1. 103GFP N°3-2016 / Mai-Juin 2016
Les pays membres de l'Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA)
ont adopté en 2009 une nouvelle génération de directives, qui représentent une
évolution comparable en importance à la réforme menée en France avec la nouvelle
Loi organique sur les lois de finances (LOLF) depuis 2001. Les articles consacrés aux
directives UEMOA traitent habituellement de l'internalisation des directives (c’est-
à-dire de l'état d'avancement de leur transcription en droit interne des États) et des
avancées et des bénéfices attendus des directives à un niveau très général. L'auteur
souhaite pour sa part promouvoir une approche originale par la définition de
solutions concrètes aux deux principaux problèmes techniques posés par les
directives en matière de comptabilité de l'État : le basculement du fait générateur
et la nouvelle organisation comptable qui en découle.
Modestes propositions concrètes
de mise en œuvre de la comptabilité
en droits constatés et patrimoniale
en Afrique de l’Ouest*
E
n raison de la politique du FMI en
matière de diffusion des informations
relatives à l’assistance technique1
, l’auteur
n’a pu citer nommément les pays dans lesquels
les pratiques décrites dans l’article ont été
observées. Dans ce cas, l’article mentionne
« dans un pays de la région » ou « dans certains
pays de la région ». Il s’agit néanmoins
toujours de situations réelles rencontrées
dans le cadre de son activité professionnelle
de conseiller à l’Afritac de l’Ouest, donc
couvrant dix pays d’Afrique de l’Ouest. Par
ailleurs, lorsque des informations publiques
étaient disponibles, elles sont utilisées et
leurs sources citées, conformément aux
usages académiques. Enfin, les opinions
exprimées dans cet article sont celles de
l’auteur, et ne doivent pas être attribuées
au FMI, ni à son conseil d’administration, ni
à sa direction.
* L'auteur tient à remercier
Jean-Paul Milot, actuellement
conseiller du Président du
CNoCP, de l'aide précieuse
apportée à la rédaction de cet
article.
1
FMI, Staff Operational
Guidelines on dissemination
of TA Information, 2009.
International
Jean-Philippe VION
Responsable de politiques (Commission européenne, DG DEVCO, unité A4)
Ancien conseiller en gestion des dépenses publiques
Fonds Monétaire International (FMI-AFW1)
Mots-clés: international - Afrique de l’Ouest - directives UEMOA - comptabilité en droits constatés
et patrimoniale - basculement du fait générateur - organisation comptable
2. 104 GFP N°3-2016 / Mai-Juin 2016
La comptabilité en droits constatés et patrimoniale
(CDCP) a véritablement fait son entrée en droit fi-
nancier positif ouest-africain avec la génération de
directives prises à partir de 20092
. La génération
précédente des directives de l’Union économique
et monétaire ouest-africaine (UEMOA) promouvait
en effet un système en base caisse modifiée3
. De-
puis lors et conformément aux orientations définies
par la Commission de l’UEMOA, les États de la
zone se sont engagés dans un processus d’inter-
nalisation des directives. Ce processus est mainte-
nant achevé dans la plupart des pays. La phase sui-
vante consistera à mettre en œuvre concrètement
les directives. L’appropriation par les administra-
tions nationales et l’émergence de problématiques
de fond auront lieu durant cette phase.
Concernant les lignes directrices destinées à guider
les administrations engagées dans la réforme, la
seule étude diffusée véritablement ciblée est une
note technique du FMI4
. Ce document de 2009
d'excellente qualité vise trois buts : démontrer
l’intérêt de la réforme, en détailler les principales
étapes et donner quelques indications de mise en
œuvre. Ce document remplissait parfaitement son
office en 2009 dans une phase de pré-réforme,
lorsqu'il s'agissait de convaincre les acteurs des
bénéfices potentiels de la réforme. Malheureuse-
ment, ce document fait aujourd'hui figure de travail
relativement ancien et ne correspondant plus aux
besoins actuels, car de portée trop générale.
Depuis lors, afin de répondre aux questions des
États, plusieurs tentatives ont été menées, en vue
de produire une sorte de « droit dérivé » ou du
moins des lignes directrices à destination des
États membres. Il est possible de citer parmi ces
initiatives, la rédaction de guides didactiques par
les principaux partenaires techniques et financiers
(PTF) en 2010, parmi lesquels Afritac de l’Ouest
s’était plus particulièrement chargé du guide
dédié à la directive plan comptable de l’État
(PCE). Et plus récemment en 2014, l’auteur à Afritac
de l’Ouest a mené un travail d’analyse critique et
de propositions sous la forme de deux notes tech-
niques autour de la même directive destinées
à être discutées et approuvées par l’instance com-
pétente de l’UEMOA, l’Observatoire des finances
publiques. Mais ces efforts restent insuffisants. En
effet, tous les acteurs de la réforme connaissent
les justifications ou le point d’arrivée de la
réforme, quelques études donnent une vision
générale de la réforme5
, sans descendre au
niveau des modalités concrètes de mise en œuvre,
et il existe de fait un besoin flagrant pour des
articles académiques qui fournissent des pistes
concrètes de mise en œuvre de la CDCP, a fortiori
des pistes adaptées à une région particulière.
En effet, le passage à la CDCP constitue un exer-
cice très technique, rebutant pour les non-spécia-
listes, ce qui peut expliquer le retard relatif pris
en comparaison de la réforme budgétaire et le
soutien parfois mesuré de certains partenaires
techniques et financiers à cette réforme. Le
passage à la CDCP fait surgir de nombreuses
interrogations au moment de sa mise en œuvre,
qui ne peuvent être traitées que par des spécia-
listes, censément des comptables publics, afin de
parvenir au niveau de précision satisfaisant pour
répondre aux légitimes interrogations des admi-
nistrations nationales engagées dans la réforme.
Il importe tout autant de vulgariser le plus possi-
ble ces questions et réponses complexes. De là,
un paradoxe que très peu de productions acadé-
miques, on l’a vu, se sont attachées à dépasser.
La présente étude entend commencer à répondre
à ce besoin. Voilà pourquoi il a paru utile de réflé-
chir à la formulation de pistes concrètes, inspirées
d’une véritable expérience de terrain et plus parti-
culièrement destinées à être mises en œuvre en
Afrique de l’Ouest. Cette étude concernera princi-
palement la zone UEMOA, sans omettre les autres
pays de la sous-région qui se trouvent dans le
périmètre d’Afritac de l’Ouest (Mauritanie, Guinée).
Les questions concrètes de mise en œuvre posées
par une réforme aussi ambitieuse sont innom-
brables. Le champ de cette étude a donc dû être
volontairement limité, pour commencer, à deux
problématiques, identifiées comme les plus impor-
tantes : celle du basculement du fait générateur et
celle de la réforme des structures comptables.
Pour cela, il convient d’analyser quelles pourraient
être les conditions concrètes de mise en œuvre
du basculement du fait générateur (1), avant de
proposer un modèle possible d’organisation
comptable à même de mettre en œuvre la
réforme dans nos pays (2).
2
Notamment la directive
n°07/2009/CM/UEMOA
portant règlement général
de la comptabilité publique
et la directive
n°09/2009/CM/UEMOA
portant plan comptable de
l’État, toutes deux du
26 juin 2009, auxquelles
s’ajoutent les directives
relatives aux lois de finances,
à la nomenclature budgétaire
de l’État et au tableau des
opérations financières de
l’État (directives n°6, 8 et 10).
3
Notamment par la directive
n°05/1998/CM/UEMOA du
22 décembre 1998.
4
Khan A., Mayes S., Transition
to accrual accounting, Fiscal
Affairs Department, FMI,
septembre 2009.
5
La mise en place de la CDCP
doit permettre de fournir une
image plus exhaustive et plus
fidèle du patrimoine de l’État
dans ses différentes
composantes (financier,
matériel). La CDCP sera mise
en place notamment par le
changement de fait générateur
et la tenue d’une comptabilité
fiable et exhaustive des
passifs, ainsi que des
immobilisations et des
matières. Voir sur ce point :
Khan A., Mayes S., op. cit.
International
A. Théorie du basculement du fait
générateur dans les directives
Dans l’environnement mis en place par la directive
n°05/98 précitée, comme dans tout système
classique de finances publiques francophone, la
chaîne de la dépense était linéaire. Les opérations
traditionnelles de dépense comprenaient la phase
administrative, de la responsabilité de l’ordonnateur,
et la phase comptable, sous les auspices du
Le basculement du fait générateur en matière de dépenses :
de la fée informatique à la réalité des faits
1
3. 105GFP N°3-2016 / Mai-Juin 2016
comptable public. Les phases classiques structu-
raient cette chaîne : engagement, liquidation,
ordonnancement pour l’ordonnateur, contrôles et
paiement pour le comptable. Du fait de sa linéarité,
ce système était aisé à mettre en œuvre : le début
de la chaîne appartenait à l’ordonnateur, et la
seconde phase, au comptable. Ce dernier procédait
à l’enregistrement comptable lorsqu’une dépense
avait satisfait aux contrôles prévus dans le Règle-
ment général de la comptabilité publique (RGCP)6
.
Les directives de 2009 sont venues modifier ce
dispositif. La directive portant PCE dispose dans
son article 8 que « Les dépenses sont enregistrées
au moment de la liquidation ». Or, la directive por-
tant RGCP dispose quant à elle dans son article 12
que « Les ordonnateurs prescrivent l’exécution
des dépenses mentionnées au titre III de la pré-
sente Directive. Sous réserve des dispositions
particulières de l’article 11 de la présente Direc-
tive, ils procèdent aux engagements, liquidations
et ordonnancements ». De fait, la fonction comp-
table partagée entre l’ordonnateur et le compta-
ble découle directement de la combinaison des
dispositions de ces deux textes. En conséquence,
l’ordonnateur devra peu ou prou être chargé
d’une partie de l’enregistrement comptable.
Il importe de cadrer les modalités de cette inter-
vention. La liquidation devient un enjeu de qualité
comptable. Or, la qualité comptable demeure
de la responsabilité du comptable. De fait, le
comptable restera garant de la maîtrise de la
chaîne comptable.
Les modalités de la participation de l’ordonnateur
doivent dès lors être définies, opérationnalisées
et une proposition d’organisation formulée en
direction des États membres. Sur ce point crucial
de la réforme, aucun travail d’opérationnalisation
des directives n’a encore été mené à notre
connaissance : aucune ligne directrice concrète
n’a été diffusée en direction des pays de la zone.
B. Propositions de mise en œuvre du
basculement du fait générateur dans
le contexte ouest-africain
Avant de dégager des propositions concrètes en
vue du basculement du fait générateur, il importe
tout d’abord de s’interroger sur la raison du choix
de la liquidation comme fait générateur de
l’inscription comptable. Il aurait semblé plus res-
pectueux des grands principes, et notamment de
celui d’image fidèle, de choisir le service fait. Il
semble que le caractère abstrait de cette option
et la difficulté à l’inclure dans la chaîne de la
dépense aient dissuadé les rédacteurs. Il existe
nécessairement un délai entre le service fait et la
liquidation. Ceci ne pose pas de problème majeur
si ce décalage est faible. Dans le cas contraire,
cela constitue un gisement possible d’arriérés de
paiements. Ce décalage doit être mesurable
grâce aux restitutions informatiques et devenir un
enjeu de qualité comptable.
Le choix de la liquidation semble donc se justifier
car cette opération est moins abstraite que le
service fait. Il importe d’éviter absolument que
cette disposition soit interprétée par les adminis-
trations nationales comme leur laissant une possi-
bilité de ne pas constater les opérations à une date
proche de celle du service fait. La liquidation, dans
sa nouvelle dimension comptable, ne constitue
donc qu’en apparence un acte volontaire, l’Admi-
nistration jouit seulement en la matière d’une
compétence liée. S’agissant de la reconnaissance
des droits des tiers (fournisseurs, créanciers),
l’Administration ne peut décider discrétion-
nairement des modalités (et notamment de la date)
de leur constatation. De fait, la liquidation doit être
comprise comme la matérialité du service fait7
.
Lorsque l’on interroge des praticiens sur la mise
en œuvre de ces dispositions, les réponses sont en
général peu étayées ou vagues, du fait même de
la faible avancée des recherches et productions
sur la phase de mise en œuvre des directives, ainsi
qu’il a déjà été observé. Pour bon nombre d’entre
eux, une solution totalement « informatique » se
dégage. Pour certains, il suffirait simplement de
confier dans le système d’informations comptable
de l’État (SICE), la phase de liquidation au comp-
table. Cette opinion peut être comprise de deux
façons : dans une première acception, la phase de
liquidation pourrait être totalement transférée au
comptable. Cette interprétation serait contraire à
la directive, comme il a déjà été indiqué. L’autre
interprétation consisterait à confier l’écriture
comptable à l’ordonnateur, tout en permettant au
comptable de contrôler la conformité de l’écriture
passée par l’ordonnateur. En effet, le comptable
public a vocation à être érigé en garant de la qualité
comptable des entités publiques et c’est pourquoi
cette solution doit être privilégiée8
.
Pour d’autres, les systèmes d’information déjà en
usage retracent déjà la phase de l’ordonnancement,
du fait de la proximité des deux phases de la
liquidation et de l’ordonnancement, il serait sou-
haitable de se contenter d’assimiler ces deux
phases. Cette dernière vision ne règle pas le
problème qui subsiste de la manière dont devrait
être organisée la prise en compte de l’ordonnan-
cement pour déclencher la saisie en comptabilité
générale de l’État9
. En tout état de cause, les
solutions dégagées doivent être conformes aux
directives et aux bonnes pratiques internationales.
En effet, d’après les directives, la phase de liqui-
dation relève toujours de l’ordonnateur et c’est
6
Au sein de la directive
n°7/2009 portant règlement
général sur la comptabilité
publique, les contrôles
incombant au comptable
public figurent à l’article 26.
En matière de dépenses, ceux-
ci portent sur la qualité de
l’ordonnateur, la validité de la
créance (qui recouvre la
justification du service fait,
l’intervention des contrôles
réglementaires, la production
des justifications et
l’application des règles de
prescription et de déchéance)
et sur le caractère libératoire
du paiement. En matière de
patrimoine, le comptable doit
en outre contrôler la prise en
charge des actifs à l’inventaire
et la conservation des droits,
privilèges et hypothèques.
7
En France, le choix a porté sur le
service fait. La date de réalisation
du service fait (en général vérifié
ou certifié) constituera la date
d’enregistrement comptable.
C’est cet événement qui
déterminera le rattachement.
Voir à ce sujet la norme n°2 du
Recueil des normes comptables
de l’État (CNOCP, Recueil des
normes comptables de l’État,
septembre 2015, p.50) :
« S’agissant de l’État, le fait
générateur se confond avec le
critère de rattachement à
l’exercice. C’est pourquoi la
norme n°2 « Les charges »
définit un critère de rattache-
ment à l’exercice pour les
charges, qui est le service fait ».
8
Cette option figure déjà dans
le GBCP français de 2012. En
zone UEMOA, cette fonction
peut être rattachée aux
grands principes comptables
énoncés dans le Recueil des
normes comptables de
l’UEMOA. Ce recueil figure
pour l’instant dans le Guide
didactique Tome I à la
directive PCE et devrait être
prochainement promu dans
un texte officiel de l’Union.
9
L’ « événement » informatique
de l’ordonnancement est déjà
retracé à titre d’information
dans certains logiciels
comptables dans la sous-
région. Selon cette opinion, il
faudrait donc aménager à la
marge le SI pour faire que
l’ordonnancement impacte la
comptabilité générale de
l’État (CGE). Ce qui n’est pas
le cas aujourd’hui.
International
4. 106 GFP N°3-2016 / Mai-Juin 2016
bien à ce stade que doit intervenir l’enregistre-
ment comptable10
. Il importe donc de définir
un modus operandi qui concilie respect des
directives, efficience opérationnelle et qualité
comptable.
Le dispositif retenu pourrait donc être le suivant.
Tout d’abord, la procédure comptable doit être
revue pour créer une procédure ad hoc qui
permette de mouvementer la CGE au stade de la
liquidation. Cette procédure existe déjà dans
certains pays et se trouve donc parfaitement
maîtrisée11
. Il s’agirait d’instaurer des écritures de
ce type : au stade de la liquidation chez l’ordon-
nateur, Débit 6x « Charges » Crédit 408 « Fournis-
seurs, factures non parvenues », et au stade de la
prise en charge par le comptable, Débit 408
Crédit 401 « Fournisseurs, dettes en comptes »
(par la suite, le paiement donne lieu à l’écriture
finale Débit 401 C 5x « Comptes de trésorerie »,
de manière classique)12
.
Ensuite, le SICE doit être modifié pour être
partagé avec l’ordonnateur13
, afin de permettre à
ce dernier d’opérer la saisie de l’événement
« liquidation ». Cela nécessitera à la fois une
modification fonctionnelle et périmétrique : fonc-
tionnelle, car il faudra intégrer cette nouvelle
fonctionnalité de mouvement de la CGE au stade
de la liquidation et périmétrique, car tout ordon-
nateur qui reçoit des factures doit être en capacité
de mouvementer la CGE, de là dans certains pays
la nécessité de déployer le SICE dans des direc-
tions administratives et financières où il ne l’est
pas encore.
Il est donc possible de conclure sur ce point que
la procédure proposée aurait pour avantage de
concilier le respect des directives (par la pro-
motion de la fonction comptable partagée) et
l’intégrité de la responsabilité personnelle et
pécuniaire du comptable public, qui reste seul
maître de l’écriture finale.
14
Par exemple, la déconcentration
comptable a débuté en avril
2009 en Mauritanie et en 2010
au Togo. Voir par exemple
sur ce point les informations
très complètes sur le site du
Trésor mauritanien :
http://www.tresor.mr/fr/.
15
Les appellations peuvent bien
entendu varier légèrement
d’un pays à l’autre. Nous
utilisons ici les appellations les
plus répandues dans la sous-
région.
16 Cette fonction peut-elle être
partagée (c’est-à-dire
l’ordonnateur peut-il saisir en
comptabilité générale au stade
de la liquidation) si le pays se
trouve toujours sous le régime
de l’ordonnateur unique ? Rien
ne s’y oppose techniquement,
mais les bonnes pratiques
internationales montrent que
l’efficience administrative ne
peut être atteinte que par une
gestion décentralisée, donc
éloignée d’un centralisme total.
17
Khan A., Mayes S., op. cit., p.2.
18
Loi organique n°2001-692 du
1er
août 2001 relative aux lois
de finances.
19
À titre d’illustration en matière
d’organisation comptable, le
CBCM Finances a été installé en
2007 après la disparition de la
Paierie générale du Trésor et de
l’Agence comptable centrale du
Trésor. Il est progressivement
monté en puissance jusqu’en
2011, tandis que s’opérait en
parallèle le déploiement du
nouveau logiciel Chorus.
International
A. Une organisation comptable
datée qui devra être adaptée
L’organisation comptable peut apparaître datée
dans plusieurs pays de la zone, dans la mesure où
le chantier de la déconcentration comptable n’a
été mis en œuvre que récemment et n’est pas
encore totalement achevé14
. En effet, le modèle
d’origine dans la sous-région consistait en un
comptable unique de l’État, dont les fonctions
étaient parfois confondues avec celles de direc-
teur général du Trésor et de la comptabilité
publique (DGTCP)15
, face à un ordonnateur
unique, le ministre des Finances. Ce schéma a
évolué ou est en cours d’évolution dans toute la
zone pour aller vers une organisation comprenant
plusieurs comptables supérieurs spécialisés
(en général, un comptable des dépenses des
ministères, un comptable des dépenses à
l’étranger, coiffant les paieries des ambassades et
des consulats, et un comptable des dépenses
déconcentrées, chapeautant les postes du réseau
national).
Cette déconcentration comptable va bien en-
tendu de pair avec une déconcentration de l’ordon-
nancement. Elle est absolument essentielle à
la réforme dans la mesure où nous avons vu pré-
cédemment que les directives instituent de fait
une fonction comptable partagée16
.
B. Vers une proposition d’organisation-
type : implanter la réforme en
l’adaptant aux spécificités régionales
Les pays francophones ayant déjà mis en œuvre
la réforme de la CDCP, qui ont donc dû mener
une réforme des structures administratives pour
s’y adapter et qui peuvent donc nourrir notre
réflexion, ne sont pas légion. Si l’on se réfère à la
note technique de Khan et Mayes précitée, sur les
sept pays ayant basculé à la CDCP, seuls deux
sont francophones ou partiellement franco-
phones, la France et le Canada17
. Mais le Canada,
pour être en partie francophone n’a pas bâti son
système comptable étatique sur la tradition fran-
cophone, mais sur le modèle britannique dit « de
Westminster ». Il ne reste donc que la France qui
possède à la fois une tradition d’organisation
financière commune avec les pays ouest-africains
et qui ait basculé dans le nouveau système.
Depuis 2001, et le vote de la nouvelle loi orga-
nique relative aux lois de finances (LOLF)18
qui a
lancé la grande réforme budgétaro-comptable,
et singulièrement depuis le « palier 2006 » qui en
constituait le début de la mise en œuvre effective
du point de vue comptable, la France a profon-
dément modifié son système financier étatique19
.
L’architecture des structures comptables en
administration centrale n’a pas échappé à cette
La réforme des structures comptables ou comment dépasser
la complexité intrinsèque de la réforme
2
10
Il importe de noter que le
choix a été fait de privilégier la
liquidation, et non la réception
de la facture par exemple. Ce
choix a un inconvénient : des
arriérés pourraient se former,
dans le cas d’un ordonnateur
peu diligent ou manquant de
probité, qui ne procéderait
pas à la liquidation à réception
des factures et après
constatation du service fait.
11
Par exemple en France
depuis 2012 et la fin du
déploiement de l’applicatif
Chorus.
12
Les comptes et libellés
utilisés ici sont issus de la
directive UEMOA n°9/2009
portant PCE.
13
Dans de nombreux pays de la
sous-région, il existe un
partage de la chaîne de la
dépense entre un SI
budgétaire et un SI
comptable interfacés. Par
exemple, la chaîne
informatique qui comprend le
logiciel SIGFIP comme SI
budgétaire et le logiciel Aster
comme SI comptable.
5. 107GFP N°3-2016 / Mai-Juin 2016
révolution, précisément pour les adapter aux exi-
gences de la réforme. L’évolution des structures
comptables s’est faite essentiellement par la prise
en compte de deux impératifs. Le premier est
celui de la fonction comptable partagée, qui per-
met seule la mise en œuvre effective des droits
constatés. En effet, la constatation comptable au
plus près du service fait, dont la réalisation n’est
connue que de l’ordonnateur, a imposé d’intégrer
ce dernier dans la chaîne comptable, avec des
interactions plus complexes que dans le modèle
classique de chaîne de la dépense20
. Ensuite, le
second impératif repose sur les contraintes infor-
matiques et financières, notamment le prix des
licences du nouvel applicatif Chorus, qui a poussé
à une rationalisation du nombre d’acteurs de la
chaîne de la dépense21
. La réforme a donc amené
à une chaîne de la dépense revue, qui intègre
désormais les services gestionnaires (SG) des
ordonnateurs, les centres de services partagés
(CSP), les contrôleurs budgétaires et comptables
ministériels (CBCM) et parfois un service facturier
(SFACT) au sein des services comptables.
Le rôle de chacun sera explicité dans la partie
consacrée aux acteurs de la chaîne rénovée.
Cesystème,pourefficientqu’ilsoit22
,peutnéanmoins
paraître complexe et sa transposition dans nos
pays sujette à caution. Afin de mener une réflexion
éclairée sur ce point, il importe de garder à l’esprit
certaines données de base (1), puis de formuler
une proposition d’organisation comptable
souhaitable (2).
1. Les principes à retenir avant de
définir l’organisation
Plusieurs données de base doivent être gardées
à l’esprit avant de tenter d’adapter les bonnes
pratiques dégagées à l’international dans la sous-
région. Ces données pourraient être au nombre
de quatre.
L’effet volume est important et a des consé-
quences en matière d’organisation. Les pays
ayant basculé comptent plusieurs dizaines de mil-
lions d’habitants et sont des pays développés. En
termes de volume d’opérations comptables, la
plupart des pays de la sous-région correspondent
donc davantage à l’une de leurs circonscriptions
administratives. Cette donnée aura bien entendu
une influence sur l’organisation des structures
administratives ou la volumétrie que devra traiter
le système d’information.
Dans les pays qui ont basculé, le système d’infor-
mation a joué un rôle tout à fait structurant. Or
il constitue précisément un point faible des admi-
nistrations de la sous-région aujourd’hui et conti-
nuera probablement à l’être, même après la
réforme. Les systèmes ont permis d’alléger une
partie de la complexité des relations du nouveau
système comptable, quand ils n’ont pas forte-
ment influencé son architecture elle-même23
.
La déconcentration budgétaire et comptable
devient une donnée de base du paysage adminis-
tratif. Même si certains pays se trouvent toujours
sous le régime de l’ordonnateur unique de l’État,
comme le Togo, la plupart sont engagés dans le
chantier de la déconcentration comptable. Cette
dernière consiste à créer plusieurs comptables
de l’État, là où le modèle classique dans de
nombreux pays reposait sur un comptable unique
de l’État, le directeur général du Trésor et de la
comptabilité publique ou l’un des hauts respon-
sables de cette direction générale. La déconcen-
tration comptable accompagne bien entendu
la déconcentration de l’ordonnancement, qui
consiste à transférer à chaque ministre la qualité
d’ordonnateur de son budget, là où seul le minis-
tre des Finances était auparavant l’ordonnateur
unique des dépenses de l’État.
De fait, certaines orientations peuvent être retenues,
qui découlent des données de base que nous
venons d’exposer.
La première consiste à affirmer que la réforme
doit permettre une rationalisation des contrôles.
Il s’agit d’une orientation ancienne et légitime, qui
se base sur l’observation empirique que la multi-
plication des acteurs des contrôles n’a aucune
influence sur la qualité de la dépense, et ne
débouche que sur une augmentation du délai
global de paiement24
. Il sera donc utile d’alléger
ou de regrouper les contrôles, afin de fluidifier au
maximum la chaîne de la dépense.
La seconde consiste à présumer qu’un système
simple constituera sans doute un système fiable.
La transposition des bonnes pratiques internatio-
nales doit se faire dans le sens d’une plus grande
simplicité, tant certains d’entre eux peuvent
sembler à la fois performants et complexes. Les
administrations de la sous-région ne doivent pas
être paralysées par cette complexité nouvelle, il
importe donc de garder à l’esprit cet impératif.
2. Propositions d’organisation pour
une chaîne de la dépense rénovée
Il est proposé d’analyser acteur par acteur les futurs
intervenants dans la chaîne de la dépense rénovée
au niveau central pour s’adapter au passage à la
comptabilité en droits constatés et patrimoniale en
Afrique de l’Ouest, puis de détailler le fonction-
nement du système proposé. Les acteurs comptent,
comme il a été indiqué plus haut, les services
gestionnaires et les CSP du côté des ordonnateurs,
etlesCBCMetservicesfacturiersducôtécomptable25
.
Tout d’abord, du point de vue des services de
l’ordonnateur. Les changements doivent viser à
20
Rappelons que, au sens du
Règlement général de la
comptabilité publique de
1962, la chaîne comptable se
composait de deux phases
principales, la première
concernait l’ordonnateur
(avec les actions
d’engagement, liquidation et
ordonnancement) et la
seconde, le comptable (avec
la mise en œuvre des
contrôles lui incombant et le
paiement). La réforme
comptable actuelle a donc
remis en cause le caractère
linéaire de la chaîne, avec des
interactions plus complexes,
comme nous allons le voir,
entre l’ordonnateur et le
comptable.
21
Voir sur ce point Cour des
comptes, Rapport public
annuel 2011, février 2011,
p.272.
22
Les gains en matière de
délais de paiement ont
notamment été
spectaculaires : pour le
CBCM Finances, les délais
sont passés de 50,3 jours en
2008 à 15,9 jours en 2010
(source : CBCM Finances).
23
Cas du Chorus français, dont
le système de licences a
fortement pesé sur
l’architecture choisie pour les
services comptables, voir
note de bas de page n°21 sur
ce point.
24
Voir par exemple sur ce
point : World Bank, Helping
Countries Combat
Corruption, the Role of the
World Bank, september 1997,
p.13 : « Sometimes politicians
and bureaucrats deliberately
put in place policies that
create control rights which
they profit from by selling ».
25
Au niveau central, qui est
l’échelon qui intéresse la
présente étude.
International
6. 108 GFP N°3-2016 / Mai-Juin 2016
augmenter le professionnalisme et la spéciali-
sation des services. Pour cela, les centres de
services partagés (CSP) peuvent être une solution.
Les CSP sont des départements financiers au
service de plusieurs ordonnateurs et qui assurent
en leur nom les fonctions complexes à caractère
financier qui leur sont dévolues (création, contrôle
et validation de l’engagement juridique, création
des fiches d’inventaire, intégration du service fait
dans le logiciel comptable, etc.) à partir des infor-
mations transmises par les services gestionnaires
des ordonnateurs26
. Les CSP se trouvent donc à
l’interface entre les services de base de l’ordon-
nateur (les services gestionnaires) et le comptable,
en l’espèce le SCBCM. Les CSP sont en outre les
services à qui est confiée la saisie dans le logiciel
comptable de l’État des opérations dont ils sont
responsables. C’est donc à leur niveau que se
matérialise la fonction comptable partagée.
Cette évolution serait particulièrement souhai-
table dans la sous-région. En effet, les directions
administratives et financières (DAF) des ministères
produisent parfois des prestations perfectibles. La
présence d’un CSP qui agisse comme un filtre sur
les dossiers de dépense, en s’assurant de leur
qualité avant tout traitement et transfert au comp-
table, aurait sans aucun doute un fort intérêt
pédagogique. Ainsi, les personnels des CSP
devraient être particulièrement choisis pour leur
motivation et leur culture technique financière. De
même, les CSP présenteraient l’avantage de
pouvoir refléter l’organisation des CBCM. Si,
comme il est proposé ici, les CBCM sont organisés
par pools de ministères, il est logique que la struc-
ture des CSP reflète cette orientation, avec un
CSP par CBCM, qui sera responsable pour le pool
de DAF ministérielles concernées.
Les CBCM constituent la troisième catégorie
d’intervenants sur la chaîne. Il s’agirait d’un nouvel
acteur du contrôle, qui se substituerait avantageu-
sement au comptable et au contrôleur financier
existant. Il s’agit en effet d’un département comp-
table ministériel (DCM) et d’un département du
contrôle budgétaire (DCB), placés sous une même
autorité, celle du Contrôleur budgétaire et comp-
table ministériel, chef du CBCM. L’intérêt de la
réforme est triple : des synergies du fait du regrou-
pement, une vision transversale de la chaîne de la
dépense et une rationalisation et une redéfinition
des contrôles. Ce dernier point serait particulière-
ment utile dans nos pays. En effet, l’expérience
montre que les contrôleurs financiers ministériels
(CFM) existants mettent en œuvre exactement les
mêmes contrôles que ceux qui incombent au
comptable public en vertu du RGCP. De fait, mis à
part le moment du contrôle qui est différent (avant
l’engagement et l’ordonnancement pour le CF,
après l’ordonnancement pour le comptable), il
s’agit d’une redondance qui doit être corrigée.
La création des CBCM permettrait donc tout à la
fois d’intégrer le contrôle du CF dans le travail
conjoint mené au sein du CBCM et surtout de
créer un nouveau type de contrôle propre au
DCB, orienté vers la soutenabilité budgétaire, qui
supprimerait la redondance en laissant au comp-
table les contrôles qui lui sont propres. Enfin,
des comptables ministériels existent déjà dans
certains pays de la sous-région et comme nous
l’avons noté ci-dessus, la déconcentration comp-
table fait partie des grandes réformes en cours et
constituera le cadre de référence de la réforme
comptable. De fait, le pas supplémentaire qui
mène au CBCM ne serait pas trop important pour
les pays les plus avancés dans la réforme.
Le service facturier (SFACT) est un centre de traite-
ment et de paiement unique des factures, sous
l’autorité du comptable, pour le compte d’un ou
de plusieurs services. Il s’agit surtout de mettre à
disposition des fournisseurs un « guichet unique »,
qui permette d’éviter la redondance des contrôles
entre l’ordonnateur et le comptable. Dans cette
configuration, les fournisseurs sont priés d’adresser
leurs factures au service facturier, c’est-à-dire au
comptable. Le gain attendu consiste en une réduc-
tion forte des délais de paiement. Dans la sous-
région, d’autres gains peuvent être attendus d’une
telle réforme : tout d’abord, il permettrait d’éviter
la formation d’arriérés chez l’ordonnateur. Des
arriérés peuvent se former à tous les niveaux de la
chaîne de la dépense. Ce type d’arriérés, que l’on
pourrait qualifier d’ « arriérés-tiroirs » est parti-
culièrement pernicieux, dans la mesure où, n’ayant
pas encore fait l’objet d’une saisie dans le système
d’information27 , il est très difficile à identifier ou
à quantifier. Le fait de faire envoyer les factures
directement chez le comptable permettrait de
réduire ce risque d’inefficience administrative.
L’autre bénéfice attendu réside dans la diminution
du risque corruptif. En effet, le fait d’adresser
la facture au comptable permet de rompre le
tête-à-tête entre l’ordonnateur et le fournisseur,
redonnant tout son sens à la séparation ordonna-
teur-comptable. De fait, la principale technique
corruptive à ce point de la chaîne de la dépense
consiste, pour l’ordonnateur indélicat, à faire
attendre le fournisseur en repoussant sans cesse
les opérations dont il a la charge : l’engagement,
l’émission du mandat de paiement, la consta-
tation du service fait, de façon à pousser le four-
nisseur à accepter un « pacte corruptif » (paie-
ment d’une somme d’argent en échange de la
confection de l’acte, qui permet la libération du
paiement). Le fait d’envoyer la facture chez le
comptable déplace le problème en concentrant
une bonne partie du risque chez le comptable.
26
Au sein du ministère des
Finances français, c’est le
logiciel Ficus qui assure le
lien entre services
gestionnaires et CSP. Les CSP
étant habilités à saisir dans
Chorus, qui assure le lien
avec le comptable. Il n’est
pas pour l’instant envisagé de
le déployer au sein des autres
ministères.
27
Il aurait dû théoriquement
faire l’objet d’une saisie au
stade de l’engagement. Mais
il apparaît que la gestion des
engagements est considérée
comme accessoire dans
certains SICE de la sous-
région. Ce point est confirmé
par l’existence de procédures
du type « dépenses
urgentes » dans lesquelles
on fusionne engagement et
ordonnancement et qui
représentent parfois une forte
proportion de l’ensemble des
dépenses dans certains pays.
International
7. 109GFP N°3-2016 / Mai-Juin 2016
La nouvelle organisation ne serait certes pas
encore optimale, mais limiterait le risque28
.
Du point de vue du fonctionnement global du
système, l’évolution par rapport à la situation
actuelle serait importante, mais les performances
envisagées justifient cet effort d’adaptation. En effet,
la chaîne de la dépense actuelle, linéaire et simple,
ne permet pas de mettre en place la fonction comp-
table partagée. Il semble notamment difficile de
donner un rôle à l’ordonnateur en amont du proces-
sus sans bouleverser le fonctionnement actuel.
Au contraire, une chaîne qui comptera les acteurs
décrits ci-dessus et fonctionnera selon un mode
rénové, pourra supporter la réforme. La nouvelle
chaîne partirait donc des services gestionnaires
(SG) de l’ordonnateur, qui bien entendu garde-
raient la maîtrise de la définition des besoins, de
la commande publique et de la plupart des rela-
tions avec les fournisseurs. Ces SG transmet-
traient toutes les informations et pièces justifi-
catives nécessaires au CSP, qui, après contrôle,
saisirait ces opérations dans le logiciel comptable
de l’État. Le comptable opérerait ses contrôles et
procéderait au paiement à partir des informa-
tions, pièces et opérations saisies par le CSP. Un
retour d’informations aurait lieu entre CSP et SG
autant que nécessaire, par exemple pour notifier
un numéro de fiche d’inventaire d’immobilisations
au SG, afin de lui permettre de mettre à jour
l’inventaire physique. Il faut enfin noter que des
flux d’informations doivent être portés par le
système d’information, entre le CSP et le DCB,
par exemple, pour que le DCB puisse exercer son
visa sur l’engagement juridique. Les systèmes
d’information doivent donc permettre de soutenir
une organisation plus complexe, de façon à faci-
liter le travail des utilisateurs.
* * *
En conclusion, il est possible de formuler des
propositions concrètes en vue du passage à la
comptabilité en droits constatés et patrimoniale
dans la sous-région, à la fois en matière de
basculement du fait générateur et de réforme de
l’organisation des structures comptables. En
matière de basculement du fait générateur, nous
avons vu que la liquidation était en fait assimilable
au service fait, et que, pour mettre en place
concrètement ce basculement, la fonction comp-
table partagée constitue la seule solution possi-
28
Dans le même ordre d’idées,
la mise en place d’un délai
global de paiement (DGP)
permettrait de combattre
cette pratique corruptive. En
effet, si le DGP est inclus
dans le logiciel (par une
bascule automatique à
l’étape suivante en l’absence
d’action bloquante), la
pression corruptive mise sur
les fournisseurs serait
moindre, une fois ceux-ci
sensibilisés à l’existence de
ce dispositif.
International
À propos de l’UEMOA, GFP a publié :.
– Le « rééquilibrage » des pouvoirs dans la procédure budgétaire en Côte d’Ivoire par
Pélagie N’Dri-Théoua, n°5/6, 2015, pp.134-138.
– L’institutionnalisation de l’évaluation des politiques fiscales dans l’espace UEMOA :
espoirs et contraintes par Seni Ouedraogo, n°7, 2012, pp.47-53.
– La directive du 26 juin 2009 portant loi de finances au sein de l’UEMOA par
Abdourahmane Dioukhane, n°3, 2012, pp.149-155.
ble, à la fois pour le respect des dispositions des
directives UEMOA et d’un point de vue pratique.
En matière de réforme de l’organisation des struc-
tures comptables, la France a profondément
rénové son système à partir de 2006 et apparaît
comme le seul État ayant à la fois basculé dans la
nouvelle comptabilité et appartenant à la même
tradition financière que les États de la sous-région.
De fait, l’examen critique de l’organisation mise en
place en France a permis de déterminer que ce
système était transposable en Afrique de l’Ouest,
mais que paradoxalement, cette duplication était
souvent souhaitable pour des raisons propres à la
sous-région. Les bénéfices propres à la sous-région
constituent autant de raisons d’espérer en une
appropriation fructueuse du système proposé.
Le point de fragilité demeurera sans doute les
systèmes d’information comptables : les systèmes
actuels assez peu performants, la faiblesse des
moyens de maîtrise d’œuvre technique des admi-
nistrations et surtout le saut technologique en
matière de technique comptable que représen-
tent les directives de 2009, constituent autant de
points d’attention. Enfin, il importe de garder à
l’esprit que ce sont les clients (les administrations
financières nationales et singulièrement les direc-
tions générales en charge de la comptabilité pu-
blique) qui définissent leurs besoins et passent
commande à leurs prestataires de service (les
sociétés informatiques). Un SI bien conçu et per-
formant ne serait guère utile à des fonctionnaires
utilisateurs qui ne maîtriseraient pas le contenu
de la réforme.
De fait, si le rôle des SI rénovés sera cardinal, le
travail de définition de la réforme, de formation
des acteurs, de conduite du changement et
d’appropriation de la réforme d’un point de vue
comptable sera beaucoup plus important en
volume et plus stratégique dans ses conséquences.
Les immenses bénéfices attendus de la réforme
(réduction des délais de paiement, lutte contre la
corruption, production de données comptables
de l’État fiabilisées, éclairage des décideurs
publics sur la réalité du patrimoine de l’État et
sur ses coûts, complémentarité avec la réforme
budgétaire en cours…) justifient un engagement
amplifié des partenaires techniques et financiers
en vue d’assurer le succès d’une réforme certes
technique mais porteuse d’une profonde réforme
de l’État en Afrique de l’Ouest. ■