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Innover
Informer
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Juillet 2014
2
KAMITIS est une société spécialisée en expertise scientifique, en
veille stratégique et technologique et en financement de
l’innovation.
Elle opère principalement auprès des entreprises innovantes mais
également auprès des structures institutionnelles.
KAMITIS réalise pour ses clients des états de l’art technologique,
des études de marchés et des analyses technico-économiques.
Elle les aide également à identifier et à obtenir les meilleurs
financements pour leurs projets.
Lyon
6 Place Bellecour
69002
Pour plus d'informations :
contact@kamitis.com - www.kamitis.com
3
Édito ___________________________________________________________ 4
L’eau : enjeux et stratégies 4
Expertise scientifique _____________________________________________ 5
Des gènes qui influencent le choix des aliments 5
Une nanopuce pour la détection précoce des cancers 5
Haute précision dans l’élaboration de quantum dots 6
Financement _____________________________________________________ 7
Débloquer son CIR par une mobilisation de créance 7
Intelligence économique ___________________________________________ 9
Les grands barrages - marchés immenses et sans risque 9
Focus sur le projet « Grand Inga » 12
Focus ___________________________________________________________ 16
L’or bleu : promesses et enjeux 16
I3 _______________________________________________________________ 23
Advanced Membrane Technology 23
– par DAVID COHEN-TANUGI
Autour des technologies des membranes 25
– par PHILIPPE MOULIN
Quand les réseaux intelligents intègrent le comptage de l’eau 27
– par EDNA NAKATI
La seconde révolution des nanotubes 29
– par PASCAL BOULANGER
Soutenir l’innovation dans le domaine de l’hydraulique 31
– par ADELE WUDTAVEE
Sommaire
4
L’eau : enjeux et stratégies
Nous évoquerons également les aménagements entrepris par l’homme pour répondre à ses besoins en eau, notamment à
travers l’édification des grands barrages, qui mobilisent beaucoup de ressources humaines et financières et qui ont des
conséquences parfois néfastes sur l’environnement.
Dans ce numéro, nos experts abordent plusieurs domaines relatifs à la gestion de l’eau. Ils nous présentent les différents
travaux de recherches qu’ils soutiennent et les innovations qu’ils portent au sein de leurs structures.
David Cohen-Tanugi, chercheur au département Materials Science and Engineering au Massachusetts Institute of
Technology, nous présente ses recherches concernant les technologies des membranes, notamment utilisées pour le
dessalement de l’eau ;
Philippe Moulin, président du Club Français des Membranes (CFM), nous parle du CFM et de son positionnement par
rapport aux technologies membranaires ;
Edna Nakati, System Marketing Manager chez ITRON, nous décrit les efforts entrepris pour la conception et le
développement de systèmes de comptages intelligents ;
Pascal Boulanger, Président fondateur de NaWaTechnologies, nous parle des nouvelles membranes conçues grâce à la
nanotechnologie ;
Enfin, Adèle Wudtavee, Chargée de communication chez INDURA, nous présente les travaux réalisés par ce pôle pour
soutenir l’innovation dans le domaine de l’hydraulique.
Bonne lecture,
Sans eau nous n’avons rien. Pas de vie, pas de culture, pas de société et pas
d’économie. L’eau est une ressource vitale, précieuse et dans certaines régions
du monde, elle est rare et source de maladies et de conflits. Relativement
abondante à l’échelle de la planète, elle reste inégalement répartie, et sa
disponibilité, comme sa qualité, font de plus en plus défaut.
Dans les quelques paragraphes qui suivent, nous verrons qu’au-delà de
l’approche économique, l’Or Bleu touche désormais aux questions de sécurité
stratégique des nations. Les inadéquations entre cette matière vitale et les
besoins de plus en plus élevés, provoquent un énorme déséquilibre social,
économique, culturel et politique, non seulement entre les régions du monde
mais aussi à l'intérieur de certains états.
Par KHALED BAAZIZ
Dirigeant de Kamitis
Édito
5
Des gènes qui influencent le choix des aliments
Les gènes qui contrôlent la perception de l'alimentation
ont été identifiés. Une série de découvertes italiennes
montre en effet que la prédilection pour des aliments se
cache dans l'ADN. Cette découverte est le fruit du travail
d'un groupe de recherche de l'Université de Trieste et de
l'Istituto Burlo Garofalo, toujours à Trieste, coordonné
par Paolo Gasparini. Le résultat a été présenté lors de la
conférence de la Société européenne de génétique
humaine.
Ces découvertes s'insèrent dans le cadre plus général de
la compréhension des liens entre la génétique et la
nutrition, ou comment le génome change la perception
du goût. Elles ouvrent la voie à la création de régimes
personnalisés extrêmement efficaces non seulement
pour la perte de poids, mais aussi pour combattre les
maladies telles que l'hypertension ou le cancer. "Nous
pourrons prévoir par le profil génétique - explique Nicola
Pirastu de l'Université de Trieste- la nourriture que
chaque personne est le plus susceptible d'aimer ou pas.
Une des limites des régimes est due au fait qu'ils sont
souvent liés à des aliments considérés comme n'étant
pas bons, mais grâce à la génétique nous pourrons
comprendre pourquoi une personne n'aime pas les
épinards, par exemple, et trouver des moyens de les
rendre plus "acceptables".
Une nanopuce pour la détection précoce des cancers
Des chercheurs de l'Institut des Sciences Photoniques
(ICFO) ont développé une nano-puce capable de
détecter dans le sang les marqueurs de protéines du
cancer, grâce à un système qui met à profit les plus
récentes avancées en matière de plasmonique, de micro
fluidique, de nano conception et de chimie des surfaces.
La grande majorité des cancers sont détectés au niveau
macroscopique, lorsque la tumeur est composée de
millions de cellules cancéreuses, et que la maladie a déjà
atteint un degré de maturité avancé. Pourtant, certains
indices pourraient signaler la présence de cellules
cancéreuses, y compris aux stades les plus précoces du
développement de la maladie, à condition que l'on soit
capable de les détecter : les marqueurs tumoraux.
Des nanoparticules d'or implantées à la surface de la
puce sont programmée avec un récepteur d'anticorps de
telle sorte qu'elles soient capables d'attirer et de fixer les
marqueurs tumoraux en circulation dans l'échantillon
sanguin. Ainsi, lors de l'injection d'une goutte de sang
dans la nano puce, l'échantillon circule à travers les
micros canaux, et les marqueurs tumoraux présents se
fixent sur ces nanoparticules. Cette fixation provoque
des variations dans ce que l'on appelle la résonance
plasmonique de surface, et qui correspond à l'entrée en
résonnance des électrons libres des atomes d'or et des
photons. Le dispositif surveille ces variations, dont
l'amplitude est directement liée à la concentration et au
nombre de marqueurs tumoraux présents dans le sang
du patient. Cela permet ainsi une évaluation directe du
risque de développement d'un cancer chez un patient
donné, grâce à une analyse dans la pratique aussi simple
qu'une prise de sang.
Expertise scientifique
6
Haute précision dans l’élaboration de quantum dots
Une équipe de recherche composée de physiciens de
l’institut Paul-Drud-Institut für Festkörperelektronik
(PDI) de Berlin, du NTT Basic Research Laboratories de
Atsugi au Japan, et du U.S. Naval Research Laboratory
(NRL) ont réussi à créer de façon parfaitement
reproductible des Quantum dots (appelés aussi «boîtes
quantiques») identiques. Cette avancée majeure,
publiée dans le numéro de Juillet 2014 du journal Nature
Nanotechnology, ouvre la voie à différentes applications
dans des domaines allant de la nanophotonique au
traitement d'information quantique.
La création de Quantum dots identiques exige que
chaque atome soit placé dans un endroit bien précis. Et
c’est en utilisant un microscope à effet tunnel (STM) et
partant d’un cristal d'arséniure d'indium que l’équipe,
menée par le Pr Stefan Fölsch, a réussi son pari de créer
des Quantum dots de façon parfaitement reproductible.
Les avantages d’une telle réalisation (qui permet de
s’affranchir des variations de la taille, la forme ou la
position des atomes) sont nombreux et offrent
notamment l'opportunité d'étudier la physique
fondamentale des boites quantiques et de mieux
comprendre les mécanismes de confinement
nanométrique.
Les états électroniques quantifiés d’un Quantum dot
composé de 22 atomes d’indium.
Image: Stefan Fölsch / PDI
References
1. http://www.ansa.it/scienza/notizie/rubriche/biotech/2014/06/04/scoperti-i-geni-che-influenzano-la-scelta-dei-cibi_f55d49ec-e5b8-
4046-a59d-e892d8bdb3b8.html
2. http://pubs.acs.org/doi/abs/10.1021/nl500574n
3. http://www.rdmag.com/news/2014/06/researchers-create-quantum-dots-single-atom-precision
7
Financement
Débloquer son CIR par une mobilisation de créance
Les modalités de remboursement
En cas de déficit fiscal, ou de résultat ne générant pas
d’IS, plusieurs situations peuvent se présenter :
- Soit le remboursement est immédiat. C’est le cas
pour les PME, start-up et JEI.
- Soit la société constitue une créance qui sera
imputable lors des 3 exercices suivants. Ainsi, le
remboursement par le Trésor public peut avoir lieu
jusqu’à 4 ans après l’engagement des dépenses de
R&D par l’entreprise.
La mobilisation de créance
Les délais mentionnés ci-dessus peuvent être raccourcis
en utilisant une méthode de levée de fonds peu connue :
la mobilisation de créances.
En effet, les articles L 313-23 à L 313-35 du Code
monétaire et financier prévoient que la créance de CIR
peut être mobilisée auprès des établissements de crédit.
L’entreprise cède à l’organisme ses futures créances de
CIR à titre de garantie en contrepartie d’un financement
immédiat par ledit organisme.
Depuis 2013, l’article 35 de la loi de Finance rectificative
a par ailleurs étendu cette possibilité, de cession de
créances, aux organismes de titrisation.
Quels enjeux pour les entreprises ?
Comme présenté sur la figure ci-dessous, les ETI et
Grandes Entreprises ne représentent que 9,3% du total
des bénéficiaires du CIR, mais le montant qui leur est
accordé s’élève quant à lui à plus de 3,5 milliards d’euros
(soit 68,1% du montant total de CIR accordé en 2011
selon BPI France).
Ces entreprises souhaitent également accéder à un
remboursement rapide de leur créance CIR dans le but
de financer leurs éventuels décalages de trésorerie ou de
renforcer cette dernière afin de réinvestir et de
développer leurs activités.
Par ailleurs, cette opération finance le besoin en fonds
de roulement (BFR) sans altérer la capacité
d’autofinancement de l’entreprise, qui pourra prétendre
à un autre emprunt si nécessaire. En effet, la capacité
d’autofinancement est un signal fort quant à la capacité
d’une entreprise à couvrir ses dettes et à honorer ses
échéances en matière d’emprunt. Ainsi, une bonne
capacité d’autofinancement rassure les organismes de
prêt.
Par Alissa KACEM
Chargée de Veille - Kamitis
Le crédit d’impôt recherche (CIR) est un facteur important dans les décisions
stratégiques en termes de planification et de localisation des services de R&D. Il
permet aux entreprises, soit de déduire de l'impôt sur les sociétés une partie de
leurs investissements en R&D, soit de récupérer la partie du CIR non imputable
sur l’IS. Le crédit d’impôt est de 30% sur les dépenses de R&D éligibles jusqu'à
100 millions d'euros et de 5% au-delà.
* La titrisation est une technique financière qui consiste à transférer à des investisseurs des actifs financiers tels que
des créances, en transformant ces créances, par le passage à travers une société ad hoc, en titres financiers émis sur le
marché des capitaux.
Procédure et échéances
Pour s’assurer de la solidité de la créance,
l’établissement bancaire ou l’organisme de titrisation
sollicite les services d’un expert agréé par le ministère de
la Recherche afin de procéder à un audit complet de la
créance CIR.
Le dossier à expertiser doit comprendre :
- Une présentation générale des activités de
l’entreprise
- L’état de l’art de la recherche
- Les incertitudes techniques
- Les travaux menés et les résultats attendus
- Les dépenses de personnel et le justificatif du temps
passé par tâche.
Les délais et échéances de la créance
La créance est monétisée dans un délai maximal de 3
mois après acceptation et validation du dossier par
l’établissement bancaire ou de titrisation.
L’échéance du prêt a lieu 6 mois après la date de clôture
de l’exercice fiscal.
Le prêt peut-être prolongé si l’entreprise ne paye pas
d’IS, ou en tout cas pas suffisamment pour imputer
l’intégralité de son CIR. Le prêt est prolongé jusqu’à ce
que le Trésor public rembourse l’organisme (6 mois
après la déclaration du CIR pour une PME ou 36 mois
pour une ETI ou une GE).
PME
30.9 % (88.5%)
ETI
35.5 % (8.7%)
% des bénéficiaires
sur un total de 14882 entreprises
% de CIR
sur un montant total de 5166 Millions d'euros
Non renseigné
1.1 % (2.3%)
Grandes entreprises
32.6% (0.6%)
Figure : Répartition du CIR
9
Intelligence économique
Les grands barrages - marchés immenses et sans risque
Dans les prochaines décennies, de gigantesques travaux
hydrographiques vont modifier l’aspect de notre
planète. Les barrages en seront les ouvrages les plus
significatifs.
Les barrages sont souvent présentés comme des
solutions au manque d’eau. Ils permettent de soutenir
l’agriculture irriguée, comblant à la fois les besoins en
eau et en nourriture. De plus, Les innovations
technologiques ont permis de développer les nouveaux
usages de l’eau retenue par un barrage : production
hydroélectrique
1
, développement industriel, expansion
urbaine ou encore protection contre les inondations.
Ainsi depuis quelques années, on observe la relance de
construction des grands barrages. L’objectif premier et
l’enjeu majeur reste en revanche l’énergie électrique.
De grandes entreprises françaises telles que GDF Suez
2
et EDF sont bien positionnées sur ce marché. Des
institutions financières nationales et internationales
comme la Coface, la Banque européenne
d’investissement et la Banque mondiale
3
participent aux
projets de réalisation de ces ouvrages.
A l’échelle mondiale, la Chine est le plus grand
constructeur de barrages. Près de la moitié des 50 000
grands barrages de la planète sont chinois et bon
nombre d’entre eux ont été construits au 21
ème
siècle.
Des pays comme le Brésil, le Canada, les Etats Unis
d’Amérique, l’Inde ou le Japon ont également érigé un
nombre imposant d’ouvrages. Mais bâtir de grands
barrages exige la mobilisation d’importantes ressources
financières et humaines.
Mais ce sont surtout les ressources financières qui
freinent le développement de beaucoup de pays et c’est
donc par ce biais que plusieurs investisseurs publics ou
privés parviennent aujourd’hui à intégrer des projets de
grande ampleur. Il est vrai que dans certains pays,
surtout en Afrique, les opportunités sont nombreuses,
les ressources inexploitées et le marché immense.
L’Afrique subsaharienne possède un potentiel
hydraulique capable d’alimenter la totalité du
continent africain en électricité
4
. Un fleuve en
particulier est au centre de tous les intérêts : c’est le
fleuve Congo, le deuxième au monde par son débit
(40.000 m
3
/sec) après l'Amazone. Il présente un
potentiel hydroélectrique estimé à 100.000 mégawatts
(MW), soit plus du tiers du potentiel africain. Près de la
moitié de ces capacités de production énergétique est
concentrée sur le seul site d'Inga (40000 MW) à une
trentaine de kilomètres de la ville portuaire de Matadi.
Le barrage Inga 3, le premier des six barrages formant
le complexe du Grand Inga, est la solution imaginée
pour la région du Katanga. D’une puissance de
4 800 MW, ce barrage servirait à fournir en électricité
l’Afrique du Sud (2 500 MW) et le réseau congolais
5
:
pour les populations (1 000 MW) et les opérateurs
miniers (1 300 MW) dont la production est limitée par le
manque d’énergie disponible (spécialement la région
Katanga
6
).
1
11
L’hydroélectricité est la principale source d’électricité renouvelable. Toutefois, au cours du temps, sa part a un peu diminué, passant de 20% à 15%
aujourd’hui. Car sa croissance n’a pas pu suivre la progression des besoins et que les grands barrages présentent un certains nombre de d’inconvénients :
coûts d’investissements élevés, coûts humain et environnemental.
La Chine est le plus grand producteur d’énergie hydroélectrique. En 2010, le pays a produit, 721 térawatts heure (TWh), ce qui a représenté 17% de sa
consommation électrique. Selon l’Administration Nationale de l’Energie, la Chine a ajouté 29 gigawatts de capacité de production d'énergie
hydroélectrique l'année dernière, pour un total de 278 GW.
Si la Chine, le Canada et le Brésil sont aujourd’hui les plus gros producteurs, trois pays dépendent de l’hydraulique pour leur production électrique : la
Norvège avec 98%, le Brésil avec 80% et le Venezuela avec 73%.
2
Le mégabarrage Jirau construit par GDF Suez en Amazonie, à proximité de la frontière bolivienne.
3
A l’image de la Chine et du Brésil, la Banque mondiale prévoit de financer ce type de structures particulièrement au Congo, Zambèze, Himalaya, etc.
4
Grace aux fleuves de l’Afrique centrale et notamment le fleuve Congo.
5
Exploité par la Société nationale d’électricité (SNEL)
6
Les besoins de l’industrie minière dans la région de Katanga sont estimés à 1 000 MW, et pourrait atteindre 2 300 MW d'ici à 2020.
10
L'exploitation du barrage sera octroyée, sous forme de concession, à un consortium sélectionné sur appel d'offres. A ce
jour, trois consortiums ont manifesté leur intérêt : China Three Gorges Corporation et Sinohydro (Chine) ; Daewoo, Posco
(Corée du Sud) et SNC-Lavalin (Canada); Actividades de Construccion y Servicios ( ACS) et Eurofinsa (Espagne).
Figure 4. Hydroélectricité : les 10 premiers producteurs – données 2011-2012
L’échelle de volume est donnée par les volumes de production en TEP par an.
Une fois terminé, le complexe d’Inga devrait fournir plus
de 25 % de la production mondiale d’énergie électrique
d’origine hydraulique. Le Grand Inga fait d’ailleurs partie
d’un vaste plan d’interconnexion et d'harmonisation des
réseaux africains au cœur des programmes du NEPAD
(Nouveau Partenariat pour le Développement de l’Afrique)
avec peut être même, à terme, une distribution de
l’électricité pour l’Europe. D’ici là, un grand effort reste
encore à faire afin de déployer le réseau électrique et les
infrastructures adéquates tout en assurant la protection
de l’environnement.
En effet, d’autres « réservoirs de mégawatts » comme le
bassin de l’Amazone au Brésil, avec notamment la
construction du barrage de Jirau et celui de Santo
Antonio sur le rio Madeira, principal affluent de
l’Amazone, ont été au centre de différentes polémiques.
Ces ouvrages, très controversés et largement
médiatisés, sont aujourd’hui accusés d’avoir contribué et
aggravé l’impact des inondations meurtrières et
historiques que connaît le rio Madeira. Des études
d’impact environnemental ont été ordonnées par
décision de justice à l’encontre de GDF Suez et le
brésilien BTP Odebrecht.
D’après plusieurs experts en énergétique, l’Afrique peut être autosuffisante en énergie, même si pour l’instant le taux
d’électrification est extrêmement faible (de l’ordre de 30%), et que la majeure partie de la population n’a pas accès à
l’électricité. L’Afrique regorge de ressources : elle a un potentiel hydraulique considérable, notamment au niveau de la
région de l’Afrique centrale.
11
Il a été démontré que le développement de
l’hydroélectricité cause beaucoup de problèmes
notamment au niveau de la protection de
l’environnement, et cela principalement à cause de
l’échec des différents acteurs (promoteurs, autorités,
investisseurs, etc.) à trouver un compromis entre le
développement hydroélectrique, les intérêts des
habitants locaux et la protection de l’environnement.
Malgré ces problèmes, les différentes nations persistent
à vouloir bâtir des barrages. Et pour beaucoup de
gouvernement, le meilleur moyen d’assurer la
croissance économique de leur pays est de mettre un
terme à la pénurie d’électricité et de moderniser les
infrastructures de transport d’énergie.
L’un des arguments en faveur de l’hydroélectricité reste
indéniablement son coût. L’énergie hydraulique est la
moins chère du marché. En effet, malgré leurs coûts de
construction colossaux, les barrages, une fois en place,
présentent très peu de frais de fonctionnement et de
maintenance. De ce fait, les gouvernements qui
cherchent à développer leurs parcs d'énergies
renouvelables, encouragent la construction de barrages.
Afin d’accélérer la construction des barrages et de
stimuler les investissements industriels, la Chine, plus
grand producteur d’énergie hydroélectrique, envisage
de modifier les prix de la production de cette énergie :
début 2014, la Commission des Reformes et du
Développement National (NDRC) a annoncé une
réforme qui vise à augmenter le prix que paient les
opérateurs du réseau pour utiliser les ressources des
centrales hydroélectriques
7
. En effet, le prix de l’énergie
hydroélectrique, plus bas que l’électricité générée par
d’autres formes traditionnelles (y compris le charbon),
est un obstacle pour le développement de
l’hydroélectricité. La commission explique que,
désormais, les prix de l’hydroélectricité seront basés sur
le prix général pour l’achat de l’'électricité ainsi que sur
le coût de construction des centrales hydroélectriques.
Les « grands » barrages ont donc un bel avenir devant
eux. Un avenir qui, comme le passé et le présent, est
caractérisé par des alliances stratégiques finement
établies, des partenariats économiques savamment
orchestrés mais aussi des retombées environnementales
trop peu considérée ou habilement ignorées.
Les besoins en eau ne cessant d’augmenter,
l’importance stratégique des pays disposant de cette
ressource ira croissant. Si les prévisions climatiques se
révèlent exactes et que la répartition de ces ressources
naturelles devient encore plus inégale, les pays riches en
eau vendront de plus en plus souvent leurs surplus à
ceux qui en manquent. Et les nations capables de
« couper le robinet » à d’autres auront alors un pouvoir
énorme. Mais si les pays situés en aval d’un bassin
fluvial sont de loin les plus riches et les plus puissants, le
développement économique des pays châteaux d’eau,
politiquement faibles, pourrait être entravés.
2
27
China's Policies and Actions for Addressing Climate Change (2013). http://en.ndrc.gov.cn/newsrelease/201311/P020131108611533042884.pdf
12
Focus sur le projet « Grand Inga »
Par Camille BORLET
Chargée de Veille - Kamitis
Le fleuve Congo est le plus puissant fleuve du monde
après l’Amazone. Long de 4700km, il sert de frontière
naturelle entre la République démocratique du Congo, la
République du Congo et l'Angola.
Il présente un potentiel hydroélectrique estimé à
100.000 mégawatts (MW), soit plus du tiers du potentiel
africain. Près de la moitié de ces capacités de production
énergétique est concentrée sur le seul site d'Inga
(40000 MW) à une trentaine de kilomètres de la ville
portuaire de Matadi.
D’une puissance de 4 800 MW, ce barrage, appelé Inga3,
servirait à fournir en électricité l’Afrique du Sud
(2 500 MW) et le réseau congolais
1
: pour les populations
(1 000 MW) et les opérateurs miniers (1 300 MW) dont la
production est limitée par le manque d’énergie
disponible (spécialement dans la région Katanga
2
).
3
3
Les besoins
Si les grandes entreprises du Nord et les institutions financières internationales se ruent
vers les fleuves des pays du Sud pour y édifier de gigantesques barrages, aux
conséquences environnementales et sociales lourdes, c'est en raison de la perspective
de créer de nouveaux marchés autour de l’énergie hydroélectrique. Mais quelles sont
les conséquences de ces ouvrages pharaoniques ? Et à qui bénéficient réellement ces
nouveaux barrages ?
1
Exploité par la Société nationale d’électricité (SNEL)
2
Les besoins de l’industrie minière dans la région de Katanga sont estimés à 1 000 MW, et pourrait atteindre 2 300 MW d'ici à 2020.
13
Le projet pharaonique, Inga, est le fruit de la
collaboration de différents acteurs du monde des
finances (Banque africaine de développement, Banque
européenne de l’investissement), du développement
(Banque de développement des Etats de l'Afrique
centrale ; Agence française de développement) ou
encore de l’ingénierie (China International Water &
Electric Corporation ; EDF ; GDF Suez).
En 2013, un accord est signé entre ces mêmes entités
dans le but de construire le projet « Grand Inga », le plus
grand complexe hydraulique du monde, à proximité des
chutes éponymes en République Démocratique du
Congo (RD Congo). La Banque mondiale a donné son
feu vert pour ce projet de grande envergure, qui viendra
détrôner le barrage des Trois Gorges en Chine, qui
détient actuellement le record du plus grand barrage du
monde. Ce plan intègre plusieurs sous-projets : la
construction d’un troisième barrage dans la région,
l’Inga 3 ; ainsi que des travaux de rénovations pour
l’ensemble de ces constructions préexistantes datant
des années 1970, l’Inga 1 et l’Inga 2, qui nécessitent
d'importants travaux de rénovations.
Contexte difficile
L’Afrique subsaharienne souffre d’un déficit durable et
chronique d’énergie électrique : seulement 31 % de la
population a accès à l’électricité, ce qui laisse près de
600 millions de personnes sans accès (selon des chiffres
officiels, 9% de la population congolaise dispose
aujourd’hui d’un accès à l’électricité). Effectivement, le
prix moyen de l’électricité dans cette région du monde
est de 0,12 dollar/kWh, soit deux fois plus élevé que dans
les autres pays en développement. De par les
constructions existantes, complétées par ce projet, le
Congo serait ainsi doté d’un énorme potentiel
hydroélectrique estimé à 100 GW (soit le troisième plus
grand au monde derrière la Chine et la Russie). Cette
source d’énergie renouvelable serait disponible en
grande quantité, rentable grâce à son faible coût de
production (environ 0,05-0,07 dollar/kWh), permettant
ainsi de concurrencer d’autres technologies comme
l’énergie thermique, éolienne et solaire.
Selon Jim Yong Kim, directeur de la Banque Mondiale,
et fervent défendeur du projet Grand Inga: « Le
développement responsable de l’énergie hydraulique peut
fortement contribuer à mettre fin à la pauvreté et à
promouvoir une prospérité partagée sur le continent
africain par la fourniture d’une source d’énergie rentable
pour les ménages et les entreprises et l’amélioration du
bien-être humain. ». La centrale d’Inga 3 fournira un
nouvel accès à l’électricité à sept millions d’habitants de
la région métropolitaine de Kinshasa. Par ailleurs, le
développement de trois projets hydroélectriques de
moyenne puissance permettra à deux millions de
personnes d’accéder à l’électricité dans l’arrière-pays
rural.
Etat actuel du projet Projet « Grand Inga »
14
Cependant, les voix dissonantes avertissent de l’arrivée
d’une catastrophe écologique et sociale : comme
l’indique l’organisation Les Amis de la Terre dans leur
rapport intitulé « A qui profitent vraiment les grands
barrages ? »
3
, de telles constructions alimenteraient
ainsi la corruption et les conflits locaux, laissant
notamment la majorité des Congolais sans électricité
contrairement à ce qui était annoncé par la Banque
Mondiale. Sans compter le nombre important de locaux
à déplacer puisqu’afin d’élever le réservoir d’Inga 3, la
vallée de la Bundi (d’une superficie de 330 km
2
) sera
rayée de la carte, forçant ainsi la délocalisation de ses
habitants vers des villes proches telles que Matadi.
L’association avait notamment profité du Forum
alternatif mondial de l’eau en mars 2012 pour
sensibiliser le public sur les grands barrages, et dénoncer
leurs impacts, ainsi que l’engouement des acteurs
financiers internationaux pour cette forme d’énergie « ni
verte, ni propre ».
Effectivement, il est nécessaire de relativiser la propreté
de cette énergie, dite « non émettrice de CO2 ». Si le
processus de production n’émet pas lui-même de gaz à
effet de serre, la construction de ces barrages, parfois
pharaoniques, implique l’utilisation et le transport de
matériaux qui alourdissent considérablement le bilan
carbone de cette énergie. Par ailleurs, le réservoir du
barrage est constitué en inondant des zones de culture
et de forêts riches en matières organiques. Ces matières
se décomposent ensuite dans le réservoir, émettant de
grandes quantités de gaz (méthane, protoxyde d’azote)
à très fort effet de serre. Au total, les grands barrages
sont responsables de 4% des émissions mondiales de
gaz à effet de serre (soit plus que le secteur aérien).
De plus, suite à la mauvaise gérance sous le régime
Mobutu et la situation de guerre depuis 1997 au Congo,
le barrage Inga 2 et son voisin Inga 1 sont dans un état
de délabrement réduisant leur capacité de production
électrique à 20 %, faute de pièces de rechange. Par
manque d’entretien également, les jacinthes d'eau sont
l'une des principales causes d'encombrement du barrage
et de dégradation de ses turbines. Les centrales
électriques ne parviennent même plus à assurer une
alimentation fiable à la seule ville de Kinshasa, alors que
les projets initiaux prévoyaient une alimentation de
toute l'Afrique australe, justifiant également la
construction de la ligne électrique Inga-Shaba.
Cependant, le potentiel désastre écologique que
représente le projet Grand Inga ne semble pas effrayer
les fonds d’investissement et les autorités locales. La
Banque africaine de développement, la Banque
mondiale et d’autres investisseurs vont prêter
150 millions de dollars pour lancer le chantier, dont la
première phase d’Inga 3 coûtera la somme de
12 milliards de dollars. Soit un investissement
représentant plus du tiers du PIB annuel du RD Congo
(30,63 milliards en 2013).
Alors, pourquoi un tel engouement des organisations,
notamment chinoises, pour ce projet alors qu’elles
détiennent déjà le plus grand complexe hydroélectrique
au monde (le barrage des Trois-Gorges) ?
Figure : Ressources minières du RD Congo4
43
http://issuu.com/amisdelaterre/docs/plaquettebarrages/1?e=0
15
Les principales causes aux intérêts chinois en RD Congo
sont les ressources naturelles dont dispose ce dernier,
en particulier les régions boisées du Bundi ou les
richesses minières de l’est et du sud du pays
(notamment dans le Katanga). En effet, la RD Congo
possède des gisements contenant une cinquantaine de
minerais recensés, même si uniquement une douzaine
de ces derniers est exploitée: le cuivre, le cobalt,
l’argent, l’uranium, le plomb, le zinc, le cadmium, le
diamant, l’or, l’étain, le tungstène, le manganèse et
quelques métaux rares comme le coltan. Le pays recèle
plus de la moitié des réserves mondiales de cobalt, 10%
de celles de cuivre, 30% de celles de diamant et plus de
70% des réserves de coltan (3/4 des réserves mondiales),
un minerai qui entre dans la composition de produits de
haute technologie. De plus, plusieurs gisements d’Or, de
germanium, de manganèse, de bauxite et de minerai de
fer restent encore inexploités.
Consciente du poids stratégique du RD Congo, la Chine
a noué des partenariats d’investissements en
infrastructures contre des concessions minières. Ainsi la
province du Katanga compte aujourd’hui environ 300
entreprises métallurgiques chinoises, la plupart
installées dans la région du Lubumbashi surnommée « la
capitale du cuivre ». En effet, à l’image de la CDM, le
plus gros producteur de cobalt chinois, 50 entreprises
chinoises s’y sont établies, et fondent le minerai pour
l’exportation.
Figure : Les 14 matières premières minérales qualifiées de « critiques » par l’UE - http://globalmetal.fr/metaux-strategiques/
Il est vrai que la Chine est l’un des pays où se trouvent les
principales concentrations de minerais de terres rares.
(Carte ci-dessus). Or, l'impact de l'exploitation de ces
derniers sur l'environnement conduit aujourd’hui à des
conséquences sociales majeures en Chine. Cela pousse
le gouvernement à mieux rentabiliser son monopole
4
pour en équilibrer les effets néfastes et pour mettre en
place les processus coûteux permettant de réduire
l'impact environnemental. Cette situation mène donc la
Chine à explorer d’autres sites et explique en partie sa
présence en RD Congo ainsi que son soutien au projet de
barrage.
5
4
Du fait de l'impact environnemental désastreux, les exploitations de ces minerais se sont arrêtées partout dans le monde, hormis en
Chine où les autorités se sont montrées peu regardantes sur la pollution générée. Ainsi depuis 2010, la Chine assure un quasi-monopole
de la production de terres rares dans le monde.
Etats-Unis
Béryllium 85%
Brésil
Niobium 92%
RD Congo
Cobalt 41%
Afrique du Sud
Platine 79%
Chine
Antimoine 91%
Germanium 72%
Graphite 72%
Indium 58%
Magnesium 56%
Terres rares 97%
Tungstène 78%
16
Focus
L’or bleu : promesses et enjeux
Source abondante…
Différentes estimations des ressources mondiales en
eau ont permis d’évaluer le volume total d’eau sur la
planète à 1,4 milliards de km
3
. L’eau douce représente
environ 2,5% du volume total (35 millions de Km
3
),
dont :
 68,9% (24 millions de km
3
) sont stockés à l’état
solide (dans les calottes glacières et dans la
couverture neigeuse persistante et pour l’essentiel,
piégés dans les glaces de l’Antarctique et du
Groenland.
 30,8% (8 millions de km
3
) se situe sous la terre dans
les nappes phréatiques, les bassins souterrains, les
marécages, etc.
 0,3% soit 105000 km
3
sont réparties dans les lacs, les
rivières, etc.
Figure 1. Ressources mondiales en eau
Par Myriam TISSEAUX
Chargée de développement - Kamitis
Pour les états, l’enjeu de l’eau est un problème d’adéquation entre les besoins et
les ressources disponibles, ce qui induit des questions d’accessibilité et de
partage et se traduit par différentes solutions de gestions du stress hydrique.
Certaines nations ont opté pour des politiques de construction d’importants
ouvrages hydrauliques. D’autres privilégient l’appropriation de terres cultivables
avec une grande capacité d’irrigation.
Quelle que soit l’option retenue, la gestion durable de cette ressource
indispensable s’impose à tous : dans certaines régions du monde, elle est rare et
source de maladies et de conflits car elle touche désormais aux questions de
sécurité stratégique des nations.
97.4 %
2.6 %
Eau salée
Eau douce
STOCKS MONDIAUX
EAU DOUCE
Eaux souterraines
30.8%
68.9%
Glaciers et couverture
neigeuse permanente
0.3%
Lac et reservoirs
17
L’eau facilement accessible (rivières, nappes
souterraines) ne représente que 0,7% du stock d’eau
mondial, à savoir 40 000 km
3
(environ 6 500 m
3
par
habitant et par an). Il est certain que cette quantité
globale disponible couvre les besoins de l’humanité et
suffit à préserver les écosystèmes. En revanche, la
répartition géographique et sociale de cette richesse à
l’échelle planétaire reste inégale. De plus la mauvaise
gestion de l’eau participe à la dégradation de sa qualité
et concourt au stress hydrique et aux conflits que nous
exposerons plus bas.
… mais inégalement répartie 6
Avec 2,6% d’eau douce sur la terre, cette ressource est renouvelable car elle est formée par le cycle de l’évaporation qui
rend cette quantité disponible toujours constante.
A cause de problématiques techniques d’accessibilité, les réserves d’eau douce, essentiellement concentrée dans les
inlandsis de l’Antarctique (28 millions de km
3
) et du Groenland (2,6 millions de km
3
), ne sont pas exploitées pour le
moment. Reste alors les réserves sous-terraines (approximativement 10,5 millions de km
3
) plutôt bien réparties entre les
continents mais souvent difficile d’accès. Les eaux superficielles sont pour une grande partie stockées dans les lacs
(123 000 km
3
)
1
. Selon la banque mondiale 1,5 milliard d’humains n’ont pas accès à l’eau potable et 400 millions survivent
en zone de pénurie.
Projection pour 2050
6
On parle de pénurie lorsque la consommation dépasse 75% des ressources. La situation est déjà préoccupante quand
elle atteint 60%. En 2030, les prélèvements en Europe sont estimés à 12% de la ressource, la consommation à 4.5%,
avec des chiffres contrastés : 32% en Espagne, 8% en France, 2% en Scandinavie. La situation est tout autre en zones
arides (certains pays du Maghreb, du Moyen Orient et de l’Afrique subsaharienne).
Du point de vue administratif, le manque d’eau se définit comme une situation pour laquelle la disponibilité en eau
renouvelable pour un pays ou une région est inférieure à 1000 m3
par personne et par année. En deçà de cette
quantité, la moindre sécheresse peut s’avérer catastrophique.
1
Le volume présent dans les fleuves est estimé à 1 300 km3
, l’atmosphère et la biosphère étant négligeable.
Selon des données recueillies en 2011 (Rapport de l’ONU) :
 Fin 2011, 89% de la population mondiale avait accès à une source d’eau potable améliorée et 55% disposait de
l’eau courante. 768 millions d’individus n’avaient alors aucune source améliorée d’eau potable, dont 185
millions étaient tributaires des eaux de surface pour leurs besoins quotidiens.
 Il existe toujours des disparités frappantes entre les populations résidantes en zone rurale et celles habitant les
villes. Les citadins comptent pour trois-quarts des individus qui ont accès à l’eau courante. Les communautés
rurales abritent 83% de la population mondiale n’ayant pas accès à une source améliorée d’eau potable et 71%
des personnes qui vivent sans assainissement.
Des pays comme le Canada, la Russie, une grande partie
de l’Europe ainsi que de l’Amérique disposent
d’importantes réserves en eau et ne présentent pas de
risque de pénurie. Dans certaines régions des Etats-
Unis, de l’Inde ou de la Chine, le risque de concurrence
est bien présent. L’Afrique Sub-saharienne connaitra
très probablement une situation critique à cause du
manque d’investissements. Enfin, les risques de pénurie
sont élevés pour l’Afrique du Nord, le moyen Orient,
l’Asie centrale, le sud de l’Inde, la Chine du Nord et
l’ouest des USA car les populations utiliseront l’eau à un
rythme plus rapide que le taux naturel de
renouvellement.
18
Figure 2. La situation hydrique en 2050
L’accroissement démographique de la population
mondiale (1 milliard d’habitants en 1800, 6 milliards en
2001 et 8 milliards en 2015) est l’une des principales
causes de pénurie.
En effet le besoin des hommes qui va croissant aggrave
l’inégale répartition des ressources en eau, les conflits
entre les usages et participe à l’altération de la qualité
de l’eau.
LES BESOINS EN EAU 7
Dans le monde, l’eau est utilisée à 70% pour
l’agriculture, à 20% pour l’industrie et à 10% pour la
consommation domestique (alimentation et hygiène).
Avec la croissance continue de la population mondiale et
l’élévation du niveau de vie moyen, des différences
saisissantes et de fortes disparités d’usages sont à noter
en fonction des continents et des régions (Plus de 200
litres/jour en Europe, 500 litres/jour en Australie ou aux
USA…).
7
Mais aujourd’hui, c’est à l’agriculture irriguée que l’on
doit la sur-utilisation d’eau dans le monde : en Inde, en
Chine ou au Mexique, près de 85% de l’eau douce est
consommée pour l’agriculture alors qu’en France, ce
taux est d’environs 20%.
Afin d’assurer la survie alimentaire, il faut environ 1000 litres d’eau pour produire 1 Kg de blé, 400 L pour 1 Kg d’orge,
100 L pour 1 Kg de pommes de terre, 13000 L pour 1 Kg de bœuf ou encore 4000 L pour 1 Kg de volaille. L’enjeu du
futur étant bien entendu de nourrir 9 milliards d’individus en 2050 !
2
L’irrigation intensive peut avoir de graves conséquences sur l’environnement comme le montre l’exemple de la Mer d’Aral en Asie
Centrale. Avec le développement de la culture intensive du coton au Kazakhstan et en Ouzbekistan, l’irrigation a peu à peu réduit les
débits des fleuves Amou Daria et Syr Daria avec des pertes considérables (40% de l’eau prélevée arrivait aux cultures irriguées). Cela a eu
pour conséquence l’assèchement de la Mer d’Aral dont la surface a diminué de 30% depuis 1960.
Ressource abondante
Pénuries structurelles
Pénuries conjoncturelles
Situation critique par manque d’investissement
Non estimé
19
LE CAS DE LA FRANCE
D’après le Service de l'Observation et des Statistiques (SOeS), 28,3 milliards de m
3
d’eau douce ont été prélevés en France
métropolitaine en 2010, et cela pour différents usages : la production d’électricité (61%), l’eau potable (19%), l’irrigation
(11%) et l’industrie (9%).
Figure 3. Prélèvements d’eau douce en France – données 2010
Notons que ces quantités d’eau ont été prélevées à partir d’eaux de surface à hauteur de 78% et d’eaux souterraines à
hauteur de 22%.
Figure 4. Evolution des prélèvements en eau par usage
Si le volume total prélevé dans les ressources en eau baisse depuis les années 2000, les évolutions selon les usages
diffèrent. Concernant l’industrie et les autres usages économiques, les prélèvements diminuent depuis la fin des
années 90, alors que pour la production d’eau potable, la baisse est plus récente. Pour les prélèvements agricoles, les
changements successifs de mode de calcul ne permettent pas de donner de tendance
3
.
8
3
À partir de 2008, l’estimation de certains prélèvements pour l’irrigation a été modifiée et les données ne sont plus comparables.
Source : agences de l’Eau, 2012. Traitements : SOeS, 2013.
Production d'électricité
Eau potable
Agriculture
Industrie
17%
11%
9%
61%
Prélèvements d’eau douce en France en 2010.
20
LE CAS DE L’UNION EUROPEENNE 9
Au niveau de l’Union Européenne, les prélèvements
d'eau par usage varient d'un état à un autre. Cela est dû
aux contextes géographiques et climatiques très variés
dans lesquels évoluent les différents pays, mais aussi à
leurs situations économiques et démographiques très
distinctes.
218 km
3
d'eau sont prélevés dans l'Union Européenne
chaque année
4
. La France, l’Allemagne, l'Italie et
l'Espagne totalisent plus de la moitié des prélèvements
totaux. En termes de prélèvement par habitant, le
Danemark, la Suède, le Luxembourg, les Pays Bas et le
Royaume Uni comptent parmi les pays dont les
prélèvements d'eau par habitant sont les plus bas. Alors
que l'Italie, le Portugal et l'Espagne arrivent en tête
devant l’Allemagne et la France.
Dans certains pays comme le Danemark, le
Luxembourg, ou le Royaume Uni, plus de 40 % des
prélèvements sont effectués pour l'approvisionnement
en eau potable et la consommation domestique. Dans
d’autres pays c’est pour le secteur de l’énergie que les
prélèvements sont les plus importants, notamment pour
la production d'électricité par exemple en Belgique, en
Allemagne, en France et aux Pays Bas. Citons
également les pays du Sud tels que l'Italie, l'Espagne, la
Grèce ou encore le Portugal, où l'agriculture est plus
consommatrice en eau.
Ce n’est pas le cas dans les pays d'Europe du Nord : La
Finlande et la Suède, par exemple, prélèvent très peu
d'eau pour l’agriculture, mais énormément d’eau pour
l’industrie (notamment pour la production de cellulose
et de papier).
Globalement, l'Europe consomme chaque année 180
km
3
d'eau dont 80 km
3
en Europe de l'Ouest. La
demande en eau par habitant y est également plus
faible comparée à l’Asie. Cette relative faiblesse résulte
essentiellement des pratiques agricoles mieux maitrisée
(cultures moins gourmandes en eau, irrigation moins
utilisée…).
9
ET DANS LE MONDE
Au cours du siècle dernier, la consommation d'eau dans
le monde a été multipliée par six, soit deux fois plus vite
que le taux de croissance démographique. Cela dit, la
croissance de la demande en eau varie fortement d'un
pays à l'autre. Elle dépend de plusieurs facteurs comme
le développement économique des pays ou le nombre
de leur population ainsi que de la ressource elle-même.
On constate que les pays les plus consommateurs d'eau
l’utilisent d'avantage pour l'irrigation et l'industrie.
»» Selon la FAO (Food and Agriculture Organization),
en 2012, le volume d'eau douce prélevé au niveau mondial
était de 3 890 km3 (représentant 555m3 /habitant/an).
Les prélèvements d'eau sont fortement concentrés
puisque les cinq pays les plus utilisateurs cumulent 60 %
du total mondial. L'importance de leur population ainsi
que les activités économiques du pays (agriculture et
industrie) expliquent cette prédominance.
 Chine (1,240 milliard habitants) 525 km
3
/an
 Inde (970 millions habitants) 500 km
3
/an
 USA (270 millions habitants) 467 km
3
/an
 Pakistan (146 millions habitants) 155 km
3
/an
 Russie (146 millions habitants) 77 km
3
/an
En termes d’usages, l’agriculture arrive en tête. En effet,
environs 70% de l'eau prélevée est utilisée pour
l'irrigation. Ce taux peut atteindre 90% dans certaines
régions du globe. Les usages industriels représentent
quand à eux 20%, les usages domestiques 10%.
De nos jours, l’agriculture est donc l'activité humaine
utilisant la plus grande quantité d'eau. Elle est
majoritairement consacrée à l'irrigation des cultures
6
.
En réalité, c’est avec près de 20% de terres irriguées (310
millions d'hectares) dans le monde (5% en Afrique et
35% en Asie) que l’on produit près de 40% de
l'alimentation mondiale.
4
Source Eurostat
5
Source : World Resources Institute 2011
6
Les terres irriguées assurent une productivité 2,7 fois supérieure à celles des terres arrosées par la pluie. Plus des deux tiers des terres
irriguées se trouvent en Asie dans les territoires à forte densité de population où la forte croissance démographique a justifié une
intensification de la riziculture. Actuellement, sur 1,5 milliard d'hectares de terres cultivés, on compte 310 millions d'hectares irrigués.
Depuis 1960, les surfaces irriguées ont environ doublé dans le monde et le recours à l'irrigation va devenir de plus en plus indispensable
dans l'agriculture pour répondre à l'augmentation des besoins alimentaires et nourrir les 9 milliards d'individus qui peupleront la terre en
2050. Source Aquastat – Base de données : http//fao.org/nr/aquastat– FAO 2012.
21
Les variations en fonction des régions sont très
importantes, en raison du climat, des techniques
d'irrigation utilisées, du type de cultures et du
rendement des récoltes. 32% des prélèvements vont à
l'agriculture en Europe contre 84% en Afrique et 88% au
Moyen-Orient. Tous ces chiffres traduisent le rôle très
important de l'irrigation et ses enjeux stratégiques
croissants. Mais les secteurs de l’industrie et de l’énergie
ne sont pas en reste. A l’échelle mondiale, les
prélèvements d'eau à des fins industriels et énergétiques
représentent près de 800 km
3
/an, soit 20% des
prélèvements totaux. Dans les pays d’Europe ou
d’Amérique du Nord, où l’usage industriel et
énergétique est dominant, plus de 60 % des
prélèvements en eau y sont destinés. Ces mêmes
prélèvements sont en constante hausse dans les pays du
Sud dont l’essor économique s'accentue.
Enfin, l'eau domestique ne représente qu'un dixième des
prélèvements au niveau mondial. Ce taux varie de
quelques pour cent dans les pays les plus pauvres et
n’atteint que 20% pour certains pays développés.
QUALITE DE L’EAU
A l’échelle mondiale, l’approvisionnement en eau
potable n’est pas homogène : dans les pays d’Europe et
les pays développés cet approvisionnement est
satisfaisant. Mais dans beaucoup de pays
(particulièrement en Asie et en Afrique) l’eau n’est pas
toujours potable. Les risques pour la santé sont liés à la
présence d'agents infectieux, de produits chimiques
toxiques ou encore à des dangers de nature
radiologique. Louis Pasteur avait affirmé que « nous
buvons 90% de nos maladies ». En effet, l’eau non
potable cause diarrhée, choléra, fièvre typhoïde, et dans
beaucoup de cas entraine la mort.
Ainsi, d’après l’Organisation Mondiale de la Santé :
 près d’un milliard de personnes n’ont pas accès à une source d’approvisionnement en eau améliorée.
 chaque année, deux millions de décès sont attribuables à l’insalubrité de l’eau et à l’insuffisance de
l’assainissement et de l’hygiène.
 plus de 50 pays notifient encore des cas de choléra à l’OMS.
 l’utilisation croissante des eaux usées en agriculture offre certes des possibilités de revenu, mais est également
associée à des risques importants pour la santé publique.
Du fait de la pollution, l’eau naturelle n’est pas
directement consommable. Avant d’être redistribuée,
elle doit être analysée et traitée.
La présence de polluants chimiques dans les
écosystèmes aquatiques est largement documentée.
Les pouvoirs publics ont déployé un certains nombre de
plans pour suivre et maîtriser les contaminations. La
recherche dans ce domaine est très active. Les
connaissances sur la bioaccumulation et les transferts de
contaminants dans les systèmes aquatiques ont permis
de définir des seuils de gestion des eaux et des
sédiments contaminés (PCB, Composés perfluorés,
alkylphénols, etc). Aujourd’hui, des biomarqueurs
permettent aisément de détecter et de caractériser les
effets des contaminants chimiques.
Pour autant, les questions adressées à la recherche
restent nombreuses. Parmi ces interrogations, celles
relatives aux contaminants dits « émergents ».
En effet, des inquiétudes sont apparues concernant la
présence de certains polluants dans l’eau potable et les
écosystèmes aquatiques. Ces substances sont soit de
nouvelles molécules (récemment synthétisées), soit des
molécules que l’on vient seulement d’être capable de
détecter et d’analyser. Du fait des lacunes concernant le
comportement de ces polluants « émergents » dans
l’environnement (eaux, sols, organismes vivants, etc.) et
leur impact sur la santé et la vie des écosystèmes, de
nombreuses questions restent adressées à la recherche.
D’après l’OMS une eau est considérée comme « potable » ou « salubre », dès qu’il est possible de la consommer sans
risque. Elle répond donc à des normes microbiologiques, physiques et chimiques très précises.
22
Les résidus pharmaceutiques représentent également
un défi majeur pour la recherche scientifique. Ils sont
aujourd’hui omniprésents dans notre environnement
(eaux profondes, eaux de surfaces, eaux de boisson,
mais aussi dans les organismes vivants : poisson,
oiseaux, etc.). Ces résidus proviennent de l’industrie
pharmaceutique (usines de formulation ou de
conditionnement), des élevages (dont les rejets sont
souvent chargés en résidus pharmaceutiques) mais
également des effluents des stations d’épuration
urbaines
7
. Une gestion optimisée des effluents
hospitaliers doit donc être développée et l’identification
de ces résidus ainsi que l’étude de leur potentiel nocif
(notamment écotoxicité) doivent être réalisés.
GESTION DE L’EAU
10
Le prix de l'eau dépend de différents facteurs, et
particulièrement de celui de la qualité de la source dans
laquelle l’eau est puisée. Le prix dépend également de la
densité de la population, de la performance du réseau
de distribution et des choix des collectivités (niveau de
service proposé aux consommateurs, investissement
dans les infrastructures, etc.).
Le marché français de l’eau et de l’assainissement est
dominé par les groupes français Veolia Environnement
et Suez Environnement. Ces deux groupes réalisent à
eux deux près des deux tiers du chiffre d’affaires
sectoriel. Bien positionnés auprès des collectivités, ils
assurent la production, la distribution et
l’assainissement de l’eau. Ils interviennent également
dans l’entretien et la modernisation des réseaux.
Le marché français étant atone, les grands groupes tels
que Veolia Environnement et Suez Environnement ont
opté pour une croissance à l’international. Suez
Environnement a ainsi signé en juin 2013 un contrat de
28 millions d’euros avec la commune tchèque de
Benešov. Le contrat portait sur la gestion durant 10 ans
10
des services d’eau et d’assainissement de la
municipalité. Veolia Environnement a pour sa part
décroché, en avril 2012, un contrat (36 millions de
dollars) portant sur l’optimisation de la performance des
services de distribution et d’assainissement d’eau avec
les autorités de New York. En mai 2013, le groupe a
remporté un contrat (130 millions d’euros) pour la
construction de trois unités de traitement des eaux
brutes et usées pour l’usine brésilienne du groupe
papetier chilien CMPC.
Les impératifs économiques, le changement climatique
ainsi que les pénuries en eau dans certaines régions du
monde ont initié le recours à des solutions alternatives :
récupération des eaux de pluie avec double circuit
ménager, récupération de l’humidité et du phénomène
de condensation (Warka water), captation des nuages
en altitude, transfert de l’eau par bateaux citernes, etc.
Cela dit les moyens les plus répandus restent
l’édification de structures de traitement ou de rétention
d’eau (tels que les usines de traitement et de
dessalement ou les barrages).
7
Il est aujourd’hui établi que les stations d’épuration sont globalement peu efficaces pour le traitement des résidus pharmaceutiques.
En particulier, ceux issus de l’activité hospitalière.
23
I3
ce sont trois interrogations pour échanger avec un expert sur l'environnement de
l'entreprise.
Nous nous intéressons dans cette édition à cette ressource vitale qu’est l’eau. Nos invités aujourd’hui sont David
Cohen-Tanugi, chercheur au département Materials Science and Engineering au Massachusetts Institute of
Technology ; Philippe Moulin, président du Club Français des Membranes ; Edna Nakati, System Marketing
Manager chez ITRON ; Adèle Wudtavee, Chargée de communication chez INDURA et PASCAL BOULANGER, Président
fondateur de NaWaTechnologies. Ces experts nous présentent les travaux de recherches qu’ils soutiennent et les
innovations qu’ils portent au sein de leurs structures.
Kamitis: The future security of freshwater resources around the world is of increasing concern. Can you present us
your research concerning desalination?
D. COHEN-TANUGI: I am using nanotechnology to make
water desalination more energy-efficient, accessible and
economical. While we traditionally had access to
groundwater and surface water (e.g. rivers) to meet all
our needs, these resources are becoming increasingly
scarce as well as polluted. As a result, many countries
are starting to look at desalination, which involves
obtaining fresh water from a saltwater source like the
ocean. In the past, only desert countries such as Saudi
Arabia relied on desalination, but nowadays cities as
diverse as Mumbai, Beijing and San Diego are also
resorting to large desalination plants to meet their
water needs.
I am in the fourth year of my Ph.D. studies in the
Department of Materials Science & Engineering at MIT.
Together with my adviser, Professor Jeffrey Grossman,
and two fellow graduate students, Shreya Dave and
Brendan Smith, we are working to design, produce and
test new membranes that would desalinate water more
efficiently. In 2012, we predicted using computer
simulations that a material called nanoporous graphene
would reject salt thanks to sub-nanometer pores while
letting water flow at 1000 greater permeability than
conventional polymer membranes. This prediction was
followed by an avalanche of new interest in water
purification applications among physicists and materials
science, which is very good news.
Since 2012, we have made significant progress in
understanding how such a membrane would work and in
exploring the best pathways to produce this material
and fully leverage its benefits for society.
I3
ADVANCED MEMBRANE TECHNOLOGY
DAVID COHEN-TANUGI
Ph.D. Candidate
Department of Materials Science and Engineering, Massachusetts Institute of Technology,
Cambridge, Massachusetts 02139, United States.
CONTACT: DCTANUGI@MIT.EDU
http://www.mit.edu/~dctanugi
” I am using nanotechnology to make water desalination more energy-efficient,
accessible and economical.”
24
Kamitis: You also studied nanostructures like graphene for water desalination. Are nanomaterials a strategic lever for
next generation membranes for clean water technology?
D. COHEN-TANUGI: I believe we need several revolutions
in the water sector in the 21st century. We are going to
need important changes in the policy, economics and
public behavior regarding water production, pricing and
usage. At the same time, I believe nanomaterials have a
critical role to play in the future of clean water.
Since my work has been focused on nanomaterials for
advanced membranes, I can talk about this opportunity
more specifically. My group has shown that a
desalination membrane that is just three times more
permeable to water would allow for up to 15% less
energy consumption. This goal is within reach of
contemporary materials science, especially because the
academic fields of materials science and applied physics
have traditionally ignored clean water applications. In
other words, I believe there is a lot of low-hanging fruit
for nanomaterials science to improve the clean water
sector.
Kamitis: Your research suggest that advances in membrane science will continue to make desalination increasingly
competitive as an option for fresh water supply in coming decades. In your opinion, what are the issues and
challenges that membrane technology can meet tomorrow?
D. COHEN-TANUGI: Innovative membrane technologies
will continue to enable greater efficiencies in existing
water applications, and they will also enable new
applications altogether. In my opinion, the biggest
challenges that membrane technology can meet
tomorrow are the treatment of highly polluted waters,
for example from shale gas production with hydraulic
fracturing, as well as continuing to fill the growing gap
between supply and demand for fresh water around the
world.
More innovations are still needed, however. Membranes
today are still too prone to organic fouling and to
mineral scaling, leading to lower fluxes, shorter
membrane lifetimes, and much more complex
pretreatment steps than would be needed otherwise.
RO membranes are also insufficiently selective to
uncharged species like boron.
Overall, the future of membrane technologies is bright.
The field of nanotechnology has much to contribute to
the development of next-generation membranes, and
greater R&D initiatives around membrane technology
worldwide can help us innovate towards a better,
cleaner tomorrow.
25
Kamitis : Vous présidez le Club Français des Membranes. Ce club est un lieu d’échange entre les acteurs académiques
et industriels, et joue un rôle majeur dans la promotion des procédés membranaires. Quelles sont les réalisations de
ce réseau ?
Philippe Moulin : Créé en 1996
*
, le Club Français des
Membranes (CFM) est, depuis octobre 2011, une
association à but non lucratif régie par la loi de 1901. Il
regroupe les compétences nationales dans le domaine
des procédés membranaires. C’est un lieu privilégié
d’échanges entre chercheurs, industriels et acteurs des
centres techniques. Les membres du club apportent une
complémentarité d’approches et de compétences au
service de la promotion de ces technologies :
fabrication, développement, génie des procédés,
ingénierie, utilisation...
L’objectif du CFM est de favoriser :
 l’utilisation des membranes et des procédés
membranaires, de les promouvoir et les rendre
accessibles à tous ;
 l’échange entre les différents acteurs
académiques et industriels de la communauté
française et francophone des membranes et
procédés membranaires,
 les actions de formation et de communication
concernant la recherche et les développements
dans ces domaines,
 les actions visant à impliquer les membranes
dans le secteur industriel.
Le club regroupe aujourd’hui un peu moins de 200
adhérents dans le domaine académique et industriel (les
laboratoires et les industriels qui travaillent dans le
domaine des membranes, fabricants de membranes,
utilisateurs, …).
Le CFM est organisé en groupes de travail (GTs)
**
. Ce
sont des lieux d’échange et de réflexion sur les
problématiques des membranes, les procédés
membranaires, leurs atouts et leurs limites dans les
intégrations industrielles. Ces groupes ont un rôle
d’information mais également de formation. Des
actions ciblées peuvent être déployées en support
(rédactions de documentations spécialisés, cahiers de
vulgarisation, ouvrages de synthèses, animations de
journées thématiques ou colloques).
Chaque groupe de travail organise à minima une journée
thématique par an, où des intervenants viennent
présenter des retours d’expérience. Ces rencontres sont
suivies de discussions sur les innovations et les nouveaux
concepts relatifs aux membranes. Les prochaines
journées déjà programmées porteront sur, pour la
première, la modélisation moléculaire et filtration
membranaire (un domaine mal connu encore
aujourd’hui). La deuxième journée est consacrée à la
caractérisation des membranes, avec notamment des
intervenants qui développent des techniques de
caractérisation ou qui sont confrontés à des
problématiques de caractérisation de membranes ou de
colmatage.
Le CFM est un lieu d’échange et de partage très
dynamique. On y trouve par exemple des offres
d’emploi, des retours d’expérience concernant les
congrès et les salons, les laboratoires partenaires y
présentent les résumés des thèses soutenues afin de
donner un aperçu aux industriels des dernières
recherches effectuées et de créer.
Autour des technologies des membranes
PHILIPPE MOULIN
PRÉSIDENT DU CLUB FRANÇAIS DES MEMBRANES
CONTACT : philippe.moulin@univ-amu.fr
06 67 14 14 18
PHILIPPE MOULIN
PRÉSIDENT DU CLUB FRANÇAIS DES MEMBRANES
CONTACT : philippe.moulin@univ-amu.fr
06 67 14 14 18
*
Le Club Français des Membranes a été créé conjointement par l’Agence de l’Environnement et la Maîtrise de l’Energie (ADEME),
le Commissariat à l’Energie Atomique (CEA), le Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), l’Electricité de France (EDF), l’Institut
Français du Pétrole (IFP) et l’Institut National pour la Recherche Agronomique (INRA).
**
Les différents groupes de travail sont : GT eau effluent et fluides alimentaires, GT Modélisation, GT Développement durable, GT Chimie
et Energie, GT Formation, GT Analyse, Caractérisation et Normalisation.
” Les membres du Club Français des Membranes apportent une complémentarité
d’approches et de compétences au service de la promotion de ces technologies.”
26
Kamitis : Quels constats faites vous concernant le marché des membranes en France, en Europe et dans le monde ?
P. Moulin : Les technologies des membranes sont
aujourd’hui matures. Elles existent depuis longtemps, et
nous avons des retours d’expérience depuis plusieurs
décennies sur des procédés comme, par exemple, la
dialyse pour l’insuffisance rénale ou la production d’eau
potable à partir d’eau de mer ou d’eau douce. Le secteur
des procédés membranaires connait un taux de
progression de 12% par an. Concernant les domaines
relatifs au traitement de l’eau, ce taux atteint plus de
20% par an. Dans le contexte de crise que nous vivons
aujourd’hui au niveau mondial, on peut dire que le
marché se porte très bien.
Notre pays bénéficie d’un potentiel de recherche très
important et compte des utilisateurs stratégiques dans
différents secteurs notamment en environnement
(Veolia et Suez) et en agroalimentaire, où les
membranes sont incontournables (Filtration du lait).
Au niveau européen, des efforts restent à faire afin de
développer et coordonner les connexions entre les
actions européennes et les pôles de compétitivité
français.
Philippe Moulin mène des travaux de recherche au sein de l’équipe procédés membranaires du laboratoire de Mécanique, Modélisation
& Procédés Propres. Il nous présente cette activité dans les quelques lignes qui suivent.
Les recherches menées au sein de l’Equipe Procédés Membranaires (EPM) du laboratoire de Mécanique, Modélisation & Procédés Propres ont pour objectif
d’optimiser les procédés membranaires par une meilleure compréhension des mécanismes mis en jeu. Les travaux concernent principalement le traitement
des effluents et leur réutilisation, la production d’eau potable ou d’eaux purifiées et la purification et la production de molécules à hautes valeurs ajoutées. Le
développement de nouveaux tests d’intégrité, d’unités industrielles (i) de traitement d’hydrocarbure (ii) de recyclage d’effluents en électronique, (iii) de
fabrication de médicaments à domicile (iv) de production d’eau potable pour les marins pompiers ou (v) de dessalement d’eau de mer par énergie solaire sans
batterie sont autant d’exemples qui illustrent la pertinence et l’originalité de ces travaux.
Les activités de recherche de notre équipe sont divisées en cinq axes de recherche :
 Bioréacteur à membranes : ce procédé, qui a connu une forte croissance en France et en Europe ces dernières années, présente l’avantage
d’atteindre une haute qualité de traitement des eaux usées. Il est particulièrement adapté pour répondre à des exigences de qualité élevées,
demandées comme pour les effluents industriels ou émanant des hôpitaux.
 Caractérisation de membranes et Eau potable : cet axe de recherche s’inscrit dans une volonté de développement des procédés membranaires qui
est limité par deux phénomènes directement liés au dimensionnement et à l’exploitation des procédés (le colmatage et le vieillissement des
membranes). L’objectif est de mettre en place une démarche de caractérisations optique, microscopique et dynamique à différentes échelles afin
d’expliquer les dérives des procédés (chute de flux, perte de sélectivité...). En parallèle de nouveaux procédés de production d’eau potable ou d’eaux
ultrapures sont développés.
 Industrialisation de procédés et CFD (Computational Fluid Dynamics) : Il s’agit ici de limiter le prototypage par l’utilisation de l’outil numérique qui
permet de mieux appréhender les aspects fluidiques tout en prenant en considération les échelles nanométriques des pores, millimétriques des
membranes et métriques des modules. Les champs de pressions et de vitesses dans des modules membranaires industriels de production d’eau
potable ainsi déterminés ont permis de montrer l’hétérogénéité des rétrolavages sur ces modules.
 Propriétés de transport et métrologie : L’objectif est de relier les propriétés de transport en écoulement aux propriétés géométriques des structures
des membranes (taille de pore, porosité, tortuosité…). Les très petites échelles auxquelles nous sommes confrontés (micro à nano) limite les
disponibilités de données expérimentales à l’échelle locale et nécessitent par conséquent de développer de nouvelles méthodes de mesures. Un
intérêt particulier est apporté à l’appropriation de nouvelles techniques métrologiques de pointe au domaine des membranes.
 Intégration de procédés membranaires : cet axe est consacré à l’intégration de chaînes de procédé membranaire dans des chaînes de production ou
des chaînes de traitements. Dans le cas du traitement des effluents, ces recherches portent sur l’étude des propriétés de transport dans les milieux
poreux, en termes d’écoulement poreux ou de transfert de masse, etc. Les procédés membranaires se placent clairement dans une stratégie de
valorisation de matière, de concentration d'effluents et de recyclage des effluents afin de retarder le moment où la valorisation énergétique des
effluents sera la seule issue. La diffusion de procédés membranaires industriels à visée curative passe par des progrès sur trois points essentiels: (i)
Envisager des couplages de procédés, (ii) Optimiser la consommation énergétique, (iii) Améliorer la durée de vie des membranes afin de limiter les
déchets et coûts induits.
Les problématiques scientifiques évoquées sont complexes et multiples. Dans ce cadre, les activités de recherche sont pour la majorité en partenariat avec des
industriels (contrat de collaboration de recherche). A partir d’une idée développée au laboratoire (test d’intégrité – eau potable) ou d’une problématique
industrielle (élimination de COV dans des effluents industriels gazeux ou liquides), il s’agit de développer de nouveaux procédés et de mettre au point de
nouvelles membranes.
27
Kamitis : Itron est le leader mondial du marché des compteurs d’eau pour tout ce qui concerne les technologies de
comptage et de transmission de données. Pouvez-vous nous présenter votre positionnement sur ce marché ?
E. NAKATI : Quand on regarde la situation de la plupart
des Distributeurs d’Eau dans le monde, nous constatons
qu’il s’agit d’une industrie qui subit encore avec un
niveau de pertes qui dépassent largement 20%. La
moyenne mondiale est de l’ordre de 34% (Source : GWI
– Global Water Intelligence/ WBD – World Bank
Database). C'est-à-dire que environs 0.4 milliard de m
3
/
jour d’eau (sur un total de 1.15 milliard des m
3
/ jour) sont
perdus avant d’être livrés chez les consommateurs.
Parmi ces 34%, il y a ce que nous appelons les pertes
physiques (ou réelles, à savoir les fuites d’eau sur le
réseau avant le compteur chez le consommateur) et ce
que nous appelons les pertes apparentes ou
commerciales, liées surtout à l’imprécision des
compteurs (effets d’usures accélérés, fraudes de la part
des consommateurs, …)
Le tableau ci-dessous représente le modèle préconisé
par l’International Water Association pour le calcul du
Bilan d’Eau (ou, Rendement du Réseau d’Eau). Les
parties en rouge sont celles où nous sommes fortement
impliqués.
Notre offre consiste à réduire au maximum les pertes
liées au compteur en proposant des équipements dotés
d’une excellente précision (un des nos modèles phare
compte des goutes) et des systèmes de télé-relève
(automatique et à distance) qui éliminent tout risque
d’erreurs liées à la relève manuelle.
Quand les réseaux intelligents intègrent le comptage de l’eau
EDNA NAKATI
SYSTEM MARKETING MANAGER – ITRON
CONTACT : edna.nakati@itron.com
www.itron.com
" Les enjeux soulevés par les technologies de l’Internet des Objets
sur l’activité de conception et plus particulièrement sur le travail
du designer sont immenses. "
” environs 0.4 milliard de m
3
/ jour d’eau (sur un total de 1.15 milliard de m
3
/ jour)
sont perdus avant d’être livrés chez les consommateurs.”
28
Kamitis : en quoi consistent ces innovations ?
E. NAKATI : Différents types des compteurs existent chez
Itron afin de proposer une gamme adaptée à la variété
des conditions de terrain et de service et qui jouent sur
la durabilité d’un compteur. Les Distributeurs d’Eau ne
font pas le choix uniquement en fonction des aspects
techniques mais aussi en fonction des aspects financiers
ou budgétaires.
La transmission des données à partir de la relève des
compteurs reste très variée : sur un même parc de
compteurs, nous pouvons avoir la coexistence de
méthodes de relève manuelles (en visuel), et
automatique, avec ou sans la présence d’un releveur.
Itron privilégie l’utilisation de la technologie de
transmission par Radio Fréquence et GPRS car cela
nécessite moins d’éléments physiques à gérer et
présente moins de contraintes au niveau de l’installation
surtout dans des constructions existantes. Il s’agit d’un
module qui s’accroche au compteur d’eau, en mode
« plug & play ».
Les données relevées à partir d’un module ne
concernent pas seulement le volume consommé, mais
également d’autres informations qui nous permettent
d’analyser le comportement de chaque compteur et
d’ajouter des fonctionnalités comme la détection de
fuites, la présence de débits anormaux, des anomalies
d’installation (compteur monté en inverse, etc). Dans
l’ensemble, cela donne une autre dimension à la relève
de compteurs : il y a tellement plus d’informations
pertinentes qui permettent aux distributeurs d’eau
d’anticiper et d’agir rapidement en cas de problème.
La quantité d’informations est bien sûr beaucoup plus
importante qu’auparavant. Aujourd’hui, sur certaines de
nos solutions, la granularité des données peut passer de
mensuel à journalier, et dans des cas spécifiques, les
alertes sont remontées en temps réel.
La mise au point des infrastructures informatiques pour
le stockage des données à des prix abordables (comme
les services hébergés ou Cloud) associées à des outils de
traitement de données très agiles, nous permettent
aujourd’hui d’avoir une compréhension beaucoup plus
riche et intéressante d’un réseau de distribution d’eau.
Du point de vue de nos clients, cela se traduit par une
amélioration significative de la qualité de service
puisque l’information est disponible pour chaque
compteur, ce qui assure un contrôle plus précis des
volumes d’eau dans les canalisations.
Kamitis : Quels sont les axes prioritaires de développement à moyen et à long terme concernant ce marché de l’eau
potable ?
E. NAKATI : Les axes prioritaires visent à trouver des
solutions efficaces de réduction des pertes. Nous
développons également des solutions qui formeront un
vrai réseau intelligent dans lequel les informations
provenant, soit des capteurs de pression ou de
température, corrélées aux informations provenant des
compteurs d’eau seront traitées efficacement et
exploitées au profit des services de distribution d’eau
comme des consommateurs.
Nous sommes également présents dans des projets
internationaux visant à résoudre des problèmes
spécifiques liés à la distribution d’eau :
https://www.itron.com/Pages/Itron-Customers-Testimonials.aspx
https://www.itron.com/fr/Pages/default.aspx.
29
Kamitis : Quels constats faites vous concernant le marché du comptage de l’eau en France, en Europe et dans le
monde ?
E. NAKATI : La France est bien placée, tout comme
l’Espagne, l’Allemagne, les Pays Bas et Singapore (qui
affiche les meilleurs performances de contrôle des
pertes avec moins de 25% du volume total produit).
Dans le marché mondial de l’eau, des sociétés comme
Veolia, Suez, Aqualia, Agbar, PWN sont présentes dans
les pays où la gestion des réseaux d’eau potable n’a pas
encore atteint un niveau acceptable. Ce marché est
encore très vaste car plus de 60% des pays sont encore à
un niveau de perte en eau potable supérieur à 30%.
Un autre aspect qui changera la façon comme l’eau est
gérée est la formation des villes intelligentes ou « smart
cities » - ce fait nous demandera des solutions pour
comprendre de mieux en mieux les réseaux d’eau et les
consommateurs.
Kamitis : Comment définissez-vous le positionnement de NaWaTechnologies sur le marché français ?
NAWATechnologies est une toute jeune start-up mais
sur un secteur qui a été très à la mode il y a à peine trois
ans. Aujourd’hui la mode de nanotubes est retombée et
c’est tant mieux car nous allons pouvoir faire valoir de
véritables propriétés d’un matériau et non de supposées
propriétés des nanotubes individuels. En effet, les
nanotubes tels qu’ils ont été produits par les entreprises
jusqu’à présent, dont certains gros leaders de l’industrie
chimique, l’ont été sous forme de poudres. Cette mise
en forme a rencontré deux problèmes : un problème de
mise en œuvre avec une difficulté majeure de réaliser
une mélange homogène de nanotubes de carbone dans
divers matrices polymères et ensuite des performances
qui ne se sont pas révélées à la hauteur des attentes car
en mélangeant simplement les nanotubes vous ne
profiter pas du fait que c’est intrinsèquement un
matériau anisotrope. En effet toutes ses propriétés du
nanotube sont selon son axe, elles ne sont pas utilisées
de manière optimale dans un mélange aléatoire qui
désorganise les axes de force des propriétés électriques,
thermique ou chimiques. Chez NAWATechnologies
nous mettons en oeuvre les nanotubes sous forme de
« tapis » où tous les nanotubes sont parallèles les uns
aux autres. Le matériau final obtenu « récupère » ainsi
de manière beaucoup plus efficace les propriétés
intrinsèques des nanotubes. Autre gros avantage, nous
n’avons pas besoin de les disperser, c’est d’ailleurs
l’inverse que nous recherchons, c’est à ne pas les
disperser, ce qui est finalement plus facile.
Nous sommes uniques au niveau européen par la
technologie que nous développons mais surtout aussi
par le procédé de fabrication que nous envisageons, ce
qui va nous permettre de développer des produits plus
performants au même niveau de prix que les
technologies concurrentes.
La seconde révolution des nanotubes
PASCAL BOULANGER
Président fondateur de NaWaTechnologies
" Nous travaillons à fabriquer une membrane qui soit la plus poreuse
possible et qui se positionne en rupture avec les membranes actuelles."
CONTACT : pascal.boulanger@nawatechnologies.com
http://www.nawatechnologies.com/
30
Kamitis : en quoi consistent ces innovations ?
La vision de notre innovation est clairement
orthogonale à ce qui existe aujourd’hui : c’est en
associant nano-objet, nano-organisation et nano-
engineering que nous pensons être à même de proposer
de nouveaux produits plus performants que les produits
actuels. Nous exploitons ainsi un savoir faire très
complet, générique et unique pour développer nos
produits. C’est sur cette base commune de savoir faire
que nous basons nos innovations et que nous les
adaptons de manière spécifique aux marchés que nous
visions. Ainsi le procédé de synthèse de tapis de
nanotubes est le même quelque soit l’application, ce qui
va changer sera le substrat sur lequel nous les faisons
croître, les différents matrices ou revêtements que nous
allons utiliser et la façon dont nous allons les mettre en
œuvre. Notre idée aussi est de jouer sur ce caractère
générique pour pouvoir fabriquer des produits avec des
solutions de stockage intégrées au cœur des produits
comme par exemple des éléments de carrosserie de
voiture ou d’ailes d’avions qui embarquent du stockage ,
ou des panneaux solaires photovoltaïques avec un
stockage intégré. Nous déployons notre technologie
d’abord dans le domaine du stockage, pour lequel nous
recherchons à nouer des partenariats avec différents
pour réaliser des démonstrateurs ou des adaptations
spécifiques.
Kamitis : Quelles sont les prochaines échéances pour NaWaTechnologies concernant ce marché de l’eau?
A court terme nous travaillons à démontrer
l’industrialisation de notre procédé de fabrication de
tapis de nanotubes de carbone alignés fonctionnalisés,
en grande surface pour une application spécifique qui
est celle des supercondensateurs. Nous espérons l’avoir
démontré d’ici deux ans et pouvoir utiliser cette
application comme vitrine de notre technologie et de
notre savoir faire pour d’autres applications.
Dans le domaine de l’eau, nous travaillons à fabriquer
une membrane qui soit la plus poreuse possible et qui se
positionne en rupture avec les membranes actuelles.
Nous recherchons là aussi des partenaires pour adresser
des applications spécifiques car le marché de la filtration
est très large et disséminé. Au delà du coût les
applications qui seraient susceptibles de bénéficier des
propriétés spécifiques des nanotubes de carbone, très
stables, sont des applications de filtration en
environnements sévères, en température en pH ou
autre. Nous sommes spécialistes de matériaux et nous
recherchons des spécialistes de membranes pour nous
accompagner.
Une fois l’industrialisation des électrodes de
supercondensateurs démontrée d’un point de vue
industriel, il sera alors possible de transposer le procédé
à la fabrication de membranes et de développer des
membranes de plus grandes surfaces. A long terme
l’application de dessalement d’eau de mer nécessitera
des surfaces gigantesques de production et nous en
sommes encore loin.
31
Kamitis : INDURA (Infrastructures Durables Rhône-Alpes) est un cluster français référent pour les enjeux du
développement des infrastructures de transport et de production d’énergie. Quels sont ses objectifs prioritaires, qui
sont ses membres et quel intérêt trouvent-ils à en faire partie ?
INDURA rassemble et accompagne les acteurs des
Travaux Publics sur les enjeux de demain, pour favoriser
le développement de projets innovants dans le domaine
des infrastructures de transport et de production
d’énergie. C’est en quelque sorte la table ronde qui
réunit l’ensemble de la chaîne de valeur : entreprises
(des PME aux grands groupes, des industriels aux
ingénieristes), organismes professionnels, écoles,
centres de recherche et instituts de formation. Nous
accompagnons nos membres principalement dans le
montage de projets innovants et la recherche de
financement, mais aussi la recherche de partenaires et
l’aide à la rédaction. Afin de faire émerger de nouvelles
idées, nous organisons régulièrement des groupes de
travail.
L’animation de réseau tient également une place très
importante et appréciée dans notre action, toujours
dans l’objectif de stimuler et promouvoir l’innovation.
Ainsi nos membres peuvent participer à de nombreuses
conférences techniques, soirées thématiques de style
« afterwork », visites de chantier, etc. Par exemple,
cette année nous avons organisé une soirée sur
l’auscultation des ouvrages avec EDF et une sur la
réparation des ouvrages hydrauliques avec la
Compagnie Nationale du Rhône (CNR). Nos membres
ont également pu visiter le chantier majeur de la
centrale hydroélectrique de Romanche-Gavet, la PCH
(petite centrale hydroélectrique) de Rochemaure, ainsi
que divers chantiers d’assainissement.
Kamitis : Quelles sont les actions entreprises au sein du cluster INDURA pour soutenir l’innovation dans le domaine
de l’hydraulique ?
Dans le domaine de l’hydraulique, INDURA œuvre à
faire émerger des solutions innovantes pour la
production d’énergie « verte » (partie génie civil) et la
sécurité des ouvrages de protection (barrages,
digues…), incluant l’auscultation et la réparation. Sur ces
sujets, plusieurs projets sont en cours, à différents
stades d’avancement, notamment pour concevoir la
centrale hydroélectrique du futur. Il y a quelques mois,
grâce à notre collaboration avec le pôle de compétitivité
Axelera, nous avons eu l’immense satisfaction de voir
labelliser notre projet BOREAL au FUI 16 avec la
notation maximale A+. Ce projet traite du bio-
renforcement des ouvrages en remblais, autrement dit il
met les bactéries au service de la protection des vies
humaines face au risque sismique. En effet, la
multiplication des catastrophes naturelles et le décret
de 2007 sur la sécurité des barrages durcissent les
normes de sûreté des ouvrages hydrauliques. BOREAL a
pour objectif de développer une technique de
confortement des digues en terre immergées dans l’eau
moins invasive et plus écologique. Si l’utilisation des
bactéries en tant que bio-calcificateurs est déjà avérée,
la nouveauté de ce projet consiste à valider ce procédé
en présence d’eau. Une formulation innovante permet
aux bactéries de fabriquer un squelette de calcite
solidifiant la matière, tout en conservant la perméabilité
nécessitée par l’ouvrage. La résistance et la cohésion
ainsi obtenues diminueront les risques de liquéfaction
lors des séismes et d’érosion interne, sans écoulement
dans la nappe phréatique. BOREAL mobilise huit
partenaires : le porteur du projet Soletanche Bachy, les
groupes CNR et EDF, les PME Geophyconsult et Enoveo,
les laboratoires LTHE et 3SR et l’Université d’Angers.
Soutenir l’innovation dans le domaine de l’hydraulique
ADELE WUDTAVEE
CHARGEE DE COMMUNICATION
CONTACT : a.wudtavee@indura.fr
http://www.indura.fr/
" C’est dans la confrontation des idées et des points de vue que naissent les
projets les plus innovants."
32
Les procédés de géotechnique actuellement disponibles
pour prévenir ces risques sont très intrusifs et peuvent
avoir un impact écologique négatif. BOREAL
débouchera donc sur un procédé de rupture, et
permettra de créer une nouvelle filière française
d’excellence. Les résultats seront facilement
transposables en France et à l’international, et
d’importantes retombées économiques sont attendues.
Kamitis : INDURA supporte l’innovation notamment en croisant différentes technologies comme l’illustre le projet
exposé plus haut. Comment se fait la sélection des projets soutenus par ce cluster ?
INDURA fait émerger et soutient des projets qui
répondent à de véritables enjeux sociétaux et qui
présentent un fort potentiel de retombées
économiques, par la commercialisation d’un produit ou
procédé innovant. Nous nous efforçons également de
changer l’image du génie civil et des travaux publics,
domaines trop souvent perçus comme peu innovant. A
tort, j’en veux pour preuve les 40% de projets rhônalpins
acceptés au FUI en relation avec les thèmes de notre
cluster !
INDURA dispose d’un Conseil Scientifique, composés
d’experts reconnus dans leur domaine, qui évalue les
projets pur s’assurer de leur qualité scientifique et
technique, ainsi que de la faisabilité des projets. Après
expertise, ce conseil peut décider de soutenir et
labelliser des projets en lien avec les thématiques du
cluster. En outre, c’est dans la confrontation des idées et
des points de vue que naissent les projets les plus
innovants. Ceci, INDURA l’a bien compris, en stimulant
les échanges et les liens avec des métiers et des
territoires différents, représentés par d’autres pôles et
clusters. Les biotechnologies, comme exposé plus haut,
mais également la chimie, la réalité virtuelle, les
nanotechnologies... Les synergies sont le plus souvent
naturelles, nous n’hésitons pas à nous solliciter entre
pôles lorsque nos compétences nécessitent d’être
croisées, pour des innovations encore plus probantes.
Nous avons également signé des conventions de
partenariat avec les pôles Advancity (ville et mobilité
durables) et LUTB (transport et systèmes de mobilité).
Kamitis : INDURA propose un accompagnement notamment dans le domaine des ouvrages hydrauliques, pouvez-
vous nous présenter cet axe là?
Le Conseil Scientifique d’INDURA a identifié lors de son
séminaire stratégique annuel les thèmes prioritaires,
parmi lesquels figurent la rupture des ouvrages par
affouillement ou érosion, la résistance des ouvrages
soumis aux séismes et les biotechnologies et
dépollution. Un des projets qui nous mobilise le plus en
ce moment concerne le traitement biotechnologique
des ouvrages de pompage d’eau, c’est-à-dire l’utilisation
de bactéries pour lutter contre le colmatage des champs
captants. Pour des ouvrages hydrauliques plus sûrs et
des pratiques plus respectueuses de l’environnement.
L'Eau : Enjeux et stratégies - publication kamitis juillet 2014

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L'Eau : Enjeux et stratégies - publication kamitis juillet 2014

  • 2. 2 KAMITIS est une société spécialisée en expertise scientifique, en veille stratégique et technologique et en financement de l’innovation. Elle opère principalement auprès des entreprises innovantes mais également auprès des structures institutionnelles. KAMITIS réalise pour ses clients des états de l’art technologique, des études de marchés et des analyses technico-économiques. Elle les aide également à identifier et à obtenir les meilleurs financements pour leurs projets. Lyon 6 Place Bellecour 69002 Pour plus d'informations : contact@kamitis.com - www.kamitis.com
  • 3. 3 Édito ___________________________________________________________ 4 L’eau : enjeux et stratégies 4 Expertise scientifique _____________________________________________ 5 Des gènes qui influencent le choix des aliments 5 Une nanopuce pour la détection précoce des cancers 5 Haute précision dans l’élaboration de quantum dots 6 Financement _____________________________________________________ 7 Débloquer son CIR par une mobilisation de créance 7 Intelligence économique ___________________________________________ 9 Les grands barrages - marchés immenses et sans risque 9 Focus sur le projet « Grand Inga » 12 Focus ___________________________________________________________ 16 L’or bleu : promesses et enjeux 16 I3 _______________________________________________________________ 23 Advanced Membrane Technology 23 – par DAVID COHEN-TANUGI Autour des technologies des membranes 25 – par PHILIPPE MOULIN Quand les réseaux intelligents intègrent le comptage de l’eau 27 – par EDNA NAKATI La seconde révolution des nanotubes 29 – par PASCAL BOULANGER Soutenir l’innovation dans le domaine de l’hydraulique 31 – par ADELE WUDTAVEE Sommaire
  • 4. 4 L’eau : enjeux et stratégies Nous évoquerons également les aménagements entrepris par l’homme pour répondre à ses besoins en eau, notamment à travers l’édification des grands barrages, qui mobilisent beaucoup de ressources humaines et financières et qui ont des conséquences parfois néfastes sur l’environnement. Dans ce numéro, nos experts abordent plusieurs domaines relatifs à la gestion de l’eau. Ils nous présentent les différents travaux de recherches qu’ils soutiennent et les innovations qu’ils portent au sein de leurs structures. David Cohen-Tanugi, chercheur au département Materials Science and Engineering au Massachusetts Institute of Technology, nous présente ses recherches concernant les technologies des membranes, notamment utilisées pour le dessalement de l’eau ; Philippe Moulin, président du Club Français des Membranes (CFM), nous parle du CFM et de son positionnement par rapport aux technologies membranaires ; Edna Nakati, System Marketing Manager chez ITRON, nous décrit les efforts entrepris pour la conception et le développement de systèmes de comptages intelligents ; Pascal Boulanger, Président fondateur de NaWaTechnologies, nous parle des nouvelles membranes conçues grâce à la nanotechnologie ; Enfin, Adèle Wudtavee, Chargée de communication chez INDURA, nous présente les travaux réalisés par ce pôle pour soutenir l’innovation dans le domaine de l’hydraulique. Bonne lecture, Sans eau nous n’avons rien. Pas de vie, pas de culture, pas de société et pas d’économie. L’eau est une ressource vitale, précieuse et dans certaines régions du monde, elle est rare et source de maladies et de conflits. Relativement abondante à l’échelle de la planète, elle reste inégalement répartie, et sa disponibilité, comme sa qualité, font de plus en plus défaut. Dans les quelques paragraphes qui suivent, nous verrons qu’au-delà de l’approche économique, l’Or Bleu touche désormais aux questions de sécurité stratégique des nations. Les inadéquations entre cette matière vitale et les besoins de plus en plus élevés, provoquent un énorme déséquilibre social, économique, culturel et politique, non seulement entre les régions du monde mais aussi à l'intérieur de certains états. Par KHALED BAAZIZ Dirigeant de Kamitis Édito
  • 5. 5 Des gènes qui influencent le choix des aliments Les gènes qui contrôlent la perception de l'alimentation ont été identifiés. Une série de découvertes italiennes montre en effet que la prédilection pour des aliments se cache dans l'ADN. Cette découverte est le fruit du travail d'un groupe de recherche de l'Université de Trieste et de l'Istituto Burlo Garofalo, toujours à Trieste, coordonné par Paolo Gasparini. Le résultat a été présenté lors de la conférence de la Société européenne de génétique humaine. Ces découvertes s'insèrent dans le cadre plus général de la compréhension des liens entre la génétique et la nutrition, ou comment le génome change la perception du goût. Elles ouvrent la voie à la création de régimes personnalisés extrêmement efficaces non seulement pour la perte de poids, mais aussi pour combattre les maladies telles que l'hypertension ou le cancer. "Nous pourrons prévoir par le profil génétique - explique Nicola Pirastu de l'Université de Trieste- la nourriture que chaque personne est le plus susceptible d'aimer ou pas. Une des limites des régimes est due au fait qu'ils sont souvent liés à des aliments considérés comme n'étant pas bons, mais grâce à la génétique nous pourrons comprendre pourquoi une personne n'aime pas les épinards, par exemple, et trouver des moyens de les rendre plus "acceptables". Une nanopuce pour la détection précoce des cancers Des chercheurs de l'Institut des Sciences Photoniques (ICFO) ont développé une nano-puce capable de détecter dans le sang les marqueurs de protéines du cancer, grâce à un système qui met à profit les plus récentes avancées en matière de plasmonique, de micro fluidique, de nano conception et de chimie des surfaces. La grande majorité des cancers sont détectés au niveau macroscopique, lorsque la tumeur est composée de millions de cellules cancéreuses, et que la maladie a déjà atteint un degré de maturité avancé. Pourtant, certains indices pourraient signaler la présence de cellules cancéreuses, y compris aux stades les plus précoces du développement de la maladie, à condition que l'on soit capable de les détecter : les marqueurs tumoraux. Des nanoparticules d'or implantées à la surface de la puce sont programmée avec un récepteur d'anticorps de telle sorte qu'elles soient capables d'attirer et de fixer les marqueurs tumoraux en circulation dans l'échantillon sanguin. Ainsi, lors de l'injection d'une goutte de sang dans la nano puce, l'échantillon circule à travers les micros canaux, et les marqueurs tumoraux présents se fixent sur ces nanoparticules. Cette fixation provoque des variations dans ce que l'on appelle la résonance plasmonique de surface, et qui correspond à l'entrée en résonnance des électrons libres des atomes d'or et des photons. Le dispositif surveille ces variations, dont l'amplitude est directement liée à la concentration et au nombre de marqueurs tumoraux présents dans le sang du patient. Cela permet ainsi une évaluation directe du risque de développement d'un cancer chez un patient donné, grâce à une analyse dans la pratique aussi simple qu'une prise de sang. Expertise scientifique
  • 6. 6 Haute précision dans l’élaboration de quantum dots Une équipe de recherche composée de physiciens de l’institut Paul-Drud-Institut für Festkörperelektronik (PDI) de Berlin, du NTT Basic Research Laboratories de Atsugi au Japan, et du U.S. Naval Research Laboratory (NRL) ont réussi à créer de façon parfaitement reproductible des Quantum dots (appelés aussi «boîtes quantiques») identiques. Cette avancée majeure, publiée dans le numéro de Juillet 2014 du journal Nature Nanotechnology, ouvre la voie à différentes applications dans des domaines allant de la nanophotonique au traitement d'information quantique. La création de Quantum dots identiques exige que chaque atome soit placé dans un endroit bien précis. Et c’est en utilisant un microscope à effet tunnel (STM) et partant d’un cristal d'arséniure d'indium que l’équipe, menée par le Pr Stefan Fölsch, a réussi son pari de créer des Quantum dots de façon parfaitement reproductible. Les avantages d’une telle réalisation (qui permet de s’affranchir des variations de la taille, la forme ou la position des atomes) sont nombreux et offrent notamment l'opportunité d'étudier la physique fondamentale des boites quantiques et de mieux comprendre les mécanismes de confinement nanométrique. Les états électroniques quantifiés d’un Quantum dot composé de 22 atomes d’indium. Image: Stefan Fölsch / PDI References 1. http://www.ansa.it/scienza/notizie/rubriche/biotech/2014/06/04/scoperti-i-geni-che-influenzano-la-scelta-dei-cibi_f55d49ec-e5b8- 4046-a59d-e892d8bdb3b8.html 2. http://pubs.acs.org/doi/abs/10.1021/nl500574n 3. http://www.rdmag.com/news/2014/06/researchers-create-quantum-dots-single-atom-precision
  • 7. 7 Financement Débloquer son CIR par une mobilisation de créance Les modalités de remboursement En cas de déficit fiscal, ou de résultat ne générant pas d’IS, plusieurs situations peuvent se présenter : - Soit le remboursement est immédiat. C’est le cas pour les PME, start-up et JEI. - Soit la société constitue une créance qui sera imputable lors des 3 exercices suivants. Ainsi, le remboursement par le Trésor public peut avoir lieu jusqu’à 4 ans après l’engagement des dépenses de R&D par l’entreprise. La mobilisation de créance Les délais mentionnés ci-dessus peuvent être raccourcis en utilisant une méthode de levée de fonds peu connue : la mobilisation de créances. En effet, les articles L 313-23 à L 313-35 du Code monétaire et financier prévoient que la créance de CIR peut être mobilisée auprès des établissements de crédit. L’entreprise cède à l’organisme ses futures créances de CIR à titre de garantie en contrepartie d’un financement immédiat par ledit organisme. Depuis 2013, l’article 35 de la loi de Finance rectificative a par ailleurs étendu cette possibilité, de cession de créances, aux organismes de titrisation. Quels enjeux pour les entreprises ? Comme présenté sur la figure ci-dessous, les ETI et Grandes Entreprises ne représentent que 9,3% du total des bénéficiaires du CIR, mais le montant qui leur est accordé s’élève quant à lui à plus de 3,5 milliards d’euros (soit 68,1% du montant total de CIR accordé en 2011 selon BPI France). Ces entreprises souhaitent également accéder à un remboursement rapide de leur créance CIR dans le but de financer leurs éventuels décalages de trésorerie ou de renforcer cette dernière afin de réinvestir et de développer leurs activités. Par ailleurs, cette opération finance le besoin en fonds de roulement (BFR) sans altérer la capacité d’autofinancement de l’entreprise, qui pourra prétendre à un autre emprunt si nécessaire. En effet, la capacité d’autofinancement est un signal fort quant à la capacité d’une entreprise à couvrir ses dettes et à honorer ses échéances en matière d’emprunt. Ainsi, une bonne capacité d’autofinancement rassure les organismes de prêt. Par Alissa KACEM Chargée de Veille - Kamitis Le crédit d’impôt recherche (CIR) est un facteur important dans les décisions stratégiques en termes de planification et de localisation des services de R&D. Il permet aux entreprises, soit de déduire de l'impôt sur les sociétés une partie de leurs investissements en R&D, soit de récupérer la partie du CIR non imputable sur l’IS. Le crédit d’impôt est de 30% sur les dépenses de R&D éligibles jusqu'à 100 millions d'euros et de 5% au-delà. * La titrisation est une technique financière qui consiste à transférer à des investisseurs des actifs financiers tels que des créances, en transformant ces créances, par le passage à travers une société ad hoc, en titres financiers émis sur le marché des capitaux.
  • 8. Procédure et échéances Pour s’assurer de la solidité de la créance, l’établissement bancaire ou l’organisme de titrisation sollicite les services d’un expert agréé par le ministère de la Recherche afin de procéder à un audit complet de la créance CIR. Le dossier à expertiser doit comprendre : - Une présentation générale des activités de l’entreprise - L’état de l’art de la recherche - Les incertitudes techniques - Les travaux menés et les résultats attendus - Les dépenses de personnel et le justificatif du temps passé par tâche. Les délais et échéances de la créance La créance est monétisée dans un délai maximal de 3 mois après acceptation et validation du dossier par l’établissement bancaire ou de titrisation. L’échéance du prêt a lieu 6 mois après la date de clôture de l’exercice fiscal. Le prêt peut-être prolongé si l’entreprise ne paye pas d’IS, ou en tout cas pas suffisamment pour imputer l’intégralité de son CIR. Le prêt est prolongé jusqu’à ce que le Trésor public rembourse l’organisme (6 mois après la déclaration du CIR pour une PME ou 36 mois pour une ETI ou une GE). PME 30.9 % (88.5%) ETI 35.5 % (8.7%) % des bénéficiaires sur un total de 14882 entreprises % de CIR sur un montant total de 5166 Millions d'euros Non renseigné 1.1 % (2.3%) Grandes entreprises 32.6% (0.6%) Figure : Répartition du CIR
  • 9. 9 Intelligence économique Les grands barrages - marchés immenses et sans risque Dans les prochaines décennies, de gigantesques travaux hydrographiques vont modifier l’aspect de notre planète. Les barrages en seront les ouvrages les plus significatifs. Les barrages sont souvent présentés comme des solutions au manque d’eau. Ils permettent de soutenir l’agriculture irriguée, comblant à la fois les besoins en eau et en nourriture. De plus, Les innovations technologiques ont permis de développer les nouveaux usages de l’eau retenue par un barrage : production hydroélectrique 1 , développement industriel, expansion urbaine ou encore protection contre les inondations. Ainsi depuis quelques années, on observe la relance de construction des grands barrages. L’objectif premier et l’enjeu majeur reste en revanche l’énergie électrique. De grandes entreprises françaises telles que GDF Suez 2 et EDF sont bien positionnées sur ce marché. Des institutions financières nationales et internationales comme la Coface, la Banque européenne d’investissement et la Banque mondiale 3 participent aux projets de réalisation de ces ouvrages. A l’échelle mondiale, la Chine est le plus grand constructeur de barrages. Près de la moitié des 50 000 grands barrages de la planète sont chinois et bon nombre d’entre eux ont été construits au 21 ème siècle. Des pays comme le Brésil, le Canada, les Etats Unis d’Amérique, l’Inde ou le Japon ont également érigé un nombre imposant d’ouvrages. Mais bâtir de grands barrages exige la mobilisation d’importantes ressources financières et humaines. Mais ce sont surtout les ressources financières qui freinent le développement de beaucoup de pays et c’est donc par ce biais que plusieurs investisseurs publics ou privés parviennent aujourd’hui à intégrer des projets de grande ampleur. Il est vrai que dans certains pays, surtout en Afrique, les opportunités sont nombreuses, les ressources inexploitées et le marché immense. L’Afrique subsaharienne possède un potentiel hydraulique capable d’alimenter la totalité du continent africain en électricité 4 . Un fleuve en particulier est au centre de tous les intérêts : c’est le fleuve Congo, le deuxième au monde par son débit (40.000 m 3 /sec) après l'Amazone. Il présente un potentiel hydroélectrique estimé à 100.000 mégawatts (MW), soit plus du tiers du potentiel africain. Près de la moitié de ces capacités de production énergétique est concentrée sur le seul site d'Inga (40000 MW) à une trentaine de kilomètres de la ville portuaire de Matadi. Le barrage Inga 3, le premier des six barrages formant le complexe du Grand Inga, est la solution imaginée pour la région du Katanga. D’une puissance de 4 800 MW, ce barrage servirait à fournir en électricité l’Afrique du Sud (2 500 MW) et le réseau congolais 5 : pour les populations (1 000 MW) et les opérateurs miniers (1 300 MW) dont la production est limitée par le manque d’énergie disponible (spécialement la région Katanga 6 ). 1 11 L’hydroélectricité est la principale source d’électricité renouvelable. Toutefois, au cours du temps, sa part a un peu diminué, passant de 20% à 15% aujourd’hui. Car sa croissance n’a pas pu suivre la progression des besoins et que les grands barrages présentent un certains nombre de d’inconvénients : coûts d’investissements élevés, coûts humain et environnemental. La Chine est le plus grand producteur d’énergie hydroélectrique. En 2010, le pays a produit, 721 térawatts heure (TWh), ce qui a représenté 17% de sa consommation électrique. Selon l’Administration Nationale de l’Energie, la Chine a ajouté 29 gigawatts de capacité de production d'énergie hydroélectrique l'année dernière, pour un total de 278 GW. Si la Chine, le Canada et le Brésil sont aujourd’hui les plus gros producteurs, trois pays dépendent de l’hydraulique pour leur production électrique : la Norvège avec 98%, le Brésil avec 80% et le Venezuela avec 73%. 2 Le mégabarrage Jirau construit par GDF Suez en Amazonie, à proximité de la frontière bolivienne. 3 A l’image de la Chine et du Brésil, la Banque mondiale prévoit de financer ce type de structures particulièrement au Congo, Zambèze, Himalaya, etc. 4 Grace aux fleuves de l’Afrique centrale et notamment le fleuve Congo. 5 Exploité par la Société nationale d’électricité (SNEL) 6 Les besoins de l’industrie minière dans la région de Katanga sont estimés à 1 000 MW, et pourrait atteindre 2 300 MW d'ici à 2020.
  • 10. 10 L'exploitation du barrage sera octroyée, sous forme de concession, à un consortium sélectionné sur appel d'offres. A ce jour, trois consortiums ont manifesté leur intérêt : China Three Gorges Corporation et Sinohydro (Chine) ; Daewoo, Posco (Corée du Sud) et SNC-Lavalin (Canada); Actividades de Construccion y Servicios ( ACS) et Eurofinsa (Espagne). Figure 4. Hydroélectricité : les 10 premiers producteurs – données 2011-2012 L’échelle de volume est donnée par les volumes de production en TEP par an. Une fois terminé, le complexe d’Inga devrait fournir plus de 25 % de la production mondiale d’énergie électrique d’origine hydraulique. Le Grand Inga fait d’ailleurs partie d’un vaste plan d’interconnexion et d'harmonisation des réseaux africains au cœur des programmes du NEPAD (Nouveau Partenariat pour le Développement de l’Afrique) avec peut être même, à terme, une distribution de l’électricité pour l’Europe. D’ici là, un grand effort reste encore à faire afin de déployer le réseau électrique et les infrastructures adéquates tout en assurant la protection de l’environnement. En effet, d’autres « réservoirs de mégawatts » comme le bassin de l’Amazone au Brésil, avec notamment la construction du barrage de Jirau et celui de Santo Antonio sur le rio Madeira, principal affluent de l’Amazone, ont été au centre de différentes polémiques. Ces ouvrages, très controversés et largement médiatisés, sont aujourd’hui accusés d’avoir contribué et aggravé l’impact des inondations meurtrières et historiques que connaît le rio Madeira. Des études d’impact environnemental ont été ordonnées par décision de justice à l’encontre de GDF Suez et le brésilien BTP Odebrecht. D’après plusieurs experts en énergétique, l’Afrique peut être autosuffisante en énergie, même si pour l’instant le taux d’électrification est extrêmement faible (de l’ordre de 30%), et que la majeure partie de la population n’a pas accès à l’électricité. L’Afrique regorge de ressources : elle a un potentiel hydraulique considérable, notamment au niveau de la région de l’Afrique centrale.
  • 11. 11 Il a été démontré que le développement de l’hydroélectricité cause beaucoup de problèmes notamment au niveau de la protection de l’environnement, et cela principalement à cause de l’échec des différents acteurs (promoteurs, autorités, investisseurs, etc.) à trouver un compromis entre le développement hydroélectrique, les intérêts des habitants locaux et la protection de l’environnement. Malgré ces problèmes, les différentes nations persistent à vouloir bâtir des barrages. Et pour beaucoup de gouvernement, le meilleur moyen d’assurer la croissance économique de leur pays est de mettre un terme à la pénurie d’électricité et de moderniser les infrastructures de transport d’énergie. L’un des arguments en faveur de l’hydroélectricité reste indéniablement son coût. L’énergie hydraulique est la moins chère du marché. En effet, malgré leurs coûts de construction colossaux, les barrages, une fois en place, présentent très peu de frais de fonctionnement et de maintenance. De ce fait, les gouvernements qui cherchent à développer leurs parcs d'énergies renouvelables, encouragent la construction de barrages. Afin d’accélérer la construction des barrages et de stimuler les investissements industriels, la Chine, plus grand producteur d’énergie hydroélectrique, envisage de modifier les prix de la production de cette énergie : début 2014, la Commission des Reformes et du Développement National (NDRC) a annoncé une réforme qui vise à augmenter le prix que paient les opérateurs du réseau pour utiliser les ressources des centrales hydroélectriques 7 . En effet, le prix de l’énergie hydroélectrique, plus bas que l’électricité générée par d’autres formes traditionnelles (y compris le charbon), est un obstacle pour le développement de l’hydroélectricité. La commission explique que, désormais, les prix de l’hydroélectricité seront basés sur le prix général pour l’achat de l’'électricité ainsi que sur le coût de construction des centrales hydroélectriques. Les « grands » barrages ont donc un bel avenir devant eux. Un avenir qui, comme le passé et le présent, est caractérisé par des alliances stratégiques finement établies, des partenariats économiques savamment orchestrés mais aussi des retombées environnementales trop peu considérée ou habilement ignorées. Les besoins en eau ne cessant d’augmenter, l’importance stratégique des pays disposant de cette ressource ira croissant. Si les prévisions climatiques se révèlent exactes et que la répartition de ces ressources naturelles devient encore plus inégale, les pays riches en eau vendront de plus en plus souvent leurs surplus à ceux qui en manquent. Et les nations capables de « couper le robinet » à d’autres auront alors un pouvoir énorme. Mais si les pays situés en aval d’un bassin fluvial sont de loin les plus riches et les plus puissants, le développement économique des pays châteaux d’eau, politiquement faibles, pourrait être entravés. 2 27 China's Policies and Actions for Addressing Climate Change (2013). http://en.ndrc.gov.cn/newsrelease/201311/P020131108611533042884.pdf
  • 12. 12 Focus sur le projet « Grand Inga » Par Camille BORLET Chargée de Veille - Kamitis Le fleuve Congo est le plus puissant fleuve du monde après l’Amazone. Long de 4700km, il sert de frontière naturelle entre la République démocratique du Congo, la République du Congo et l'Angola. Il présente un potentiel hydroélectrique estimé à 100.000 mégawatts (MW), soit plus du tiers du potentiel africain. Près de la moitié de ces capacités de production énergétique est concentrée sur le seul site d'Inga (40000 MW) à une trentaine de kilomètres de la ville portuaire de Matadi. D’une puissance de 4 800 MW, ce barrage, appelé Inga3, servirait à fournir en électricité l’Afrique du Sud (2 500 MW) et le réseau congolais 1 : pour les populations (1 000 MW) et les opérateurs miniers (1 300 MW) dont la production est limitée par le manque d’énergie disponible (spécialement dans la région Katanga 2 ). 3 3 Les besoins Si les grandes entreprises du Nord et les institutions financières internationales se ruent vers les fleuves des pays du Sud pour y édifier de gigantesques barrages, aux conséquences environnementales et sociales lourdes, c'est en raison de la perspective de créer de nouveaux marchés autour de l’énergie hydroélectrique. Mais quelles sont les conséquences de ces ouvrages pharaoniques ? Et à qui bénéficient réellement ces nouveaux barrages ? 1 Exploité par la Société nationale d’électricité (SNEL) 2 Les besoins de l’industrie minière dans la région de Katanga sont estimés à 1 000 MW, et pourrait atteindre 2 300 MW d'ici à 2020.
  • 13. 13 Le projet pharaonique, Inga, est le fruit de la collaboration de différents acteurs du monde des finances (Banque africaine de développement, Banque européenne de l’investissement), du développement (Banque de développement des Etats de l'Afrique centrale ; Agence française de développement) ou encore de l’ingénierie (China International Water & Electric Corporation ; EDF ; GDF Suez). En 2013, un accord est signé entre ces mêmes entités dans le but de construire le projet « Grand Inga », le plus grand complexe hydraulique du monde, à proximité des chutes éponymes en République Démocratique du Congo (RD Congo). La Banque mondiale a donné son feu vert pour ce projet de grande envergure, qui viendra détrôner le barrage des Trois Gorges en Chine, qui détient actuellement le record du plus grand barrage du monde. Ce plan intègre plusieurs sous-projets : la construction d’un troisième barrage dans la région, l’Inga 3 ; ainsi que des travaux de rénovations pour l’ensemble de ces constructions préexistantes datant des années 1970, l’Inga 1 et l’Inga 2, qui nécessitent d'importants travaux de rénovations. Contexte difficile L’Afrique subsaharienne souffre d’un déficit durable et chronique d’énergie électrique : seulement 31 % de la population a accès à l’électricité, ce qui laisse près de 600 millions de personnes sans accès (selon des chiffres officiels, 9% de la population congolaise dispose aujourd’hui d’un accès à l’électricité). Effectivement, le prix moyen de l’électricité dans cette région du monde est de 0,12 dollar/kWh, soit deux fois plus élevé que dans les autres pays en développement. De par les constructions existantes, complétées par ce projet, le Congo serait ainsi doté d’un énorme potentiel hydroélectrique estimé à 100 GW (soit le troisième plus grand au monde derrière la Chine et la Russie). Cette source d’énergie renouvelable serait disponible en grande quantité, rentable grâce à son faible coût de production (environ 0,05-0,07 dollar/kWh), permettant ainsi de concurrencer d’autres technologies comme l’énergie thermique, éolienne et solaire. Selon Jim Yong Kim, directeur de la Banque Mondiale, et fervent défendeur du projet Grand Inga: « Le développement responsable de l’énergie hydraulique peut fortement contribuer à mettre fin à la pauvreté et à promouvoir une prospérité partagée sur le continent africain par la fourniture d’une source d’énergie rentable pour les ménages et les entreprises et l’amélioration du bien-être humain. ». La centrale d’Inga 3 fournira un nouvel accès à l’électricité à sept millions d’habitants de la région métropolitaine de Kinshasa. Par ailleurs, le développement de trois projets hydroélectriques de moyenne puissance permettra à deux millions de personnes d’accéder à l’électricité dans l’arrière-pays rural. Etat actuel du projet Projet « Grand Inga »
  • 14. 14 Cependant, les voix dissonantes avertissent de l’arrivée d’une catastrophe écologique et sociale : comme l’indique l’organisation Les Amis de la Terre dans leur rapport intitulé « A qui profitent vraiment les grands barrages ? » 3 , de telles constructions alimenteraient ainsi la corruption et les conflits locaux, laissant notamment la majorité des Congolais sans électricité contrairement à ce qui était annoncé par la Banque Mondiale. Sans compter le nombre important de locaux à déplacer puisqu’afin d’élever le réservoir d’Inga 3, la vallée de la Bundi (d’une superficie de 330 km 2 ) sera rayée de la carte, forçant ainsi la délocalisation de ses habitants vers des villes proches telles que Matadi. L’association avait notamment profité du Forum alternatif mondial de l’eau en mars 2012 pour sensibiliser le public sur les grands barrages, et dénoncer leurs impacts, ainsi que l’engouement des acteurs financiers internationaux pour cette forme d’énergie « ni verte, ni propre ». Effectivement, il est nécessaire de relativiser la propreté de cette énergie, dite « non émettrice de CO2 ». Si le processus de production n’émet pas lui-même de gaz à effet de serre, la construction de ces barrages, parfois pharaoniques, implique l’utilisation et le transport de matériaux qui alourdissent considérablement le bilan carbone de cette énergie. Par ailleurs, le réservoir du barrage est constitué en inondant des zones de culture et de forêts riches en matières organiques. Ces matières se décomposent ensuite dans le réservoir, émettant de grandes quantités de gaz (méthane, protoxyde d’azote) à très fort effet de serre. Au total, les grands barrages sont responsables de 4% des émissions mondiales de gaz à effet de serre (soit plus que le secteur aérien). De plus, suite à la mauvaise gérance sous le régime Mobutu et la situation de guerre depuis 1997 au Congo, le barrage Inga 2 et son voisin Inga 1 sont dans un état de délabrement réduisant leur capacité de production électrique à 20 %, faute de pièces de rechange. Par manque d’entretien également, les jacinthes d'eau sont l'une des principales causes d'encombrement du barrage et de dégradation de ses turbines. Les centrales électriques ne parviennent même plus à assurer une alimentation fiable à la seule ville de Kinshasa, alors que les projets initiaux prévoyaient une alimentation de toute l'Afrique australe, justifiant également la construction de la ligne électrique Inga-Shaba. Cependant, le potentiel désastre écologique que représente le projet Grand Inga ne semble pas effrayer les fonds d’investissement et les autorités locales. La Banque africaine de développement, la Banque mondiale et d’autres investisseurs vont prêter 150 millions de dollars pour lancer le chantier, dont la première phase d’Inga 3 coûtera la somme de 12 milliards de dollars. Soit un investissement représentant plus du tiers du PIB annuel du RD Congo (30,63 milliards en 2013). Alors, pourquoi un tel engouement des organisations, notamment chinoises, pour ce projet alors qu’elles détiennent déjà le plus grand complexe hydroélectrique au monde (le barrage des Trois-Gorges) ? Figure : Ressources minières du RD Congo4 43 http://issuu.com/amisdelaterre/docs/plaquettebarrages/1?e=0
  • 15. 15 Les principales causes aux intérêts chinois en RD Congo sont les ressources naturelles dont dispose ce dernier, en particulier les régions boisées du Bundi ou les richesses minières de l’est et du sud du pays (notamment dans le Katanga). En effet, la RD Congo possède des gisements contenant une cinquantaine de minerais recensés, même si uniquement une douzaine de ces derniers est exploitée: le cuivre, le cobalt, l’argent, l’uranium, le plomb, le zinc, le cadmium, le diamant, l’or, l’étain, le tungstène, le manganèse et quelques métaux rares comme le coltan. Le pays recèle plus de la moitié des réserves mondiales de cobalt, 10% de celles de cuivre, 30% de celles de diamant et plus de 70% des réserves de coltan (3/4 des réserves mondiales), un minerai qui entre dans la composition de produits de haute technologie. De plus, plusieurs gisements d’Or, de germanium, de manganèse, de bauxite et de minerai de fer restent encore inexploités. Consciente du poids stratégique du RD Congo, la Chine a noué des partenariats d’investissements en infrastructures contre des concessions minières. Ainsi la province du Katanga compte aujourd’hui environ 300 entreprises métallurgiques chinoises, la plupart installées dans la région du Lubumbashi surnommée « la capitale du cuivre ». En effet, à l’image de la CDM, le plus gros producteur de cobalt chinois, 50 entreprises chinoises s’y sont établies, et fondent le minerai pour l’exportation. Figure : Les 14 matières premières minérales qualifiées de « critiques » par l’UE - http://globalmetal.fr/metaux-strategiques/ Il est vrai que la Chine est l’un des pays où se trouvent les principales concentrations de minerais de terres rares. (Carte ci-dessus). Or, l'impact de l'exploitation de ces derniers sur l'environnement conduit aujourd’hui à des conséquences sociales majeures en Chine. Cela pousse le gouvernement à mieux rentabiliser son monopole 4 pour en équilibrer les effets néfastes et pour mettre en place les processus coûteux permettant de réduire l'impact environnemental. Cette situation mène donc la Chine à explorer d’autres sites et explique en partie sa présence en RD Congo ainsi que son soutien au projet de barrage. 5 4 Du fait de l'impact environnemental désastreux, les exploitations de ces minerais se sont arrêtées partout dans le monde, hormis en Chine où les autorités se sont montrées peu regardantes sur la pollution générée. Ainsi depuis 2010, la Chine assure un quasi-monopole de la production de terres rares dans le monde. Etats-Unis Béryllium 85% Brésil Niobium 92% RD Congo Cobalt 41% Afrique du Sud Platine 79% Chine Antimoine 91% Germanium 72% Graphite 72% Indium 58% Magnesium 56% Terres rares 97% Tungstène 78%
  • 16. 16 Focus L’or bleu : promesses et enjeux Source abondante… Différentes estimations des ressources mondiales en eau ont permis d’évaluer le volume total d’eau sur la planète à 1,4 milliards de km 3 . L’eau douce représente environ 2,5% du volume total (35 millions de Km 3 ), dont :  68,9% (24 millions de km 3 ) sont stockés à l’état solide (dans les calottes glacières et dans la couverture neigeuse persistante et pour l’essentiel, piégés dans les glaces de l’Antarctique et du Groenland.  30,8% (8 millions de km 3 ) se situe sous la terre dans les nappes phréatiques, les bassins souterrains, les marécages, etc.  0,3% soit 105000 km 3 sont réparties dans les lacs, les rivières, etc. Figure 1. Ressources mondiales en eau Par Myriam TISSEAUX Chargée de développement - Kamitis Pour les états, l’enjeu de l’eau est un problème d’adéquation entre les besoins et les ressources disponibles, ce qui induit des questions d’accessibilité et de partage et se traduit par différentes solutions de gestions du stress hydrique. Certaines nations ont opté pour des politiques de construction d’importants ouvrages hydrauliques. D’autres privilégient l’appropriation de terres cultivables avec une grande capacité d’irrigation. Quelle que soit l’option retenue, la gestion durable de cette ressource indispensable s’impose à tous : dans certaines régions du monde, elle est rare et source de maladies et de conflits car elle touche désormais aux questions de sécurité stratégique des nations. 97.4 % 2.6 % Eau salée Eau douce STOCKS MONDIAUX EAU DOUCE Eaux souterraines 30.8% 68.9% Glaciers et couverture neigeuse permanente 0.3% Lac et reservoirs
  • 17. 17 L’eau facilement accessible (rivières, nappes souterraines) ne représente que 0,7% du stock d’eau mondial, à savoir 40 000 km 3 (environ 6 500 m 3 par habitant et par an). Il est certain que cette quantité globale disponible couvre les besoins de l’humanité et suffit à préserver les écosystèmes. En revanche, la répartition géographique et sociale de cette richesse à l’échelle planétaire reste inégale. De plus la mauvaise gestion de l’eau participe à la dégradation de sa qualité et concourt au stress hydrique et aux conflits que nous exposerons plus bas. … mais inégalement répartie 6 Avec 2,6% d’eau douce sur la terre, cette ressource est renouvelable car elle est formée par le cycle de l’évaporation qui rend cette quantité disponible toujours constante. A cause de problématiques techniques d’accessibilité, les réserves d’eau douce, essentiellement concentrée dans les inlandsis de l’Antarctique (28 millions de km 3 ) et du Groenland (2,6 millions de km 3 ), ne sont pas exploitées pour le moment. Reste alors les réserves sous-terraines (approximativement 10,5 millions de km 3 ) plutôt bien réparties entre les continents mais souvent difficile d’accès. Les eaux superficielles sont pour une grande partie stockées dans les lacs (123 000 km 3 ) 1 . Selon la banque mondiale 1,5 milliard d’humains n’ont pas accès à l’eau potable et 400 millions survivent en zone de pénurie. Projection pour 2050 6 On parle de pénurie lorsque la consommation dépasse 75% des ressources. La situation est déjà préoccupante quand elle atteint 60%. En 2030, les prélèvements en Europe sont estimés à 12% de la ressource, la consommation à 4.5%, avec des chiffres contrastés : 32% en Espagne, 8% en France, 2% en Scandinavie. La situation est tout autre en zones arides (certains pays du Maghreb, du Moyen Orient et de l’Afrique subsaharienne). Du point de vue administratif, le manque d’eau se définit comme une situation pour laquelle la disponibilité en eau renouvelable pour un pays ou une région est inférieure à 1000 m3 par personne et par année. En deçà de cette quantité, la moindre sécheresse peut s’avérer catastrophique. 1 Le volume présent dans les fleuves est estimé à 1 300 km3 , l’atmosphère et la biosphère étant négligeable. Selon des données recueillies en 2011 (Rapport de l’ONU) :  Fin 2011, 89% de la population mondiale avait accès à une source d’eau potable améliorée et 55% disposait de l’eau courante. 768 millions d’individus n’avaient alors aucune source améliorée d’eau potable, dont 185 millions étaient tributaires des eaux de surface pour leurs besoins quotidiens.  Il existe toujours des disparités frappantes entre les populations résidantes en zone rurale et celles habitant les villes. Les citadins comptent pour trois-quarts des individus qui ont accès à l’eau courante. Les communautés rurales abritent 83% de la population mondiale n’ayant pas accès à une source améliorée d’eau potable et 71% des personnes qui vivent sans assainissement. Des pays comme le Canada, la Russie, une grande partie de l’Europe ainsi que de l’Amérique disposent d’importantes réserves en eau et ne présentent pas de risque de pénurie. Dans certaines régions des Etats- Unis, de l’Inde ou de la Chine, le risque de concurrence est bien présent. L’Afrique Sub-saharienne connaitra très probablement une situation critique à cause du manque d’investissements. Enfin, les risques de pénurie sont élevés pour l’Afrique du Nord, le moyen Orient, l’Asie centrale, le sud de l’Inde, la Chine du Nord et l’ouest des USA car les populations utiliseront l’eau à un rythme plus rapide que le taux naturel de renouvellement.
  • 18. 18 Figure 2. La situation hydrique en 2050 L’accroissement démographique de la population mondiale (1 milliard d’habitants en 1800, 6 milliards en 2001 et 8 milliards en 2015) est l’une des principales causes de pénurie. En effet le besoin des hommes qui va croissant aggrave l’inégale répartition des ressources en eau, les conflits entre les usages et participe à l’altération de la qualité de l’eau. LES BESOINS EN EAU 7 Dans le monde, l’eau est utilisée à 70% pour l’agriculture, à 20% pour l’industrie et à 10% pour la consommation domestique (alimentation et hygiène). Avec la croissance continue de la population mondiale et l’élévation du niveau de vie moyen, des différences saisissantes et de fortes disparités d’usages sont à noter en fonction des continents et des régions (Plus de 200 litres/jour en Europe, 500 litres/jour en Australie ou aux USA…). 7 Mais aujourd’hui, c’est à l’agriculture irriguée que l’on doit la sur-utilisation d’eau dans le monde : en Inde, en Chine ou au Mexique, près de 85% de l’eau douce est consommée pour l’agriculture alors qu’en France, ce taux est d’environs 20%. Afin d’assurer la survie alimentaire, il faut environ 1000 litres d’eau pour produire 1 Kg de blé, 400 L pour 1 Kg d’orge, 100 L pour 1 Kg de pommes de terre, 13000 L pour 1 Kg de bœuf ou encore 4000 L pour 1 Kg de volaille. L’enjeu du futur étant bien entendu de nourrir 9 milliards d’individus en 2050 ! 2 L’irrigation intensive peut avoir de graves conséquences sur l’environnement comme le montre l’exemple de la Mer d’Aral en Asie Centrale. Avec le développement de la culture intensive du coton au Kazakhstan et en Ouzbekistan, l’irrigation a peu à peu réduit les débits des fleuves Amou Daria et Syr Daria avec des pertes considérables (40% de l’eau prélevée arrivait aux cultures irriguées). Cela a eu pour conséquence l’assèchement de la Mer d’Aral dont la surface a diminué de 30% depuis 1960. Ressource abondante Pénuries structurelles Pénuries conjoncturelles Situation critique par manque d’investissement Non estimé
  • 19. 19 LE CAS DE LA FRANCE D’après le Service de l'Observation et des Statistiques (SOeS), 28,3 milliards de m 3 d’eau douce ont été prélevés en France métropolitaine en 2010, et cela pour différents usages : la production d’électricité (61%), l’eau potable (19%), l’irrigation (11%) et l’industrie (9%). Figure 3. Prélèvements d’eau douce en France – données 2010 Notons que ces quantités d’eau ont été prélevées à partir d’eaux de surface à hauteur de 78% et d’eaux souterraines à hauteur de 22%. Figure 4. Evolution des prélèvements en eau par usage Si le volume total prélevé dans les ressources en eau baisse depuis les années 2000, les évolutions selon les usages diffèrent. Concernant l’industrie et les autres usages économiques, les prélèvements diminuent depuis la fin des années 90, alors que pour la production d’eau potable, la baisse est plus récente. Pour les prélèvements agricoles, les changements successifs de mode de calcul ne permettent pas de donner de tendance 3 . 8 3 À partir de 2008, l’estimation de certains prélèvements pour l’irrigation a été modifiée et les données ne sont plus comparables. Source : agences de l’Eau, 2012. Traitements : SOeS, 2013. Production d'électricité Eau potable Agriculture Industrie 17% 11% 9% 61% Prélèvements d’eau douce en France en 2010.
  • 20. 20 LE CAS DE L’UNION EUROPEENNE 9 Au niveau de l’Union Européenne, les prélèvements d'eau par usage varient d'un état à un autre. Cela est dû aux contextes géographiques et climatiques très variés dans lesquels évoluent les différents pays, mais aussi à leurs situations économiques et démographiques très distinctes. 218 km 3 d'eau sont prélevés dans l'Union Européenne chaque année 4 . La France, l’Allemagne, l'Italie et l'Espagne totalisent plus de la moitié des prélèvements totaux. En termes de prélèvement par habitant, le Danemark, la Suède, le Luxembourg, les Pays Bas et le Royaume Uni comptent parmi les pays dont les prélèvements d'eau par habitant sont les plus bas. Alors que l'Italie, le Portugal et l'Espagne arrivent en tête devant l’Allemagne et la France. Dans certains pays comme le Danemark, le Luxembourg, ou le Royaume Uni, plus de 40 % des prélèvements sont effectués pour l'approvisionnement en eau potable et la consommation domestique. Dans d’autres pays c’est pour le secteur de l’énergie que les prélèvements sont les plus importants, notamment pour la production d'électricité par exemple en Belgique, en Allemagne, en France et aux Pays Bas. Citons également les pays du Sud tels que l'Italie, l'Espagne, la Grèce ou encore le Portugal, où l'agriculture est plus consommatrice en eau. Ce n’est pas le cas dans les pays d'Europe du Nord : La Finlande et la Suède, par exemple, prélèvent très peu d'eau pour l’agriculture, mais énormément d’eau pour l’industrie (notamment pour la production de cellulose et de papier). Globalement, l'Europe consomme chaque année 180 km 3 d'eau dont 80 km 3 en Europe de l'Ouest. La demande en eau par habitant y est également plus faible comparée à l’Asie. Cette relative faiblesse résulte essentiellement des pratiques agricoles mieux maitrisée (cultures moins gourmandes en eau, irrigation moins utilisée…). 9 ET DANS LE MONDE Au cours du siècle dernier, la consommation d'eau dans le monde a été multipliée par six, soit deux fois plus vite que le taux de croissance démographique. Cela dit, la croissance de la demande en eau varie fortement d'un pays à l'autre. Elle dépend de plusieurs facteurs comme le développement économique des pays ou le nombre de leur population ainsi que de la ressource elle-même. On constate que les pays les plus consommateurs d'eau l’utilisent d'avantage pour l'irrigation et l'industrie. »» Selon la FAO (Food and Agriculture Organization), en 2012, le volume d'eau douce prélevé au niveau mondial était de 3 890 km3 (représentant 555m3 /habitant/an). Les prélèvements d'eau sont fortement concentrés puisque les cinq pays les plus utilisateurs cumulent 60 % du total mondial. L'importance de leur population ainsi que les activités économiques du pays (agriculture et industrie) expliquent cette prédominance.  Chine (1,240 milliard habitants) 525 km 3 /an  Inde (970 millions habitants) 500 km 3 /an  USA (270 millions habitants) 467 km 3 /an  Pakistan (146 millions habitants) 155 km 3 /an  Russie (146 millions habitants) 77 km 3 /an En termes d’usages, l’agriculture arrive en tête. En effet, environs 70% de l'eau prélevée est utilisée pour l'irrigation. Ce taux peut atteindre 90% dans certaines régions du globe. Les usages industriels représentent quand à eux 20%, les usages domestiques 10%. De nos jours, l’agriculture est donc l'activité humaine utilisant la plus grande quantité d'eau. Elle est majoritairement consacrée à l'irrigation des cultures 6 . En réalité, c’est avec près de 20% de terres irriguées (310 millions d'hectares) dans le monde (5% en Afrique et 35% en Asie) que l’on produit près de 40% de l'alimentation mondiale. 4 Source Eurostat 5 Source : World Resources Institute 2011 6 Les terres irriguées assurent une productivité 2,7 fois supérieure à celles des terres arrosées par la pluie. Plus des deux tiers des terres irriguées se trouvent en Asie dans les territoires à forte densité de population où la forte croissance démographique a justifié une intensification de la riziculture. Actuellement, sur 1,5 milliard d'hectares de terres cultivés, on compte 310 millions d'hectares irrigués. Depuis 1960, les surfaces irriguées ont environ doublé dans le monde et le recours à l'irrigation va devenir de plus en plus indispensable dans l'agriculture pour répondre à l'augmentation des besoins alimentaires et nourrir les 9 milliards d'individus qui peupleront la terre en 2050. Source Aquastat – Base de données : http//fao.org/nr/aquastat– FAO 2012.
  • 21. 21 Les variations en fonction des régions sont très importantes, en raison du climat, des techniques d'irrigation utilisées, du type de cultures et du rendement des récoltes. 32% des prélèvements vont à l'agriculture en Europe contre 84% en Afrique et 88% au Moyen-Orient. Tous ces chiffres traduisent le rôle très important de l'irrigation et ses enjeux stratégiques croissants. Mais les secteurs de l’industrie et de l’énergie ne sont pas en reste. A l’échelle mondiale, les prélèvements d'eau à des fins industriels et énergétiques représentent près de 800 km 3 /an, soit 20% des prélèvements totaux. Dans les pays d’Europe ou d’Amérique du Nord, où l’usage industriel et énergétique est dominant, plus de 60 % des prélèvements en eau y sont destinés. Ces mêmes prélèvements sont en constante hausse dans les pays du Sud dont l’essor économique s'accentue. Enfin, l'eau domestique ne représente qu'un dixième des prélèvements au niveau mondial. Ce taux varie de quelques pour cent dans les pays les plus pauvres et n’atteint que 20% pour certains pays développés. QUALITE DE L’EAU A l’échelle mondiale, l’approvisionnement en eau potable n’est pas homogène : dans les pays d’Europe et les pays développés cet approvisionnement est satisfaisant. Mais dans beaucoup de pays (particulièrement en Asie et en Afrique) l’eau n’est pas toujours potable. Les risques pour la santé sont liés à la présence d'agents infectieux, de produits chimiques toxiques ou encore à des dangers de nature radiologique. Louis Pasteur avait affirmé que « nous buvons 90% de nos maladies ». En effet, l’eau non potable cause diarrhée, choléra, fièvre typhoïde, et dans beaucoup de cas entraine la mort. Ainsi, d’après l’Organisation Mondiale de la Santé :  près d’un milliard de personnes n’ont pas accès à une source d’approvisionnement en eau améliorée.  chaque année, deux millions de décès sont attribuables à l’insalubrité de l’eau et à l’insuffisance de l’assainissement et de l’hygiène.  plus de 50 pays notifient encore des cas de choléra à l’OMS.  l’utilisation croissante des eaux usées en agriculture offre certes des possibilités de revenu, mais est également associée à des risques importants pour la santé publique. Du fait de la pollution, l’eau naturelle n’est pas directement consommable. Avant d’être redistribuée, elle doit être analysée et traitée. La présence de polluants chimiques dans les écosystèmes aquatiques est largement documentée. Les pouvoirs publics ont déployé un certains nombre de plans pour suivre et maîtriser les contaminations. La recherche dans ce domaine est très active. Les connaissances sur la bioaccumulation et les transferts de contaminants dans les systèmes aquatiques ont permis de définir des seuils de gestion des eaux et des sédiments contaminés (PCB, Composés perfluorés, alkylphénols, etc). Aujourd’hui, des biomarqueurs permettent aisément de détecter et de caractériser les effets des contaminants chimiques. Pour autant, les questions adressées à la recherche restent nombreuses. Parmi ces interrogations, celles relatives aux contaminants dits « émergents ». En effet, des inquiétudes sont apparues concernant la présence de certains polluants dans l’eau potable et les écosystèmes aquatiques. Ces substances sont soit de nouvelles molécules (récemment synthétisées), soit des molécules que l’on vient seulement d’être capable de détecter et d’analyser. Du fait des lacunes concernant le comportement de ces polluants « émergents » dans l’environnement (eaux, sols, organismes vivants, etc.) et leur impact sur la santé et la vie des écosystèmes, de nombreuses questions restent adressées à la recherche. D’après l’OMS une eau est considérée comme « potable » ou « salubre », dès qu’il est possible de la consommer sans risque. Elle répond donc à des normes microbiologiques, physiques et chimiques très précises.
  • 22. 22 Les résidus pharmaceutiques représentent également un défi majeur pour la recherche scientifique. Ils sont aujourd’hui omniprésents dans notre environnement (eaux profondes, eaux de surfaces, eaux de boisson, mais aussi dans les organismes vivants : poisson, oiseaux, etc.). Ces résidus proviennent de l’industrie pharmaceutique (usines de formulation ou de conditionnement), des élevages (dont les rejets sont souvent chargés en résidus pharmaceutiques) mais également des effluents des stations d’épuration urbaines 7 . Une gestion optimisée des effluents hospitaliers doit donc être développée et l’identification de ces résidus ainsi que l’étude de leur potentiel nocif (notamment écotoxicité) doivent être réalisés. GESTION DE L’EAU 10 Le prix de l'eau dépend de différents facteurs, et particulièrement de celui de la qualité de la source dans laquelle l’eau est puisée. Le prix dépend également de la densité de la population, de la performance du réseau de distribution et des choix des collectivités (niveau de service proposé aux consommateurs, investissement dans les infrastructures, etc.). Le marché français de l’eau et de l’assainissement est dominé par les groupes français Veolia Environnement et Suez Environnement. Ces deux groupes réalisent à eux deux près des deux tiers du chiffre d’affaires sectoriel. Bien positionnés auprès des collectivités, ils assurent la production, la distribution et l’assainissement de l’eau. Ils interviennent également dans l’entretien et la modernisation des réseaux. Le marché français étant atone, les grands groupes tels que Veolia Environnement et Suez Environnement ont opté pour une croissance à l’international. Suez Environnement a ainsi signé en juin 2013 un contrat de 28 millions d’euros avec la commune tchèque de Benešov. Le contrat portait sur la gestion durant 10 ans 10 des services d’eau et d’assainissement de la municipalité. Veolia Environnement a pour sa part décroché, en avril 2012, un contrat (36 millions de dollars) portant sur l’optimisation de la performance des services de distribution et d’assainissement d’eau avec les autorités de New York. En mai 2013, le groupe a remporté un contrat (130 millions d’euros) pour la construction de trois unités de traitement des eaux brutes et usées pour l’usine brésilienne du groupe papetier chilien CMPC. Les impératifs économiques, le changement climatique ainsi que les pénuries en eau dans certaines régions du monde ont initié le recours à des solutions alternatives : récupération des eaux de pluie avec double circuit ménager, récupération de l’humidité et du phénomène de condensation (Warka water), captation des nuages en altitude, transfert de l’eau par bateaux citernes, etc. Cela dit les moyens les plus répandus restent l’édification de structures de traitement ou de rétention d’eau (tels que les usines de traitement et de dessalement ou les barrages). 7 Il est aujourd’hui établi que les stations d’épuration sont globalement peu efficaces pour le traitement des résidus pharmaceutiques. En particulier, ceux issus de l’activité hospitalière.
  • 23. 23 I3 ce sont trois interrogations pour échanger avec un expert sur l'environnement de l'entreprise. Nous nous intéressons dans cette édition à cette ressource vitale qu’est l’eau. Nos invités aujourd’hui sont David Cohen-Tanugi, chercheur au département Materials Science and Engineering au Massachusetts Institute of Technology ; Philippe Moulin, président du Club Français des Membranes ; Edna Nakati, System Marketing Manager chez ITRON ; Adèle Wudtavee, Chargée de communication chez INDURA et PASCAL BOULANGER, Président fondateur de NaWaTechnologies. Ces experts nous présentent les travaux de recherches qu’ils soutiennent et les innovations qu’ils portent au sein de leurs structures. Kamitis: The future security of freshwater resources around the world is of increasing concern. Can you present us your research concerning desalination? D. COHEN-TANUGI: I am using nanotechnology to make water desalination more energy-efficient, accessible and economical. While we traditionally had access to groundwater and surface water (e.g. rivers) to meet all our needs, these resources are becoming increasingly scarce as well as polluted. As a result, many countries are starting to look at desalination, which involves obtaining fresh water from a saltwater source like the ocean. In the past, only desert countries such as Saudi Arabia relied on desalination, but nowadays cities as diverse as Mumbai, Beijing and San Diego are also resorting to large desalination plants to meet their water needs. I am in the fourth year of my Ph.D. studies in the Department of Materials Science & Engineering at MIT. Together with my adviser, Professor Jeffrey Grossman, and two fellow graduate students, Shreya Dave and Brendan Smith, we are working to design, produce and test new membranes that would desalinate water more efficiently. In 2012, we predicted using computer simulations that a material called nanoporous graphene would reject salt thanks to sub-nanometer pores while letting water flow at 1000 greater permeability than conventional polymer membranes. This prediction was followed by an avalanche of new interest in water purification applications among physicists and materials science, which is very good news. Since 2012, we have made significant progress in understanding how such a membrane would work and in exploring the best pathways to produce this material and fully leverage its benefits for society. I3 ADVANCED MEMBRANE TECHNOLOGY DAVID COHEN-TANUGI Ph.D. Candidate Department of Materials Science and Engineering, Massachusetts Institute of Technology, Cambridge, Massachusetts 02139, United States. CONTACT: DCTANUGI@MIT.EDU http://www.mit.edu/~dctanugi ” I am using nanotechnology to make water desalination more energy-efficient, accessible and economical.”
  • 24. 24 Kamitis: You also studied nanostructures like graphene for water desalination. Are nanomaterials a strategic lever for next generation membranes for clean water technology? D. COHEN-TANUGI: I believe we need several revolutions in the water sector in the 21st century. We are going to need important changes in the policy, economics and public behavior regarding water production, pricing and usage. At the same time, I believe nanomaterials have a critical role to play in the future of clean water. Since my work has been focused on nanomaterials for advanced membranes, I can talk about this opportunity more specifically. My group has shown that a desalination membrane that is just three times more permeable to water would allow for up to 15% less energy consumption. This goal is within reach of contemporary materials science, especially because the academic fields of materials science and applied physics have traditionally ignored clean water applications. In other words, I believe there is a lot of low-hanging fruit for nanomaterials science to improve the clean water sector. Kamitis: Your research suggest that advances in membrane science will continue to make desalination increasingly competitive as an option for fresh water supply in coming decades. In your opinion, what are the issues and challenges that membrane technology can meet tomorrow? D. COHEN-TANUGI: Innovative membrane technologies will continue to enable greater efficiencies in existing water applications, and they will also enable new applications altogether. In my opinion, the biggest challenges that membrane technology can meet tomorrow are the treatment of highly polluted waters, for example from shale gas production with hydraulic fracturing, as well as continuing to fill the growing gap between supply and demand for fresh water around the world. More innovations are still needed, however. Membranes today are still too prone to organic fouling and to mineral scaling, leading to lower fluxes, shorter membrane lifetimes, and much more complex pretreatment steps than would be needed otherwise. RO membranes are also insufficiently selective to uncharged species like boron. Overall, the future of membrane technologies is bright. The field of nanotechnology has much to contribute to the development of next-generation membranes, and greater R&D initiatives around membrane technology worldwide can help us innovate towards a better, cleaner tomorrow.
  • 25. 25 Kamitis : Vous présidez le Club Français des Membranes. Ce club est un lieu d’échange entre les acteurs académiques et industriels, et joue un rôle majeur dans la promotion des procédés membranaires. Quelles sont les réalisations de ce réseau ? Philippe Moulin : Créé en 1996 * , le Club Français des Membranes (CFM) est, depuis octobre 2011, une association à but non lucratif régie par la loi de 1901. Il regroupe les compétences nationales dans le domaine des procédés membranaires. C’est un lieu privilégié d’échanges entre chercheurs, industriels et acteurs des centres techniques. Les membres du club apportent une complémentarité d’approches et de compétences au service de la promotion de ces technologies : fabrication, développement, génie des procédés, ingénierie, utilisation... L’objectif du CFM est de favoriser :  l’utilisation des membranes et des procédés membranaires, de les promouvoir et les rendre accessibles à tous ;  l’échange entre les différents acteurs académiques et industriels de la communauté française et francophone des membranes et procédés membranaires,  les actions de formation et de communication concernant la recherche et les développements dans ces domaines,  les actions visant à impliquer les membranes dans le secteur industriel. Le club regroupe aujourd’hui un peu moins de 200 adhérents dans le domaine académique et industriel (les laboratoires et les industriels qui travaillent dans le domaine des membranes, fabricants de membranes, utilisateurs, …). Le CFM est organisé en groupes de travail (GTs) ** . Ce sont des lieux d’échange et de réflexion sur les problématiques des membranes, les procédés membranaires, leurs atouts et leurs limites dans les intégrations industrielles. Ces groupes ont un rôle d’information mais également de formation. Des actions ciblées peuvent être déployées en support (rédactions de documentations spécialisés, cahiers de vulgarisation, ouvrages de synthèses, animations de journées thématiques ou colloques). Chaque groupe de travail organise à minima une journée thématique par an, où des intervenants viennent présenter des retours d’expérience. Ces rencontres sont suivies de discussions sur les innovations et les nouveaux concepts relatifs aux membranes. Les prochaines journées déjà programmées porteront sur, pour la première, la modélisation moléculaire et filtration membranaire (un domaine mal connu encore aujourd’hui). La deuxième journée est consacrée à la caractérisation des membranes, avec notamment des intervenants qui développent des techniques de caractérisation ou qui sont confrontés à des problématiques de caractérisation de membranes ou de colmatage. Le CFM est un lieu d’échange et de partage très dynamique. On y trouve par exemple des offres d’emploi, des retours d’expérience concernant les congrès et les salons, les laboratoires partenaires y présentent les résumés des thèses soutenues afin de donner un aperçu aux industriels des dernières recherches effectuées et de créer. Autour des technologies des membranes PHILIPPE MOULIN PRÉSIDENT DU CLUB FRANÇAIS DES MEMBRANES CONTACT : philippe.moulin@univ-amu.fr 06 67 14 14 18 PHILIPPE MOULIN PRÉSIDENT DU CLUB FRANÇAIS DES MEMBRANES CONTACT : philippe.moulin@univ-amu.fr 06 67 14 14 18 * Le Club Français des Membranes a été créé conjointement par l’Agence de l’Environnement et la Maîtrise de l’Energie (ADEME), le Commissariat à l’Energie Atomique (CEA), le Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), l’Electricité de France (EDF), l’Institut Français du Pétrole (IFP) et l’Institut National pour la Recherche Agronomique (INRA). ** Les différents groupes de travail sont : GT eau effluent et fluides alimentaires, GT Modélisation, GT Développement durable, GT Chimie et Energie, GT Formation, GT Analyse, Caractérisation et Normalisation. ” Les membres du Club Français des Membranes apportent une complémentarité d’approches et de compétences au service de la promotion de ces technologies.”
  • 26. 26 Kamitis : Quels constats faites vous concernant le marché des membranes en France, en Europe et dans le monde ? P. Moulin : Les technologies des membranes sont aujourd’hui matures. Elles existent depuis longtemps, et nous avons des retours d’expérience depuis plusieurs décennies sur des procédés comme, par exemple, la dialyse pour l’insuffisance rénale ou la production d’eau potable à partir d’eau de mer ou d’eau douce. Le secteur des procédés membranaires connait un taux de progression de 12% par an. Concernant les domaines relatifs au traitement de l’eau, ce taux atteint plus de 20% par an. Dans le contexte de crise que nous vivons aujourd’hui au niveau mondial, on peut dire que le marché se porte très bien. Notre pays bénéficie d’un potentiel de recherche très important et compte des utilisateurs stratégiques dans différents secteurs notamment en environnement (Veolia et Suez) et en agroalimentaire, où les membranes sont incontournables (Filtration du lait). Au niveau européen, des efforts restent à faire afin de développer et coordonner les connexions entre les actions européennes et les pôles de compétitivité français. Philippe Moulin mène des travaux de recherche au sein de l’équipe procédés membranaires du laboratoire de Mécanique, Modélisation & Procédés Propres. Il nous présente cette activité dans les quelques lignes qui suivent. Les recherches menées au sein de l’Equipe Procédés Membranaires (EPM) du laboratoire de Mécanique, Modélisation & Procédés Propres ont pour objectif d’optimiser les procédés membranaires par une meilleure compréhension des mécanismes mis en jeu. Les travaux concernent principalement le traitement des effluents et leur réutilisation, la production d’eau potable ou d’eaux purifiées et la purification et la production de molécules à hautes valeurs ajoutées. Le développement de nouveaux tests d’intégrité, d’unités industrielles (i) de traitement d’hydrocarbure (ii) de recyclage d’effluents en électronique, (iii) de fabrication de médicaments à domicile (iv) de production d’eau potable pour les marins pompiers ou (v) de dessalement d’eau de mer par énergie solaire sans batterie sont autant d’exemples qui illustrent la pertinence et l’originalité de ces travaux. Les activités de recherche de notre équipe sont divisées en cinq axes de recherche :  Bioréacteur à membranes : ce procédé, qui a connu une forte croissance en France et en Europe ces dernières années, présente l’avantage d’atteindre une haute qualité de traitement des eaux usées. Il est particulièrement adapté pour répondre à des exigences de qualité élevées, demandées comme pour les effluents industriels ou émanant des hôpitaux.  Caractérisation de membranes et Eau potable : cet axe de recherche s’inscrit dans une volonté de développement des procédés membranaires qui est limité par deux phénomènes directement liés au dimensionnement et à l’exploitation des procédés (le colmatage et le vieillissement des membranes). L’objectif est de mettre en place une démarche de caractérisations optique, microscopique et dynamique à différentes échelles afin d’expliquer les dérives des procédés (chute de flux, perte de sélectivité...). En parallèle de nouveaux procédés de production d’eau potable ou d’eaux ultrapures sont développés.  Industrialisation de procédés et CFD (Computational Fluid Dynamics) : Il s’agit ici de limiter le prototypage par l’utilisation de l’outil numérique qui permet de mieux appréhender les aspects fluidiques tout en prenant en considération les échelles nanométriques des pores, millimétriques des membranes et métriques des modules. Les champs de pressions et de vitesses dans des modules membranaires industriels de production d’eau potable ainsi déterminés ont permis de montrer l’hétérogénéité des rétrolavages sur ces modules.  Propriétés de transport et métrologie : L’objectif est de relier les propriétés de transport en écoulement aux propriétés géométriques des structures des membranes (taille de pore, porosité, tortuosité…). Les très petites échelles auxquelles nous sommes confrontés (micro à nano) limite les disponibilités de données expérimentales à l’échelle locale et nécessitent par conséquent de développer de nouvelles méthodes de mesures. Un intérêt particulier est apporté à l’appropriation de nouvelles techniques métrologiques de pointe au domaine des membranes.  Intégration de procédés membranaires : cet axe est consacré à l’intégration de chaînes de procédé membranaire dans des chaînes de production ou des chaînes de traitements. Dans le cas du traitement des effluents, ces recherches portent sur l’étude des propriétés de transport dans les milieux poreux, en termes d’écoulement poreux ou de transfert de masse, etc. Les procédés membranaires se placent clairement dans une stratégie de valorisation de matière, de concentration d'effluents et de recyclage des effluents afin de retarder le moment où la valorisation énergétique des effluents sera la seule issue. La diffusion de procédés membranaires industriels à visée curative passe par des progrès sur trois points essentiels: (i) Envisager des couplages de procédés, (ii) Optimiser la consommation énergétique, (iii) Améliorer la durée de vie des membranes afin de limiter les déchets et coûts induits. Les problématiques scientifiques évoquées sont complexes et multiples. Dans ce cadre, les activités de recherche sont pour la majorité en partenariat avec des industriels (contrat de collaboration de recherche). A partir d’une idée développée au laboratoire (test d’intégrité – eau potable) ou d’une problématique industrielle (élimination de COV dans des effluents industriels gazeux ou liquides), il s’agit de développer de nouveaux procédés et de mettre au point de nouvelles membranes.
  • 27. 27 Kamitis : Itron est le leader mondial du marché des compteurs d’eau pour tout ce qui concerne les technologies de comptage et de transmission de données. Pouvez-vous nous présenter votre positionnement sur ce marché ? E. NAKATI : Quand on regarde la situation de la plupart des Distributeurs d’Eau dans le monde, nous constatons qu’il s’agit d’une industrie qui subit encore avec un niveau de pertes qui dépassent largement 20%. La moyenne mondiale est de l’ordre de 34% (Source : GWI – Global Water Intelligence/ WBD – World Bank Database). C'est-à-dire que environs 0.4 milliard de m 3 / jour d’eau (sur un total de 1.15 milliard des m 3 / jour) sont perdus avant d’être livrés chez les consommateurs. Parmi ces 34%, il y a ce que nous appelons les pertes physiques (ou réelles, à savoir les fuites d’eau sur le réseau avant le compteur chez le consommateur) et ce que nous appelons les pertes apparentes ou commerciales, liées surtout à l’imprécision des compteurs (effets d’usures accélérés, fraudes de la part des consommateurs, …) Le tableau ci-dessous représente le modèle préconisé par l’International Water Association pour le calcul du Bilan d’Eau (ou, Rendement du Réseau d’Eau). Les parties en rouge sont celles où nous sommes fortement impliqués. Notre offre consiste à réduire au maximum les pertes liées au compteur en proposant des équipements dotés d’une excellente précision (un des nos modèles phare compte des goutes) et des systèmes de télé-relève (automatique et à distance) qui éliminent tout risque d’erreurs liées à la relève manuelle. Quand les réseaux intelligents intègrent le comptage de l’eau EDNA NAKATI SYSTEM MARKETING MANAGER – ITRON CONTACT : edna.nakati@itron.com www.itron.com " Les enjeux soulevés par les technologies de l’Internet des Objets sur l’activité de conception et plus particulièrement sur le travail du designer sont immenses. " ” environs 0.4 milliard de m 3 / jour d’eau (sur un total de 1.15 milliard de m 3 / jour) sont perdus avant d’être livrés chez les consommateurs.”
  • 28. 28 Kamitis : en quoi consistent ces innovations ? E. NAKATI : Différents types des compteurs existent chez Itron afin de proposer une gamme adaptée à la variété des conditions de terrain et de service et qui jouent sur la durabilité d’un compteur. Les Distributeurs d’Eau ne font pas le choix uniquement en fonction des aspects techniques mais aussi en fonction des aspects financiers ou budgétaires. La transmission des données à partir de la relève des compteurs reste très variée : sur un même parc de compteurs, nous pouvons avoir la coexistence de méthodes de relève manuelles (en visuel), et automatique, avec ou sans la présence d’un releveur. Itron privilégie l’utilisation de la technologie de transmission par Radio Fréquence et GPRS car cela nécessite moins d’éléments physiques à gérer et présente moins de contraintes au niveau de l’installation surtout dans des constructions existantes. Il s’agit d’un module qui s’accroche au compteur d’eau, en mode « plug & play ». Les données relevées à partir d’un module ne concernent pas seulement le volume consommé, mais également d’autres informations qui nous permettent d’analyser le comportement de chaque compteur et d’ajouter des fonctionnalités comme la détection de fuites, la présence de débits anormaux, des anomalies d’installation (compteur monté en inverse, etc). Dans l’ensemble, cela donne une autre dimension à la relève de compteurs : il y a tellement plus d’informations pertinentes qui permettent aux distributeurs d’eau d’anticiper et d’agir rapidement en cas de problème. La quantité d’informations est bien sûr beaucoup plus importante qu’auparavant. Aujourd’hui, sur certaines de nos solutions, la granularité des données peut passer de mensuel à journalier, et dans des cas spécifiques, les alertes sont remontées en temps réel. La mise au point des infrastructures informatiques pour le stockage des données à des prix abordables (comme les services hébergés ou Cloud) associées à des outils de traitement de données très agiles, nous permettent aujourd’hui d’avoir une compréhension beaucoup plus riche et intéressante d’un réseau de distribution d’eau. Du point de vue de nos clients, cela se traduit par une amélioration significative de la qualité de service puisque l’information est disponible pour chaque compteur, ce qui assure un contrôle plus précis des volumes d’eau dans les canalisations. Kamitis : Quels sont les axes prioritaires de développement à moyen et à long terme concernant ce marché de l’eau potable ? E. NAKATI : Les axes prioritaires visent à trouver des solutions efficaces de réduction des pertes. Nous développons également des solutions qui formeront un vrai réseau intelligent dans lequel les informations provenant, soit des capteurs de pression ou de température, corrélées aux informations provenant des compteurs d’eau seront traitées efficacement et exploitées au profit des services de distribution d’eau comme des consommateurs. Nous sommes également présents dans des projets internationaux visant à résoudre des problèmes spécifiques liés à la distribution d’eau : https://www.itron.com/Pages/Itron-Customers-Testimonials.aspx https://www.itron.com/fr/Pages/default.aspx.
  • 29. 29 Kamitis : Quels constats faites vous concernant le marché du comptage de l’eau en France, en Europe et dans le monde ? E. NAKATI : La France est bien placée, tout comme l’Espagne, l’Allemagne, les Pays Bas et Singapore (qui affiche les meilleurs performances de contrôle des pertes avec moins de 25% du volume total produit). Dans le marché mondial de l’eau, des sociétés comme Veolia, Suez, Aqualia, Agbar, PWN sont présentes dans les pays où la gestion des réseaux d’eau potable n’a pas encore atteint un niveau acceptable. Ce marché est encore très vaste car plus de 60% des pays sont encore à un niveau de perte en eau potable supérieur à 30%. Un autre aspect qui changera la façon comme l’eau est gérée est la formation des villes intelligentes ou « smart cities » - ce fait nous demandera des solutions pour comprendre de mieux en mieux les réseaux d’eau et les consommateurs. Kamitis : Comment définissez-vous le positionnement de NaWaTechnologies sur le marché français ? NAWATechnologies est une toute jeune start-up mais sur un secteur qui a été très à la mode il y a à peine trois ans. Aujourd’hui la mode de nanotubes est retombée et c’est tant mieux car nous allons pouvoir faire valoir de véritables propriétés d’un matériau et non de supposées propriétés des nanotubes individuels. En effet, les nanotubes tels qu’ils ont été produits par les entreprises jusqu’à présent, dont certains gros leaders de l’industrie chimique, l’ont été sous forme de poudres. Cette mise en forme a rencontré deux problèmes : un problème de mise en œuvre avec une difficulté majeure de réaliser une mélange homogène de nanotubes de carbone dans divers matrices polymères et ensuite des performances qui ne se sont pas révélées à la hauteur des attentes car en mélangeant simplement les nanotubes vous ne profiter pas du fait que c’est intrinsèquement un matériau anisotrope. En effet toutes ses propriétés du nanotube sont selon son axe, elles ne sont pas utilisées de manière optimale dans un mélange aléatoire qui désorganise les axes de force des propriétés électriques, thermique ou chimiques. Chez NAWATechnologies nous mettons en oeuvre les nanotubes sous forme de « tapis » où tous les nanotubes sont parallèles les uns aux autres. Le matériau final obtenu « récupère » ainsi de manière beaucoup plus efficace les propriétés intrinsèques des nanotubes. Autre gros avantage, nous n’avons pas besoin de les disperser, c’est d’ailleurs l’inverse que nous recherchons, c’est à ne pas les disperser, ce qui est finalement plus facile. Nous sommes uniques au niveau européen par la technologie que nous développons mais surtout aussi par le procédé de fabrication que nous envisageons, ce qui va nous permettre de développer des produits plus performants au même niveau de prix que les technologies concurrentes. La seconde révolution des nanotubes PASCAL BOULANGER Président fondateur de NaWaTechnologies " Nous travaillons à fabriquer une membrane qui soit la plus poreuse possible et qui se positionne en rupture avec les membranes actuelles." CONTACT : pascal.boulanger@nawatechnologies.com http://www.nawatechnologies.com/
  • 30. 30 Kamitis : en quoi consistent ces innovations ? La vision de notre innovation est clairement orthogonale à ce qui existe aujourd’hui : c’est en associant nano-objet, nano-organisation et nano- engineering que nous pensons être à même de proposer de nouveaux produits plus performants que les produits actuels. Nous exploitons ainsi un savoir faire très complet, générique et unique pour développer nos produits. C’est sur cette base commune de savoir faire que nous basons nos innovations et que nous les adaptons de manière spécifique aux marchés que nous visions. Ainsi le procédé de synthèse de tapis de nanotubes est le même quelque soit l’application, ce qui va changer sera le substrat sur lequel nous les faisons croître, les différents matrices ou revêtements que nous allons utiliser et la façon dont nous allons les mettre en œuvre. Notre idée aussi est de jouer sur ce caractère générique pour pouvoir fabriquer des produits avec des solutions de stockage intégrées au cœur des produits comme par exemple des éléments de carrosserie de voiture ou d’ailes d’avions qui embarquent du stockage , ou des panneaux solaires photovoltaïques avec un stockage intégré. Nous déployons notre technologie d’abord dans le domaine du stockage, pour lequel nous recherchons à nouer des partenariats avec différents pour réaliser des démonstrateurs ou des adaptations spécifiques. Kamitis : Quelles sont les prochaines échéances pour NaWaTechnologies concernant ce marché de l’eau? A court terme nous travaillons à démontrer l’industrialisation de notre procédé de fabrication de tapis de nanotubes de carbone alignés fonctionnalisés, en grande surface pour une application spécifique qui est celle des supercondensateurs. Nous espérons l’avoir démontré d’ici deux ans et pouvoir utiliser cette application comme vitrine de notre technologie et de notre savoir faire pour d’autres applications. Dans le domaine de l’eau, nous travaillons à fabriquer une membrane qui soit la plus poreuse possible et qui se positionne en rupture avec les membranes actuelles. Nous recherchons là aussi des partenaires pour adresser des applications spécifiques car le marché de la filtration est très large et disséminé. Au delà du coût les applications qui seraient susceptibles de bénéficier des propriétés spécifiques des nanotubes de carbone, très stables, sont des applications de filtration en environnements sévères, en température en pH ou autre. Nous sommes spécialistes de matériaux et nous recherchons des spécialistes de membranes pour nous accompagner. Une fois l’industrialisation des électrodes de supercondensateurs démontrée d’un point de vue industriel, il sera alors possible de transposer le procédé à la fabrication de membranes et de développer des membranes de plus grandes surfaces. A long terme l’application de dessalement d’eau de mer nécessitera des surfaces gigantesques de production et nous en sommes encore loin.
  • 31. 31 Kamitis : INDURA (Infrastructures Durables Rhône-Alpes) est un cluster français référent pour les enjeux du développement des infrastructures de transport et de production d’énergie. Quels sont ses objectifs prioritaires, qui sont ses membres et quel intérêt trouvent-ils à en faire partie ? INDURA rassemble et accompagne les acteurs des Travaux Publics sur les enjeux de demain, pour favoriser le développement de projets innovants dans le domaine des infrastructures de transport et de production d’énergie. C’est en quelque sorte la table ronde qui réunit l’ensemble de la chaîne de valeur : entreprises (des PME aux grands groupes, des industriels aux ingénieristes), organismes professionnels, écoles, centres de recherche et instituts de formation. Nous accompagnons nos membres principalement dans le montage de projets innovants et la recherche de financement, mais aussi la recherche de partenaires et l’aide à la rédaction. Afin de faire émerger de nouvelles idées, nous organisons régulièrement des groupes de travail. L’animation de réseau tient également une place très importante et appréciée dans notre action, toujours dans l’objectif de stimuler et promouvoir l’innovation. Ainsi nos membres peuvent participer à de nombreuses conférences techniques, soirées thématiques de style « afterwork », visites de chantier, etc. Par exemple, cette année nous avons organisé une soirée sur l’auscultation des ouvrages avec EDF et une sur la réparation des ouvrages hydrauliques avec la Compagnie Nationale du Rhône (CNR). Nos membres ont également pu visiter le chantier majeur de la centrale hydroélectrique de Romanche-Gavet, la PCH (petite centrale hydroélectrique) de Rochemaure, ainsi que divers chantiers d’assainissement. Kamitis : Quelles sont les actions entreprises au sein du cluster INDURA pour soutenir l’innovation dans le domaine de l’hydraulique ? Dans le domaine de l’hydraulique, INDURA œuvre à faire émerger des solutions innovantes pour la production d’énergie « verte » (partie génie civil) et la sécurité des ouvrages de protection (barrages, digues…), incluant l’auscultation et la réparation. Sur ces sujets, plusieurs projets sont en cours, à différents stades d’avancement, notamment pour concevoir la centrale hydroélectrique du futur. Il y a quelques mois, grâce à notre collaboration avec le pôle de compétitivité Axelera, nous avons eu l’immense satisfaction de voir labelliser notre projet BOREAL au FUI 16 avec la notation maximale A+. Ce projet traite du bio- renforcement des ouvrages en remblais, autrement dit il met les bactéries au service de la protection des vies humaines face au risque sismique. En effet, la multiplication des catastrophes naturelles et le décret de 2007 sur la sécurité des barrages durcissent les normes de sûreté des ouvrages hydrauliques. BOREAL a pour objectif de développer une technique de confortement des digues en terre immergées dans l’eau moins invasive et plus écologique. Si l’utilisation des bactéries en tant que bio-calcificateurs est déjà avérée, la nouveauté de ce projet consiste à valider ce procédé en présence d’eau. Une formulation innovante permet aux bactéries de fabriquer un squelette de calcite solidifiant la matière, tout en conservant la perméabilité nécessitée par l’ouvrage. La résistance et la cohésion ainsi obtenues diminueront les risques de liquéfaction lors des séismes et d’érosion interne, sans écoulement dans la nappe phréatique. BOREAL mobilise huit partenaires : le porteur du projet Soletanche Bachy, les groupes CNR et EDF, les PME Geophyconsult et Enoveo, les laboratoires LTHE et 3SR et l’Université d’Angers. Soutenir l’innovation dans le domaine de l’hydraulique ADELE WUDTAVEE CHARGEE DE COMMUNICATION CONTACT : a.wudtavee@indura.fr http://www.indura.fr/ " C’est dans la confrontation des idées et des points de vue que naissent les projets les plus innovants."
  • 32. 32 Les procédés de géotechnique actuellement disponibles pour prévenir ces risques sont très intrusifs et peuvent avoir un impact écologique négatif. BOREAL débouchera donc sur un procédé de rupture, et permettra de créer une nouvelle filière française d’excellence. Les résultats seront facilement transposables en France et à l’international, et d’importantes retombées économiques sont attendues. Kamitis : INDURA supporte l’innovation notamment en croisant différentes technologies comme l’illustre le projet exposé plus haut. Comment se fait la sélection des projets soutenus par ce cluster ? INDURA fait émerger et soutient des projets qui répondent à de véritables enjeux sociétaux et qui présentent un fort potentiel de retombées économiques, par la commercialisation d’un produit ou procédé innovant. Nous nous efforçons également de changer l’image du génie civil et des travaux publics, domaines trop souvent perçus comme peu innovant. A tort, j’en veux pour preuve les 40% de projets rhônalpins acceptés au FUI en relation avec les thèmes de notre cluster ! INDURA dispose d’un Conseil Scientifique, composés d’experts reconnus dans leur domaine, qui évalue les projets pur s’assurer de leur qualité scientifique et technique, ainsi que de la faisabilité des projets. Après expertise, ce conseil peut décider de soutenir et labelliser des projets en lien avec les thématiques du cluster. En outre, c’est dans la confrontation des idées et des points de vue que naissent les projets les plus innovants. Ceci, INDURA l’a bien compris, en stimulant les échanges et les liens avec des métiers et des territoires différents, représentés par d’autres pôles et clusters. Les biotechnologies, comme exposé plus haut, mais également la chimie, la réalité virtuelle, les nanotechnologies... Les synergies sont le plus souvent naturelles, nous n’hésitons pas à nous solliciter entre pôles lorsque nos compétences nécessitent d’être croisées, pour des innovations encore plus probantes. Nous avons également signé des conventions de partenariat avec les pôles Advancity (ville et mobilité durables) et LUTB (transport et systèmes de mobilité). Kamitis : INDURA propose un accompagnement notamment dans le domaine des ouvrages hydrauliques, pouvez- vous nous présenter cet axe là? Le Conseil Scientifique d’INDURA a identifié lors de son séminaire stratégique annuel les thèmes prioritaires, parmi lesquels figurent la rupture des ouvrages par affouillement ou érosion, la résistance des ouvrages soumis aux séismes et les biotechnologies et dépollution. Un des projets qui nous mobilise le plus en ce moment concerne le traitement biotechnologique des ouvrages de pompage d’eau, c’est-à-dire l’utilisation de bactéries pour lutter contre le colmatage des champs captants. Pour des ouvrages hydrauliques plus sûrs et des pratiques plus respectueuses de l’environnement.