter ou être « l’ensemble des règles et des devoirs
• l’accélération des fusions et restruc-
affectés par la gestion de l’entreprise qui régissent une profession ».
turations ; (salariés, actionnaires, fournisseurs,
• l’existence de rémunérations exces-
clients, État, groupes de pression …). Aujourd’hui, la morale s’efface devant
sives, en complète déconnexion avec La relation est bilatérale avec l’entre- l’éthique, non pour des raisons philo-
l’évolution financière des entrepri- prise, chacune des Parties Prenantes sophiques ou conceptuelles, mais pour
ses ; étant animée par son propre intérêt. des raisons médiatiques. La morale est
• le manque de transparence de l’infor-
Il faut cependant noter les limites de qualifiée de ringarde, de conformis-
mation délivrée aux actionnaires ; cette notion de Partie Prenante : diffi- te ; sa connotation dogmatique, reli-
• le manque de clarté dans le fonction-
culté d’identifier les Parties Prenantes, gieuse, impérative, en fait un terme au
nement des conseils d’administra- de déterminer leur légitimité et de hié- « cachet victorien, suranné et répres-
tion ; rarchiser leurs attentes. sif » (A. Minc).
• les soupçons portant sur l’intégrité
des audits comptables et financiers. Les relations entre les Parties Prenan- Existe-t-il une éthique universelle ?
tes et l’entreprise sont définies par des Existe-t-il plusieurs éthiques : une pour
« La justice commence par le refus contrats juridiques plus ou moins com- les affaires, une pour les salariés, une
de la démesure » disait le poète grec plets ou par des liens d’intérêt sans pour les média, une autre pour la mé-
Hésiode (milieu du VIII ème siècle av. contrat écrit. Elles doivent être basées decine … ?
JC). sur la confiance mutuelle, valeur-clé
L’élégance morale nécessite la justesse de l’éthique. Devant l’incomplétude L’ambiguïté se lève si l’on distingue
des proportions, l’éthique doit placer ou l’absence de contrat juridique, le l’éthique universelle de « l’éthique
l’Homme au centre de l’entreprise. contrat psychologique établit une autre appliquée » considérée comme s’ap-
Toute éthique doit être pensée avec forme de lien entre la firme et chaque puyant sur les principes de la première
sensibilité, sérénité sans “effet pathéti- partie prenante. Il peut ainsi être consi- tout en les faisant redescendre dans
que” ni indulgence. La notion de « mo- déré comme une amélioration quali- les différentes sphères (affaires, méde-
rale » n’a de sens que rattachée au bien tative du contrat juridique ou, en l’ab- cine, média …).
ou au mal. Aussi faut-il soutenir la vé- sence de celui-ci, comme un contrat Quant à l’éthique des affaires, elle ne
rité du bien ! virtuel, défini comme un contrat synal- peut exister que dans des institutions
La gouvernance se définit comme « le lagmatique qui détermine les attentes justes et être circonscrite par cinq
système par lequel les entreprises réciproques d’une Partie Prenante avec mots-clés, considérés comme repré-
NewDDeal 2012 18
21. LES FONDAMENTAUX
sentant les valeurs fondamentales qui Dans la pratique, elle se traduit notam-
pilotent le comportement éthique dans ment par la mise en place de codes Les principales raisons invoquées
l’entreprise : justice, responsabilité so- d’éthiques, de responsables d’éthi- par l’entreprise pour promouvoir
ciale, exemplarité, confiance mutuelle ques, de développement durable, de une fonction éthique sont les sui-
et respect des autres. différents comités : comité de rémuné- vantes :
ration, de nomination, des comptes de • n interne, affirmer l’identité de
e
À ce concept d’éthique des affaires, conformité (compliance) …, d’institu- l’entreprise et sa différence, recher-
s’ajoute celui de responsabilité sociale tions organisant les relations avec les cher une cohérence éthique autour
de l’entreprise (RSE). Être responsable, actionnaires, d’indicateurs, de normes, de principes communs, fédérer et
c’est répondre de ses actes, en accep- la mise en place d’administrateurs in- mobiliser le personnel, développer
ter les conséquences. dépendants, des contrôles externes la culture de responsabilité des ma-
tant sur le plan financier qu’extra-fi- nagers ;
nancier, du respect des conventions et • n externe, concrétiser la respon-
e
La gouvernance des normes internationales. sabilité sociale de l’entreprise et se
donner un avantage concurrentiel ;
Si la gouvernance d’entreprise est un Une bonne gouvernance d’entrepri- • n interne comme en externe, pro-
e
produit «made in USA», elle a rapide- se ne peut se concevoir que dans un téger l’entreprise contre les agis-
ment été adoptée par d’autres zones système intégré de management qui sements d’agents susceptibles de
géographiques, notamment l’Europe, implique la convergence de tous les nuire à ses intérêts.
mais avec des approches spécifiques à systèmes de la firme (ressources hu-
chaque culture. maines, finances, qualité, achat, santé,
hygiène …).
Les mécanismes de gouvernance ne se Les missions du déontologue varient,
manipulent pas de la même manière notamment avec le secteur d’activité et
selon les entreprises, leurs secteurs Le déontologue la taille de l’entreprise.
d’activité, leur implantation géogra- Celles qui sont le plus souvent repérées
phique, le contexte économique, so- L’émergence du développement dura- dans l’organisation sont les suivantes :
cial, politique … Cependant, quel que ble, de la RSE et de l’éthique crée un aider l’entreprise à expliciter sa politi-
soit l’environnement, ils jouent un rôle nouveau métier dans les organisations que en matière d’éthique, mettre en
complémentaire et une firme n’est ja- aux dénominations variées : déontolo- œuvre la politique éthique, organiser et
mais soumise à un seul mécanisme. Ce gue, éthicien, compliance officer. déployer la fonction éthique, sensibili-
sont des mécanismes contingentiels et ser et former le personnel à l’éthique,
contextuels. A la croisée des fonctions dans l’or- mettre l’entreprise à l’abri de toute mal-
ganisation, le déontologue, pour sau- versation et la protéger contre les ris-
Des lois récentes, Sarbanes-Oxley aux vegarder son indépendance, dépend ques éthiques, promouvoir la politique
USA ou les lois françaises sur les «Nou- généralement directement de la direc- éthique dans l’entreprise, assurer le re-
velles Régulations Économiques» et de tion, qu’il s’agisse d’un poste à temps porting global et mettre en évidence les
« Sécurité financière » sont contingen- plein ou bien faisant partie de la DRH, réalisations de l’entreprise en matière
tes, notamment à des évènements fi- de la direction juridique, voire du ser- de RSE.
nanciers récents et à des rapports en vice financier.
Europe (Viénot, Bouton en France, Ca- La fonction de déontologue dans l’en- Le principal défi est de créer une effi-
dbury en Angleterre). treprise remonte aux années 1970 aux cacité économique au service de l’Hu-
USA et elle connaît un essor remarqua- main et de sa planète. L’objectif est de
Une « bonne gouvernance » repose sur ble en France dans la décennie 1990. répondre aux besoins par une produc-
le respect d’un certain nombre de prin- À partir de 1997, une réglementation tion écologique et responsable.
cipes et de valeurs : principe de précau- a imposé aux entreprises du secteur
tion, souci de la prévention, recherche financier de mettre en place une fonc- Jean-Luc Laffargue,
d’une gestion sobre et économe, prin- tion déontologique. Directeur de Qualitique,
cipe de responsabilité, participation, Magazine de la culture managériale du
esprit de solidarité … XXIe siècle. Business Ethics.
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22. LES PREMIERS PAS
QUEL RÔLE POUR L’ENTREPRISE ?
Le Développement Durable concerne toutes les entreprises, privées
comme publiques, quelque soit leur secteur d’activité, de l’industrie
aux services en passant par le commerce et l’artisanat.
Les préoccupations liées à la pollu- fit de la libéralisation des marchés et entreprises ont compris l’importance
tion, à la dégradation des ressources de l’intégration des échanges en s’ap- d’un dialogue avec toutes leurs «parties
énergétiques, à la réduction de la biodi- provisionnant auprès de filiales et de prenantes» – clientèle, fournisseurs, in-
versité et à la nécessité d’introduire une fournisseurs dans les pays en voie de vestisseurs, collectivités locales et ONG.
éthique dans l’économie conduisent à développement.
considérer désormais la performance
de l’entreprise non plus seulement sous Les entreprises sont au coeur du sys- Une vision intégrée
l’angle économique et financier, mais tème de production / consommation.
également en fonction du respect des Elles ont donc un rôle primordial à Pour une entreprise, le développement
intérêts de la communauté et de l’envi- jouer dans la mise en oeuvre du dé- durable repose sur une démarche ser-
ronnement dans lesquels elle opère. veloppement durable. vant à la fois le développement écono-
La communauté peut être conçue, dans mique, le développement social et la
le sens géographique du terme, comme préservation de l’environnement.
le voisinage immédiat, ou dans un sens Développement durable Une entreprise soucieuse d’appliquer les
plus large, comme une entité incluant et secteur privé principes du développement durable et
toutes les «parties prenantes» (stakehol- de jouer un rôle constructif dans la so-
ders) – personnel, actionnaires, clientèle, Par les biens et services qu’il produit, par ciété investira dans des techniques «éco-
fournisseurs et autres groupes concer- ses modes de production, par sa politi- efficaces» respectant les ressources na-
nés par les activités de l’entreprise. que sociale, etc., le secteur privé est en turelles et l’environnement, et dans le
mesure de contribuer à l’amélioration capital humain afin de créer des produits
de la qualité de vie et à la préservation et des services nouveaux.
Un mouvement de fond de l’environnement pour les générations De même, l’intégration de la dimension
futures. Jusqu’ici toutefois, certains obs- sociale fera de votre entreprise une entre-
Sous la pression conjuguée des investis- tacles ont freiné l’adoption de pratiques prise citoyenne qui se préoccupe de la ma-
seurs, des consommateurs, des groupes «durables» par ce secteur. Au cours nière dont ses activités affectent son capi-
d’opinion et parfois des gouvernements, des années qui ont suivi la Conférence tal humain, les consommateurs ainsi que
les entreprises doivent faire face à des de Rio, les gouvernements ont tardé à les communautés locales, régionales ou
exigences accrues en matière de respon- émettre des signaux clairs vers le sec- internationales dans lesquelles elle opère.
sabilité et de durabilité. Ces impératifs se teur privé ; les investissements consentis
fondent encore à l’heure actuelle sur des ont été insuffisants, les consommateurs
critères non standardisés, et ils concernent et les actionnaires – que ce soit par man- Spécificité des PME
surtout les multinationales et les grandes que d’intérêt ou d’information – n’ont pas
entreprises. Il n’en demeure pas moins exercé une pression suffisante ; à l’échel- Une enquête réalisée en 2001 par le
que cette tendance commence à influen- le internationale, les marchés instables Réseau européen de recherche sur les
cer le marché de manière globale. Les et imprévisibles ont souvent empêché PME (ENSR) révèle que de nombreu-
PME (souvent fournisseuses de produits et un développement industriel durable ses PME ont déjà adopté des pratiques
de services pour les grandes entreprises) dans des secteurs prioritaires. sociales et environnementales dura-
sont confrontées de manière croissante à Mais depuis quelques années, un chan- bles, souvent définies et comprises par
la nécessité de répondre à certaines ques- gement se fait sentir. Le public est tou- les PME comme des pratiques respon-
tions, sinon à prouver qu’elles opèrent se- jours plus sensible aux questions de sables de gestion d’entreprise. Leur
lon certains critères de responsabilité. «durabilité». Le milieu financier – notam- engagement dans le domaine social
L’économie évoluant vers une écono- ment les fonds de pension – exerce une ou au sein de leur communauté est gé-
mie de services, on s’attend à ce que pression croissante en faveur des inves- néralement de portée locale, de nature
les PME et surtout les TPE – très petites tissements socialement responsables. occasionnelle et détaché de la stratégie
entreprises - gagnent encore en impor- Face à ces mouvements d’opinion, les commerciale. Il semble que la principale
tance. La tendance croissante à la créa- entreprises européennes, puis américai- motivation soit la conception éthique du
tion de nouvelles entreprises participe nes ont pris conscience de la nécessité responsable d’entreprise. L’obstacle ma-
à cette évolution. d’adopter un comportement éthique- jeur à un engagement social, surtout chez
Par ailleurs, un nombre croissant de ment, écologiquement et socialement les plus petites PME, paraît être le manque
PME développent leurs activités au responsable dans la conduite de leurs de sensibilisation, suivi par la limitation
niveau international ; elles tirent pro- affaires. Parallèlement, de nombreuses des ressources.
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