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La lettre trimestrielle de
MERCATOR
No 8 - Janvier 2003 - page 1
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METEO-FRANCE
SHOM
PSY2v1 contre PSY1v1
Les innovations
Editorial Sommaire
Chèr(e) Mercatorien(ne),
La haute résolution, c'est quoi ? Vous en avez entendu
parler, et peut-être avez vous vu des exemples
académiques. Mais cela reste quelque peu abstrait,
voire chimérique.
La présentation du nouveau système PSY2v1 d'analyse-
prévision à haute résolution (6km) de l'Atlantique nord
et de la Méditerranée va constituer le fil rouge de cette
lettre trimestrielle.
Ce numéro a pour principal objectif de montrer tout ce
qui est nouveau par rapport au premier système
PSY1v1 à moyenne résolution (36km). La Méditerranée,
les performances statistiques et la validation in situ
feront l'objet d'autres lettres plus détaillées.
Bienvenue dans le nouvel océan.
PSY2v1 contre PSY1v1
Les innovations
Résolution horizontale
Spin-up ultra court et MSSH réaliste
GFO et analyse plus fine
Un exemple de la campagne Ovide
Conclusions
Les faits marquants du trimestre
Noir Prestige
Course du Rhum
Annexe
Niveau moyen de la mer
Bloc Note
Le passage du premier prototype PSY1 au second PSY2
se traduit par l'évolution de diverses caractéristiques
du modèle numérique d'océan. Il y a la résolution
horizontale, la bathymétrie lissée, le frottement latéral
libre à la côte (free slip), la diffusion horizontale
biharmonique, le rappel à la climatologie dans le Golfe
de cadix (le rappel dans les fosses océaniques est
supprimé) et d'autres encore. Tout ceci a fait l'objet de
la lettre trimestrielle #5. Nous ne reviendrons dans la
présente lettre que sur l'innovation majeure du
modèle, la résolution horizontale.
On passe en effet de 36km avec PSY1 à 6km avec
PSY2, ce qui ouvre de nouvelles perspectives dans la
mesure où ni la résolution verticale (43 niveaux), ni la
physique (diffusion verticale turbulente) n'ont été
sacrifiés.
PSY2 voit aussi l'introduction de deux innovations
majeures dans la partie d'analyse du système. La
première concerne le niveau de référence altimétrique
(niveau moyen de la mer ou MSSH) qui fixe une partie
de la circulation moyenne. En effet, les observations
satellitales de niveau de la mer ne sont que des
variations (ou anomalies ou SLA) par rapport à un
niveau de référence mal connu qu'il faut spécifier. Dans
PSY1, on utilisait une MSSH synthétique qui était un
mélange entre la moyenne de la simulation forcée et
les analyses Reynolds de température de surface. Dans
PSY2, on utilise une MSSH issue de la combinaison de
l'altimétrie satellitale et d'observations hydrologiques.
Cette nouvelle MSSH est décrite en annexe. Ceci n'est
pleinement bénéfique que grâce à un changement de la
stratégie du spin-up : on ne fait plus un long spin-up
du modèle depuis la climatologie, mais seulement 3
semaines (début de la simulation le 5-9-2001),
avant d'enclencher l'assimilation.
L'autre innovation de l'analyse concerne l'utilisation
d'un troisième satellite altimétrique, Geosat Follow On
(GFO) qui vient rejoindre JASON et ERS-2 dans
MERCATOR. Ceci est nécessaire dans la mesure où
l'augmentation de la résolution du modèle océanique
entraîne un décuplement du nombre de degrés de
liberté du système. GFO permet d'avoir davantage
d'informations pour mieux estimer l'état du système.
En conjonction avec l'introduction de GFO, les échelles
de corrélation de l'erreur d'ébauche ont été réduites,
conformément à l'étude de la lettre trimestrielle #7
(une valeur constante de 150km est adoptée en
Méditerranée). Les nouvelles échelles sont plus
réalistes et elles sont compatibles avec le spectre
d'énergie qui est plus étendu dans la mésoéchelle dans
PSY2 (PSY2 est "eddy resolving" alors que PSY1 n'était
qu'"eddy permiting"). Enfin, GFO permet d'utiliser ces
échelles réduites dans un système exploité en temps
réel, sans avoir trop à redouter les erreurs
d'extrapolation liées à un échantillonnage insuffisant
(voir la lettre trimestrielle #7).
Bien sûr, tout ceci a un prix. Distribué sur 6 gros
processeurs vectoriels, PSY2 est gourmand en temps
de calcul, en mémoire et en stockage disque. Pour
rendre acceptable l'exploitation en temps réel de PSY2,
il a fallu réduire l'analyse différée (ou rétrovision ou
hindcast) de 3 semaines à 2 semaines. Ceci est tout à
fait acceptable puisque deux années d'exploitation de
PSY1 on démontré que les retards de livraison des
observations altimétriques étaient rarissimes. Enfin,
analyse et prévision sont maintenant exécutées
séparément, l'analyse passant le mardi soir, et la
prévision le mercredi matin.
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PSY2v1 contre PSY1v1 (suite)
Résolution horizontale
Le premier bénéfice de la haute résolution est le réalisme accru de la ligne de côte. Ceci est illustré par la salinité
de surface de PSY1v1 comparée avec celle de PSY2v2 (figure 1).
Figure 1 : salinité de surface de PSY1v1 (gauche) et de PSY2v1 (droite), analyses du 11-12-2002.
Si la résolution de PSY1 était déjà suffisante pour simuler l'upwelling du Cap Rhir, on découvre dans PSY2 de
nouvelles îles (Madère, Canaries), de nouveaux monts sous-marins, de nouvelles dorsales. Un détail du relief
sous-marin apparemment négligeable peut en réalité s'avérer déterminant pour la circulation océanique. Le jet
d'eau douce qui passe dans PSY2 entre Tenerife et Las Palmas est peut-être anodin, mais il illustre bien la finesse
permise dans les interactions entre le relief et la thermodynamique. De plus, si PSY1 n'était qu'un modèle
hauturier, PSY2 devient quasiment un modèle côtier. Les interactions entre les courants hauturiers et les courants
côtiers sont maintenant bien présentes dans PSY2 (filament du Cap Rhir, tourbillon anticyclonique au sud de
Fuerteventura).
Le second bénéfice de la haute résolution est bien sûr la finesse accrue des structures thermodynamiques
permises par le modèle. Un exemple caractéristique est donné par la comparaison du niveau de la mer dans le
Golfe du Mexique (figure 2).
Figure 2 : niveau de la mer de PSY1v1 (gauche) et de PSY2v1 (droite), analyses du 3-4-2002.
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Les grandes structures de PSY1 et PSY2 sont très comparables. Mais les structures de PSY1 sont toutes très
"rondes" : les tourbillons ont des rayons zonaux et méridiens assez identiques. Ce n'est pas le cas avec PSY2 où
les tourbillons présentent des structures complexes. On note surtout l'apparition de fines structures
complètement inédites. Ceci vient bien de la résolution du modèle car GFO n'était pas encore utilisé à cette date,
et les rayons de corrélation de l'erreur d'ébauche qui interviennent dans l'analyse étaient alors identiques pour
PSY1 et PSY2 (voir le chapitre "GFO et analyse plus fine").
Enfin, si l'on prend garde aux échelles de couleur, on peut être frappé par la différence de hauteur au niveau du
Golfe du Mexique et de Cuba. Le Loop Current qui fait le tour de Cuba pénètre moins dans le golfe. Il y a moins
d'anticyclones chauds éjectés par le Loop Current (par conservation de la vorticité) et il est plus "facile" pour
PSY2 de simuler des dépressions froides. Ceci provient de la nouvelle stratégie de spin-up et de la nouvelle MSSH
qui font l'objet du chapitre suivant.
Spin-up ultra court et MSSH réaliste
Une autre innovation majeure introduite lors du passage à PSY2 est l'utilisation d'une MSSH réaliste. Quel en a
été l'impact sur le système d'analyse ? Une première réponse est donnée par la comparaison du niveau de la mer
analysé des deux systèmes (figure 3).
Figure 3 : niveau de la mer de PSY1v1 (gauche) et de PSY2v1 (droite), moyenne des analyses de 2002.
Plus précisément, il s'agit du niveau après initialisation et redémarrage du modèle, autrement dit ce que le
modèle a retenu (digéré) de l'analyse. Sur la figure, on voit que PSY2 est 20cm plus bas que PSY1. En fait, c'est
PSY1 qui est trop haut : le long spin-up de PSY1 a diffusé le gradient vertical de densité et il en résulte une
élévation artificielle depuis le démarrage du spin-up (voir la lettre trimestrielle #2). La nouvelle MSSH utilisée
dans PSY2 est compatible avec la climatologie qui est aussi le point de démarrage du spin-up. La conjonction de
cette cohérence avec la nouvelle stratégie de spin-up court permet à PSY2 de rester de fait au voisinage de la
MSSH réaliste.
L'impact le plus net en terme de structure océanique est le front du Gulf Stream (GS) qui est à sa position la plus
septentrionale dans PSY1. Dans PSY2, on le retrouve bien à sa position médiane.
Le tourbillon de Mann est marqué dans PSY2 vers 44°O-43°N.
Plus loin vers l'Europe, le Courant Nord Atlantique (NAC) est moins schématique dans PSY2. Le dipole du
Porcupine Bank (15°O-52°N) a heureusement disparu. Le front des Feroe donne lieu dans PSY2 à un Courant de
Norvège plus marqué. Le gyre subpolaire est complètement transformé. PSY2 présente deux nettes dépressions
en Mer du Labrador et en Mer d'Irminger, ce qui est conforme à nos connaissances actuelles de ces régions de
formation d'eau profonde lors de la convection hivernale. A la pointe sud du gyre, on peut noter dans PSY2 une
confrontation très marquée entre le Courant du Labrador et l'extension du GS, conformément aux observations
satellitales de SST. On peut enfin retrouver dans PSY2 un Courant des Açores bien marqué et connecté au GS
vers 50°O. Le Courant des Açores pénètre dans le Golfe de Cadix où il donne bien naissance au Courant des
Canaries. En un mot, la circulation telle qu'on peut l'imaginer d'après la MSSH est nettement plus réaliste dans
PSY2.
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Comment cela se traduit-il sur la circulation de surface ? Une réponse nous est donnée par la comparaison entre
PSY1, PSY2 et l'analyse Reynolds (figure 4).
Le front du GS est plus réaliste dans PSY2. Il semble toutefois qu'il y ait encore un léger overshoot au Cap
Haterras (le GS décolle un peu trop vers le nord de la côte américaine) et un manque d'eaux froides depuis le cap
jusqu'à la Nouvelle Ecosse. En revanche, la recirculation à l'ouest du tourbillon de Mann (dans PSY2 vers 46°O-
42°N) suggère que la résolution des analyses Reynolds devient insuffisante à ce niveau de détail. La forme en
éventail du NAC est très bien rendue dans PSY2. Le front des Feroe semble très réaliste. Par contre, le Courant du
Groenland semble moins bien rendu qu'avec PSY1 (voir la MSSH à la côte est du Groenland en figure 3). Le
courant du Labrador semble réaliste, de même que sa confrontation avec le GS. Au sud, il n'y a pas de différences
nettes entre PSY1, PSY2 et Reynolds, ce qui est réconfortant pour la frontière artificielle à 9°N de PSY2.
Les écarts moyens à Reynolds (figure 5) apportent quelques informations complémentaires. La remarque
principale est que la structure des écarts est la même pour PSY1 et PSY2. On peut donc suggérer que la cause
des biais est commune et réside dans un paramètre qui n'a pas été modifié comme le forçage, la diffusion
verticale turbulente ou le schéma d'assimilation. La figure 5 confirme qu'un léger overshoot du GS persiste au
Cap Haterras. On découvre aussi des eaux froides à la côte depuis le détroit de Floride jusqu'au Cap Haterras.
Ceci mérite d'être investigué avec d'autres observations plus précises. Il en est de même pour l'anomalie négative
de l'extension du GS marquée dans PSY2 vers 50°O, pour le Courant du Groenland et celui du Labrador. En
revanche, le "biais froid" à la côte africaine et sans doute dû à une mauvaise représentation dans Reynolds des
upwellings côtiers. Finalement, on peut noter que la Mer des Caraïbes reste trop froide dans PSY2, tandis qu'une
amélioration est perceptible dans le Golfe du Mexique.
Figure 4 :
température de surface de PSY1 (haut gauche) et de
PSY2 (haut droite),
comparée avec les analyses Reynolds (gauche), en
moyenne sur 2002.
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Figure 5 : écart de température de surface entre PSY1 et Reynolds (gauche),
entre PSY2 et Reynolds (droite), en moyenne sur 2002.
On vient de voir que PSY2 reste au voisinage de la nouvelle MSSH, et que la circulation moyenne induite conduit
à une amélioration sensible en SST. Qu'en est-il en profondeur ? Est-ce que PSY2 corrige les biais significatifs de
PSY1 et reste au voisinage de la climatologie ? Une réponse est donnée sur 2002 par la température à 1000m
(figure 6). Ce qui frappe en premier lieu, c'est l'apparition de l'eau méditerranéenne dans PSY2, complètement
absente de PSY1. Ceci peut être partiellement attribué au rappel à la climatologie dans le Golfe de Cadix, en
conjonction avec les nouveaux courants des Açores et des Canaries. Une autre amélioration spectaculaire
concerne le gyre subpolaire qui est bien plus réaliste dans PSY2. Cependant, on peut noter que la recirculation
sud du GS reste un peu chaude dans PSY2, et il en est de même pour la Mer des Antilles et le Golfe du Mexique.
Figure 6 :
température analysée à 1000m de PSY1 (haut gauche)
et de PSY2 (haut droite),
comparée avec la climatologie Reynaud (gauche), en
moyenne sur 2002.
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Les écarts à la climatologie (figure 7) confirment la forte réduction des biais. De même que pour la SST, on
retrouve une similarité dans la structure de ces écarts. A cette profondeur, on peut éliminer le flux de chaleur et
le flux d'eau douce de la liste des facteurs influents. Notons toutefois qu'une grande partie de l'écart à la
climatologie est naturellement imputable aux fluctuations du niveau de la mer (voir le chapitre "GFO et analyse
plus fine").
Figure 7 : écart de température analysée à 1000m entre PSY1 et la climatologie Reynaud (gauche),
entre PSY2 et la climatologie Reynaud (droite), en moyenne sur 2002.
L'analyse de la salinité à 1000m (figure 8) appelle les mêmes remarques que la température. L'eau
méditerranéenne de PSY1 est beaucoup trop diffuse, au point que les eaux douces du gyre subpolaire et de la
bande tropicale sont peu différenciées. Ce n'est pas le cas de PSY2 qui colle bien à la climatologie.
Figure 8 :
salinité analysée à 1000m de PSY1 (haut gauche) et de
PSY2 (haut droite),
comparée avec la climatologie Reynaud (gauche), en
moyenne sur 2002.
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Les écarts à la climatologie confirment la forte réduction des biais dans PSY2. On note encore une fois la
similitude des biais de PSY1 et PSY2. On sait de plus que les biais de température et de salinité de PSY1 se
compensent en grande partie en terme de densité (voir les lettres No 2 et No 6).
On voit que PSY2 a le même comportement. Ce n'est pas surprenant puisque la méthode d'assimilation est par
construction "isopycnale" : on monte ou descend les masses d'eau en les faisant tourner, sans modifier leurs
caractéristiques T-S.
En première analyse, il semblerait qu'une remontée des isopycnes expliquerait le désalage des eaux
méditerranéennes à 1000m de PSY2.
Figure 9 : écart de salinité analysée à 1000m entre PSY1 et la climatologie Reynaud (gauche),
entre PSY2 et la climatologie Reynaud (droite), en moyenne sur 2002.
En conclusion de ce chapitre, on voit que les écarts ont été fortement réduits en température et en salinité. Ceci
permet d'espérer pouvoir comparer directement les champs du modèle aux observations in situ. Il reste quelques
régions où les écarts sont nets, mais certains peuvent être dus à une fluctuation récente de l'Atlantique (par
opposition à la période correspondant à la climatologie).
GFO et analyse plus fine
Depuis juillet 2002, un troisième satellite altimétrique GFO est assimilé dans PSY2, et les échelles de corrélation
ont été réduites. Quel en est l'impact ?
En moyenne sur 2002, l'impact est quasiment nul sur les analyses du niveau de la mer : les fluctuations
interannuelles du niveau sont voisines dans PSY1 et PSY2 (figure 10), comme par exemple la recirculation à
l'ouest du tourbillon de Mann vers 46°O-42°N. Cela nous remémore la bonne tenue de PSY1 dans le domaine des
fluctuations à basse fréquence. Cela confirme aussi qu'un troisième satellite n'apporte pas grand chose pour
l'étude de ce type de fluctuations.
Au rang des différences entre PSY1 et PSY2, on peut citer la région du Gulf Stream (GS) au large du Cap
Haterras, le Banc de Porcupine, la côte est du Groenland et la mer d'Irminger, ainsi que la côte africaine. Ces
différences sont vraisemblablement attribuables au biais important des prévisions de PSY1 (supérieur à l'erreur
d'ébauche de 7cm) qui limite la précision de l'analyse. L'apport de GFO et des échelles réduites est sensible en
zone littorale, et à la côte africaine en particulier. PSY2 permet maintenant de mieux représenter les pentes de
niveau de la mer dues aux phénomènes côtiers (upwellings).
Enfin, on peut remarquer que les anomalies du niveau de la mer (SLA) de 2002 expliquent certains écarts à la
climatologie à 1000m. Ainsi, le réchauffement en surface et à 1000m au large du cap Haterras (overshoot du Gulf
Stream) est attesté par l'anomalie positive de SLA. Entre 60°O et 50°O, la SLA présente un affaiblissement du
front du GS, ce qui se traduit à 1000m par des eaux chaudes au nord du GS. Entre 50°O et 40°O, la SLA suggère
un éclatement en deux branche du GS à ce niveau, ce qui se retrouve bien à 1000m. En revanche, l'anomalie
négative de SLA des courants du Groenland et du Labrador suggérerait plutôt un refroidissement (ou un salage).
Or, c'est le signal inverse que l'on retrouve en surface et à 1000m. Enfin, on peut noter que le désalage de PSY2
à 1000m des eaux méditerranéennes du triangle Canaries-Açores-Irlande ne correspond pas à un changement de
niveau de SLA.
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Figure 10 : anomalie de niveau de la mer analysée de PSY1 (gauche),
et PSY2 (droite), en moyenne sur 2002.
L'impact des 3 satellites et des échelles de corrélations réduites est net quand on compare les analyses des
anomalies du niveau de la mer de PSY1 et PSY2 (figure 11). Si les grandes structures sont approximativement
aux mêmes endroits, on voit bien la richesse de détails permise par la nouvelle analyse de PSY2. On peut ici noter
que cette finesse d'analyse s'étend maintenant jusqu'en zone côtière.
Figure 11 : anomalie de niveau de la mer de PSY1 (gauche), et PSY2 (droite),
analyse du 13-11-2002 à l'ouest de la péninsule ibérique.
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On peut bien sûr se demander si un modèle dynamique à si haute résolution arrive effectivement à digérer sans
heurts cette analyse statistique à base d'interpolation optimale. Une indication nous est donnée par la
comparaison des températures analysées à 1000m des deux systèmes (figure 12). L'accord en terme de
structures et d'échelles entre le niveau de la mer et la température qui était bon dans PSY1 est conservé dans
PSY2. Les champs analysés présentent des structures qui sont cohérentes du point de vue dynamique : les
courants côtiers, meddies, méandres et filaments de PSY2 semblent faire bon ménage avec l'analyse.
Figure 12 : température vers 1000m de PSY1 (gauche), et PSY2 (droite),
analyse du 13-11-2002 à l'ouest de la péninsule ibérique.
Un exemple de la campagne Ovide
La campagne OVIDE 2002 (Observatoire de la Variabilité Inter-annuelle à DEcénale en Atlantique Nord) s'est
achevée le 11 juillet 2002, à l'issue de 30 jours en mer sur le N/O Thalassa. L'objectif principal de OVIDE est la
réalisation tous les 2 ans (pendant 10 ans) d'une section d'hydrographie et de géochimie du Groenland au
Portugal afin de résoudre les fluctuations à basse fréquence de la cellule méridienne de circulation, du flux de
chaleur vers l'Europe, du transport de traceurs et des caractéristiques des masses d'eau. OVIDE contribue au
programme international CLIVAR. Cette campagne a aussi permis la mise à l'eau de 17 profileurs dérivants dans
le cadre du projet ARGO, enrichissant ainsi le réseau d'observation en temps réel de l'Atlantique Nord.
Dans ce chapitre, nous allons comparer les observations de la radiale descendante avec les analyses des
systèmes PSY1 et PSY2. Les champs MERCATOR présentés ici sont des analyses réalisées en temps différé qui
correspondent approximativement au milieu de la radiale.
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La climatologie présente le long de la radiale descendante d'Ovide (figure 13) cinq caractéristiques principales. A
l'extrême ouest, on trouve trace d'un Courant du Groenland froid et surtout désalé. De 40°O à 35°O, c'est la mer
d'Irminger avec ses eaux froides et douces. Vers 30°O, la Dorsale de Reykjanes contraint le Gyre Subpolaire à
recirculer vers l'ouest-sud-ouest, entraînant des eaux plus chaudes et plus salées venant du Courant Nord
Atlantique, situé lui vers 25°O-20°O. A l'est de la radiale, on note la forte signature des eaux méditerranéennes
chaudes et salées, de 400m jusqu'à 1000m. Le noyau qui se situe vers 1000m est très visible en salinité, alors
que l'on a une zone homogène en température (thermostad).
Figure 13 : sections verticales de température et de salinité :
climatologie Reynaud de juin le long de la radiale descendante Ovide.
Dans PSY1 (figure 14), la dorsale de Reykjanes et la remontée d'eau froide du Gyre Subpolaire sont plus marqués
en température que dans la climatologie, se rapprochant ainsi des observations (figure 16). Les eaux de la Mer
d'Irminger sont trop chaudes et trop salées, ce qui est une dégradation par rapport à la climatologie. Le Courant
Nord Atlantique est bien marqué. En revanche, les eaux méditerranéennes sont terriblement mal placées dans
PSY1.
Figure 14 : sections verticales de température et de salinité :
analyse PSY1 du 26-6-2002 le long de la radiale descendante Ovide.
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No 8 - Janvier 2003 - page 11
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Dans PSY2 (figure 15), on ne trouve pas trace des eaux très froides du Courant du Labrador, même si l'inclinaison
des isothermes est qualitativement plus en en accord avec les observations que la climatologie. En revanche, le
minimum de salinité de PSY2 est situé très au large, ce qui est une dégradation par rapport à la climatologie. On
ne trouve pas trace entre 1000m et 2000m des eaux froides qui ont probablement été formées lors d'une année
précédente. Vers 28°O, la recirculation du gyre est assez réaliste dans PSY2, aussi bien en température qu'en
salinité. Le front du Courant Nord Atlantique est bien rendu vers 23°O. Plus à l'est, les eaux méditerranéennes
sont assez proches des observations, mais on constate quand même un désalage, et un déplacement du noyau
vers 900m au lieu de 1000m dans les observations.
On peut aussi noter que la stratification est un peu trop importante en surface dans PSY2, alors qu'elle était
insuffisante dans PSY1. Il semblerait que le mélange soit trop intense à la côte portugaise.
Enfin, le gradient thermique est-ouest qui est nul dans les observations entre 18°O et 12°O de 300m à 2000m
(isothermes plates) est nettement plus conforme dans PSY2 que dans la climatologie ce qui montre que des
progrès sont intervenus depuis le spin-up.
Figure 15 : sections verticales de température et de salinité :
analyse PSY2 du 26-6-2002 le long de la radiale descendante Ovide.
Figure 16 : sections verticales de température et de salinité :
observations CTD le long de la radiale descendante Ovide.
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Les champs de PSY2 permettent de proposer un contexte de cette radiale. Cela peut s'avérer utile car on retrouve
une correspondance entre la mésoéchelle de PSY2 et la radiale. Ainsi, la température à 100m (figure 17) présente
une petite recirculation chaude vers le nord à 33°O et une poche d'eau chaude vers 27°O que l'on retrouve dans
la température observée. Sur la température à 300m (figure 17), PSY2 présente un front du NAC situé vers 24°O
ainsi qu'un front secondaire vers 22°O que l'on retrouve bien dans les observations.
Figure 17 : température à 100m et 300m :
analyse PSY2 du 26-6-2002.
La salinité à 300m (figure 18) présente un méandre salé (et chaud) vers 19°O.
La salinité à 1000m présente un méandre salé entre 15° et 16°O, et un autre vers 14°O. Ces détails
mésoéchelles sont intéressants puisqu'ils proposent une vision dynamique de la région traversée. Par exemple,
les maxima locaux de sel au large du Portugal sont reliés entre eux : il y a vers 40°N (la latitude finale de la
radiale) une protubérance salé qui s'étend vers l'ouest, perturbée par divers tourbillons et recirculations.
Figure 18 : salinité à 300m et 1000m :
analyse PSY2 du 26-6-2002.
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No 8 - Janvier 2003 - page 13
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Vue d'ensemble
Les trois modifications majeures qui interviennent lors du passage de PSY1v1 à
PSY2v1 sont :
le modèle Atlantique nord et Atlantique tropical "MNATL" 1/3° (~36km)
remplacé par le modèle Atlantique nord et Méditerranée "PAM" 1/15°
(~6km),
un nouveau niveau de référence altimétrique (MSSH hydrologique en
Atlantique et issue de 3 ans de spin-up en Méditerranée) et un spin-up du
modèle ultra court (3 semaine depuis le 5-9-2001) avant l'assimilation,
un 3ème
satellite GFO et des échelles de corrélation réduites (PSY1v1 à
posteriori et 150km en Méditerranée).
Il y a aussi trois nouveaux points mineurs :
le rappel à la climatologie dans les fosses océaniques est supprimé : on laisse
le modèle entièrement libre,
on impose un rappel vers 1000m dans le Golfe de Cadiz pour imposer l'eau
Méditerranéenne en Atlantique.
La méthode d'analyse et la technique de correction du modèle demeurent inchangées
par rapport à PSY1v1. L'univarié de PSY2v1 ne diffère donc significativement de
PSY1v1 que par la nouvelle MSSH et les échelles de corrélation.
Les observations utilisées sont les observations de niveau de la mer le long des
traces des satellites (chaque 21km). L'écart à l'anomalie de niveau prévue
chaque 7 jours par le modèle est analysé en 2D par SOFA (analyse univariée).
On utilise des erreurs de 3cm (TOPEX/POSEIDON-JASON-1), 4.5cm (ERS-2 et GFO)
et 7cm (modèle). Les rayons de corrélation spatio-temporelle des erreurs varient
spatialement sauf en Méditerranée. L'incrément 2D d'analyse est converti en
incrément 3D de l'ensemble des variables d'état du modèle (vitesse,
température, salinité et énergie cinétique turbulente) en montant ou descendant
les couches d'eau dans les régions verticalement stratifiées, et en modifiant la
rotation des colonnes dans les régions homogènes. On applique partiellement la
géostrophie aux incréments. On utilise une procédure légère d'initialisation avant de
redémarrer le modèle pour la prévision.
La lettre trimestrielle de
MERCATOR
No 8 - Janvier 2003 - page 14
CNES
CNRS/INSU
IFREMER
IRD
METEO-FRANCE
SHOM
Conclusions
2002 est une année très conforme à la moyenne 1993-
99 en terme de niveau de la mer. On peut relever
principalement :
le Loop Current est moins étendu dans le Golfe
du Mexique,
le Gulf Stream est plus au nord entre 75°O et
60°O,
le Courant Nord Atlantique est plus au sud
entre 45°O et 20°O.
Le biais en température de surface (SST) a été réduit
dans PSY2 par rapport à PSY1. Cette réduction devrait
permettre une croissance d'erreur plus faible dans la
couche de mélange à travers le rappel à l'analyse
Reynolds de SST. Il reste encore des défauts dans la
SST de PSY2 :
léger overshoot du décollement du Gulf Stream,
peut-être en liaison avec les recirculations nord
et sud. Ceci n'est que partiellement expliqué
par les anomalies de niveau de la mer.
la Mer des Antilles et le Gyre Subtropical sont
trop froids.
En profondeur (à 1000m), les écarts à la climatologie
ont été considérablement réduits dans PSY2 par
rapport à PSY1. On peut retenir deux biais principaux :
le Courant du Groenland, le Courant du
Labrador et la recirculation sud du Gulf Stream
sont plus chauds et plus salés que la
climatologie.
le panache d'eau méditerranéenne est un peu
plus froid et surtout moins salé. Il semblerait ici
qu'une remontée d'environ 100m des isopycnes
expliquerait le désalage des eaux
méditerranéennes à 1000m de PSY2.
L'anomalie du niveau de la mer semble expliquer une
partie des écarts à la climatologie dans la région du
Gulf Stream. Ce n'est pas le cas en ce qui concerne les
courants du Groenland et du Labrador ou le panache
Atlantique de l'eau méditerranéenne.
La radiale d'observations de la campagne OVIDE 2002
nous montre que PSY2 ne fait pas que réduire les
écarts à la climatologie. PSY2 présente des détails
mésoéchelles réalistes qui étaient absents de la
climatologie. Fronts et masses d'eau sont relativement
bien représentés à toutes les profondeurs, ce qui
justifie la résolution verticale conséquente et la
physique complète de la nouvelle configuration du
modèle. La radiale OVIDE nous renseigne aussi sur
deux des points faibles restants de PSY2.
On peut ainsi se demander si les courants du
Groenland et du Labrador sont bien représentés dans
la nouvelle MSSH. On peut vérifier que dans une bande
de 2° du Cap Farewell (sud Groenland), le gradient de
la MSSH de PSY2 est moindre (~5cm de moins) que
dans PSY1. Le gradient à la côte du Groenland
présente une différence semblable au niveau du Détroit
du Danemark (entre Groenland et Islande), ce qui
pourrait influer sur la descente des eaux polaires.
Cependant, on pourrait tout aussi bien voir une origine
physique dans la représentation médiocre de ces
courants. Par exemple, la fonte des glaces de mer
venues du nord, ou des glaciers du Groenland, a-t-elle
un impact sensible sur ces courants ?
A propos du biais du panache méditerranéen, il serait
encore facile d'imputer cela à la MSSH, mais la
correction qu'il "suffirait" d'effectuer serait tout de
même d'environ 10cm (le rapport entre l'amplitude du
déplacement isopycnal et la hauteur dynamique est
~100m/10cm dans cette région). Or, on sait déjà que
l'écoulement des eaux méditerranéennes sur le seuil de
Gibraltar n'est pas parfait. Mais on peut aussi imaginer
que cela vient d'une dérive causée par un Courant du
Portugal trop turbulent, ou par un transport insuffisant
à Gibraltar. Peut-être s'agit-il d'un effet combiné de
toutes ces causes.
Dans ces deux cas, on a besoin d'un volume
conséquent d'observations contemporaines précises
pour analyser en détail le comportement de PSY2. Ceci
fera l'objet de la prochaine lettre trimestrielle.
La lettre trimestrielle de
MERCATOR
No 8 - Janvier 2003 - page 15
CNES
CNRS/INSU
IFREMER
IRD
METEO-FRANCE
SHOM
Les faits marquants du trimestre
Noir Prestige
Voici en guise de carte de voeux, la prévision de MERCATOR pour le 1er
janvier 2003 sur le littoral Atlantique : les
vents persistants du sud-ouest créent des courants de surface portant vers les côtes françaises depuis La Coruna
jusqu'à Biarritz. Ce sombre présage s'est transformé en triste réalité lorsque les boulettes de pétrole du Prestige
atteignirent les plages du côté d'Hossegor.
Courant de surface prévu le 25-12-2002 pour le 1-1-2003
Cette région située aux pieds des monts cantabriques est très fluctuante. On estime aujourd'hui que la fenêtre
maximale de validité des prévisions MERCATOR se situe entre 3 et 10 jours, suivant la qualité des prévisions
atmosphériques et la densité de la couverture satellitale en altimétrie. La prévision du premier de l'an illustre le
potentiel des prévisions océaniques dans l'aide à la protection du littoral. Elle témoigne du travail du projet pour
couvrir cette catastrophe écologique et humaine.
MERCATOR a distribué ses analyses et prévisions à plusieurs organismes (Cedre, Météo-France, Shom, Ifremer,
Préfecture Maritime) depuis la date du naufrage.
La lettre trimestrielle de
MERCATOR
No 8 - Janvier 2003 - page 16
CNES
CNRS/INSU
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METEO-FRANCE
SHOM
Les faits marquants du trimestre (suite)
Course du Rhum
Si le baptême du feu a été sordide pour PSY2 avec le naufrage du Prestige, PSY1 a eu une fin glorieuse, avec un
podium en monocoque dans la course du Rhum 2002. En effet, MERCATOR a envoyé des prévisions à Denis
Thunynck de L'Université du Littoral Côte d'Opale qui coordonnait le routage du navigateur Joé Seeten. Les cartes
MERCATOR ont permis en particulier d'éviter des zones où les courants prévus s'opposaient au vent, ce qui a
généré une mer très "cassante" (14 multicoques sur 17 abandonnèrent lors de la traversée du Golfe de
Gascogne). Plus anecdotique mais plus visuel, Joé Seeten nous fît l'amitié de passer la région du Courant de
Açores en accord avec PSY1 (voir figure).
Courant de surface prévu le 25-12-2002 pour le 1-1-2003
MERCATOR a aussi permis un gain de route lors des derniers 48h
, ainsi qu'un gain de temps grâce à une
réduction des empannages. Quoique sous estimées de 15% à 20%, les courants prévus ont accéléré l'arrivée de
Joé Seeten à Pointe à Pitre. Bravo, et à la prochaine, avec PSY2.
La lettre trimestrielle de
MERCATOR
No 8 - Janvier 2003 - page 17
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SHOM
Annexe
Niveau moyen de la mer
PSY2-v1 adopte un nouveau niveau de référence (MSSH ou ARL) pour caler les anomalies de niveau de la mer
(SLA). Le changement de MSSH constitue une grande avancée par rapport à PSY1-v1 (voir la lettre trimestrielle
#2). Ceci n'est pleinement bénéfique que grâce à un changement de la stratégie du spin-up : on ne fait plus de
spin-up long du modèle comme c'était la tradition en France, mais un court spin-up depuis la climatologie,
stratégie utilisée depuis des années au UKMO. Le modèle n'a donc plus le temps de dériver, et reste dans un état
proche de la climatologie, et donc en accord avec la MSSH.
En effet, la nouvelle MSSH est en grande partie due à Marie-Hélène Rio et Fabrice Hernandez (Rio, M.-H. & F.
Hernandez, 2002). Cette MSSH est construite à partir d'observations hydrologiques (température, salinité et
courants) de la période 1993-99 et doit donc être en bon accord avec la climatologie. Cela n'était pas le cas de la
MSSH de PSY1-v1, qui correspondait davantage à l'état de régime du modèle. Toutefois, ce produit hydrologique
n'est pas encore disponible sur la Méditerranée, et il a donc fallu compléter la MSSH Atlantique par quelque
chose. Le choix des équipes PSY et PAM de MERCATOR s'est porté sur un spin-up de 3 années du zoom
Méditerranée de PAM (la configuration 1/15° de PSY2-v1). Cette MSSH Méditerranée est principalement due à
Karine Béranger et à Yann Drillet. On y retrouve très bien des structures connues comme le front Alméria-Oran,
le courant algérien, le front d'Ibiza, le courant liguro-provençal... Quelques structures mésoéchelles peu
vraisemblables ont été éliminées au large d'Ibiza et de la Libye.
La lettre trimestrielle de
MERCATOR
No 8 - Janvier 2003 - page 18
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Annexe (suite)
Enfin, à propos du collage des deux morceaux de MSSH à Gibraltar, on a choisi de mettre au même niveau les
deux morceaux. Autrement dit, on a supposé qu'il n'y avait pas de dénivelé entre le Golfe de Cadix et la Mer
d'Alboran. C'est un pis-aller en l'absence d'information précise (millimétrique) quant à ce dénivelé. Noter par
ailleurs que l'assimilation est coupée dans les détroits car on ne sait pas localement y convertir l'information
altimétrique.
En conséquence, l'assimilation ne peut induire de corrections dans la SLA analysée à Gibraltar. Cela signifie que le
collage de MSSH à Gibraltar est sans effet sur la SLA analysée.
En revanche, la procédure d'initialisation peut induire des corrections baroclines et barotropes dans le détroit.
Ceci pourra être visible dans les champs de vitesse "initiaux".
Ensuite, les corrections dans les bassins Atlantique et Méditerranée doivent entraîner des ajustements à travers le
détroit. C'est à ce moment qu'intervient le dénivelé imposé par la MSSH. Cela sera visible dans la SSH "initiale" et
tous les autres champs ultérieurs (courants, température...). Le transport à Gibraltar sera donc fortement
contraint par ce dénivelé.
Voici ci-après quelques zooms sur des régions MERCATOR du bulletin. Voici quelques remarques :
le Gulf Stream est assez rectiligne, c'est un jet bien marqué,
il y a une circulation cyclonique à la côte de Floride ; cela va conférer plus d'inertie au jet vers le Cap
Hatteras,
il y a une circulation cyclonique au large du Saint-Laurent : cela va faire descendre des eaux du Labrador,
le front des Açores est bien marqué et est connecté au Gulf Stream.
Ces quatre propriétés devraient corriger les biais de PSY1-v1 qui sont aussi dans une moindre mesure ceux du
spin-up de PAM.
La lettre trimestrielle de
MERCATOR
No 8 - Janvier 2003 - page 19
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Annexe (suite)
En pratique, on a généré deux MSSHs, l'une relative à la période 1993-95 et l'autre relative à la période 1993-99,
suivant que l'on utilise des anomalies (SLA) relatifs à 1993-95 ou à 1993-99. On passe de l'un à l'autre en
ajoutant (sur l'Atlantique uniquement) la moyenne DUACS 1/4° de la SLA relative à 1993-95 sur 1996-99 par la
formule suivante :
Références
Greiner, E. : "Biais de la réanalyse PSY1-v1 AOO1 de 1993-98", Lettre Trimestrielle MERCATOR #2, juillet
2001, http://www.mercator.com.fr/html/lettre/lettre_2/page_8.html.
Rio, M.-H. and F. Hernandez, 2002: Estimation d'une topographie dynamique moyenne sur l'Atlantique
Nord et Tropical. Rapport final pour le Groupe Mission Mercator CLS/DOS/NT/02.515, xx pp. CLS,
Ramonville St Agne.
MSSH(93,99) = MSSH(93,95) + 3/(4+3) * MEAN_SLA(93,95) + 4/(4+3) * MEAN_SLA(96,99)
= MSSH(93,95) + 4/(4+3) * MEAN_SLA(96,99) car MEAN_SLA(93,95) = 0
La lettre trimestrielle de
MERCATOR
No 8 - Janvier 2003 - page 20
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- Bloc Note -
Adresse
N'hésitez pas à nous faire part de vos remarques à l'adresse : webmaster@mercator.com.fr
Prochaine édition : Avril 2003
Edition
Eric Greiner
Auteurs :
Cette lettre a été rédigée par Eric Greiner avec la
participation de Pascale Lherminier, Véronique Landes
et Vincent Toumazou.

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Mercator Ocean newsletter 08

  • 1. La lettre trimestrielle de MERCATOR No 8 - Janvier 2003 - page 1 CNES CNRS/INSU IFREMER IRD METEO-FRANCE SHOM PSY2v1 contre PSY1v1 Les innovations Editorial Sommaire Chèr(e) Mercatorien(ne), La haute résolution, c'est quoi ? Vous en avez entendu parler, et peut-être avez vous vu des exemples académiques. Mais cela reste quelque peu abstrait, voire chimérique. La présentation du nouveau système PSY2v1 d'analyse- prévision à haute résolution (6km) de l'Atlantique nord et de la Méditerranée va constituer le fil rouge de cette lettre trimestrielle. Ce numéro a pour principal objectif de montrer tout ce qui est nouveau par rapport au premier système PSY1v1 à moyenne résolution (36km). La Méditerranée, les performances statistiques et la validation in situ feront l'objet d'autres lettres plus détaillées. Bienvenue dans le nouvel océan. PSY2v1 contre PSY1v1 Les innovations Résolution horizontale Spin-up ultra court et MSSH réaliste GFO et analyse plus fine Un exemple de la campagne Ovide Conclusions Les faits marquants du trimestre Noir Prestige Course du Rhum Annexe Niveau moyen de la mer Bloc Note Le passage du premier prototype PSY1 au second PSY2 se traduit par l'évolution de diverses caractéristiques du modèle numérique d'océan. Il y a la résolution horizontale, la bathymétrie lissée, le frottement latéral libre à la côte (free slip), la diffusion horizontale biharmonique, le rappel à la climatologie dans le Golfe de cadix (le rappel dans les fosses océaniques est supprimé) et d'autres encore. Tout ceci a fait l'objet de la lettre trimestrielle #5. Nous ne reviendrons dans la présente lettre que sur l'innovation majeure du modèle, la résolution horizontale. On passe en effet de 36km avec PSY1 à 6km avec PSY2, ce qui ouvre de nouvelles perspectives dans la mesure où ni la résolution verticale (43 niveaux), ni la physique (diffusion verticale turbulente) n'ont été sacrifiés. PSY2 voit aussi l'introduction de deux innovations majeures dans la partie d'analyse du système. La première concerne le niveau de référence altimétrique (niveau moyen de la mer ou MSSH) qui fixe une partie de la circulation moyenne. En effet, les observations satellitales de niveau de la mer ne sont que des variations (ou anomalies ou SLA) par rapport à un niveau de référence mal connu qu'il faut spécifier. Dans PSY1, on utilisait une MSSH synthétique qui était un mélange entre la moyenne de la simulation forcée et les analyses Reynolds de température de surface. Dans PSY2, on utilise une MSSH issue de la combinaison de l'altimétrie satellitale et d'observations hydrologiques. Cette nouvelle MSSH est décrite en annexe. Ceci n'est pleinement bénéfique que grâce à un changement de la stratégie du spin-up : on ne fait plus un long spin-up du modèle depuis la climatologie, mais seulement 3 semaines (début de la simulation le 5-9-2001), avant d'enclencher l'assimilation. L'autre innovation de l'analyse concerne l'utilisation d'un troisième satellite altimétrique, Geosat Follow On (GFO) qui vient rejoindre JASON et ERS-2 dans MERCATOR. Ceci est nécessaire dans la mesure où l'augmentation de la résolution du modèle océanique entraîne un décuplement du nombre de degrés de liberté du système. GFO permet d'avoir davantage d'informations pour mieux estimer l'état du système. En conjonction avec l'introduction de GFO, les échelles de corrélation de l'erreur d'ébauche ont été réduites, conformément à l'étude de la lettre trimestrielle #7 (une valeur constante de 150km est adoptée en Méditerranée). Les nouvelles échelles sont plus réalistes et elles sont compatibles avec le spectre d'énergie qui est plus étendu dans la mésoéchelle dans PSY2 (PSY2 est "eddy resolving" alors que PSY1 n'était qu'"eddy permiting"). Enfin, GFO permet d'utiliser ces échelles réduites dans un système exploité en temps réel, sans avoir trop à redouter les erreurs d'extrapolation liées à un échantillonnage insuffisant (voir la lettre trimestrielle #7). Bien sûr, tout ceci a un prix. Distribué sur 6 gros processeurs vectoriels, PSY2 est gourmand en temps de calcul, en mémoire et en stockage disque. Pour rendre acceptable l'exploitation en temps réel de PSY2, il a fallu réduire l'analyse différée (ou rétrovision ou hindcast) de 3 semaines à 2 semaines. Ceci est tout à fait acceptable puisque deux années d'exploitation de PSY1 on démontré que les retards de livraison des observations altimétriques étaient rarissimes. Enfin, analyse et prévision sont maintenant exécutées séparément, l'analyse passant le mardi soir, et la prévision le mercredi matin.
  • 2. La lettre trimestrielle de MERCATOR No 8 - Janvier 2003 - page 2 CNES CNRS/INSU IFREMER IRD METEO-FRANCE SHOM PSY2v1 contre PSY1v1 (suite) Résolution horizontale Le premier bénéfice de la haute résolution est le réalisme accru de la ligne de côte. Ceci est illustré par la salinité de surface de PSY1v1 comparée avec celle de PSY2v2 (figure 1). Figure 1 : salinité de surface de PSY1v1 (gauche) et de PSY2v1 (droite), analyses du 11-12-2002. Si la résolution de PSY1 était déjà suffisante pour simuler l'upwelling du Cap Rhir, on découvre dans PSY2 de nouvelles îles (Madère, Canaries), de nouveaux monts sous-marins, de nouvelles dorsales. Un détail du relief sous-marin apparemment négligeable peut en réalité s'avérer déterminant pour la circulation océanique. Le jet d'eau douce qui passe dans PSY2 entre Tenerife et Las Palmas est peut-être anodin, mais il illustre bien la finesse permise dans les interactions entre le relief et la thermodynamique. De plus, si PSY1 n'était qu'un modèle hauturier, PSY2 devient quasiment un modèle côtier. Les interactions entre les courants hauturiers et les courants côtiers sont maintenant bien présentes dans PSY2 (filament du Cap Rhir, tourbillon anticyclonique au sud de Fuerteventura). Le second bénéfice de la haute résolution est bien sûr la finesse accrue des structures thermodynamiques permises par le modèle. Un exemple caractéristique est donné par la comparaison du niveau de la mer dans le Golfe du Mexique (figure 2). Figure 2 : niveau de la mer de PSY1v1 (gauche) et de PSY2v1 (droite), analyses du 3-4-2002.
  • 3. La lettre trimestrielle de MERCATOR No 8 - Janvier 2003 - page 3 CNES CNRS/INSU IFREMER IRD METEO-FRANCE SHOM PSY2v1 contre PSY1v1 (suite) Les grandes structures de PSY1 et PSY2 sont très comparables. Mais les structures de PSY1 sont toutes très "rondes" : les tourbillons ont des rayons zonaux et méridiens assez identiques. Ce n'est pas le cas avec PSY2 où les tourbillons présentent des structures complexes. On note surtout l'apparition de fines structures complètement inédites. Ceci vient bien de la résolution du modèle car GFO n'était pas encore utilisé à cette date, et les rayons de corrélation de l'erreur d'ébauche qui interviennent dans l'analyse étaient alors identiques pour PSY1 et PSY2 (voir le chapitre "GFO et analyse plus fine"). Enfin, si l'on prend garde aux échelles de couleur, on peut être frappé par la différence de hauteur au niveau du Golfe du Mexique et de Cuba. Le Loop Current qui fait le tour de Cuba pénètre moins dans le golfe. Il y a moins d'anticyclones chauds éjectés par le Loop Current (par conservation de la vorticité) et il est plus "facile" pour PSY2 de simuler des dépressions froides. Ceci provient de la nouvelle stratégie de spin-up et de la nouvelle MSSH qui font l'objet du chapitre suivant. Spin-up ultra court et MSSH réaliste Une autre innovation majeure introduite lors du passage à PSY2 est l'utilisation d'une MSSH réaliste. Quel en a été l'impact sur le système d'analyse ? Une première réponse est donnée par la comparaison du niveau de la mer analysé des deux systèmes (figure 3). Figure 3 : niveau de la mer de PSY1v1 (gauche) et de PSY2v1 (droite), moyenne des analyses de 2002. Plus précisément, il s'agit du niveau après initialisation et redémarrage du modèle, autrement dit ce que le modèle a retenu (digéré) de l'analyse. Sur la figure, on voit que PSY2 est 20cm plus bas que PSY1. En fait, c'est PSY1 qui est trop haut : le long spin-up de PSY1 a diffusé le gradient vertical de densité et il en résulte une élévation artificielle depuis le démarrage du spin-up (voir la lettre trimestrielle #2). La nouvelle MSSH utilisée dans PSY2 est compatible avec la climatologie qui est aussi le point de démarrage du spin-up. La conjonction de cette cohérence avec la nouvelle stratégie de spin-up court permet à PSY2 de rester de fait au voisinage de la MSSH réaliste. L'impact le plus net en terme de structure océanique est le front du Gulf Stream (GS) qui est à sa position la plus septentrionale dans PSY1. Dans PSY2, on le retrouve bien à sa position médiane. Le tourbillon de Mann est marqué dans PSY2 vers 44°O-43°N. Plus loin vers l'Europe, le Courant Nord Atlantique (NAC) est moins schématique dans PSY2. Le dipole du Porcupine Bank (15°O-52°N) a heureusement disparu. Le front des Feroe donne lieu dans PSY2 à un Courant de Norvège plus marqué. Le gyre subpolaire est complètement transformé. PSY2 présente deux nettes dépressions en Mer du Labrador et en Mer d'Irminger, ce qui est conforme à nos connaissances actuelles de ces régions de formation d'eau profonde lors de la convection hivernale. A la pointe sud du gyre, on peut noter dans PSY2 une confrontation très marquée entre le Courant du Labrador et l'extension du GS, conformément aux observations satellitales de SST. On peut enfin retrouver dans PSY2 un Courant des Açores bien marqué et connecté au GS vers 50°O. Le Courant des Açores pénètre dans le Golfe de Cadix où il donne bien naissance au Courant des Canaries. En un mot, la circulation telle qu'on peut l'imaginer d'après la MSSH est nettement plus réaliste dans PSY2.
  • 4. La lettre trimestrielle de MERCATOR No 8 - Janvier 2003 - page 4 CNES CNRS/INSU IFREMER IRD METEO-FRANCE SHOM PSY2v1 contre PSY1v1 (suite) Comment cela se traduit-il sur la circulation de surface ? Une réponse nous est donnée par la comparaison entre PSY1, PSY2 et l'analyse Reynolds (figure 4). Le front du GS est plus réaliste dans PSY2. Il semble toutefois qu'il y ait encore un léger overshoot au Cap Haterras (le GS décolle un peu trop vers le nord de la côte américaine) et un manque d'eaux froides depuis le cap jusqu'à la Nouvelle Ecosse. En revanche, la recirculation à l'ouest du tourbillon de Mann (dans PSY2 vers 46°O- 42°N) suggère que la résolution des analyses Reynolds devient insuffisante à ce niveau de détail. La forme en éventail du NAC est très bien rendue dans PSY2. Le front des Feroe semble très réaliste. Par contre, le Courant du Groenland semble moins bien rendu qu'avec PSY1 (voir la MSSH à la côte est du Groenland en figure 3). Le courant du Labrador semble réaliste, de même que sa confrontation avec le GS. Au sud, il n'y a pas de différences nettes entre PSY1, PSY2 et Reynolds, ce qui est réconfortant pour la frontière artificielle à 9°N de PSY2. Les écarts moyens à Reynolds (figure 5) apportent quelques informations complémentaires. La remarque principale est que la structure des écarts est la même pour PSY1 et PSY2. On peut donc suggérer que la cause des biais est commune et réside dans un paramètre qui n'a pas été modifié comme le forçage, la diffusion verticale turbulente ou le schéma d'assimilation. La figure 5 confirme qu'un léger overshoot du GS persiste au Cap Haterras. On découvre aussi des eaux froides à la côte depuis le détroit de Floride jusqu'au Cap Haterras. Ceci mérite d'être investigué avec d'autres observations plus précises. Il en est de même pour l'anomalie négative de l'extension du GS marquée dans PSY2 vers 50°O, pour le Courant du Groenland et celui du Labrador. En revanche, le "biais froid" à la côte africaine et sans doute dû à une mauvaise représentation dans Reynolds des upwellings côtiers. Finalement, on peut noter que la Mer des Caraïbes reste trop froide dans PSY2, tandis qu'une amélioration est perceptible dans le Golfe du Mexique. Figure 4 : température de surface de PSY1 (haut gauche) et de PSY2 (haut droite), comparée avec les analyses Reynolds (gauche), en moyenne sur 2002.
  • 5. La lettre trimestrielle de MERCATOR No 8 - Janvier 2003 - page 5 CNES CNRS/INSU IFREMER IRD METEO-FRANCE SHOM PSY2v1 contre PSY1v1 (suite) Figure 5 : écart de température de surface entre PSY1 et Reynolds (gauche), entre PSY2 et Reynolds (droite), en moyenne sur 2002. On vient de voir que PSY2 reste au voisinage de la nouvelle MSSH, et que la circulation moyenne induite conduit à une amélioration sensible en SST. Qu'en est-il en profondeur ? Est-ce que PSY2 corrige les biais significatifs de PSY1 et reste au voisinage de la climatologie ? Une réponse est donnée sur 2002 par la température à 1000m (figure 6). Ce qui frappe en premier lieu, c'est l'apparition de l'eau méditerranéenne dans PSY2, complètement absente de PSY1. Ceci peut être partiellement attribué au rappel à la climatologie dans le Golfe de Cadix, en conjonction avec les nouveaux courants des Açores et des Canaries. Une autre amélioration spectaculaire concerne le gyre subpolaire qui est bien plus réaliste dans PSY2. Cependant, on peut noter que la recirculation sud du GS reste un peu chaude dans PSY2, et il en est de même pour la Mer des Antilles et le Golfe du Mexique. Figure 6 : température analysée à 1000m de PSY1 (haut gauche) et de PSY2 (haut droite), comparée avec la climatologie Reynaud (gauche), en moyenne sur 2002.
  • 6. La lettre trimestrielle de MERCATOR No 8 - Janvier 2003 - page 6 CNES CNRS/INSU IFREMER IRD METEO-FRANCE SHOM PSY2v1 contre PSY1v1 (suite) Les écarts à la climatologie (figure 7) confirment la forte réduction des biais. De même que pour la SST, on retrouve une similarité dans la structure de ces écarts. A cette profondeur, on peut éliminer le flux de chaleur et le flux d'eau douce de la liste des facteurs influents. Notons toutefois qu'une grande partie de l'écart à la climatologie est naturellement imputable aux fluctuations du niveau de la mer (voir le chapitre "GFO et analyse plus fine"). Figure 7 : écart de température analysée à 1000m entre PSY1 et la climatologie Reynaud (gauche), entre PSY2 et la climatologie Reynaud (droite), en moyenne sur 2002. L'analyse de la salinité à 1000m (figure 8) appelle les mêmes remarques que la température. L'eau méditerranéenne de PSY1 est beaucoup trop diffuse, au point que les eaux douces du gyre subpolaire et de la bande tropicale sont peu différenciées. Ce n'est pas le cas de PSY2 qui colle bien à la climatologie. Figure 8 : salinité analysée à 1000m de PSY1 (haut gauche) et de PSY2 (haut droite), comparée avec la climatologie Reynaud (gauche), en moyenne sur 2002.
  • 7. La lettre trimestrielle de MERCATOR No 8 - Janvier 2003 - page 7 CNES CNRS/INSU IFREMER IRD METEO-FRANCE SHOM PSY2v1 contre PSY1v1 (suite) Les écarts à la climatologie confirment la forte réduction des biais dans PSY2. On note encore une fois la similitude des biais de PSY1 et PSY2. On sait de plus que les biais de température et de salinité de PSY1 se compensent en grande partie en terme de densité (voir les lettres No 2 et No 6). On voit que PSY2 a le même comportement. Ce n'est pas surprenant puisque la méthode d'assimilation est par construction "isopycnale" : on monte ou descend les masses d'eau en les faisant tourner, sans modifier leurs caractéristiques T-S. En première analyse, il semblerait qu'une remontée des isopycnes expliquerait le désalage des eaux méditerranéennes à 1000m de PSY2. Figure 9 : écart de salinité analysée à 1000m entre PSY1 et la climatologie Reynaud (gauche), entre PSY2 et la climatologie Reynaud (droite), en moyenne sur 2002. En conclusion de ce chapitre, on voit que les écarts ont été fortement réduits en température et en salinité. Ceci permet d'espérer pouvoir comparer directement les champs du modèle aux observations in situ. Il reste quelques régions où les écarts sont nets, mais certains peuvent être dus à une fluctuation récente de l'Atlantique (par opposition à la période correspondant à la climatologie). GFO et analyse plus fine Depuis juillet 2002, un troisième satellite altimétrique GFO est assimilé dans PSY2, et les échelles de corrélation ont été réduites. Quel en est l'impact ? En moyenne sur 2002, l'impact est quasiment nul sur les analyses du niveau de la mer : les fluctuations interannuelles du niveau sont voisines dans PSY1 et PSY2 (figure 10), comme par exemple la recirculation à l'ouest du tourbillon de Mann vers 46°O-42°N. Cela nous remémore la bonne tenue de PSY1 dans le domaine des fluctuations à basse fréquence. Cela confirme aussi qu'un troisième satellite n'apporte pas grand chose pour l'étude de ce type de fluctuations. Au rang des différences entre PSY1 et PSY2, on peut citer la région du Gulf Stream (GS) au large du Cap Haterras, le Banc de Porcupine, la côte est du Groenland et la mer d'Irminger, ainsi que la côte africaine. Ces différences sont vraisemblablement attribuables au biais important des prévisions de PSY1 (supérieur à l'erreur d'ébauche de 7cm) qui limite la précision de l'analyse. L'apport de GFO et des échelles réduites est sensible en zone littorale, et à la côte africaine en particulier. PSY2 permet maintenant de mieux représenter les pentes de niveau de la mer dues aux phénomènes côtiers (upwellings). Enfin, on peut remarquer que les anomalies du niveau de la mer (SLA) de 2002 expliquent certains écarts à la climatologie à 1000m. Ainsi, le réchauffement en surface et à 1000m au large du cap Haterras (overshoot du Gulf Stream) est attesté par l'anomalie positive de SLA. Entre 60°O et 50°O, la SLA présente un affaiblissement du front du GS, ce qui se traduit à 1000m par des eaux chaudes au nord du GS. Entre 50°O et 40°O, la SLA suggère un éclatement en deux branche du GS à ce niveau, ce qui se retrouve bien à 1000m. En revanche, l'anomalie négative de SLA des courants du Groenland et du Labrador suggérerait plutôt un refroidissement (ou un salage). Or, c'est le signal inverse que l'on retrouve en surface et à 1000m. Enfin, on peut noter que le désalage de PSY2 à 1000m des eaux méditerranéennes du triangle Canaries-Açores-Irlande ne correspond pas à un changement de niveau de SLA.
  • 8. La lettre trimestrielle de MERCATOR No 8 - Janvier 2003 - page 8 CNES CNRS/INSU IFREMER IRD METEO-FRANCE SHOM PSY2v1 contre PSY1v1 (suite) Figure 10 : anomalie de niveau de la mer analysée de PSY1 (gauche), et PSY2 (droite), en moyenne sur 2002. L'impact des 3 satellites et des échelles de corrélations réduites est net quand on compare les analyses des anomalies du niveau de la mer de PSY1 et PSY2 (figure 11). Si les grandes structures sont approximativement aux mêmes endroits, on voit bien la richesse de détails permise par la nouvelle analyse de PSY2. On peut ici noter que cette finesse d'analyse s'étend maintenant jusqu'en zone côtière. Figure 11 : anomalie de niveau de la mer de PSY1 (gauche), et PSY2 (droite), analyse du 13-11-2002 à l'ouest de la péninsule ibérique.
  • 9. La lettre trimestrielle de MERCATOR No 8 - Janvier 2003 - page 9 CNES CNRS/INSU IFREMER IRD METEO-FRANCE SHOM PSY2v1 contre PSY1v1 (suite) On peut bien sûr se demander si un modèle dynamique à si haute résolution arrive effectivement à digérer sans heurts cette analyse statistique à base d'interpolation optimale. Une indication nous est donnée par la comparaison des températures analysées à 1000m des deux systèmes (figure 12). L'accord en terme de structures et d'échelles entre le niveau de la mer et la température qui était bon dans PSY1 est conservé dans PSY2. Les champs analysés présentent des structures qui sont cohérentes du point de vue dynamique : les courants côtiers, meddies, méandres et filaments de PSY2 semblent faire bon ménage avec l'analyse. Figure 12 : température vers 1000m de PSY1 (gauche), et PSY2 (droite), analyse du 13-11-2002 à l'ouest de la péninsule ibérique. Un exemple de la campagne Ovide La campagne OVIDE 2002 (Observatoire de la Variabilité Inter-annuelle à DEcénale en Atlantique Nord) s'est achevée le 11 juillet 2002, à l'issue de 30 jours en mer sur le N/O Thalassa. L'objectif principal de OVIDE est la réalisation tous les 2 ans (pendant 10 ans) d'une section d'hydrographie et de géochimie du Groenland au Portugal afin de résoudre les fluctuations à basse fréquence de la cellule méridienne de circulation, du flux de chaleur vers l'Europe, du transport de traceurs et des caractéristiques des masses d'eau. OVIDE contribue au programme international CLIVAR. Cette campagne a aussi permis la mise à l'eau de 17 profileurs dérivants dans le cadre du projet ARGO, enrichissant ainsi le réseau d'observation en temps réel de l'Atlantique Nord. Dans ce chapitre, nous allons comparer les observations de la radiale descendante avec les analyses des systèmes PSY1 et PSY2. Les champs MERCATOR présentés ici sont des analyses réalisées en temps différé qui correspondent approximativement au milieu de la radiale.
  • 10. La lettre trimestrielle de MERCATOR No 8 - Janvier 2003 - page 10 CNES CNRS/INSU IFREMER IRD METEO-FRANCE SHOM PSY2v1 contre PSY1v1 (suite) La climatologie présente le long de la radiale descendante d'Ovide (figure 13) cinq caractéristiques principales. A l'extrême ouest, on trouve trace d'un Courant du Groenland froid et surtout désalé. De 40°O à 35°O, c'est la mer d'Irminger avec ses eaux froides et douces. Vers 30°O, la Dorsale de Reykjanes contraint le Gyre Subpolaire à recirculer vers l'ouest-sud-ouest, entraînant des eaux plus chaudes et plus salées venant du Courant Nord Atlantique, situé lui vers 25°O-20°O. A l'est de la radiale, on note la forte signature des eaux méditerranéennes chaudes et salées, de 400m jusqu'à 1000m. Le noyau qui se situe vers 1000m est très visible en salinité, alors que l'on a une zone homogène en température (thermostad). Figure 13 : sections verticales de température et de salinité : climatologie Reynaud de juin le long de la radiale descendante Ovide. Dans PSY1 (figure 14), la dorsale de Reykjanes et la remontée d'eau froide du Gyre Subpolaire sont plus marqués en température que dans la climatologie, se rapprochant ainsi des observations (figure 16). Les eaux de la Mer d'Irminger sont trop chaudes et trop salées, ce qui est une dégradation par rapport à la climatologie. Le Courant Nord Atlantique est bien marqué. En revanche, les eaux méditerranéennes sont terriblement mal placées dans PSY1. Figure 14 : sections verticales de température et de salinité : analyse PSY1 du 26-6-2002 le long de la radiale descendante Ovide.
  • 11. La lettre trimestrielle de MERCATOR No 8 - Janvier 2003 - page 11 CNES CNRS/INSU IFREMER IRD METEO-FRANCE SHOM PSY2v1 contre PSY1v1 (suite) Dans PSY2 (figure 15), on ne trouve pas trace des eaux très froides du Courant du Labrador, même si l'inclinaison des isothermes est qualitativement plus en en accord avec les observations que la climatologie. En revanche, le minimum de salinité de PSY2 est situé très au large, ce qui est une dégradation par rapport à la climatologie. On ne trouve pas trace entre 1000m et 2000m des eaux froides qui ont probablement été formées lors d'une année précédente. Vers 28°O, la recirculation du gyre est assez réaliste dans PSY2, aussi bien en température qu'en salinité. Le front du Courant Nord Atlantique est bien rendu vers 23°O. Plus à l'est, les eaux méditerranéennes sont assez proches des observations, mais on constate quand même un désalage, et un déplacement du noyau vers 900m au lieu de 1000m dans les observations. On peut aussi noter que la stratification est un peu trop importante en surface dans PSY2, alors qu'elle était insuffisante dans PSY1. Il semblerait que le mélange soit trop intense à la côte portugaise. Enfin, le gradient thermique est-ouest qui est nul dans les observations entre 18°O et 12°O de 300m à 2000m (isothermes plates) est nettement plus conforme dans PSY2 que dans la climatologie ce qui montre que des progrès sont intervenus depuis le spin-up. Figure 15 : sections verticales de température et de salinité : analyse PSY2 du 26-6-2002 le long de la radiale descendante Ovide. Figure 16 : sections verticales de température et de salinité : observations CTD le long de la radiale descendante Ovide.
  • 12. La lettre trimestrielle de MERCATOR No 8 - Janvier 2003 - page 12 CNES CNRS/INSU IFREMER IRD METEO-FRANCE SHOM PSY2v1 contre PSY1v1 (suite) Les champs de PSY2 permettent de proposer un contexte de cette radiale. Cela peut s'avérer utile car on retrouve une correspondance entre la mésoéchelle de PSY2 et la radiale. Ainsi, la température à 100m (figure 17) présente une petite recirculation chaude vers le nord à 33°O et une poche d'eau chaude vers 27°O que l'on retrouve dans la température observée. Sur la température à 300m (figure 17), PSY2 présente un front du NAC situé vers 24°O ainsi qu'un front secondaire vers 22°O que l'on retrouve bien dans les observations. Figure 17 : température à 100m et 300m : analyse PSY2 du 26-6-2002. La salinité à 300m (figure 18) présente un méandre salé (et chaud) vers 19°O. La salinité à 1000m présente un méandre salé entre 15° et 16°O, et un autre vers 14°O. Ces détails mésoéchelles sont intéressants puisqu'ils proposent une vision dynamique de la région traversée. Par exemple, les maxima locaux de sel au large du Portugal sont reliés entre eux : il y a vers 40°N (la latitude finale de la radiale) une protubérance salé qui s'étend vers l'ouest, perturbée par divers tourbillons et recirculations. Figure 18 : salinité à 300m et 1000m : analyse PSY2 du 26-6-2002.
  • 13. La lettre trimestrielle de MERCATOR No 8 - Janvier 2003 - page 13 CNES CNRS/INSU IFREMER IRD METEO-FRANCE SHOM Vue d'ensemble Les trois modifications majeures qui interviennent lors du passage de PSY1v1 à PSY2v1 sont : le modèle Atlantique nord et Atlantique tropical "MNATL" 1/3° (~36km) remplacé par le modèle Atlantique nord et Méditerranée "PAM" 1/15° (~6km), un nouveau niveau de référence altimétrique (MSSH hydrologique en Atlantique et issue de 3 ans de spin-up en Méditerranée) et un spin-up du modèle ultra court (3 semaine depuis le 5-9-2001) avant l'assimilation, un 3ème satellite GFO et des échelles de corrélation réduites (PSY1v1 à posteriori et 150km en Méditerranée). Il y a aussi trois nouveaux points mineurs : le rappel à la climatologie dans les fosses océaniques est supprimé : on laisse le modèle entièrement libre, on impose un rappel vers 1000m dans le Golfe de Cadiz pour imposer l'eau Méditerranéenne en Atlantique. La méthode d'analyse et la technique de correction du modèle demeurent inchangées par rapport à PSY1v1. L'univarié de PSY2v1 ne diffère donc significativement de PSY1v1 que par la nouvelle MSSH et les échelles de corrélation. Les observations utilisées sont les observations de niveau de la mer le long des traces des satellites (chaque 21km). L'écart à l'anomalie de niveau prévue chaque 7 jours par le modèle est analysé en 2D par SOFA (analyse univariée). On utilise des erreurs de 3cm (TOPEX/POSEIDON-JASON-1), 4.5cm (ERS-2 et GFO) et 7cm (modèle). Les rayons de corrélation spatio-temporelle des erreurs varient spatialement sauf en Méditerranée. L'incrément 2D d'analyse est converti en incrément 3D de l'ensemble des variables d'état du modèle (vitesse, température, salinité et énergie cinétique turbulente) en montant ou descendant les couches d'eau dans les régions verticalement stratifiées, et en modifiant la rotation des colonnes dans les régions homogènes. On applique partiellement la géostrophie aux incréments. On utilise une procédure légère d'initialisation avant de redémarrer le modèle pour la prévision.
  • 14. La lettre trimestrielle de MERCATOR No 8 - Janvier 2003 - page 14 CNES CNRS/INSU IFREMER IRD METEO-FRANCE SHOM Conclusions 2002 est une année très conforme à la moyenne 1993- 99 en terme de niveau de la mer. On peut relever principalement : le Loop Current est moins étendu dans le Golfe du Mexique, le Gulf Stream est plus au nord entre 75°O et 60°O, le Courant Nord Atlantique est plus au sud entre 45°O et 20°O. Le biais en température de surface (SST) a été réduit dans PSY2 par rapport à PSY1. Cette réduction devrait permettre une croissance d'erreur plus faible dans la couche de mélange à travers le rappel à l'analyse Reynolds de SST. Il reste encore des défauts dans la SST de PSY2 : léger overshoot du décollement du Gulf Stream, peut-être en liaison avec les recirculations nord et sud. Ceci n'est que partiellement expliqué par les anomalies de niveau de la mer. la Mer des Antilles et le Gyre Subtropical sont trop froids. En profondeur (à 1000m), les écarts à la climatologie ont été considérablement réduits dans PSY2 par rapport à PSY1. On peut retenir deux biais principaux : le Courant du Groenland, le Courant du Labrador et la recirculation sud du Gulf Stream sont plus chauds et plus salés que la climatologie. le panache d'eau méditerranéenne est un peu plus froid et surtout moins salé. Il semblerait ici qu'une remontée d'environ 100m des isopycnes expliquerait le désalage des eaux méditerranéennes à 1000m de PSY2. L'anomalie du niveau de la mer semble expliquer une partie des écarts à la climatologie dans la région du Gulf Stream. Ce n'est pas le cas en ce qui concerne les courants du Groenland et du Labrador ou le panache Atlantique de l'eau méditerranéenne. La radiale d'observations de la campagne OVIDE 2002 nous montre que PSY2 ne fait pas que réduire les écarts à la climatologie. PSY2 présente des détails mésoéchelles réalistes qui étaient absents de la climatologie. Fronts et masses d'eau sont relativement bien représentés à toutes les profondeurs, ce qui justifie la résolution verticale conséquente et la physique complète de la nouvelle configuration du modèle. La radiale OVIDE nous renseigne aussi sur deux des points faibles restants de PSY2. On peut ainsi se demander si les courants du Groenland et du Labrador sont bien représentés dans la nouvelle MSSH. On peut vérifier que dans une bande de 2° du Cap Farewell (sud Groenland), le gradient de la MSSH de PSY2 est moindre (~5cm de moins) que dans PSY1. Le gradient à la côte du Groenland présente une différence semblable au niveau du Détroit du Danemark (entre Groenland et Islande), ce qui pourrait influer sur la descente des eaux polaires. Cependant, on pourrait tout aussi bien voir une origine physique dans la représentation médiocre de ces courants. Par exemple, la fonte des glaces de mer venues du nord, ou des glaciers du Groenland, a-t-elle un impact sensible sur ces courants ? A propos du biais du panache méditerranéen, il serait encore facile d'imputer cela à la MSSH, mais la correction qu'il "suffirait" d'effectuer serait tout de même d'environ 10cm (le rapport entre l'amplitude du déplacement isopycnal et la hauteur dynamique est ~100m/10cm dans cette région). Or, on sait déjà que l'écoulement des eaux méditerranéennes sur le seuil de Gibraltar n'est pas parfait. Mais on peut aussi imaginer que cela vient d'une dérive causée par un Courant du Portugal trop turbulent, ou par un transport insuffisant à Gibraltar. Peut-être s'agit-il d'un effet combiné de toutes ces causes. Dans ces deux cas, on a besoin d'un volume conséquent d'observations contemporaines précises pour analyser en détail le comportement de PSY2. Ceci fera l'objet de la prochaine lettre trimestrielle.
  • 15. La lettre trimestrielle de MERCATOR No 8 - Janvier 2003 - page 15 CNES CNRS/INSU IFREMER IRD METEO-FRANCE SHOM Les faits marquants du trimestre Noir Prestige Voici en guise de carte de voeux, la prévision de MERCATOR pour le 1er janvier 2003 sur le littoral Atlantique : les vents persistants du sud-ouest créent des courants de surface portant vers les côtes françaises depuis La Coruna jusqu'à Biarritz. Ce sombre présage s'est transformé en triste réalité lorsque les boulettes de pétrole du Prestige atteignirent les plages du côté d'Hossegor. Courant de surface prévu le 25-12-2002 pour le 1-1-2003 Cette région située aux pieds des monts cantabriques est très fluctuante. On estime aujourd'hui que la fenêtre maximale de validité des prévisions MERCATOR se situe entre 3 et 10 jours, suivant la qualité des prévisions atmosphériques et la densité de la couverture satellitale en altimétrie. La prévision du premier de l'an illustre le potentiel des prévisions océaniques dans l'aide à la protection du littoral. Elle témoigne du travail du projet pour couvrir cette catastrophe écologique et humaine. MERCATOR a distribué ses analyses et prévisions à plusieurs organismes (Cedre, Météo-France, Shom, Ifremer, Préfecture Maritime) depuis la date du naufrage.
  • 16. La lettre trimestrielle de MERCATOR No 8 - Janvier 2003 - page 16 CNES CNRS/INSU IFREMER IRD METEO-FRANCE SHOM Les faits marquants du trimestre (suite) Course du Rhum Si le baptême du feu a été sordide pour PSY2 avec le naufrage du Prestige, PSY1 a eu une fin glorieuse, avec un podium en monocoque dans la course du Rhum 2002. En effet, MERCATOR a envoyé des prévisions à Denis Thunynck de L'Université du Littoral Côte d'Opale qui coordonnait le routage du navigateur Joé Seeten. Les cartes MERCATOR ont permis en particulier d'éviter des zones où les courants prévus s'opposaient au vent, ce qui a généré une mer très "cassante" (14 multicoques sur 17 abandonnèrent lors de la traversée du Golfe de Gascogne). Plus anecdotique mais plus visuel, Joé Seeten nous fît l'amitié de passer la région du Courant de Açores en accord avec PSY1 (voir figure). Courant de surface prévu le 25-12-2002 pour le 1-1-2003 MERCATOR a aussi permis un gain de route lors des derniers 48h , ainsi qu'un gain de temps grâce à une réduction des empannages. Quoique sous estimées de 15% à 20%, les courants prévus ont accéléré l'arrivée de Joé Seeten à Pointe à Pitre. Bravo, et à la prochaine, avec PSY2.
  • 17. La lettre trimestrielle de MERCATOR No 8 - Janvier 2003 - page 17 CNES CNRS/INSU IFREMER IRD METEO-FRANCE SHOM Annexe Niveau moyen de la mer PSY2-v1 adopte un nouveau niveau de référence (MSSH ou ARL) pour caler les anomalies de niveau de la mer (SLA). Le changement de MSSH constitue une grande avancée par rapport à PSY1-v1 (voir la lettre trimestrielle #2). Ceci n'est pleinement bénéfique que grâce à un changement de la stratégie du spin-up : on ne fait plus de spin-up long du modèle comme c'était la tradition en France, mais un court spin-up depuis la climatologie, stratégie utilisée depuis des années au UKMO. Le modèle n'a donc plus le temps de dériver, et reste dans un état proche de la climatologie, et donc en accord avec la MSSH. En effet, la nouvelle MSSH est en grande partie due à Marie-Hélène Rio et Fabrice Hernandez (Rio, M.-H. & F. Hernandez, 2002). Cette MSSH est construite à partir d'observations hydrologiques (température, salinité et courants) de la période 1993-99 et doit donc être en bon accord avec la climatologie. Cela n'était pas le cas de la MSSH de PSY1-v1, qui correspondait davantage à l'état de régime du modèle. Toutefois, ce produit hydrologique n'est pas encore disponible sur la Méditerranée, et il a donc fallu compléter la MSSH Atlantique par quelque chose. Le choix des équipes PSY et PAM de MERCATOR s'est porté sur un spin-up de 3 années du zoom Méditerranée de PAM (la configuration 1/15° de PSY2-v1). Cette MSSH Méditerranée est principalement due à Karine Béranger et à Yann Drillet. On y retrouve très bien des structures connues comme le front Alméria-Oran, le courant algérien, le front d'Ibiza, le courant liguro-provençal... Quelques structures mésoéchelles peu vraisemblables ont été éliminées au large d'Ibiza et de la Libye.
  • 18. La lettre trimestrielle de MERCATOR No 8 - Janvier 2003 - page 18 CNES CNRS/INSU IFREMER IRD METEO-FRANCE SHOM Annexe (suite) Enfin, à propos du collage des deux morceaux de MSSH à Gibraltar, on a choisi de mettre au même niveau les deux morceaux. Autrement dit, on a supposé qu'il n'y avait pas de dénivelé entre le Golfe de Cadix et la Mer d'Alboran. C'est un pis-aller en l'absence d'information précise (millimétrique) quant à ce dénivelé. Noter par ailleurs que l'assimilation est coupée dans les détroits car on ne sait pas localement y convertir l'information altimétrique. En conséquence, l'assimilation ne peut induire de corrections dans la SLA analysée à Gibraltar. Cela signifie que le collage de MSSH à Gibraltar est sans effet sur la SLA analysée. En revanche, la procédure d'initialisation peut induire des corrections baroclines et barotropes dans le détroit. Ceci pourra être visible dans les champs de vitesse "initiaux". Ensuite, les corrections dans les bassins Atlantique et Méditerranée doivent entraîner des ajustements à travers le détroit. C'est à ce moment qu'intervient le dénivelé imposé par la MSSH. Cela sera visible dans la SSH "initiale" et tous les autres champs ultérieurs (courants, température...). Le transport à Gibraltar sera donc fortement contraint par ce dénivelé. Voici ci-après quelques zooms sur des régions MERCATOR du bulletin. Voici quelques remarques : le Gulf Stream est assez rectiligne, c'est un jet bien marqué, il y a une circulation cyclonique à la côte de Floride ; cela va conférer plus d'inertie au jet vers le Cap Hatteras, il y a une circulation cyclonique au large du Saint-Laurent : cela va faire descendre des eaux du Labrador, le front des Açores est bien marqué et est connecté au Gulf Stream. Ces quatre propriétés devraient corriger les biais de PSY1-v1 qui sont aussi dans une moindre mesure ceux du spin-up de PAM.
  • 19. La lettre trimestrielle de MERCATOR No 8 - Janvier 2003 - page 19 CNES CNRS/INSU IFREMER IRD METEO-FRANCE SHOM Annexe (suite) En pratique, on a généré deux MSSHs, l'une relative à la période 1993-95 et l'autre relative à la période 1993-99, suivant que l'on utilise des anomalies (SLA) relatifs à 1993-95 ou à 1993-99. On passe de l'un à l'autre en ajoutant (sur l'Atlantique uniquement) la moyenne DUACS 1/4° de la SLA relative à 1993-95 sur 1996-99 par la formule suivante : Références Greiner, E. : "Biais de la réanalyse PSY1-v1 AOO1 de 1993-98", Lettre Trimestrielle MERCATOR #2, juillet 2001, http://www.mercator.com.fr/html/lettre/lettre_2/page_8.html. Rio, M.-H. and F. Hernandez, 2002: Estimation d'une topographie dynamique moyenne sur l'Atlantique Nord et Tropical. Rapport final pour le Groupe Mission Mercator CLS/DOS/NT/02.515, xx pp. CLS, Ramonville St Agne. MSSH(93,99) = MSSH(93,95) + 3/(4+3) * MEAN_SLA(93,95) + 4/(4+3) * MEAN_SLA(96,99) = MSSH(93,95) + 4/(4+3) * MEAN_SLA(96,99) car MEAN_SLA(93,95) = 0
  • 20. La lettre trimestrielle de MERCATOR No 8 - Janvier 2003 - page 20 CNES CNRS/INSU IFREMER IRD METEO-FRANCE SHOM - Bloc Note - Adresse N'hésitez pas à nous faire part de vos remarques à l'adresse : webmaster@mercator.com.fr Prochaine édition : Avril 2003 Edition Eric Greiner Auteurs : Cette lettre a été rédigée par Eric Greiner avec la participation de Pascale Lherminier, Véronique Landes et Vincent Toumazou.