SlideShare una empresa de Scribd logo
1 de 63
Descargar para leer sin conexión
Nicolas Micallef
COMAL 4
Tuteur de mémoire
Antoine Pecnard
Directeur de mémoire
Stanislas Thiry,
Gérant des sociétés
Radioshop et l’AgenSe
Les vertus de la musique dans le marketing
expérientiel
Promotion 2013-2014Montpellier
J C €
Pourquoi des 5 sens, l’ouïe est-elle le plus prometteur aujourd’hui pour
attirer l’attention du consommateur et l’influencer alors qu’il est soumis à
de nombreuses autres sollicitations sensorielles ?
MÉMOIRE DE FIN D’ÉTUDES
€
Remerciements
Me voilà au terme d’une sacrée aventure lorsque je rédige cette ultime partie...
Aboutissement de plusieurs mois de travail, ces quelques lignes s’adressent aux
personnes qui m’ont aidé dans la réalisation de ce mémoire.
En premier lieu, je tiens à remercier M.Thiry Stanislas, directeur associé de
Radioshop et de l’AgenSe, qui a su accompagner et recadrer lorsque nécessaire,
ma réflexion sur ce sujet. Je remercie également M.Pecnard Antoine et Mme.
Puyau Claudine, référents pédagogiques à l’ISCOM pour le temps qu’ils ont
bien voulu m’accorder à discuter du sujet et à m’aiguiller dans la construction
de mon plan. Leurs conseils avisés m’ont permis de structurer ma pensée et
de vous livrer ici un travail réfléchi autour de la musique dans le marketing.
Enfin, je pense aussi à tous mes proches et les remercie pour leurs
encouragements comme pour leur patience dans certains cas...Merci !
A présent, il est temps de laisser « jouer la musique » de ce travail et de vous en
souhaiter une très bonne lecture.
-5-
« La musique commence là où s’arrête le pouvoir des mots. »
Richard Wagner
-6-
Sommaire
Introduction..................................................................................................................................... 8
I- Le marketing polysensoriel, la réponse à un consommateur en quête de
sensations
A- À l’ère de l’expérience, le marketing traditionnel de moins en moins
pertinent............................................................................................................................................10
1- L’essoufflement du marketing traditionnel
2- L’ère de l’expérience
3- Le marketing émotionnel : les 4E
B- Le marketing sensoriel, ou comment stimuler les sens pour vendre................13
1- Définition, objectifs et avantages du marketing sensoriel
2- 5 sens sur lesquels agir
C- Enquête de terrain : Les ambiances de magasins, ressentis et attentes des
consommateurs.............................................................................................................................19
1- Méthodologie
2- Résulats majeurs du questionnaire
3- Bilan
II- La musique, « langue des émotions », une sollicitation sensorielle clé
A- Un élément immatériel dont on ne peut se passer.....................................................23
1- Au cœur de l’activité de l’Homme
2- Le langage commun des « digital natives »
3- Les fonctions de la musique
B- La Musique et les Marques...................................................................................................27
1- Histoire de la musique dans la Communication
2- Les différentes formes de liaisons entre la musique et les marques
-7-
3- La construction d’une identité sonore cohérente
4- Une identité sonore réussie : le cas SNCF
5- Le baromètre des identités musicales des marques (BIMM)
C- L’identité sonore à travers le point de vente.................................................................37
1- La musique sur le point de vente, un pouvoir avéré
2- De la musique d’ambiance passive à la musique qui transmet des messages
3- La musique et le point de vente virtuel
III- Construire avec la musique le point de vente de demain
A- L’expérience musicale dans les points de vente........................................................44
1- Élaborer sa stratégie musicale
2- Déployer la stratégie musicale dans et au delà du point de vente
3- S’intégrer dans une démarche polysensorielle
B- Aller encore plus loin : Se rapprocher des artistes....................................................49
1- La création de contenu de marque (Brand content)
2- Une relation gagnant / gagnant
-8-
Introduction
	 La musique n’a jamais été autant démocratisée et consommée depuis sa
dématérialisation due à la Révolution numérique. C’est simple, elle est présente et
accessible partout autour de nous, que ce soit dans nos lecteurs MP3, nos téléphones,
nos tablettes mobiles, à la télévision, dans la rue, sur internet, dans la publicité et
même jusque dans les points de vente...
Ne rendant personne vraiment insensible et nous touchant à différents degrés, la
musique est sans doute un des objets émotionnels les plus puissants qu’il soit.
Par ailleurs, ce besoin de rechercher à vivre des émotions à travers la musique
semble aller de pair avec la volonté croissante du consommateur d’être interpellé
différemment par les marques. Aujourd’hui « blasé » des techniques de marketing
traditionnel et de l’omniprésence du visuel commercial tout comme il peut être « embêté
» face à la multitude de choix de produits s’offrant à lui, le consommateur délaisse
effectivement de plus en plus la Raison au profit de l’Émotion et de l’Éxpérience. Ainsi,
voilà maintenant quelques années que les marques et enseignes ont commencé à
pratiquer du marketing sensoriel et donc à solliciter d’autres sens que la vue.
Au travers de ce mémoire, nous tenterons d’analyser l’ensemble des opportunités
qu’offre la musique dans un usage marketing et commercial pour les marques et nous
nous efforcerons de répondre à la question suivante : Pourquoi des 5 sens, l’ouïe
est-elle le plus prometteur aujourd’hui pour attirer l’attention du consommateur et
l’influencer alors qu’il est soumis à de nombreuses autres sollicitations sensorielles ?
Aujourd’hui, force est de constater que très souvent le son est choisi sans réelle
réflexion derrière ou en phase finale d’un projet de communication.
Nous nous efforcerons ainsi à démontrer la force de la musique et à présenter
l’approche expérientielle qu’un individu peut avoir avec une marque qui l’aurait intégré
de façon réfléchie au cœur de sa stratégie. L’idée de ce travail de recherche est donc
de repositionner l’ouïe et la musique au centre du marketing afin de mieux toucher
le consommateur. Pour cela, nous nous focaliserons sur les lieux de vente, en tant
que points de contacts et sollicitations sensorielles directes avec les cibles. Bien
-9-
qu’abordée, la relation entre la musique et la publicité fera l’objet d’une étude moins
approfondie.
De ce fait, dans une première partie et en guise de contexte, nous vivrons ensemble
le passage d’un marketing s’appuyant sur la raison à un marketing d’avantage
émotionnel qui vise à faire vivre de véritables expériences consommateur. Au cours
de cette partie nous nous intéresserons également aux ressentis et attentes des
consommateurs dans les magasins. Puis, nous analyserons les effets de la musique
sur l’Homme et le consommateur en étudiant notamment comment les marques
l’utilisent au sein de leur communication et comment la construction d’une identité
sonore peut renforcer l’image globale de marque. Enfin, dans une troisième et dernière
partie, nous réfléchirons à des recommandations stratégiques pour construire le point
de vente de demain avec la musique en moyen de premier plan.
-10-
I- Le marketing polysensoriel, la réponse à un consommateur en quête de
sensations
A- À l’ère de l’expérience, le marketing traditionnel de moins en moins
pertinent.
1- L’essoufflement du marketing traditionnel
	 Défini par Kotler comme étant « l’ensemble des techniques et études
d’applications qui ont pour but de prévoir, constater, susciter, renouveler ou stimuler
les besoins des consommateurs et adapter de manière continue l’appareil productif
et commercial »1
, le marketing au sens traditionnel est particulièrement centré sur les
attributs du produit et les bénéfices qu’on en tire. Caractérisé par une approche très
analytique, rationnelle et objective de nos besoins, c’est parce qu’il considère toujours
le consommateur comme une cible passive dénuée d’émotions sans également tenir
réellement compte de l’évolution de nos comportements et attentes que le marketing
traditionnel ne suffit plus.
En effet, à l’ère du « consom’acteur » où la demande est reine, différents facteurs
visent à souligner les lacunes de ce type de marketing :
- Les éléments qui constituent le Mix Marketing à savoir les 4P (Prix, Produit, Place,
Promotion) ne sont pas orientés client et bien que Lovelock en 2008 ait élargi le mix
aux services en rajoutant le personnel en contact avec les clients, les procédures et
interfaces non humaines ainsi que les éléments matériels de l’environnement physique
(Personne, Process et Preuve)2
, le client et son ressenti restent tout de même relégués
en second plan.
- Face à une offre homogène de produits très souvent différenciés entre eux sur des
dimensions intrinsèques n’intéressant pas toujours le consommateur, ce dernier se
laisse souvent guidé par son affect, en se basant sur des caractéristiques subjectives
et en se détournant de la publicité interruptive.
- Du fait de la multiplication des points de contact qui existent entre le consommateur
et les marques (l’internet, le mobile, les réseaux sociaux…), le marketing en point de
vente a tout intérêt à se renouveler en intégrant notamment l’ensemble des nouveaux
canaux. En clair, si un produit peut être acheté à distance, le client doit trouver plus
1- KOTLER & DUBOIS, Marketing Management, 11e édition, Pearson Éducation, Paris, 2003.
2- LOVELOCK & LAPERT, Marketing des Services, 6e édition, Publi Union, Paris, 2006
-11-
en magasin pour qu’il achète et ait envie de revenir : une atmosphère, un confort, une
émotion.
Les points de vente sont ainsi les premiers concernés dans cette nécessité d’évoluer
afin de satisfaire des consommateurs « blasés » par le marketing traditionnel et
désormais à la recherche de stimulations sensorielles et émotionnelles. Ayant dépassé
le cadre d’une consommation plutôt utilitariste, il semblerait que les consommateurs
aujourd’hui consomment d’avantage d’image et de sens.
2- L’ère de l’expérience
	 En 1999, Pine et Gilmore démontraient que notre société de consommation,
après être passée par l’ère de l’agriculture, de l’industrie et des services, était entrée
dans l’ère de l’expérience3
. Joseph Pine, présentait alors sous la forme du schéma ci-
dessous l’évolution de notre économie appliquée à l’exemple du café.
Avec cette théorie, la création d’une offre expérientielle autour de produits augmente
la notion de valeur liée aux marques. IKEA, en précurseur du marketing de l’expérience,
illustre parfaitement cela en ayant décliné le concept « d’ expérience client » sur l’ensemble
de sa chaîne de valeur. Grâce à ses mises en scène de produits ou encore son parcours
Extraction de matières
premières
Fabrication
de biens
Délivrance
de services
Mise en scène
d’expériences
différenciation
indifférenciation
marché premium
Concurrence
Politique de Prix
Besoins des
consommateurs
non pertinence
pertinence
3- PINE & GILMORE,The Experience Economy : Work is Theatre and Every Business a Stage, HBS Press Harvard, 1999.
4- COVA, L’expérience de consommation : de la manipulation à la compromission ?,colloque société et
consommation,Rouen, 2004
-12-
guidé et balisé au travers de meubles facilement montables une fois chez soi, l’enseigne
suédoise et son concept de « fun shopping » a su s’imposer mondialement en
devenant leader dans le secteur de l’ameublement en kit. Pour les consommateurs,
il ne s’agit alors plus de « faire ses courses » mais de « vivre des expériences » et le
plus souvent des expériences dites « incorporées » car elles font appel à tous les sens
de l’individu. Contrairement au marketing traditionnel, le consommateur du marketing
dit expérientiel se veut ainsi fortement impliqué dans son processus.4
Vézina5
le définissait d’ailleurs en 4 points :
- Le consommateur n’est pas que consommateur;
- Le consommateur agit à l’intérieur de situations
- Le consommateur est à la recherche de sens
- La consommation ne se limite pas à l’achat.
3- Le marketing émotionnel : les 4E
	 Suite au constat précédent, on s’aperçoit assez vite que les 4P ne sont
effectivement pas les plus adaptés pour répondre aux attentes du consommateur
décrit ci-dessus...En revanche, avec l’alternative présentée par Christopher Graves6
,
le mix marketing revêt une couleur bien plus humaine en engageant notamment
les consommateurs dans une voie plus profonde et multidimensionnelle. Les 4P
deviennent les 4E : (Éxperience, Échange, Engagement et Exclusivité) et ainsi le
marketing devient émotionnel. Dans ce marketing, outre la vision d’un consommateur
non « soumis », c’est principalement son rapport avec les marques qui change. En
effet, ancré dans une démarche émotionnelle, le consommateur veut être proche de
l’écosystème de la marque, accompagné par celle-ci, et vivre une expérience avec
elle. Pour illustrer le marketing émotionnel, DISNEYLAND et ses Disneystores se
pose en référence absolue. Quoi de plus magique que cette plongée dans l’univers
DISNEY permise grâce à des décors travaillés , des couleurs vives, un parfum
propre à la marque au nom « d’Imagination » et une musique gaie et festive...
L’émotion peut donc influencer largement le consommateur. Une étude de 2007
conduite par Jack Morton montrait d’ailleurs que pour 70% d’entre eux, les émotions
comptent pour 50% dans leur décision d’achat.7
5- VEZINA R., « Pour comprendre et analyser l’expérience du consommateur », Gestion, vol. 24, n° 2,1999, p. 59-65
6- GRAVES C, presentation at Ogilvy Verge Singapore, http://fr.slideshare.net/theopenroom/the-4-es-of-marketing-ogilvy-pr, 2008
7- Morton Jack, «experiential marketing study», http://www.jackmorton.com/pdf/EMS_2006.pdf, 2006
-13-
Il importe tout de même de noter que cette vision du marketing ne doit pas être
uniquement l’apanage des grandes marques. Tous les points de ventes et lieux de
consommation peuvent créer un lien émotionnel via une expérience sensorielle
inédite. Pour les enseignes, réfléchir à une réelle atmosphère de magasin contribue
notamment à limiter le showrooming, cette pratique selon laquelle un consommateur
réalise une démarche d’information et de découverte d’un produit sur un lieu de vente
physique avant de le commander en ligne immédiatement (à partir de son smartphone)
ou plus tard auprès d’un autre marchand sur Internet.8
Enfin, il n’en reste pas moins que dans un monde d’urbanisation et de dématérialisation
croissante « nous avons besoin de nouveaux espaces de rencontres et de convivialité »9
B- Le marketing sensoriel, ou comment stimuler les sens pour vendre
1- Définition, objectifs et avantages du marketing sensoriel
	 Popularisé au début des années 2000, le marketing sensoriel est une
composante capitale du marketing de l’expérience, et tout particulièrement de
celle relative au point de vente. En 1992, Bitner soulignait ainsi que l’atmosphère
pouvait non seulement agir sur les individus (clients comme employés) de
manière émotionnelle, mais également à des niveaux cognitifs et physiologiques10
.
Ses résultats de recherches avaient alors été conceptualisés dans un modèle
visible en Annexe I. En clair, dans une atmosphère propice, l’acte d’achat
des clients peut être favorisé grâce à différentes stimulations sensorielles...
La définition généralement admise du marketing sensoriel est celle de Marc Filser,
à savoir « l’ensemble de variables d’actions contrôlées par le producteur et/ou le
distributeur pour créer autour du produit ou du service une atmosphère multi sensorielle
spécifique, soit à travers les caractéristiques du produit lui-même, soit à travers la
communication en sa faveur, soit à travers l’environnement du produit au point de
vente »11
. Ce marketing postule de ce fait que l’on est prêt à passer plus de temps
et à dépenser plus dans un lieu où l’on se sent bien et où l’ambiance générale est
agréable. A l’image de la madeleine de Proust, le marketing sensoriel vise ainsi à
8- http://www.definitions-webmarketing.com/Definition-Showrooming
9- DE ROSNAY J, «Passions sur Internet», in la revue tranversale sciences culture,1996
10- BitnerM.J.,Servicescapes:theimpactofphysicalsurroundingsoncustomersandemployees-JournalofMarketing,56,1992
11-FILSER M, «le marketing sensoriel : la quête de l’intégration théorique et managériale»,in revue française du marketing N°194, 2003
-14-
réveiller les bons souvenirs du consommateur afin de provoquer chez lui une réaction
inconsciente affective et favorable à la consommation. En lui procurant un certain bien
être et en amenant un certain sentiment réconfortant de réalité, la marque espère
surtout fidéliser et créer des liens durables d’attachement et d’engagement.
Enfin, par rapport à la concurrence, le marketing sensoriel peut s’avérer être un fort
moyen de différenciation quand les autres marques misent exclusivement sur une
logique de prix ou d’assortiments de produits inhérente au marketing traditionnel.
2- 5 sens sur lesquels agir
•	 La vue
Prépondérante dans le marketing sensoriel, la vue est le sens le plus sollicité par
l’environnement. Jouer ainsi sur les formes, les couleurs lors de la conception d’un
produit, d’une atmosphère de point de vente ou encore de la publicité représente un
facteur clé de succès depuis longtemps. Dans cette quête de l’esthétique chère à
l’Homme, le marketing visuel vise à rendre attrayant et reconnaissable du premier
coup d’œil des produits ou univers. Ceci est d’autant plus vrai que la concurrence
est importante...
Face à des rayons d’hypermarchés biens fournis par exemple, il convient d’être
reconnaissable rapidement au cours du balayage de l’œil. A ce sujet, la technologie
de l’eye tracking qui consiste à identifier le parcours visuel d’un individu (ordre et
durée de fixation) par rapport à un stimulus visuel et donc à mettre en lumière ce
que l’œil voit ou ne regarde pas illustre bien l’importance du travail notamment
réalisé autour du packaging. La mise en valeur passe souvent par le choix d’une
couleur dominante qui dictera le choix du registre émotionnel (rouge/orange pour la
chaleur, vert/marron pour la nature...) pour un produit comme pour une ambiance
de magasin en général. Les parfumeries et le prêt à porter haut de gamme sont par
exemple souvent dans des tonalités sombres afin de faire ressortir un côté assez
chic et précieux ou encore des teintes acidulées et colorées pour des enseignes
jeunes type Desigual ou Undiz. L’éclairage et la luminosité permettent en addition de
renforcer l’ambiance souhaitée. Outre la couleur et l’éclairage, la façon d’agencer et
de présenter des produits joue aussi beaucoup dans la stimulation visuelle.
-15-
Dans les grandes surfaces là encore, des rayons sont souvent dans la rondeur
afin de favoriser la flânerie et la curiosité alors que des alignements en lignes
droites droits seront plutôt synonymes de vitesse. De même, le fait de jouer sur la
quantité de produits exposés pour un effet recherché d’abondance ou au contraire
de transparence et de dépouillement s’intègre dans une logique de marketing visuel.
De nos jours et avec l’importance de l’image dans notre société, on peut noter que
l’utilisation de la vidéo est devenue une évolution assez courante dans les points
de vente. De plus, les technologies d’écrans plats et de grande taille contribuent à
démultiplier les effets, tout comme les écrans plasma 3D qui gagneront sûrement
en popularité dans les prochaines années. M.Bricolage diffuse par exemple des
démonstrations d’outillage et des spots promotionnels au sein même des rayons.
Avec les nouvelles technologies tactiles, les consommateurs peuvent souvent eux
même dans certaines enseignes choisir le programme à visionner du bout des
doigts...
•	 Le toucher
Sans doute le sens le plus intime, le toucher, car connectant directement deux
entités (le consommateur et le produit ou magasin) est un ressenti majeur dans
le processus d’achat. Comment s’assurer en effet de la bonne qualité d’un
tissu ou encore de la robustesse d’un objet si ce n’est en le touchant ? Mais le
marketing tactile ne se limite pas au simple fait de prendre un produit en main.
Les sources d’expériences tactiles pour le client sont nombreuses. Outre le fait
de manipuler des produits, l’ambiance thermique, le contact avec les éléments
du magasin ou encore les contacts interpersonnels avec les employés (une
main sur l’épaule par exemple) sont autant d’éléments sur lesquels le marketing
tactile intervient. Ce dernier se décompose ainsi en deux types principaux :
- Le toucher instrumental lorsque le but pour le client est d’obtenir des informations
en lien avec le produit manipulé.
- Le toucher autotélique dès lors qu’ il est orienté « plaisir », lui donnant envie de
prolonger son geste. C’est le cas par exemple en touchant un tissu de soi.
Depuis l’avènement du e-commerce, les enseignes ont beaucoup travaillé autour
du marketing tactile afin justement de valoriser leurs points de ventes et produits
-16-
physiques par rapport à l’immatérialité d’internet.
N’est-ce pas plus confortable de marcher sur un tapis rouge moelleux que de
marcher à même le sol ? Séphora l’a bien compris en installant dans ses points de
vente un sol agréable incitant à flâner. L’enseigne offre même la possibilité de tester
du maquillage.
Enfin, l’avènement des tablettes tactiles tout comme la digitalisation croissante
des points de vente semblent avoir contribuer à remettre le toucher au cœur des
sollicitations sensorielles. Les différentes bornes tactiles installées dans certains
magasins font office de véritables conseillers/vendeurs en donnant accès à de
nombreuses informations supplémentaires au sujet de l’enseigne ou d’un produit.
•	 Le goût
Imaginez-vous prendre le RER parisien après une grande journée de travail et voir
débarquer au cours d’un arrêt toute une équipe de serveurs prêts à vous faire déguster
un menu gastronomique au cours de votre voyage...C’est pourtant ce qu’avaient pu
vivre des passagers chanceux du RER grâce à une opération spéciale menée entre
la marque d’eau pétillante BADOIT et le chef étoilé Thierry Marx, jury de l’émission
Top Chef12
. Cette campagne originale de Marketing gustatif illustre bien comment
utiliser le goût pour promouvoir une marque et faire vivre une réelle expérience
à des consommateurs. Naturellement applicable qu’aux produits alimentaires, ce
marketing repose essentiellement sur des actions de dégustations comme celles
menées dans les grandes surfaces avec le fromage ou la charcuterie par exemple.
Il est intéressant de noter que certaines enseignes non alimentaires peuvent parfois
faire à leur manière du marketing gustatif. C’est le cas de certaines stations-services
mettant à disposition des bonbons à leurs caisses pour rendre plus agréable la
transaction.
Enfin, nous pouvons remarquer que d’autres sens peuvent changer le ressenti que
l’on peut avoir du goût. En ouvrant une bouteille de soda sans entendre de « pshitt
» par exemple, l’on peut facilement penser que la fraicheur et le goût ne seront plus
optimaux. De même, plus la couleur d’un produit est intensive, plus l’on va faire
dans notre esprit la corrélation avec l’intensité du goût. Ainsi, Les industriels de
12- «Thierry Marx à bord du Badoit Express !», youtube, septembre 2012
13- NALLET P, Rôle et importance des odeurs dans le comportement de l’homme, Thèse de doctorat, Université de Poitiers.1985
-17-
l’agro alimentaire travaillent ainsi beaucoup le son comme la couleur afin que ces
derniers ne desservent pas les propriétés gustatives des produits.
•	 L’odorat
L’homme serait capable de sentir 10 000 odeurs distinctes13
. Sens incontrôlable
du fait de notre respiration, l’odorat présente ainsi de nombreux intérêts en termes
de marketing notamment du fait du taux de déperdition de la mémoire olfactive
s’élevant à 5% contre 20% pour la mémoire visuelle.14
Et en effet, certaines senteurs
savent réveiller en nous de nombreux souvenirs...Le parfum d’une fille dans la rue
qui peut faire songer à celui de son ex petite amie, une odeur de pâtisserie chaude
qui nous renvoie dans la cuisine de sa grand-mère etc. Il existe ainsi un lien très
intime entre l’odorat et les émotions. De plus, au même titre que les couleurs,
les odeurs sont teintées de nombreuses connotations qui peuvent contribuer à
immerger le client dans de nombreux univers spécifiques ; de l’énergie grâce à
des notes citronnées, des vacances avec de la vanille ou du monoï, du neuf avec
une odeur de cuir sortie d’usine (très utilisé par les revendeurs automobiles)...
Cette particularité s’avère de fait une très grande opportunité pour les enseignes
pour attirer des passants devant une boutique, jouer avec leurs émotions, et in
fine, influencer leur comportement. Air Berger, entreprise leader dans le Marketing
Olfactif accompagne ainsi les points de vente en travaillant sur des signatures
olfactives propres aux marques. Dans le cadre de la coupe du monde de football
en 2008, l’enseigne Boulanger avait ainsi diffusé des senteurs pour vendre des
télévisions. En parcourant le rayon des grands écrans, les clients pouvaient alors
voir des diffusions de matchs de foot et sentir une odeur « d’herbe fraîchement
coupée ». La logique était la même près des machines à laver le linge où une odeur
de « propre » était diffusée. Selon Pascal Charlier, le président de la société Air
Berger15
, on pratiquant du marketing olfactif, la fréquentation d’un rayon peut être
augmentée de 20% et 38% d’achats supplémentaires peuvent être déclenchés.
Sa société qui se positionne comme « créatrice d’ambiances » équipe près de
10 000 points de ventes et a d’ors et déjà crée de nombreuses senteurs aussi
diverses et variées comme « Les pieds dans l’eau », destinée aux enseignes
14- BITAR L, «L’ identité olfactive et la création de parfums sur mesure, Luxe extrême !»,conférence du Rotary Club Beyrouth, 2013
15- MENAGE E, «Consommateurs pris au piège», in Le doc du dimanche, France 5, 13 mai 2012.
-18-
d’articles de plage, « Fraise tagada » pour des enseignes de gourmandises par
exemple...
•	 L’ouïe
Enfin, pour finir cette exploration des sens et leurs usages en marketing, prêtons
l’oreille à présent sur l’un des véhicules de sensations et d’émotions les plus forts
que l’on connaisse : le son.
Sans lui autour d’un produit ou dans un magasin, une impression pesante de vide
apparaîtrait rapidement. Le silence n’est en effet généralement guère propice
aux vertus d’une marque ou d’une campagne de communication. A la fois par sa
faculté à transmettre des informations utiles pour le cerveau (comme l’origine d’un
bruit, son emplacement, mais aussi l’usage et la fonctionnalité d’un produit grâce
à l’identification d’un bruit particulier), et du fait des émotions qu’il transmet, le son
représente un élément phare du marketing. Ainsi avant toutes choses, il convient
de bien distinguer le marketing sonore (ou design sonore) du marketing musical.
- Le premier consiste à travailler la nature des bruits lors du développement d’un
produit afin de les rendre révélateurs de ses qualités et dans le but de générer
chez un consommateur des réactions affectives, conatives ou cognitives visant
essentiellement à créer un acte de ré-achat. Le bruit ronflant d’une Harley-Davidson,
le claquement sourd des portes d’une Audi, le versement d’un café Nespresso sont
autant d’éléments travaillés par des designers sonores afin d’être caractéristiques
de la marque.
- Le marketing musical, quand à lui désigne dans la définition de Laurent Delassus
« l’ensemble des techniques et des stratégies qui utilisent la musique comme outil
d’attribution, d’évocation, de différenciation, de mémorisation et de promotion d’un
produit ou d’une marque ».16
Ambiances musicales de points de vente, synchronisations publicitaires, jingles,
signature sonores...Les domaines d’exploitation de l’ouïe dans le marketing
sont ainsi larges et variés. Sur le lieu de vente, de multiples chaines privées de
programmes musicaux sont apparues (c’est le cas de la fréquence Mousquetaires
16 - DELASSUS.L, La musique au service du marketing, Paris, 2012, Eyrolles,149 pages, p°6
-19-
pour Intermarché) et en addition à une musique visant à plaire au plus grand
nombre, de nombreux spots promotionnels et jingles sont diffusés en permanence.
Tous ces éléments contribuent à doter les enseignes de véritables identités
sonores. Si l’ambiance musicale est ainsi soigneusement étudiée dans les points
de vente, c’est parce que de nombreuses études ont démontré que la musique
pouvait influencer le comportement des consommateurs et cela de manière
inconsciente. Bien que l’on reviendra plus tard plus en détails sur cette partie,
notons tout de même que la perception du temps passé sur le point de vente tout
comme le type d’achats peuvent ainsi être influencés par la diffusion de musiques.
Des tempos rapides peuvent presser le pas des consommateurs quand des
musiques douces sont elles, plus favorables à la flânerie. De la musique classique
peut influencer la nature des achats et les sommes dépensées...
C- Enquête de terrain : Les ambiances de magasins, ressentis et attentes des
consommateurs
1- Méthodologie
Dans l’objectif de mieux connaître les attentes des consommateurs en matière
d’atmosphères de points de vente, et tout particulièrement leur ressenti vis à vis de
la musique utilisée à des fins commerciales, j’ai décidé de rencontrer directement
les consommateurs et de les interroger en face à face au moyen d’un questionnaire.
3 espaces commerciaux différents contenant des enseignes habituées au marketing
sonore comme Orchestra, Nature et Découvertes ou encore Tape à l’œil ont été
choisis. Ces espaces étant les suivants : Odysseum, Polygone de Montpellier et
la galerie marchande de Carrefour Saint-Clément de Rivière. Un panel de 100
individus « à chaud » a alors été interrogé en respectant des quotas en fonction
de leur âge (4 tranches avec autant d’individus) ; les 18 à 29 ans, les 30 à 49 ans,
les 50 à 64 ans et enfin les plus de 65 ans. Enfin, le choix des répondants s’est
effectué de manière non-probabiliste.
-20-
2- Résultats majeurs du questionnaire *
*L’intégralité des résultat est à retrouver en Annexe 2.
Age : de 18 à 29 ans  de 30 à 49 ans  de 50 à 64 ans  65 ans et plus
Genre : M  	 F			
1-) Quel(s) mode(s) de distribution privilégiez-vous lors de vos achats ?
(2 réponses possibles)
Site internet  Magasin  Vente par correspondance  Vente à domicile 	
Les magasins restent encore le mode de distribution préféré des consommateurs à
hauteur de (94%)
L’utilisation d’Internet pour acheter n’est néanmoins pas écarté totalement (28%)
2-) Parmi les critères suivants, auxquels êtes-vous le plus sensible dans un point de
vente ? (2 réponses possibles)
Luminosité  Senteurs  Couleurs  Musique  Écrans numériques 
Packaging des produits  Publicité  Annonces sonores 
De manière générale, les consommateurs sont presque autant sensibles à la
luminosité des points de vente (42%) qu’à la musique qui y est diffusée (43%)
Les senteurs arrivent en 3ème position avec un taux de (21%).
Il est intéressant de constater qu’autant les Hommes que les Femmes sont sensibles
à la musique et à la luminosité en premier lieu.
Les individus de moins de 30 ans semblent en revanche être les plus sensibles
à la musique (56%) quand à l’inverse, les individus de 65 ans et plus déclarent
prêter d’avantage attention à la luminosité (61%). Cette dernière sensibilité restant
globalement très importante pour les consommateurs.
3-) Selon vous, diriez-vous que l’atmosphère générale du lieu de vente (musique,
couleurs, lumière, odeurs, etc...) exerce une influence sur les comportements d’achat ?
Absolument  Plutôt oui  Pas vraiment  Pas du tout 
51% des interrogés pensent que « Plutôt oui », l’atmosphère générale d’un lieu de
vente a une influence sur les comportements d’achat, et particulièrement chez les
30-49 ans (59.3%.)
Ce constat est plus fort encore chez les femmes (56% « plutôt oui » et 24% «
Absolument » contre 46% pour les hommes « Plutôt oui » et 16% « Absolument ».)
Les plus de 65 ans sont plus réservés et ne sont que 43.5% à penser « plutôt oui ».
39.1% pensent que cela n’influence « Pas vraiment » leurs comportements d’achat.
-21-
4-) Selon vous, pensez-vous que la musique peut jouer un rôle dans votre processus
d’achat ?
Absolument  Plutôt oui  Pas vraiment  Pas du tout 
Avec 35% de répondants « Plutôt oui » à la question, suivi de près par 27% de «
Pas vraiment » et 21% de «Pas du tout », il est clair que la plupart des individus ne
réalise pas vraiment l’influence que la musique peut avoir sur eux en magasin. Ainsi
seulement, 14% des interrogés pensent assurément que la musique peut jouer un
rôle dans le processus d’achat.
5-)Sur une échelle de 1 à 5, où 1 représente une notion d’agacement et 5 représente
un véritable plaisir, Quel score attribuez-vous à la musique diffusée de manière
générale en point de vente :
				 1	2	3	4	5
53% des interrogés sont neutres à l’égard de la musique diffusée sur les points de
vente en attribuant la note de 3. Autant de personnes lui attribuent une note de 2
qu’une note de 4 (19% dans les deux cas)
6-) Si vous en avez, quelle(s) reproche(s) pourriez-vous faire de manière
générale à la musique des points de vente ? Sinon, passez à la question 7
(2 réponses possibles) :
Volume trop élevé  Tempo trop rapide  Tempo trop lent 	
Programmation inadaptée à l’enseigne  Musique trop standardisée 		
Autre...
La plus grande reproche faite à la musique des points de vente est son volume
sonore considérée par 53% d’interrogés trop élevée.
De nombreuses critiques sont également émises à l’égard des playlists des points
de vente jugées trop standardisées pour 37% des réponses.
7-) Êtes-vous favorable à la diffusion de musique sur le site internet des enseignes ? 	
Oui  Non 
Avec 70% de réponses négatives, les individus interrogés sont clairement
défavorables à la diffusion de musique imposée sur le site internet des enseignes.
8-) De plus en plus de chanteurs s’associent aux marques dans la publicité, en avez-
vous une image positive ?
Absolument  Plutôt oui  Pas vraiment  Pas du tout 
Avec seulement 16% d’avis positifs sur les associations de ce type, les opérations de
-22-
co branding et d’endorsement ne sont pas réellement appréciés par les interrogés.
Dans l’opinion collective, les «artistes gagnent déjà suffisamment d’argent comme
cela» ou «chacun doit rester à sa place».
9-) Pourriez-vous me citer des points de vente français qui vous semblent en avance
ou originaux en termes d’ambiance sonore ?
Du fait du très faible nombre de réponses à cette question, on peut en déduire que
globalement les consommateurs n’ont pas vraiment à l’esprit d’enseignes soignant
leur marketing sensoriel. Néanmoins si l’on s’intéresse aux répondants, nous notons
en enseignes cités à plusieurs reprises : Natures et découvertes (6 fois), Majestic (3
fois) Bershka, General et Ikéa (2 fois).
D’autres enseignes ont étés cités une fois c’est le cas de Desigual, Carrefour,
E.Leclerc, Galeries Lafayette, Cultura, Sandro.
10-) Pour vous, une sortie shopping réussie c’est quand :
Vous avez passé un agréable moment sans forcément dépenser	
Vous avez fait de bonnes affaires 
68% privilégient tout de même lors de leurs sorties shopping le plaisir procuré
sans forcément dépenser. Ce résultat montre bien l’importance de travailler les
atmosphères de magasin.
3- Bilan
Au vue des résultats de cette enquête terrain, quelques conclusions me semblent
importantes à souligner :
- Bien que près d’un interrogé sur deux pense que l’ambiance d’un magasin a une
influence sur le comportement d’achat, quand on établit un focus sur la musique,
les consommateurs s’avèrent être étonnement moins convaincus de l’efficacité de
celle-ci.
- Il n’en reste pas moins que la musique est un facteur d’ambiance apprécié par les
consommateurs dans les magasins dès lors que son volume est correctement réglé
sous peine d’agacer les clients.
- Des programmations jugées trop standardisées d’où la nécessité pour les enseignes
de mieux réfléchir à leur couleur musicale.
- Des pratiques de marketing sensoriels trop peu évidentes dans l’esprit des
consommateurs qui ne parviennent pas à citer spontanément des enseignes faisant
des efforts en la matière.
-23-
II- La musique, «langue des émotions», une sollicitation sensorielle clé
A- Un élément immatériel dont on ne peut se passer
1- Au cœur de l’activité de l’Homme
	 Associés, le rythme et les notes forment les fondations de la musique définie
par Rousseau comme étant « l’art de combiner les sons d’une manière agréable à
l’oreille ». Le son fait partie intégrante de la vie humaine dès la naissance. En
effet, les premiers rythmes du battement du coeur suivis par les notes criées
de notre première respiration marquent d’une certaine manière le début de la
bande son de notre vie...
Une étude de 2007 a montré que la musique est le média dont les individus sont
le moins disposés à vivre sans (devant la télé et l’internet)1
. La musique est un
élément assez personnel car intimement connectée à nos émotions. Ne ressentons-
nous pas des frissons lorsque une musique nous fait vibrer ou encore n’écoutons
pas, dans un besoin de relaxation, une musique assez calme le soir en rentrant du
travail ? Ainsi la musique est en premier lieu un important régulateur d’émotions.
Elle accompagne de nombreux individus au quotidien et rythme les journées en
fonction de l’humeur ou même dans l’accomplissement de certaines tâches. De
la musique entraînante pour l’entraînement sportif ou au contraire de la musique
classique pour la concentration de certaines personnes, nous sommes tous un peu,
pour paraphraser Laurent Delassus, notre propre Dj ! 2
Des applications comme
Moodagent ou Walkman existent même pour proposer à l’auditeur une sélection de
chansons en fonction de l’humeur ou de l’émotion du moment suivant de nombreuses
caractéristiques des morceaux (timbre, tempo, style...).
Un second point fort de la musique est sa capacité à révéler la personnalité d’une
personne et par extension, son identité. Souvent le style de musique écouté est
synonyme de style vestimentaire. De ce fait, nos préférences et goûts musicaux
communiquent aux autres nos valeurs et il est bien connu par exemple que les
1 - WILLIAMS.J, Millward Brown Brandamp Study, 2007,
2 - DELASSUS.L, La musique au service du marketing, Paris, 2012, Eyrolles,149 pages, p°7
-24-
afficionados de Hip-Hop aiment s’habiller en streetwear ou encore que les fans
de Métal apprécient les vêtements sombres de style gothique. Or, que veulent
les marques aujourd’hui si ce n’est parler et raconter qui elles sont ? Ainsi le style
musical d’une campagne publicitaire peut être un élément déterminant des valeurs
de l’annonceur. Il convient toutefois de ne pas oublier aujourd’hui que la manière de
se procurer de la musique et le lieu d’écoute importent beaucoup dans la distinction
de profils distinctifs. Avec l’étude Baromusic3
lancée sous l’initiative d’Havas Sport
 Entertainment et du CSA, le rapport des Français à la musique a ainsi permis de
faire ressortir cinq grandes typologies ;
•	 Les « Full Shuffle », cible majoritairement âgée de moins de 35 ans et qui incarne
à elle seule l’évolution de la consommation musicale. Les 8 millions de Français
qui composent cette catégorie sont friands de diversité et d’aléatoire (22 genres
différents écoutés en moyenne). Ils se procurent la musique via tous les moyens
possibles qu’ils soient digitaux ou physiques.
•	 Les «Tontons Rockeurs» (9.3 millions de Français), ces individus qui ont pratiqué
la musique ou la pratiquent encore et qui sont âgés de plus de 35 ans. Ils sont
notamment habitués aux nouvelles technologie et savent écouter de la musique
en streaming.
•	 Les « Groupies », catégorie plutôt féminine et âgée de moins de 40 ans qui
voue souvent aux chanteurs un grand culte et qui échangent beaucoup sur les
réseaux sociaux au sujet de leur passion musicale (10,7 millions de Français).
•	 Les «Nostalgiques» (12.7 millions de Français) ayant plus de 50 ans et qui
écoutent des styles très précis tels que le jazz ou la musique classique. Ils ont
pour habitude d’écouter la radio ou bien des chansons issues de chaînes HI-Fi
•	 Les «Mute» ou les personnes qui ne sont pas intéressés par la musique et
l’écoutent généralement de façon assez passive (10.2 millions).
Chaque individu a donc un rapport particulier avec la musique et appartient à un
certain « socio style musical ». Tout l’intérêt pour les marques réside donc dans la
compréhension de ces communautés afin de mieux toucher leurs cibles.
2- Le langage commun des «digital natives»
3- Havas Sports  Entertainement, « Baromusic : Quel music addict êtes-vous ? », juin 2013
4- SAP. A, Du Rock  des Marques, Maximal, Paris, 2013, 173 pages, Préface
-25-
5- WILLIAMS.J, Millward Brown Brandamp Study, 2007,
6- LE GOFF. D « Cultures en ligne » in Stratégies n°1700, 22 novembre 2012, p°12
7- SAP. A, Du Rock  des Marques, Maximal, Paris, 2013, 173 pages, Préface
Les marques ne visent-elles pas dans l’absolu à fédérer un maximum de personnes
autours de leurs valeurs ? Justement, il se trouve que la musique est l’activité qui
peut rassembler avec le sport plusieurs milliers d’individus à un même endroit. Dans
la préface de l’ouvrage Du Rock  des Marques4
d’Alexandre Sap, Jacques Séguéla
disait d’ailleurs : « La musique est notre esperanto, la seule langue universelle qui
ne nécessite ni traduction ni explication. Ce fil rouge qui unit l’âme des peuples du
monde et traverse les générations ». Mais c’est tout particulièrement les jeunes
générations qui sont touchées par la musique aujourd’hui à l’heure du digital. En
effet, 80% des 16-24 ans écoutent tous les jours de la musique et 41% d’entre eux
l’écoutent entre 1 et 2 heures quotidiennement.5
Les «digital natives» (que l’on peut
traduire par « nés avec Internet ») sont ainsi des cibles particulièrement friantes
de contenu musical et culturel en général. 87% des jeunes utilisent le Web pour
du contenu culturel et à 94%, la musique est le bien culturel le plus prisé.6
Grâce à
de nombreuses plates-formes de vidéos, streaming musical et de téléchargements
MP3, le son coule dans les veines des jeunes que l’on dit « nés avec des écouteurs
». Plus que quiconque, les jeunes incarnent pour les annonceurs l’avenir d’un
marketing musical ayant compris l’engagement social autour de la musique.
Pour illustration, la manière de vivre un concert qui a fortement évolué au cours des
dernières années. A ce sujet, Alexandre Sap décrit parfaitement la situation : « Les
téléphones portables ont remplacé les briquets dans les salles de concert. Le public
est un ensemble de friends sur Facebook qui publient, like et partagent ce moment
d’émotion »7
Enfin, rappelons nous que dans notre enquête terrain précédemment analysée, les
individus interrogés de moins de 30 ans étaient les plus sensibles à la musique
(56%), ce qui confirme bien l’importance que va devoir revêtir le marketing musical
dans quelques années vis à vis de ces populations.
3- Les effets spécifiques de la musique
La musique est un véritable outil de communication. L’on peut en effet distinguer 3
fonctions ou effets principaux.
-26-
•	 Un effet affectif premièrement : elle nous touche, nous agace, réveille des souvenirs
en nous car agit sur nos sens, notre émotionnel. En effet la musique ne laisse pas
indifférent et le fait parfois d’avoir des frissons en est une manifestation évidente.
Des études scientifiques en neurologie ont d’ailleurs démontré que la musique
aurait principalement des effets sur la sécrétion de la dopamine, l’hormone du plaisir.
Ainsi écouter de la musique peut provoquer d’un point de vue hormonal autant de
plaisir que le sexe ou le chocolat pour certains ! Par ailleurs des expériences
montrent aussi qu’il existe une vraie dépendance à la musique, analogue à celle
de la drogue et déclenchant les mêmes effets biologiques relatifs au «manque».8
•	 Un effet cognitif, ensuite. Parce qu’elle véhicule un message et renvoie à tout un
système d’informations comme on l’a vu, la musique remplit une certaine fonction
didactique. Cela s’illustre tout particulièrement avec le « parler bébé », ce langage
qu’adopte une mère vis à vis de son bébé et qui se caractérise par des exagérations
mélodiques permettant à l’enfant, à défaut de comprendre les mots, de saisir les
intentions de sa maman. Des phrases à tonalités montantes vont amener une forme
d’enthousiasme et les descendantes une forme de consolation. Autre exemple,
celui de l’apprentissage à l’école de l’alphabet en chansons afin de mieux retenir
ses lettres. Il suffit d’écouter de la musique pour apprendre. Barbara Tillman voit
d’ailleurs en la musique un langage universel que l’on «acquiert de façon tout aussi
spontanée que l’on apprend à parler».9
•	 Enfin, un effet conatif. Et c’est cette facette de la musique qui nous intéressera tout
particulièrement en termes de marketing. L’exemple de l’effet nommé «Château
Lafitte»esttrèsparlant.Ils’agitdeserendrechezuncavisteavecl’intentiond’acheter
un vin de pays pour finalement ressortir avec un grand cru tel qu’un «Château
Lafitte», la musique y étant alors fortement pour quelque chose. En effet, à l’écoute
du Mozart diffusé, le consommateur par associations (raffinement, qualité, culture)
se dirige vers les grands vins. Une étude de 1998 menée par Adrian North, David
Hargreaves et Jennifer McKendrick de l’Université de Leicester en Angleterre a
en outre montré que l’origine de la musique d’ambiance influait dans les décisions
d’achat 10
. Chez un caviste anglais, en alternant pendant plusieurs jours entre une
8- Apposcience, http://apposcience.blogspot.fr/2012/02/dopamine-et-musique.html, 2012
9- TILLMAN. B, La musique, un langage universel ?, In ″Pour la science″, novembre 2008, n° 373,159 p, pp. 124-131.
10- NORTH, « Music and on-hold waiting time ». The British Journal of Psychology 90, Automne 1999.
-27-
musique typée française et une typée allemande, on a constaté que le vin français
s’était mieux vendu les jours de musique française que le vin allemand (rapport
de 5 à 1) et le vin allemand se vendait mieux les jours de musique allemande que le
vin français (rapport de 2 à 1).Pour conclure ce point, il me semble intéressant de
relater un autre fait assez étonnant mis en lumière par North et son équipe. Dans
une ferme sonorisée avec diffusion de musiques douces (style Beethoven), des
vaches ont produit 0.73L de lait chacune en plus alors qu’au contraire, la diffusion
de morceaux de variété au tempo plus rapide les avaient rendus moins productives.
Cette expérience insolite menée sur des vaches prouve toutefois bien la nécessité
de travailler l’atmosphère afin de favoriser le bien-être.
La musique communique donc à trois niveaux : l’intellect (esprit), l’affect (l’émotion)
et le sensationnel (sens et goût). En cela, elle est donc un facteur déterminant de
l’argumentation publicitaire.
B- La Musique et les Marques
1- Histoire de la musique dans la Communication
Dans une précédente partie, on a vu que la musique était au coeur de l’activité
de l’Homme. À présent nous allons tenter d’établir une petite rétrospective de son
utilisation a des fins stratégiques avant qu’elle ne trouve les chemins de la publicité.
L’histoire de l’utilisation de la musique par l’Homme va ainsi de pair avec l’histoire
de la Communication.
En effet, la musique a toujours été une forme d’interaction majeure entre les
Hommes. Autour de feux, elle se manifestait sous la forme de percussions durant
les cérémonies et fêtes des premiers Hommes. Plus tard, la musique était utilisée
dans le monde de la religion à travers les louanges chantées par les fidèles et
également dans le milieu sportif avec les chants de supporters. La musique est
aussi très importante dans l’armée pour stimuler les soldats et les fédérer. À ce
sujet, il est intéressant de noter qu’elle peut être utilisée à des fins nettement moins
saines, en tant qu’instrument de torture, voire même en tant qu’arme de guerre.
11- CHYTROSCHEK Tristan, «La musique comme instrument de torture», in ARTE, 2010
-28-
Par exemple, afin d’affaiblir l’ennemi Irakien, les américains diffusaient toute la
journée des morceaux de Heavy métal durant la bataille de Falloujah et contrôlaient
ainsi l’environnement. A Guantanamo, le même style de musique à un volume
excessif torturait les détenus et les rendait dans un état quasi végétatif...11
Dans
l’antiquité déjà, Platon avait conscience du pouvoir de la musique et disait « Si tu
veux contrôler un peuple, contrôle d’abord sa musique ». C’est dire si la musique
est un puissant média et la politique l’a bien compris avec l’apparition des hymnes
nationaux et chansons de propagande. Mais les prémices du marketing musical sont
apparus dans les années 1930 en Amérique au même moment où les Hommes ont
commencé à construire des gratte-ciels et travaillé l’ambiance des ascenseurs, des
supermarchés et autres galeries commerciales. Ce concept de musique d’ambiance
spécialement dédié à sonoriser les lieux publics se nomme Musak (appelé parfois
« musique d’ascenseur »), du nom de la compagnie américaine diffusant ces
programmations musicales visant à stimuler psychologiquement les auditeurs.
Mais ce n’est qu’avec l’apparition de la radio que les liens entre publicité et musique
se sont développés considérablement. Les régies radiophoniques alors chargées
durant l’entre deux guerres de diffuser des messages commerciaux, proposaient
parfois des supports musicaux aux annonces afin de limiter l’ennui. Charles Trénet a
notamment été compositeur de nombreuses chansons publicitaires pour le compte
de Marcel Bleustein-Blanchet (fondateur de PUBLICIS) et propriétaire en ce temps
de la régie de Radio-Cité.
C’est à partir des années 1970, que des maisons de productions se spécialisent
sur la réalisation publicitaire sonore et audiovisuelle suite à l’autorisation de la
diffusion de publicité de marque à la télévision française (1968).11
De nombreux
compositeurs comme Richard Gotainer, dont le travail de production musicale
pour la publicité est assez largement reconnu (Saupiquet, Vittel, Banga ou
le très célèbre thème de Belle des Champs), Michel Berger (orangina) ou
encore Serge Gainsbourg (Gini, Pentex) ont ainsi à la demande des maisons
de productions contribué à construire la liaison entre la musique et la publicité.
En 1981, MTV, la première chaîne dédiée à la musique marque la naissance des
vidéo-clips musicaux révolutionnant ainsi la Pop-music. Quelques années plus tard,
Michael Jackson changera les paroles de son tube « thriller » pour le compte de
12- MAGIS.C, http://www.inaglobal.fr/musique/article/musique-et-publicite-les-enjeux-de-la-synchronisation, jan 2014
-29-
Pepsi et incarnera la première association évidente de l’industrie du disque et de la
publicité.
2 - Les formes de communication musicale de la marque
•	 La synchronisation
La synchronisation est le fait de placer de la musique sur certaines images afin de
les habiller et rendre le message plus signifiant. Ainsi, on distingue la musique de
commande (spécialement composée pour le spot) de la musique d’illustration
(souvent instrumentale et composée de manière générique selon certains thèmes)
et enfin de la musique issue d’un répertoire préexistant comme ce fut le cas avec
le titre « A New soul » de la chanteuse Yael Naim illustrant les spots publicitaires
d’ Apple . Le superviseur musical chargé d’assurer ce mariage a ainsi différentes
possibilités qui s’offrent à lui en fonction du brief et du budget de l’annonceur. Notons
que souvent, l’interrogation pour les marques consiste au choix d’une musique
connue ou au contraire inconnue. Dès qu’elles le peuvent, les marques optent
pour la première solution qui apportera à leur image une valeur ajoutée bien plus
importante qu’une musique originale mais dans tous les cas, il convient pour elles ou
le superviseur musical de réfléchir à la tranche d’âge visée, la couleur musicale du
produit, à l’univers de l’artiste etc. Pourtant force est de constater que le son est très
souvent choisi en phase finale d’un projet de communication sans réelle stratégie
et réflexion derrière. Ce qui explique peut être que de nombreuses bandes sons
se ressemblent du fait de briefs semblables et stéréotypés de la part des marques.
Charles-Henri de Pierrefeu du département Synchronisation Universal music
déplore ainsi le manque d’audace de la part des annonceurs qui se réfugient dans
des sonorités Pop-Rock et Folk, sonorités qui à son sens ne laissent pas vraiment
de « traces », « de reconnaissance » et s’avèrent facilement interchangeables
d’une marque à l’autre.13
Pour en revenir à l’importance accordée à la notoriété
d’un artiste ou d’une oeuvre, élément déterminant du prix, il est intéressant de faire
remarquer que de nos jours les artistes sont beaucoup plus enclins à accepter la
publicité pour toucher leur public. Cela s’explique facilement par les difficultés de
13- GUILLOIS Mickaël, « Musique et publicité. La synchro en question(s) », Dailymotion, 2009
14- MAGIS.C, http://www.inaglobal.fr/musique/article/musique-et-publicite-les-enjeux-de-la-synchronisation, jan 2014
-30-
l’industrie du disque mais également par les programmations trop standardisées
des radios. L’artiste Moby avait ainsi assuré l’exposition de son album Play et de
ses 18 titres en 1999 exclusivement grâce à la synchronisation sur des supports
audiovisuels (publicité, films, séries TV).14
Aujourd’hui, en permettant aux auditeurs
de tagger une musique lors d’un passage pub, l’application Shazam rend l’expérience
consommateur vis à vis de la bande sonore encore plus immersive notamment par
le biais des réseaux sociaux. Ainsi, un spot peut jouir de la force de l’identification
audio grâce à un hit qu’il aura su s’attribuer et peut même prolonger l’expérience en
proposant des interactions en direct avec les spectateurs (voir des scènes inédites,
remporter des cadeaux flash, participer à des jeux concours...). Sfr avait ainsi lancé
avec Shazam et l’artiste « Maï Lan » une campagne interactive où en taggant la
musique du spot, les utilisateurs basculaient via leur mobile dans le concert live de
l’artiste en direct du studio SFR à Paris.15
Shazam s’avère ainsi un formidable moyen
pour valoriser les synchronisations mises en place.
•	 Le logo musical ou jingle et le slogan musical
Le jingle prend la forme d’une mélodie d’une durée maximale de dix secondes.
Il est la signature d’une marque et joue le même rôle que le logo visuel, il
vise à ce que la marque soit automatiquement reconnue puis mémorisée.
D’ailleurs, les logos visuel et sonore sont souvent exposés ensemble à la fin d’un
spot publicitaire. Plus encore, une signature sonore doit être porteuse de valeurs.
Parmi les plus connus citons celui de McDonald’s, de la SNCF, Samsung,
La Poste, EDF, Renault etc. Pour arriver à un niveau de reconnaissance de la
marque à travers son jingle, il faut néanmoins des mois voire des années de
répétition publicitaire. Pour accélérer le processus, une entreprise britannique
de télécommunication du nom de Batelco a ainsi eu l’idée de demander à des
musiciens d’arranger sa signature en version longue Hip-Hop, House, Rock et
a par la suite envoyé un CD contenant ces différentes versions à de nombreux
DJ de discothèques. Sans le savoir, de nombreuses personnes ont ainsi dansé
sur la signature sonore de Batelco qui a même mis plus tard en téléchargement
15- DE BULLE. V, « De la synchro à shazam » , in http://aperipub.fr/, oct 2012
16- « L’évènement, L’identité sonore des marques », in Culture Pub, mai 2011
17- VOIX OFFONLINE, « Les frères Costa jingle chantés », www.youtube.com/watch?v=hnYTGIG5eYQ, juillet 2012
-31-
gratuit l’ensemble du CD apprécié par les cibles.16
L’adaptation musicale du
logo sonore est ainsi un moyen efficace de se faire connaître auprès des cibles.
Les jingles peuvent également être chantés et c’est généralement le cas dans la
radio où de nombreuses stations disposent de leur propre signature, révélatrice de
leur programmation tels que NRJ, Chérie FM, Nostalgie, jingles d’ailleurs tous trois
composés par les frères Costa.17
Le slogan musical est quant à lui la mise en musique du slogan textuel. Il remplit les
mêmes objectifs que le jingle en termes de mémorisation et de reconnaissance. Le «
zéro tracas, zéro bla bla, MMA ! », « Playmobil, en avant les histoires ! » ou encore
« Malin comme Maped ! » sont autant d’exemples célèbres. Le slogan musical peut
ainsi être adapté composé spécifiquement pour la marque ou adapté de chansons
connues ( La vache qui rit reprend « 100% VIP » de Philippe Katerine entre autres).
•	 L’endorsement ou co-branding
Le mot endorsement provient du verbe anglais to endorse signifiant « appuyer », «
approuver ». L’endorsement est l’une des pratiques de sponsoring les plus courantes
dans le domaine de la musique et comme on l’a vu avec l’opération entre Michael
Jackson et Pepsi, ce type d’alliance ne date pas d’aujourd’hui.
Récemment, David Guetta a prêté son image et son morceau «The alphabeat »
pour le compte de la Renault Twizy. Cette opération avait ainsi vocation à donner
une image jeune, branchée et dynamique pour Renault et sa nouvelle voiture. La
collaboration ne s’est pas limité à une seule participation dans un spot télévisé car
dans le clip de Ludacris « Rest on my Life » avec Usher et David Guetta, ce dernier
a mis en mouvement la Twizy. Un autre cas réussi reste sans doute le choix de
David Bowie en tant qu’égérie pour la marque Louis Vuitton. Surfant sur le coup de
communication provoqué par la sortie inattendue du nouvel album de Bowie (en
janvier 2013), la marque, pour le nouveau volet de sa campagne « Invitation au
voyage » a choisi la star pour interpréter son titre «I’d rather be high» au clavecin,
dans une vidéo mettant en scène des personnages masqués évoluant dans un
bal vénitien. Les résultats ont été à la hauteur : 13 millions de vues sur Youtube
et 17% de croissance des produits exposés 10 jours après son lancement.18
18- LENGRAND Vanessa, « La relation Marques - Musique », in http://musicspottin.com/2014/01/07/bilan-2013-sil-ne-
fallait-en-retenir-quun-seul/ janv 2014
-32-
Si le principe n’est pas nouveau, il s’est tout de même grandement développé
ces dernières années suite aux difficultés et au renouveau de l’industrie musicale.
Rappelons toutes fois que notre panel interrogé dans le cadre de l’enquête terrain
n’était pas des plus favorables à ce genre d’associations Marques-Artistes.
•	 L’ambiance musicale
Relative au marketing sensoriel, l’ambiance musicale est généralement une sélection
de titres retenues pour véhiculer une atmosphère, des émotions, de l’affect. Il y a de
nombreux endroits chics parisiens qui utilisent ce que l’on appelle du « Lounge
» et certaines ambiances de lieux peuvent même devenir cultes et se retrouvées
compilées dans des CD premium (Cafe Del Mar avec plus de 9 milions d’albums
vendus, Hôtel Costes, le Buddha Bar, le Kong). Cet engouement exceptionnel
se fonde sur la notoriété des lieux concernés. Par ailleurs, certaines enseignes
n’hésitent également pas à avoir leur DJ maison , ambassadeur de l’esprit du lieu et
mixant exclusivement pour elles.
3- La construction d’une identité sonore cohérente
Un annonceur dispose ainsi de différentes manières d’utiliser la musique au sein de sa
communication. Pour plus d’efficacité et afin de favoriser au mieux la reconnaissance
et le positionnement de la marque, il convient néanmoins aux annonceurs de
réfléchir à leur couleur sonore et ainsi adopter une « ligne musicale » pertinente
et cohérente dans laquelle les cibles pourront se retrouver. En effet, 80% des
marques sont schizophrènes19
et d’un support à l’autre, le style musical peut varier....
Les plates-formes sur lesquelles les marques peuvent utiliser la musique sont les
suivantes :
- Les spots télévisés
- Les spots radio
- La musique sur les pages internet
- L’attente téléphonique
- Le logo sonore
19 - MORVAN. XV, « L’identité sonore peine à se faire entendre » in Stratégies n°1752, jan 2014, p°34
-33-
- Les opérations de parrainage avec des artistes (endorsement, co-branding)
- Les événements musicaux (festivals, concerts...)
- Les produits musicaux tels que les CD, compilations, sonneries de portables...)
- La musique dans les espaces physiques de la marque (magasins, bureaux,
accueils...)
Musicalement parlant, une marque dispose donc de multiples points de contact
pour communiquer avec sa cible. Mais qu’est ce que l’identité sonore au juste ?
Terme inventé il y’a une vingtaine d’années par Michaël Boumendil, fondateur de
l’agence Sixième son (leader mondial de la discipline), l’identité sonore ou musicale
(selon qu’il y ait de la musique ou simplement des sonorités non mélodiques) est
une composante du territoire de marque et s’intègre dans l’identité de celle-ci.
L’identité sonore c’est donc l’ensemble des éléments sonores qui vont permettre
à une marque de communiquer avec du sens et de promouvoir son offre de
manière plus impactante. Elle est aussi un certain parti pris créatif et donc
le style d’une marque. Ainsi, comme a pu le dire Nicolas Duperon, fondateur
associé de Sixième son, « Un jingle, une signature sonore est incontournable
pour une marque mais pas suffisante pour créer une identité sonore ».
Le processus de création d’une identité musicale doit être basé sur l’ADN de la
marque à travers ses attributs physiques, fonctionnels et symboliques mais aussi en
fonction des attentes du public et des usages et codes du secteur. C’est en amont de
la stratégie que doit être associée à l’identité visuelle une musique ou une sonorité qui
renforcera la personnalité de la marque. Pour cela, tous les éléments constitutifs de
la marque ainsi que ses dimensions doivent faire l’objet d’une réflexion approfondie
en tenant compte des connotations renvoyées par l’utilisation d’une certaine hauteur,
d’un certain timbre musical, d’un certain arrangement, d’un certain style musical etc.
Au niveau du timbre des morceaux par exemple, certains instruments comme le
violon véhiculeront des valeurs de type « aérien », « calme », «majestueux » quand
le piano lui sera davantage perçu comme « zen », « select »...
La musique permet ainsi d’illustrer des valeurs de marque et de soutenir les autres
éléments de communication. Elle permet aussi pour le consommateur de favoriser
la reconnaissance d’une identité de marque bien précise que ce soit dans un spot
publicitaire voire même sur un point de vente.
20 - DELASSUS.L, La musique au service du marketing, Paris, 2012, Eyrolles,149 pages, p°83
-34-
Alexandre Delassus,sous la forme d’un tableau, présente les différentes évocations
possibles de principales caractéristiques musicales : 20
Caractéristiques Évocations
Dimension temporelle
Rythme
Régulier, sans syncopes
Régularité, stabilité,
continuité, sécurité, confort
Irrégulier, syncopé
Dynamisme, mouvement,
démarcation
Phrasé
legato Fluidité, espace, expressivité
Staccato
Dynamisme, mouvement,
réactivité
Tempo
Lent Solenité, calme, confort
Rapide
Dynamisme, mouvement,
réactivité
Durée
Courte (5-10 sec.) Efficacité, simplicité
Longue (10 sec.) Complexité, richesse
Dimension harmonique
Mode
Majeur Positivité, optimisme
Mineur Solennité
Accords
Pauvres Simplicité
Riches : enrichis majeurs
altérés mineurs
Envergure
Direction mélodique
Ascendante
Dynamisme, positivité, am-
bition, progression, conquête
Descendante Tradition, ancrage
Mélodie
Présente Féminité
Absente Masculinité
Dimension Instrumentale
Voix chantée
Masculine Masculinité, séduction
Féminine Féminité, sensualité
Sans paroles Légèreté
Avec texte
Le sens est crée par les pa-
roles
Instrumentation
Instrumentation Technicité, modernité
Synthétique
Naturel, chaleur, authenticité,
humanité
Arrangement
Minimaliste Technicité, modernité
Complexe Sophistication
-35-
Caractéristiques Évocations
Dimension temporelle
Timbre + interpréta-
tion
Humanité
4- Une identité sonore réussie : le cas SNCF
Une succession de 4 notes reconnaissable d’entre mille caractérise l’identité sonore
de la SNCF. En 2005, le transporteur ferroviaire suite à un nouveau positionnement
décide de se doter d’une véritable couleur sonore et fait appel aux services de
l’agence Sixième son . Si le résultat aujourd’hui reste encore très efficace et pertinent,
c’est sans doute car la réflexion sur la couleur musicale est intervenue en même
temps que celle qui a conduit à une nouvelle identité graphique et plus largement
à une redéfinition du territoire de marque. L’agence TBWA pour la stratégie de
communication, Carré Noir pour le design graphique et « Sixième son » ont ainsi
travaillé ensemble sur ce projet pour donner à la SNCF une nouvelle identité et lui
permettre de se positionner clairement sur son marché.
L’identité sonore de la SNCF lancé en mars 2005 affiche en effet une volonté
claire de se distinguer des autres acteurs du transport en engageant la marque
dans une univers plus riche, plus émotionnel. C’est un nouveau vocabulaire
avec de nouveaux codes qui est alors inventé afin de provoquer une rupture
profonde. L’idée étant d’adoucir au mieux cet univers assez brut, ces gares au
bruit métallique permanent qui se mélange au brouhaha des foules de voyageurs.
Avec les 4 notes imaginées par l’équipe de Michaël Boumendil, la SNCF gagne « en
perception de service et en humanité »* pour reprendre les mots de la directrice de la
marque et du design, Laurence Béhar. Le sens donné au transporteur se veut rempli
de présence humaine, de bienveillance, de chaleur, de mouvement et de voyage.
Notions bien évidemment favorables dans les guichets de vente de billets...
Mais la SNCF ne s’est pas arrêtée à la simple conception d’un jingle sonore.
Les 4 notes ont également été déclinées et adaptées à la télévision, à la radio
en téléphonie et dans l’événementiel pour mieux être ancrées dans l’esprit des
voyageurs comme des non voyageurs. Aujourd’hui tout le monde est capable de
* BOUMENDIL..M, « La création de l’identité sonore de la SNCF racontée par son agence », in Marketing professionnel.fr, mai 2009
-36-
chantonner ces notes. En octobre 2010, Sixième Son s’est vu décerner le « Grand
Prix Stratégies du Design » pour le programme d’identité sonore de la SNCF.
Récemment, la compagnie est allée plus loin encore dans la démarche
d’utilisation de musique en demandant aux utilisateurs des lignes A, J et L
du Transilien de choisir et voter pour l’ambiance sonore de leur gare parmi
une sélection de musiques classiques (de Chopin à Mozart en passant par
Vivaldi, Lully...) visant à rendre les gares plus sereines et plus agréables.
Mais aussi, de manière un peu plus officieuse, pour combattre le squat et
décourager certaines catégories de personnes de rester trop longtemps sur les
lieux...
4- Le baromètre des identités musicales des marques (BIMM)
La plupart des marques ont conscience que la musique peut parfaitement s’intégrer
au sein de leur stratégie. 97% des marqueteurs pensent ainsi que la musique
peut renforcer leur marque et 74% pensent qu’elle deviendra de plus en plus
importante dans le futur. Pourtant, alors qu’il émerge de nombreuses agences
de design sonore, un peu moins de 6 entreprises sur 10 n’ont pas évalué leur
couleur sonore et 8 entreprises sur 10 n’ont pas de jingle. Ce constat quelque peu
paradoxal est celui présenté par Jakob Lusensky, PDG de Heartbeats International.
L’enquête qu’il a conduit amenait à la conclusion que les annonceurs aimaient la
musique mais ne savaient pas réellement comment l’intégrer et en tirer profit.20
En ce qui concerne les annonceurs français faisant déjà confiance en la musique,
l’agence AtooMedia et Hyperworld Marketing ont lancé en 2008 le premier
baromètre des identités musicales des marques (BIMM) afin de permettre à
ces entreprises de mesurer pour leur marque et dans leur secteur d’activité : la
reconnaissance de leur identité musicale par les consommateurs, l’agrément ou
l’éventuelle saturation que celle-ci peut générer et en dernier lieu, l’attribution à
leur marque de leur identité musicale. Pour sa première vague de test, 30 identités
musicales de marques réparties dans divers secteurs d’activité et représentant
différentes stratégies avaient été ciblés. En voici des annonceurs étudiés : 118 218,
Aéroports de Paris,Air France,Alice,Auchan, Banque Populaire, Bouygues Télécom,
20 - Heartbeats International, « Sound like branding », Sweeden, 2011
-37-
Carte Noire, CNP, Coca Cola, Crédit Mutuel, Dim, Evian, France Télécom, etc.
Les résultats avaient alors permis de mettre en évidence certains très bon
élèves comme DIM par exemple avec une notoriété de 99% sur l’ensemble
de la population testée, un agrément qui résiste bien à la saturation malgré une
utilisation continue du même thème depuis 1970, et des scores d’attribution assistée
(95%), spontanée (86%) et prouvée (80%) sans égal. De manière générale,
ce baromètre a révélé que les niveaux de notoriété des signatures musicales
étaient plutôt bons tout comme les niveaux de saturation qui étaient globalement
maîtrisés sauf pour le secteur Télécom qui faisait office de mauvais élève.
Les scores d’attribution de l’identité musicale à la marque étaient eux assez variables
d’un secteur à un autre. L’énergie ayant le plus fort coefficient de dispersion avec
des identités musicales mal attribuées. La meilleure attribution était celle du secteur
bancaire. Enfin, selon le BIMM, les moins de 35 ans étaient les plus réceptifs à
l’identité musicale de marque, (ce qui coïncide également avec les résultats de
l’enquête mené dans le cadre de ce mémoire) mais avaient tout de même davantage
la culture de zapping et étaient ceux pouvant saturer le plus rapidement.21
C- L’identité sonore à travers le point de vente
1- La musique sur le point de vente, un pouvoir avéré
Nous avons vu au cours d’une précédente partie que la musique entrainait 3 types
de réaction : sur le plan conatif, cognitif et affectif. Et, au même titre que l’ambiance
physique (décoration, luminosité, signalétique, vendeurs...) l’ambiance musicale
participe à la sensation d’un point de vente en jouant un rôle essentiel dans la
perception du territoire de la marque.
De nombreuses recherches basées sur l’importance de l’ambiance musicale d’un
point de vente ont ainsi été menées et ont permis de recenser différents effets sur
les consommateurs en fonction de variables que sont le tempo, le volume, le style de
musique et la notoriété de cette dernière. En voici les principaux résultats compilés
par Sophie Rieunier dans sa thèse sur le sujet22
.
21 - ATOOMEDIA, http://bimm.atoomedia.com/resultats_bimm_pub.html, 2008
22 - RIEUNIER.S, L’influence de la musique d’ambiance sur le comportement des consommateurs sur le lieu de vente, 2000, Paris 9
-38-
•	 Influence de la musique sur les réactions conatives
- Le temps passé en magasin
Lorsque l’on diffuse une musique avec un faible volume (Smith et Curnow, 1966)
et lorsque celle-ci est appréciée par la clientèle (Yalch et Spangenberg, 1993 ;
Herrington, 1993), le client passe plus de temps sur le point de vente.
Une seconde influence est celle provoquée par le tempo entraînant souvent des
réactions corporelles sur les consommateurs. Le tempo agirait ainsi à la fois sur la
vitesse de déplacement (Milliman, 1982) et sur la vitesse de consommation.
En d’autres termes, quand les affaires sont assez calmes, les magasins peuvent
retenir les clients en jouant de la musique assez lente qui les encouragera à regarder
plus attentivement les produits et, à l’inverse, la musique rapide sera plutôt utilisée
pour créer ou renforcer une activité et ainsi être en accord avec la vitesse du flot.
Les clients d’un restaurant consommeraient plus vite quand le tempo de la musique
diffusée est rapide (Roballey et alii, 1985, McElrea et Standing, 1992).
- Les achats et les dépenses
Déjà brièvement abordé avec l’effet du « Château Lafitte » ou encore « l’expérience
des vins français et allemands », le style de musique aurait une influence sur le
type d’achat réalisé par les clients et donc parfois sur la valeur du panier. Dans
les supermarchés, il a été montré que les clients achetaient plus d’articles et
dépensaient plus avec de la musique de variété par exemple (Sibéril, 1994). En
outre, des musiques entrainantes type « boite de nuit » marquée par un son de
batterie et de basse dans un magasin de vêtements pourraient conduire les filles à
s’acheter des hauts décolletés et vêtements de sortie...Justement, en parlant de «
boites », il a été observé que les clients d’un bar de nuit consommaient d’avantage
lorsque le volume de la musique était augmentée. Deux hypothèses ont alors été
avancées : Le volume sonore stimule d’avantage les consommateurs en les incitant
à boire plus rapidement et donc à plus commander. La deuxième elle consiste à
penser que les échanges sociaux sont diminués par la musique ayant un fort volume
et donc à défaut de parler, les clients consomment plus.23
23- France Presse, « La musique forte dans les bars fait boire davantage », La Presse.CA, juillet 2008
-39-
•	 Influence de la musique sur les réactions cognitives
- La perception du magasin :
Lorsque l’on rentre pour la première fois dans un magasin, on se fait rapidement une
idée de l’identité et de la personnalité de l’enseigne au travers de son atmosphère
et des stimuli sensoriels qu’elle exerce sur nous. La musique d’ambiance est une
des composantes principales dans ce processus d’identification et peut influencer
la perception de l’image globale du magasin. Les musiques Hip-Hop de certains
magasins spécialisés dans le street wear participent à segmenter d’avantage la
clientèle de même qu’un magasin diffusant de la musique de variété peut être perçu
comme vendant des produits bas de gamme (Yalch et Spangenberg, 1990).
- La perception du temps d’attente et du temps passé :
Une musique plaisante permettrait d’améliorer la perception des consommateurs du
temps d’attente ou de réduire le temps passé (Stratton, 1992, Hui et alii, 1997). C’est
comme on l’a vu une des premières raisons historiques de son utilisation (musique
d’ascenseur, salles d’attentes...). L’humeur ici conditionne beaucoup la perception
du temps où celui-ci aura tendance à passer plus rapidement avec de la musique
comblant un silence pesant.
Cependant, encore faut-il gérer convenablement le volume car s’il est élevé, il peut
devenir alors dérangeant, influencer l’humeur et donc le temps d’attente perçu sera
augmenté (Cameron, 1996). Le côté dérangeant d’un volume sonore trop fort était
d’ailleurs le premier reproche de notre enquête terrain...
•	 Influence de la musique sur les réactions affectives
- Le plaisir et l’humeur
La musique en tant que vecteur fort d’émotions affecte le plaisir ressenti ainsi
que notre humeur. Il semble évident ici que la diffusion d’une musique triste ne va
pas favoriser la gaité et le plaisir des clients sur un point de vente. A l’inverse, le
-40-
fait de diffuser une musique joyeuse aura plus de chance d’égayer l’humeur des
consommateurs (Alpert et Alpert, 1988)
L’ambiancemusicalepeutainsiêtreuncritèredefidélisationsielleestparticulièrement
apprécié par la clientèle. L’enseigne américaine Abercrombie  Fitch a d’ailleurs
poussé la démarche assez loin en concevant ses magasins comme des boites de
nuits. La musique diffusée est une musique de club destinée aux jeunes qui apprécient
pour la majorité cette ambiance. De véritables files d’attente sont même organisées
avec portier à l’issue pour mieux renforcer le positionnement de la marque.
On assiste ainsi aujourd’hui de plus en plus au passage de l’utilisation
d’une musique d’ambiance visant à masquer le silence (background)
à une musique d’ambiance qui s’intègre pleinement dans la stratégie
d’image et de marketing de la marque (foreground). Au vue des principaux
résultats décrits ci-dessus, cette pratique semble tout à fait pertinente...
2- De la musique d’ambiance passive à la musique qui transmet des messages
Depuis quelques années, à forces de recherches et d’expérimentations, la
musique diffusée sur les points de vente connaît de nombreuses évolutions.
Passés de la simple musique d’ambiance type « Musak » dont la fonction se résumait
principalement à combler le silence et agrémenter le lieu, à la diffusion de morceaux
bien ciblés ayant une finalité marketing, un nombre croissant d’enseignes aujourd’hui
semble avoir compris le potentiel de la musique et n’hésitent pas à investir pour
développer la manière de la diffuser en magasin.
•	 Les Radios Personnalisées ou Radios Instore
Pour une enseigne, se doter d’une radio sur mesure avec des playlists adaptés à la
clientèle, des jingles rappelant la marque et sa promesse ainsi que des messages
publicitaires propres au magasin, c’est avant tout affirmer son identité et contrôler sa
communication. Gérer sois même (ou faire gérer sa radio par des agences externes
comme Moodmedia, Radioshop...) donne en effet beaucoup de souplesse à une
-41-
enseigne lui permettant d’adapter notamment son ambiance sonore à tout moment
de la journée et en fonction de ses promotions en cours. Les messages commerciaux
qui peuvent être diffusés dans ces radios s’avèrent d’ailleurs assez efficaces. Il a été
observé dans un magasin de prêt-à-porter que la mise en avant dans un message
promotionnel d’une remise supérieur à 30% sur un article bien précis entrainait une
augmentation de 4 à 6 % du CA.24
Avoir sa radio permet également d’éviter la diffusion de messages commerciaux
des concurrents comme cela peut-être le cas pour une enseigne utilisant une radio
généraliste (NRJ, Skyrock, Fun Radio, RTL...). De nombreuses marques ont déjà
adopté le système comme Gifi, Mr.Bricolage, Citroën, Subway...
Pour aller encore plus loin dans la démarche, les enseignes peuvent également
disposer de véritables radios animées et ainsi insuffler un maximum de vie à
la manifestation de leur identité sonore. En plus de titres en rapport avec la
programmation du brief, de jingles et de messages, un animateur peut ainsi, au
même titre que sur une radio générique, apporter du contenu par le biais de conseils
s’intégrant dans l’univers de la marque.
•	 Les Douches sonores
Également appelée « laser sonore », une douche sonore est « un faisceau acoustique
directionnel » qui permet de créer du son uniquement audible dans une zone délimité
sans polluer l’ensemble de l’espace. Ainsi, selon la section du magasin et le rayon
où l’on se trouve, il est possible d’obtenir des informations propres à une gamme ou
un produit. Il est également possible avec des contenus sonores plus élaborés de
déclencher des accélérations du pas du client, des ralentissements etc.
Les avantages de cette technologie sont multiples :
D’unepart,unedouchesonorepermetd’attirerl’attentionmaximaleduconsommateur
sur les produits (linéaires, corners présents sur les lieux de vente) avec la mise en
place d’un zoning.
D’autre part, il est possible de créer de véritables « hologrammes sonores » qui
vont donner la parole directement aux produits, affiches, PLV grâce à la réflexion
du son sur ces items. L’expérience client est ainsi favorisée au mieux grâce à ce
dispositif récemment permis du fait des progrés technologiques. Le plus étonnant
24- Chiffres donnés par THIRI Stanislas, directeur de l’agence en identité sonore RADIOSHOP.
-42-
reste sans doûte le transducteur ou un petit appareil servant à transformer une
vitrine ou d’un mobilier commercial en véritable haut-parleur invisible. Cela peut
se présenter comme un bon moyen par exemple d’attirer des personnes passant
devant une vitrine de magasin qui émettrait du son et qui les inciterait à se rendre à
l’intérieur. L’enseigne Peter Jones à Londres qui a testé le dispositif a observé grâce
à une caméra une augmentation de coup de regard sur la vitrine de 58 % et une
augmentation de 49 % de personnes s’arrêtant devant la vitrine pour y regarder les
produits exposés.25
3- La musique et le point de vente virtuel
A l’heure du digital, il nous est impossible de ne pas aborder la question d’Internet et
de la musique. Intimement liés car le premier ayant démocratisé le second comme
jamais, les enseignes ont très rapidement souhaité retranscrire leur ambiance sonore
sur leur sites Web. Ces derniers se posent en effet comme de nouvelles interfaces
entre l’entreprise et ses clients, un environnement virtuel permettant la visualisation
des produits en trois dimensions, la visualisation de films ou d’animations et bien sûr
l’écoute de musique…
Mais les effets de la musique observés sur un point de vente physique sont-ils les
mêmes que dans la sphère Internet ? A en croire notre enquête terrain, la diffusion
de musique sur les sites commerciaux semble en tous cas massivement rejetée par
les individus (70% de réponses négatives). Trop souvent en effet, le son intervient
sur Internet de manière intempestive et incontrôlable du fait notamment de publicités
sonores voire de vidéos s’ouvrant toutes seules au cours de la navigation. Cela peut
devenir très gênant et entrainer une saturation de la musique sur Internet lorsqu’elle
n’est pas souhaitée. La solution réside peut-être en la possibilité de donner le choix de
la musique à écouter à l’internaute et en personnalisant au maximum son expérience.
Il est en effet possible pour les enseignes de se faire créer des Webradios disponibles
en ligne 24 heures sur 24 et diffusant les messages marketing au cours d’un
programme musical sur mesure, ou encore d’impliquer l’internaute en lui donnant la
possibilité de voter pour un titre afin qu’il soit diffusé dans la webradio ou en instore.
Pour en revenir aux effets de la musique dans le contexte de l’internet, il convient
de préciser tout d’abord que de nombreuses spécificités techniques sont liées à son
25 - SCULLY.K, Visual Merchandising Manager, Peter Jones, London, http://www.feonic.com/retail-sector.
-43-
utilisation.Par exemple, l’influence du volume (vue comme active sur en situation de
point de vente) ne peut-être prise en compte du fait de la possibilité pour l’internaute
de baisser celui-ci comme bon lui semble. Par ailleurs, si l’utilisateur écoute une
autre musique sur l’ordinateur, il ne sera pas du tout enclin à écouter la musique
de l’enseigne. En revanche si toutes les conditions techniques sont favorables a
l’écoute de la musique sur un site Web Annonceur, alors la musique ne perd pas de
« son pouvoir » et peut toujours agir sur les fameuses fonctions cognitives, conatives
et affectives de l’internaute.26
26 - GALLAN, JP, « Impact de la musique sur le consommateur en ligne »,Thèse de Doctorat, Toulouse, 2003
-44-
III- Construire avec la musique le point de vente de demain
A- L’expérience musicale dans les points de vente
1- Élaborer sa stratégie musicale
	 Ace stade du développement, maintenant que nous connaissons l’importance de
la sollicitation sensorielle induite par la musique et son influence sur les consommateurs,
nous allons réfléchir ensemble à quelles recommandations stratégiques nous pourrions
faire à une enseigne qui souhaiterait développer une stratégie musicale à son image.
•	 Se poser les bonnes questions
En premier lieu, pour concevoir sa future stratégie de marketing musical, il convient
de bien définir les objectifs. L’entreprise cherche elle à accroître sa notoriété ?
Accentuer le positionnement de sa marque ? Attirer l’attention du consommateur ?
S’adresser à une nouvelle génération ? L’utilisation de la musique doit se concevoir
dans un réel cadre statégique au même titre que certains moyens préconisés dans un
projet de communication. En fonction des objectifs visés, la marque jouera alors sur tel
ou tel point de contact (signature sonore et slogan sonore pour de la reconnaissance,
synchronisation publicitaire et co-branding pour la construction d’une image etc).
Une fois les buts recherchés explicités, connaître sa cible, ses tendances, son
appartenance communautaire comme ses goûts musicaux s’avère par la suite très
important car il est nécessaire de proposer à son public une expérience qui sera
en adéquation avec ses valeurs. Il peut à ce moment là être judicieux par exemple
d’utiliser les grandes typologies de consommateurs de l’étude Baromusic réalisée par
Havas. L’âge influençant pas mal la manière de se procurer et d’écouter la musique.
•	 Étudier : Faire l’audit de la marque
Il est primordial de prendre soin de maintenir la cohérence avec
l’ensemble des éléments qui constituent l’identité de la marque. Ainsi,
les supports visuels doivent être correctement étudiés afin d’obtenir des
-45-
correspondances entre la charte graphique et sonore. Rappelons que le
bleu évoque de l’apaisement et de la réflexion, le rouge du dynamisme etc.
En parallèle, il faut Benchmarker. L’environnement concurrentiel et le marché dans
lequel évolue la marque doivent être scrupuleusement oscultés. En observant la
stratégiesonoredesconcurrents,l’onpourranotammentserendrecomptedelamaturité
du secteur vis-à-vis du design sonore et notamment élaborer son positionnement.
Deux choix restent alors possibles : s’aligner sur les statégies sonores concurrentes
ou bien se démarquer en osant prendre des risques.
•	 Choisir une stratégie musicale appropriée
Pour cela, il est vivement conseillé de s’adresser à une agence de conseil en identité
sonore qui apportera une véritable expertise dans l’identification de musiques en
fonction de la cible et permettra à la marque de faire émerger son ADN musical.
Comme on a pu le voir, fonctionner à l’instinct pour évaluer sa couleur sonore ne peut
être pertinent et en cela, un accompagnement par des spécialistes est nécessaire
pour étudier l’environnement de la marque et son marché afin de séléctionner et
réaliser une stratégie musicale appropriée qui se déploiera sur les différents points
de contacts. Le positionnement Premium d’Air France est par exemple reflété grâce
à un contenu musical en phase. Des artistes comme Boards Of Canada, Charlotte
Gainsbourg, Massive Attack, Jonsi sont utilisés car ils incarnent la détente et l’évasion
que les passagers associent à la marque.
•	 Fixer un budget et respecter le droit en matière d’utilisation de la musique
Le prix d’un morceau dépend généralement de la notoriété de l’oeuvre et de son artiste
mais aussi du plan média souhaité (nombre d’utilisation et supports de diffusion). Pour
pouvoir utiliser une chanson déjà commercialisée par exemple, il convient de négocier
financièrement auprès de chaque ayant-droit (auteurs, compositeurs, éditeurs) et de
régler les droits d’auteurs perçus par des organismes collecteurs tels que la SACEM
ou encore la SPRE. Précisons ici que la SACEM rémunère les artistes, compositeurs
et éditeurs alors que la SPRE collecte la rémunération des artistes interprètes et les
producteurs. Il est ainsi impératif en cas d’utilisation d’une œuvre musicale protégée
-46-
de demander les autorisations nécessaires, même lorsque les œuvres appartiennent
aux licences libres ou (creative commons).
2 - Déployer la stratégie musicale dans et au delà du point de vente
•	 Dans le point de vente
C’est réellement à travers le point de vente, en tant que premier lieu d’interaction
directe avec le consommateur, que l’on peut transmettre une expérience musicale.
Et, cela doit être favorisé non pas par une simple musique d’ambiance passive mais
par une véritable immersion sonore unique à chaque visite. La musique doit servir
à réenchanter le magasin. Ainsi, comme nous l’avons vu p°35, diverses solutions
existent pour délivrer des contenus audio sur mesure et originaux qui contribueront
à enrichir l’expérience consommateur.
Deuxièmement, pour influencer le comportement d’achat et faire en sorte que
l’atmosphère sonore soit efficace, il est nécessaire d’attirer l’attention sur la musique
en créant des ruptures dans l’environnement sonore sans que cela ne devienne
dérangeant pour le consommateur. L’idée est ici d’attirer délicatement et naturellement
l’attention des clients qui trop souvent déclarent ne pas faire attention à la musique. Pour
cela, il est par exemple judicieux d’alterner des morceaux connus avec des morceaux
moins connus, d’alterner les titres avec des messages promotionnels, de varier les
tempos, de varier les volumes à certains endroits, d’utiliser des douches sonores etc.
Pour conclure cette sous partie, nous ferons remarquer que la France est assez en
retard en terme de dynamisation sonore des points de vente par rapport aux pays
anglo-saxons. De ce fait, les enseignes françaises qui feront l’effort de mettre en place
ces quelques techniques auront de meilleures chances de se démarquer des autres,
celles se contentant de diffuser une musique d’ambiance passive.
•	 Au-delà du point de vente
Il est également très judicieux de ne pas figer les frontières de la musique. En effet,
c’est dans sa capacité à partager la musique au-delà même de son point de
vente physique qu’une enseigne se montrera sincère dans l’utilisation de la musique.
-47-
Pour aller plus loin, une marque doit être capable de fédérer une communauté
musicale. De très bonnes pratiques ont déjà été menées et peuvent être sources
d’inspiration. La marque automobile AUDI a par exemple déployé son univers
musical sur un site internet www.myaudi.fr. Des nouveautés (revendiquant l’avant
gardisme de la marque alternées à des grands classiques (pour assurer l’intérêt
de l’internaute) ainsi que des playlists d’ambassadeurs d’AUDI ponctuent ainsi
le site internet réalisé sous l’initiative de l’agence conseil UThink, agence affiliée à
la Major UNIVERSAL MUSIC. De ce fait, l’expérience musicale doit se poursuivre
même en ligne en faisant participer les clients et non en imposant des musiques
qui se déclenchent automatiquement. Je partage d’ailleurs personnellement
l’avis des nombreux interrogés de l’enquête terrain s’étant opposés à cela...
De manière générale, rappelons que tous les points de contacts peuvent faire
l’objet d’une expérience musicale. Plus ils seront nombreux à partager l’identité
musicale, et plus celle ci sera claire dans l’esprit des auditeurs/consommateurs. Enfin,
et c’est ce qui fera l’objet de la dernière partie de ce mémoire, une enseigne qui sait
se montrer proche des artistes en les intégrant dans sa communication à travers du
(co-branding, de l’événementiel...) renforcera d’autant plus son image de marque hors
du point de vente.
3- S’intégrer dans une démarche polysensorielle
Avoir une identité sonore réussie et une réelle personnalité musicale c’est une chose.
Mais cela est-il réellement suffisant pour plonger l’individu traversant un point de
vente dans l’univers de la marque ? Selon Body et Giboreau27
, plus les sollicitations
sensorielles sont nombreuses et plus les traces qu’elles laissent sont alors mémorables.
Par ailleurs on a vu que les sens pouvaient se compléter mutuellement les uns les
autres en renforçant les sensations perçues (goût/couleur, ouïe/odorat...).
De ce fait, il importe pour les enseignes de travailler ce mélange de sollicitations
sensorielles afin de favoriser la création de l’expérientiel. La musique diffusée sera
d’autant plus cohérente et pertinente qu’elle s’intègrera dans un ensemble
réfléchi de sollicitations sensorielles. Il est en outre plus juste aujourd’hui de parler
de marketing polysensoriel plûtot que de marketing sensoriel. En effet, le marketing
polysensoriel est surtout apparu avec l’utilisation des sens « moins évidents » que
27 - BODY L et GIBOREAU A, Le marketing sensoriel: de la stratégie à la mise en oeuvre, Vuibert , Paris, 2007
-48-
sont l’odeur et le son pour les points de vente. L’enseigne Abercrombie  Fitch déjà
abordée dans ce mémoire est un symbole du marketing polysensoriel, voir expérientiel.
Son image de marque jeune, dynamique et branchée et reflétée à travers 4 sens.
Comme en discothèque, une musique de type éléctro est diffusée à un fort volume
et de manière continue pour conférer au magasin une réelle ambiance de clubbing.
La vue elle, est sollicitée grâce à des jeux de lumière mettant en valeur les produits
alors que le reste du magasin est plongé dans l’obscurité. Les vendeurs quelque peu
dénudés et choisis pour leur physique avantageux jouent également leur rôle pour
en « mettre plein les yeux » aux clients. Le toucher est rendu possible en permettant
l’étude des textile et la prise de photographies avec les vendeurs. Enfin, la marque
s’est créée elle même un parfum au nom de « Fierce n°8 » qu’elle diffuse dans tout le
magasin, sur les vêtements et hors de la boutique. Un autre exemple à suivre est celui
de l’enseigne Nature  Découvertes d’ailleurs relativement connu par les individus
interrogés dans l’enquête terrain (cités 6 fois). Entre l’odeur de cèdre d’Esteban et les
musiques d’oiseaux dans le magasin, les points de ventes Nature  Découvertes sont
des lieux de calme et bien-être. Tout est mis en place pour être touché, manipulé, mis en
situation. L’immersion client est à son maximum et cette mise en scène des espaces
favorise la fidélisation et l’acte d’achat. Par les sens, la marque communique,
affirme son territoire, crée une relation intime et émotionnelle avec la clientèle.
Il convient néanmoins de ne pas sombrer dans une certaine « cacophonie » sensorielle
au risque de déranger le client et de brouiller le message commercial. Il importe ainsi
de « doser » pertinemment et correctement tout ce qui aura pour but de solliciter les
sens sur le point de vente. Pour cela, des tests de pré lancement sont vivement
recommandés. Certaines personnes reprochent notamment à l’enseigneAbercrombie
 Fitch de miser trop sur le sensoriel au détriment de la visibilité des produits.28
A titre d’anecdote également, la RATP en 1993 avait expérimenté la diffusion
d’un parfum de menthe et d’eucalyptus dans ses stations mais s’était
rapidement ravisé après avoir reçu de nombreuses plaintes des usagers...
Enfin pour clore cette partie sur l’expérience polysensorielle des points de vente,
n’oublions pas que les avancées technologiques et digitales peuvent remplir un grand
rôle dans cette quête. De nombreuses opportunités expérientielles peuvent être
28 - NEBIA A, « Des points de vente à l’épreuve des sens » in Marketing N°144, novembre 2010
Les vertus de la musique dans le marketing de l'expérience
Les vertus de la musique dans le marketing de l'expérience
Les vertus de la musique dans le marketing de l'expérience
Les vertus de la musique dans le marketing de l'expérience
Les vertus de la musique dans le marketing de l'expérience
Les vertus de la musique dans le marketing de l'expérience
Les vertus de la musique dans le marketing de l'expérience
Les vertus de la musique dans le marketing de l'expérience
Les vertus de la musique dans le marketing de l'expérience
Les vertus de la musique dans le marketing de l'expérience
Les vertus de la musique dans le marketing de l'expérience
Les vertus de la musique dans le marketing de l'expérience
Les vertus de la musique dans le marketing de l'expérience
Les vertus de la musique dans le marketing de l'expérience
Les vertus de la musique dans le marketing de l'expérience

Más contenido relacionado

La actualidad más candente

Séance n°7 stratégie des moyens
Séance n°7   stratégie des moyensSéance n°7   stratégie des moyens
Séance n°7 stratégie des moyens
Ber Wajchendler
 
Publicité & Media - Etude de Cas Christian Lacroix Parfum C'est La Vie
Publicité & Media - Etude de Cas Christian Lacroix Parfum C'est La Vie Publicité & Media - Etude de Cas Christian Lacroix Parfum C'est La Vie
Publicité & Media - Etude de Cas Christian Lacroix Parfum C'est La Vie
Oriane Liégé @orianelie
 
La communication digitale et l’événementiel [Mémoire de fin d'étude - Master 2]
La communication digitale et l’événementiel [Mémoire de fin d'étude - Master 2]La communication digitale et l’événementiel [Mémoire de fin d'étude - Master 2]
La communication digitale et l’événementiel [Mémoire de fin d'étude - Master 2]
Maxime Orven
 

La actualidad más candente (20)

DEFINIR L'IMAGE DE L'ARTISTE
DEFINIR L'IMAGE DE L'ARTISTEDEFINIR L'IMAGE DE L'ARTISTE
DEFINIR L'IMAGE DE L'ARTISTE
 
Thèse " Comment le streaming a-t-il impacté l'industrie musicale ? " - Emilie...
Thèse " Comment le streaming a-t-il impacté l'industrie musicale ? " - Emilie...Thèse " Comment le streaming a-t-il impacté l'industrie musicale ? " - Emilie...
Thèse " Comment le streaming a-t-il impacté l'industrie musicale ? " - Emilie...
 
Streaming Musical, Quelle stratégie adopter pour fidéliser le consommateur ?
Streaming Musical, Quelle stratégie adopter pour fidéliser le consommateur ?Streaming Musical, Quelle stratégie adopter pour fidéliser le consommateur ?
Streaming Musical, Quelle stratégie adopter pour fidéliser le consommateur ?
 
E marketing - Deezer - William Belle
E marketing - Deezer - William BelleE marketing - Deezer - William Belle
E marketing - Deezer - William Belle
 
La campagne Benetton
La campagne BenettonLa campagne Benetton
La campagne Benetton
 
Deezer et ses problématiques
Deezer et ses problématiques Deezer et ses problématiques
Deezer et ses problématiques
 
Memoire
MemoireMemoire
Memoire
 
Réinventer la communication interne à l'ère collaborative
Réinventer la communication interne à l'ère collaborativeRéinventer la communication interne à l'ère collaborative
Réinventer la communication interne à l'ère collaborative
 
Memoire : L'impact du web 2.0 sur la promotion du rap de 1975 à 2015
Memoire : L'impact du web 2.0 sur la promotion du rap de 1975 à 2015Memoire : L'impact du web 2.0 sur la promotion du rap de 1975 à 2015
Memoire : L'impact du web 2.0 sur la promotion du rap de 1975 à 2015
 
Séance n°7 stratégie des moyens
Séance n°7   stratégie des moyensSéance n°7   stratégie des moyens
Séance n°7 stratégie des moyens
 
Mémoire de fin d'étude - ISCOM
Mémoire de fin d'étude - ISCOM Mémoire de fin d'étude - ISCOM
Mémoire de fin d'étude - ISCOM
 
[MÉMOIRE] Améliorer l'image de marque d'une entreprise sur les médias sociaux...
[MÉMOIRE] Améliorer l'image de marque d'une entreprise sur les médias sociaux...[MÉMOIRE] Améliorer l'image de marque d'une entreprise sur les médias sociaux...
[MÉMOIRE] Améliorer l'image de marque d'une entreprise sur les médias sociaux...
 
Deezer le dossier compter
Deezer le dossier compterDeezer le dossier compter
Deezer le dossier compter
 
Nike social media - Analyse de la stratégie de la marque
Nike social media - Analyse de la stratégie de la marqueNike social media - Analyse de la stratégie de la marque
Nike social media - Analyse de la stratégie de la marque
 
Web 2.0 et Communication
Web 2.0 et CommunicationWeb 2.0 et Communication
Web 2.0 et Communication
 
Etude de cas : stratégie de communication de Nike
Etude de cas : stratégie de communication de NikeEtude de cas : stratégie de communication de Nike
Etude de cas : stratégie de communication de Nike
 
Publicité & Media - Etude de Cas Christian Lacroix Parfum C'est La Vie
Publicité & Media - Etude de Cas Christian Lacroix Parfum C'est La Vie Publicité & Media - Etude de Cas Christian Lacroix Parfum C'est La Vie
Publicité & Media - Etude de Cas Christian Lacroix Parfum C'est La Vie
 
Mémoire - L'avenir des Influenceurs Virtuels - Héloïse Auger.pdf
Mémoire - L'avenir des Influenceurs Virtuels - Héloïse Auger.pdfMémoire - L'avenir des Influenceurs Virtuels - Héloïse Auger.pdf
Mémoire - L'avenir des Influenceurs Virtuels - Héloïse Auger.pdf
 
Etude de Cas Marketing Levi's
Etude de Cas Marketing Levi'sEtude de Cas Marketing Levi's
Etude de Cas Marketing Levi's
 
La communication digitale et l’événementiel [Mémoire de fin d'étude - Master 2]
La communication digitale et l’événementiel [Mémoire de fin d'étude - Master 2]La communication digitale et l’événementiel [Mémoire de fin d'étude - Master 2]
La communication digitale et l’événementiel [Mémoire de fin d'étude - Master 2]
 

Destacado

Le marketing sensoriel des services et des expériences client
Le marketing sensoriel des services et des expériences clientLe marketing sensoriel des services et des expériences client
Le marketing sensoriel des services et des expériences client
Laurence Body
 
Marketing expérientiel - présentation étudiants CELSA
Marketing expérientiel  - présentation étudiants CELSAMarketing expérientiel  - présentation étudiants CELSA
Marketing expérientiel - présentation étudiants CELSA
Deborah Marino
 

Destacado (20)

Marketing sonore et marketing sensoriel en magasin
Marketing sonore et marketing sensoriel en magasinMarketing sonore et marketing sensoriel en magasin
Marketing sonore et marketing sensoriel en magasin
 
Marketing expérientiel et sensoriel: accélérateurs de bouche à oreille
Marketing expérientiel et sensoriel: accélérateurs de bouche à oreille Marketing expérientiel et sensoriel: accélérateurs de bouche à oreille
Marketing expérientiel et sensoriel: accélérateurs de bouche à oreille
 
Le marketing et la musique
Le marketing et la musiqueLe marketing et la musique
Le marketing et la musique
 
Présentation Deezer 2012 - William Belle
Présentation Deezer 2012 - William BellePrésentation Deezer 2012 - William Belle
Présentation Deezer 2012 - William Belle
 
courts circuits : l'Innovation Emotionelle
courts circuits : l'Innovation Emotionelle   courts circuits : l'Innovation Emotionelle
courts circuits : l'Innovation Emotionelle
 
Shazam
ShazamShazam
Shazam
 
Le Marketing Sensoriel - Conférence du 15 décembre 2011
Le Marketing Sensoriel - Conférence du 15 décembre 2011Le Marketing Sensoriel - Conférence du 15 décembre 2011
Le Marketing Sensoriel - Conférence du 15 décembre 2011
 
Le marketing sensoriel des services et des expériences client
Le marketing sensoriel des services et des expériences clientLe marketing sensoriel des services et des expériences client
Le marketing sensoriel des services et des expériences client
 
Sneakers
SneakersSneakers
Sneakers
 
Personnalisation et marketing
Personnalisation et marketingPersonnalisation et marketing
Personnalisation et marketing
 
Quand Monsieur Experience rencontre Madame Marketing
Quand Monsieur Experience rencontre Madame MarketingQuand Monsieur Experience rencontre Madame Marketing
Quand Monsieur Experience rencontre Madame Marketing
 
Marketing expérientiel - présentation étudiants CELSA
Marketing expérientiel  - présentation étudiants CELSAMarketing expérientiel  - présentation étudiants CELSA
Marketing expérientiel - présentation étudiants CELSA
 
Conference pitch l'ux design a ta grand-mere
Conference pitch l'ux design a ta grand-mereConference pitch l'ux design a ta grand-mere
Conference pitch l'ux design a ta grand-mere
 
Disneyland Paris : une stratégie marketing de l'expérience pour une entrepris...
Disneyland Paris : une stratégie marketing de l'expérience pour une entrepris...Disneyland Paris : une stratégie marketing de l'expérience pour une entrepris...
Disneyland Paris : une stratégie marketing de l'expérience pour une entrepris...
 
Marketing expérientiel chapitre 1 - ESC3 -
Marketing expérientiel chapitre 1 - ESC3 - Marketing expérientiel chapitre 1 - ESC3 -
Marketing expérientiel chapitre 1 - ESC3 -
 
Les meilleures stratégies de Brand Content Musical - Septembre 2014
Les meilleures stratégies de Brand Content Musical - Septembre 2014Les meilleures stratégies de Brand Content Musical - Septembre 2014
Les meilleures stratégies de Brand Content Musical - Septembre 2014
 
PrésiTrack : l'analyse de la semaine du 13 au 17 mars
PrésiTrack : l'analyse de la semaine du 13 au 17 marsPrésiTrack : l'analyse de la semaine du 13 au 17 mars
PrésiTrack : l'analyse de la semaine du 13 au 17 mars
 
Terra9 202234
Terra9   202234Terra9   202234
Terra9 202234
 
Perfeccionamiento del tutor
Perfeccionamiento del tutorPerfeccionamiento del tutor
Perfeccionamiento del tutor
 
Générer plus de prestations juridiques avec SparkUp
Générer plus de prestations juridiques avec SparkUpGénérer plus de prestations juridiques avec SparkUp
Générer plus de prestations juridiques avec SparkUp
 

Similar a Les vertus de la musique dans le marketing de l'expérience

Le marketing sensoriel
Le marketing sensorielLe marketing sensoriel
Le marketing sensoriel
Omar BE
 
Moonshine Production (Presentation)
Moonshine Production (Presentation)Moonshine Production (Presentation)
Moonshine Production (Presentation)
Tibet Demirel
 
Thèse professionnelle - Le marketing sensoriel peut-il être considéré comme u...
Thèse professionnelle - Le marketing sensoriel peut-il être considéré comme u...Thèse professionnelle - Le marketing sensoriel peut-il être considéré comme u...
Thèse professionnelle - Le marketing sensoriel peut-il être considéré comme u...
robinlajou66
 

Similar a Les vertus de la musique dans le marketing de l'expérience (20)

Le marketing sensoriel
Le marketing sensorielLe marketing sensoriel
Le marketing sensoriel
 
Introduction au programme de PARIS 2.0 sur le branded entertainment #entertai...
Introduction au programme de PARIS 2.0 sur le branded entertainment #entertai...Introduction au programme de PARIS 2.0 sur le branded entertainment #entertai...
Introduction au programme de PARIS 2.0 sur le branded entertainment #entertai...
 
Cours " Histoire des supports publicitaires " - partie 1
Cours " Histoire des supports publicitaires "   - partie 1Cours " Histoire des supports publicitaires "   - partie 1
Cours " Histoire des supports publicitaires " - partie 1
 
Mémoire christelledehlinger MASCI 2
Mémoire christelledehlinger MASCI 2Mémoire christelledehlinger MASCI 2
Mémoire christelledehlinger MASCI 2
 
Marketing information et perception client
Marketing information et perception clientMarketing information et perception client
Marketing information et perception client
 
Simon Morinière - Mémoire sur le Buzz Marketing
Simon Morinière - Mémoire sur le Buzz MarketingSimon Morinière - Mémoire sur le Buzz Marketing
Simon Morinière - Mémoire sur le Buzz Marketing
 
MAGCOM #6
MAGCOM #6MAGCOM #6
MAGCOM #6
 
Le management de la brand culture (livre blanc)
Le management de la brand culture (livre blanc)Le management de la brand culture (livre blanc)
Le management de la brand culture (livre blanc)
 
Objets pub - Analyse, l'objet publicitaire par les chiffres !
Objets pub  - Analyse, l'objet publicitaire par les chiffres !Objets pub  - Analyse, l'objet publicitaire par les chiffres !
Objets pub - Analyse, l'objet publicitaire par les chiffres !
 
Introduction a l'Engagement Planning : comment impliquer en communication
Introduction a l'Engagement Planning : comment impliquer en communicationIntroduction a l'Engagement Planning : comment impliquer en communication
Introduction a l'Engagement Planning : comment impliquer en communication
 
Présentation communication chocolatiers 2013
Présentation communication chocolatiers 2013Présentation communication chocolatiers 2013
Présentation communication chocolatiers 2013
 
Marketing communication et produit
Marketing communication et produitMarketing communication et produit
Marketing communication et produit
 
Moonshine Production (Presentation)
Moonshine Production (Presentation)Moonshine Production (Presentation)
Moonshine Production (Presentation)
 
Cadrage de paris 2.0 : les enjeux du branded entertainment pour les annonceur...
Cadrage de paris 2.0 : les enjeux du branded entertainment pour les annonceur...Cadrage de paris 2.0 : les enjeux du branded entertainment pour les annonceur...
Cadrage de paris 2.0 : les enjeux du branded entertainment pour les annonceur...
 
Thèse professionnelle - Le marketing sensoriel peut-il être considéré comme u...
Thèse professionnelle - Le marketing sensoriel peut-il être considéré comme u...Thèse professionnelle - Le marketing sensoriel peut-il être considéré comme u...
Thèse professionnelle - Le marketing sensoriel peut-il être considéré comme u...
 
Fidéliser à l'heure du numérique, les enjeux pour le monde culturel et pour l...
Fidéliser à l'heure du numérique, les enjeux pour le monde culturel et pour l...Fidéliser à l'heure du numérique, les enjeux pour le monde culturel et pour l...
Fidéliser à l'heure du numérique, les enjeux pour le monde culturel et pour l...
 
Manifeste pour le marketing de demain
Manifeste pour le marketing de demainManifeste pour le marketing de demain
Manifeste pour le marketing de demain
 
Manifeste ADETEM pour le marketing de demain
Manifeste ADETEM pour le marketing de demainManifeste ADETEM pour le marketing de demain
Manifeste ADETEM pour le marketing de demain
 
Pres inCitu webinar-comment utiliser les réseaux sociaux pour etre efficace
Pres inCitu webinar-comment utiliser les réseaux sociaux pour etre efficacePres inCitu webinar-comment utiliser les réseaux sociaux pour etre efficace
Pres inCitu webinar-comment utiliser les réseaux sociaux pour etre efficace
 
Adetem Rhônes-Alpes - Atelier pratique Design Thinking - (Re)Booster votre se...
Adetem Rhônes-Alpes - Atelier pratique Design Thinking - (Re)Booster votre se...Adetem Rhônes-Alpes - Atelier pratique Design Thinking - (Re)Booster votre se...
Adetem Rhônes-Alpes - Atelier pratique Design Thinking - (Re)Booster votre se...
 

Les vertus de la musique dans le marketing de l'expérience

  • 1. Nicolas Micallef COMAL 4 Tuteur de mémoire Antoine Pecnard Directeur de mémoire Stanislas Thiry, Gérant des sociétés Radioshop et l’AgenSe Les vertus de la musique dans le marketing expérientiel Promotion 2013-2014Montpellier J C € Pourquoi des 5 sens, l’ouïe est-elle le plus prometteur aujourd’hui pour attirer l’attention du consommateur et l’influencer alors qu’il est soumis à de nombreuses autres sollicitations sensorielles ? MÉMOIRE DE FIN D’ÉTUDES €
  • 2.
  • 3. Remerciements Me voilà au terme d’une sacrée aventure lorsque je rédige cette ultime partie... Aboutissement de plusieurs mois de travail, ces quelques lignes s’adressent aux personnes qui m’ont aidé dans la réalisation de ce mémoire. En premier lieu, je tiens à remercier M.Thiry Stanislas, directeur associé de Radioshop et de l’AgenSe, qui a su accompagner et recadrer lorsque nécessaire, ma réflexion sur ce sujet. Je remercie également M.Pecnard Antoine et Mme. Puyau Claudine, référents pédagogiques à l’ISCOM pour le temps qu’ils ont bien voulu m’accorder à discuter du sujet et à m’aiguiller dans la construction de mon plan. Leurs conseils avisés m’ont permis de structurer ma pensée et de vous livrer ici un travail réfléchi autour de la musique dans le marketing. Enfin, je pense aussi à tous mes proches et les remercie pour leurs encouragements comme pour leur patience dans certains cas...Merci ! A présent, il est temps de laisser « jouer la musique » de ce travail et de vous en souhaiter une très bonne lecture.
  • 4.
  • 5. -5- « La musique commence là où s’arrête le pouvoir des mots. » Richard Wagner
  • 6. -6- Sommaire Introduction..................................................................................................................................... 8 I- Le marketing polysensoriel, la réponse à un consommateur en quête de sensations A- À l’ère de l’expérience, le marketing traditionnel de moins en moins pertinent............................................................................................................................................10 1- L’essoufflement du marketing traditionnel 2- L’ère de l’expérience 3- Le marketing émotionnel : les 4E B- Le marketing sensoriel, ou comment stimuler les sens pour vendre................13 1- Définition, objectifs et avantages du marketing sensoriel 2- 5 sens sur lesquels agir C- Enquête de terrain : Les ambiances de magasins, ressentis et attentes des consommateurs.............................................................................................................................19 1- Méthodologie 2- Résulats majeurs du questionnaire 3- Bilan II- La musique, « langue des émotions », une sollicitation sensorielle clé A- Un élément immatériel dont on ne peut se passer.....................................................23 1- Au cœur de l’activité de l’Homme 2- Le langage commun des « digital natives » 3- Les fonctions de la musique B- La Musique et les Marques...................................................................................................27 1- Histoire de la musique dans la Communication 2- Les différentes formes de liaisons entre la musique et les marques
  • 7. -7- 3- La construction d’une identité sonore cohérente 4- Une identité sonore réussie : le cas SNCF 5- Le baromètre des identités musicales des marques (BIMM) C- L’identité sonore à travers le point de vente.................................................................37 1- La musique sur le point de vente, un pouvoir avéré 2- De la musique d’ambiance passive à la musique qui transmet des messages 3- La musique et le point de vente virtuel III- Construire avec la musique le point de vente de demain A- L’expérience musicale dans les points de vente........................................................44 1- Élaborer sa stratégie musicale 2- Déployer la stratégie musicale dans et au delà du point de vente 3- S’intégrer dans une démarche polysensorielle B- Aller encore plus loin : Se rapprocher des artistes....................................................49 1- La création de contenu de marque (Brand content) 2- Une relation gagnant / gagnant
  • 8. -8- Introduction La musique n’a jamais été autant démocratisée et consommée depuis sa dématérialisation due à la Révolution numérique. C’est simple, elle est présente et accessible partout autour de nous, que ce soit dans nos lecteurs MP3, nos téléphones, nos tablettes mobiles, à la télévision, dans la rue, sur internet, dans la publicité et même jusque dans les points de vente... Ne rendant personne vraiment insensible et nous touchant à différents degrés, la musique est sans doute un des objets émotionnels les plus puissants qu’il soit. Par ailleurs, ce besoin de rechercher à vivre des émotions à travers la musique semble aller de pair avec la volonté croissante du consommateur d’être interpellé différemment par les marques. Aujourd’hui « blasé » des techniques de marketing traditionnel et de l’omniprésence du visuel commercial tout comme il peut être « embêté » face à la multitude de choix de produits s’offrant à lui, le consommateur délaisse effectivement de plus en plus la Raison au profit de l’Émotion et de l’Éxpérience. Ainsi, voilà maintenant quelques années que les marques et enseignes ont commencé à pratiquer du marketing sensoriel et donc à solliciter d’autres sens que la vue. Au travers de ce mémoire, nous tenterons d’analyser l’ensemble des opportunités qu’offre la musique dans un usage marketing et commercial pour les marques et nous nous efforcerons de répondre à la question suivante : Pourquoi des 5 sens, l’ouïe est-elle le plus prometteur aujourd’hui pour attirer l’attention du consommateur et l’influencer alors qu’il est soumis à de nombreuses autres sollicitations sensorielles ? Aujourd’hui, force est de constater que très souvent le son est choisi sans réelle réflexion derrière ou en phase finale d’un projet de communication. Nous nous efforcerons ainsi à démontrer la force de la musique et à présenter l’approche expérientielle qu’un individu peut avoir avec une marque qui l’aurait intégré de façon réfléchie au cœur de sa stratégie. L’idée de ce travail de recherche est donc de repositionner l’ouïe et la musique au centre du marketing afin de mieux toucher le consommateur. Pour cela, nous nous focaliserons sur les lieux de vente, en tant que points de contacts et sollicitations sensorielles directes avec les cibles. Bien
  • 9. -9- qu’abordée, la relation entre la musique et la publicité fera l’objet d’une étude moins approfondie. De ce fait, dans une première partie et en guise de contexte, nous vivrons ensemble le passage d’un marketing s’appuyant sur la raison à un marketing d’avantage émotionnel qui vise à faire vivre de véritables expériences consommateur. Au cours de cette partie nous nous intéresserons également aux ressentis et attentes des consommateurs dans les magasins. Puis, nous analyserons les effets de la musique sur l’Homme et le consommateur en étudiant notamment comment les marques l’utilisent au sein de leur communication et comment la construction d’une identité sonore peut renforcer l’image globale de marque. Enfin, dans une troisième et dernière partie, nous réfléchirons à des recommandations stratégiques pour construire le point de vente de demain avec la musique en moyen de premier plan.
  • 10. -10- I- Le marketing polysensoriel, la réponse à un consommateur en quête de sensations A- À l’ère de l’expérience, le marketing traditionnel de moins en moins pertinent. 1- L’essoufflement du marketing traditionnel Défini par Kotler comme étant « l’ensemble des techniques et études d’applications qui ont pour but de prévoir, constater, susciter, renouveler ou stimuler les besoins des consommateurs et adapter de manière continue l’appareil productif et commercial »1 , le marketing au sens traditionnel est particulièrement centré sur les attributs du produit et les bénéfices qu’on en tire. Caractérisé par une approche très analytique, rationnelle et objective de nos besoins, c’est parce qu’il considère toujours le consommateur comme une cible passive dénuée d’émotions sans également tenir réellement compte de l’évolution de nos comportements et attentes que le marketing traditionnel ne suffit plus. En effet, à l’ère du « consom’acteur » où la demande est reine, différents facteurs visent à souligner les lacunes de ce type de marketing : - Les éléments qui constituent le Mix Marketing à savoir les 4P (Prix, Produit, Place, Promotion) ne sont pas orientés client et bien que Lovelock en 2008 ait élargi le mix aux services en rajoutant le personnel en contact avec les clients, les procédures et interfaces non humaines ainsi que les éléments matériels de l’environnement physique (Personne, Process et Preuve)2 , le client et son ressenti restent tout de même relégués en second plan. - Face à une offre homogène de produits très souvent différenciés entre eux sur des dimensions intrinsèques n’intéressant pas toujours le consommateur, ce dernier se laisse souvent guidé par son affect, en se basant sur des caractéristiques subjectives et en se détournant de la publicité interruptive. - Du fait de la multiplication des points de contact qui existent entre le consommateur et les marques (l’internet, le mobile, les réseaux sociaux…), le marketing en point de vente a tout intérêt à se renouveler en intégrant notamment l’ensemble des nouveaux canaux. En clair, si un produit peut être acheté à distance, le client doit trouver plus 1- KOTLER & DUBOIS, Marketing Management, 11e édition, Pearson Éducation, Paris, 2003. 2- LOVELOCK & LAPERT, Marketing des Services, 6e édition, Publi Union, Paris, 2006
  • 11. -11- en magasin pour qu’il achète et ait envie de revenir : une atmosphère, un confort, une émotion. Les points de vente sont ainsi les premiers concernés dans cette nécessité d’évoluer afin de satisfaire des consommateurs « blasés » par le marketing traditionnel et désormais à la recherche de stimulations sensorielles et émotionnelles. Ayant dépassé le cadre d’une consommation plutôt utilitariste, il semblerait que les consommateurs aujourd’hui consomment d’avantage d’image et de sens. 2- L’ère de l’expérience En 1999, Pine et Gilmore démontraient que notre société de consommation, après être passée par l’ère de l’agriculture, de l’industrie et des services, était entrée dans l’ère de l’expérience3 . Joseph Pine, présentait alors sous la forme du schéma ci- dessous l’évolution de notre économie appliquée à l’exemple du café. Avec cette théorie, la création d’une offre expérientielle autour de produits augmente la notion de valeur liée aux marques. IKEA, en précurseur du marketing de l’expérience, illustre parfaitement cela en ayant décliné le concept « d’ expérience client » sur l’ensemble de sa chaîne de valeur. Grâce à ses mises en scène de produits ou encore son parcours Extraction de matières premières Fabrication de biens Délivrance de services Mise en scène d’expériences différenciation indifférenciation marché premium Concurrence Politique de Prix Besoins des consommateurs non pertinence pertinence 3- PINE & GILMORE,The Experience Economy : Work is Theatre and Every Business a Stage, HBS Press Harvard, 1999. 4- COVA, L’expérience de consommation : de la manipulation à la compromission ?,colloque société et consommation,Rouen, 2004
  • 12. -12- guidé et balisé au travers de meubles facilement montables une fois chez soi, l’enseigne suédoise et son concept de « fun shopping » a su s’imposer mondialement en devenant leader dans le secteur de l’ameublement en kit. Pour les consommateurs, il ne s’agit alors plus de « faire ses courses » mais de « vivre des expériences » et le plus souvent des expériences dites « incorporées » car elles font appel à tous les sens de l’individu. Contrairement au marketing traditionnel, le consommateur du marketing dit expérientiel se veut ainsi fortement impliqué dans son processus.4 Vézina5 le définissait d’ailleurs en 4 points : - Le consommateur n’est pas que consommateur; - Le consommateur agit à l’intérieur de situations - Le consommateur est à la recherche de sens - La consommation ne se limite pas à l’achat. 3- Le marketing émotionnel : les 4E Suite au constat précédent, on s’aperçoit assez vite que les 4P ne sont effectivement pas les plus adaptés pour répondre aux attentes du consommateur décrit ci-dessus...En revanche, avec l’alternative présentée par Christopher Graves6 , le mix marketing revêt une couleur bien plus humaine en engageant notamment les consommateurs dans une voie plus profonde et multidimensionnelle. Les 4P deviennent les 4E : (Éxperience, Échange, Engagement et Exclusivité) et ainsi le marketing devient émotionnel. Dans ce marketing, outre la vision d’un consommateur non « soumis », c’est principalement son rapport avec les marques qui change. En effet, ancré dans une démarche émotionnelle, le consommateur veut être proche de l’écosystème de la marque, accompagné par celle-ci, et vivre une expérience avec elle. Pour illustrer le marketing émotionnel, DISNEYLAND et ses Disneystores se pose en référence absolue. Quoi de plus magique que cette plongée dans l’univers DISNEY permise grâce à des décors travaillés , des couleurs vives, un parfum propre à la marque au nom « d’Imagination » et une musique gaie et festive... L’émotion peut donc influencer largement le consommateur. Une étude de 2007 conduite par Jack Morton montrait d’ailleurs que pour 70% d’entre eux, les émotions comptent pour 50% dans leur décision d’achat.7 5- VEZINA R., « Pour comprendre et analyser l’expérience du consommateur », Gestion, vol. 24, n° 2,1999, p. 59-65 6- GRAVES C, presentation at Ogilvy Verge Singapore, http://fr.slideshare.net/theopenroom/the-4-es-of-marketing-ogilvy-pr, 2008 7- Morton Jack, «experiential marketing study», http://www.jackmorton.com/pdf/EMS_2006.pdf, 2006
  • 13. -13- Il importe tout de même de noter que cette vision du marketing ne doit pas être uniquement l’apanage des grandes marques. Tous les points de ventes et lieux de consommation peuvent créer un lien émotionnel via une expérience sensorielle inédite. Pour les enseignes, réfléchir à une réelle atmosphère de magasin contribue notamment à limiter le showrooming, cette pratique selon laquelle un consommateur réalise une démarche d’information et de découverte d’un produit sur un lieu de vente physique avant de le commander en ligne immédiatement (à partir de son smartphone) ou plus tard auprès d’un autre marchand sur Internet.8 Enfin, il n’en reste pas moins que dans un monde d’urbanisation et de dématérialisation croissante « nous avons besoin de nouveaux espaces de rencontres et de convivialité »9 B- Le marketing sensoriel, ou comment stimuler les sens pour vendre 1- Définition, objectifs et avantages du marketing sensoriel Popularisé au début des années 2000, le marketing sensoriel est une composante capitale du marketing de l’expérience, et tout particulièrement de celle relative au point de vente. En 1992, Bitner soulignait ainsi que l’atmosphère pouvait non seulement agir sur les individus (clients comme employés) de manière émotionnelle, mais également à des niveaux cognitifs et physiologiques10 . Ses résultats de recherches avaient alors été conceptualisés dans un modèle visible en Annexe I. En clair, dans une atmosphère propice, l’acte d’achat des clients peut être favorisé grâce à différentes stimulations sensorielles... La définition généralement admise du marketing sensoriel est celle de Marc Filser, à savoir « l’ensemble de variables d’actions contrôlées par le producteur et/ou le distributeur pour créer autour du produit ou du service une atmosphère multi sensorielle spécifique, soit à travers les caractéristiques du produit lui-même, soit à travers la communication en sa faveur, soit à travers l’environnement du produit au point de vente »11 . Ce marketing postule de ce fait que l’on est prêt à passer plus de temps et à dépenser plus dans un lieu où l’on se sent bien et où l’ambiance générale est agréable. A l’image de la madeleine de Proust, le marketing sensoriel vise ainsi à 8- http://www.definitions-webmarketing.com/Definition-Showrooming 9- DE ROSNAY J, «Passions sur Internet», in la revue tranversale sciences culture,1996 10- BitnerM.J.,Servicescapes:theimpactofphysicalsurroundingsoncustomersandemployees-JournalofMarketing,56,1992 11-FILSER M, «le marketing sensoriel : la quête de l’intégration théorique et managériale»,in revue française du marketing N°194, 2003
  • 14. -14- réveiller les bons souvenirs du consommateur afin de provoquer chez lui une réaction inconsciente affective et favorable à la consommation. En lui procurant un certain bien être et en amenant un certain sentiment réconfortant de réalité, la marque espère surtout fidéliser et créer des liens durables d’attachement et d’engagement. Enfin, par rapport à la concurrence, le marketing sensoriel peut s’avérer être un fort moyen de différenciation quand les autres marques misent exclusivement sur une logique de prix ou d’assortiments de produits inhérente au marketing traditionnel. 2- 5 sens sur lesquels agir • La vue Prépondérante dans le marketing sensoriel, la vue est le sens le plus sollicité par l’environnement. Jouer ainsi sur les formes, les couleurs lors de la conception d’un produit, d’une atmosphère de point de vente ou encore de la publicité représente un facteur clé de succès depuis longtemps. Dans cette quête de l’esthétique chère à l’Homme, le marketing visuel vise à rendre attrayant et reconnaissable du premier coup d’œil des produits ou univers. Ceci est d’autant plus vrai que la concurrence est importante... Face à des rayons d’hypermarchés biens fournis par exemple, il convient d’être reconnaissable rapidement au cours du balayage de l’œil. A ce sujet, la technologie de l’eye tracking qui consiste à identifier le parcours visuel d’un individu (ordre et durée de fixation) par rapport à un stimulus visuel et donc à mettre en lumière ce que l’œil voit ou ne regarde pas illustre bien l’importance du travail notamment réalisé autour du packaging. La mise en valeur passe souvent par le choix d’une couleur dominante qui dictera le choix du registre émotionnel (rouge/orange pour la chaleur, vert/marron pour la nature...) pour un produit comme pour une ambiance de magasin en général. Les parfumeries et le prêt à porter haut de gamme sont par exemple souvent dans des tonalités sombres afin de faire ressortir un côté assez chic et précieux ou encore des teintes acidulées et colorées pour des enseignes jeunes type Desigual ou Undiz. L’éclairage et la luminosité permettent en addition de renforcer l’ambiance souhaitée. Outre la couleur et l’éclairage, la façon d’agencer et de présenter des produits joue aussi beaucoup dans la stimulation visuelle.
  • 15. -15- Dans les grandes surfaces là encore, des rayons sont souvent dans la rondeur afin de favoriser la flânerie et la curiosité alors que des alignements en lignes droites droits seront plutôt synonymes de vitesse. De même, le fait de jouer sur la quantité de produits exposés pour un effet recherché d’abondance ou au contraire de transparence et de dépouillement s’intègre dans une logique de marketing visuel. De nos jours et avec l’importance de l’image dans notre société, on peut noter que l’utilisation de la vidéo est devenue une évolution assez courante dans les points de vente. De plus, les technologies d’écrans plats et de grande taille contribuent à démultiplier les effets, tout comme les écrans plasma 3D qui gagneront sûrement en popularité dans les prochaines années. M.Bricolage diffuse par exemple des démonstrations d’outillage et des spots promotionnels au sein même des rayons. Avec les nouvelles technologies tactiles, les consommateurs peuvent souvent eux même dans certaines enseignes choisir le programme à visionner du bout des doigts... • Le toucher Sans doute le sens le plus intime, le toucher, car connectant directement deux entités (le consommateur et le produit ou magasin) est un ressenti majeur dans le processus d’achat. Comment s’assurer en effet de la bonne qualité d’un tissu ou encore de la robustesse d’un objet si ce n’est en le touchant ? Mais le marketing tactile ne se limite pas au simple fait de prendre un produit en main. Les sources d’expériences tactiles pour le client sont nombreuses. Outre le fait de manipuler des produits, l’ambiance thermique, le contact avec les éléments du magasin ou encore les contacts interpersonnels avec les employés (une main sur l’épaule par exemple) sont autant d’éléments sur lesquels le marketing tactile intervient. Ce dernier se décompose ainsi en deux types principaux : - Le toucher instrumental lorsque le but pour le client est d’obtenir des informations en lien avec le produit manipulé. - Le toucher autotélique dès lors qu’ il est orienté « plaisir », lui donnant envie de prolonger son geste. C’est le cas par exemple en touchant un tissu de soi. Depuis l’avènement du e-commerce, les enseignes ont beaucoup travaillé autour du marketing tactile afin justement de valoriser leurs points de ventes et produits
  • 16. -16- physiques par rapport à l’immatérialité d’internet. N’est-ce pas plus confortable de marcher sur un tapis rouge moelleux que de marcher à même le sol ? Séphora l’a bien compris en installant dans ses points de vente un sol agréable incitant à flâner. L’enseigne offre même la possibilité de tester du maquillage. Enfin, l’avènement des tablettes tactiles tout comme la digitalisation croissante des points de vente semblent avoir contribuer à remettre le toucher au cœur des sollicitations sensorielles. Les différentes bornes tactiles installées dans certains magasins font office de véritables conseillers/vendeurs en donnant accès à de nombreuses informations supplémentaires au sujet de l’enseigne ou d’un produit. • Le goût Imaginez-vous prendre le RER parisien après une grande journée de travail et voir débarquer au cours d’un arrêt toute une équipe de serveurs prêts à vous faire déguster un menu gastronomique au cours de votre voyage...C’est pourtant ce qu’avaient pu vivre des passagers chanceux du RER grâce à une opération spéciale menée entre la marque d’eau pétillante BADOIT et le chef étoilé Thierry Marx, jury de l’émission Top Chef12 . Cette campagne originale de Marketing gustatif illustre bien comment utiliser le goût pour promouvoir une marque et faire vivre une réelle expérience à des consommateurs. Naturellement applicable qu’aux produits alimentaires, ce marketing repose essentiellement sur des actions de dégustations comme celles menées dans les grandes surfaces avec le fromage ou la charcuterie par exemple. Il est intéressant de noter que certaines enseignes non alimentaires peuvent parfois faire à leur manière du marketing gustatif. C’est le cas de certaines stations-services mettant à disposition des bonbons à leurs caisses pour rendre plus agréable la transaction. Enfin, nous pouvons remarquer que d’autres sens peuvent changer le ressenti que l’on peut avoir du goût. En ouvrant une bouteille de soda sans entendre de « pshitt » par exemple, l’on peut facilement penser que la fraicheur et le goût ne seront plus optimaux. De même, plus la couleur d’un produit est intensive, plus l’on va faire dans notre esprit la corrélation avec l’intensité du goût. Ainsi, Les industriels de 12- «Thierry Marx à bord du Badoit Express !», youtube, septembre 2012 13- NALLET P, Rôle et importance des odeurs dans le comportement de l’homme, Thèse de doctorat, Université de Poitiers.1985
  • 17. -17- l’agro alimentaire travaillent ainsi beaucoup le son comme la couleur afin que ces derniers ne desservent pas les propriétés gustatives des produits. • L’odorat L’homme serait capable de sentir 10 000 odeurs distinctes13 . Sens incontrôlable du fait de notre respiration, l’odorat présente ainsi de nombreux intérêts en termes de marketing notamment du fait du taux de déperdition de la mémoire olfactive s’élevant à 5% contre 20% pour la mémoire visuelle.14 Et en effet, certaines senteurs savent réveiller en nous de nombreux souvenirs...Le parfum d’une fille dans la rue qui peut faire songer à celui de son ex petite amie, une odeur de pâtisserie chaude qui nous renvoie dans la cuisine de sa grand-mère etc. Il existe ainsi un lien très intime entre l’odorat et les émotions. De plus, au même titre que les couleurs, les odeurs sont teintées de nombreuses connotations qui peuvent contribuer à immerger le client dans de nombreux univers spécifiques ; de l’énergie grâce à des notes citronnées, des vacances avec de la vanille ou du monoï, du neuf avec une odeur de cuir sortie d’usine (très utilisé par les revendeurs automobiles)... Cette particularité s’avère de fait une très grande opportunité pour les enseignes pour attirer des passants devant une boutique, jouer avec leurs émotions, et in fine, influencer leur comportement. Air Berger, entreprise leader dans le Marketing Olfactif accompagne ainsi les points de vente en travaillant sur des signatures olfactives propres aux marques. Dans le cadre de la coupe du monde de football en 2008, l’enseigne Boulanger avait ainsi diffusé des senteurs pour vendre des télévisions. En parcourant le rayon des grands écrans, les clients pouvaient alors voir des diffusions de matchs de foot et sentir une odeur « d’herbe fraîchement coupée ». La logique était la même près des machines à laver le linge où une odeur de « propre » était diffusée. Selon Pascal Charlier, le président de la société Air Berger15 , on pratiquant du marketing olfactif, la fréquentation d’un rayon peut être augmentée de 20% et 38% d’achats supplémentaires peuvent être déclenchés. Sa société qui se positionne comme « créatrice d’ambiances » équipe près de 10 000 points de ventes et a d’ors et déjà crée de nombreuses senteurs aussi diverses et variées comme « Les pieds dans l’eau », destinée aux enseignes 14- BITAR L, «L’ identité olfactive et la création de parfums sur mesure, Luxe extrême !»,conférence du Rotary Club Beyrouth, 2013 15- MENAGE E, «Consommateurs pris au piège», in Le doc du dimanche, France 5, 13 mai 2012.
  • 18. -18- d’articles de plage, « Fraise tagada » pour des enseignes de gourmandises par exemple... • L’ouïe Enfin, pour finir cette exploration des sens et leurs usages en marketing, prêtons l’oreille à présent sur l’un des véhicules de sensations et d’émotions les plus forts que l’on connaisse : le son. Sans lui autour d’un produit ou dans un magasin, une impression pesante de vide apparaîtrait rapidement. Le silence n’est en effet généralement guère propice aux vertus d’une marque ou d’une campagne de communication. A la fois par sa faculté à transmettre des informations utiles pour le cerveau (comme l’origine d’un bruit, son emplacement, mais aussi l’usage et la fonctionnalité d’un produit grâce à l’identification d’un bruit particulier), et du fait des émotions qu’il transmet, le son représente un élément phare du marketing. Ainsi avant toutes choses, il convient de bien distinguer le marketing sonore (ou design sonore) du marketing musical. - Le premier consiste à travailler la nature des bruits lors du développement d’un produit afin de les rendre révélateurs de ses qualités et dans le but de générer chez un consommateur des réactions affectives, conatives ou cognitives visant essentiellement à créer un acte de ré-achat. Le bruit ronflant d’une Harley-Davidson, le claquement sourd des portes d’une Audi, le versement d’un café Nespresso sont autant d’éléments travaillés par des designers sonores afin d’être caractéristiques de la marque. - Le marketing musical, quand à lui désigne dans la définition de Laurent Delassus « l’ensemble des techniques et des stratégies qui utilisent la musique comme outil d’attribution, d’évocation, de différenciation, de mémorisation et de promotion d’un produit ou d’une marque ».16 Ambiances musicales de points de vente, synchronisations publicitaires, jingles, signature sonores...Les domaines d’exploitation de l’ouïe dans le marketing sont ainsi larges et variés. Sur le lieu de vente, de multiples chaines privées de programmes musicaux sont apparues (c’est le cas de la fréquence Mousquetaires 16 - DELASSUS.L, La musique au service du marketing, Paris, 2012, Eyrolles,149 pages, p°6
  • 19. -19- pour Intermarché) et en addition à une musique visant à plaire au plus grand nombre, de nombreux spots promotionnels et jingles sont diffusés en permanence. Tous ces éléments contribuent à doter les enseignes de véritables identités sonores. Si l’ambiance musicale est ainsi soigneusement étudiée dans les points de vente, c’est parce que de nombreuses études ont démontré que la musique pouvait influencer le comportement des consommateurs et cela de manière inconsciente. Bien que l’on reviendra plus tard plus en détails sur cette partie, notons tout de même que la perception du temps passé sur le point de vente tout comme le type d’achats peuvent ainsi être influencés par la diffusion de musiques. Des tempos rapides peuvent presser le pas des consommateurs quand des musiques douces sont elles, plus favorables à la flânerie. De la musique classique peut influencer la nature des achats et les sommes dépensées... C- Enquête de terrain : Les ambiances de magasins, ressentis et attentes des consommateurs 1- Méthodologie Dans l’objectif de mieux connaître les attentes des consommateurs en matière d’atmosphères de points de vente, et tout particulièrement leur ressenti vis à vis de la musique utilisée à des fins commerciales, j’ai décidé de rencontrer directement les consommateurs et de les interroger en face à face au moyen d’un questionnaire. 3 espaces commerciaux différents contenant des enseignes habituées au marketing sonore comme Orchestra, Nature et Découvertes ou encore Tape à l’œil ont été choisis. Ces espaces étant les suivants : Odysseum, Polygone de Montpellier et la galerie marchande de Carrefour Saint-Clément de Rivière. Un panel de 100 individus « à chaud » a alors été interrogé en respectant des quotas en fonction de leur âge (4 tranches avec autant d’individus) ; les 18 à 29 ans, les 30 à 49 ans, les 50 à 64 ans et enfin les plus de 65 ans. Enfin, le choix des répondants s’est effectué de manière non-probabiliste.
  • 20. -20- 2- Résultats majeurs du questionnaire * *L’intégralité des résultat est à retrouver en Annexe 2. Age : de 18 à 29 ans  de 30 à 49 ans  de 50 à 64 ans  65 ans et plus Genre : M  F 1-) Quel(s) mode(s) de distribution privilégiez-vous lors de vos achats ? (2 réponses possibles) Site internet  Magasin  Vente par correspondance  Vente à domicile  Les magasins restent encore le mode de distribution préféré des consommateurs à hauteur de (94%) L’utilisation d’Internet pour acheter n’est néanmoins pas écarté totalement (28%) 2-) Parmi les critères suivants, auxquels êtes-vous le plus sensible dans un point de vente ? (2 réponses possibles) Luminosité  Senteurs  Couleurs  Musique  Écrans numériques  Packaging des produits  Publicité  Annonces sonores  De manière générale, les consommateurs sont presque autant sensibles à la luminosité des points de vente (42%) qu’à la musique qui y est diffusée (43%) Les senteurs arrivent en 3ème position avec un taux de (21%). Il est intéressant de constater qu’autant les Hommes que les Femmes sont sensibles à la musique et à la luminosité en premier lieu. Les individus de moins de 30 ans semblent en revanche être les plus sensibles à la musique (56%) quand à l’inverse, les individus de 65 ans et plus déclarent prêter d’avantage attention à la luminosité (61%). Cette dernière sensibilité restant globalement très importante pour les consommateurs. 3-) Selon vous, diriez-vous que l’atmosphère générale du lieu de vente (musique, couleurs, lumière, odeurs, etc...) exerce une influence sur les comportements d’achat ? Absolument  Plutôt oui  Pas vraiment  Pas du tout  51% des interrogés pensent que « Plutôt oui », l’atmosphère générale d’un lieu de vente a une influence sur les comportements d’achat, et particulièrement chez les 30-49 ans (59.3%.) Ce constat est plus fort encore chez les femmes (56% « plutôt oui » et 24% « Absolument » contre 46% pour les hommes « Plutôt oui » et 16% « Absolument ».) Les plus de 65 ans sont plus réservés et ne sont que 43.5% à penser « plutôt oui ». 39.1% pensent que cela n’influence « Pas vraiment » leurs comportements d’achat.
  • 21. -21- 4-) Selon vous, pensez-vous que la musique peut jouer un rôle dans votre processus d’achat ? Absolument  Plutôt oui  Pas vraiment  Pas du tout  Avec 35% de répondants « Plutôt oui » à la question, suivi de près par 27% de « Pas vraiment » et 21% de «Pas du tout », il est clair que la plupart des individus ne réalise pas vraiment l’influence que la musique peut avoir sur eux en magasin. Ainsi seulement, 14% des interrogés pensent assurément que la musique peut jouer un rôle dans le processus d’achat. 5-)Sur une échelle de 1 à 5, où 1 représente une notion d’agacement et 5 représente un véritable plaisir, Quel score attribuez-vous à la musique diffusée de manière générale en point de vente : 1 2 3 4 5 53% des interrogés sont neutres à l’égard de la musique diffusée sur les points de vente en attribuant la note de 3. Autant de personnes lui attribuent une note de 2 qu’une note de 4 (19% dans les deux cas) 6-) Si vous en avez, quelle(s) reproche(s) pourriez-vous faire de manière générale à la musique des points de vente ? Sinon, passez à la question 7 (2 réponses possibles) : Volume trop élevé  Tempo trop rapide  Tempo trop lent  Programmation inadaptée à l’enseigne  Musique trop standardisée  Autre... La plus grande reproche faite à la musique des points de vente est son volume sonore considérée par 53% d’interrogés trop élevée. De nombreuses critiques sont également émises à l’égard des playlists des points de vente jugées trop standardisées pour 37% des réponses. 7-) Êtes-vous favorable à la diffusion de musique sur le site internet des enseignes ? Oui  Non  Avec 70% de réponses négatives, les individus interrogés sont clairement défavorables à la diffusion de musique imposée sur le site internet des enseignes. 8-) De plus en plus de chanteurs s’associent aux marques dans la publicité, en avez- vous une image positive ? Absolument  Plutôt oui  Pas vraiment  Pas du tout  Avec seulement 16% d’avis positifs sur les associations de ce type, les opérations de
  • 22. -22- co branding et d’endorsement ne sont pas réellement appréciés par les interrogés. Dans l’opinion collective, les «artistes gagnent déjà suffisamment d’argent comme cela» ou «chacun doit rester à sa place». 9-) Pourriez-vous me citer des points de vente français qui vous semblent en avance ou originaux en termes d’ambiance sonore ? Du fait du très faible nombre de réponses à cette question, on peut en déduire que globalement les consommateurs n’ont pas vraiment à l’esprit d’enseignes soignant leur marketing sensoriel. Néanmoins si l’on s’intéresse aux répondants, nous notons en enseignes cités à plusieurs reprises : Natures et découvertes (6 fois), Majestic (3 fois) Bershka, General et Ikéa (2 fois). D’autres enseignes ont étés cités une fois c’est le cas de Desigual, Carrefour, E.Leclerc, Galeries Lafayette, Cultura, Sandro. 10-) Pour vous, une sortie shopping réussie c’est quand : Vous avez passé un agréable moment sans forcément dépenser Vous avez fait de bonnes affaires  68% privilégient tout de même lors de leurs sorties shopping le plaisir procuré sans forcément dépenser. Ce résultat montre bien l’importance de travailler les atmosphères de magasin. 3- Bilan Au vue des résultats de cette enquête terrain, quelques conclusions me semblent importantes à souligner : - Bien que près d’un interrogé sur deux pense que l’ambiance d’un magasin a une influence sur le comportement d’achat, quand on établit un focus sur la musique, les consommateurs s’avèrent être étonnement moins convaincus de l’efficacité de celle-ci. - Il n’en reste pas moins que la musique est un facteur d’ambiance apprécié par les consommateurs dans les magasins dès lors que son volume est correctement réglé sous peine d’agacer les clients. - Des programmations jugées trop standardisées d’où la nécessité pour les enseignes de mieux réfléchir à leur couleur musicale. - Des pratiques de marketing sensoriels trop peu évidentes dans l’esprit des consommateurs qui ne parviennent pas à citer spontanément des enseignes faisant des efforts en la matière.
  • 23. -23- II- La musique, «langue des émotions», une sollicitation sensorielle clé A- Un élément immatériel dont on ne peut se passer 1- Au cœur de l’activité de l’Homme Associés, le rythme et les notes forment les fondations de la musique définie par Rousseau comme étant « l’art de combiner les sons d’une manière agréable à l’oreille ». Le son fait partie intégrante de la vie humaine dès la naissance. En effet, les premiers rythmes du battement du coeur suivis par les notes criées de notre première respiration marquent d’une certaine manière le début de la bande son de notre vie... Une étude de 2007 a montré que la musique est le média dont les individus sont le moins disposés à vivre sans (devant la télé et l’internet)1 . La musique est un élément assez personnel car intimement connectée à nos émotions. Ne ressentons- nous pas des frissons lorsque une musique nous fait vibrer ou encore n’écoutons pas, dans un besoin de relaxation, une musique assez calme le soir en rentrant du travail ? Ainsi la musique est en premier lieu un important régulateur d’émotions. Elle accompagne de nombreux individus au quotidien et rythme les journées en fonction de l’humeur ou même dans l’accomplissement de certaines tâches. De la musique entraînante pour l’entraînement sportif ou au contraire de la musique classique pour la concentration de certaines personnes, nous sommes tous un peu, pour paraphraser Laurent Delassus, notre propre Dj ! 2 Des applications comme Moodagent ou Walkman existent même pour proposer à l’auditeur une sélection de chansons en fonction de l’humeur ou de l’émotion du moment suivant de nombreuses caractéristiques des morceaux (timbre, tempo, style...). Un second point fort de la musique est sa capacité à révéler la personnalité d’une personne et par extension, son identité. Souvent le style de musique écouté est synonyme de style vestimentaire. De ce fait, nos préférences et goûts musicaux communiquent aux autres nos valeurs et il est bien connu par exemple que les 1 - WILLIAMS.J, Millward Brown Brandamp Study, 2007, 2 - DELASSUS.L, La musique au service du marketing, Paris, 2012, Eyrolles,149 pages, p°7
  • 24. -24- afficionados de Hip-Hop aiment s’habiller en streetwear ou encore que les fans de Métal apprécient les vêtements sombres de style gothique. Or, que veulent les marques aujourd’hui si ce n’est parler et raconter qui elles sont ? Ainsi le style musical d’une campagne publicitaire peut être un élément déterminant des valeurs de l’annonceur. Il convient toutefois de ne pas oublier aujourd’hui que la manière de se procurer de la musique et le lieu d’écoute importent beaucoup dans la distinction de profils distinctifs. Avec l’étude Baromusic3 lancée sous l’initiative d’Havas Sport Entertainment et du CSA, le rapport des Français à la musique a ainsi permis de faire ressortir cinq grandes typologies ; • Les « Full Shuffle », cible majoritairement âgée de moins de 35 ans et qui incarne à elle seule l’évolution de la consommation musicale. Les 8 millions de Français qui composent cette catégorie sont friands de diversité et d’aléatoire (22 genres différents écoutés en moyenne). Ils se procurent la musique via tous les moyens possibles qu’ils soient digitaux ou physiques. • Les «Tontons Rockeurs» (9.3 millions de Français), ces individus qui ont pratiqué la musique ou la pratiquent encore et qui sont âgés de plus de 35 ans. Ils sont notamment habitués aux nouvelles technologie et savent écouter de la musique en streaming. • Les « Groupies », catégorie plutôt féminine et âgée de moins de 40 ans qui voue souvent aux chanteurs un grand culte et qui échangent beaucoup sur les réseaux sociaux au sujet de leur passion musicale (10,7 millions de Français). • Les «Nostalgiques» (12.7 millions de Français) ayant plus de 50 ans et qui écoutent des styles très précis tels que le jazz ou la musique classique. Ils ont pour habitude d’écouter la radio ou bien des chansons issues de chaînes HI-Fi • Les «Mute» ou les personnes qui ne sont pas intéressés par la musique et l’écoutent généralement de façon assez passive (10.2 millions). Chaque individu a donc un rapport particulier avec la musique et appartient à un certain « socio style musical ». Tout l’intérêt pour les marques réside donc dans la compréhension de ces communautés afin de mieux toucher leurs cibles. 2- Le langage commun des «digital natives» 3- Havas Sports Entertainement, « Baromusic : Quel music addict êtes-vous ? », juin 2013 4- SAP. A, Du Rock des Marques, Maximal, Paris, 2013, 173 pages, Préface
  • 25. -25- 5- WILLIAMS.J, Millward Brown Brandamp Study, 2007, 6- LE GOFF. D « Cultures en ligne » in Stratégies n°1700, 22 novembre 2012, p°12 7- SAP. A, Du Rock des Marques, Maximal, Paris, 2013, 173 pages, Préface Les marques ne visent-elles pas dans l’absolu à fédérer un maximum de personnes autours de leurs valeurs ? Justement, il se trouve que la musique est l’activité qui peut rassembler avec le sport plusieurs milliers d’individus à un même endroit. Dans la préface de l’ouvrage Du Rock des Marques4 d’Alexandre Sap, Jacques Séguéla disait d’ailleurs : « La musique est notre esperanto, la seule langue universelle qui ne nécessite ni traduction ni explication. Ce fil rouge qui unit l’âme des peuples du monde et traverse les générations ». Mais c’est tout particulièrement les jeunes générations qui sont touchées par la musique aujourd’hui à l’heure du digital. En effet, 80% des 16-24 ans écoutent tous les jours de la musique et 41% d’entre eux l’écoutent entre 1 et 2 heures quotidiennement.5 Les «digital natives» (que l’on peut traduire par « nés avec Internet ») sont ainsi des cibles particulièrement friantes de contenu musical et culturel en général. 87% des jeunes utilisent le Web pour du contenu culturel et à 94%, la musique est le bien culturel le plus prisé.6 Grâce à de nombreuses plates-formes de vidéos, streaming musical et de téléchargements MP3, le son coule dans les veines des jeunes que l’on dit « nés avec des écouteurs ». Plus que quiconque, les jeunes incarnent pour les annonceurs l’avenir d’un marketing musical ayant compris l’engagement social autour de la musique. Pour illustration, la manière de vivre un concert qui a fortement évolué au cours des dernières années. A ce sujet, Alexandre Sap décrit parfaitement la situation : « Les téléphones portables ont remplacé les briquets dans les salles de concert. Le public est un ensemble de friends sur Facebook qui publient, like et partagent ce moment d’émotion »7 Enfin, rappelons nous que dans notre enquête terrain précédemment analysée, les individus interrogés de moins de 30 ans étaient les plus sensibles à la musique (56%), ce qui confirme bien l’importance que va devoir revêtir le marketing musical dans quelques années vis à vis de ces populations. 3- Les effets spécifiques de la musique La musique est un véritable outil de communication. L’on peut en effet distinguer 3 fonctions ou effets principaux.
  • 26. -26- • Un effet affectif premièrement : elle nous touche, nous agace, réveille des souvenirs en nous car agit sur nos sens, notre émotionnel. En effet la musique ne laisse pas indifférent et le fait parfois d’avoir des frissons en est une manifestation évidente. Des études scientifiques en neurologie ont d’ailleurs démontré que la musique aurait principalement des effets sur la sécrétion de la dopamine, l’hormone du plaisir. Ainsi écouter de la musique peut provoquer d’un point de vue hormonal autant de plaisir que le sexe ou le chocolat pour certains ! Par ailleurs des expériences montrent aussi qu’il existe une vraie dépendance à la musique, analogue à celle de la drogue et déclenchant les mêmes effets biologiques relatifs au «manque».8 • Un effet cognitif, ensuite. Parce qu’elle véhicule un message et renvoie à tout un système d’informations comme on l’a vu, la musique remplit une certaine fonction didactique. Cela s’illustre tout particulièrement avec le « parler bébé », ce langage qu’adopte une mère vis à vis de son bébé et qui se caractérise par des exagérations mélodiques permettant à l’enfant, à défaut de comprendre les mots, de saisir les intentions de sa maman. Des phrases à tonalités montantes vont amener une forme d’enthousiasme et les descendantes une forme de consolation. Autre exemple, celui de l’apprentissage à l’école de l’alphabet en chansons afin de mieux retenir ses lettres. Il suffit d’écouter de la musique pour apprendre. Barbara Tillman voit d’ailleurs en la musique un langage universel que l’on «acquiert de façon tout aussi spontanée que l’on apprend à parler».9 • Enfin, un effet conatif. Et c’est cette facette de la musique qui nous intéressera tout particulièrement en termes de marketing. L’exemple de l’effet nommé «Château Lafitte»esttrèsparlant.Ils’agitdeserendrechezuncavisteavecl’intentiond’acheter un vin de pays pour finalement ressortir avec un grand cru tel qu’un «Château Lafitte», la musique y étant alors fortement pour quelque chose. En effet, à l’écoute du Mozart diffusé, le consommateur par associations (raffinement, qualité, culture) se dirige vers les grands vins. Une étude de 1998 menée par Adrian North, David Hargreaves et Jennifer McKendrick de l’Université de Leicester en Angleterre a en outre montré que l’origine de la musique d’ambiance influait dans les décisions d’achat 10 . Chez un caviste anglais, en alternant pendant plusieurs jours entre une 8- Apposcience, http://apposcience.blogspot.fr/2012/02/dopamine-et-musique.html, 2012 9- TILLMAN. B, La musique, un langage universel ?, In ″Pour la science″, novembre 2008, n° 373,159 p, pp. 124-131. 10- NORTH, « Music and on-hold waiting time ». The British Journal of Psychology 90, Automne 1999.
  • 27. -27- musique typée française et une typée allemande, on a constaté que le vin français s’était mieux vendu les jours de musique française que le vin allemand (rapport de 5 à 1) et le vin allemand se vendait mieux les jours de musique allemande que le vin français (rapport de 2 à 1).Pour conclure ce point, il me semble intéressant de relater un autre fait assez étonnant mis en lumière par North et son équipe. Dans une ferme sonorisée avec diffusion de musiques douces (style Beethoven), des vaches ont produit 0.73L de lait chacune en plus alors qu’au contraire, la diffusion de morceaux de variété au tempo plus rapide les avaient rendus moins productives. Cette expérience insolite menée sur des vaches prouve toutefois bien la nécessité de travailler l’atmosphère afin de favoriser le bien-être. La musique communique donc à trois niveaux : l’intellect (esprit), l’affect (l’émotion) et le sensationnel (sens et goût). En cela, elle est donc un facteur déterminant de l’argumentation publicitaire. B- La Musique et les Marques 1- Histoire de la musique dans la Communication Dans une précédente partie, on a vu que la musique était au coeur de l’activité de l’Homme. À présent nous allons tenter d’établir une petite rétrospective de son utilisation a des fins stratégiques avant qu’elle ne trouve les chemins de la publicité. L’histoire de l’utilisation de la musique par l’Homme va ainsi de pair avec l’histoire de la Communication. En effet, la musique a toujours été une forme d’interaction majeure entre les Hommes. Autour de feux, elle se manifestait sous la forme de percussions durant les cérémonies et fêtes des premiers Hommes. Plus tard, la musique était utilisée dans le monde de la religion à travers les louanges chantées par les fidèles et également dans le milieu sportif avec les chants de supporters. La musique est aussi très importante dans l’armée pour stimuler les soldats et les fédérer. À ce sujet, il est intéressant de noter qu’elle peut être utilisée à des fins nettement moins saines, en tant qu’instrument de torture, voire même en tant qu’arme de guerre. 11- CHYTROSCHEK Tristan, «La musique comme instrument de torture», in ARTE, 2010
  • 28. -28- Par exemple, afin d’affaiblir l’ennemi Irakien, les américains diffusaient toute la journée des morceaux de Heavy métal durant la bataille de Falloujah et contrôlaient ainsi l’environnement. A Guantanamo, le même style de musique à un volume excessif torturait les détenus et les rendait dans un état quasi végétatif...11 Dans l’antiquité déjà, Platon avait conscience du pouvoir de la musique et disait « Si tu veux contrôler un peuple, contrôle d’abord sa musique ». C’est dire si la musique est un puissant média et la politique l’a bien compris avec l’apparition des hymnes nationaux et chansons de propagande. Mais les prémices du marketing musical sont apparus dans les années 1930 en Amérique au même moment où les Hommes ont commencé à construire des gratte-ciels et travaillé l’ambiance des ascenseurs, des supermarchés et autres galeries commerciales. Ce concept de musique d’ambiance spécialement dédié à sonoriser les lieux publics se nomme Musak (appelé parfois « musique d’ascenseur »), du nom de la compagnie américaine diffusant ces programmations musicales visant à stimuler psychologiquement les auditeurs. Mais ce n’est qu’avec l’apparition de la radio que les liens entre publicité et musique se sont développés considérablement. Les régies radiophoniques alors chargées durant l’entre deux guerres de diffuser des messages commerciaux, proposaient parfois des supports musicaux aux annonces afin de limiter l’ennui. Charles Trénet a notamment été compositeur de nombreuses chansons publicitaires pour le compte de Marcel Bleustein-Blanchet (fondateur de PUBLICIS) et propriétaire en ce temps de la régie de Radio-Cité. C’est à partir des années 1970, que des maisons de productions se spécialisent sur la réalisation publicitaire sonore et audiovisuelle suite à l’autorisation de la diffusion de publicité de marque à la télévision française (1968).11 De nombreux compositeurs comme Richard Gotainer, dont le travail de production musicale pour la publicité est assez largement reconnu (Saupiquet, Vittel, Banga ou le très célèbre thème de Belle des Champs), Michel Berger (orangina) ou encore Serge Gainsbourg (Gini, Pentex) ont ainsi à la demande des maisons de productions contribué à construire la liaison entre la musique et la publicité. En 1981, MTV, la première chaîne dédiée à la musique marque la naissance des vidéo-clips musicaux révolutionnant ainsi la Pop-music. Quelques années plus tard, Michael Jackson changera les paroles de son tube « thriller » pour le compte de 12- MAGIS.C, http://www.inaglobal.fr/musique/article/musique-et-publicite-les-enjeux-de-la-synchronisation, jan 2014
  • 29. -29- Pepsi et incarnera la première association évidente de l’industrie du disque et de la publicité. 2 - Les formes de communication musicale de la marque • La synchronisation La synchronisation est le fait de placer de la musique sur certaines images afin de les habiller et rendre le message plus signifiant. Ainsi, on distingue la musique de commande (spécialement composée pour le spot) de la musique d’illustration (souvent instrumentale et composée de manière générique selon certains thèmes) et enfin de la musique issue d’un répertoire préexistant comme ce fut le cas avec le titre « A New soul » de la chanteuse Yael Naim illustrant les spots publicitaires d’ Apple . Le superviseur musical chargé d’assurer ce mariage a ainsi différentes possibilités qui s’offrent à lui en fonction du brief et du budget de l’annonceur. Notons que souvent, l’interrogation pour les marques consiste au choix d’une musique connue ou au contraire inconnue. Dès qu’elles le peuvent, les marques optent pour la première solution qui apportera à leur image une valeur ajoutée bien plus importante qu’une musique originale mais dans tous les cas, il convient pour elles ou le superviseur musical de réfléchir à la tranche d’âge visée, la couleur musicale du produit, à l’univers de l’artiste etc. Pourtant force est de constater que le son est très souvent choisi en phase finale d’un projet de communication sans réelle stratégie et réflexion derrière. Ce qui explique peut être que de nombreuses bandes sons se ressemblent du fait de briefs semblables et stéréotypés de la part des marques. Charles-Henri de Pierrefeu du département Synchronisation Universal music déplore ainsi le manque d’audace de la part des annonceurs qui se réfugient dans des sonorités Pop-Rock et Folk, sonorités qui à son sens ne laissent pas vraiment de « traces », « de reconnaissance » et s’avèrent facilement interchangeables d’une marque à l’autre.13 Pour en revenir à l’importance accordée à la notoriété d’un artiste ou d’une oeuvre, élément déterminant du prix, il est intéressant de faire remarquer que de nos jours les artistes sont beaucoup plus enclins à accepter la publicité pour toucher leur public. Cela s’explique facilement par les difficultés de 13- GUILLOIS Mickaël, « Musique et publicité. La synchro en question(s) », Dailymotion, 2009 14- MAGIS.C, http://www.inaglobal.fr/musique/article/musique-et-publicite-les-enjeux-de-la-synchronisation, jan 2014
  • 30. -30- l’industrie du disque mais également par les programmations trop standardisées des radios. L’artiste Moby avait ainsi assuré l’exposition de son album Play et de ses 18 titres en 1999 exclusivement grâce à la synchronisation sur des supports audiovisuels (publicité, films, séries TV).14 Aujourd’hui, en permettant aux auditeurs de tagger une musique lors d’un passage pub, l’application Shazam rend l’expérience consommateur vis à vis de la bande sonore encore plus immersive notamment par le biais des réseaux sociaux. Ainsi, un spot peut jouir de la force de l’identification audio grâce à un hit qu’il aura su s’attribuer et peut même prolonger l’expérience en proposant des interactions en direct avec les spectateurs (voir des scènes inédites, remporter des cadeaux flash, participer à des jeux concours...). Sfr avait ainsi lancé avec Shazam et l’artiste « Maï Lan » une campagne interactive où en taggant la musique du spot, les utilisateurs basculaient via leur mobile dans le concert live de l’artiste en direct du studio SFR à Paris.15 Shazam s’avère ainsi un formidable moyen pour valoriser les synchronisations mises en place. • Le logo musical ou jingle et le slogan musical Le jingle prend la forme d’une mélodie d’une durée maximale de dix secondes. Il est la signature d’une marque et joue le même rôle que le logo visuel, il vise à ce que la marque soit automatiquement reconnue puis mémorisée. D’ailleurs, les logos visuel et sonore sont souvent exposés ensemble à la fin d’un spot publicitaire. Plus encore, une signature sonore doit être porteuse de valeurs. Parmi les plus connus citons celui de McDonald’s, de la SNCF, Samsung, La Poste, EDF, Renault etc. Pour arriver à un niveau de reconnaissance de la marque à travers son jingle, il faut néanmoins des mois voire des années de répétition publicitaire. Pour accélérer le processus, une entreprise britannique de télécommunication du nom de Batelco a ainsi eu l’idée de demander à des musiciens d’arranger sa signature en version longue Hip-Hop, House, Rock et a par la suite envoyé un CD contenant ces différentes versions à de nombreux DJ de discothèques. Sans le savoir, de nombreuses personnes ont ainsi dansé sur la signature sonore de Batelco qui a même mis plus tard en téléchargement 15- DE BULLE. V, « De la synchro à shazam » , in http://aperipub.fr/, oct 2012 16- « L’évènement, L’identité sonore des marques », in Culture Pub, mai 2011 17- VOIX OFFONLINE, « Les frères Costa jingle chantés », www.youtube.com/watch?v=hnYTGIG5eYQ, juillet 2012
  • 31. -31- gratuit l’ensemble du CD apprécié par les cibles.16 L’adaptation musicale du logo sonore est ainsi un moyen efficace de se faire connaître auprès des cibles. Les jingles peuvent également être chantés et c’est généralement le cas dans la radio où de nombreuses stations disposent de leur propre signature, révélatrice de leur programmation tels que NRJ, Chérie FM, Nostalgie, jingles d’ailleurs tous trois composés par les frères Costa.17 Le slogan musical est quant à lui la mise en musique du slogan textuel. Il remplit les mêmes objectifs que le jingle en termes de mémorisation et de reconnaissance. Le « zéro tracas, zéro bla bla, MMA ! », « Playmobil, en avant les histoires ! » ou encore « Malin comme Maped ! » sont autant d’exemples célèbres. Le slogan musical peut ainsi être adapté composé spécifiquement pour la marque ou adapté de chansons connues ( La vache qui rit reprend « 100% VIP » de Philippe Katerine entre autres). • L’endorsement ou co-branding Le mot endorsement provient du verbe anglais to endorse signifiant « appuyer », « approuver ». L’endorsement est l’une des pratiques de sponsoring les plus courantes dans le domaine de la musique et comme on l’a vu avec l’opération entre Michael Jackson et Pepsi, ce type d’alliance ne date pas d’aujourd’hui. Récemment, David Guetta a prêté son image et son morceau «The alphabeat » pour le compte de la Renault Twizy. Cette opération avait ainsi vocation à donner une image jeune, branchée et dynamique pour Renault et sa nouvelle voiture. La collaboration ne s’est pas limité à une seule participation dans un spot télévisé car dans le clip de Ludacris « Rest on my Life » avec Usher et David Guetta, ce dernier a mis en mouvement la Twizy. Un autre cas réussi reste sans doute le choix de David Bowie en tant qu’égérie pour la marque Louis Vuitton. Surfant sur le coup de communication provoqué par la sortie inattendue du nouvel album de Bowie (en janvier 2013), la marque, pour le nouveau volet de sa campagne « Invitation au voyage » a choisi la star pour interpréter son titre «I’d rather be high» au clavecin, dans une vidéo mettant en scène des personnages masqués évoluant dans un bal vénitien. Les résultats ont été à la hauteur : 13 millions de vues sur Youtube et 17% de croissance des produits exposés 10 jours après son lancement.18 18- LENGRAND Vanessa, « La relation Marques - Musique », in http://musicspottin.com/2014/01/07/bilan-2013-sil-ne- fallait-en-retenir-quun-seul/ janv 2014
  • 32. -32- Si le principe n’est pas nouveau, il s’est tout de même grandement développé ces dernières années suite aux difficultés et au renouveau de l’industrie musicale. Rappelons toutes fois que notre panel interrogé dans le cadre de l’enquête terrain n’était pas des plus favorables à ce genre d’associations Marques-Artistes. • L’ambiance musicale Relative au marketing sensoriel, l’ambiance musicale est généralement une sélection de titres retenues pour véhiculer une atmosphère, des émotions, de l’affect. Il y a de nombreux endroits chics parisiens qui utilisent ce que l’on appelle du « Lounge » et certaines ambiances de lieux peuvent même devenir cultes et se retrouvées compilées dans des CD premium (Cafe Del Mar avec plus de 9 milions d’albums vendus, Hôtel Costes, le Buddha Bar, le Kong). Cet engouement exceptionnel se fonde sur la notoriété des lieux concernés. Par ailleurs, certaines enseignes n’hésitent également pas à avoir leur DJ maison , ambassadeur de l’esprit du lieu et mixant exclusivement pour elles. 3- La construction d’une identité sonore cohérente Un annonceur dispose ainsi de différentes manières d’utiliser la musique au sein de sa communication. Pour plus d’efficacité et afin de favoriser au mieux la reconnaissance et le positionnement de la marque, il convient néanmoins aux annonceurs de réfléchir à leur couleur sonore et ainsi adopter une « ligne musicale » pertinente et cohérente dans laquelle les cibles pourront se retrouver. En effet, 80% des marques sont schizophrènes19 et d’un support à l’autre, le style musical peut varier.... Les plates-formes sur lesquelles les marques peuvent utiliser la musique sont les suivantes : - Les spots télévisés - Les spots radio - La musique sur les pages internet - L’attente téléphonique - Le logo sonore 19 - MORVAN. XV, « L’identité sonore peine à se faire entendre » in Stratégies n°1752, jan 2014, p°34
  • 33. -33- - Les opérations de parrainage avec des artistes (endorsement, co-branding) - Les événements musicaux (festivals, concerts...) - Les produits musicaux tels que les CD, compilations, sonneries de portables...) - La musique dans les espaces physiques de la marque (magasins, bureaux, accueils...) Musicalement parlant, une marque dispose donc de multiples points de contact pour communiquer avec sa cible. Mais qu’est ce que l’identité sonore au juste ? Terme inventé il y’a une vingtaine d’années par Michaël Boumendil, fondateur de l’agence Sixième son (leader mondial de la discipline), l’identité sonore ou musicale (selon qu’il y ait de la musique ou simplement des sonorités non mélodiques) est une composante du territoire de marque et s’intègre dans l’identité de celle-ci. L’identité sonore c’est donc l’ensemble des éléments sonores qui vont permettre à une marque de communiquer avec du sens et de promouvoir son offre de manière plus impactante. Elle est aussi un certain parti pris créatif et donc le style d’une marque. Ainsi, comme a pu le dire Nicolas Duperon, fondateur associé de Sixième son, « Un jingle, une signature sonore est incontournable pour une marque mais pas suffisante pour créer une identité sonore ». Le processus de création d’une identité musicale doit être basé sur l’ADN de la marque à travers ses attributs physiques, fonctionnels et symboliques mais aussi en fonction des attentes du public et des usages et codes du secteur. C’est en amont de la stratégie que doit être associée à l’identité visuelle une musique ou une sonorité qui renforcera la personnalité de la marque. Pour cela, tous les éléments constitutifs de la marque ainsi que ses dimensions doivent faire l’objet d’une réflexion approfondie en tenant compte des connotations renvoyées par l’utilisation d’une certaine hauteur, d’un certain timbre musical, d’un certain arrangement, d’un certain style musical etc. Au niveau du timbre des morceaux par exemple, certains instruments comme le violon véhiculeront des valeurs de type « aérien », « calme », «majestueux » quand le piano lui sera davantage perçu comme « zen », « select »... La musique permet ainsi d’illustrer des valeurs de marque et de soutenir les autres éléments de communication. Elle permet aussi pour le consommateur de favoriser la reconnaissance d’une identité de marque bien précise que ce soit dans un spot publicitaire voire même sur un point de vente. 20 - DELASSUS.L, La musique au service du marketing, Paris, 2012, Eyrolles,149 pages, p°83
  • 34. -34- Alexandre Delassus,sous la forme d’un tableau, présente les différentes évocations possibles de principales caractéristiques musicales : 20 Caractéristiques Évocations Dimension temporelle Rythme Régulier, sans syncopes Régularité, stabilité, continuité, sécurité, confort Irrégulier, syncopé Dynamisme, mouvement, démarcation Phrasé legato Fluidité, espace, expressivité Staccato Dynamisme, mouvement, réactivité Tempo Lent Solenité, calme, confort Rapide Dynamisme, mouvement, réactivité Durée Courte (5-10 sec.) Efficacité, simplicité Longue (10 sec.) Complexité, richesse Dimension harmonique Mode Majeur Positivité, optimisme Mineur Solennité Accords Pauvres Simplicité Riches : enrichis majeurs altérés mineurs Envergure Direction mélodique Ascendante Dynamisme, positivité, am- bition, progression, conquête Descendante Tradition, ancrage Mélodie Présente Féminité Absente Masculinité Dimension Instrumentale Voix chantée Masculine Masculinité, séduction Féminine Féminité, sensualité Sans paroles Légèreté Avec texte Le sens est crée par les pa- roles Instrumentation Instrumentation Technicité, modernité Synthétique Naturel, chaleur, authenticité, humanité Arrangement Minimaliste Technicité, modernité Complexe Sophistication
  • 35. -35- Caractéristiques Évocations Dimension temporelle Timbre + interpréta- tion Humanité 4- Une identité sonore réussie : le cas SNCF Une succession de 4 notes reconnaissable d’entre mille caractérise l’identité sonore de la SNCF. En 2005, le transporteur ferroviaire suite à un nouveau positionnement décide de se doter d’une véritable couleur sonore et fait appel aux services de l’agence Sixième son . Si le résultat aujourd’hui reste encore très efficace et pertinent, c’est sans doute car la réflexion sur la couleur musicale est intervenue en même temps que celle qui a conduit à une nouvelle identité graphique et plus largement à une redéfinition du territoire de marque. L’agence TBWA pour la stratégie de communication, Carré Noir pour le design graphique et « Sixième son » ont ainsi travaillé ensemble sur ce projet pour donner à la SNCF une nouvelle identité et lui permettre de se positionner clairement sur son marché. L’identité sonore de la SNCF lancé en mars 2005 affiche en effet une volonté claire de se distinguer des autres acteurs du transport en engageant la marque dans une univers plus riche, plus émotionnel. C’est un nouveau vocabulaire avec de nouveaux codes qui est alors inventé afin de provoquer une rupture profonde. L’idée étant d’adoucir au mieux cet univers assez brut, ces gares au bruit métallique permanent qui se mélange au brouhaha des foules de voyageurs. Avec les 4 notes imaginées par l’équipe de Michaël Boumendil, la SNCF gagne « en perception de service et en humanité »* pour reprendre les mots de la directrice de la marque et du design, Laurence Béhar. Le sens donné au transporteur se veut rempli de présence humaine, de bienveillance, de chaleur, de mouvement et de voyage. Notions bien évidemment favorables dans les guichets de vente de billets... Mais la SNCF ne s’est pas arrêtée à la simple conception d’un jingle sonore. Les 4 notes ont également été déclinées et adaptées à la télévision, à la radio en téléphonie et dans l’événementiel pour mieux être ancrées dans l’esprit des voyageurs comme des non voyageurs. Aujourd’hui tout le monde est capable de * BOUMENDIL..M, « La création de l’identité sonore de la SNCF racontée par son agence », in Marketing professionnel.fr, mai 2009
  • 36. -36- chantonner ces notes. En octobre 2010, Sixième Son s’est vu décerner le « Grand Prix Stratégies du Design » pour le programme d’identité sonore de la SNCF. Récemment, la compagnie est allée plus loin encore dans la démarche d’utilisation de musique en demandant aux utilisateurs des lignes A, J et L du Transilien de choisir et voter pour l’ambiance sonore de leur gare parmi une sélection de musiques classiques (de Chopin à Mozart en passant par Vivaldi, Lully...) visant à rendre les gares plus sereines et plus agréables. Mais aussi, de manière un peu plus officieuse, pour combattre le squat et décourager certaines catégories de personnes de rester trop longtemps sur les lieux... 4- Le baromètre des identités musicales des marques (BIMM) La plupart des marques ont conscience que la musique peut parfaitement s’intégrer au sein de leur stratégie. 97% des marqueteurs pensent ainsi que la musique peut renforcer leur marque et 74% pensent qu’elle deviendra de plus en plus importante dans le futur. Pourtant, alors qu’il émerge de nombreuses agences de design sonore, un peu moins de 6 entreprises sur 10 n’ont pas évalué leur couleur sonore et 8 entreprises sur 10 n’ont pas de jingle. Ce constat quelque peu paradoxal est celui présenté par Jakob Lusensky, PDG de Heartbeats International. L’enquête qu’il a conduit amenait à la conclusion que les annonceurs aimaient la musique mais ne savaient pas réellement comment l’intégrer et en tirer profit.20 En ce qui concerne les annonceurs français faisant déjà confiance en la musique, l’agence AtooMedia et Hyperworld Marketing ont lancé en 2008 le premier baromètre des identités musicales des marques (BIMM) afin de permettre à ces entreprises de mesurer pour leur marque et dans leur secteur d’activité : la reconnaissance de leur identité musicale par les consommateurs, l’agrément ou l’éventuelle saturation que celle-ci peut générer et en dernier lieu, l’attribution à leur marque de leur identité musicale. Pour sa première vague de test, 30 identités musicales de marques réparties dans divers secteurs d’activité et représentant différentes stratégies avaient été ciblés. En voici des annonceurs étudiés : 118 218, Aéroports de Paris,Air France,Alice,Auchan, Banque Populaire, Bouygues Télécom, 20 - Heartbeats International, « Sound like branding », Sweeden, 2011
  • 37. -37- Carte Noire, CNP, Coca Cola, Crédit Mutuel, Dim, Evian, France Télécom, etc. Les résultats avaient alors permis de mettre en évidence certains très bon élèves comme DIM par exemple avec une notoriété de 99% sur l’ensemble de la population testée, un agrément qui résiste bien à la saturation malgré une utilisation continue du même thème depuis 1970, et des scores d’attribution assistée (95%), spontanée (86%) et prouvée (80%) sans égal. De manière générale, ce baromètre a révélé que les niveaux de notoriété des signatures musicales étaient plutôt bons tout comme les niveaux de saturation qui étaient globalement maîtrisés sauf pour le secteur Télécom qui faisait office de mauvais élève. Les scores d’attribution de l’identité musicale à la marque étaient eux assez variables d’un secteur à un autre. L’énergie ayant le plus fort coefficient de dispersion avec des identités musicales mal attribuées. La meilleure attribution était celle du secteur bancaire. Enfin, selon le BIMM, les moins de 35 ans étaient les plus réceptifs à l’identité musicale de marque, (ce qui coïncide également avec les résultats de l’enquête mené dans le cadre de ce mémoire) mais avaient tout de même davantage la culture de zapping et étaient ceux pouvant saturer le plus rapidement.21 C- L’identité sonore à travers le point de vente 1- La musique sur le point de vente, un pouvoir avéré Nous avons vu au cours d’une précédente partie que la musique entrainait 3 types de réaction : sur le plan conatif, cognitif et affectif. Et, au même titre que l’ambiance physique (décoration, luminosité, signalétique, vendeurs...) l’ambiance musicale participe à la sensation d’un point de vente en jouant un rôle essentiel dans la perception du territoire de la marque. De nombreuses recherches basées sur l’importance de l’ambiance musicale d’un point de vente ont ainsi été menées et ont permis de recenser différents effets sur les consommateurs en fonction de variables que sont le tempo, le volume, le style de musique et la notoriété de cette dernière. En voici les principaux résultats compilés par Sophie Rieunier dans sa thèse sur le sujet22 . 21 - ATOOMEDIA, http://bimm.atoomedia.com/resultats_bimm_pub.html, 2008 22 - RIEUNIER.S, L’influence de la musique d’ambiance sur le comportement des consommateurs sur le lieu de vente, 2000, Paris 9
  • 38. -38- • Influence de la musique sur les réactions conatives - Le temps passé en magasin Lorsque l’on diffuse une musique avec un faible volume (Smith et Curnow, 1966) et lorsque celle-ci est appréciée par la clientèle (Yalch et Spangenberg, 1993 ; Herrington, 1993), le client passe plus de temps sur le point de vente. Une seconde influence est celle provoquée par le tempo entraînant souvent des réactions corporelles sur les consommateurs. Le tempo agirait ainsi à la fois sur la vitesse de déplacement (Milliman, 1982) et sur la vitesse de consommation. En d’autres termes, quand les affaires sont assez calmes, les magasins peuvent retenir les clients en jouant de la musique assez lente qui les encouragera à regarder plus attentivement les produits et, à l’inverse, la musique rapide sera plutôt utilisée pour créer ou renforcer une activité et ainsi être en accord avec la vitesse du flot. Les clients d’un restaurant consommeraient plus vite quand le tempo de la musique diffusée est rapide (Roballey et alii, 1985, McElrea et Standing, 1992). - Les achats et les dépenses Déjà brièvement abordé avec l’effet du « Château Lafitte » ou encore « l’expérience des vins français et allemands », le style de musique aurait une influence sur le type d’achat réalisé par les clients et donc parfois sur la valeur du panier. Dans les supermarchés, il a été montré que les clients achetaient plus d’articles et dépensaient plus avec de la musique de variété par exemple (Sibéril, 1994). En outre, des musiques entrainantes type « boite de nuit » marquée par un son de batterie et de basse dans un magasin de vêtements pourraient conduire les filles à s’acheter des hauts décolletés et vêtements de sortie...Justement, en parlant de « boites », il a été observé que les clients d’un bar de nuit consommaient d’avantage lorsque le volume de la musique était augmentée. Deux hypothèses ont alors été avancées : Le volume sonore stimule d’avantage les consommateurs en les incitant à boire plus rapidement et donc à plus commander. La deuxième elle consiste à penser que les échanges sociaux sont diminués par la musique ayant un fort volume et donc à défaut de parler, les clients consomment plus.23 23- France Presse, « La musique forte dans les bars fait boire davantage », La Presse.CA, juillet 2008
  • 39. -39- • Influence de la musique sur les réactions cognitives - La perception du magasin : Lorsque l’on rentre pour la première fois dans un magasin, on se fait rapidement une idée de l’identité et de la personnalité de l’enseigne au travers de son atmosphère et des stimuli sensoriels qu’elle exerce sur nous. La musique d’ambiance est une des composantes principales dans ce processus d’identification et peut influencer la perception de l’image globale du magasin. Les musiques Hip-Hop de certains magasins spécialisés dans le street wear participent à segmenter d’avantage la clientèle de même qu’un magasin diffusant de la musique de variété peut être perçu comme vendant des produits bas de gamme (Yalch et Spangenberg, 1990). - La perception du temps d’attente et du temps passé : Une musique plaisante permettrait d’améliorer la perception des consommateurs du temps d’attente ou de réduire le temps passé (Stratton, 1992, Hui et alii, 1997). C’est comme on l’a vu une des premières raisons historiques de son utilisation (musique d’ascenseur, salles d’attentes...). L’humeur ici conditionne beaucoup la perception du temps où celui-ci aura tendance à passer plus rapidement avec de la musique comblant un silence pesant. Cependant, encore faut-il gérer convenablement le volume car s’il est élevé, il peut devenir alors dérangeant, influencer l’humeur et donc le temps d’attente perçu sera augmenté (Cameron, 1996). Le côté dérangeant d’un volume sonore trop fort était d’ailleurs le premier reproche de notre enquête terrain... • Influence de la musique sur les réactions affectives - Le plaisir et l’humeur La musique en tant que vecteur fort d’émotions affecte le plaisir ressenti ainsi que notre humeur. Il semble évident ici que la diffusion d’une musique triste ne va pas favoriser la gaité et le plaisir des clients sur un point de vente. A l’inverse, le
  • 40. -40- fait de diffuser une musique joyeuse aura plus de chance d’égayer l’humeur des consommateurs (Alpert et Alpert, 1988) L’ambiancemusicalepeutainsiêtreuncritèredefidélisationsielleestparticulièrement apprécié par la clientèle. L’enseigne américaine Abercrombie Fitch a d’ailleurs poussé la démarche assez loin en concevant ses magasins comme des boites de nuits. La musique diffusée est une musique de club destinée aux jeunes qui apprécient pour la majorité cette ambiance. De véritables files d’attente sont même organisées avec portier à l’issue pour mieux renforcer le positionnement de la marque. On assiste ainsi aujourd’hui de plus en plus au passage de l’utilisation d’une musique d’ambiance visant à masquer le silence (background) à une musique d’ambiance qui s’intègre pleinement dans la stratégie d’image et de marketing de la marque (foreground). Au vue des principaux résultats décrits ci-dessus, cette pratique semble tout à fait pertinente... 2- De la musique d’ambiance passive à la musique qui transmet des messages Depuis quelques années, à forces de recherches et d’expérimentations, la musique diffusée sur les points de vente connaît de nombreuses évolutions. Passés de la simple musique d’ambiance type « Musak » dont la fonction se résumait principalement à combler le silence et agrémenter le lieu, à la diffusion de morceaux bien ciblés ayant une finalité marketing, un nombre croissant d’enseignes aujourd’hui semble avoir compris le potentiel de la musique et n’hésitent pas à investir pour développer la manière de la diffuser en magasin. • Les Radios Personnalisées ou Radios Instore Pour une enseigne, se doter d’une radio sur mesure avec des playlists adaptés à la clientèle, des jingles rappelant la marque et sa promesse ainsi que des messages publicitaires propres au magasin, c’est avant tout affirmer son identité et contrôler sa communication. Gérer sois même (ou faire gérer sa radio par des agences externes comme Moodmedia, Radioshop...) donne en effet beaucoup de souplesse à une
  • 41. -41- enseigne lui permettant d’adapter notamment son ambiance sonore à tout moment de la journée et en fonction de ses promotions en cours. Les messages commerciaux qui peuvent être diffusés dans ces radios s’avèrent d’ailleurs assez efficaces. Il a été observé dans un magasin de prêt-à-porter que la mise en avant dans un message promotionnel d’une remise supérieur à 30% sur un article bien précis entrainait une augmentation de 4 à 6 % du CA.24 Avoir sa radio permet également d’éviter la diffusion de messages commerciaux des concurrents comme cela peut-être le cas pour une enseigne utilisant une radio généraliste (NRJ, Skyrock, Fun Radio, RTL...). De nombreuses marques ont déjà adopté le système comme Gifi, Mr.Bricolage, Citroën, Subway... Pour aller encore plus loin dans la démarche, les enseignes peuvent également disposer de véritables radios animées et ainsi insuffler un maximum de vie à la manifestation de leur identité sonore. En plus de titres en rapport avec la programmation du brief, de jingles et de messages, un animateur peut ainsi, au même titre que sur une radio générique, apporter du contenu par le biais de conseils s’intégrant dans l’univers de la marque. • Les Douches sonores Également appelée « laser sonore », une douche sonore est « un faisceau acoustique directionnel » qui permet de créer du son uniquement audible dans une zone délimité sans polluer l’ensemble de l’espace. Ainsi, selon la section du magasin et le rayon où l’on se trouve, il est possible d’obtenir des informations propres à une gamme ou un produit. Il est également possible avec des contenus sonores plus élaborés de déclencher des accélérations du pas du client, des ralentissements etc. Les avantages de cette technologie sont multiples : D’unepart,unedouchesonorepermetd’attirerl’attentionmaximaleduconsommateur sur les produits (linéaires, corners présents sur les lieux de vente) avec la mise en place d’un zoning. D’autre part, il est possible de créer de véritables « hologrammes sonores » qui vont donner la parole directement aux produits, affiches, PLV grâce à la réflexion du son sur ces items. L’expérience client est ainsi favorisée au mieux grâce à ce dispositif récemment permis du fait des progrés technologiques. Le plus étonnant 24- Chiffres donnés par THIRI Stanislas, directeur de l’agence en identité sonore RADIOSHOP.
  • 42. -42- reste sans doûte le transducteur ou un petit appareil servant à transformer une vitrine ou d’un mobilier commercial en véritable haut-parleur invisible. Cela peut se présenter comme un bon moyen par exemple d’attirer des personnes passant devant une vitrine de magasin qui émettrait du son et qui les inciterait à se rendre à l’intérieur. L’enseigne Peter Jones à Londres qui a testé le dispositif a observé grâce à une caméra une augmentation de coup de regard sur la vitrine de 58 % et une augmentation de 49 % de personnes s’arrêtant devant la vitrine pour y regarder les produits exposés.25 3- La musique et le point de vente virtuel A l’heure du digital, il nous est impossible de ne pas aborder la question d’Internet et de la musique. Intimement liés car le premier ayant démocratisé le second comme jamais, les enseignes ont très rapidement souhaité retranscrire leur ambiance sonore sur leur sites Web. Ces derniers se posent en effet comme de nouvelles interfaces entre l’entreprise et ses clients, un environnement virtuel permettant la visualisation des produits en trois dimensions, la visualisation de films ou d’animations et bien sûr l’écoute de musique… Mais les effets de la musique observés sur un point de vente physique sont-ils les mêmes que dans la sphère Internet ? A en croire notre enquête terrain, la diffusion de musique sur les sites commerciaux semble en tous cas massivement rejetée par les individus (70% de réponses négatives). Trop souvent en effet, le son intervient sur Internet de manière intempestive et incontrôlable du fait notamment de publicités sonores voire de vidéos s’ouvrant toutes seules au cours de la navigation. Cela peut devenir très gênant et entrainer une saturation de la musique sur Internet lorsqu’elle n’est pas souhaitée. La solution réside peut-être en la possibilité de donner le choix de la musique à écouter à l’internaute et en personnalisant au maximum son expérience. Il est en effet possible pour les enseignes de se faire créer des Webradios disponibles en ligne 24 heures sur 24 et diffusant les messages marketing au cours d’un programme musical sur mesure, ou encore d’impliquer l’internaute en lui donnant la possibilité de voter pour un titre afin qu’il soit diffusé dans la webradio ou en instore. Pour en revenir aux effets de la musique dans le contexte de l’internet, il convient de préciser tout d’abord que de nombreuses spécificités techniques sont liées à son 25 - SCULLY.K, Visual Merchandising Manager, Peter Jones, London, http://www.feonic.com/retail-sector.
  • 43. -43- utilisation.Par exemple, l’influence du volume (vue comme active sur en situation de point de vente) ne peut-être prise en compte du fait de la possibilité pour l’internaute de baisser celui-ci comme bon lui semble. Par ailleurs, si l’utilisateur écoute une autre musique sur l’ordinateur, il ne sera pas du tout enclin à écouter la musique de l’enseigne. En revanche si toutes les conditions techniques sont favorables a l’écoute de la musique sur un site Web Annonceur, alors la musique ne perd pas de « son pouvoir » et peut toujours agir sur les fameuses fonctions cognitives, conatives et affectives de l’internaute.26 26 - GALLAN, JP, « Impact de la musique sur le consommateur en ligne »,Thèse de Doctorat, Toulouse, 2003
  • 44. -44- III- Construire avec la musique le point de vente de demain A- L’expérience musicale dans les points de vente 1- Élaborer sa stratégie musicale Ace stade du développement, maintenant que nous connaissons l’importance de la sollicitation sensorielle induite par la musique et son influence sur les consommateurs, nous allons réfléchir ensemble à quelles recommandations stratégiques nous pourrions faire à une enseigne qui souhaiterait développer une stratégie musicale à son image. • Se poser les bonnes questions En premier lieu, pour concevoir sa future stratégie de marketing musical, il convient de bien définir les objectifs. L’entreprise cherche elle à accroître sa notoriété ? Accentuer le positionnement de sa marque ? Attirer l’attention du consommateur ? S’adresser à une nouvelle génération ? L’utilisation de la musique doit se concevoir dans un réel cadre statégique au même titre que certains moyens préconisés dans un projet de communication. En fonction des objectifs visés, la marque jouera alors sur tel ou tel point de contact (signature sonore et slogan sonore pour de la reconnaissance, synchronisation publicitaire et co-branding pour la construction d’une image etc). Une fois les buts recherchés explicités, connaître sa cible, ses tendances, son appartenance communautaire comme ses goûts musicaux s’avère par la suite très important car il est nécessaire de proposer à son public une expérience qui sera en adéquation avec ses valeurs. Il peut à ce moment là être judicieux par exemple d’utiliser les grandes typologies de consommateurs de l’étude Baromusic réalisée par Havas. L’âge influençant pas mal la manière de se procurer et d’écouter la musique. • Étudier : Faire l’audit de la marque Il est primordial de prendre soin de maintenir la cohérence avec l’ensemble des éléments qui constituent l’identité de la marque. Ainsi, les supports visuels doivent être correctement étudiés afin d’obtenir des
  • 45. -45- correspondances entre la charte graphique et sonore. Rappelons que le bleu évoque de l’apaisement et de la réflexion, le rouge du dynamisme etc. En parallèle, il faut Benchmarker. L’environnement concurrentiel et le marché dans lequel évolue la marque doivent être scrupuleusement oscultés. En observant la stratégiesonoredesconcurrents,l’onpourranotammentserendrecomptedelamaturité du secteur vis-à-vis du design sonore et notamment élaborer son positionnement. Deux choix restent alors possibles : s’aligner sur les statégies sonores concurrentes ou bien se démarquer en osant prendre des risques. • Choisir une stratégie musicale appropriée Pour cela, il est vivement conseillé de s’adresser à une agence de conseil en identité sonore qui apportera une véritable expertise dans l’identification de musiques en fonction de la cible et permettra à la marque de faire émerger son ADN musical. Comme on a pu le voir, fonctionner à l’instinct pour évaluer sa couleur sonore ne peut être pertinent et en cela, un accompagnement par des spécialistes est nécessaire pour étudier l’environnement de la marque et son marché afin de séléctionner et réaliser une stratégie musicale appropriée qui se déploiera sur les différents points de contacts. Le positionnement Premium d’Air France est par exemple reflété grâce à un contenu musical en phase. Des artistes comme Boards Of Canada, Charlotte Gainsbourg, Massive Attack, Jonsi sont utilisés car ils incarnent la détente et l’évasion que les passagers associent à la marque. • Fixer un budget et respecter le droit en matière d’utilisation de la musique Le prix d’un morceau dépend généralement de la notoriété de l’oeuvre et de son artiste mais aussi du plan média souhaité (nombre d’utilisation et supports de diffusion). Pour pouvoir utiliser une chanson déjà commercialisée par exemple, il convient de négocier financièrement auprès de chaque ayant-droit (auteurs, compositeurs, éditeurs) et de régler les droits d’auteurs perçus par des organismes collecteurs tels que la SACEM ou encore la SPRE. Précisons ici que la SACEM rémunère les artistes, compositeurs et éditeurs alors que la SPRE collecte la rémunération des artistes interprètes et les producteurs. Il est ainsi impératif en cas d’utilisation d’une œuvre musicale protégée
  • 46. -46- de demander les autorisations nécessaires, même lorsque les œuvres appartiennent aux licences libres ou (creative commons). 2 - Déployer la stratégie musicale dans et au delà du point de vente • Dans le point de vente C’est réellement à travers le point de vente, en tant que premier lieu d’interaction directe avec le consommateur, que l’on peut transmettre une expérience musicale. Et, cela doit être favorisé non pas par une simple musique d’ambiance passive mais par une véritable immersion sonore unique à chaque visite. La musique doit servir à réenchanter le magasin. Ainsi, comme nous l’avons vu p°35, diverses solutions existent pour délivrer des contenus audio sur mesure et originaux qui contribueront à enrichir l’expérience consommateur. Deuxièmement, pour influencer le comportement d’achat et faire en sorte que l’atmosphère sonore soit efficace, il est nécessaire d’attirer l’attention sur la musique en créant des ruptures dans l’environnement sonore sans que cela ne devienne dérangeant pour le consommateur. L’idée est ici d’attirer délicatement et naturellement l’attention des clients qui trop souvent déclarent ne pas faire attention à la musique. Pour cela, il est par exemple judicieux d’alterner des morceaux connus avec des morceaux moins connus, d’alterner les titres avec des messages promotionnels, de varier les tempos, de varier les volumes à certains endroits, d’utiliser des douches sonores etc. Pour conclure cette sous partie, nous ferons remarquer que la France est assez en retard en terme de dynamisation sonore des points de vente par rapport aux pays anglo-saxons. De ce fait, les enseignes françaises qui feront l’effort de mettre en place ces quelques techniques auront de meilleures chances de se démarquer des autres, celles se contentant de diffuser une musique d’ambiance passive. • Au-delà du point de vente Il est également très judicieux de ne pas figer les frontières de la musique. En effet, c’est dans sa capacité à partager la musique au-delà même de son point de vente physique qu’une enseigne se montrera sincère dans l’utilisation de la musique.
  • 47. -47- Pour aller plus loin, une marque doit être capable de fédérer une communauté musicale. De très bonnes pratiques ont déjà été menées et peuvent être sources d’inspiration. La marque automobile AUDI a par exemple déployé son univers musical sur un site internet www.myaudi.fr. Des nouveautés (revendiquant l’avant gardisme de la marque alternées à des grands classiques (pour assurer l’intérêt de l’internaute) ainsi que des playlists d’ambassadeurs d’AUDI ponctuent ainsi le site internet réalisé sous l’initiative de l’agence conseil UThink, agence affiliée à la Major UNIVERSAL MUSIC. De ce fait, l’expérience musicale doit se poursuivre même en ligne en faisant participer les clients et non en imposant des musiques qui se déclenchent automatiquement. Je partage d’ailleurs personnellement l’avis des nombreux interrogés de l’enquête terrain s’étant opposés à cela... De manière générale, rappelons que tous les points de contacts peuvent faire l’objet d’une expérience musicale. Plus ils seront nombreux à partager l’identité musicale, et plus celle ci sera claire dans l’esprit des auditeurs/consommateurs. Enfin, et c’est ce qui fera l’objet de la dernière partie de ce mémoire, une enseigne qui sait se montrer proche des artistes en les intégrant dans sa communication à travers du (co-branding, de l’événementiel...) renforcera d’autant plus son image de marque hors du point de vente. 3- S’intégrer dans une démarche polysensorielle Avoir une identité sonore réussie et une réelle personnalité musicale c’est une chose. Mais cela est-il réellement suffisant pour plonger l’individu traversant un point de vente dans l’univers de la marque ? Selon Body et Giboreau27 , plus les sollicitations sensorielles sont nombreuses et plus les traces qu’elles laissent sont alors mémorables. Par ailleurs on a vu que les sens pouvaient se compléter mutuellement les uns les autres en renforçant les sensations perçues (goût/couleur, ouïe/odorat...). De ce fait, il importe pour les enseignes de travailler ce mélange de sollicitations sensorielles afin de favoriser la création de l’expérientiel. La musique diffusée sera d’autant plus cohérente et pertinente qu’elle s’intègrera dans un ensemble réfléchi de sollicitations sensorielles. Il est en outre plus juste aujourd’hui de parler de marketing polysensoriel plûtot que de marketing sensoriel. En effet, le marketing polysensoriel est surtout apparu avec l’utilisation des sens « moins évidents » que 27 - BODY L et GIBOREAU A, Le marketing sensoriel: de la stratégie à la mise en oeuvre, Vuibert , Paris, 2007
  • 48. -48- sont l’odeur et le son pour les points de vente. L’enseigne Abercrombie Fitch déjà abordée dans ce mémoire est un symbole du marketing polysensoriel, voir expérientiel. Son image de marque jeune, dynamique et branchée et reflétée à travers 4 sens. Comme en discothèque, une musique de type éléctro est diffusée à un fort volume et de manière continue pour conférer au magasin une réelle ambiance de clubbing. La vue elle, est sollicitée grâce à des jeux de lumière mettant en valeur les produits alors que le reste du magasin est plongé dans l’obscurité. Les vendeurs quelque peu dénudés et choisis pour leur physique avantageux jouent également leur rôle pour en « mettre plein les yeux » aux clients. Le toucher est rendu possible en permettant l’étude des textile et la prise de photographies avec les vendeurs. Enfin, la marque s’est créée elle même un parfum au nom de « Fierce n°8 » qu’elle diffuse dans tout le magasin, sur les vêtements et hors de la boutique. Un autre exemple à suivre est celui de l’enseigne Nature Découvertes d’ailleurs relativement connu par les individus interrogés dans l’enquête terrain (cités 6 fois). Entre l’odeur de cèdre d’Esteban et les musiques d’oiseaux dans le magasin, les points de ventes Nature Découvertes sont des lieux de calme et bien-être. Tout est mis en place pour être touché, manipulé, mis en situation. L’immersion client est à son maximum et cette mise en scène des espaces favorise la fidélisation et l’acte d’achat. Par les sens, la marque communique, affirme son territoire, crée une relation intime et émotionnelle avec la clientèle. Il convient néanmoins de ne pas sombrer dans une certaine « cacophonie » sensorielle au risque de déranger le client et de brouiller le message commercial. Il importe ainsi de « doser » pertinemment et correctement tout ce qui aura pour but de solliciter les sens sur le point de vente. Pour cela, des tests de pré lancement sont vivement recommandés. Certaines personnes reprochent notamment à l’enseigneAbercrombie Fitch de miser trop sur le sensoriel au détriment de la visibilité des produits.28 A titre d’anecdote également, la RATP en 1993 avait expérimenté la diffusion d’un parfum de menthe et d’eucalyptus dans ses stations mais s’était rapidement ravisé après avoir reçu de nombreuses plaintes des usagers... Enfin pour clore cette partie sur l’expérience polysensorielle des points de vente, n’oublions pas que les avancées technologiques et digitales peuvent remplir un grand rôle dans cette quête. De nombreuses opportunités expérientielles peuvent être 28 - NEBIA A, « Des points de vente à l’épreuve des sens » in Marketing N°144, novembre 2010