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1ETE 2014 GAZETTE 01 ANNEE 69
OURS
Magazine gratuit édité par Marcel Rose,
SASU au capital de 2 000 euros.
117, rue de Charenton, 75012 Paris.
www.lagazettedemarcelrose.fr
Numéro ISSN en cours d’immatriculation
PrEsident et directeur de la publication
Eric Boccalupo « Je veux être de ce qui va arriver. », Coco Chanel
REdacteurs en chef
Eric Boccalupo
Journalistes
Séverine Hartenstein « Le tout dans l’audace, c’est de savoir jusqu’où on peut
aller trop loin. », Jean Cocteau
Mickaël Bertrand « Le bon historien, lui, ressemble à l’ogre de la légende. Là
où il flaire la chair humaine, il sait que là est son gibier. », Marc Bloch
Pierre Lefever « Mes affaires personnelles m’ennuient à mourir. Je préfère
celles des autres. », Oscar Wilde
Photographes
Marc Daniel, « Si Adam avait été homosexuel, personne ne serait là pour le
dire. », Oscar Wilde
Sarah Lenoir, « I don’t mind living in a man’s world, as long as I can be a
woman in it. », Marilyn Monroe
Illustrateurs
Felix le Sha, « Life is too vicious ! »
David Berson
Graphiste
Eric Joseph, « On ne peut rien écrire dans l’indifférence. », Simone de Beau-
voir Les Mandarins (1954)
CORRECTRICE
Monique Van Weddingen, « Notre vraie nationalité est l’humanité. »
de H. G. Wells (dans « The Outline of History »)
IMPRESSION La Provence
COUVERTURE Photographe et D.A. : Sarah Lenoir, Mannequins : Mickael Bucaram et Ria
3
. a c c e s s o i r e s d e m o d e .
. o b j e t s d e d é c o r a t i o n .
. p a r i s .
w w w . d e l i c a t e d i s t o r s i o n . c o m
contact@delicatedistorsion.com
A
nnée 69, année érotique ?
Vous pensez voir un homme
en couverture avec de belles
tablettes de chocolat ?Ou que les su-
jets vont traiter uniquement de sexe
pour booster nos ventes ? Vous n’y
êtes pas du tout ! Pour la gazette de
Marcel Rose, l’année 69 a été une an-
née Héroïque.
« Gay is Good » slogan de la fierté et
de la libération homosexuelles qui est
encore aujourd’hui d’actualité, slogan
qui marque l’histoire de la commu-
nauté rose. On est dans l’activisme, la
libération sexuelle et morale.
Désolé de vous décevoir, mais la seule
érection que vous allez avoir c’est une
érection nerveuse quand vous allez
découvrir que dans les années 60 et
spécialement l’année 69, la commu-
nauté LGBT a fait preuve de courage
et s’est regroupée pour faire avancer
les choses.
« Le 28 juin 1969, la rafle opérée par
la police au Stonewall Inn est celle
de trop. Au lieu de se laisser pour
la énième fois disperser, arrêter ou
matraquer, les clients du bar se re-
bellent, avec, à leur tête, une bande
de travestis enragés qui parviennent à
faire reculer la police. Une bagarre de
EDITO
5
Fondateur E.B.
Photo Sarah Lenoir
quelques dizaines de participants de-
vient, cette nuit-là et les deux qui sui-
virent, un énorme soulèvement, bien-
tôt rejoint par d’autres représentants
de minorités et des droits civiques qui
défièrent les forces de l’ordre et expo-
sèrent au grand jour ces persécutions
de l’ombre. Un an plus tard exacte-
ment, la première Gay Pride était
organisée à New York, et rien n’allait
plus être comme avant : la honte di-
vise, la fierté rassemble. » citation
de l’article paru le 31/10/2012 dans
LE MONDE par Renaud Machart.
Cet événement me marque person-
nellement par la solidarité des nom-
breuses minorités qui existent dans la
communauté rose et qui se sont bat-
tues main dans la main pour défendre
leur droit.
Ce qui me touche et qui me fait rire,
c’est qu’ on a botté le cul des policiers
pas à coups de bâton, ni en jetant des
bombes aveuglantes, mais à coups de
talon bien placés !
. a c c e s s o i r e s d e m o d e .
. o b j e t s d e d é c o r a t i o n .
. p a r i s .
w w w . d e l i c a t e d i s t o r s i o n . c o m
contact@delicatedistorsion.com
SOMMAIRE
Page 8
LA CHRONIQUE ROSE
Page 16
Shooting By Sarah Lenoir // PROJET 69
Page 36
LA SOCIOLOGIE ROSE
Stonewall, 1969 : acte de naissance du mouvement homosexuel ?
Page 40
LE SYMBOLE ROSE
Le drapeau LGBT
Page 44
la mode rose
Le perfetto
Page 46
L’HISTOIRE DE MARCEL
Homosexuels français enfants de la révolution américaine ?
Page 52
REPORTAGE PHOTOS
From Paris to New-York
LA CHRONIQUE ROSE
Buttiner Ou Seduire ?
9
Chronique J.C.
Illustration David Berson
I
l ne vous ait jamais arrivé de tomber sous
le charme d’un bel inconnu. Vous vous croi-
sez et d’un battement d’ailes d’une abeille,
l’attirance s’éveille. Vous prenez un verre, vous
discutez de tout et de rien, il vous dit que vous
avez de beaux yeux, une bouche lascive, il vous
prend la main… et en un clin d’oeil vous vous
faites piquer !
Coup du jour, du matin ou du soir, c’est la joie
de la vie et à tout âge.
Quand on rencontre quelqu’un par hasard quels
sont les signes qui nous indiquent que cette ren-
contre deviendra un coup du moment ou un
coup pour la vie?
On nous répète sans cesse quand on est céliba-
taire (et ça empire avec l’âge) que quand on le/
la verra, on le saura de suite… c’est vrai ça m’est
arrivé.
Je suis allé à une soirée chez des amis, on était
une trentaine autour de la Reine des abeilles.
Dès que j’ai passé la porte, elle et moi avons
échangé des regards et ça été le coup de foudre
immédiat.
C’était magique toutes ses abeilles qui essayaient
de butiner la reine qui ne faisait que de me re-
garder et me parler. On est parti s’acheter des
cigarettes seuls en repoussant les abeilles un peu
trop collantes. Dans l’ascenseur la tension était
haute, on s’est frôlé à plusieurs reprises, une fois
les cigarettes achetées on a joué à qui allume la
cigarette de l’autre en profitant de se toucher la
main. Tout était sensuel, la rencontre magique,
seul au monde dans cette ruche.
Le problème est vite arrivé lorsqu’une troisième
et belle abeille est arrivée entre nous. Rapide-
ment, elle était tellement présente essayant de
me piquer avec son dard, que pour protéger
«la magie avec mon bel inconnu», j’ai déci-
dé de partir de la soirée laissant mon numéro
de téléphone à la reine pour la revoir dans un
autre contexte. Libre cours à mon imagination,
en pensant qu’elle allait partir seule de la soi-
rée et qu’elle allait me rappeler le lendemain…
j’ai cru qu’en agissant ainsi que notre rencontre
d’un soir allait devenir au moins relation pour
quelques semaines avec des rendez-vous ga-
lants, et on ne sait jamais gouter à notre miel…
grossière erreur !
La reine est bien partie de la soirée mais pas
seule … avec bien évidement la 3ème abeille
butineuse.
Ça m’amène à me poser certaines questions
à savoir si une rencontre imprévue a une date
de péremption ? Et quand il s’agit de la «reine
des abeilles» la date de péremption n’est elle
pas davantage plus courte ? Faut-il oublier dans
ce type de rencontre, Romantisme et Liberté
d’imagination plus sérieuse?
Un ami m’a dit qu’il aurait mieux valu que je
vole plus vite vers la Reine et la piquer avec mon
dard. N’ayant pas profité du moment présent et
m’ayant mordu les doigts plus tard, il est pro-
bable que la meilleure attitude à adopter c’est
de penser présent et de profiter de la vie avec
cet(te) inconnu(e) sans se projeter dans le futur.
Consommer sur place ou à emporter, est-elle
vraiment la seule option que la vie nous pro-
pose ?
Chronique J.C.
Illustration David Berson
S
i vous êtes célibataire et que vous attendez
que le prince charmant vienne frapper à
votre porte eh bien vous allez rester seul
très longtemps… voir à tout jamais ! (la fameuse
phrase de fin des contes de fées !)
Premier moyen pour faire des rencontres :
les sites.
Meetic, Grindr, Scruff, Nopicnodial, Gayroméo,
Menoboy… pléthore de sites pour pousser un
peu le destin. On est tous d’accord que de nos
jours, il n’y a pas que des geeks, maigres avec des
lunettes derrière les écrans. On a réussi à trans-
former ce moyen «facile» de rencontres en un
allociné pour voir, choisir et commander le film
le plus intéressant dans la salle de ciné la plus
proche de chez nous.
Nous avons donc agrandi nos critères de ren-
contre : la distance en km, la taille en cm, la cor-
pulence en 4 niveaux (Mince, Moyenne, Ath-
létique, Musclé) - on oublie certains certains
critères primordiaux au vu de la qualité des
échanges comme le QI…
Sans bouger de chez soi et surtout pour les per-
sonnes trop timides pour faire le premier pas,
voilà la promesse des rencontres virtuelles.
Aujourd’hui ce moyen est-il utilisé pour des
rencontres d’un soir uniquement ? Avec de la
chance, vous pourriez trouver l’internaute qui
sortira du lot.
Deuxième moyen : la ville.
A qui me jette la pierre le premier, qui n’a ja-
mais croisé un beau jeune homme seul et qui
n’a jamais osé s’en approcher. Passer du virtuel
à la réalité devient bien difficile, on ne peut lui
envoyer des étoiles pour lui faire comprendre
qu’il nous plait, ni lui envoyer un «Salut, ça va?».
Pourtant c’est tout aussi simple de regarder et
juste de lui faire un sourire. Sourire rendu, bin-
go ! on peut s’en approcher lui serrer la main (et
pas la bise !!!) lui dire une connerie (et on évite
«tu as de beaux yeux» ou pire «j’adore tes chaus-
sures ! «) et lui filer sa carte avec ses coordon-
nées et laisser les choses se faire naturellement !
Tout moment est opportun pour faire des ren-
contres et n’importe où !
Les meilleurs rencontres ne sont-elles pas quand
on s’y attend le moins ? Faut-il uniquement se
contenter d’attendre un message virtuel pour
savoir si on plait à quelqu’un ou ne vaut-il pas
mieux se confronter réellement à la vie et foncer
quand un mec nous plait ?
Troisième moyen : le jardin de Tuileries.
Surpris par tous les lieux qui existent à Paris
pour faire des «rencontres» très portées sex (les
backrooms, le dépôt, les sauna…) j’ai été éton-
né d’apprendre que le jardin des Tuileries très
visité en journée par les touristes, les familles
et les sportifs, était également très prisé en pro-
fondeur par des gays. Certains restent plantés
au milieu des buissons dans le noir et dans le
froid voir sous la pluie, d’autres font leur défilé
et shopping en déambulant dans les vastes che-
mins de ce labyrinthe et s’arrêtent pour choisir
le mec qui sera l’homme d’une nuit (voir d’une
demi heure).
Jusqu’où irons-nous pour faire des rencontres
d’une nuit ? Allons nous créer encore un autre
lieu pour baiser plus facilement ? Entre bran-
lette et coup d’un soir, vous préférez quoi? Avec
le mariage qui vient de passer (et malheureu-
sement le divorce automatiquement), n’espérez
vous pas voir un jour des lieux de rencontre
plus «élégants» voir «conceptuels» apparaître
dans notre menu ? Nous commençons sérieuse-
ment tous à être en manque d’endroits où nous
pouvons discuter, plaisanter et s’amuser pour
faire des rencontres de qualité. Entre anorexie
d’endroits conformes et boulimie d’endroits in-
solites, ne risquons-nous pas de vivre le «black-
out» de notre réseau ? Notre réseau perd de son
bon coming out malgré les multiples moyens
de rencontres directs et digitaux, notre basique
instinct de former une unité avec une 2ème per-
sonne, ne serait-il pas entrain de mourir à coup
de pic à glace ?
11
LA CHRONIQUE ROSE
LE RESEAU GAY
ET SON COMING IN
LA CHRONIQUE ROSE
QUAND CUPIDON S’EMMERDE...
T
rouver la personne idéale, celle qui leur
est destinée, comme créé rien que pour
elles, est un rêve que toutes les femmes,
quelque soit leur préférence sexuelle, ressentent
au plus profond de leur coeur. Mais à l’ère de
la 4G, des réseaux sociaux, du virtuel érigés en
mode principal de communication, ce n’est pas
si aisé ! Et si les informations circulent à vitesse
grand V, les préjugés eux, semblent bien encore
stagner…
Dans les contes de fées de notres enfance, la
princesse et la bergère finissent toujours par
trouver, enfin, leur grand amour quelques
soient les obstacles (je sais, ça énerve) ! Alors,
imaginons un instant, rien qu’un petit instant,
que… Il était une fois, au Paradis, Cupidon, un
petit ange joufflu, aux boucles blondes comme
il se doit, dont les ailes duveteuses battaient l’air
impatiemment car, osons l’avouer, il régnait
dans ce monde si blanc, si pur, si parfait et si
prévisible un tel ennui, qu’il en devenait diable-
ment mortel !
Beaucoup plus bas, sur la terre, dans un café pa-
risien bobo chic à 20H. Une jeune femme, au
visage délicat, dont la chevelure rousse relevée
en un chignon à l’élégant chahut, vêtue d’une
robe en mousseline réchauffée d’un petit blou-
son en cuir et chaussée, non pas de pantoufle
de vair (Cendrillon n’est pas l’unique héroïne
des contes, soyons ouverts) mais de sages bal-
lerines, sirotait d’un air vague et mélancolique
sa boisson. Cette vision attisa la curiosité de cet
ange qui, il faut bien le dire, était plus sensible
à la mode qu’aux problèmes existentiels et à la
nature humaine (vous comprendrez plus tard ce
petit détail). Au lieu de se demander, mais pour-
quoi une si charmante jeune femme si trendy
13
Chronique Sévérine Hartenstein
Illustration David Berson
se retrouvait seule dans ce café, il se demanda
pourquoi elle ne portait pas les chaussures de
Cendrillon (encore elle !). Son comparse, un
autre Cupidon, qui était en train d’envisager
sa mutation en Enfer pour traiter des dossiers
plus palpitants, remarqua lui aussi cette douce
créature terrestre. Mais ce ne sont pas ses pieds
qui l’intéressèrent, c’était son coeur qui attendait
depuis trop longtemps l’âme soeur : il décida d’y
remédier avant qu’elle et lui ne meurent d’ennui
(ce qui finalement était assez égoïste de sa part
mais tous les anges ne sont pas parfaits non, non
!). Se disant qu’un peu d’air pollué et d’action
lui feraient le plus grand bien, il descendit en
un clin d’ailes sur Terre, son compagnon à ses
côtés.
Plein de bonne volonté, Cupidon joufflu pro-
posa son aide et ayant repéré dans le café, un
homme élégant, à l’allure racée et beau à tom-
ber, il sortit son arc et tira sa flèche, certain
d’avoir fait mouche ! Une claque aussi bruyante
qu’humiliante retentit aussitôt sous les yeux bla-
sés de l’assistance. Elle aussi avait fait mouche !
Cupidon se dit que peut-être sa cible n’avait pas
eu le bon goût de porter du 100% caschmere
(de loin il était difficile de s’en rendre compte),
ce qui, pour cette femme si raffinéee, avait dû
être le comble de l’horreur (tout le monde se
souvient des pulls en acrylique qui rendaient
chevelus le plus chauves des hommes grâce au
pouvoir de l’électricité statique !). A quelques
mètres de là, notre autre Cupidon (il y en a deux
dans ce conte, vous suivez ?), qui possédait une
plus grande connaissance de l’âme humaine et
surtout une plus grande ouverture d’esprit, dé-
cida d’innover : point d’arc ni de flèche, un peu
d’originalité que diable !
Je vous vois venir et vous imaginer James Bond
débarquant de nulle part dans ce café, un vrai
prince ravi de sortir enfin des pages pous-
sièreuses des contes de fée ou encore le pro-
videntiel ami de toujours qui enfin révéle sa
flamme un énorme diamant dans sa poche (on
peut rêver nous sommes dans un conte !!).
Juchées sur des talons aiguilles, les hanches
moulées dans une jupe qui frôlait l’indécence,
sans parler du chemisier qui avait bien du mal à
contenir les seins obuesques, sexy à la limite du
soutenable, une renversante jeune femme venait
d’un air nonchalant et troublant de désir s’as-
seoir à quelques enjambées (gainées de noir cela
va s’en dire) de notre rousse esseulée. Mais que
vient faire cette femme ? Qui a changé l’histoire
? Personne ! Car derrière cette divine et sulfu-
reuse apparition, qui d’un regard aux cils effet
papillon (merci l’Oréal), venait d’enflammer
l’âme, le coeur et le reste de notre belle solitaire,
se cachait notre Cupidon.
Il avait compris que ce n’était pas un homme qui
chasserait la mélancolie des yeux de notre belle
inconnue mais une femme. Les voix du Paradis
sont impénétrables !
Déconcerté et un brin vexé, Cupidon joufflu re-
partit au Paradis et s’ennuya à nouveau ferme.
Jusqu’au jour où, par je ne sais quel miracle, il se
mit à regarder les humains avec plus de discer-
nement et envoya valser son arc et ses flèches et
les boucles blondes toutes ébouriffées, il se mit
à se métamorphoser tantôt en homme ou en
femme pour réunir les âmes soeurs et enfin le
Paradis lui sembla beaucoup plus fun !!
						
FIN
Chronique J. C.
Illustration David Berson
R.S. = RENCARD SERIEUX ?
P
our connaître une personne rien ne vaut
un rencard. Dans le but d’évaluer l’adéqua-
tion avec cette personne au travers d’ac-
tivités semblables à celles d’un couple comme
d’aller boire un café en public, un rencard est le
moyen le plus efficace pour voir si oui ou non
on ira plus loin avec cette personne.
Si on part du principe que deux personnes qui
se rencontrent par hasard et quand dans un élan
de séduction s’invitent à se revoir plus intime-
ment, la question de ce que l’autre cherche doit-
elle se poser avant ou après le rencard ?
Lors d’un premier rencard sans savoir ce que
veut l’autre, un jeu de séduction s’installe natu-
rellement. Déjà on se change un milliard de fois
pour trouver le bon jean qui nous met en valeur
sans trop faire bitch sans trop faire bonne soeur.
Le moment le moins glamour c’est quand on le
rejoint à la sortie du métro. On attend en regar-
dant notre portable avec la musique plein les
oreilles pour nous détendre, on prend la pause
sans trop en faire. Le pire c’est le retard, étant fu-
meur, attendre, stresser et ne pas pouvoir fumer
(oui ça craint de sentir le tabac froid lors de la
première rencontre! ) c’est juste l’enfer sans feu !
Si la rencontre est hasardeuse, le premier ren-
card ne doit pas l’être. On doit observer, com-
muniquer sans trop en dire sur nous, savoir ce
qu’il cherche sans lui demander clairement, évi-
ter certains sujets comme les enfants (là il fuira
! ) surtout les ex (image de votre non stabilité
sans compter les chapitres de vos infidélités ou
pas ! ). Et bien sur, à mettre au placard la ques-
tion du salaire !!!
En France surtout, tous sujets de votre passé
pourraient avoir une répercussion sur votre
image présente et souvent elle sera négative.
Rare sont les mecs qui voient en l’autre dès la
premiere rencontre un type bien quand vous lui
racontez que vous avez cassé la gueule de votre
ex suite à son infidélité ou encore ils ne verront
pas un type ambitieux et constructif si vous lui
annoncez que vous touchez 5000euros par mois
et que vous souhaitez très prochainement faire
appel à une mère porteuse en Belgique pour
lancer la machine et élever 2 enfants. Non !
Si vous êtes une femme hétéro (et encore les
choses ont bien changé !!!) vous pouvez vous le
permettre car c’est inconscient mais on voit en
vous la possibilité de procréer et d’être le noyau
d’une famille. Par contre un gay surtout de 30
ans … c’est la fin d’un espoir de liberté pour la
personne qui vous écoute et regarde.
Entre ce que l’on veut, ce que l’on voudrait et ce
que l’on a, quel est l’ingrédient qui alimentera
notre courage de se lancer à l’eau ?
Combien faut-il de rencard pour définir notre
relation comme sérieuse ? A quel moment
avons-nous le droit de se laisser porter par ses
sentiments et arrêter d’avoir peur de souffrir?
Quand on est prêt à se lancer comment savoir
que l’autre personne l’est aussi ?
Plus on vieillit plus nos exigences sont difficiles
à faire taire. On se contente jamais de ce qu’on a,
toujours à la recherche de la perfection même si
on est conscient que nous ne sommes pas par-
fait soi-même.
A la recherche d’une relation sérieuse c’est
comme à la recherche du Saint-Graal … suivez
ma chronique et je vous raconterai mes expé-
riences et ma quête pour trouver cet homme sur
son cheval blanc… j’ai plus de chance déjà d’en
trouver un avec un iphone blanc.
15
LA CHRONIQUE ROSE
17
Projet
69
Photographe :
Sarah Lenoir
www.sarah-lenoir.com
Mannequins :
Mickael Bucaram
& Ria
19
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25
27
29
31
33
FLORILEGEFLORILEGE
35
LA SOCIOLOGIE ROSE
U
ne nuit de juin 1969, les autorités
new-yorkaises ont organisé une des-
cente de police à Stonewall Inn, un
bar LGBT. C’était leur façon à eux de signi-
fier à la clientèle du lieu que son existence
dépendait du bon vouloir des hétéros. Une
chose aussi ordinaire aurait pu être classée
sans suite dans le long récit de la répression
policière. Surprise de l’histoire : les forces de
l’ordre ont eu le malheur de tomber sur des
homosexuel(e)s bien décidé(e)s à rendre
coup sur coup et à taper du flic. Après avoir
ameuté le quartier sous le cris de ralliement
« Gay Power! », des bataillons de gouines, de
pédés, de trans’ et de trav’ leur ont livré ba-
taille dans les rues de Greenwich Village pen-
dant les trois jours qui ont suivi. A posteriori,
les émeutes de Stonewall ont été érigées en
mythe fondateur du mouvement de libéra-
tion par l’histoire héroïque des militants.
Les années 1960 se sont donc conclues sur
un éclat foudroyant dans le milieu LGBT,
tandis que la Gay Pride, instituée en 1970 en
mémoire des émeutes, a semble-t-il projeté
les homosexuel(le)s sur le devant de la scène
politique. Ils sont désormais visibles, et réso-
lu(e)s à se faire (re)connaître.
Cependant, des historiens tels que Massimo
Prearo et Eric Fassin nous invitent à ne pas
se laisser prendre au jeu de cette histoire mi-
litante. Pour ces deux auteurs, l’erreur serait
de penser Stonewall comme le point de dé-
part d’une « histoire homosexuelle », devant
nécessairement conduire à l’avènement de la
libération, soit la sortie définitive du placard.
L’historiographie actuelle rejette cette vision
téléologique et tend plutôt à voir dans ces
émeutes un changement de paradigme, qui se
traduirait par le déplacement de l’action sur
37
STONEWALL, 1969 :
ACTE DE NAISSANCE DU MOUVE-
MENT HOMOSEXUEL ?
un terrain véritablement politique. Ce com-
portement n’aurait d’ailleurs rien d’étonnant
dans le contexte des années 1970, qui se sin-
gularisaient par la lutte des minorités sociales
et ethniques contre les discriminations.
Un tour d’horizon des associations gay et
lesbiennes, antérieures et postérieures aux
émeutes de Stonewall, qu’elles soient mi-
litantes ou non, investies dans la politique
nationale ou des œuvres sociales, sera ainsi
l’occasion de tordre le cou à l’idée pré-conçue
d’un mouvement homosexuel unifié et claire-
ment identifiable.
Si l’on peut concéder à l’histoire militante que
Stonewall marque l’avènement d’un mouve-
ment homo, il n’en reste pas moins qu’une
culture gay et lesbienne s’était déjà durable-
ment introduite dans certaines grandes villes.
Dès le début du XXe siècle, et singulièrement
en Allemagne, de grandes villes ont attiré
des homosexuel(le)s de tous les pays. C’est
par exemple à Berlin que le romancier bri-
tannique Christopher Isherwood a pu trou-
ver un environnement moins hostile. C’était
d’autant plus vrai à San Francisco, qui dans la
conscience collective a toujours été considé-
ré comme un eldorado gay. On y voyait alors
des travestis, des bals homosexuels et des re-
présentations artistiques qui jouissaient d’une
étonnante liberté.
À côté de ces pratiques culturelles, des as-
sociations «  homophiles  » se sont formées
dans le but de chercher à légitimer les ho-
mosexuel(le)s, dès les années 1940 et 1950.
Le contexte socio-politique était alors indé-
niablement répressif, c’est pourquoi ces as-
sociations se caractérisaient par une volonté
d’intégrer les réprouvé(e)s dans la norme, en
veillant par exemple à désexualiser leurs pra-
tiques (ses membres se qualifient d’« amis »)
et à faire valoir une respectabilité et une di-
gnité de bon ton. L’exemple français s’illustre
dans Arcadie, fondée en 1953 par André
Baudry, association conservatrice qui rejette
les « folles » et espère gagner du terrain en
négociant avec les élites. Les émeutes de 1969
s’insèrent donc dans un cadre qui l’a préexisté
et surtout l’a rendu possible.
Il n’est en revanche pas contestable que
Stonewall a marqué un tournant dans l’émer-
gence d’un mouvement de libération homo-
sexuelle, au sens d’organisation ordonnée
autour d’un objectif commun. Une telle mu-
tation n’était possible que si les activistes se
définissaient par rapport à leur orientation
sexuelle, ce qui n’avait rien d’évident au début
du siècle, où la catégorie homosexuelle, es-
sentiellement psychiatrique, n’était pas répan-
due (on parlait plutôt de comportements effé-
minés ou de pratiques inverties). L’institution
de la Gay Pride, en mémoire des émeutes, a
permis en revanche une identification entre
pratiques sexuelles et identité homosexuelle.
Sont alors apparus dans les années 1970 des
mouvements «  libérationnistes  » radicaux,
proche de l’extrême gauche et résolument pé-
dés et gouines, à l’image du Front homosexuel
d’action révolutionnaire en France. Le FHAR
menait une politique offensive à l’égard du
pouvoir hétérosexuel. Leurs slogans et publi-
cations étaient autrement plus rentre-dedans
que ceux des « homophiles » : « Nous sommes
343 salopes. Nous nous sommes faits enculer
par des arabes. Nous en sommes fiers et nous
recommencerons ». Ils ont notamment écrit
un brillant Rapport contre la normalité, qui
dresse un virulent procès de la société hété-
ro-patriarcal. Ces associations d’action col-
lective n’étaient pas non plus insensibles aux
mouvements sociaux qui fleurissaient à cette
époque autour de la libération des femmes,
de la paix et de l’environnement. Le Mouve-
ment de libération des femmes, par exemple,
entretenait une relation complexe avec les les-
biennes.
Un autre type de militantisme est ensuite ap-
paru dans les années 1980, lorsque l’épidémie
du Sida a fait ses premières victimes à San
Francisco. Les interventions des hommes po-
litiques dans la presse et les journaux télévisés
ont été si agressives à l’égard des victimes, à
qui l’on reprochait de contaminer l’ensemble
de la société, que la crainte de la stigmatisa-
tion a fait naître quelques hésitations de la
part des associations de s’adresser aux pou-
voirs publics. L’engagement de l’Etat n’a fina-
lement été possible qu’après l’insistance des
associations dont la mission était de prévenir
l’épidémie et d’accompagner les victimes du
Sida. Elles ont par ailleurs été l’occasion de
donner un souffle nouveau aux revendica-
tions homosexuelles : Act Up est né à New-
York en 1987, puis à Paris deux ans plus tard.
Si l’époque de la révolution sexuelle paraissait
révolue, d’autres modes d’action originaux
ont vu le jour, à l’image de ceux adoptés par
Queer Nation, fondée en 1990 par d’anciens
activistes d’Act Up. Le but poursuivi par cette
association était de sortir du ghetto pour in-
vestir l’ensemble de la société : « we’re here,
we’re queer, get used to it ! ». Au lieu de créer
des zones exclusivement homosexuelles, les
activistes de Queer nation occupaient les es-
paces ordinairement hétéros, détournaient
des campagnes publicitaires (un mannequin
« Gap » trop peu viril perdait ainsi son P au
39
Article Pierre Lefever
Photo Sarah Lenoir
profit d’un joli Y) et jouaient habilement sur
la crainte de la contagion homosexuelle géné-
ralisée. Conscients que cette attitude pouvait
générer des réactions homophobes, certains
communiquaient avec des talkies-walkies
lorsque l’un des membres avait quelques en-
nuis avec ceux que les activistes du FHAR ap-
pelaient les « hétéro-flics ».
À l’heure actuelle, l’égalité formelle entre les
hétéros et les homos a été consacrée par l’ou-
verture du mariage aux personnes de même
sexe, et par la répression légale des actes et
propos homophobes. Si la lutte contre la
norme hétéro n’est donc plus d’actualité, reste
à savoir ce qu’il va advenir des associations
gay et lesbiennes. Sébastien Chauvin a relevé
que des pistes se sont ouvertes du côté d’or-
ganisations axées autour de la lutte contre les
discriminations ethniques au sein des com-
munautés homosexuelles. Mais n’oublions
pas les transexuel(e). Les pouvoirs publics
rechignent à entendre leurs revendications.
Mutatis mutandis, doit-on s’attendre à ce
qu’éclate un Stonewall trans’ ?
41
LE SYMBOLE ROSE
LE DRAPEAU LGBT
L
e 28 juin 1970, les activistes et militants
organisèrent la première Gay Pride,
premier anniversaire des émeutes de
Stonewall en 69. Elle se déroula à San fran-
cisco, New York, Los Angeles et Chicago. Au-
jourd’hui, la marche de la fierté est célébrée à
travers le monde durant le mois de juin pour
honorer l’esprit de la communauté LGBT
durant 69, et ainsi revendiquer leur histoire,
culture et égalité.
Après le triangle rose, le drapeau arc-en-ciel a
été créé comme symbole positif, de paix d’une
communauté vivante et bien dans leur peau.
La rédaction a trouvé un interview de Gilbert
Baker, créateur du drapeau LGBT, en voici
quelques extraits :
« Ce symbole aujourd’hui internationalement
reconnu est né à San Francisco, en 1978. En
réponse à l’appel lancé par le premier politi-
cien ouvertement gai, l’activiste Harvey Milk,
qui affirmait la nécessité de créer un symbole
unificateur et positif pour la communauté, le
militant Clive Jones et l’artiste Gilbert Baker
ont l’idée de créer un drapeau utilisant les cou-
leurs de l’arc-en-ciel pour célébrer la diversité
et l’espoir. Gilbert Baker, qui vit maintenant à
New York, se remémore les événements qui ont
mené à la création et à l’évolution du drapeau...
Comment en êtes-vous arrivé à créer le dra-
peau arc-en-ciel ?
« Je suis un artiste, ... on faisait souvent appel
à moi quand il y avait un ralliement politique.
Je mettais mes robes de côté et je confectionnais
des bannières. C’était devenu mon rôle, ma
manière de contribuer à la cause. C’est comme
ça que j’en suis venu à fabriquer le drapeau. »
À l’époque, San Francisco devait être une ville
particulièrement intéressante où vivre...
« Effectivement, c’était un endroit incroyable où
nous avions comme communauté une grande
liberté. Il y avait aussi une concentration suf-
fisamment importante de gais et de lesbiennes
pour avoir un poids politique. C’est d’ailleurs là
qu’a été élu le premier politicien ouvertement
gai,?Harvey Milk. Harvey a toujours été un
activiste près des gens et une personne vision-
naire. C’est lui, il me semble, qui a suggéré de
créer un symbole unificateur et positif pour la
communauté. Avec (le militant) Clive Jones,
j’étais allé à cette rencontre du comité organi-
sateur du défilé de la fierté de San Francisco
et nous avons proposé l’idée d’un drapeau ras-
sembleur. Le drapeau arc-en-ciel me semblait
un match parfait avec les intentions de départ.
Les drapeaux sont des symboles identitaires
auxquels on s’identifie, des objets à valeur poli-
tique qu’on peu brandir lors de manifestations.
Le drapeau aux couleurs de l’arc-en-ciel était
aussi, de diverses manières, une réponse au
triangle rose qu’on nous avait imposé durant
la Guerre pour « marquer » nous homosexuels,
nous identifier. Ce symbole de persécution a
par la suite été repris par certains militants
comme symbole identitaire — Act Up, entre
autres, s’en est servi dans un contexte différent
: celui de l’épidémie du sida, qui commença
par toucher les homosexuels —, mais comme
les origines du triangle rose comportaient une
part importante de négatif, plusieurs désiraient
qu’on trouve un symbole plus joyeux, plus en
accord avec la diversité qu’on retrouve au sein
de la communauté. La profusion de couleurs
de l’arc-en-ciel était, en plus, porteuse d’un ca-
ractère festif souhaité. »
43
Quel sens symbolique avait le drapeau et ses
couleurs pour vous à l’origine ?
«Caractéristiquedel’époquehippiechacunedes
huit couleurs a d’abord été associé à un concept
ou une idée liée à la communauté. Mais le sens
initial et fondamental du drapeau réside à mes
yeux dans la diversité. Une diversité assumée,
constatée et célébrée, à l’image du spectre com-
plet de la sexualité humaine, qui est également
quelque chose de sacré à mes yeux. Le drapeau
original a été confectionné au Centre commu-
nautaire gai de San Francisco, avec des milliers
de verges de tissu. Du coton que nous avons
lavé, teint, relavé à nouveau, reteint plusieurs
fois afin de trouver les couleurs, la dimension
et les agencements qui nous ont satisfaits. On
utilisait des teintures naturelles qui tachaient la
peau pendant des semaines, mais permettaient
de créer des couleurs éclatantes. Les deux pre-
miers drapeaux d’une dimension de 60 pieds
par 30 pieds ont été hissés à San Francisco,. en
juin 1978, sur la Place des Nations Unies, lors
de la Gay Pride. Dans les jours qui ont suivi, j’ai
reçu plein de demandes de personnes, me de-
mandant de leur fabriquer un drapeau. Après
quelques semaines cependant, j’ai compris que
je ne pourrais fournir à la tache et surtout que
j’allais manquer de tissu rose, une couleur que
j’avais eu beaucoup de difficulté à reproduire. »
Le drapeau a donc remporté un succès immé-
diat...
« Oui. À la réaction des milliers de gens qui
se trouvaient sur la place, il était évident que
nous avions créé quelque chose de fort. Rapi-
dement, plusieurs groupes et participants ont
demandé la permission de pouvoir l’utiliser
lors des prochaines marches. La décision fut
prise pour qu’on le reproduise à plusieurs mil-
liers d’exemplaires. J’ai donc pris contact avec le
plus important fabricant de drapeaux de San
Francisco, la Paramount Flag Company, pour
lui proposer la production à grande échelle
du drapeau arc-en-ciel. Malheureusement, la
teinte rose vif n’était pas disponible industriel-
lement à cette époque et on a donc pris la déci-
sion de supprimer cette couleur. Et, de manière
à pouvoir distribuer également les couleurs de
part et d’autre du parcours des marches, on a
éliminé une autre bande, le turquoise. Pour des
raisons esthétiques, j’ai alors remplacé l’indi-
go par le bleu royal, formant le drapeau à six
bandes (rouge, orange, jaune, vert, bleu, vio-
let). C’est cette version du drapeau qui est de-
venu la version commerciale que l’on connait
dorénavant partout. »
La visibilité est-elle aussi importante au-
jourd’hui qu’elle l’était à l’époque?
« La visibilité est essentielle pour la lutte.
Les gens qui croient que la lutte est finie se
trompent. Tout combat politique est long et
doit être soutenu. Si on ne reste pas vigilant,
on risque de perdre les quelques acquis rem-
portés. C’est vrai que l’on vient de loin, qu’il y
a des acquis. Il est plus facile de vivre nos réa-
lités ouvertement à New York, Londres, Paris
ou Montréal. C’est moins le cas à Jakarta ou
Téhéran. Et bien qu’être gai aujourd’hui, c’est
différent que ce que c’était quand j’étais jeune,
s’accepter comme gai sera toujours un moment
important, un moment de libération person-
nelle qui est un élément commun et collectif à
tous les gais. Un très bel outil de visibilité à la
fois séduisant et puissant. »
Source http://www.fugues.com/220690-
article-un-symbole-identitaire-pas-
juste-un-drapeau.html
Photo Sarah Lenoir
45
LEPERFECTO
LA MODE ROSE
Créé en 1928 aux États-Unis par la firme
Schott (toujours propriétaire de la marque
déposée Perfecto), le modèle est le fruit d’une
commande d’un concessionnaire Harley-Da-
vidson désirant un blouson résistant pour le
motard en cas de chute. Il est à l’époque ven-
du 5,50 $ !
Il possède une coupe spécifique:
. une fermeture croisée, à glissière, décalée
sur le devant, doublant ainsi l’épaisseur de
cuir pour mieux protéger le torse;
. des pressions permettent de rabattre le col
pour éviter qu’il ne batte dans le vent;
. des poignets zippés afin d’être resserrés et
éviter les entrées d’air;
. une ceinture, dans le même cuir que le blou-
son, assurant un ajustement à la taille et fixée
au dos par un empiècement maintenant le
blouson sur les reins.
À l’origine, il était fabriqué uniquement en
cuir de cheval. Aujourd’hui, le Perfecto existe
toujours en cuir de cheval mais l’essentiel de
la production est réalisée en taureau et en va-
chette.
La firme Schott a développé plusieurs va-
riantes du Perfecto dont les plus connues
sont le 618 et le 613, ce dernier étant pourvu
d’étoiles en métal sur les épaules.
Son nom d’origine espagnole lui vient des
cigares cubains Perfecto que fumait Irving
Schott.
Article J.C.
Crédit photo libre de droit
Comédien Marlon Brandon
LES HOMOSEXUELS FRANÇAIS SONT-ILS LES
ENFANTS DE LA RÉVOLUTION AMÉRICAINE ?
STONEWALL DANS L’HISTOIRE DU MOUVE-
MENT HOMOSEXUEL FRANÇAIS
47
HISTOIRE DE MARCEL
Le 10 mars 1971, à l’occasion d’une émission
de radio animée par la journaliste Ménie
Grégoire sur « L’homosexualité, ce doulou-
reux problème », plusieurs dizaines de les-
biennes et gais envahissent la salle Pleyel où
se déroule l’enregistrement. Après seulement
quelques échanges, la tension monte, notam-
ment lorsque le Père Guinchat affirme :
« J’accueille beaucoup d’homosexuels, mes confrères égale-
ment, et qui viennent parler de leurs souffrances, cette souf-
france-là, on ne peut pas y être insensible ».
Une voix s’élève alors dans le public :
« Ne parlez plus de votre souffrance ».
En quelques minutes, la situation dégénère ; le
podium où sont installés les intervenants est
envahi par « des homosexuels de tout ordre »
selon les mots de l’animatrice qui est obligée
de rendre l’antenne avant d’être évacuée .
Dans son ouvrage sur le mouvement Arcadie,
l’historien britannique Julian Jackson qualifie
ces débordements de « «Stonewall» de l’ho-
mosexualité française » . Il n’est d’ailleurs pas
le seul à utiliser cette comparaison. Dans son
article sur la longue marche du mouvement
homosexuel en France vers l’émancipation,
Stéphane Lanchon décide de débuter cette
histoire par les émeutes de Stonewall aux
Etats-Unis, bien que son analyse se concentre
ensuite sur la situation française .
Doit-on dès lors considérer que les émeutes
américaines de Stonewall constituent un évè-
nement fondateur dans l’histoire mondiale
de l’homosexualité ou bien, comme semble
plutôt y inviter Julian Jackson, que l’acte de
rébellion des homosexuels new-yorkais a
seulement constitué le point de départ d’un
mouvement de libération homosexuelle qui
s’est ensuite exporté à l’échelle mondiale.
De quoi Stonewall est-il le nom ?
Stonewall Inn est un bar gai de Greenwich
Village à New York qui fait l’objet d’une des-
cente de police comme tant d’autres depuis
la fin du XIXe siècle. Huit officiers de la Pu-
blic Moral Section contrôlent les identités des
clients de ce bar comme ils ont l’habitude de
le faire depuis des années. Sauf que ce soir du
17 juin 1969, tandis que les forces de l’ordre
embarquent les employés et les drag-queens,
le reste des clients refuse de se disperser. Au
contraire, ils se regroupent autour du fourgon
de police et commencent à siffler les policiers,
lancer des briques et des bouteilles. Treize
d’entre eux sont interpelés avant que la situa-
tion s’apaise.
Dès le lendemain, les manifestants se re-
trouvent au même endroit pour affronter à
nouveau les autorités dont ils n’entendent
plus supporter sans réagir les contrôles ino-
pinés. C’est le début d’un vent de révolte qui
se prolonge rapidement des rues de New York
vers les assemblées associatives et les tribunes
politiques.
QuelquesjoursaprèslesémeutesdeStonewall,
la fronde se propage en effet dans les rangs de
la Mattachine Society qui depuis les années
1950 avait adopté une stratégie «intégration-
niste» des homosexuels qu’on appelle alors
plutôt les homophiles. Tandis que l’associa-
tion tente de trouver une réponse mesurée
à l’échauffourée, plusieurs militants s’im-
patientent et décident de faire sécession en
formant le Gay Liberation Front qui adopte
immédiatement une stratégie plus virulente.
49
Le Mai 68 des homosexuels américains ?
Dans la chronologie du mouvement d’éman-
cipation des homosexuels, un évènement pré-
cède cependant de quelques mois les émeutes
américaines de Stonewall. Il s’agit des évè-
nements de Mai 68 en France qui, aux côtés
d’autres revendications, portent les germes
d’un mouvement de libération des homo-
sexuels. Bien que son existence soit éphémère,
l’historien Michael Sibalis est parvenu à re-
tracer la courte histoire du Comité d’action
pédérastique révolutionnaire (CAPR) qui est
souvent considéré comme le balbutiement du
Front homosexuel d’action révolutionnaire
(FHAR).
Au milieu de la révolte estudiantine, deux
jeunes hommes décident de prendre l’ini-
tiative de rédiger un manifeste ayant pour
objectif de rendre visible les revendications
homosexuelles aux côtés des autres revendi-
cations sociales :
« Émus et profondément bouleversés par la répression civile
et policière qui s’exerce à l’endroit de toutes les minorités éro-
tiques (homosexuels, voyeurs, maso., partouzes), le Comité
d’Action Pédérastique Révolutionnaire dénonce la restric-
tion des possibilités amoureuses qui sévit en Occident depuis
l’avènement du judéo-christianisme. Les exemples de cette
répression odieuses ne manquent pas ; vous les avez sous les
yeux à chaque instant ; les inscriptions et les dessins dans
les chiottes de la Sorbonne et autres ; les passages à tabac
d’homosexuels par la police ou par des civils rétrogrades ; la
mise en fiche policière, en général, l’attitude de soumission,
les yeux de chiens battus, le genre rase-les-murs de l’homo-
sexuel type ; les carrières brisées, l’isolement et la mise au se-
cret qui sont le lot de toutes les minorités érotiques. Pour un
glorieux Jean Genet, cent mille pédérastes honteux, condam-
nés au malheur.
Le C.A.P.R. lance un appel pour que vous, pédérastes, les-
biennes, etc..., preniez conscience de votre droit à exprimer
en toute liberté vos options ou vos particularités amoureuses
et à promouvoir par votre exemple une véritable libération
sexuelle dont les prétendues majorités sexuelles ont tout au-
tant besoin que nous (...)
(Un homme sur 20 est pd; sur 4 milliards de la population
mondiale, ça fait 200 millions de pd). NON PAS L’AMOUR
ET LA MORT, MAIS L’AMOUR ET LA LIBERTÉ ».
Les huit premières affiches manuscrites col-
lées sur les murs de la Sorbonne ne resteront
que quelques heures, sans que l’on sache vrai-
ment qui en a ordonné l’arrachage. D’autres
sont rapidement réalisées et accompagnées de
tracts qui invitent à une réunion dans l’am-
phithéâtre Michelet. Le mouvement peine
cependant à s’affirmer et les deux étudiants
à son origine abandonnent à peine deux se-
maines après sa naissance.
Michael Sibalis explique cet échec par le
contexte encore relativement puritain des
étudiants de Mai 68 qui, s’ils sont prêts à
tolérer l’existence et la présence des homo-
sexuels, n’en acceptent pas pour autant leurs
démonstrations publiques et politiques. Le
témoignage du futur militant homosexuel
Guy Hocquenghem est révélateur de cet état
d’esprit. Membre du Comité d’occupation de
la Sorbonne, il explique a posteriori :
« Le comité d’occupation de la Sorbonne s’in-
quiétait de la présence d’homosexuels autour
des W.C. Cela risquait de «déconsidérer» le
mouvement : au moment où l’on se croyait au
sommet de la libération de tous les possibles,
il y avait encore des aspects de notre vie qu’il
n’était pas permis de faire apparaître » .
Non seulement le contexte social ne semble
pas être le plus favorable à l’émergence d’un
mouvement d’émancipation homosexuelle,
mais le contexte militant non plus. La prin-
cipale caractéristique du Comité d’action pé-
dérastique révolutionnaire repose en effet sur
l’idée que les revendications homosexuelles
peuvent s’ajouter aux autres revendications
sociales des étudiants, des femmes, des ou-
vriers, etc. contre l’oppression d’une société
judéo-chrétienne, patriarcale et capitaliste.
Cette stratégie semble vaine en 1968 et les
homosexuels vont d’abord devoir faire leurs
preuves et défendre seuls leurs droits avant
d’envisager une union des forces.
L’an I de la libération homosexuelle aux
Etats-Unis et dans le monde
Dans son article sur le CAPR, Michael Sibalis
utilise le pseudonyme de Guillaume Char-
pentier pour désigner le principal initiateur
de ce mouvement. Il termine cependant son
histoire en précisant qu’à l’issue des évène-
ments, le jeune homme part aux Etats-Unis
où il assiste aux émeutes de Stonewall. En-
seignant à New-York, puis à Los Angeles, il
participe aux meetings du mouvement de
libération des homosexuels américains et
s’imprègne progressivement de cette nouvelle
approche politique du militantisme qu’il es-
saiera ensuite d’importer en France dès son
retour en octobre 1970, expliquant même
qu’il a « tout appris aux Etats-Unis » malgré
son expérience parisienne en Mai 68.
Quelques mois plus tard, il contribue à la
création du Front homosexuel d’action ré-
volutionnaire (FHAR) aux côté notamment
de Marie-Jo Bonnet, Françoise d’Eaubonne,
Guy Hocquenghem, mais aussi de l’améri-
caine Margaret Stephenson et de Gilles Châ-
telet qui était aussi en Californie en 1969 et
qui participe à son retour aux meetings du
FHAR pour, comme il le dit plus tard, « re-
trouver l’ambiance des États-Unis » .
D’ailleurs, tandis que les militants améri-
cains organisent leur première Gay Pride en
souvenir des émeutes de Stonewall le 28 juin
1970, les membres du FHAR organisent aussi
le 27 juin 1971 un rassemblement pour célé-
brer le deuxième anniversaire de Stonewall et
la naissance Gay Liberation Front. Quelques
mois plus tard, dans le Rapport contre la nor-
malité visant à formaliser et expliquer leur
action, les militants du FHAR inscrivent
d’ailleurs résolument et consciemment leur
mouvement dans une logique commune
puisque la chronologie de leur mouvement
commence certes en mai 68 avec le Comité
d’action pédérastique révolutionnaire, mais
la seconde date fait immédiatement référence
aux émeutes de Stonewall qui, selon ce texte,
s’explique par « le meurtre d’un jeune homo-
sexuel par la police » .
Un autre extrait de cette publication est éga-
lement révélateur de cette volonté d’écrire
une histoire commune de part et d’autre de
l’Atlantique :
« Malheureusement, jusqu’en mai 68, le camp de la révo-
lution était celui de l’ordre moral, hérité de Staline. Tout y
était gris, puritain, lamentable. Et quelle répression sexuelle
sévissait sur tous ! Mais soudain, ce coup de tonnerre : l’ex-
plosion de Mai, la joie de vivre, de se battre ! [...] Alors, de-
vant cette situation nouvelle, nous homosexuels révoltés – et
certains d’entre nous étaient déjà politisés – nous avons dé-
couvert que notre homosexualité – dans la mesure où nous
saurions l’affirmer envers et contre tout – nous amènerait
à devenir d’authentiques révolutionnaires, parce que nous
mettrons ainsi en question tout ce qui est interdit dans la
civilisation euro-américaine ».
Si l’on peut donc considérer que le FHAR
assume dès le départ une certaine influence
américaine, c’est aussi ce qui va lui être repro-
ché par certains, voire transposé aussi a pos-
teriori sur le Comité d’action pédérastique
révolutionnaire. Ainsi, en 1998, le sociologue
Daniel Defert se souvient du CAPR en ces
termes :
« Cela paraissait alors assez incongru, et cette action, à ma
connaissance, n’a eu aucune suite immédiate. En 1968, le
discours dominant est hautement politique et finalement très
traditionnel : un discours marxiste ou anarchiste, un peu ré-
nové, sur la lutte des classes, l’anticapitalisme, la liaison uni-
versités/usines. [...] Au milieu de tous ces propos marxistes
militaro-révolutionnaires, il y a bien quelques individus qui
tiennent un langage hédoniste sur le plaisir. Mais ils passent
pour des représentants de la «gauche américaine» [...] forcé-
ment suspecte en temps de guerre froide ».
Les émeutes de Stonewall occupent donc une
place singulière dans l’histoire de l’homo-
sexualité. Si l’évènement n’est pas considéré
comme l’acte de naissance du mouvement ho-
mosexuel français moderne, il a énormément
influencé les militants déçus par l’expérience
ratée du Comité d’action pédérastique révo-
lutionnaire de Mai 68. En seulement quelques
mois, ils vont s’emparer de ce modèle pour
politiser et médiatiser leurs revendications,
s’associer avec d’autres groupes minoritaires,
et créer une nouvelle forme de militantisme
contestataire après des années de stratégie
dite «intégrationniste». Après le Front ho-
mosexuel d’action révolutionnaire (FHAR),
d’autres mouvements tels que les Groupes de
Libération homosexuelle (GLH) prendront le
relais pendant plusieurs années sur le modèle
du Gay Liberation Front américain créé au
lendemain des émeutes de Stonewall.
Article Mickaël Bertrand
Photographe Sarah Lenoir
51
Reportage photo Sarah Lenoir
Lieu Stonewall inn à New-York
53
FROM PARIS TO NEW-YORK
FROM O
55
OUTSIDE
TO IN
57
NSIDE
ROMAIN, 18 ANS.
CHASSÉ DU DOMICILE FAMILIAL.
PARCE QU'IL EST HOMOSEXUEL.
Source:Shutterstock©Djslavic-©Laconceptionetlaréalisationdecettecampagnesontoffertesparl’agence
LA LIGNE D’URGENCE 24H/24H : 06 31 59 69 50
HÉBERGEMENT TEMPORAIRE ET ACCOMPAGNEMENT PSYCHOLOGIQUE
ET SOCIAL DES JEUNES VICTIMES D’HOMOPHOBIE
LUTTONS ENSEMBLECONTRE L’HOMOPHOBIEAIDEZ-NOUS POUR LES AIDERwww.le-refuge.orgAssociation reconnue d’utilité publique
HÉBERGEMENT TEMPORAIRE ET ACCOMPAGNEMENT PSYCHOLOGIQUE
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LA GAZETTE DE MARCEL ROSE N°1 ANNEE 69

  • 1. 1ETE 2014 GAZETTE 01 ANNEE 69
  • 2. OURS Magazine gratuit édité par Marcel Rose, SASU au capital de 2 000 euros. 117, rue de Charenton, 75012 Paris. www.lagazettedemarcelrose.fr Numéro ISSN en cours d’immatriculation PrEsident et directeur de la publication Eric Boccalupo « Je veux être de ce qui va arriver. », Coco Chanel REdacteurs en chef Eric Boccalupo Journalistes Séverine Hartenstein « Le tout dans l’audace, c’est de savoir jusqu’où on peut aller trop loin. », Jean Cocteau Mickaël Bertrand « Le bon historien, lui, ressemble à l’ogre de la légende. Là où il flaire la chair humaine, il sait que là est son gibier. », Marc Bloch Pierre Lefever « Mes affaires personnelles m’ennuient à mourir. Je préfère celles des autres. », Oscar Wilde Photographes Marc Daniel, « Si Adam avait été homosexuel, personne ne serait là pour le dire. », Oscar Wilde Sarah Lenoir, « I don’t mind living in a man’s world, as long as I can be a woman in it. », Marilyn Monroe Illustrateurs Felix le Sha, « Life is too vicious ! » David Berson Graphiste Eric Joseph, « On ne peut rien écrire dans l’indifférence. », Simone de Beau- voir Les Mandarins (1954) CORRECTRICE Monique Van Weddingen, « Notre vraie nationalité est l’humanité. » de H. G. Wells (dans « The Outline of History ») IMPRESSION La Provence COUVERTURE Photographe et D.A. : Sarah Lenoir, Mannequins : Mickael Bucaram et Ria
  • 3. 3 . a c c e s s o i r e s d e m o d e . . o b j e t s d e d é c o r a t i o n . . p a r i s . w w w . d e l i c a t e d i s t o r s i o n . c o m contact@delicatedistorsion.com
  • 4. A nnée 69, année érotique ? Vous pensez voir un homme en couverture avec de belles tablettes de chocolat ?Ou que les su- jets vont traiter uniquement de sexe pour booster nos ventes ? Vous n’y êtes pas du tout ! Pour la gazette de Marcel Rose, l’année 69 a été une an- née Héroïque. « Gay is Good » slogan de la fierté et de la libération homosexuelles qui est encore aujourd’hui d’actualité, slogan qui marque l’histoire de la commu- nauté rose. On est dans l’activisme, la libération sexuelle et morale. Désolé de vous décevoir, mais la seule érection que vous allez avoir c’est une érection nerveuse quand vous allez découvrir que dans les années 60 et spécialement l’année 69, la commu- nauté LGBT a fait preuve de courage et s’est regroupée pour faire avancer les choses. « Le 28 juin 1969, la rafle opérée par la police au Stonewall Inn est celle de trop. Au lieu de se laisser pour la énième fois disperser, arrêter ou matraquer, les clients du bar se re- bellent, avec, à leur tête, une bande de travestis enragés qui parviennent à faire reculer la police. Une bagarre de EDITO
  • 5. 5 Fondateur E.B. Photo Sarah Lenoir quelques dizaines de participants de- vient, cette nuit-là et les deux qui sui- virent, un énorme soulèvement, bien- tôt rejoint par d’autres représentants de minorités et des droits civiques qui défièrent les forces de l’ordre et expo- sèrent au grand jour ces persécutions de l’ombre. Un an plus tard exacte- ment, la première Gay Pride était organisée à New York, et rien n’allait plus être comme avant : la honte di- vise, la fierté rassemble. » citation de l’article paru le 31/10/2012 dans LE MONDE par Renaud Machart. Cet événement me marque person- nellement par la solidarité des nom- breuses minorités qui existent dans la communauté rose et qui se sont bat- tues main dans la main pour défendre leur droit. Ce qui me touche et qui me fait rire, c’est qu’ on a botté le cul des policiers pas à coups de bâton, ni en jetant des bombes aveuglantes, mais à coups de talon bien placés !
  • 6. . a c c e s s o i r e s d e m o d e . . o b j e t s d e d é c o r a t i o n . . p a r i s . w w w . d e l i c a t e d i s t o r s i o n . c o m contact@delicatedistorsion.com
  • 7. SOMMAIRE Page 8 LA CHRONIQUE ROSE Page 16 Shooting By Sarah Lenoir // PROJET 69 Page 36 LA SOCIOLOGIE ROSE Stonewall, 1969 : acte de naissance du mouvement homosexuel ? Page 40 LE SYMBOLE ROSE Le drapeau LGBT Page 44 la mode rose Le perfetto Page 46 L’HISTOIRE DE MARCEL Homosexuels français enfants de la révolution américaine ? Page 52 REPORTAGE PHOTOS From Paris to New-York
  • 9. 9 Chronique J.C. Illustration David Berson I l ne vous ait jamais arrivé de tomber sous le charme d’un bel inconnu. Vous vous croi- sez et d’un battement d’ailes d’une abeille, l’attirance s’éveille. Vous prenez un verre, vous discutez de tout et de rien, il vous dit que vous avez de beaux yeux, une bouche lascive, il vous prend la main… et en un clin d’oeil vous vous faites piquer ! Coup du jour, du matin ou du soir, c’est la joie de la vie et à tout âge. Quand on rencontre quelqu’un par hasard quels sont les signes qui nous indiquent que cette ren- contre deviendra un coup du moment ou un coup pour la vie? On nous répète sans cesse quand on est céliba- taire (et ça empire avec l’âge) que quand on le/ la verra, on le saura de suite… c’est vrai ça m’est arrivé. Je suis allé à une soirée chez des amis, on était une trentaine autour de la Reine des abeilles. Dès que j’ai passé la porte, elle et moi avons échangé des regards et ça été le coup de foudre immédiat. C’était magique toutes ses abeilles qui essayaient de butiner la reine qui ne faisait que de me re- garder et me parler. On est parti s’acheter des cigarettes seuls en repoussant les abeilles un peu trop collantes. Dans l’ascenseur la tension était haute, on s’est frôlé à plusieurs reprises, une fois les cigarettes achetées on a joué à qui allume la cigarette de l’autre en profitant de se toucher la main. Tout était sensuel, la rencontre magique, seul au monde dans cette ruche. Le problème est vite arrivé lorsqu’une troisième et belle abeille est arrivée entre nous. Rapide- ment, elle était tellement présente essayant de me piquer avec son dard, que pour protéger «la magie avec mon bel inconnu», j’ai déci- dé de partir de la soirée laissant mon numéro de téléphone à la reine pour la revoir dans un autre contexte. Libre cours à mon imagination, en pensant qu’elle allait partir seule de la soi- rée et qu’elle allait me rappeler le lendemain… j’ai cru qu’en agissant ainsi que notre rencontre d’un soir allait devenir au moins relation pour quelques semaines avec des rendez-vous ga- lants, et on ne sait jamais gouter à notre miel… grossière erreur ! La reine est bien partie de la soirée mais pas seule … avec bien évidement la 3ème abeille butineuse. Ça m’amène à me poser certaines questions à savoir si une rencontre imprévue a une date de péremption ? Et quand il s’agit de la «reine des abeilles» la date de péremption n’est elle pas davantage plus courte ? Faut-il oublier dans ce type de rencontre, Romantisme et Liberté d’imagination plus sérieuse? Un ami m’a dit qu’il aurait mieux valu que je vole plus vite vers la Reine et la piquer avec mon dard. N’ayant pas profité du moment présent et m’ayant mordu les doigts plus tard, il est pro- bable que la meilleure attitude à adopter c’est de penser présent et de profiter de la vie avec cet(te) inconnu(e) sans se projeter dans le futur. Consommer sur place ou à emporter, est-elle vraiment la seule option que la vie nous pro- pose ?
  • 10. Chronique J.C. Illustration David Berson S i vous êtes célibataire et que vous attendez que le prince charmant vienne frapper à votre porte eh bien vous allez rester seul très longtemps… voir à tout jamais ! (la fameuse phrase de fin des contes de fées !) Premier moyen pour faire des rencontres : les sites. Meetic, Grindr, Scruff, Nopicnodial, Gayroméo, Menoboy… pléthore de sites pour pousser un peu le destin. On est tous d’accord que de nos jours, il n’y a pas que des geeks, maigres avec des lunettes derrière les écrans. On a réussi à trans- former ce moyen «facile» de rencontres en un allociné pour voir, choisir et commander le film le plus intéressant dans la salle de ciné la plus proche de chez nous. Nous avons donc agrandi nos critères de ren- contre : la distance en km, la taille en cm, la cor- pulence en 4 niveaux (Mince, Moyenne, Ath- létique, Musclé) - on oublie certains certains critères primordiaux au vu de la qualité des échanges comme le QI… Sans bouger de chez soi et surtout pour les per- sonnes trop timides pour faire le premier pas, voilà la promesse des rencontres virtuelles. Aujourd’hui ce moyen est-il utilisé pour des rencontres d’un soir uniquement ? Avec de la chance, vous pourriez trouver l’internaute qui sortira du lot. Deuxième moyen : la ville. A qui me jette la pierre le premier, qui n’a ja- mais croisé un beau jeune homme seul et qui n’a jamais osé s’en approcher. Passer du virtuel à la réalité devient bien difficile, on ne peut lui envoyer des étoiles pour lui faire comprendre qu’il nous plait, ni lui envoyer un «Salut, ça va?». Pourtant c’est tout aussi simple de regarder et juste de lui faire un sourire. Sourire rendu, bin- go ! on peut s’en approcher lui serrer la main (et pas la bise !!!) lui dire une connerie (et on évite «tu as de beaux yeux» ou pire «j’adore tes chaus- sures ! «) et lui filer sa carte avec ses coordon- nées et laisser les choses se faire naturellement ! Tout moment est opportun pour faire des ren- contres et n’importe où ! Les meilleurs rencontres ne sont-elles pas quand on s’y attend le moins ? Faut-il uniquement se contenter d’attendre un message virtuel pour savoir si on plait à quelqu’un ou ne vaut-il pas mieux se confronter réellement à la vie et foncer quand un mec nous plait ? Troisième moyen : le jardin de Tuileries. Surpris par tous les lieux qui existent à Paris pour faire des «rencontres» très portées sex (les backrooms, le dépôt, les sauna…) j’ai été éton- né d’apprendre que le jardin des Tuileries très visité en journée par les touristes, les familles et les sportifs, était également très prisé en pro- fondeur par des gays. Certains restent plantés au milieu des buissons dans le noir et dans le froid voir sous la pluie, d’autres font leur défilé et shopping en déambulant dans les vastes che- mins de ce labyrinthe et s’arrêtent pour choisir le mec qui sera l’homme d’une nuit (voir d’une demi heure). Jusqu’où irons-nous pour faire des rencontres d’une nuit ? Allons nous créer encore un autre lieu pour baiser plus facilement ? Entre bran- lette et coup d’un soir, vous préférez quoi? Avec le mariage qui vient de passer (et malheureu- sement le divorce automatiquement), n’espérez vous pas voir un jour des lieux de rencontre plus «élégants» voir «conceptuels» apparaître dans notre menu ? Nous commençons sérieuse- ment tous à être en manque d’endroits où nous pouvons discuter, plaisanter et s’amuser pour faire des rencontres de qualité. Entre anorexie d’endroits conformes et boulimie d’endroits in- solites, ne risquons-nous pas de vivre le «black- out» de notre réseau ? Notre réseau perd de son bon coming out malgré les multiples moyens de rencontres directs et digitaux, notre basique instinct de former une unité avec une 2ème per- sonne, ne serait-il pas entrain de mourir à coup de pic à glace ?
  • 11. 11 LA CHRONIQUE ROSE LE RESEAU GAY ET SON COMING IN
  • 12. LA CHRONIQUE ROSE QUAND CUPIDON S’EMMERDE... T rouver la personne idéale, celle qui leur est destinée, comme créé rien que pour elles, est un rêve que toutes les femmes, quelque soit leur préférence sexuelle, ressentent au plus profond de leur coeur. Mais à l’ère de la 4G, des réseaux sociaux, du virtuel érigés en mode principal de communication, ce n’est pas si aisé ! Et si les informations circulent à vitesse grand V, les préjugés eux, semblent bien encore stagner… Dans les contes de fées de notres enfance, la princesse et la bergère finissent toujours par trouver, enfin, leur grand amour quelques soient les obstacles (je sais, ça énerve) ! Alors, imaginons un instant, rien qu’un petit instant, que… Il était une fois, au Paradis, Cupidon, un petit ange joufflu, aux boucles blondes comme il se doit, dont les ailes duveteuses battaient l’air impatiemment car, osons l’avouer, il régnait dans ce monde si blanc, si pur, si parfait et si prévisible un tel ennui, qu’il en devenait diable- ment mortel ! Beaucoup plus bas, sur la terre, dans un café pa- risien bobo chic à 20H. Une jeune femme, au visage délicat, dont la chevelure rousse relevée en un chignon à l’élégant chahut, vêtue d’une robe en mousseline réchauffée d’un petit blou- son en cuir et chaussée, non pas de pantoufle de vair (Cendrillon n’est pas l’unique héroïne des contes, soyons ouverts) mais de sages bal- lerines, sirotait d’un air vague et mélancolique sa boisson. Cette vision attisa la curiosité de cet ange qui, il faut bien le dire, était plus sensible à la mode qu’aux problèmes existentiels et à la nature humaine (vous comprendrez plus tard ce petit détail). Au lieu de se demander, mais pour- quoi une si charmante jeune femme si trendy
  • 13. 13 Chronique Sévérine Hartenstein Illustration David Berson se retrouvait seule dans ce café, il se demanda pourquoi elle ne portait pas les chaussures de Cendrillon (encore elle !). Son comparse, un autre Cupidon, qui était en train d’envisager sa mutation en Enfer pour traiter des dossiers plus palpitants, remarqua lui aussi cette douce créature terrestre. Mais ce ne sont pas ses pieds qui l’intéressèrent, c’était son coeur qui attendait depuis trop longtemps l’âme soeur : il décida d’y remédier avant qu’elle et lui ne meurent d’ennui (ce qui finalement était assez égoïste de sa part mais tous les anges ne sont pas parfaits non, non !). Se disant qu’un peu d’air pollué et d’action lui feraient le plus grand bien, il descendit en un clin d’ailes sur Terre, son compagnon à ses côtés. Plein de bonne volonté, Cupidon joufflu pro- posa son aide et ayant repéré dans le café, un homme élégant, à l’allure racée et beau à tom- ber, il sortit son arc et tira sa flèche, certain d’avoir fait mouche ! Une claque aussi bruyante qu’humiliante retentit aussitôt sous les yeux bla- sés de l’assistance. Elle aussi avait fait mouche ! Cupidon se dit que peut-être sa cible n’avait pas eu le bon goût de porter du 100% caschmere (de loin il était difficile de s’en rendre compte), ce qui, pour cette femme si raffinéee, avait dû être le comble de l’horreur (tout le monde se souvient des pulls en acrylique qui rendaient chevelus le plus chauves des hommes grâce au pouvoir de l’électricité statique !). A quelques mètres de là, notre autre Cupidon (il y en a deux dans ce conte, vous suivez ?), qui possédait une plus grande connaissance de l’âme humaine et surtout une plus grande ouverture d’esprit, dé- cida d’innover : point d’arc ni de flèche, un peu d’originalité que diable ! Je vous vois venir et vous imaginer James Bond débarquant de nulle part dans ce café, un vrai prince ravi de sortir enfin des pages pous- sièreuses des contes de fée ou encore le pro- videntiel ami de toujours qui enfin révéle sa flamme un énorme diamant dans sa poche (on peut rêver nous sommes dans un conte !!). Juchées sur des talons aiguilles, les hanches moulées dans une jupe qui frôlait l’indécence, sans parler du chemisier qui avait bien du mal à contenir les seins obuesques, sexy à la limite du soutenable, une renversante jeune femme venait d’un air nonchalant et troublant de désir s’as- seoir à quelques enjambées (gainées de noir cela va s’en dire) de notre rousse esseulée. Mais que vient faire cette femme ? Qui a changé l’histoire ? Personne ! Car derrière cette divine et sulfu- reuse apparition, qui d’un regard aux cils effet papillon (merci l’Oréal), venait d’enflammer l’âme, le coeur et le reste de notre belle solitaire, se cachait notre Cupidon. Il avait compris que ce n’était pas un homme qui chasserait la mélancolie des yeux de notre belle inconnue mais une femme. Les voix du Paradis sont impénétrables ! Déconcerté et un brin vexé, Cupidon joufflu re- partit au Paradis et s’ennuya à nouveau ferme. Jusqu’au jour où, par je ne sais quel miracle, il se mit à regarder les humains avec plus de discer- nement et envoya valser son arc et ses flèches et les boucles blondes toutes ébouriffées, il se mit à se métamorphoser tantôt en homme ou en femme pour réunir les âmes soeurs et enfin le Paradis lui sembla beaucoup plus fun !! FIN
  • 14. Chronique J. C. Illustration David Berson R.S. = RENCARD SERIEUX ? P our connaître une personne rien ne vaut un rencard. Dans le but d’évaluer l’adéqua- tion avec cette personne au travers d’ac- tivités semblables à celles d’un couple comme d’aller boire un café en public, un rencard est le moyen le plus efficace pour voir si oui ou non on ira plus loin avec cette personne. Si on part du principe que deux personnes qui se rencontrent par hasard et quand dans un élan de séduction s’invitent à se revoir plus intime- ment, la question de ce que l’autre cherche doit- elle se poser avant ou après le rencard ? Lors d’un premier rencard sans savoir ce que veut l’autre, un jeu de séduction s’installe natu- rellement. Déjà on se change un milliard de fois pour trouver le bon jean qui nous met en valeur sans trop faire bitch sans trop faire bonne soeur. Le moment le moins glamour c’est quand on le rejoint à la sortie du métro. On attend en regar- dant notre portable avec la musique plein les oreilles pour nous détendre, on prend la pause sans trop en faire. Le pire c’est le retard, étant fu- meur, attendre, stresser et ne pas pouvoir fumer (oui ça craint de sentir le tabac froid lors de la première rencontre! ) c’est juste l’enfer sans feu ! Si la rencontre est hasardeuse, le premier ren- card ne doit pas l’être. On doit observer, com- muniquer sans trop en dire sur nous, savoir ce qu’il cherche sans lui demander clairement, évi- ter certains sujets comme les enfants (là il fuira ! ) surtout les ex (image de votre non stabilité sans compter les chapitres de vos infidélités ou pas ! ). Et bien sur, à mettre au placard la ques- tion du salaire !!! En France surtout, tous sujets de votre passé pourraient avoir une répercussion sur votre image présente et souvent elle sera négative. Rare sont les mecs qui voient en l’autre dès la premiere rencontre un type bien quand vous lui racontez que vous avez cassé la gueule de votre ex suite à son infidélité ou encore ils ne verront pas un type ambitieux et constructif si vous lui annoncez que vous touchez 5000euros par mois et que vous souhaitez très prochainement faire appel à une mère porteuse en Belgique pour lancer la machine et élever 2 enfants. Non ! Si vous êtes une femme hétéro (et encore les choses ont bien changé !!!) vous pouvez vous le permettre car c’est inconscient mais on voit en vous la possibilité de procréer et d’être le noyau d’une famille. Par contre un gay surtout de 30 ans … c’est la fin d’un espoir de liberté pour la personne qui vous écoute et regarde. Entre ce que l’on veut, ce que l’on voudrait et ce que l’on a, quel est l’ingrédient qui alimentera notre courage de se lancer à l’eau ? Combien faut-il de rencard pour définir notre relation comme sérieuse ? A quel moment avons-nous le droit de se laisser porter par ses sentiments et arrêter d’avoir peur de souffrir? Quand on est prêt à se lancer comment savoir que l’autre personne l’est aussi ? Plus on vieillit plus nos exigences sont difficiles à faire taire. On se contente jamais de ce qu’on a, toujours à la recherche de la perfection même si on est conscient que nous ne sommes pas par- fait soi-même. A la recherche d’une relation sérieuse c’est comme à la recherche du Saint-Graal … suivez ma chronique et je vous raconterai mes expé- riences et ma quête pour trouver cet homme sur son cheval blanc… j’ai plus de chance déjà d’en trouver un avec un iphone blanc.
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  • 36. LA SOCIOLOGIE ROSE U ne nuit de juin 1969, les autorités new-yorkaises ont organisé une des- cente de police à Stonewall Inn, un bar LGBT. C’était leur façon à eux de signi- fier à la clientèle du lieu que son existence dépendait du bon vouloir des hétéros. Une chose aussi ordinaire aurait pu être classée sans suite dans le long récit de la répression policière. Surprise de l’histoire : les forces de l’ordre ont eu le malheur de tomber sur des homosexuel(e)s bien décidé(e)s à rendre coup sur coup et à taper du flic. Après avoir ameuté le quartier sous le cris de ralliement « Gay Power! », des bataillons de gouines, de pédés, de trans’ et de trav’ leur ont livré ba- taille dans les rues de Greenwich Village pen- dant les trois jours qui ont suivi. A posteriori, les émeutes de Stonewall ont été érigées en mythe fondateur du mouvement de libéra- tion par l’histoire héroïque des militants. Les années 1960 se sont donc conclues sur un éclat foudroyant dans le milieu LGBT, tandis que la Gay Pride, instituée en 1970 en mémoire des émeutes, a semble-t-il projeté les homosexuel(le)s sur le devant de la scène politique. Ils sont désormais visibles, et réso- lu(e)s à se faire (re)connaître. Cependant, des historiens tels que Massimo Prearo et Eric Fassin nous invitent à ne pas se laisser prendre au jeu de cette histoire mi- litante. Pour ces deux auteurs, l’erreur serait de penser Stonewall comme le point de dé- part d’une « histoire homosexuelle », devant nécessairement conduire à l’avènement de la libération, soit la sortie définitive du placard. L’historiographie actuelle rejette cette vision téléologique et tend plutôt à voir dans ces émeutes un changement de paradigme, qui se traduirait par le déplacement de l’action sur
  • 37. 37 STONEWALL, 1969 : ACTE DE NAISSANCE DU MOUVE- MENT HOMOSEXUEL ? un terrain véritablement politique. Ce com- portement n’aurait d’ailleurs rien d’étonnant dans le contexte des années 1970, qui se sin- gularisaient par la lutte des minorités sociales et ethniques contre les discriminations. Un tour d’horizon des associations gay et lesbiennes, antérieures et postérieures aux émeutes de Stonewall, qu’elles soient mi- litantes ou non, investies dans la politique nationale ou des œuvres sociales, sera ainsi l’occasion de tordre le cou à l’idée pré-conçue d’un mouvement homosexuel unifié et claire- ment identifiable. Si l’on peut concéder à l’histoire militante que Stonewall marque l’avènement d’un mouve- ment homo, il n’en reste pas moins qu’une culture gay et lesbienne s’était déjà durable- ment introduite dans certaines grandes villes. Dès le début du XXe siècle, et singulièrement en Allemagne, de grandes villes ont attiré des homosexuel(le)s de tous les pays. C’est par exemple à Berlin que le romancier bri- tannique Christopher Isherwood a pu trou- ver un environnement moins hostile. C’était d’autant plus vrai à San Francisco, qui dans la conscience collective a toujours été considé- ré comme un eldorado gay. On y voyait alors des travestis, des bals homosexuels et des re- présentations artistiques qui jouissaient d’une étonnante liberté. À côté de ces pratiques culturelles, des as- sociations «  homophiles  » se sont formées dans le but de chercher à légitimer les ho- mosexuel(le)s, dès les années 1940 et 1950. Le contexte socio-politique était alors indé- niablement répressif, c’est pourquoi ces as- sociations se caractérisaient par une volonté d’intégrer les réprouvé(e)s dans la norme, en
  • 38. veillant par exemple à désexualiser leurs pra- tiques (ses membres se qualifient d’« amis ») et à faire valoir une respectabilité et une di- gnité de bon ton. L’exemple français s’illustre dans Arcadie, fondée en 1953 par André Baudry, association conservatrice qui rejette les « folles » et espère gagner du terrain en négociant avec les élites. Les émeutes de 1969 s’insèrent donc dans un cadre qui l’a préexisté et surtout l’a rendu possible. Il n’est en revanche pas contestable que Stonewall a marqué un tournant dans l’émer- gence d’un mouvement de libération homo- sexuelle, au sens d’organisation ordonnée autour d’un objectif commun. Une telle mu- tation n’était possible que si les activistes se définissaient par rapport à leur orientation sexuelle, ce qui n’avait rien d’évident au début du siècle, où la catégorie homosexuelle, es- sentiellement psychiatrique, n’était pas répan- due (on parlait plutôt de comportements effé- minés ou de pratiques inverties). L’institution de la Gay Pride, en mémoire des émeutes, a permis en revanche une identification entre pratiques sexuelles et identité homosexuelle. Sont alors apparus dans les années 1970 des mouvements «  libérationnistes  » radicaux, proche de l’extrême gauche et résolument pé- dés et gouines, à l’image du Front homosexuel d’action révolutionnaire en France. Le FHAR menait une politique offensive à l’égard du pouvoir hétérosexuel. Leurs slogans et publi- cations étaient autrement plus rentre-dedans que ceux des « homophiles » : « Nous sommes 343 salopes. Nous nous sommes faits enculer par des arabes. Nous en sommes fiers et nous recommencerons ». Ils ont notamment écrit un brillant Rapport contre la normalité, qui dresse un virulent procès de la société hété- ro-patriarcal. Ces associations d’action col- lective n’étaient pas non plus insensibles aux mouvements sociaux qui fleurissaient à cette époque autour de la libération des femmes, de la paix et de l’environnement. Le Mouve- ment de libération des femmes, par exemple, entretenait une relation complexe avec les les- biennes. Un autre type de militantisme est ensuite ap- paru dans les années 1980, lorsque l’épidémie du Sida a fait ses premières victimes à San Francisco. Les interventions des hommes po- litiques dans la presse et les journaux télévisés ont été si agressives à l’égard des victimes, à qui l’on reprochait de contaminer l’ensemble de la société, que la crainte de la stigmatisa- tion a fait naître quelques hésitations de la part des associations de s’adresser aux pou- voirs publics. L’engagement de l’Etat n’a fina- lement été possible qu’après l’insistance des associations dont la mission était de prévenir l’épidémie et d’accompagner les victimes du Sida. Elles ont par ailleurs été l’occasion de donner un souffle nouveau aux revendica- tions homosexuelles : Act Up est né à New- York en 1987, puis à Paris deux ans plus tard. Si l’époque de la révolution sexuelle paraissait révolue, d’autres modes d’action originaux ont vu le jour, à l’image de ceux adoptés par Queer Nation, fondée en 1990 par d’anciens activistes d’Act Up. Le but poursuivi par cette association était de sortir du ghetto pour in- vestir l’ensemble de la société : « we’re here, we’re queer, get used to it ! ». Au lieu de créer des zones exclusivement homosexuelles, les activistes de Queer nation occupaient les es- paces ordinairement hétéros, détournaient des campagnes publicitaires (un mannequin « Gap » trop peu viril perdait ainsi son P au
  • 39. 39 Article Pierre Lefever Photo Sarah Lenoir profit d’un joli Y) et jouaient habilement sur la crainte de la contagion homosexuelle géné- ralisée. Conscients que cette attitude pouvait générer des réactions homophobes, certains communiquaient avec des talkies-walkies lorsque l’un des membres avait quelques en- nuis avec ceux que les activistes du FHAR ap- pelaient les « hétéro-flics ». À l’heure actuelle, l’égalité formelle entre les hétéros et les homos a été consacrée par l’ou- verture du mariage aux personnes de même sexe, et par la répression légale des actes et propos homophobes. Si la lutte contre la norme hétéro n’est donc plus d’actualité, reste à savoir ce qu’il va advenir des associations gay et lesbiennes. Sébastien Chauvin a relevé que des pistes se sont ouvertes du côté d’or- ganisations axées autour de la lutte contre les discriminations ethniques au sein des com- munautés homosexuelles. Mais n’oublions pas les transexuel(e). Les pouvoirs publics rechignent à entendre leurs revendications. Mutatis mutandis, doit-on s’attendre à ce qu’éclate un Stonewall trans’ ?
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  • 41. 41 LE SYMBOLE ROSE LE DRAPEAU LGBT
  • 42. L e 28 juin 1970, les activistes et militants organisèrent la première Gay Pride, premier anniversaire des émeutes de Stonewall en 69. Elle se déroula à San fran- cisco, New York, Los Angeles et Chicago. Au- jourd’hui, la marche de la fierté est célébrée à travers le monde durant le mois de juin pour honorer l’esprit de la communauté LGBT durant 69, et ainsi revendiquer leur histoire, culture et égalité. Après le triangle rose, le drapeau arc-en-ciel a été créé comme symbole positif, de paix d’une communauté vivante et bien dans leur peau. La rédaction a trouvé un interview de Gilbert Baker, créateur du drapeau LGBT, en voici quelques extraits : « Ce symbole aujourd’hui internationalement reconnu est né à San Francisco, en 1978. En réponse à l’appel lancé par le premier politi- cien ouvertement gai, l’activiste Harvey Milk, qui affirmait la nécessité de créer un symbole unificateur et positif pour la communauté, le militant Clive Jones et l’artiste Gilbert Baker ont l’idée de créer un drapeau utilisant les cou- leurs de l’arc-en-ciel pour célébrer la diversité et l’espoir. Gilbert Baker, qui vit maintenant à New York, se remémore les événements qui ont mené à la création et à l’évolution du drapeau... Comment en êtes-vous arrivé à créer le dra- peau arc-en-ciel ? « Je suis un artiste, ... on faisait souvent appel à moi quand il y avait un ralliement politique. Je mettais mes robes de côté et je confectionnais des bannières. C’était devenu mon rôle, ma manière de contribuer à la cause. C’est comme ça que j’en suis venu à fabriquer le drapeau. » À l’époque, San Francisco devait être une ville particulièrement intéressante où vivre... « Effectivement, c’était un endroit incroyable où nous avions comme communauté une grande liberté. Il y avait aussi une concentration suf- fisamment importante de gais et de lesbiennes pour avoir un poids politique. C’est d’ailleurs là qu’a été élu le premier politicien ouvertement gai,?Harvey Milk. Harvey a toujours été un activiste près des gens et une personne vision- naire. C’est lui, il me semble, qui a suggéré de créer un symbole unificateur et positif pour la communauté. Avec (le militant) Clive Jones, j’étais allé à cette rencontre du comité organi- sateur du défilé de la fierté de San Francisco et nous avons proposé l’idée d’un drapeau ras- sembleur. Le drapeau arc-en-ciel me semblait un match parfait avec les intentions de départ. Les drapeaux sont des symboles identitaires auxquels on s’identifie, des objets à valeur poli- tique qu’on peu brandir lors de manifestations. Le drapeau aux couleurs de l’arc-en-ciel était aussi, de diverses manières, une réponse au triangle rose qu’on nous avait imposé durant la Guerre pour « marquer » nous homosexuels, nous identifier. Ce symbole de persécution a par la suite été repris par certains militants comme symbole identitaire — Act Up, entre autres, s’en est servi dans un contexte différent : celui de l’épidémie du sida, qui commença par toucher les homosexuels —, mais comme les origines du triangle rose comportaient une part importante de négatif, plusieurs désiraient qu’on trouve un symbole plus joyeux, plus en accord avec la diversité qu’on retrouve au sein de la communauté. La profusion de couleurs de l’arc-en-ciel était, en plus, porteuse d’un ca- ractère festif souhaité. »
  • 43. 43 Quel sens symbolique avait le drapeau et ses couleurs pour vous à l’origine ? «Caractéristiquedel’époquehippiechacunedes huit couleurs a d’abord été associé à un concept ou une idée liée à la communauté. Mais le sens initial et fondamental du drapeau réside à mes yeux dans la diversité. Une diversité assumée, constatée et célébrée, à l’image du spectre com- plet de la sexualité humaine, qui est également quelque chose de sacré à mes yeux. Le drapeau original a été confectionné au Centre commu- nautaire gai de San Francisco, avec des milliers de verges de tissu. Du coton que nous avons lavé, teint, relavé à nouveau, reteint plusieurs fois afin de trouver les couleurs, la dimension et les agencements qui nous ont satisfaits. On utilisait des teintures naturelles qui tachaient la peau pendant des semaines, mais permettaient de créer des couleurs éclatantes. Les deux pre- miers drapeaux d’une dimension de 60 pieds par 30 pieds ont été hissés à San Francisco,. en juin 1978, sur la Place des Nations Unies, lors de la Gay Pride. Dans les jours qui ont suivi, j’ai reçu plein de demandes de personnes, me de- mandant de leur fabriquer un drapeau. Après quelques semaines cependant, j’ai compris que je ne pourrais fournir à la tache et surtout que j’allais manquer de tissu rose, une couleur que j’avais eu beaucoup de difficulté à reproduire. » Le drapeau a donc remporté un succès immé- diat... « Oui. À la réaction des milliers de gens qui se trouvaient sur la place, il était évident que nous avions créé quelque chose de fort. Rapi- dement, plusieurs groupes et participants ont demandé la permission de pouvoir l’utiliser lors des prochaines marches. La décision fut prise pour qu’on le reproduise à plusieurs mil- liers d’exemplaires. J’ai donc pris contact avec le plus important fabricant de drapeaux de San Francisco, la Paramount Flag Company, pour lui proposer la production à grande échelle du drapeau arc-en-ciel. Malheureusement, la teinte rose vif n’était pas disponible industriel- lement à cette époque et on a donc pris la déci- sion de supprimer cette couleur. Et, de manière à pouvoir distribuer également les couleurs de part et d’autre du parcours des marches, on a éliminé une autre bande, le turquoise. Pour des raisons esthétiques, j’ai alors remplacé l’indi- go par le bleu royal, formant le drapeau à six bandes (rouge, orange, jaune, vert, bleu, vio- let). C’est cette version du drapeau qui est de- venu la version commerciale que l’on connait dorénavant partout. » La visibilité est-elle aussi importante au- jourd’hui qu’elle l’était à l’époque? « La visibilité est essentielle pour la lutte. Les gens qui croient que la lutte est finie se trompent. Tout combat politique est long et doit être soutenu. Si on ne reste pas vigilant, on risque de perdre les quelques acquis rem- portés. C’est vrai que l’on vient de loin, qu’il y a des acquis. Il est plus facile de vivre nos réa- lités ouvertement à New York, Londres, Paris ou Montréal. C’est moins le cas à Jakarta ou Téhéran. Et bien qu’être gai aujourd’hui, c’est différent que ce que c’était quand j’étais jeune, s’accepter comme gai sera toujours un moment important, un moment de libération person- nelle qui est un élément commun et collectif à tous les gais. Un très bel outil de visibilité à la fois séduisant et puissant. » Source http://www.fugues.com/220690- article-un-symbole-identitaire-pas- juste-un-drapeau.html Photo Sarah Lenoir
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  • 45. 45 LEPERFECTO LA MODE ROSE Créé en 1928 aux États-Unis par la firme Schott (toujours propriétaire de la marque déposée Perfecto), le modèle est le fruit d’une commande d’un concessionnaire Harley-Da- vidson désirant un blouson résistant pour le motard en cas de chute. Il est à l’époque ven- du 5,50 $ ! Il possède une coupe spécifique: . une fermeture croisée, à glissière, décalée sur le devant, doublant ainsi l’épaisseur de cuir pour mieux protéger le torse; . des pressions permettent de rabattre le col pour éviter qu’il ne batte dans le vent; . des poignets zippés afin d’être resserrés et éviter les entrées d’air; . une ceinture, dans le même cuir que le blou- son, assurant un ajustement à la taille et fixée au dos par un empiècement maintenant le blouson sur les reins. À l’origine, il était fabriqué uniquement en cuir de cheval. Aujourd’hui, le Perfecto existe toujours en cuir de cheval mais l’essentiel de la production est réalisée en taureau et en va- chette. La firme Schott a développé plusieurs va- riantes du Perfecto dont les plus connues sont le 618 et le 613, ce dernier étant pourvu d’étoiles en métal sur les épaules. Son nom d’origine espagnole lui vient des cigares cubains Perfecto que fumait Irving Schott. Article J.C. Crédit photo libre de droit Comédien Marlon Brandon
  • 46. LES HOMOSEXUELS FRANÇAIS SONT-ILS LES ENFANTS DE LA RÉVOLUTION AMÉRICAINE ? STONEWALL DANS L’HISTOIRE DU MOUVE- MENT HOMOSEXUEL FRANÇAIS
  • 47. 47 HISTOIRE DE MARCEL Le 10 mars 1971, à l’occasion d’une émission de radio animée par la journaliste Ménie Grégoire sur « L’homosexualité, ce doulou- reux problème », plusieurs dizaines de les- biennes et gais envahissent la salle Pleyel où se déroule l’enregistrement. Après seulement quelques échanges, la tension monte, notam- ment lorsque le Père Guinchat affirme : « J’accueille beaucoup d’homosexuels, mes confrères égale- ment, et qui viennent parler de leurs souffrances, cette souf- france-là, on ne peut pas y être insensible ». Une voix s’élève alors dans le public : « Ne parlez plus de votre souffrance ». En quelques minutes, la situation dégénère ; le podium où sont installés les intervenants est envahi par « des homosexuels de tout ordre » selon les mots de l’animatrice qui est obligée de rendre l’antenne avant d’être évacuée . Dans son ouvrage sur le mouvement Arcadie, l’historien britannique Julian Jackson qualifie ces débordements de « «Stonewall» de l’ho- mosexualité française » . Il n’est d’ailleurs pas le seul à utiliser cette comparaison. Dans son article sur la longue marche du mouvement homosexuel en France vers l’émancipation, Stéphane Lanchon décide de débuter cette histoire par les émeutes de Stonewall aux Etats-Unis, bien que son analyse se concentre ensuite sur la situation française . Doit-on dès lors considérer que les émeutes américaines de Stonewall constituent un évè- nement fondateur dans l’histoire mondiale de l’homosexualité ou bien, comme semble plutôt y inviter Julian Jackson, que l’acte de rébellion des homosexuels new-yorkais a seulement constitué le point de départ d’un mouvement de libération homosexuelle qui s’est ensuite exporté à l’échelle mondiale. De quoi Stonewall est-il le nom ? Stonewall Inn est un bar gai de Greenwich Village à New York qui fait l’objet d’une des- cente de police comme tant d’autres depuis la fin du XIXe siècle. Huit officiers de la Pu- blic Moral Section contrôlent les identités des clients de ce bar comme ils ont l’habitude de le faire depuis des années. Sauf que ce soir du 17 juin 1969, tandis que les forces de l’ordre embarquent les employés et les drag-queens, le reste des clients refuse de se disperser. Au contraire, ils se regroupent autour du fourgon de police et commencent à siffler les policiers, lancer des briques et des bouteilles. Treize d’entre eux sont interpelés avant que la situa- tion s’apaise. Dès le lendemain, les manifestants se re- trouvent au même endroit pour affronter à nouveau les autorités dont ils n’entendent plus supporter sans réagir les contrôles ino- pinés. C’est le début d’un vent de révolte qui se prolonge rapidement des rues de New York vers les assemblées associatives et les tribunes politiques. QuelquesjoursaprèslesémeutesdeStonewall, la fronde se propage en effet dans les rangs de la Mattachine Society qui depuis les années 1950 avait adopté une stratégie «intégration- niste» des homosexuels qu’on appelle alors plutôt les homophiles. Tandis que l’associa- tion tente de trouver une réponse mesurée à l’échauffourée, plusieurs militants s’im- patientent et décident de faire sécession en formant le Gay Liberation Front qui adopte immédiatement une stratégie plus virulente.
  • 48.
  • 49. 49 Le Mai 68 des homosexuels américains ? Dans la chronologie du mouvement d’éman- cipation des homosexuels, un évènement pré- cède cependant de quelques mois les émeutes américaines de Stonewall. Il s’agit des évè- nements de Mai 68 en France qui, aux côtés d’autres revendications, portent les germes d’un mouvement de libération des homo- sexuels. Bien que son existence soit éphémère, l’historien Michael Sibalis est parvenu à re- tracer la courte histoire du Comité d’action pédérastique révolutionnaire (CAPR) qui est souvent considéré comme le balbutiement du Front homosexuel d’action révolutionnaire (FHAR). Au milieu de la révolte estudiantine, deux jeunes hommes décident de prendre l’ini- tiative de rédiger un manifeste ayant pour objectif de rendre visible les revendications homosexuelles aux côtés des autres revendi- cations sociales : « Émus et profondément bouleversés par la répression civile et policière qui s’exerce à l’endroit de toutes les minorités éro- tiques (homosexuels, voyeurs, maso., partouzes), le Comité d’Action Pédérastique Révolutionnaire dénonce la restric- tion des possibilités amoureuses qui sévit en Occident depuis l’avènement du judéo-christianisme. Les exemples de cette répression odieuses ne manquent pas ; vous les avez sous les yeux à chaque instant ; les inscriptions et les dessins dans les chiottes de la Sorbonne et autres ; les passages à tabac d’homosexuels par la police ou par des civils rétrogrades ; la mise en fiche policière, en général, l’attitude de soumission, les yeux de chiens battus, le genre rase-les-murs de l’homo- sexuel type ; les carrières brisées, l’isolement et la mise au se- cret qui sont le lot de toutes les minorités érotiques. Pour un glorieux Jean Genet, cent mille pédérastes honteux, condam- nés au malheur. Le C.A.P.R. lance un appel pour que vous, pédérastes, les- biennes, etc..., preniez conscience de votre droit à exprimer en toute liberté vos options ou vos particularités amoureuses et à promouvoir par votre exemple une véritable libération sexuelle dont les prétendues majorités sexuelles ont tout au- tant besoin que nous (...) (Un homme sur 20 est pd; sur 4 milliards de la population mondiale, ça fait 200 millions de pd). NON PAS L’AMOUR ET LA MORT, MAIS L’AMOUR ET LA LIBERTÉ ». Les huit premières affiches manuscrites col- lées sur les murs de la Sorbonne ne resteront que quelques heures, sans que l’on sache vrai- ment qui en a ordonné l’arrachage. D’autres sont rapidement réalisées et accompagnées de tracts qui invitent à une réunion dans l’am- phithéâtre Michelet. Le mouvement peine cependant à s’affirmer et les deux étudiants à son origine abandonnent à peine deux se- maines après sa naissance. Michael Sibalis explique cet échec par le contexte encore relativement puritain des étudiants de Mai 68 qui, s’ils sont prêts à tolérer l’existence et la présence des homo- sexuels, n’en acceptent pas pour autant leurs démonstrations publiques et politiques. Le témoignage du futur militant homosexuel Guy Hocquenghem est révélateur de cet état d’esprit. Membre du Comité d’occupation de la Sorbonne, il explique a posteriori : « Le comité d’occupation de la Sorbonne s’in- quiétait de la présence d’homosexuels autour des W.C. Cela risquait de «déconsidérer» le mouvement : au moment où l’on se croyait au sommet de la libération de tous les possibles, il y avait encore des aspects de notre vie qu’il n’était pas permis de faire apparaître » . Non seulement le contexte social ne semble pas être le plus favorable à l’émergence d’un mouvement d’émancipation homosexuelle, mais le contexte militant non plus. La prin- cipale caractéristique du Comité d’action pé- dérastique révolutionnaire repose en effet sur l’idée que les revendications homosexuelles peuvent s’ajouter aux autres revendications sociales des étudiants, des femmes, des ou- vriers, etc. contre l’oppression d’une société judéo-chrétienne, patriarcale et capitaliste. Cette stratégie semble vaine en 1968 et les homosexuels vont d’abord devoir faire leurs preuves et défendre seuls leurs droits avant d’envisager une union des forces. L’an I de la libération homosexuelle aux Etats-Unis et dans le monde Dans son article sur le CAPR, Michael Sibalis utilise le pseudonyme de Guillaume Char- pentier pour désigner le principal initiateur de ce mouvement. Il termine cependant son histoire en précisant qu’à l’issue des évène- ments, le jeune homme part aux Etats-Unis où il assiste aux émeutes de Stonewall. En-
  • 50. seignant à New-York, puis à Los Angeles, il participe aux meetings du mouvement de libération des homosexuels américains et s’imprègne progressivement de cette nouvelle approche politique du militantisme qu’il es- saiera ensuite d’importer en France dès son retour en octobre 1970, expliquant même qu’il a « tout appris aux Etats-Unis » malgré son expérience parisienne en Mai 68. Quelques mois plus tard, il contribue à la création du Front homosexuel d’action ré- volutionnaire (FHAR) aux côté notamment de Marie-Jo Bonnet, Françoise d’Eaubonne, Guy Hocquenghem, mais aussi de l’améri- caine Margaret Stephenson et de Gilles Châ- telet qui était aussi en Californie en 1969 et qui participe à son retour aux meetings du FHAR pour, comme il le dit plus tard, « re- trouver l’ambiance des États-Unis » . D’ailleurs, tandis que les militants améri- cains organisent leur première Gay Pride en souvenir des émeutes de Stonewall le 28 juin 1970, les membres du FHAR organisent aussi le 27 juin 1971 un rassemblement pour célé- brer le deuxième anniversaire de Stonewall et la naissance Gay Liberation Front. Quelques mois plus tard, dans le Rapport contre la nor- malité visant à formaliser et expliquer leur action, les militants du FHAR inscrivent d’ailleurs résolument et consciemment leur mouvement dans une logique commune puisque la chronologie de leur mouvement commence certes en mai 68 avec le Comité d’action pédérastique révolutionnaire, mais la seconde date fait immédiatement référence aux émeutes de Stonewall qui, selon ce texte, s’explique par « le meurtre d’un jeune homo- sexuel par la police » . Un autre extrait de cette publication est éga- lement révélateur de cette volonté d’écrire une histoire commune de part et d’autre de l’Atlantique : « Malheureusement, jusqu’en mai 68, le camp de la révo- lution était celui de l’ordre moral, hérité de Staline. Tout y était gris, puritain, lamentable. Et quelle répression sexuelle sévissait sur tous ! Mais soudain, ce coup de tonnerre : l’ex- plosion de Mai, la joie de vivre, de se battre ! [...] Alors, de- vant cette situation nouvelle, nous homosexuels révoltés – et certains d’entre nous étaient déjà politisés – nous avons dé- couvert que notre homosexualité – dans la mesure où nous saurions l’affirmer envers et contre tout – nous amènerait à devenir d’authentiques révolutionnaires, parce que nous mettrons ainsi en question tout ce qui est interdit dans la civilisation euro-américaine ». Si l’on peut donc considérer que le FHAR assume dès le départ une certaine influence américaine, c’est aussi ce qui va lui être repro- ché par certains, voire transposé aussi a pos- teriori sur le Comité d’action pédérastique révolutionnaire. Ainsi, en 1998, le sociologue Daniel Defert se souvient du CAPR en ces termes : « Cela paraissait alors assez incongru, et cette action, à ma connaissance, n’a eu aucune suite immédiate. En 1968, le discours dominant est hautement politique et finalement très traditionnel : un discours marxiste ou anarchiste, un peu ré- nové, sur la lutte des classes, l’anticapitalisme, la liaison uni- versités/usines. [...] Au milieu de tous ces propos marxistes militaro-révolutionnaires, il y a bien quelques individus qui tiennent un langage hédoniste sur le plaisir. Mais ils passent pour des représentants de la «gauche américaine» [...] forcé- ment suspecte en temps de guerre froide ». Les émeutes de Stonewall occupent donc une place singulière dans l’histoire de l’homo- sexualité. Si l’évènement n’est pas considéré comme l’acte de naissance du mouvement ho- mosexuel français moderne, il a énormément influencé les militants déçus par l’expérience ratée du Comité d’action pédérastique révo- lutionnaire de Mai 68. En seulement quelques mois, ils vont s’emparer de ce modèle pour politiser et médiatiser leurs revendications, s’associer avec d’autres groupes minoritaires, et créer une nouvelle forme de militantisme contestataire après des années de stratégie dite «intégrationniste». Après le Front ho- mosexuel d’action révolutionnaire (FHAR), d’autres mouvements tels que les Groupes de Libération homosexuelle (GLH) prendront le relais pendant plusieurs années sur le modèle du Gay Liberation Front américain créé au lendemain des émeutes de Stonewall. Article Mickaël Bertrand Photographe Sarah Lenoir
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  • 52. Reportage photo Sarah Lenoir Lieu Stonewall inn à New-York
  • 53. 53 FROM PARIS TO NEW-YORK
  • 56. TO IN
  • 58. ROMAIN, 18 ANS. CHASSÉ DU DOMICILE FAMILIAL. PARCE QU'IL EST HOMOSEXUEL. Source:Shutterstock©Djslavic-©Laconceptionetlaréalisationdecettecampagnesontoffertesparl’agence LA LIGNE D’URGENCE 24H/24H : 06 31 59 69 50 HÉBERGEMENT TEMPORAIRE ET ACCOMPAGNEMENT PSYCHOLOGIQUE ET SOCIAL DES JEUNES VICTIMES D’HOMOPHOBIE LUTTONS ENSEMBLECONTRE L’HOMOPHOBIEAIDEZ-NOUS POUR LES AIDERwww.le-refuge.orgAssociation reconnue d’utilité publique HÉBERGEMENT TEMPORAIRE ET ACCOMPAGNEMENT PSYCHOLOGIQUE ET SOCIAL DES JEUNES VICTIMES D’HOMOPHOBIE