Melnitz renoue avec la tradition du roman familial du XIXe siècle : la saga des Meijer, une famille juive suisse, court sur cinq générations, de la guerre franco-prussienne à la Deuxième Guerre mondiale. 1871 : le patriarche Salomon, marchand de bestiaux, vit à Endingen, l’une des seules bourgades helvétiques où les juifs sont autorisés à résider. La famille commence son ascension sociale, sans jamais parvenir à s’affranchir du destin des exclus. 1945 : l’oncle Melnitz, revenu d’entre les morts, raconte. Il est le grand récitant de cette admirable fresque, hommage au monde englouti de la culture et de l’humour yiddish, tour de force romanesque salué comme un chef-d’œuvre par une critique unanime.
2. CHARLES LEWINSKY
Melnitz
ROMAN TRADUIT DE L’ALLEMAND PAR LÉA MARCOU
Traduit avec le concours du Centre National du Livre
GRASSET
3. 1
Après sa mort, il revenait. Toujours.
Le dernier jour de la semaine de deuil, lorsque la
perte s’était fondue dans le quotidien, que la douleur,
il fallait déjà la rechercher, telle une piqûre d’insecte
hier encore urticante et aujourd’hui devenue à peine
perceptible, quand on avait mal au dos à force de res-
ter assis sur les sièges bas imposés aux survivants, pour
ces sept jours, par l’antique coutume, il revint, avec
le plus grand naturel, pénétra dans la pièce au milieu
des autres visiteurs, dont rien en apparence ne le distin-
guait. Sauf que, contrairement à la tradition, il n’appor-
tait pas de nourriture. A la cuisine, les casseroles et les
terrines, coiffées de leur couvercle, attendaient en file,
une haie d’honneur pour le défunt ; il arriva les mains
vides, prit un siège, selon l’usage, ne prononça pas
un mot à moins que les endeuillés ne lui adressent la
parole, se levait quand ils priaient, s’asseyait quand ils
se rasseyaient. Puis, lorsque les autres s’en furent après
avoir murmuré les paroles de consolation prescrites, il
resta assis là, présent comme il l’avait toujours été. Son
exhalaison de poussière humide se mêlait aux autres
effluves de la maison mortuaire, odeurs de sueur, des
bougies en suif, de l’impatience ; il faisait de nouveau
partie de la famille, partageait son deuil, prenait congé
de sa propre personne, poussait son soupir familier,
semi-soupir et semi-ronflement, puis il s’endormit,
4. 14 Melnitz
tête pendante et bouche ouverte, en un mot il était de
retour.
Salomon Meijer se leva de son tabouret, hissa son
corps comme l’on soulève une lourde charge, un quar-
tier de bœuf ou un sac de farine, s’étira à en faire craquer
les articulations de ses épaules et dit : « Nouou. Il faut
manger quelque chose. » C’était un homme de haute
taille, de large carrure, qui aurait dégagé une impression
de force si sa tête n’était trop fine pour sa stature, la tête
d’un érudit sur un corps de paysan. Il s’était fait pousser
des favoris, qui déjà – bien trop tôt, de l’avis de Salo-
mon – blanchissaient par endroits. Dessous, encadré par
la barbe, un lacis de petites veines éclatées formait deux
taches rouges, qui lui donnaient en permanence l’air
alcoolisé bien qu’il ne bût du vin que pour la solennité
du Kiddousch 1, les bénédictions précédant le repas le
Shabbat et les jours de fête, et à la rigueur une bière ou
deux les jours de canicule. Tout le reste embrume la tête,
or la tête est la partie du corps primordiale pour un mar-
chand de bestiaux.
Il était entièrement vêtu de noir, non point en raison
de son deuil, mais parce qu’il n’imaginait pas une autre
couleur, portait une redingote démodée, en drap épais,
et, l’arrivée de nouveaux visiteurs paraissant fort impro-
bable, il la déboutonna, l’enleva et la laissa tomber der-
rière lui, sans se retourner. Il partait du principe que sa
Golda la ramasserait et la suspendrait, comme il se doit,
sur le dos d’un siège, postulat où il ne fallait pas voir
un quelconque despotisme mais la simple expression
naturelle d’une claire répartition des tâches. Il ajusta sa
petite calotte en soie, geste parfaitement superflu – il y
1. Les mots en yiddish et en hébreu (Glossaire p. 947), ainsi
que ceux en français dans le texte original, sont en italique. Les
notes sont de la traductrice.
5. 1871 15
avait des années qu’elle n’avait pas glissé, sur le crâne de
Salomon Meijer ne poussait, à cet endroit, aucune touffe
de cheveux récalcitrants. Dans ses jeunes années déjà ses
amis le surnommaient le Gale’h, le moine, car la plaque
dégarnie les faisait penser à une tonsure.
Il se dirigea vers la cuisine en se frottant les mains,
ainsi qu’il le faisait toujours quand il s’apprêtait à man-
ger ; comme s’il procédait à ses ablutions avant même
d’être parvenu au broc d’eau.
Golda, la femme de Salomon Meijer, devait lever les
bras par-dessus sa tête pour secouer la redingote. Elle
était petite, et autrefois avait été menue, si menue que la
première année de leur union s’était créée, en manière de
plaisanterie, une coutume qu’aucun tiers ne comprenait,
ni d’ailleurs ne percevait. Lorsque, à l’entrée du Shabbat,
Salomon récitait le verset biblique « Esches h’ayjil mi
yimzoh », à la louange de la maîtresse de maison, après
les premiers mots il faisait une pause et jetait des regards
investigateurs autour de lui, comme s’il n’avait pas dit
« Qui trouve une femme vaillante » mais « Qui trouve la
femme vaillante ? ». Autrefois, quand il était jeune marié
et vibrait d’un jeune amour, il jouait en outre, chaque
vendredi soir, une pantomime sur ce thème, cherchait,
avec des mouvements exagérément patauds, sa frêle
petite épouse, et quand il l’avait enfin trouvée, l’attirait à
lui et même l’embrassait. A présent il ne subsistait de la
saynète qu’une pause et un regard, et si quelqu’un l’avait
interrogé sur leurs raisons, Salomon Meijer lui-même
aurait été bien en peine de répondre.
Avec les années, Golda avait beaucoup grossi, elle tra-
versait la vie d’un pas pressé, en se dandinant, tel un pay-
san qui a hâte d’achever les semailles, ressemblait, dans
sa robe ornée de rubans de soie noire, à un pot recou-
vert d’une cloche isolante, et sa perruque roussâtre,
bien que confectionnée par la meilleure perruquière de
6. 16 Melnitz
Schwäbisch Hall, était perchée sur sa tête comme un nid
d’oiseau. Elle avait pris l’habitude de replier sa lèvre infé-
rieure dans sa bouche et de la mordiller, et semblait alors
édentée. Salomon avait parfois l’impression que c’était
comme si à un moment quelconque – non, pas quel-
conque, se reprenait-il aussitôt : comme si après cet inter-
minable et douloureux accouchement, après ces nuits
de cris et de vaines souffrances, une jeune femme l’avait
quitté et une matrone avait pris sa place. Mais Golda
n’était pas en faute, et qui trouve une femme vaillante,
dit le cantique, a reçu un bien plus précieux que les plus
splendides des perles. Il psalmodiait ces mots chaque
semaine, faisait une pause et regardait autour de lui.
La redingote était à présent suspendue au dossier du
fauteuil revêtu de cuir où Salomon aimait à se reposer
après une longue journée sur les routes, mais qu’aujour-
d’hui il avait offert au rebbe, le rabbin Bodenheimer. Il
fallait maintenant remettre les chaises en place, tout ran-
ger, en bon ordre, autour de l’oncle Melnitz dont le men-
ton pendait sur la poitrine comme chez un mort.
« Nouou ? Alors ? J’ai faim ! » La voix de Salomon
s’éleva de la cuisine.
D’ordinaire, du moins quand le maître de maison
n’était pas en voyage d’affaires, les Meijer mangeaient
dans la pièce de devant, que Mimi aimait qualifier de
salon alors que ses parents l’appelaient tout simplement
la salle. Aujourd’hui, on avait poussé la grande table
contre le mur, de sorte que la schabbeslampe – lampe
de Shabbat traditionnelle dans les maisons juives – sur-
plombait le vide. Il avait fallu faire de la place pour les
visiteurs, beaucoup de place car, à Endingen, Salomon
Meijer était un homme respecté, l’un des notables de la
communauté et l’administrateur de la caisse de bienfai-
sance. Quiconque était venu chez lui lors d’une simhe,
une fête, boire un verre de kirsch « A la vie », s’y présen-
7. 1871 17
tait aussi lors d’une schiwe, une semaine de deuil, pour
lui rendre cet honneur et parce qu’on ne pouvait jamais
savoir quand on aurait besoin de lui. Ce dont Salomon
était parfaitement conscient mais ne s’offusquait point.
Donc, pour une fois, on mangeait dans la cuisine, où
Hannele avait déjà tout préparé. Elle était une parente
pauvre, pensaient les gens de la communauté, bien que
les vieilles femmes les plus expertes en mischpohologie,
à savoir l’art de décrypter les liens familiaux, étaient
incapables de dire de quelle branche de l’arbre généalo-
gique Meijer elle pouvait bien être issue. A l’époque, il y
avait presque vingt ans, Salomon l’avait rapportée d’un
voyage d’affaires en Alsace, ballot hurlant et gigotant,
enveloppée de linges telle une oie grasse de Strasbourg.
« Pourquoi l’aurait-il recueillie si elle ne lui était pas
apparentée ? » demandaient les vieilles, et plusieurs
d’entre elles, qui avaient perdu toutes leurs dents et
de ce fait pensaient le plus grand mal de toute l’espèce
humaine, affirmaient avec des hochements de tête signi-
ficatifs que Hannele avait exactement le même menton
que Salomon, et qu’on pouvait imaginer sans peine pour-
quoi celui-ci se rendait si souvent en Alsace.
En réalité, il s’agissait d’une tout autre histoire. Le
médecin goy avait expliqué à Salomon que le fils qu’ils
avaient dû démembrer afin de l’extraire de sa mère avait
tellement déchiré Golda qu’elle ne survivrait pas à un
nouvel accouchement difficile ; il devait s’estimer heu-
reux d’avoir au moins un enfant, fût-ce seulement une
fille. « Remerciez votre Dieu », avait-il dit, comme s’il en
existait plusieurs, qui se seraient réparti leurs champs de
compétences, avec des attributions aussi clairement défi-
nies que le médecin de santé publique et le vétérinaire.
Or, toute personne dotée d’un peu d’esprit pratique
sait qu’un enfant unique donne beaucoup plus de travail
que deux, et lorsque, au cours de l’un de ses voyages,
8. 18 Melnitz
l’occasion se présenta – une mère était morte en couches
et son mari en avait perdu la raison – Salomon la saisit.
Il réalisait un investissement, avec une motivation pure-
ment pratique, sans rien de sentimental, comme lors-
qu’on achète un veau à bas prix et le nourrit jusqu’à ce
que la bête, devenue vache laitière, vous rapporte plu-
sieurs fois ce qu’elle vous a coûté.
Hannele n’était donc point la fille de la maison, mais
pas non plus une servante, se voyait traitée tantôt comme
l’une et tantôt comme l’autre, personne ne la chérissait
et elle ne gênait personne. Elle portait des robes qu’elle
se confectionnait elle-même ou qui ne plaisaient plus à
Mimi et emprisonnait ses cheveux dans un filet, à l’instar
d’une femme mariée – quand on n’a pas de dot, inutile
de se soucier du paraître. Pourtant, elle était jolie quand
elle riait, avait juste des sourcils trop épais, une ligne qui
barrait son visage comme l’on barre un calcul faux ou un
compte déjà réglé.
Hannele avait servi le repas sur la table de la cuisine.
Il n’y avait pas eu de cuisine à faire, car, pour épargner
ce travail aux endeuillés, on apporte de la nourriture
quand on fait une visite de schiwe. Un bon feu brûlait
néanmoins dans le fourneau, de crépitantes bûches de
sapin, promptes à émettre de la chaleur. Il y avait encore
des gelées nocturnes, bien que dans deux semaines l’on
célébrerait le Seder, la soirée pascale. Pessah tombait tôt
en cette année 1871.
« Nouou ? »
Quand Salomon Meijer avait faim, il perdait toute
patience. Il était assis à la table, mains posées sur le bois,
de part et d’autre des couverts, tel un mohel ayant pré-
paré ses instruments en vue de la circoncision. Il avait
déjà fait Mautzi, saupoudré de sel un petit morceau de
pain et l’avait mis dans sa bouche après avoir prononcé la
bénédiction. Mais il n’avait touché à aucun autre aliment,
9. 1871 19
car il tenait à ce qu’on prenne le repas tous ensemble
pour une fois qu’il était à la maison. Manger seul, ç’avait
été son lot toute la semaine. A présent il tambourinait de
la main droite sur le plateau de la table, en soulevant son
poignet en cadence, comme font les musiciens désireux
d’afficher leur virtuosité devant des auditeurs. Ses doigts
dansaient, mais ce n’était pas sur un rythme joyeux, cela
pouvait à tout moment, comme dans une auberge, tour-
ner au grabuge.
Enfin, Mimi apparut, s’avança avec un trottinement
théâtral censé montrer à quel point elle se hâtait. Sans
raison apparente, elle avait changé de vêtements et por-
tait maintenant une robe d’intérieur gris souris, un brin
trop longue de sorte que son ourlet balayait le dallage de
pierre. « Ces gens, dit-elle. Tous ces gens ! N’est-ce pas
ennuyant ? »
Mimi aimait les mots recherchés, comme tout ce
qu’elle trouvait élégant. Elle les grappillait dans des livres
goy qu’elle empruntait en cachette à Anne-Catherine, la
fille du maître d’école, et en parsemait, comme de paillettes
d’or, son langage de tous les jours. Du fait, aussi, de son
souci de distinction, elle n’aimait pas que l’on continue
à l’appeler Mimi, diminutif convenant à un enfant, alors
qu’elle avait dépassé ce stade depuis bien longtemps –
« Bien longtemps, m’man, vraiment ». A quinze ans
(mais il ne fallait surtout pas lui rappeler l’événement
si l’on voulait échapper à un déluge de larmes) lui avait
pris soudain la lubie d’exiger qu’on l’appelle Mimo-
lette, et Salomon, incorrigible farceur, l’avait effective-
ment appelée ainsi pendant quelques jours, avant de
lui avouer en riant qu’en France c’était le nom d’un fro-
mage. Depuis, elle déployait de gros efforts pour obte-
nir au moins qu’on l’appelle Myriam, du reste son nom
véritable, mais n’avait pu ébranler la vieille habitude
familiale.
10. 20 Melnitz
Mimi avait tout pour être une beauté : une peau
blanche, sans défaut, des lèvres pleines, de grands yeux
bruns luisant d’un éclat toujours un peu humide, de longs
cheveux noirs aux douces ondulations. Mais pour une
quelconque raison – elle avait passé des heures devant
le miroir sans trouver la moindre explication – ces élé-
ments parfaits ne s’harmonisaient pas vraiment, comme
parfois une soupe refuse d’avoir bon goût bien qu’elle
soit composée des meilleurs ingrédients. Elle ne laissait
pas transparaître son manque de confiance en elle, affi-
chait bien au contraire des airs arrogants et même dédai-
gneux, au point que sa mère lui avait demandé plus d’une
fois si elle se prenait pour l’Esther biblique et attendait
que des envoyés, à la recherche de la plus belle jeune
fille du pays, se présentent à Endingen pour la conduire
auprès de leur Roi.
A présent, ils étaient assis tous quatre autour de la
table. Il se trouvait, dans la communauté, des familles
plus nombreuses, mais quand Salomon Meijer contem-
plait la sienne, il était pleinement satisfait de ce que Dieu
lui avait donné, une satisfaction très pragmatique, se fon-
dant sur le constat – qui saurait ces choses mieux qu’un
marchand de bestiaux, lequel fourre son nez partout ? –
que son sort aurait pu être bien pire.
Comme toujours à l’issue de schiwe, il y avait beau-
coup trop de nourriture sur la table. Trois saladiers
pleins d’œufs hachés, une demi-carpe en gelée, une
assiette contenant des harengs, quelques harengs et pas
vraiment gras, car Moïsche le Roux était un radin, bien
qu’il eût fait peindre pour son échoppe une enseigne
plus large que toute la boutique. La coutume voulait que
l’on dépose discrètement les mets apportés, l’offrande
devant rester anonyme et ne pas être suivie de remer-
ciements. Mais, d’après leurs décors, on reconnaissait
les assiettes, on savait bien à qui appartenait telle ou
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telle pièce de vaisselle, sinon comment aurait-on pu les
rendre le lendemain ? Le pot de choucroute – et pour
le savoir il n’était même pas nécessaire de l’identifier à
son anse cassée – venait de Feigele Dreifuss, que tout le
monde appelait Mère Feigele car elle était la doyenne du
village. Chaque automne, elle mettait à fermenter, avec
des baies de genièvre, deux grands tonneaux de chou-
croute, bien que, depuis fort longtemps, elle n’avait plus
de famille pour la consommer. Et elle en offrait à toute
occasion, en apportait aux accouchées pour les fortifier
et aux endeuillés pour les consoler.
Sur le buffet, enveloppé d’un journal et repoussé dans
le coin le plus éloigné comme s’il s’agissait du produit d’un
vol, se trouvait un pain natté, un superbe berches constellé
de graines de pavot, que demain ils sortiraient en cachette
de la maison pour en régaler les canards et les poules.
Un envoi de Christian Hauenstein (qui naturellement
s’était abstenu de se présenter en personne), le boulanger
du village, dans le four duquel tous faisaient cuire leurs
pains sabbatiques et gardaient au chaud le traditionnel
kouguel. Un homme moderne, un libre-penseur, comme
il aimait à le souligner, désireux de prouver à ses clients
juifs qu’il les estimait et ne nourrissait pas de préjugés à
leur égard. Personne n’aurait eu le cœur de lui dire que
ce pain, qu’il avait confectionné avec tant de bonnes inten-
tions, on ne pouvait le manger car il n’était pas koscher.
Mais qui a besoin de pain quand il y a du gâteau au fro-
mage sur la table ? Surtout quand il s’agit du légendaire
gâteau au fromage de Sarah Pomeranz, la seule à le réus-
sir aussi bien. Naftali Pomeranz, un immigré comme, à
l’évidence, l’indiquait son nom, était certes un homme
important, le cho’het et chames, boucher et bedeau de la
synagogue. Il semblait même vouloir créer une dynastie
en ces fonctions, et le jeune Pin’has, destiné à lui succé-
der et qu’il formait dans ce but, savait déjà trancher la