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LA DEPENDANCE – DEBAT NATIONAL : POSER LES ENJEUX

        LE 8 FEVRIER 2011 AU CONSEIL ECONOMIQUE, SOCIAL ET
                         ENVIRONNEMENTAL

                                 PALAIS D'IENA A PARIS




Ouverture par M. Jean-Paul DELEVOYE, Président du C.E.S.E :

M. Jean-Paul DELEVOYE explique que dès sa nomination à la tête du C.E.S.E, il a mis en
place une commission dont les objectifs sont de réfléchir sur les modifications des équilibres au
premier rang desquels la démographie (la France n’est pas la plus mal placée ; en 2050,
l’Allemagne comptera plus de 40% de personnes de plus de 60 ans, le Japon plus de 25%...).

Il évoque ensuite :
     - La possible mise à mal du pacte de solidarité : Jusqu’où ira la solidarité publique ?
     - La modification de la donne hospitalière du fait du vieillissement de la population,
     - La nécessaire adaptation des logements, sujet sur lequel la France accuse un retard,
     - Le manque de personnels aidants,
     - la capacité à gérer la maltraitance,
     - le développement de l’économie de la santé
     - la dépendance n’est pas un enjeu politique, c’est un enjeu de société


Intervention de Mme Roselyne BACHELOT-NARQUIN, Ministre des solidarités et de la
cohésion sociale :

Je commence par cette interrogation : allons-nous rejeter notre père ou notre mère parvenu au
seuil de sa vie ?
Il dépend de nous de poser une image positive du vieillissement. Nous voulons promouvoir une
société humaniste.
Parler de la dépendance, c’est bien entendu évoquer des situations difficiles, mais c’est aussi
envisager de façon positive la place des personnes âgées dans notre société.
Il faut tenir compte de l’allongement de l’espérance de vie (+ 1 trimestre chaque année et même
+ 4 mois en 2010).
La priorité est aujourd’hui de traiter la dépendance des personnes âgées, mais les personnes
en situation de handicap bénéficieront également de la réforme.
Notre société se doit d’être accueillante et solidaire : lien entre les générations, maintien du lien,
intégrer et non pas exclure.
La dépendance est un défi pour demain. Nous avons un devoir d’anticipation ; mais il existe
déjà des situations difficiles. Les difficultés sont d’ordre matériel, financier (reste à charge),
psychologiques (modification des rôles). Il faut considérer les charges financières que doivent
supporter les départements (inégalités entre eux).
Un questionnement doit avoir lieu sur nos valeurs, un débat est engagé ainsi qu’une large
concertation. La diversité autour des tables rondes témoigne de la diversité du débat.
4 groupes de travail viennent d’être mis en place :

    « société et vieillissement » animé par Annick MOREL (IGAS); son but : apprécier l’état
     de l’opinion sur la dépendance.
     Au-delà de ses aspects financiers, la question de la perte d’autonomie soulève les
     questions de la place des personnes âgées dans notre société et des défis multiples liés
     au vieillissement.
     Le groupe de travail s’interrogera ainsi sur les adaptations de notre monde aux réalités
     de la population de demain, que ce soit en termes d’aménagement du territoire ou
     d’adaptation de nos modèles sociaux.
     L’évolution des modèles familiaux aura également un impact majeur sur les modes de
     prise en charge des personnes âgées dépendantes. Les débats au sein de ce groupe de
     travail aborderont, par exemple, la place de la solidarité familiale, les liens inter-
     générationnels, ou l’aide aux aidants.

    « enjeux démographiques et financiers de la dépendance » présidé par Jean-Michel
     CHARPIN (ancien commissaire au plan et ancien directeur général de l’INSEE); but :
     réfléchir sur les enjeux démographiques et financiers, établir des projections robustes et
     actualisées concernant la dépendance.
     Les travaux du groupe de travail permettront d’établir une maquette financière qui
     servira de base à l’ensemble des réflexions et des débats concernant la dépendance.
     Pour cela, les membres du groupe devront établir des prévisions sur le nombre de
     personnes en situation de dépendance dans les prochaines années et de traduire ces
     évolutions en termes de dépenses publique et privée. Ce groupe devra tenir compte
     également de l’impact potentiel de nouveaux traitements médicaux sur les situations de
     dépendances et à leurs conséquences prévisibles sur les besoins de financement futurs.

    « accueil et accompagnement des personnes âgées » animé par Evelyne RATTE
     (conseillère maître à la cour des comptes),
     Les débats au sein de ce groupe de travail pourront aborder la question de la place des
     technologies de l’autonomie, l’évolution des métiers au service de nos aînés, l’évolution
     de l’habitat et de l’urbanisme, l’offre de services, aussi bien à domicile qu’en
     établissement.
     Les réflexions de ce groupe de travail aboutiront à définir les conditions permettant de
     garantir le libre choix des concitoyens entre l’hébergement en établissement spécialisé
     et le maintien à domicile.
     La question des aidants familiaux, dont le nombre est appelé à diminuer au cours des
     prochaines années, devra être abordée.

    « stratégie pour la couverture de la dépendance des personnes âgées » animé par
     Bertrand FRAGONARD (Pdt du Ht conseil de la famille).
     Le financement de la perte d’autonomie est partagé entre de nombreux acteurs :
     principalement l’Etat et la Sécurité Sociale, mais également les Conseils généraux, les
     assurances privées et les familles. En raison de la croissance programmée du nombre
     de personnes dépendantes, ces dépenses seront amenées à augmenter au cours des
     prochaines années.

      Ce groupe de travail analysera la question du coût de l’hébergement pour les familles en
      fonction de leurs revenus et celle, plus structurelle, des pistes envisageables pour le
      financement de la perte d’autonomie.
      Le groupe de travail abordera également le sujet de la gouvernance associée au
      financement de la dépendance ainsi que les évolutions qui pourraient être proposées.




                                                                                     2/16
4 colloques inter régionaux auront lieu. Un point d’étape sera régulièrement fait sur chaque
thématique.

Des débats interdépartementaux constitueront des moments d’écoute et d’échange.

3 principes irréfragables :
    liberté de choix entre domicile et établissement
    qualité des prises en charge
    responsabilité du financement : il n’est pas question de reporter la dette sur les
       générations à venir.




                             PREMIERE TABLE RONDE :
              ENJEUX DU VIEILLISSEMENT POUR LA SOCIETE FRANCAISE

Introduction par M. François EWALD, philosophe :

Nous célébrons le recul de l’espérance de vie, en France. En Russie et aux USA, au contraire,
l’espérance de vie diminue. Mais une réorganisation de la société est nécessaire. Nous voulons
passer de situations où nous trouvons des solutions au coup par coup à une anticipation
organisée.
Il ne s’agit pas de mesurer uniquement des quantités mais également du bien-être.
La question des valeurs fait référence à l’éthique individuelle. Elle était déjà évoquée par
Cicéron : « Il faut savoir adapter ses forces à son environnement » qui est une question relative
à « pour bien vieillir, il faut d’abord bien vivre ».
Mais si nous nous disons qu’il faut adapter la société aux personnes âgées pour bien les traiter,
intervient le problème des équilibres sociaux (incidences sur les plus jeunes).
La logique de l’Etat providence est une logique de libération des besoins. En matière de
vieillissement, l’idéal serait de revendiquer les moyens de maintenir l’autonomie. Il faut repenser
la solidarité.


Intervention de M. Alain VASSELLE, sénateur de l’Oise :

L’évolution de la situation des personnes âgées est complexe. Les enjeux sont économiques,
sociaux et politiques (cf le Rapport du Haut Conseil pour l’Avenir de l’Assurance maladie
Nous avons à nous intéresser à deux aspects :
     repenser les solidarités
     s’investir dans le domaine de la prévention pour retarder la dépendance


Mme Annick MOREL (IGAS)

On parle de l’aspect démographique du vieillissement depuis plusieurs décennies, mais on est
à présent au pied du mur.
Concernant les valeurs éthiques sur l’accompagnement de la fin de vie, l’effet canicule avait
suscité un sursaut dans les familles qui se déclaraient disposées à prendre en charge un parent
chez eux ; mais la concrétisation de cette proposition volontaire diminue d’année en année.




                                                                                         3/16
Intervention de M. Jean-Michel CHARPIN :

En France, l’espérance de vie continue de progresser. L’augmentation de la problématique
dépendance sera particulièrement forte entre 2005 et 2035. La proportion des + de 65 ans va
doubler d’ici 2050. Des transferts intergénérationnels importants sont prévisibles. Il faut les
mesurer par rapport à l’ampleur de la charge.
Problématique comportant des différences importantes par rapport à la retraite. En 1990, un
lancement de réformes a été nécessaire parce que la situation allait devenir intenable.


M. François EWALD précise la différence entre les seniors et les « vieux ».
Le mot « Vieux » va avec vétusté (vision de destruction) ;
Le mot « Senior » fait référence à une situation relative par rapport aux jeunes.


Intervention du Professeur Gilles BERRUT, gériatre au CHU de Nantes :

On a une première période de 20 à 25 ans après la fin de la période de travail, puis une
« période de longévité ». C’est une chance pour soi mais également pour les autres, puisque
ces personnes transmettent à leurs petits enfants des savoirs, de l’expérience, et se consacrent
à des activités sociales, notamment au sein d’associations. C’est aussi un bassin d’emplois. La
longévité est donc une chance pour tous.

Deux points :
    La prévention : dépistage des personnes fragiles
    Mettre dans le débat les organisations du niveau régional (cf. le gérontopôle à
      Toulouse) ; c’est par une action multi-domaines que l’on pourra aborder la question.


Question de la journaliste animatrice : à quel moment se pose la question de l’autonomie des
personnes âgées ?

Mme WEBER (C.E.S.E) répond que la priorité pour les 3,5 millions d’aidants est d’apporter une
solution pour les personnes en besoin d’aide.
Il faut investiguer le projet de vie, voire le projet de fin de vie. Les aidants voudraient pouvoir
avoir une vie normale et pouvoir conserver leur lien à l’autre (rester la fille de la vieille dame et
que celle-ci ne la confonde pas avec une soignante). Il faut pouvoir partager les charges
quotidiennes avec des professionnels.

Mme Annick MOREL : « vieux çà gêne, moi non »
Le mot « dépendance » est devenu péjoratif. La dépendance est différente de la perte
d’autonomie. L’autonomie c’est la capacité à se gérer soi-même. L’aide collective potentialise
l’aide familiale. Il faut une solidarité collective pour garantir l’aide de la famille.

Mme WEBER : il faudrait que les familles puissent disposer de plus d’informations sur les
établissements, les prestations offertes, leurs coûts.

Le Pr Gilles BERRUT indique que l’entrée en établissement recule (83 ans) bien que la maladie
d’Alzheimer et les troubles de la circulation font baisser cet âge moyen.
L’entrée en établissement de personnes âgées qui ne s’y sont pas préparé se traduit par des
incidences sur leur état de santé.

M. Alain VASSELLE précise qu’en revanche la situation des personnes très âgées qui entrent
en établissement s’améliore.



                                                                                           4/16
Le succès du maintien à domicile implique que les établissements d’accueil intermédiaire se
vident.
Il ne faut pas opposer domicile et établissement mais organiser une trajectoire.

Mme Florence LEDUC, présidente de l’association française des aidants : Il faut pouvoir
disposer sur un territoire donné de l’ensemble des réponses. Ce qui est important, c’est la
panoplie des réponses et l’adéquation de la réponse.

Question de la journaliste animatrice : les questions éthiques telles que la maltraitance relèvent-
elles de la morale politique ?

Le Pr Gilles BERRUT répond que c’est surtout une question de formation.

Mme Florence LEDUC ajoute que la dignité est intrinsèque à l’homme mais que c’est à la
collectivité de cultiver cette question.

M. Alain VASSELLE précise qu’il faut veiller à la maltraitance passive.

M. François EWALD conclut que l’idéal de l’homme contemporain est l’homme autonome ; or, la
dépendance est un échec.


Synthèse de la 1ère table ronde par Mme Marie-Anne MONTCHAMP, Secrétaire d’Etat auprès
de la Ministre des solidarités et de la cohésion sociale :

Le scénario du vieillissement n’est pas écrit.
Nous n’avons pas réellement pris en compte la dimension économique.
Il faut s’interroger sur la nature de l’offre (souvent des aidantes) pour respecter les équilibres.
La morale politique doit être au cœur des processus.
L’offre ne doit pas définir le besoin.
Le choix des aînés doit être placé au cœur de la réflexion.
Il faut définir des scénarios complémentaires.



                               DEUXIEME TABLE RONDE :
                       ASSURER UNE PRISE EN CHARGE DE QUALITE
                         DES PERSONNES AGEES DEPENDANTES


Introduction par M. Bertrand FRAGONARD : 2 impératifs en ce qui concerne la qualité d’offre
de service :
    1. assurer un socle de prestations de qualité
      Il faut rejeter tout système dual.
      Le système de prise en charge doit favoriser le maintien à domicile.
      La variabilité des besoins est importante. Si on veut retenir le principe de prestations
      personnalisées, cela implique l’exclusion des prestations forfaitaires.

   2. L’offre de service est-elle suffisante ?
      Il faut assumer et pouvoir payer la prestation de qualité voulue.
      Il faut donner la priorité au soulagement de ceux qui assurent la plus large charge et donc
      développer des services pour les aidants.

Les problèmes de financement vont augmenter. L’aide publique tient compte des revenus des
familles. Si ce critère est maintenu, il faudra redéfinir la frontière.

                                                                                            5/16
Une fois calée socle public / socle familial, il y a deux options :
     Assurance, épargne, gestion de patrimoine
     Incitation publique : assurance obligatoire
Enfin, si l’aide publique est appelée à s’accroître, quelles sources nouvelles de financement ?

Question de la journaliste animatrice : quels sont les modèles étrangers ?

Réponse de M. Jean-Marie ROLLAND, président du conseil général de l’Yonne, membre du
conseil de la CNSA :

Aux Etats-Unis, l’usage est de permettre à chacun de participer à la vie en société, d’accroître
l’indépendance, d’alléger le travail des aidants.
En France, depuis 2002, avec l’APA, on a démontré notre capacité à assurer un service de
proximité et de qualité, mais quid de la pérennité du système ?
La crise récente, notamment concernant l’immobilier, a montré que nous étions au bout du
système.

Mme Valérie ROSSO-DEBORD précise que la Suède offre un système, sans libre choix. La
France, à l’inverse, offre un choix et il faut maintenir ce particularisme.

M. Yves VEROLLET, rapporteur de la Commission du C.E.S.E sur la dépendance, souligne un
aspect sous estimé : les générations actuelles ont connu un bon niveau de protection sociale.
Lorsqu’elles vont être confrontées à la problématique de la dépendance, elles n’admettront pas
de ne pas trouver une réponse. Deux questions importantes : comment financer les services et
comment rendre attractives les professions ?

Mme Marie-Sophie DESAULLE, directrice générale de l’ARS des Pays-de-Loire, souligne les
différences de situations territoriales, particulièrement entre les départements. Les taux
d’équipements permettent un accès variable à l’offre.
En fonction des politiques menées, il y a un déséquilibre, parfois au détriment des
établissements, d’autres fois au détriment des services.
En fonction des projets, de la capacité à les porter, on a une offre plus ou moins satisfaisante
(problème de formation).
Adapter l’offre existante est le rôle de l’ARS.

Mme Evelyne RATTE remarque que l’offre n’est pas toujours là où est la demande : problème
de gouvernance.
La qualité représente un coût, mais son amélioration peut également être une économie :
meilleure coordination, formation, partenariats entre structures, mise en commun des fonctions
support.

Mme Marie-Sophie DESAULLE observe que tout le monde évalue les besoins des personnes
parce que l’on a des organisations cloisonnées. La première personne qui peut coordonner est
le médecin traitant. Il faut repenser les organisations.

Mme Marie-Odile DESANA, présidente de France-Alzheimer, souligne le coût de la prise en
charge d’une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer :
Un aidant à domicile pour 6 heures par jour représente un coût de 3000 € par mois.
Reste à charge de la famille : 1000 € par mois.
Il faut porter un regard sur les capacités maintenues des malades et non sur leurs déficits.
Mise en place nécessaire d’une offre de soins diversifiée.
Il faut pouvoir avoir le choix de rester à domicile ou d’accéder à un établissement. 70% des
malades vivent à domicile, + de 50% dans une grande dépendance.




                                                                                        6/16
M. Jean-Marie ROLLAND souligne que pour le même type de dépendance, on n’apporte pas la
même réponse.

M. Yves VEROLLET précise que les départements ont réalisé un travail formidable depuis la
mise en place de l’APA, mais ils en financent les 2/3.
Une réalité : les disponibilités financières influent sur le girage.

Mme Valérie ROSSO-DEBORD souligne que sur 1.400.000 bénéficiaires de l’APA, 600.000
sont en GIR 4. Les programmes de prévention doivent être au cœur de nos préoccupations.
Nous avons du temps, le pic étant en 2030 / 2035.

Mme Marie-Odile DESANA ajoute qu’il faut un financement pérenne basé sur la solidarité
nationale pour qu’il y ait une prise en charge équitable sur le territoire.

M. Bertrand FRAGONARD précise que pour le financement, il y a deux objectifs antinomiques :
    Si le besoin est très lourd, le financement doit être élevé
    La part des ménages (reste à charge) est souhaitée la plus faible possible.
B. FRAGONARD est favorable à l’amélioration de l’offre et l’augmentation de la part des
ménages.

Mme Marie-Sophie DESAULLE souligne que des personnes âgées sont prises en charge de
façon inadéquate (service de médecine au lieu d’EHPAD). Des répartitions d’enveloppes
peuvent améliorer la prise en charge.

Mme Valérie ROSSO-DEBORD répond que la loi HPST a créé les ARS, ce qui va contribuer à
prendre en charge les personnes sans les « saucissonner ». 5 millions de Français bénéficient
déjà d’une assurance, mais la majeure partie d’entre eux est insatisfaite de la rente servie.

Mme Marie-Odile DESANA conclut en disant que la prise en charge globale aidant / aidé est
indispensable. Les assurances privées ont fait la preuve de leur inefficacité.




Synthèse de la 2ème table ronde par Mme Roselyne BACHELOT-NARQUIN, Ministre des
solidarités et de la cohésion sociale :

Les débats révèlent que le sujet est complexe. Une seule certitude : il faut penser la
dépendance de façon globale.

L’entrée dans la dépendance peut être retardée : c’est le rôle de la prévention.
L’activité sociale, l’engagement associatif… contribuent à retarder l’entrée en dépendance.
Prévenir, c’est d’abord dépister, c’est aussi améliorer la coordination autour de la personne
âgée.
M. François EWALD a rappelé qu’il fallait revisiter l’ensemble de nos politiques. Vivre à domicile
doit être un choix libre et non un confinement.
Il faut accompagner les proches et les aidants. Les personnes aidées sont d’abord des femmes
de même que les aidantes.
Dans les interventions, il a été souligné que les femmes, après avoir mis entre parenthèses
parfois leurs carrières, deviennent aidantes. Il faut donc leur permettre de concilier leur vie
personnelle avec leurs charges.
Contrairement aux idées reçues, le recours aux aidants professionnels est un moyen de
réintroduire de l’humanité.
Il faudra garantir une égalité de traitement sur le territoire. Il faut concilier proximité et équité.



                                                                                           7/16
A qui confier la gouvernance pour qu’elle soit d’une qualité optimale ?
Imaginons qu’un traitement efficace de la maladie d’Alzheimer soit élaboré. Les structures
actuelles pourraient être en surnombre.
Déjà 22 Md € sont mobilisés pour la dépendance.

Mme Bachelot venant d’être informée de l’arrivée du Pdt de la République, interrompt sa
synthèse en indiquant que le gouvernement était totalement mobilisé sur la question de la
dépendance.




               Clôture par M. Nicolas SARKOZY, Président de la République


Monsieur le Président du Conseil économique et social environnemental, Cher Jean-Paul
Delevoye,

Mesdames et messieurs les Ministres, Mesdames et Messieurs,


Nous voici réunis aujourd'hui, dans ce lieu entièrement voué au dialogue social, pour lancer le
grand débat national sur la dépendance.

Ce débat je l'ai souhaité, je l'ai voulu malgré les appels à la prudence, les mises en garde de
ceux, si nombreux, qui le trouvaient trop risqué au regard des enjeux et des échéances
électorales.

Une fois de plus il aurait donc fallu attendre... Mais attendre quoi ? Attendre de mieux connaître
les données du problème ? Mais les données du problème nous les connaissons toutes !
Attendre de mieux prendre la mesure du défi que notre pays va avoir à relever dans les années,
les décennies qui viennent ? Mais l'ampleur de ce défi nous la mesurons tous, nous savons
tous quelle est sa gravité, l'urgence qu'il y a à nous donner les moyens d'y répondre compte
tenu du temps qu'il faut pour que les mécanismes de prise en charge puissent produire leurs
pleins effets.

Nous pouvons toujours attendre mais la démographie, elle, n'attendra pas.

La vie s'allonge et la France vieillit. Ce vieillissement, qui est un progrès parce que lorsque l'on
vit plus longtemps et en meilleure santé, va continuer de bouleverser nos équilibres
économiques et sociaux.

Nous pouvons toujours refuser de regarder cet avenir en face mais cet avenir va finir par
devenir notre présent. S'agissant de l'allongement de durée de vie et du vieillissement, il est
écrit d'avance et ses conséquences aussi.

En vérité, nous n'avons pas le choix, nous devons choisir maintenant quelle place nous allons
faire dans notre société à l'âge et au grand âge. Ce problème est devant nous, non pas loin
mais tout près.

Nous ne pouvons plus attendre. Plus nous attendrons, plus ce sera difficile, car l'on ne fait pas
une telle révolution ni en quelques jours, ni en quelques mois, ni même en quelques années. Il
faut que les mentalités, les comportements, les institutions s'adaptent à la réalité sociale et
démographique qui jour après jour s'impose à nous, inexorablement. Il faut que les systèmes de
financement montent en charge.

                                                                                          8/16
Nous ne pouvons plus attendre, peut-être même avons-nous collectivement déjà trop attendu.

Nous avons progressivement réformé nos systèmes de retraites. Nous les avons sauvés de la
faillite à laquelle le choc démographique les condamnait à plus ou moins brève échéance.

Nous avons sauvé la répartition et le principe de la solidarité entre les générations qui est au
cœur de notre pacte social.

Nous l'avons fait en choisissant de travailler davantage plutôt qu'en augmentant des impôts et
des charges qui auraient principalement pesé sur le travail, encouragé les délocalisations,
détruit des emplois et réduit le pouvoir d'achat.

Faire converger les régimes spéciaux, allonger la durée de cotisation, relever l'âge de la retraite
à taux plein, ce fut je le sais, demander à ceux qui travaillent des efforts supplémentaires. Mais
nous n'avions pas le choix. Fallait-il attendre de se trouver dans la situation où nous n'aurions
plus eu à choisir qu'entre la fin de la répartition et la réduction des pensions de retraites ?

Je m'y suis refusé. C'était difficile. Mais alors que la crise creusait dramatiquement nos déficits,
c'était mon devoir de prendre des décisions qui auraient été encore plus difficiles et auraient
demandé encore plus de sacrifices si elles avaient été différées.

A l'horizon 2020, l'équilibre financier de nos retraites est assuré.

Mais sur la dépendance qui est une autre conséquence de l'allongement de la durée de la vie et
du vieillissement, notre société -je dis notre société parce que cela nous concerne tous- a pris
du retard.

Ceux qui me conseillent d'attendre, ceux qui me disent que ce n'est pas le moment d'ouvrir un
tel chantier de réforme, devraient se pencher sur les difficultés inextricables et si douloureuses
dans lesquelles sont plongées tant de familles qui se trouvent confrontées à la perte
d'autonomie de leurs proches affaiblis par l'âge et ne pouvant plus affronter seuls la vie
quotidienne. Et que dire de ceux qui n'ont pas de famille, que personne ne soutient et
n'accompagne et qu'on oublie dans leur terrible solitude ? Que dire de la souffrance de celui
que l'on arrache de sa maison où il n'aspire qu'à finir ses jours parce que personne ne veut au
fond se compliquer la vie pour l'aider à s'y maintenir ?

Nous connaissons tous ces difficultés, ces souffrances, ce désarroi et nous savons tous que la
montée de la dépendance n'en est qu'à ses débuts, que le problème ne va cesser de grandir, et
que si nous ne nous mettons pas maintenant les moyens d'y répondre, alors il y aura davantage
de peines, de souffrances et de désarroi.

Ce qui est en jeu n'est pas seulement d'ordre matériel, d'ordre financier.
Ce qui est en jeu c'est l'idée que nous nous faisons de notre société, devrais-je même dire de
notre civilisation ?
Ce qui est en jeu est humain, et affectif, et moral.

C'est dans le sort qu'elle réserve, dans la place qu'elle donne, dans la considération qu'elle
porte aux plus humbles, aux plus vulnérables, aux plus fragiles, aux plus innocents des siens
que se mesure la valeur morale et humaine d'une société. C'est sans doute dans les regards du
handicapé et du malade, dans le regard du vieillard, ou de l'enfant que se lit le bonheur de vivre
dans une société.

Cette étincelle est celle de la vie, de l'importance et du respect qu'on lui accorde. Et c'est de
nous-mêmes, de notre propre histoire, de notre propre avenir au fond de notre propre dignité

                                                                                          9/16
dont il s'agit, parce que ces malades, ces handicapés, ces enfants, ces vieillards sont nos
parents, ces vieillards - si tout se passe bien ! -- ce sera nous. Je n'ai pas le sentiment de parler
des autres en parlant d'eux. C'est de nous dont il s'agit.

Quelle estime pourrions-nous avoir de nous-mêmes si nous étions incapables de traiter
dignement nos parents, incapables de les aider à vivre pleinement jusqu'à la fin de leurs jours,
à vivre, pas seulement à survivre ? Comment pourrions-nous alors, quand, à notre tour, nous
serons devenus fragiles et vulnérables, comment à ce moment là après avoir oublié nos
parents, nous pourrions demander l'aide et l'attention de nos enfants ? C'est cela qui est en
cause. Ceux qui auraient abandonné leurs parents ne seraient pas les mieux placés pour
demander à leur tour à leurs enfants de ne pas leur faire à eux, ce qu'ils n'ont pas hésité à faire
à leurs parents. Nous ne pouvons pas laisser les choses en l'état et nous ne les laisserons pas
en l'état.

Donc je n'attendrai pas. Attendre encore serait une faute morale impardonnable, ce serait
refuser de regarder la réalité en face, ce serait refuser d'assumer mes responsabilités. Pourquoi
refuser d'assumer ses responsabilités ? Parce que c'est difficile ? Parce que l'année prochaine
il y aura des élections présidentielles ? Mais qui pourrait comprendre que l'on ne s'attaque pas
à un problème grave parce qu'il est difficile ? Qui pourrait accepter que l'on s'arrête d'agir, de
réformer un an et demi avant la fin d'un quinquennat ?

Qui peut croire que j'ai été élu pour cela ?
Qui peut penser que c'est ce que les Français attendent ?
Qui peut penser que les Français préfèrent l'immobilisme au risque d'une réforme dont ils sont
au fond d'eux-mêmes absolument convaincus qu'elle est nécessaire ?

Mais naturellement une réforme de cette ampleur qui concerne des sujets qui touchent chacun
si profondément, ne peut pas être une réforme venue d'en haut.

La manière dont nous abordons le problème de la dépendance dans notre société n'est pas
l'affaire d'une catégorie sociale ou d'une génération. C'est une question qui nous est posée à
tous. La réflexion doit être collective et la réponse aussi.

Si la Sécurité Sociale a pu exister, c'est parce que les Français se la sont appropriée. C'est
parce que pour chaque Français, elle est la propriété de tous.

Eh bien, je voudrais que la dépendance fasse l'objet de la même appropriation par les Français,
qu'elle soit l'expression de la même solidarité que les retraites, la maladie, la famille, le
chômage.

C'est assez dire qu'il ne s'agit pas à mes yeux d'une réforme comme une autre, mais qu'il s'agit
d'ajouter une nouvelle dimension à notre pacte social. Un tel projet ne peut pas s'inscrire dans
le débat politique ordinaire. Il exige de la part de chacun un effort sur lui-même pour s'élever au-
dessus des clivages partisans et idéologiques et laisser sa conscience, son cœur, sa raison
indiquer la voie de l'intérêt général comme le firent jadis les auteurs du programme du Conseil
National de la Résistance et les bâtisseurs de la Sécurité Sociale. C'est à cette exigence
intellectuelle et morale que nous appelle le souvenir de ce qu'ils ont accompli et l'ampleur de la
tâche à laquelle nous nous attelons aujourd'hui.

Cette tâche appelle des échanges, des discussions, des débats parce qu'il s'agit d'aborder l'un
des problèmes les plus sensibles qui se posent à notre société, c'est le respect que nous
devons à ceux que la vie éprouve, à ceux que laisserait dans la difficulté et dans la peine notre
imprévoyance collective si nous n'arrivions pas à dégager un consensus suffisant.




                                                                                         10/16
Gardons donc ce sujet à l'abri des polémiques. C'est notre devoir à tous. Nous ne travaillons
pas pour les 15 mois qui viennent. Nous travaillons pour le demi-siècle à venir.

Dire que le débat qui s'ouvre aujourd'hui n'est pas politique ne serait pas exact. Car ce n'est pas
un débat technique, un débat d'experts, c'est un débat de société et quoi de plus politique qu'un
débat de société. Mais c'est un débat autour de ce qui nous rassemble, de ce qui fonde notre
rapport à l'autre et non de ce qui nous oppose et de ce qui nous divise. Nous parlons de ce au
nom de quoi nous vivons ensemble et qui fait que nous nous reconnaissons tous dans l'idée du
bien commun.

Encore faut-il élever suffisamment le débat. Non pour ne brasser que des idées générales loin
des réalités humaines et sociales, mais pour embrasser ce problème dans toutes ses
dimensions.
Je veux dire par là qu'en prenant la question de la dépendance par le seul biais de sa prise en
charge et de son financement, on la dénaturerait. Ce serait refaire l'erreur qui fut longtemps
faite de ne voir le problème de la vieillesse qu'à travers celui de la retraite sans s'occuper de la
participation des retraités à la vie sociale, le problème de la maladie qu'à travers celui de
l'assurance maladie sans se préoccuper ni de la santé publique ni de la place du malade dans
la société, ou encore celui du handicap sous le seul angle de la compensation financière sans
se soucier de l'insertion sociale du handicapé.

Ce n'est que vers les années 80 que les choses ont commencé à changer. Lentement. Trop
lentement.
Songez qu'il a fallu attendre 2005 pour que la loi impose que les établissements recevant du
public soient accessibles à tous. Songez qu'il a fallu attendre 2009 pour qu'un retraité qui
bénéficie d'une retraite à taux plein puisse cumuler sans restriction sa pension de retraite avec
un revenu d'activité. Songez qu'il a fallu attendre 2007 pour que commence à être amélioré
l'accès à l'emprunt pour des malades qui jusque-là s'en trouvaient exclus ou soumis à des
conditions exorbitantes : « Vous êtes malades, vous n'allez pas en plus demander à vous
loger ! Ce n'est pas raisonnable ! ».

La rapidité de l'évolution démographique nous oblige à ne pas perdre de temps et à traiter
d'emblée la question de la dépendance dans le cadre des politiques de santé publique, de
prévention et de recherche qui se verraient accorder enfin l'importance qu'elles méritent.

Je pense bien sûr aux recherches sur les maladies du grand âge, Alzheimer, qui ne se limite
pas à la recherche en laboratoire. La gérontologie qui devrait enfin conquérir ses lettres de
noblesse parce qu'elle a beaucoup à nous apprendre. La dépendance n'est pas une fatalité : je
veux dire, on peut la repousser. On peut éviter que la fragilité d'une personne âgée, dont
l'attention baisse ou qui se fatigue plus vite, ne la conduise inexorablement vers la dépendance.
En aménageant mieux les logements, en prévoyant un accès de proximité à un médecin, en
prenant certaines précautions, en apprenant certaines règles de comportement, nous savons
que nous pourrions prévenir l'apparition de beaucoup de situations de dépendance ou éviter
des entrées en établissement.

Les personnes âgées elles-mêmes jouent un rôle essentiel pour prévenir leur perte
d'autonomie, en entretenant leur mémoire, en étant actives, en participant à la vie de la cité.
Les proches, bien sûr, sont les premiers à les aider, à les maintenir dans une vie sociale active.
Mais la collectivité a son rôle à jouer. Des actions de prévention doivent être développées.
Il faut donc aborder le problème sous l'angle plus large de la place du grand âge dans notre
société. Je dis bien « dans » la société et non pas à l'écart de celle-ci. Après une trop longue
prise de conscience une grande mutation est en train de s'opérer quant à notre façon de traiter
la vieillesse.




                                                                                         11/16
Nous commençons à associer les personnes âgées à la vie sociale. Nous construisons des
maisons de retraite qui ne sont plus des lieux de relégation comme si le grand âge devait être
éloigné de la vue de ceux qui vivent une vie active. Ces lieux doivent être des lieux de vie. On
ne voit plus ces grands dortoirs de lits, alignés, sans aucune intimité, sans aucune vie sociale.
Aujourd'hui, les personnes âgées peuvent compter sur un personnel soignant mieux formé. La
prise en charge des résidents est en progrès. On ne se contente pas de les soigner, de les
héberger et de leur proposer des activités pour passer le temps. Beaucoup d'établissements
construisent de véritables projets de vie, auxquels les pensionnaires participent pleinement.
Avec un investissement exceptionnel des personnels, soignants et non soignants, des
directeurs d'établissements mais aussi des professionnels de santé libéraux.

Il nous faut inscrire le traitement de la dépendance dans ce grand mouvement de réinsertion de
la vieillesse dans la vie sociale.
Il ne s'agit pas que les plus âgés dont les facultés déclinent puissent seulement survivre tant
bien que mal surtout sans déranger personne. Il s'agit de tout faire pour que leur vie soit une
vraie vie le plus longtemps possible, pour que même affaiblis, diminués, privés de tout ou partie
de leur autonomie, ils puissent encore éprouver assez de joie de vivre pour que le bonheur
d'être là l'emporte sur la lassitude, le sentiment d'être de trop et même l'attente d'une mort
vécue comme une délivrance d'une existence qui n'a plus de sens. Une société qui traite
comme cela ses vieux est une société qui n'a aucune morale et qui ne respecte pas la dignité
humaine. On peut être dépendant, on peut avoir perdu son autonomie et vouloir qu'on respecte
sa dignité parce qu'on est jusqu'au bout une personne humaine.

Alors de quoi ont-ils d'abord besoin, même ceux qui ont tout oublié, même ceux qui sont
redevenus comme des enfants, même ceux qui sont déjà ailleurs ? Ils ont besoin d'amour. Ils
ont besoin qu'on les aime.

Alors, vous me direz, nous sommes bien loin de ce qu'une politique peut faire. L'amour ne se
décrète pas, le bonheur non plus. Mais rien n'empêche d'y penser lorsque l'on choisit une
politique. On ne fera pas la même politique si l'on considère la dépendance comme un
problème à résoudre par la seule logique administrative et bureaucratique ou si on la considère
d'abord comme un bouleversement de notre rapport à la vie. On ne traite pas l'enfant handicapé
de la même manière si l'on ne voit à travers son handicap qu'un problème pratique à résoudre
ou si l'on se le représente, je veux dire cet enfant handicapé, comme une source
d'enrichissement humain pour les autres enfants à travers quoi ? A travers l'apprentissage de la
différence.

Alors nous devons faire attention à ne pas construire une société où tous les liens de nature
affective ou morale seraient rompus, où le cœur partout s'effacerait devant le droit, répandant
partout la terrible fatalité de la solitude.

La personne âgée dépendante, je l'affirme, doit pouvoir rester le plus longtemps possible dans
son environnement familier. C'est un axe. Elle doit le plus longtemps possible conserver les
liens familiaux, affectifs, les relations de voisinage qui nourrissent sa vie intérieure et sa vie
sociale. Le maintien le plus longtemps possible à domicile, l'encouragement aux solidarités
familiales, aux solidarités de proximité, doivent être regardés comme des priorités absolues
pour une politique à l'égard des personnes âgées dépendantes qui considère leur présence
dans la société comme une source d'enrichissement humain et qui repose sur la conviction que
le sentiment d'être aimés est peut-être le plus important que l'on puisse faire à l'endroit de ceux
qui nous ont tant donné. Il ne s'agit pas de cacher le grand âge, il s'agit de le réinsérer dans la
vie sociale et de le voir comme un enrichissement.

Alors si nous en sommes tous convaincus nous ne devons pas seulement réfléchir à la prise en
charge de la dépendance « par » la société. Mais à la prise en charge de la dépendance « dans
» la société. Ce n'est pas qu'une question de sémantique, c'est une question absolument

                                                                                        12/16
essentielle. Il ne s'agit pas de faire prendre en charge « par » la société, il s'agit d'organiser la
dépendance « dans » la société. Alors les moyens modernes, télésurveillance, télémédecine,
domotique, la révolution numérique nous permettent de l'envisager sur une échelle et pour des
degrés de dépendance pour lesquels c'était jusqu'à présent impensable, et à des coûts
moindres que l'hébergement dans des maisons de retraite médicalisées.

Mais les équipements, les moyens techniques aussi performants soient-ils ne sont rien sans
une prise de conscience, une mise à jour de la responsabilité de chacun. Je souhaite que la
question de la responsabilité des familles soit au cœur de la réflexion parce qu'elle est au cœur
de la solidarité entre les générations et de la transmission, parce que la piété filiale est la
reconnaissance de tout ce que l'on a reçu d'amour et de sacrifice et que cette dette, en quelque
sorte cette reconnaissance est sans doute ce qui donne le plus de sens à la vie qui s'achève.
Oui je l'affirme, on a tous une dette à l'endroit de ceux qui nous ont donné la vie et qui nous ont
accompagnés sur le chemin de cette vie. Il y a un continuum, ça s'appelle les valeurs d'une
société. Et on est responsable vis-à-vis de cette dette.

La société est là pour accompagner les familles, les soutenir, les aider, les soulager, mais
j'affirme que la société n'est pas là pour remplacer les familles. C'est un autre choix politique
très fort dans mon esprit. La société ne remplacera jamais la famille. Elle doit aider la famille,
elle doit soutenir la famille, mais elle ne peut pas la remplacer. La société est là pour permettre
aux familles de faire vivre les valeurs de partage qui unissent les générations entre elles et non
pour leur signifier qu'elles n'auraient plus aucun rôle à jouer parce que ces valeurs seraient
dépassées. Mais alors si ces valeurs sont dépassées, que transmettrions-nous à nos enfants ?
Ces valeurs ne sont pas dépassées. Et le débat sur la dépendance et les décisions que nous
allons prendre, sont l'occasion de parler de ces valeurs et de les faire triompher.

Chacun sent bien que la dépendance n'est pas qu'un problème financier, c'est aussi une
question morale qui nous touche au plus profond de nous-mêmes. Il ne s'agit pas simplement
de savoir combien ça coûte, mais quelle place nous donnons.

Naturellement les familles ne peuvent pas tout faire. Aux prises avec des difficultés
innombrables, les familles doivent pouvoir s'appuyer sur les collectivités, les associations, sur
une main d'œuvre qualifiée capable de pratiquer des soins, de faire face aux besoins de la vie
quotidienne, formée à l'hygiène, à la sécurité, à l'écoute, au dialogue, à l'accompagnement
psychologique.

C'est un domaine où l'expérience et les qualités humaines sont précieuses. Comme la
gérontologie qui doit être reconnue comme une spécialité médicale à part entière aussi
valorisante, aussi prestigieuse que les autres, les emplois qui accompagnent le grand âge ne
doivent pas être considérés comme des petits boulots, des boulots au rabais que l'on fait faute
de mieux, sans en avoir le goût, sans y être préparé, avec le sentiment qu'il ne s'y attache
aucune reconnaissance sociale. Il va falloir relever le statut social à la mesure de leur utilité, de
leur nécessité. Il faut les professionnaliser, valider les acquis de l'expérience, améliorer les
conditions de travail et de rémunération, ne pas les laisser dans la précarité, avec le sentiment
d'une absence totale de perspective. Nous avons besoin de ces professionnels, car ce sont des
professionnels.

Souvenons-nous que rendre la demande solvable ne suffit pas. Il va falloir aussi structurer
l'offre. Et la qualité de l'offre dépendra de la qualité des hommes et des femmes qui voudront
bien se dévouer pour les autres, se mettre au service des autres non pas seulement dans une
relation exclusivement marchande mais dans une relation aussi humaine. Il va falloir créer les
conditions pour que l'engagement de ces hommes et ces femmes soit un choix, un choix de vie.
Car tout ce qui ne sera pas fait avec un peu de cœur sera une cause supplémentaire de peine
et de souffrance.



                                                                                         13/16
Mais si nous laissons aux familles toute la charge financière de la dépendance, nous ne
pouvons espérer atteindre aucun des objectifs que nous dicte pourtant notre raison. Ouvrir le
débat sur la dépendance, c'est ouvrir la voie à une profonde transformation sociale, c'est
engager un changement en profondeur de nos rapports sociaux, de notre rapport à la vie, de
notre rapport à l'avenir. Ce n'est pas seulement équilibrer les comptes. Si la problématique de la
dépendance dépasse largement la problématique financière, si elle ne peut pas être enfermée
dans la seule logique comptable, la question de son financement n'en est pas moins
incontournable.

Et qu'exprime-t-elle d'autre en vérité, cette question du financement, que la nécessité du
partage ? Pas seulement le partage avec ceux que nous aimons, avec ceux auxquels nous
devons d'être ce que nous sommes, mais aussi le partage entre le présent et l'avenir, entre ce à
quoi nous sommes prêts à renoncer aujourd'hui pour être couverts demain. A quoi sommes-
nous prêts à renoncer aujourd'hui pour être couverts demain ? Une question absolument
essentielle, incontournable, inévitable, car ce que nous verserons pour nos parents, nos enfants
à leur tour le verseront pour nous. Dans le continuum dont je parlais à l'instant.

Alors qu'aujourd'hui - vous connaissez les chiffres -- ils sont effrayants. Une personne âgée sur
cinq est en mesure de financer sur ses seuls revenus son hébergement en maison de retraite.
Une personne âgée sur cinq. Nous ne pouvons pas laisser les familles seules face à la montée
de la dépendance. Pour y faire face c'est 25 milliards d'argent public qui seront mobilisés cette
année. C'est plus de la moitié de ce que nous dépensons pour notre politique familiale. C'est
trois fois ce que nous dépensons pour les accidents du travail et les maladies professionnelles.

Ces 25 milliards empruntent une multitude de canaux dont les principaux sont l'assurance
maladie et les départements. Quand on sait que ces dépenses ont augmenté au rythme de un
milliard par an au cours des quatre dernières années, on mesure l'inquiétude des gestionnaires
de ces organismes et celle des pouvoirs publics confrontés aux déficits abyssaux creusés par la
crise financière.

Alors que chacun fait tout ce qu'il faut pour maîtriser ses dépenses, alors que pour la première
fois depuis 1997, l'objectif de dépenses d'assurance maladie a été tenu en 2010 au prix
d'efforts importants, alors que beaucoup de départements se débattent dans des difficultés
financières de plus en plus grandes, on ne peut pas imaginer faire financer par l'endettement,
c'est-à-dire par le déficit, l'effort supplémentaire qu'il s'avérera nécessaire de consentir dans les
années à venir en faveur de la prise en charge de la dépendance. Je refuse cette voie du déficit
et de l'endettement et je la ferme.

Nous devrons, là comme ailleurs, dépenser mieux. Mais nous devrons aussi dépenser plus. Il
nous faut donc réfléchir à un nouveau financement. Nous devons chercher ensemble la
meilleure solution à la fois du point de vue de la justice et de l'économie. Taxer davantage le
travail et en augmenter le coût ne conduiront qu'à une délocalisation encore plus importante de
nos emplois.

Si un nombre toujours plus réduit d'actifs doit prendre en charge un nombre toujours plus grand
d'inactifs, c'est tout notre système de protection sociale, tout notre modèle social qui explosera.
Je vois bien les revendications de tant d'actifs : vous travaillez moins, moins longtemps dans la
semaine, moins longtemps dans la journée, moins longtemps dans la vie et dans le même
temps, on a de plus en plus d'inactifs dont il faut financer la protection sociale. Comment cela
peut-il fonctionner ? Cela ne peut pas fonctionner, je ferme également cette voie.

Aussi, je demande à chacun d'entre vous d'examiner toutes les autres options possibles, de
n'écarter d'emblée aucune solution, y compris celle de l'assurance, pour des a priori
idéologiques. L'idéologie n'a rien à faire dans une affaire de cette importance et de cette
humanité.

                                                                                         14/16
Quand nos finances publiques sont dans la situation où elles sont, quand le travail est à ce
point taxé, quand 5 millions de Français ont déjà souscrit une assurance dépendance, est-il
raisonnable de ne pas s'interroger sur le rôle que peuvent jouer les mutuelles, les compagnies
d'assurances et les organismes de prévoyance ? Ne fermons pas le débat avant de l'avoir
ouvert ! Cherchons de façon pragmatique la solution la plus efficace et réfléchissons aux règles
qui, dans tous les cas, feront prévaloir les principes de justice auxquels nous sommes tous
attachés.

Pour la prise en charge de la dépendance, il nous faut sans doute inventer autre chose que le
modèle traditionnel de couverture des risques par la sécurité sociale. Je n'ai pas pour autant
parlé par hasard d'un cinquième risque. Mais parce que je souhaitais que la couverture de ce
risque, quel que soit le mode de financement, obéisse elle aussi aux principes d'universalité et
de paritarisme qui gouvernent les quatre branches de la sécurité sociale.

Personne ne devra être tenu à l'écart de cette couverture ou pénalisé, ni à cause de son âge, ni
à cause de son état de santé, ni à cause de son niveau de revenus. L'universalité implique
l'absence totale de discrimination. Je ne transigerai pas sur ce principe que la loi devra garantir.

De la même manière, il va de soi que pour moi les partenaires sociaux ne sauraient être exclus
du pilotage, de la surveillance et du contrôle du système de prise en charge de la dépendance,
quel qu'il soit. Il faudra y associer d'autres acteurs comme les départements dont le rôle est
majeur. Avec la dépendance, c'est donc une nouvelle forme de paritarisme qui doit voir le jour,
une nouvelle forme de paritarisme que nous allons inventer.

Je le dis aussi pour rassurer ceux qui auraient un doute : je n'ai pas l'intention d'utiliser la
dépendance pour privatiser insidieusement l'assurance maladie.

Je n'ai pas non plus l'intention de diluer le handicap dans la dépendance. La situation des
handicapés dans la société est une priorité et le restera. J'avais promis que l'allocation adulte
handicapé serait revalorisée de 25% durant mon mandat. Cette promesse est scrupuleusement
tenue. Je me suis de longue date engagé sur la question de la scolarisation des enfants
handicapés. Elle sera à l'ordre du jour de la prochaine conférence nationale du handicap, en
juin prochain.

Si l'impératif d'insertion dans la société est le même pour le malade, le handicapé et la
personne que l'âge condamne à la dépendance, la dépendance pose un problème bien
différent de la maladie ou du handicap et qui doit donc être abordé en tant que tel. Nous
n'avancerons pas dans la confusion. Nous n'avancerons que dans la clarté, en faisant la part
des choses, avec des réponses et des financements adaptés pour chaque cas. C'est une ligne
de conduite dont nous ne devons pas dévier si nous voulons que le dispositif que nous allons
mettre en place soit lisible, soit compréhensible, soit gérable.

Que chacun en soit bien convaincu : il n'y a dans ma volonté d'ouvrir le dossier de la
dépendance aucune intention cachée, aucune arrière-pensée idéologique ou électorale. Quelle
pourrait donc être d'ailleurs cette pensée ?

Le débat qui s'ouvre a donc toutes les raisons d'être apaisé et tout entier consacré à la
recherche d'un large consensus. Nous avons six mois devant nous. C'est court. Mais nous ne
partons pas de rien. C'est un sujet auquel les parlementaires, les conseils généraux, le monde
associatif, les partenaires sociaux, les experts ont déjà beaucoup réfléchi. Je pense en
particulier aux rapports d'Alain VASSELLE et de Valérie ROSSO DEBORD que je remercie, qui
vous ont présentés ce matin les résultats du travail approfondi qu'ils ont effectué.




                                                                                         15/16
Les quatre groupes de travail sont mis en place par Roselyne BACHELOT et Marie-Anne
MONTCHAMP -je leur fais toute confiance-, réunissent l'ensemble des compétences. Je
remercie Roselyne comme Marie-Anne de leur courage et de leur volonté. Elles savent qu'elles
ont une obligation de résultat comme chacun d'entre nous.

Les débats qui seront organisés au niveau régional éclaireront utilement les travaux des
groupes et notre réflexion commune. Ils permettront de bien cerner les attentes de nos
concitoyens.

Plusieurs institutions apporteront leur éclairage à commencer, Monsieur le Président, par le
Conseil économique, social et environnemental.

Puis, après la réflexion et l'échange, viendra l'heure de la prise de décision et de la
responsabilité. J'ai souvent répété ce mot : responsabilité, mais vous savez, les Français ne
nous demandent pas de réussir sur tout, ils savent bien que c'est difficile de diriger un pays. Ils
demandent que les responsables que nous sommes, assument leurs responsabilités, qu'ils
fassent face quand cela marche comme quand cela ne marche pas. Assumer sa responsabilité
devrait être la priorité de chaque responsable. C'est cela qu'attendent de nous les Français.

A la lumière de ces travaux, le gouvernement élaborera son projet avant l'été prochain, en vue
d'un examen par le Parlement à l'automne.

Si à la fin de cette année, mes chers compatriotes, nous pouvons dire à nos enfants : vos
retraites seront payées, votre dépendance sera prise en charge, alors nous aurons changé le
rapport que notre jeunesse entretient avec l'avenir : elle regardera, notre jeunesse, moins
l'avenir comme une menace et davantage l'avenir comme une promesse. Si nous pouvons nous
dire que ce que nous avons fait allumera un jour dans le regard perdu de celui qui a tant besoin
des autres pour vivre doucement, doucement la fin de son existence une petite étincelle de
bonheur et d'espérance, alors nous aurons fait de notre mieux.

Et nous pourrons être fiers de ce que nous aurons accompli ensemble.

J'ai conscience que ce que je vous demande est difficile, mais vous devez avoir conscience que
nous n'avons pas le choix. Cela fait trop d'années que la France attend. Nous sommes là pour
résoudre les problèmes, les vrais problèmes : défendre les solidarités, les vraies solidarités.
Alors c'est tout de suite, six mois pour en parler, quelques semaines pour prendre la décision et
la postérité jugera si, ensemble, nous avons été à la hauteur de nos responsabilités ou pas.

Je vous remercie de votre attention.




                                                                                        16/16

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La Dépendance - Débat national 8 Fév. 2011 Paris

  • 1. LA DEPENDANCE – DEBAT NATIONAL : POSER LES ENJEUX LE 8 FEVRIER 2011 AU CONSEIL ECONOMIQUE, SOCIAL ET ENVIRONNEMENTAL PALAIS D'IENA A PARIS Ouverture par M. Jean-Paul DELEVOYE, Président du C.E.S.E : M. Jean-Paul DELEVOYE explique que dès sa nomination à la tête du C.E.S.E, il a mis en place une commission dont les objectifs sont de réfléchir sur les modifications des équilibres au premier rang desquels la démographie (la France n’est pas la plus mal placée ; en 2050, l’Allemagne comptera plus de 40% de personnes de plus de 60 ans, le Japon plus de 25%...). Il évoque ensuite : - La possible mise à mal du pacte de solidarité : Jusqu’où ira la solidarité publique ? - La modification de la donne hospitalière du fait du vieillissement de la population, - La nécessaire adaptation des logements, sujet sur lequel la France accuse un retard, - Le manque de personnels aidants, - la capacité à gérer la maltraitance, - le développement de l’économie de la santé - la dépendance n’est pas un enjeu politique, c’est un enjeu de société Intervention de Mme Roselyne BACHELOT-NARQUIN, Ministre des solidarités et de la cohésion sociale : Je commence par cette interrogation : allons-nous rejeter notre père ou notre mère parvenu au seuil de sa vie ? Il dépend de nous de poser une image positive du vieillissement. Nous voulons promouvoir une société humaniste. Parler de la dépendance, c’est bien entendu évoquer des situations difficiles, mais c’est aussi envisager de façon positive la place des personnes âgées dans notre société. Il faut tenir compte de l’allongement de l’espérance de vie (+ 1 trimestre chaque année et même + 4 mois en 2010). La priorité est aujourd’hui de traiter la dépendance des personnes âgées, mais les personnes en situation de handicap bénéficieront également de la réforme. Notre société se doit d’être accueillante et solidaire : lien entre les générations, maintien du lien, intégrer et non pas exclure. La dépendance est un défi pour demain. Nous avons un devoir d’anticipation ; mais il existe déjà des situations difficiles. Les difficultés sont d’ordre matériel, financier (reste à charge), psychologiques (modification des rôles). Il faut considérer les charges financières que doivent supporter les départements (inégalités entre eux). Un questionnement doit avoir lieu sur nos valeurs, un débat est engagé ainsi qu’une large concertation. La diversité autour des tables rondes témoigne de la diversité du débat.
  • 2. 4 groupes de travail viennent d’être mis en place :  « société et vieillissement » animé par Annick MOREL (IGAS); son but : apprécier l’état de l’opinion sur la dépendance. Au-delà de ses aspects financiers, la question de la perte d’autonomie soulève les questions de la place des personnes âgées dans notre société et des défis multiples liés au vieillissement. Le groupe de travail s’interrogera ainsi sur les adaptations de notre monde aux réalités de la population de demain, que ce soit en termes d’aménagement du territoire ou d’adaptation de nos modèles sociaux. L’évolution des modèles familiaux aura également un impact majeur sur les modes de prise en charge des personnes âgées dépendantes. Les débats au sein de ce groupe de travail aborderont, par exemple, la place de la solidarité familiale, les liens inter- générationnels, ou l’aide aux aidants.  « enjeux démographiques et financiers de la dépendance » présidé par Jean-Michel CHARPIN (ancien commissaire au plan et ancien directeur général de l’INSEE); but : réfléchir sur les enjeux démographiques et financiers, établir des projections robustes et actualisées concernant la dépendance. Les travaux du groupe de travail permettront d’établir une maquette financière qui servira de base à l’ensemble des réflexions et des débats concernant la dépendance. Pour cela, les membres du groupe devront établir des prévisions sur le nombre de personnes en situation de dépendance dans les prochaines années et de traduire ces évolutions en termes de dépenses publique et privée. Ce groupe devra tenir compte également de l’impact potentiel de nouveaux traitements médicaux sur les situations de dépendances et à leurs conséquences prévisibles sur les besoins de financement futurs.  « accueil et accompagnement des personnes âgées » animé par Evelyne RATTE (conseillère maître à la cour des comptes), Les débats au sein de ce groupe de travail pourront aborder la question de la place des technologies de l’autonomie, l’évolution des métiers au service de nos aînés, l’évolution de l’habitat et de l’urbanisme, l’offre de services, aussi bien à domicile qu’en établissement. Les réflexions de ce groupe de travail aboutiront à définir les conditions permettant de garantir le libre choix des concitoyens entre l’hébergement en établissement spécialisé et le maintien à domicile. La question des aidants familiaux, dont le nombre est appelé à diminuer au cours des prochaines années, devra être abordée.  « stratégie pour la couverture de la dépendance des personnes âgées » animé par Bertrand FRAGONARD (Pdt du Ht conseil de la famille). Le financement de la perte d’autonomie est partagé entre de nombreux acteurs : principalement l’Etat et la Sécurité Sociale, mais également les Conseils généraux, les assurances privées et les familles. En raison de la croissance programmée du nombre de personnes dépendantes, ces dépenses seront amenées à augmenter au cours des prochaines années. Ce groupe de travail analysera la question du coût de l’hébergement pour les familles en fonction de leurs revenus et celle, plus structurelle, des pistes envisageables pour le financement de la perte d’autonomie. Le groupe de travail abordera également le sujet de la gouvernance associée au financement de la dépendance ainsi que les évolutions qui pourraient être proposées. 2/16
  • 3. 4 colloques inter régionaux auront lieu. Un point d’étape sera régulièrement fait sur chaque thématique. Des débats interdépartementaux constitueront des moments d’écoute et d’échange. 3 principes irréfragables :  liberté de choix entre domicile et établissement  qualité des prises en charge  responsabilité du financement : il n’est pas question de reporter la dette sur les générations à venir. PREMIERE TABLE RONDE : ENJEUX DU VIEILLISSEMENT POUR LA SOCIETE FRANCAISE Introduction par M. François EWALD, philosophe : Nous célébrons le recul de l’espérance de vie, en France. En Russie et aux USA, au contraire, l’espérance de vie diminue. Mais une réorganisation de la société est nécessaire. Nous voulons passer de situations où nous trouvons des solutions au coup par coup à une anticipation organisée. Il ne s’agit pas de mesurer uniquement des quantités mais également du bien-être. La question des valeurs fait référence à l’éthique individuelle. Elle était déjà évoquée par Cicéron : « Il faut savoir adapter ses forces à son environnement » qui est une question relative à « pour bien vieillir, il faut d’abord bien vivre ». Mais si nous nous disons qu’il faut adapter la société aux personnes âgées pour bien les traiter, intervient le problème des équilibres sociaux (incidences sur les plus jeunes). La logique de l’Etat providence est une logique de libération des besoins. En matière de vieillissement, l’idéal serait de revendiquer les moyens de maintenir l’autonomie. Il faut repenser la solidarité. Intervention de M. Alain VASSELLE, sénateur de l’Oise : L’évolution de la situation des personnes âgées est complexe. Les enjeux sont économiques, sociaux et politiques (cf le Rapport du Haut Conseil pour l’Avenir de l’Assurance maladie Nous avons à nous intéresser à deux aspects :  repenser les solidarités  s’investir dans le domaine de la prévention pour retarder la dépendance Mme Annick MOREL (IGAS) On parle de l’aspect démographique du vieillissement depuis plusieurs décennies, mais on est à présent au pied du mur. Concernant les valeurs éthiques sur l’accompagnement de la fin de vie, l’effet canicule avait suscité un sursaut dans les familles qui se déclaraient disposées à prendre en charge un parent chez eux ; mais la concrétisation de cette proposition volontaire diminue d’année en année. 3/16
  • 4. Intervention de M. Jean-Michel CHARPIN : En France, l’espérance de vie continue de progresser. L’augmentation de la problématique dépendance sera particulièrement forte entre 2005 et 2035. La proportion des + de 65 ans va doubler d’ici 2050. Des transferts intergénérationnels importants sont prévisibles. Il faut les mesurer par rapport à l’ampleur de la charge. Problématique comportant des différences importantes par rapport à la retraite. En 1990, un lancement de réformes a été nécessaire parce que la situation allait devenir intenable. M. François EWALD précise la différence entre les seniors et les « vieux ». Le mot « Vieux » va avec vétusté (vision de destruction) ; Le mot « Senior » fait référence à une situation relative par rapport aux jeunes. Intervention du Professeur Gilles BERRUT, gériatre au CHU de Nantes : On a une première période de 20 à 25 ans après la fin de la période de travail, puis une « période de longévité ». C’est une chance pour soi mais également pour les autres, puisque ces personnes transmettent à leurs petits enfants des savoirs, de l’expérience, et se consacrent à des activités sociales, notamment au sein d’associations. C’est aussi un bassin d’emplois. La longévité est donc une chance pour tous. Deux points :  La prévention : dépistage des personnes fragiles  Mettre dans le débat les organisations du niveau régional (cf. le gérontopôle à Toulouse) ; c’est par une action multi-domaines que l’on pourra aborder la question. Question de la journaliste animatrice : à quel moment se pose la question de l’autonomie des personnes âgées ? Mme WEBER (C.E.S.E) répond que la priorité pour les 3,5 millions d’aidants est d’apporter une solution pour les personnes en besoin d’aide. Il faut investiguer le projet de vie, voire le projet de fin de vie. Les aidants voudraient pouvoir avoir une vie normale et pouvoir conserver leur lien à l’autre (rester la fille de la vieille dame et que celle-ci ne la confonde pas avec une soignante). Il faut pouvoir partager les charges quotidiennes avec des professionnels. Mme Annick MOREL : « vieux çà gêne, moi non » Le mot « dépendance » est devenu péjoratif. La dépendance est différente de la perte d’autonomie. L’autonomie c’est la capacité à se gérer soi-même. L’aide collective potentialise l’aide familiale. Il faut une solidarité collective pour garantir l’aide de la famille. Mme WEBER : il faudrait que les familles puissent disposer de plus d’informations sur les établissements, les prestations offertes, leurs coûts. Le Pr Gilles BERRUT indique que l’entrée en établissement recule (83 ans) bien que la maladie d’Alzheimer et les troubles de la circulation font baisser cet âge moyen. L’entrée en établissement de personnes âgées qui ne s’y sont pas préparé se traduit par des incidences sur leur état de santé. M. Alain VASSELLE précise qu’en revanche la situation des personnes très âgées qui entrent en établissement s’améliore. 4/16
  • 5. Le succès du maintien à domicile implique que les établissements d’accueil intermédiaire se vident. Il ne faut pas opposer domicile et établissement mais organiser une trajectoire. Mme Florence LEDUC, présidente de l’association française des aidants : Il faut pouvoir disposer sur un territoire donné de l’ensemble des réponses. Ce qui est important, c’est la panoplie des réponses et l’adéquation de la réponse. Question de la journaliste animatrice : les questions éthiques telles que la maltraitance relèvent- elles de la morale politique ? Le Pr Gilles BERRUT répond que c’est surtout une question de formation. Mme Florence LEDUC ajoute que la dignité est intrinsèque à l’homme mais que c’est à la collectivité de cultiver cette question. M. Alain VASSELLE précise qu’il faut veiller à la maltraitance passive. M. François EWALD conclut que l’idéal de l’homme contemporain est l’homme autonome ; or, la dépendance est un échec. Synthèse de la 1ère table ronde par Mme Marie-Anne MONTCHAMP, Secrétaire d’Etat auprès de la Ministre des solidarités et de la cohésion sociale : Le scénario du vieillissement n’est pas écrit. Nous n’avons pas réellement pris en compte la dimension économique. Il faut s’interroger sur la nature de l’offre (souvent des aidantes) pour respecter les équilibres. La morale politique doit être au cœur des processus. L’offre ne doit pas définir le besoin. Le choix des aînés doit être placé au cœur de la réflexion. Il faut définir des scénarios complémentaires. DEUXIEME TABLE RONDE : ASSURER UNE PRISE EN CHARGE DE QUALITE DES PERSONNES AGEES DEPENDANTES Introduction par M. Bertrand FRAGONARD : 2 impératifs en ce qui concerne la qualité d’offre de service : 1. assurer un socle de prestations de qualité Il faut rejeter tout système dual. Le système de prise en charge doit favoriser le maintien à domicile. La variabilité des besoins est importante. Si on veut retenir le principe de prestations personnalisées, cela implique l’exclusion des prestations forfaitaires. 2. L’offre de service est-elle suffisante ? Il faut assumer et pouvoir payer la prestation de qualité voulue. Il faut donner la priorité au soulagement de ceux qui assurent la plus large charge et donc développer des services pour les aidants. Les problèmes de financement vont augmenter. L’aide publique tient compte des revenus des familles. Si ce critère est maintenu, il faudra redéfinir la frontière. 5/16
  • 6. Une fois calée socle public / socle familial, il y a deux options :  Assurance, épargne, gestion de patrimoine  Incitation publique : assurance obligatoire Enfin, si l’aide publique est appelée à s’accroître, quelles sources nouvelles de financement ? Question de la journaliste animatrice : quels sont les modèles étrangers ? Réponse de M. Jean-Marie ROLLAND, président du conseil général de l’Yonne, membre du conseil de la CNSA : Aux Etats-Unis, l’usage est de permettre à chacun de participer à la vie en société, d’accroître l’indépendance, d’alléger le travail des aidants. En France, depuis 2002, avec l’APA, on a démontré notre capacité à assurer un service de proximité et de qualité, mais quid de la pérennité du système ? La crise récente, notamment concernant l’immobilier, a montré que nous étions au bout du système. Mme Valérie ROSSO-DEBORD précise que la Suède offre un système, sans libre choix. La France, à l’inverse, offre un choix et il faut maintenir ce particularisme. M. Yves VEROLLET, rapporteur de la Commission du C.E.S.E sur la dépendance, souligne un aspect sous estimé : les générations actuelles ont connu un bon niveau de protection sociale. Lorsqu’elles vont être confrontées à la problématique de la dépendance, elles n’admettront pas de ne pas trouver une réponse. Deux questions importantes : comment financer les services et comment rendre attractives les professions ? Mme Marie-Sophie DESAULLE, directrice générale de l’ARS des Pays-de-Loire, souligne les différences de situations territoriales, particulièrement entre les départements. Les taux d’équipements permettent un accès variable à l’offre. En fonction des politiques menées, il y a un déséquilibre, parfois au détriment des établissements, d’autres fois au détriment des services. En fonction des projets, de la capacité à les porter, on a une offre plus ou moins satisfaisante (problème de formation). Adapter l’offre existante est le rôle de l’ARS. Mme Evelyne RATTE remarque que l’offre n’est pas toujours là où est la demande : problème de gouvernance. La qualité représente un coût, mais son amélioration peut également être une économie : meilleure coordination, formation, partenariats entre structures, mise en commun des fonctions support. Mme Marie-Sophie DESAULLE observe que tout le monde évalue les besoins des personnes parce que l’on a des organisations cloisonnées. La première personne qui peut coordonner est le médecin traitant. Il faut repenser les organisations. Mme Marie-Odile DESANA, présidente de France-Alzheimer, souligne le coût de la prise en charge d’une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer : Un aidant à domicile pour 6 heures par jour représente un coût de 3000 € par mois. Reste à charge de la famille : 1000 € par mois. Il faut porter un regard sur les capacités maintenues des malades et non sur leurs déficits. Mise en place nécessaire d’une offre de soins diversifiée. Il faut pouvoir avoir le choix de rester à domicile ou d’accéder à un établissement. 70% des malades vivent à domicile, + de 50% dans une grande dépendance. 6/16
  • 7. M. Jean-Marie ROLLAND souligne que pour le même type de dépendance, on n’apporte pas la même réponse. M. Yves VEROLLET précise que les départements ont réalisé un travail formidable depuis la mise en place de l’APA, mais ils en financent les 2/3. Une réalité : les disponibilités financières influent sur le girage. Mme Valérie ROSSO-DEBORD souligne que sur 1.400.000 bénéficiaires de l’APA, 600.000 sont en GIR 4. Les programmes de prévention doivent être au cœur de nos préoccupations. Nous avons du temps, le pic étant en 2030 / 2035. Mme Marie-Odile DESANA ajoute qu’il faut un financement pérenne basé sur la solidarité nationale pour qu’il y ait une prise en charge équitable sur le territoire. M. Bertrand FRAGONARD précise que pour le financement, il y a deux objectifs antinomiques :  Si le besoin est très lourd, le financement doit être élevé  La part des ménages (reste à charge) est souhaitée la plus faible possible. B. FRAGONARD est favorable à l’amélioration de l’offre et l’augmentation de la part des ménages. Mme Marie-Sophie DESAULLE souligne que des personnes âgées sont prises en charge de façon inadéquate (service de médecine au lieu d’EHPAD). Des répartitions d’enveloppes peuvent améliorer la prise en charge. Mme Valérie ROSSO-DEBORD répond que la loi HPST a créé les ARS, ce qui va contribuer à prendre en charge les personnes sans les « saucissonner ». 5 millions de Français bénéficient déjà d’une assurance, mais la majeure partie d’entre eux est insatisfaite de la rente servie. Mme Marie-Odile DESANA conclut en disant que la prise en charge globale aidant / aidé est indispensable. Les assurances privées ont fait la preuve de leur inefficacité. Synthèse de la 2ème table ronde par Mme Roselyne BACHELOT-NARQUIN, Ministre des solidarités et de la cohésion sociale : Les débats révèlent que le sujet est complexe. Une seule certitude : il faut penser la dépendance de façon globale. L’entrée dans la dépendance peut être retardée : c’est le rôle de la prévention. L’activité sociale, l’engagement associatif… contribuent à retarder l’entrée en dépendance. Prévenir, c’est d’abord dépister, c’est aussi améliorer la coordination autour de la personne âgée. M. François EWALD a rappelé qu’il fallait revisiter l’ensemble de nos politiques. Vivre à domicile doit être un choix libre et non un confinement. Il faut accompagner les proches et les aidants. Les personnes aidées sont d’abord des femmes de même que les aidantes. Dans les interventions, il a été souligné que les femmes, après avoir mis entre parenthèses parfois leurs carrières, deviennent aidantes. Il faut donc leur permettre de concilier leur vie personnelle avec leurs charges. Contrairement aux idées reçues, le recours aux aidants professionnels est un moyen de réintroduire de l’humanité. Il faudra garantir une égalité de traitement sur le territoire. Il faut concilier proximité et équité. 7/16
  • 8. A qui confier la gouvernance pour qu’elle soit d’une qualité optimale ? Imaginons qu’un traitement efficace de la maladie d’Alzheimer soit élaboré. Les structures actuelles pourraient être en surnombre. Déjà 22 Md € sont mobilisés pour la dépendance. Mme Bachelot venant d’être informée de l’arrivée du Pdt de la République, interrompt sa synthèse en indiquant que le gouvernement était totalement mobilisé sur la question de la dépendance. Clôture par M. Nicolas SARKOZY, Président de la République Monsieur le Président du Conseil économique et social environnemental, Cher Jean-Paul Delevoye, Mesdames et messieurs les Ministres, Mesdames et Messieurs, Nous voici réunis aujourd'hui, dans ce lieu entièrement voué au dialogue social, pour lancer le grand débat national sur la dépendance. Ce débat je l'ai souhaité, je l'ai voulu malgré les appels à la prudence, les mises en garde de ceux, si nombreux, qui le trouvaient trop risqué au regard des enjeux et des échéances électorales. Une fois de plus il aurait donc fallu attendre... Mais attendre quoi ? Attendre de mieux connaître les données du problème ? Mais les données du problème nous les connaissons toutes ! Attendre de mieux prendre la mesure du défi que notre pays va avoir à relever dans les années, les décennies qui viennent ? Mais l'ampleur de ce défi nous la mesurons tous, nous savons tous quelle est sa gravité, l'urgence qu'il y a à nous donner les moyens d'y répondre compte tenu du temps qu'il faut pour que les mécanismes de prise en charge puissent produire leurs pleins effets. Nous pouvons toujours attendre mais la démographie, elle, n'attendra pas. La vie s'allonge et la France vieillit. Ce vieillissement, qui est un progrès parce que lorsque l'on vit plus longtemps et en meilleure santé, va continuer de bouleverser nos équilibres économiques et sociaux. Nous pouvons toujours refuser de regarder cet avenir en face mais cet avenir va finir par devenir notre présent. S'agissant de l'allongement de durée de vie et du vieillissement, il est écrit d'avance et ses conséquences aussi. En vérité, nous n'avons pas le choix, nous devons choisir maintenant quelle place nous allons faire dans notre société à l'âge et au grand âge. Ce problème est devant nous, non pas loin mais tout près. Nous ne pouvons plus attendre. Plus nous attendrons, plus ce sera difficile, car l'on ne fait pas une telle révolution ni en quelques jours, ni en quelques mois, ni même en quelques années. Il faut que les mentalités, les comportements, les institutions s'adaptent à la réalité sociale et démographique qui jour après jour s'impose à nous, inexorablement. Il faut que les systèmes de financement montent en charge. 8/16
  • 9. Nous ne pouvons plus attendre, peut-être même avons-nous collectivement déjà trop attendu. Nous avons progressivement réformé nos systèmes de retraites. Nous les avons sauvés de la faillite à laquelle le choc démographique les condamnait à plus ou moins brève échéance. Nous avons sauvé la répartition et le principe de la solidarité entre les générations qui est au cœur de notre pacte social. Nous l'avons fait en choisissant de travailler davantage plutôt qu'en augmentant des impôts et des charges qui auraient principalement pesé sur le travail, encouragé les délocalisations, détruit des emplois et réduit le pouvoir d'achat. Faire converger les régimes spéciaux, allonger la durée de cotisation, relever l'âge de la retraite à taux plein, ce fut je le sais, demander à ceux qui travaillent des efforts supplémentaires. Mais nous n'avions pas le choix. Fallait-il attendre de se trouver dans la situation où nous n'aurions plus eu à choisir qu'entre la fin de la répartition et la réduction des pensions de retraites ? Je m'y suis refusé. C'était difficile. Mais alors que la crise creusait dramatiquement nos déficits, c'était mon devoir de prendre des décisions qui auraient été encore plus difficiles et auraient demandé encore plus de sacrifices si elles avaient été différées. A l'horizon 2020, l'équilibre financier de nos retraites est assuré. Mais sur la dépendance qui est une autre conséquence de l'allongement de la durée de la vie et du vieillissement, notre société -je dis notre société parce que cela nous concerne tous- a pris du retard. Ceux qui me conseillent d'attendre, ceux qui me disent que ce n'est pas le moment d'ouvrir un tel chantier de réforme, devraient se pencher sur les difficultés inextricables et si douloureuses dans lesquelles sont plongées tant de familles qui se trouvent confrontées à la perte d'autonomie de leurs proches affaiblis par l'âge et ne pouvant plus affronter seuls la vie quotidienne. Et que dire de ceux qui n'ont pas de famille, que personne ne soutient et n'accompagne et qu'on oublie dans leur terrible solitude ? Que dire de la souffrance de celui que l'on arrache de sa maison où il n'aspire qu'à finir ses jours parce que personne ne veut au fond se compliquer la vie pour l'aider à s'y maintenir ? Nous connaissons tous ces difficultés, ces souffrances, ce désarroi et nous savons tous que la montée de la dépendance n'en est qu'à ses débuts, que le problème ne va cesser de grandir, et que si nous ne nous mettons pas maintenant les moyens d'y répondre, alors il y aura davantage de peines, de souffrances et de désarroi. Ce qui est en jeu n'est pas seulement d'ordre matériel, d'ordre financier. Ce qui est en jeu c'est l'idée que nous nous faisons de notre société, devrais-je même dire de notre civilisation ? Ce qui est en jeu est humain, et affectif, et moral. C'est dans le sort qu'elle réserve, dans la place qu'elle donne, dans la considération qu'elle porte aux plus humbles, aux plus vulnérables, aux plus fragiles, aux plus innocents des siens que se mesure la valeur morale et humaine d'une société. C'est sans doute dans les regards du handicapé et du malade, dans le regard du vieillard, ou de l'enfant que se lit le bonheur de vivre dans une société. Cette étincelle est celle de la vie, de l'importance et du respect qu'on lui accorde. Et c'est de nous-mêmes, de notre propre histoire, de notre propre avenir au fond de notre propre dignité 9/16
  • 10. dont il s'agit, parce que ces malades, ces handicapés, ces enfants, ces vieillards sont nos parents, ces vieillards - si tout se passe bien ! -- ce sera nous. Je n'ai pas le sentiment de parler des autres en parlant d'eux. C'est de nous dont il s'agit. Quelle estime pourrions-nous avoir de nous-mêmes si nous étions incapables de traiter dignement nos parents, incapables de les aider à vivre pleinement jusqu'à la fin de leurs jours, à vivre, pas seulement à survivre ? Comment pourrions-nous alors, quand, à notre tour, nous serons devenus fragiles et vulnérables, comment à ce moment là après avoir oublié nos parents, nous pourrions demander l'aide et l'attention de nos enfants ? C'est cela qui est en cause. Ceux qui auraient abandonné leurs parents ne seraient pas les mieux placés pour demander à leur tour à leurs enfants de ne pas leur faire à eux, ce qu'ils n'ont pas hésité à faire à leurs parents. Nous ne pouvons pas laisser les choses en l'état et nous ne les laisserons pas en l'état. Donc je n'attendrai pas. Attendre encore serait une faute morale impardonnable, ce serait refuser de regarder la réalité en face, ce serait refuser d'assumer mes responsabilités. Pourquoi refuser d'assumer ses responsabilités ? Parce que c'est difficile ? Parce que l'année prochaine il y aura des élections présidentielles ? Mais qui pourrait comprendre que l'on ne s'attaque pas à un problème grave parce qu'il est difficile ? Qui pourrait accepter que l'on s'arrête d'agir, de réformer un an et demi avant la fin d'un quinquennat ? Qui peut croire que j'ai été élu pour cela ? Qui peut penser que c'est ce que les Français attendent ? Qui peut penser que les Français préfèrent l'immobilisme au risque d'une réforme dont ils sont au fond d'eux-mêmes absolument convaincus qu'elle est nécessaire ? Mais naturellement une réforme de cette ampleur qui concerne des sujets qui touchent chacun si profondément, ne peut pas être une réforme venue d'en haut. La manière dont nous abordons le problème de la dépendance dans notre société n'est pas l'affaire d'une catégorie sociale ou d'une génération. C'est une question qui nous est posée à tous. La réflexion doit être collective et la réponse aussi. Si la Sécurité Sociale a pu exister, c'est parce que les Français se la sont appropriée. C'est parce que pour chaque Français, elle est la propriété de tous. Eh bien, je voudrais que la dépendance fasse l'objet de la même appropriation par les Français, qu'elle soit l'expression de la même solidarité que les retraites, la maladie, la famille, le chômage. C'est assez dire qu'il ne s'agit pas à mes yeux d'une réforme comme une autre, mais qu'il s'agit d'ajouter une nouvelle dimension à notre pacte social. Un tel projet ne peut pas s'inscrire dans le débat politique ordinaire. Il exige de la part de chacun un effort sur lui-même pour s'élever au- dessus des clivages partisans et idéologiques et laisser sa conscience, son cœur, sa raison indiquer la voie de l'intérêt général comme le firent jadis les auteurs du programme du Conseil National de la Résistance et les bâtisseurs de la Sécurité Sociale. C'est à cette exigence intellectuelle et morale que nous appelle le souvenir de ce qu'ils ont accompli et l'ampleur de la tâche à laquelle nous nous attelons aujourd'hui. Cette tâche appelle des échanges, des discussions, des débats parce qu'il s'agit d'aborder l'un des problèmes les plus sensibles qui se posent à notre société, c'est le respect que nous devons à ceux que la vie éprouve, à ceux que laisserait dans la difficulté et dans la peine notre imprévoyance collective si nous n'arrivions pas à dégager un consensus suffisant. 10/16
  • 11. Gardons donc ce sujet à l'abri des polémiques. C'est notre devoir à tous. Nous ne travaillons pas pour les 15 mois qui viennent. Nous travaillons pour le demi-siècle à venir. Dire que le débat qui s'ouvre aujourd'hui n'est pas politique ne serait pas exact. Car ce n'est pas un débat technique, un débat d'experts, c'est un débat de société et quoi de plus politique qu'un débat de société. Mais c'est un débat autour de ce qui nous rassemble, de ce qui fonde notre rapport à l'autre et non de ce qui nous oppose et de ce qui nous divise. Nous parlons de ce au nom de quoi nous vivons ensemble et qui fait que nous nous reconnaissons tous dans l'idée du bien commun. Encore faut-il élever suffisamment le débat. Non pour ne brasser que des idées générales loin des réalités humaines et sociales, mais pour embrasser ce problème dans toutes ses dimensions. Je veux dire par là qu'en prenant la question de la dépendance par le seul biais de sa prise en charge et de son financement, on la dénaturerait. Ce serait refaire l'erreur qui fut longtemps faite de ne voir le problème de la vieillesse qu'à travers celui de la retraite sans s'occuper de la participation des retraités à la vie sociale, le problème de la maladie qu'à travers celui de l'assurance maladie sans se préoccuper ni de la santé publique ni de la place du malade dans la société, ou encore celui du handicap sous le seul angle de la compensation financière sans se soucier de l'insertion sociale du handicapé. Ce n'est que vers les années 80 que les choses ont commencé à changer. Lentement. Trop lentement. Songez qu'il a fallu attendre 2005 pour que la loi impose que les établissements recevant du public soient accessibles à tous. Songez qu'il a fallu attendre 2009 pour qu'un retraité qui bénéficie d'une retraite à taux plein puisse cumuler sans restriction sa pension de retraite avec un revenu d'activité. Songez qu'il a fallu attendre 2007 pour que commence à être amélioré l'accès à l'emprunt pour des malades qui jusque-là s'en trouvaient exclus ou soumis à des conditions exorbitantes : « Vous êtes malades, vous n'allez pas en plus demander à vous loger ! Ce n'est pas raisonnable ! ». La rapidité de l'évolution démographique nous oblige à ne pas perdre de temps et à traiter d'emblée la question de la dépendance dans le cadre des politiques de santé publique, de prévention et de recherche qui se verraient accorder enfin l'importance qu'elles méritent. Je pense bien sûr aux recherches sur les maladies du grand âge, Alzheimer, qui ne se limite pas à la recherche en laboratoire. La gérontologie qui devrait enfin conquérir ses lettres de noblesse parce qu'elle a beaucoup à nous apprendre. La dépendance n'est pas une fatalité : je veux dire, on peut la repousser. On peut éviter que la fragilité d'une personne âgée, dont l'attention baisse ou qui se fatigue plus vite, ne la conduise inexorablement vers la dépendance. En aménageant mieux les logements, en prévoyant un accès de proximité à un médecin, en prenant certaines précautions, en apprenant certaines règles de comportement, nous savons que nous pourrions prévenir l'apparition de beaucoup de situations de dépendance ou éviter des entrées en établissement. Les personnes âgées elles-mêmes jouent un rôle essentiel pour prévenir leur perte d'autonomie, en entretenant leur mémoire, en étant actives, en participant à la vie de la cité. Les proches, bien sûr, sont les premiers à les aider, à les maintenir dans une vie sociale active. Mais la collectivité a son rôle à jouer. Des actions de prévention doivent être développées. Il faut donc aborder le problème sous l'angle plus large de la place du grand âge dans notre société. Je dis bien « dans » la société et non pas à l'écart de celle-ci. Après une trop longue prise de conscience une grande mutation est en train de s'opérer quant à notre façon de traiter la vieillesse. 11/16
  • 12. Nous commençons à associer les personnes âgées à la vie sociale. Nous construisons des maisons de retraite qui ne sont plus des lieux de relégation comme si le grand âge devait être éloigné de la vue de ceux qui vivent une vie active. Ces lieux doivent être des lieux de vie. On ne voit plus ces grands dortoirs de lits, alignés, sans aucune intimité, sans aucune vie sociale. Aujourd'hui, les personnes âgées peuvent compter sur un personnel soignant mieux formé. La prise en charge des résidents est en progrès. On ne se contente pas de les soigner, de les héberger et de leur proposer des activités pour passer le temps. Beaucoup d'établissements construisent de véritables projets de vie, auxquels les pensionnaires participent pleinement. Avec un investissement exceptionnel des personnels, soignants et non soignants, des directeurs d'établissements mais aussi des professionnels de santé libéraux. Il nous faut inscrire le traitement de la dépendance dans ce grand mouvement de réinsertion de la vieillesse dans la vie sociale. Il ne s'agit pas que les plus âgés dont les facultés déclinent puissent seulement survivre tant bien que mal surtout sans déranger personne. Il s'agit de tout faire pour que leur vie soit une vraie vie le plus longtemps possible, pour que même affaiblis, diminués, privés de tout ou partie de leur autonomie, ils puissent encore éprouver assez de joie de vivre pour que le bonheur d'être là l'emporte sur la lassitude, le sentiment d'être de trop et même l'attente d'une mort vécue comme une délivrance d'une existence qui n'a plus de sens. Une société qui traite comme cela ses vieux est une société qui n'a aucune morale et qui ne respecte pas la dignité humaine. On peut être dépendant, on peut avoir perdu son autonomie et vouloir qu'on respecte sa dignité parce qu'on est jusqu'au bout une personne humaine. Alors de quoi ont-ils d'abord besoin, même ceux qui ont tout oublié, même ceux qui sont redevenus comme des enfants, même ceux qui sont déjà ailleurs ? Ils ont besoin d'amour. Ils ont besoin qu'on les aime. Alors, vous me direz, nous sommes bien loin de ce qu'une politique peut faire. L'amour ne se décrète pas, le bonheur non plus. Mais rien n'empêche d'y penser lorsque l'on choisit une politique. On ne fera pas la même politique si l'on considère la dépendance comme un problème à résoudre par la seule logique administrative et bureaucratique ou si on la considère d'abord comme un bouleversement de notre rapport à la vie. On ne traite pas l'enfant handicapé de la même manière si l'on ne voit à travers son handicap qu'un problème pratique à résoudre ou si l'on se le représente, je veux dire cet enfant handicapé, comme une source d'enrichissement humain pour les autres enfants à travers quoi ? A travers l'apprentissage de la différence. Alors nous devons faire attention à ne pas construire une société où tous les liens de nature affective ou morale seraient rompus, où le cœur partout s'effacerait devant le droit, répandant partout la terrible fatalité de la solitude. La personne âgée dépendante, je l'affirme, doit pouvoir rester le plus longtemps possible dans son environnement familier. C'est un axe. Elle doit le plus longtemps possible conserver les liens familiaux, affectifs, les relations de voisinage qui nourrissent sa vie intérieure et sa vie sociale. Le maintien le plus longtemps possible à domicile, l'encouragement aux solidarités familiales, aux solidarités de proximité, doivent être regardés comme des priorités absolues pour une politique à l'égard des personnes âgées dépendantes qui considère leur présence dans la société comme une source d'enrichissement humain et qui repose sur la conviction que le sentiment d'être aimés est peut-être le plus important que l'on puisse faire à l'endroit de ceux qui nous ont tant donné. Il ne s'agit pas de cacher le grand âge, il s'agit de le réinsérer dans la vie sociale et de le voir comme un enrichissement. Alors si nous en sommes tous convaincus nous ne devons pas seulement réfléchir à la prise en charge de la dépendance « par » la société. Mais à la prise en charge de la dépendance « dans » la société. Ce n'est pas qu'une question de sémantique, c'est une question absolument 12/16
  • 13. essentielle. Il ne s'agit pas de faire prendre en charge « par » la société, il s'agit d'organiser la dépendance « dans » la société. Alors les moyens modernes, télésurveillance, télémédecine, domotique, la révolution numérique nous permettent de l'envisager sur une échelle et pour des degrés de dépendance pour lesquels c'était jusqu'à présent impensable, et à des coûts moindres que l'hébergement dans des maisons de retraite médicalisées. Mais les équipements, les moyens techniques aussi performants soient-ils ne sont rien sans une prise de conscience, une mise à jour de la responsabilité de chacun. Je souhaite que la question de la responsabilité des familles soit au cœur de la réflexion parce qu'elle est au cœur de la solidarité entre les générations et de la transmission, parce que la piété filiale est la reconnaissance de tout ce que l'on a reçu d'amour et de sacrifice et que cette dette, en quelque sorte cette reconnaissance est sans doute ce qui donne le plus de sens à la vie qui s'achève. Oui je l'affirme, on a tous une dette à l'endroit de ceux qui nous ont donné la vie et qui nous ont accompagnés sur le chemin de cette vie. Il y a un continuum, ça s'appelle les valeurs d'une société. Et on est responsable vis-à-vis de cette dette. La société est là pour accompagner les familles, les soutenir, les aider, les soulager, mais j'affirme que la société n'est pas là pour remplacer les familles. C'est un autre choix politique très fort dans mon esprit. La société ne remplacera jamais la famille. Elle doit aider la famille, elle doit soutenir la famille, mais elle ne peut pas la remplacer. La société est là pour permettre aux familles de faire vivre les valeurs de partage qui unissent les générations entre elles et non pour leur signifier qu'elles n'auraient plus aucun rôle à jouer parce que ces valeurs seraient dépassées. Mais alors si ces valeurs sont dépassées, que transmettrions-nous à nos enfants ? Ces valeurs ne sont pas dépassées. Et le débat sur la dépendance et les décisions que nous allons prendre, sont l'occasion de parler de ces valeurs et de les faire triompher. Chacun sent bien que la dépendance n'est pas qu'un problème financier, c'est aussi une question morale qui nous touche au plus profond de nous-mêmes. Il ne s'agit pas simplement de savoir combien ça coûte, mais quelle place nous donnons. Naturellement les familles ne peuvent pas tout faire. Aux prises avec des difficultés innombrables, les familles doivent pouvoir s'appuyer sur les collectivités, les associations, sur une main d'œuvre qualifiée capable de pratiquer des soins, de faire face aux besoins de la vie quotidienne, formée à l'hygiène, à la sécurité, à l'écoute, au dialogue, à l'accompagnement psychologique. C'est un domaine où l'expérience et les qualités humaines sont précieuses. Comme la gérontologie qui doit être reconnue comme une spécialité médicale à part entière aussi valorisante, aussi prestigieuse que les autres, les emplois qui accompagnent le grand âge ne doivent pas être considérés comme des petits boulots, des boulots au rabais que l'on fait faute de mieux, sans en avoir le goût, sans y être préparé, avec le sentiment qu'il ne s'y attache aucune reconnaissance sociale. Il va falloir relever le statut social à la mesure de leur utilité, de leur nécessité. Il faut les professionnaliser, valider les acquis de l'expérience, améliorer les conditions de travail et de rémunération, ne pas les laisser dans la précarité, avec le sentiment d'une absence totale de perspective. Nous avons besoin de ces professionnels, car ce sont des professionnels. Souvenons-nous que rendre la demande solvable ne suffit pas. Il va falloir aussi structurer l'offre. Et la qualité de l'offre dépendra de la qualité des hommes et des femmes qui voudront bien se dévouer pour les autres, se mettre au service des autres non pas seulement dans une relation exclusivement marchande mais dans une relation aussi humaine. Il va falloir créer les conditions pour que l'engagement de ces hommes et ces femmes soit un choix, un choix de vie. Car tout ce qui ne sera pas fait avec un peu de cœur sera une cause supplémentaire de peine et de souffrance. 13/16
  • 14. Mais si nous laissons aux familles toute la charge financière de la dépendance, nous ne pouvons espérer atteindre aucun des objectifs que nous dicte pourtant notre raison. Ouvrir le débat sur la dépendance, c'est ouvrir la voie à une profonde transformation sociale, c'est engager un changement en profondeur de nos rapports sociaux, de notre rapport à la vie, de notre rapport à l'avenir. Ce n'est pas seulement équilibrer les comptes. Si la problématique de la dépendance dépasse largement la problématique financière, si elle ne peut pas être enfermée dans la seule logique comptable, la question de son financement n'en est pas moins incontournable. Et qu'exprime-t-elle d'autre en vérité, cette question du financement, que la nécessité du partage ? Pas seulement le partage avec ceux que nous aimons, avec ceux auxquels nous devons d'être ce que nous sommes, mais aussi le partage entre le présent et l'avenir, entre ce à quoi nous sommes prêts à renoncer aujourd'hui pour être couverts demain. A quoi sommes- nous prêts à renoncer aujourd'hui pour être couverts demain ? Une question absolument essentielle, incontournable, inévitable, car ce que nous verserons pour nos parents, nos enfants à leur tour le verseront pour nous. Dans le continuum dont je parlais à l'instant. Alors qu'aujourd'hui - vous connaissez les chiffres -- ils sont effrayants. Une personne âgée sur cinq est en mesure de financer sur ses seuls revenus son hébergement en maison de retraite. Une personne âgée sur cinq. Nous ne pouvons pas laisser les familles seules face à la montée de la dépendance. Pour y faire face c'est 25 milliards d'argent public qui seront mobilisés cette année. C'est plus de la moitié de ce que nous dépensons pour notre politique familiale. C'est trois fois ce que nous dépensons pour les accidents du travail et les maladies professionnelles. Ces 25 milliards empruntent une multitude de canaux dont les principaux sont l'assurance maladie et les départements. Quand on sait que ces dépenses ont augmenté au rythme de un milliard par an au cours des quatre dernières années, on mesure l'inquiétude des gestionnaires de ces organismes et celle des pouvoirs publics confrontés aux déficits abyssaux creusés par la crise financière. Alors que chacun fait tout ce qu'il faut pour maîtriser ses dépenses, alors que pour la première fois depuis 1997, l'objectif de dépenses d'assurance maladie a été tenu en 2010 au prix d'efforts importants, alors que beaucoup de départements se débattent dans des difficultés financières de plus en plus grandes, on ne peut pas imaginer faire financer par l'endettement, c'est-à-dire par le déficit, l'effort supplémentaire qu'il s'avérera nécessaire de consentir dans les années à venir en faveur de la prise en charge de la dépendance. Je refuse cette voie du déficit et de l'endettement et je la ferme. Nous devrons, là comme ailleurs, dépenser mieux. Mais nous devrons aussi dépenser plus. Il nous faut donc réfléchir à un nouveau financement. Nous devons chercher ensemble la meilleure solution à la fois du point de vue de la justice et de l'économie. Taxer davantage le travail et en augmenter le coût ne conduiront qu'à une délocalisation encore plus importante de nos emplois. Si un nombre toujours plus réduit d'actifs doit prendre en charge un nombre toujours plus grand d'inactifs, c'est tout notre système de protection sociale, tout notre modèle social qui explosera. Je vois bien les revendications de tant d'actifs : vous travaillez moins, moins longtemps dans la semaine, moins longtemps dans la journée, moins longtemps dans la vie et dans le même temps, on a de plus en plus d'inactifs dont il faut financer la protection sociale. Comment cela peut-il fonctionner ? Cela ne peut pas fonctionner, je ferme également cette voie. Aussi, je demande à chacun d'entre vous d'examiner toutes les autres options possibles, de n'écarter d'emblée aucune solution, y compris celle de l'assurance, pour des a priori idéologiques. L'idéologie n'a rien à faire dans une affaire de cette importance et de cette humanité. 14/16
  • 15. Quand nos finances publiques sont dans la situation où elles sont, quand le travail est à ce point taxé, quand 5 millions de Français ont déjà souscrit une assurance dépendance, est-il raisonnable de ne pas s'interroger sur le rôle que peuvent jouer les mutuelles, les compagnies d'assurances et les organismes de prévoyance ? Ne fermons pas le débat avant de l'avoir ouvert ! Cherchons de façon pragmatique la solution la plus efficace et réfléchissons aux règles qui, dans tous les cas, feront prévaloir les principes de justice auxquels nous sommes tous attachés. Pour la prise en charge de la dépendance, il nous faut sans doute inventer autre chose que le modèle traditionnel de couverture des risques par la sécurité sociale. Je n'ai pas pour autant parlé par hasard d'un cinquième risque. Mais parce que je souhaitais que la couverture de ce risque, quel que soit le mode de financement, obéisse elle aussi aux principes d'universalité et de paritarisme qui gouvernent les quatre branches de la sécurité sociale. Personne ne devra être tenu à l'écart de cette couverture ou pénalisé, ni à cause de son âge, ni à cause de son état de santé, ni à cause de son niveau de revenus. L'universalité implique l'absence totale de discrimination. Je ne transigerai pas sur ce principe que la loi devra garantir. De la même manière, il va de soi que pour moi les partenaires sociaux ne sauraient être exclus du pilotage, de la surveillance et du contrôle du système de prise en charge de la dépendance, quel qu'il soit. Il faudra y associer d'autres acteurs comme les départements dont le rôle est majeur. Avec la dépendance, c'est donc une nouvelle forme de paritarisme qui doit voir le jour, une nouvelle forme de paritarisme que nous allons inventer. Je le dis aussi pour rassurer ceux qui auraient un doute : je n'ai pas l'intention d'utiliser la dépendance pour privatiser insidieusement l'assurance maladie. Je n'ai pas non plus l'intention de diluer le handicap dans la dépendance. La situation des handicapés dans la société est une priorité et le restera. J'avais promis que l'allocation adulte handicapé serait revalorisée de 25% durant mon mandat. Cette promesse est scrupuleusement tenue. Je me suis de longue date engagé sur la question de la scolarisation des enfants handicapés. Elle sera à l'ordre du jour de la prochaine conférence nationale du handicap, en juin prochain. Si l'impératif d'insertion dans la société est le même pour le malade, le handicapé et la personne que l'âge condamne à la dépendance, la dépendance pose un problème bien différent de la maladie ou du handicap et qui doit donc être abordé en tant que tel. Nous n'avancerons pas dans la confusion. Nous n'avancerons que dans la clarté, en faisant la part des choses, avec des réponses et des financements adaptés pour chaque cas. C'est une ligne de conduite dont nous ne devons pas dévier si nous voulons que le dispositif que nous allons mettre en place soit lisible, soit compréhensible, soit gérable. Que chacun en soit bien convaincu : il n'y a dans ma volonté d'ouvrir le dossier de la dépendance aucune intention cachée, aucune arrière-pensée idéologique ou électorale. Quelle pourrait donc être d'ailleurs cette pensée ? Le débat qui s'ouvre a donc toutes les raisons d'être apaisé et tout entier consacré à la recherche d'un large consensus. Nous avons six mois devant nous. C'est court. Mais nous ne partons pas de rien. C'est un sujet auquel les parlementaires, les conseils généraux, le monde associatif, les partenaires sociaux, les experts ont déjà beaucoup réfléchi. Je pense en particulier aux rapports d'Alain VASSELLE et de Valérie ROSSO DEBORD que je remercie, qui vous ont présentés ce matin les résultats du travail approfondi qu'ils ont effectué. 15/16
  • 16. Les quatre groupes de travail sont mis en place par Roselyne BACHELOT et Marie-Anne MONTCHAMP -je leur fais toute confiance-, réunissent l'ensemble des compétences. Je remercie Roselyne comme Marie-Anne de leur courage et de leur volonté. Elles savent qu'elles ont une obligation de résultat comme chacun d'entre nous. Les débats qui seront organisés au niveau régional éclaireront utilement les travaux des groupes et notre réflexion commune. Ils permettront de bien cerner les attentes de nos concitoyens. Plusieurs institutions apporteront leur éclairage à commencer, Monsieur le Président, par le Conseil économique, social et environnemental. Puis, après la réflexion et l'échange, viendra l'heure de la prise de décision et de la responsabilité. J'ai souvent répété ce mot : responsabilité, mais vous savez, les Français ne nous demandent pas de réussir sur tout, ils savent bien que c'est difficile de diriger un pays. Ils demandent que les responsables que nous sommes, assument leurs responsabilités, qu'ils fassent face quand cela marche comme quand cela ne marche pas. Assumer sa responsabilité devrait être la priorité de chaque responsable. C'est cela qu'attendent de nous les Français. A la lumière de ces travaux, le gouvernement élaborera son projet avant l'été prochain, en vue d'un examen par le Parlement à l'automne. Si à la fin de cette année, mes chers compatriotes, nous pouvons dire à nos enfants : vos retraites seront payées, votre dépendance sera prise en charge, alors nous aurons changé le rapport que notre jeunesse entretient avec l'avenir : elle regardera, notre jeunesse, moins l'avenir comme une menace et davantage l'avenir comme une promesse. Si nous pouvons nous dire que ce que nous avons fait allumera un jour dans le regard perdu de celui qui a tant besoin des autres pour vivre doucement, doucement la fin de son existence une petite étincelle de bonheur et d'espérance, alors nous aurons fait de notre mieux. Et nous pourrons être fiers de ce que nous aurons accompli ensemble. J'ai conscience que ce que je vous demande est difficile, mais vous devez avoir conscience que nous n'avons pas le choix. Cela fait trop d'années que la France attend. Nous sommes là pour résoudre les problèmes, les vrais problèmes : défendre les solidarités, les vraies solidarités. Alors c'est tout de suite, six mois pour en parler, quelques semaines pour prendre la décision et la postérité jugera si, ensemble, nous avons été à la hauteur de nos responsabilités ou pas. Je vous remercie de votre attention. 16/16