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I

UNIVERSITE CATHOLIQUE DE LOUVAIN

LOUVAIN SCHOOL OF MANAGEMENT

Intégration de la RSE en PME au moyen de la
norme ISO 26000 : spécificités et adaptations.

Directeur : Mme. Valérie Swaen

Mémoire-recherche présenté par
Quentin Lambert (3008-05-00)
en vue de l'obtention du titre de
« Master en Ingénieur de Gestion »

ANNEE ACADEMIQUE 2011-2012
II

En préambule de ce mémoire, j’aimerais adresser mes
remerciements les plus sincères aux personnes qui ont aidé, de
près ou de loin, à la réalisation de ce travail. Ainsi, je remercie :
- Mme. Valérie Swaen, promotrice de ce mémoire, pour sa
disponibilité, et son efficacité.
- M. Thierry Vandebroeck, maître de stage chez POSECO, pour
m’avoir fait confiance et m’avoir fait découvrir l’entrepreneuriat
sociétal, ses valeurs et ses passions.
Enfin, je remercie ma famille et mes proches pour leur
encouragement,
leur soutien et leurs conseils qui m’ont permis d’arriver au bout de
ce mémoire.
Je tiens à remercier tout particulièrement, Jean-Pierre Gillet et
Charlotte Duquenne,
pour leurs relectures et leur patience.
Merci à tous
III

Table des matières
Introduction............................................................................................................................................. 1
Guide de lecture et questions de recherche. ...................................................................................... 1
Méthodologie .......................................................................................................................................... 3
Présentation ........................................................................................................................................ 3
Limites ................................................................................................................................................. 4
Chapitre I -

La PME ............................................................................................................................. 6

1.

Définition opérationnelle. ........................................................................................................... 6

2.

PME : un concept nébuleux. ........................................................................................................ 9

3.

La recherche et les courants de pensée. ................................................................................... 10

4.

Vers une définition : les caractéristiques. ................................................................................. 15

5.

Conclusion. ................................................................................................................................ 18

Chapitre II -

La RSE............................................................................................................................. 20

1.

L’évolution de la RSE : une revue théorique. ............................................................................ 20

2.

La RSE aujourd’hui. .................................................................................................................... 25

Chapitre III - La RSE en PME. .............................................................................................................. 29
1.

La nécessité de pratique responsable de la part des PME. ....................................................... 29

2.

Une révolution qui est en marche. ............................................................................................ 30

3.

Spécificité de la RSE en PME...................................................................................................... 31

4.

Une étude différentiée de la RSE en PME. ................................................................................ 44

5.

Tentatives d’intégration de la RSE en PME. .............................................................................. 47

Chapitre IV -

La normalisation de la RSE. ....................................................................................... 49

1.

Les normes. ............................................................................................................................... 49

2.

Normes et PME.......................................................................................................................... 51

3.

Pourquoi vouloir normaliser la RSE ? ........................................................................................ 53

4.

La norme ISO 26000, une norme hors norme !......................................................................... 57

5.

L’ISO 26000 : le point de vue des PME. ..................................................................................... 60

Chapitre V -

Adapter l’ISO 26000 aux PME ? ..................................................................................... 64

1.

Adapter : répondre à la spécificité de l’objet-PME. ................................................................. 65

1.

Spécialiser : répondre à la diversité des PME. .......................................................................... 68

3.

Conclusion. ................................................................................................................................ 72

Conclusion générale .............................................................................................................................. 74
Bibliographie.......................................................................................................................................... 76
Annexes ................................................................................................................................................. 81
Annexe 1 – vue schématique de l’ISO 26000 .................................................................................... 81
Annexe 2 - Sensibiliser à la RSE : Communication de masse............................................................. 81
Annexe 3 – Le cluster pour dépasser les barrières........................................................................... 82
1

Introduction.
Qui est responsable de la dure crise économique qui frappe aujourd’hui de plein fouet les
populations de la planète ? Les tentatives d’explication sont nombreuses mais toutes accablent le
monde financier et dénoncent son irresponsabilité sociétale.
Depuis le début des années 60, le monde a pris conscience du fait que les entreprises sont
redevables envers la société dans laquelle elles s’enracinent. Ainsi est né le principe de
Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE).
D’abord mise en œuvre au sein des grandes entreprises et multinationales, après quelques maladies
de jeunesse, la RSE a atteint aujourd’hui le stade de la maturité sous la forme de la norme ISO 26000.
De manière schématique, la RSE est considérée comme la contribution des organisations au
développement durable.
Le constat est réjouissant mais ne peut pas être généralisé à toutes les entreprises. En effet, les
petites et Moyennes Entreprises (PME) ont largement été tenues à l’écart du débat sociétal
jusqu’au début des années 1990. La relation des petites entreprises à la RSE est depuis lors le sujet
d’un certain nombre d’étude et la quantité de publications académiques s’est accrue de manière
significative ces dernières années. Malgré cet intérêt croissant, le champ de recherche reste jeune et
beaucoup de questions restent inexplorées (LOUCHE et MICHOTTE, 2011).
Cette jeunesse, elle se ressent aussi sur le terrain. Malgré l’accroissement de la volonté des
dirigeants de PME à engager leur entreprise dans la RSE, il semble que l’intégration effective des
principes RSE à la gestion de l’entreprise ne suive pas le même rythme. Cela amène la problématique
abordée dans le mémoire, celle de l’intégration de la RSE en PME.

Guide de lecture et questions de recherche.
L’écart constaté entre la maturité des champs de recherche pourtant proches interroge. L’ISO 26000
fixe principes et définitions de la responsabilité sociétale et prétend fournir des lignes directrices
pour guider son intégration dans toutes les organisations, tandis que la RSE en PME n’en est qu’à ses
débuts et que les tentatives, académiques ou autres, d’intégration de la RSE dans les pratiques de
gestion des petites et moyennes entreprises se heurtent à de nombreuses limites.
Ceci donne naissance à la question de recherche principale traitée dans le mémoire : La norme
internationale ISO 26000 est-elle à même d’intégrer la responsabilité sociétale au sein des petites
et moyennes entreprises ?
Assez naturellement, la question de recherche principale en a amené d’autres plus spécifiques.
D’abord, il a été nécessaire de s’interroger sur le concept de PME et celui de RSE que l’on présente cidessous sous la forme de questions de recherche et questions dérivées.
-

Qu’est-ce qu’une PME ?
o

LA PME est-elle une organisation spécifique ?
2
o
-

Quelle sont les éléments caractéristiques d’une PME ?

Qu’est-ce que la RSE ?
o

Quelles sont les origines de la RSE ?

o

Qu’elles sont les moyens d’intégration de la RSE ?

Le développement de ces questions constitue la trame de fond des 2 premiers chapitres.
L’étude de la PME au premier chapitre révèle une certaine dualité entre les cadres conceptuels la
définissant. Une prise de position a dû être nécessaire afin de construire la suite du raisonnement. Le
choix qui a été fait est celui du caractère « spécifique » de l’objet-PME qu’il convient de reléguer au
rang d’hypothèse.
Le second chapitre fait état de la littérature en RSE depuis ses origines jusqu’à nos jours en épinglant
les diverses influences qui ont construit le concept.
Ensuite, la conjugaison des 2 concepts abordés permet une analyse approfondie de la RSE en PME.
Les questions ayant sous-tendu cette analyse sont les suivantes
-

Comment aborder la RSE en PME ?
o

Quelle pertinence pour la RSE en PME ?

o

Quelles sont les spécificités de la RSE en PME ?


Est-ce que l’hypothèse de la spécificité des PME se vérifie dans la pratique de
la RSE ?

C’est ainsi que le troisième chapitre, après avoir justifié la RSE en PME rentre dans une analyse
descriptive visant à faire ressortir le plus clair des caractéristiques spécifiques.
Le chapitre IV, traite de la normalisation de la RSE et de son implication sur l’intégration de la RSE en
PME. Le chapitre aborde la norme ISO 26000 et la question de recherche principale. On y posepose
d’abord 2 questions majeures qui en appellent d’autres :
-

Pourquoi vouloir normaliser la RSE ?
o
o

Quel est le rapport de la PME à la normalisation ?

o
-

Quelssont les apports de la normalisation ?
Quels sont les effets de la normalisation sur la RSE ?

La norme internationale ISO 26000 est-elle à même d’intégrer la responsabilité sociétale au
sein des petites et moyennes entreprises ?
o

Quel est le niveau d’applicabilité pour l’ISO 26000 en PME ?

o

Quelle est la légitimité de L’ISO 26000 pour réguler la RSE des PME ?

Le dernier chapitre propose quelques suggestions pour rendre la norme plus légitime, plus
accessible, plus pertinente et plus applicable à la PME. Il interroge notamment sur :
-

Comment peut-on améliorer l’impact de l’ISO 26000 sur les PME ?
3

Méthodologie
Présentation
Chapitre II

Chapitre I
Mémoire
Recherche
documentaire:
PME

Recherche
documentaire:
RSE

Théorie PME

Théorie RSE

Chapitre III

PME

Définition et
Caractéristiques
PME

Recherche
documentaire
RSE&PME

Analyse RSE&PME

Définition RSE

Normalisation

Définition et
caractéristiques
RSE&PME

ISO 26000/PME

ISO 26000

ISO 26000 & PME

Chapitre IV
ISO 26000/PME

Chapitre V

La méthode employée tout au long du mémoire est exclusivement qualitative et essentiellement
basée sur une revue et une critique de la littérature qui, à chaque étape, a été mise en vis-à-vis avec
une expérience empirique personnelle faite d’observation et de travail sur le terrain1.

1

Malgréle manque d’objectivité de cette méthode de recherche, l’expérience personnelle n’en est pas moins un moyen d’acquisition de
connaissance qui est utile à la recherche scientifique (N’Da, 2007). Compte tenu de cela il s’emblait important de spécifier au lecteur la
teneur de cette expérience personnelle.
4
Le chapitre I a parcouru la littérature sur le concept de PME. Ce parcours est organisé selon le cadre
utilisée par TORRÈS (1997) dans son approche contingente de la spécificité de la PME1 enrichi par les
apports de JULIEN (2008) et d’autres. La littérature étant indécise, une réflexion basée sur un
schéma dialectique a permis de postuler la spécificité (thèse) de la PME et accepter sa diversité
(antithèse) afin de pouvoir réaliser une analyse critique des caractéristiques spécifiques aux PME.
Cette analyse s’est axée autour de trois composantes fortes : le dirigeant, la proximité et les
relations externes, en s’appuyant à la fois sur la littérature et l’expérience empirique accumulée.
Le chapitre II, -organisé de manière chronologique, passe en revue la littérature relative à la RSE et
son évolution décennie par décennie de 1953 à 2010. Une analyse plus critique des définitions
actuelles est fournie.
Le chapitre III fait intervenir les acquis théoriques des deux précédents chapitres, les données
empiriques secondaires issues de l’étude de BERGER-DOUCE (2008) ainsi que les acquis d’expérience
dans une analyse approfondie qui a pour but la construction d’un profil caractéristique de la RSE en
PME.
Le chapitre IV fait intervenir la théorie de la normalisation puis présente la norme ISO 26000.
Ensuite, une analyse critique est effectuée avec les apports du profil caractéristique de la RSE en PME
ainsi que les données empiriques secondaires spécifiques à la question (PERERA, 2008)et conclut à
l’inadéquation partielle de la norme ISO 26000 à intégrer la RSE en PME.
Le chapitre V analyse plus en profondeur l’incapacité partielle de la norme ISO 26000 à intégrer la
RSE en PME et y repère 2 niveaux d’inadéquation (la spécificité et la diversité) qui sont tout droit
issus de la définition de la PME. Ensuite, le chapitre suggère un modèle de développement de l’ISO
26000

au moyen d’une spécialisation sur trois degrés qui devrait lui permettrede rendre la

connaissance normative actionnable auprès des PME et ainsi de favoriser l’intégration de la RSE dans
ces organisations.

Limites
Le mémoire présente un sujet très large et très jeune sur lequel peu de chercheurs se sont encore
essayés à effectuer des analyses quantitatives. En effet le sujet de la RSE en PME ne semble avoir été
traité de manière empirique que par une seule personne en France jusqu’à présent (BERGER-DOUCE,
2008). En cause, la très grande hétérogénéité de l’échantillon-PME qui interdit toute généralisation
des résultats et l’accessibilité difficile de leurs dirigeants. Dès lors, plutôt que de fournir un travail
empirique duquel peu de conclusions peuvent être tirées, il a été choisi de travailler de manière
qualitative et descriptive afin de donner à la recherche la profondeur que nécessitait le mémoire.

1

Le stage effectué comme coordinateur du réseau d’entreprise « Positive Entrepreneurs » a permis au mémorant d’emmagasiner des
connaissances empiriques tout à fait spécifiques au sujet de l’intégration de la RSE en PME. Grâce au contact quotidien avec des gérants et
gérantes de PME qui se déclarent entrepreneurs sociétaux, les préceptes de la RSE en PME ont été acquis de la manière qui semble la plus
naturelle, et certainement la plus répandue, la tradition orale et informelle. Pour renforcer encore l’idée selon laquelle le mémorant a pu
acquérir le discernement nécessaire à la bonne conduite du mémoire est qu’il est lui-même et depuis trois ans un entrepreneur qui a su
intégrer les principes de responsabilité sociétale au cœur de ses activités.
5
En outre, Le mémoire ayant pour objet une norme internationale, il a semblé normal d’avoir une
approche globale. D’ailleurs, le niveau d’observation semble justifié puisque « les enjeux de la RSE et
du Développement Durable, ne peuvent être abordés efficacement qu’au niveau international »
(HELFRICH, 2010).
L’analyse de la littérature et l’étude empirique de PERERA (2008) montrent que le Norme ISO 26000
n’est pas applicable en l’état aux PME, du fait de leur spécificité et de leur diversité. Il nous a paru
judicieux de nous en tenir à des propositions d’aménagement dont la pertinence pourrait être alors
testée par un autre mémoire.
6

Chapitre I -

La PME

Afin de bien comprendre comment la norme internationale ISO 26000 peut intervenir dans le
processus d’intégration des considérations sociétales au sein des PME, il semble judicieux de
commencer par fournir une définition des petites et moyennes entreprises.
Mais définir les PME, en tant qu’objet ou en tant que concept, n’est pas chose aisée. Pour
commencer, nous rappellerons la définition opérationnelle de la PME, celle qui est utilisée par les
institutions. Ensuite, afin d’explorer les différentes facettes du concept de PME, près de trente ans
de théorie seront passés en revue dans la deuxième section. Nous y épinglerons les principaux
courants de pensée ayant porté très haut la réflexion sur la PME. La troisième section tentera de
cristalliser toute ces réflexions en une série de caractéristiques non exclusives et non contraignantes
mais, néanmoins, éclairantes sur la PME.
Pour entrer rapidement dans le sujet du chapitre, voici la définition vulgarisée de la PME :
Entreprise d'importance petite et moyenne, « dans laquelle le chef d'entreprise assume personnellement et
directement les responsabilités financières, techniques, sociales et morales de l'entreprise, quelle que soit la
forme juridique de celle-ci. » (LAROUSSE, 2012).

1. Définition opérationnelle.
Parce que la définition opérationnelle permet un repérage relativement aisé des entreprises au
moyen de critères facilement mesurables, elle est souvent choisie par la sphère politique afin
d’appliquer aux entreprise ainsi identifiées des programme ciblés.
Du fait de sa corrélation avec le politique, la définition opérationnelle sera précédée des
considérations européennes à l’égard des PME. Celles-ci permettront de mieux comprendre
l’ampleur du sujet.
1.1.

La PME au centre de la politique économique européenne.

Depuis mars 2000 et le Conseil de Lisbonne, l’entreprise est au centre de la stratégie économique
européenne. Pour atteindre ses objectifs, l’économie européenne doit devenir la plus compétitive et
la plus dynamique des économies de la connaissance. Pour le Conseil de Lisbonne, les entreprises,
en particulier les PME, doivent être des moteurs de croissance économique durable et de
développement de la cohésion sociale.
La même année, la Charte Européenne des Petites Entreprises confère aux PME le rôle de moteur de
l’innovation et de la création d’emplois en Europe (Commission Européenne, 2007). C’est pourquoi,
lors du Conseil européen de Feira (Portugal), les dirigeants soulignèrent la « nécessité de faciliter le
développement des petites entreprises »(Commission Européenne, 2007). Cela doit passer par le
renforcement des capacités technologiques des petites entreprises. En particulier, la charte doit
consolider « les programmes existants qui visent à promouvoir la dissémination technologique vers
les petites entreprises ainsi que renforcer la capacité des petites entreprises à identifier, sélectionner
et adapter les technologies »(Commission Européenne, 2007). La charte prévoit également de
7
« développer et d’adapter les systèmes de qualité et de certification aux petites entreprises »
(Commission Européenne, 2006, pp.19).
En 2003, la Commission publie le « Green PaperEntrepreneurship » qui établit les forces et faiblesses
de l’entrepreneuriat en Europe tout en dégageant des suggestions d’action possible en termes de
politique économique. L’« Action Plan » qui en découle établit une stratégie pour l’entrepreneuriat
pour les années à venir. L’objectif est alors de développer un environnement dans lequel les PME
survivent et prospèrent.
Mais les PME et, plus particulièrement, les micro-entreprises, qui constituent plus de 90% des
effectifs, n’ont pas les ressources pour affronter les défis que sont l’adaptation aux nouvelles
technologies et la mise en conformité aux exigences réglementaires. De plus, les PME font face à une
pression concurrentielle grandissante en grande partie due à la globalisation et à l’ouverture des
marchés rendues possibles notamment par les nouvelles technologies.
Si les dirigeants européens veulent voir les objectifs de croissance durable et de compétitivité
atteints avec le concours des PME, ils doivent impérativement mettre en œuvre les politiques
nécessaires afin de protéger les plus petites entreprises de leurs propres faiblesses.
Pour assurer la bonne santé des PME qui garantissent près de 66% (voir figure 2) de l’emploi en
Europe, les interactions entre les états et l’Europe doivent nécessairement être profondes. Il s’agit
d’assurer la cohérence et l’efficacité des mécanismes pouvant limiter les distorsions de la
concurrence tout en encourageant l’innovation et en facilitant l’accès au financement. Profondeur,
cohérence et efficacité dans la mise en place d’un programme sont trois des principales raisons pour
une définition commune de la PME.
1.2.

La nouvelle définition de la PME.

Selon la Commission Européenne, une définition commune est nécessaire à l’application d’une
stratégie économique visant plusieurs objectifs. Ces objectifs sont probablement ceux consignés
dans le « Small Business Act » européen mais les promesses explicites de la définition commune sont
celles-ci :
-

Promouvoir les micros entreprises,

-

Améliorer l’accès au capital en privilégiant certains types d’investisseurs (fonds régionaux,
sociétés de capital-risque, business angels),

-

Promouvoir l’innovation et améliorer l’accès à la recherche et au développement en
encourageant la collaboration avec les universités et les centres de recherche.

-

Soutenir les entreprises qui en ont réellement besoin, celles qui n’ont pas d’autres
alternatives.

Pour la Commission Européenne, une PME est une entreprise dont les effectifs et le chiffre d’affaires
annuel ou le bilan annuel sont limités. Il est important de souligner que la PME est d’abord une
8
entreprise, c’est-à-dire une « entité, indépendamment de sa forme juridique, exerçant une activité
économique ». Les limitations sont, quant à elles, reprises dans la figure 1 ci-dessous.
Figure 1 - Seuils de définition d'une PME

Source : Communautés européennes, 2006, La nouvelle défintion des PME ;
http://europa.eu.int/comm/enterprise/enterprise_policy/sme_definition/index_fr.htm

En plus de ces seuils limites, plaçant l’entreprise dans l’une ou l’autre catégorie, la recommandation
de la Commission établit de manière formelle la manière de calculer les données propres à
l’organisation. Ainsi, lorsque l’entreprise entretient des relations particulières (sous la forme d’une
participation en capital ou de droit de vote) avec une ou plusieurs autres entreprises, le calcul doit
incorporer une partie ou la totalité des données

des entreprises en relation. C’est pourquoi la

Commission Européenne distingue les entreprises autonomes qui ne doivent considérer que leurs
données propres, les entreprises partenaires qui doivent intégrer une partie des données des
partenaires, et les entreprises liées qui doivent intégrer la totalité des effectifs et du chiffre d’affaire
ou du montant bilantaire à leurs calculs.
Il est intéressant de relever que, dans la catégorisation quantitative des petites et moyennes
entreprises effectuée par la Commission Européenne, on retrouve certaines caractéristiques issues
des tentatives de spécification qualitative des PME dont il est fait mention dans la section suivante.
Les seuils sont le reflet quantitatif et arbitraire de la petite taille de l’organisation. De manière
équivalente, les réflexions faites sur les relations des PME avec les autres entreprises et les
considérations liées à la contrôlabilité, c’est-à-dire l’autonomie de la gestion et la non-dépendance
financière, ont probablement trouvé, nous le verrons, dans cette recommandation leur pendant
qualitatif, à savoir : la règlementation en termes de droit de vote et de participation financière.
9
1.3. Conclusion.
« Pour utiles qu’elle soient, les définitions quantitatives de la PME se révèlent insatisfaisantes lorsque
l’on s’intéresse aux enjeux de gestion et aux méthodes adaptées à ces organisations » (COURRENT et
CAPRON, 2012). La responsabilité sociétale d’une entreprise étant d’intégrer dans sa gouvernance
l’impact de ses activités sur l’environnement naturel et social, il semble nécessaire d’adopter une
définition permettant d’en savoir plus long sur les pratiques de gestion des PME.
Puisqu’il semble qu’un découpage quantitatifn’apporte pas le sens recherché au concept de PME, la
section suivante propose de se frayer un chemin vers une définition qualitative.

2. PME : un concept nébuleux.
Comme souvent en science sociale et, plus généralement, dans la recherche, donner une définition
claire d’un concept n’est pas chose aisée. Cela est d’autant plus vrai pour l’un des plus jeunes
paradigmes des sciences de gestion (BYGRAVE, 1989) que sont l’entrepreneuriat et le concept de
PME. Il n’en reste pas moins que cette définition est nécessaire, non seulement, pour que le concept
existe mais aussi pour qu’il puisse être un élément constitutif d’autres avancées théoriques. La
difficulté d’une définition et la raison d’être de celle-ci sont les matières discutées dans les deux
sous-sections suivantes.
2.1.

Difficulté d’une définition.

Comme D’Amboise en 1993, on pourrait reprocher au corpus théorique attaché à la PME son
caractère fragmenté. Plus récemment, on « considère l’étude du sujet*-PME] comme étant un potpourri »(LOW, 2001) cherchant « dans toutes les directions sans théorie encore solide »(JULIEN,
2008). Pour expliquer le flou autour de ce concept,WTTERWULGHE (1998) invoque une grande
diversité des PME, du fait de leur taille d’abord, mais aussi du fait de leur environnement
économique et de leur statut juridique. Mais la nature de l’objet n’explique pas à elle seule la
difficulté. En effet, la recherche, censée amener la définition, y est pour quelque chose. D’après la
lecture de trente ans de théorie en PME»(JULIEN, 2008),celle-ci a vu une diversité tellement grande
de chercheurs (économistes, sociologues, psychologues, anthropologues, géographes, … )
s’intéresser au cas de la PME que Olivier Torres en 1997 dit de la recherche en PME qu’elle est
« fondée sur un projet cognitif nécessairement flou et instable et dont les frontières sont
nécessairement contingentes. »(TORRES, 1997 pp.26).
2.2.

Raison d’être.

Il n’en reste pas moins que l’existence du concept de PME, son étude et sa définition sont justifiées à
plus d’un titre. En effet, TORRÈS (1997) affirme encore qu’il y a trois bonnes raisons pour la
recherche de se pencher sur les PME.
La première est empirique. « Les micro-, les petites et les moyennes entreprise (PME) sont le moteur
de l’économie » (Commission Européenne, 2006). En outre les PME représentaient, en 2006, 99% de
l’ensemble des entreprises de l’UE pour un total de 23 millions de PME fournissant environ 75
millions d’emplois, soit environ 40% de la mise à l’emploi de la population en activité. Le soutien aux
10
PME étant une des priorités de la Commission Européenne, une définition commune de la PME est
une nécessité qui s’impose.
La deuxième raison est d’ordre méthodologique. Comme d’autres avant lui (D’AMBOISE,
1988)TORRÈS(2007) relève que les PME sont un terrain d’expérimentation où tous les phénomènes
sont plus lisibles. En ce sens SARNIN (1990) ira même jusqu’à affirmer que la pertinence de « l'objet
PME tient plus dans sa valeur heuristique d'analyse des changements que dans la construction d'une
catégorie, d'un concept empirique particulièrement utile »(SARNIN, 1990).
La troisième raison relevée par TORRÈS (2007) s’appuie sur certains fondements théoriques qui
expliqueraient l’élévation de l’objet-PME au rang d’objet de recherche scientifique à proprement
parlé. Parmi d’autres, et sur base du recensement effectué par JULIEN (1993), il cite : le rôle de
l'entrepreneuriat, la théorie des interstices, les critiques à l'égard des économies d'échelle ou de
champ, les besoins de flexibilité et les mutations de nos systèmes productifs.
Une dernière justification a été ajoutée en 2007 par Olivier TORRÈS dans son compte rendu sur « La
recherche académique française en PME » où il souligne l’attention accrue qui est portée sur les
petites entreprises par le monde politique. En effet, il semble que depuis plus d’une dizaine
d’années, les PME soient au centre de bon nombre de politiques macroéconomiques.
Le domaine de la PME constituerait donc bien un domaine d’étude à part entière et le besoin d’une
définition de la PME serait donc réel. Difficile de l’infirmer tant les recherches, qu’elles soient en
faveur ou en défaveur de la petite et la moyenne entreprise, ont fleuri durant ces trente dernières
années.

3. La recherche et les courants de pensée.
Dans le but de mettre en lumière un certain nombre de caractéristiques associées aux petites et
moyennes organisations, cette section présente brièvement les différents courants de pensée ayant
influencé la recherche en PME. En premier lieu, la vision primaire des économistes classiques est
présentée. Elle est directement suivie par la réponse néo-classique en la matière. Ensuite, nous
verrons comment, d’une approche purement économique, la recherche est passée entre les mains
d’un grand nombre de praticiens pour finalement peaufiner le concept de PME.
3.1.
Les balbutiements.
Il est souvent admis dans la littérature que, bien avant qu’il soit considéré par la recherche dans la
deuxième partie du XXème, le sujet-PME a été effleuré à de nombreuses reprises par quelques-uns des
piliers de l’économie moderne.
Durant le 19ème siècle, les économistes classiques ont toujours considéré l’entreprise, petite ou
grande, comme une boîte noire agissant pour maximiser son profit et permettant ainsi la répartition
optimale des ressources en vertu du principe de la main invisible d’Adam SMITH. Bien que ce dernier,
quand il parlait d’entreprise, ne considérait quasi exclusivement que les petites entreprises (les
11
grandes entreprises, issues des colonies,
libérales). Ce n’est qu’au début du XX

ème

ne se comportaient pas exactement comme entités
que certains « défricheurs » se sont intéressés aux

caractéristiques des PME. On peut citer, à titre d’exemple, VEBLEN (1904), qui mettra le doigt sur
une rupture croissante entre les entrepreneurs et les capitalistes de la grande entreprise, ou
ANSIAUX (1926), qui affirme qu’il y aura toujours des PME du fait que certaines productions à faible
demande et à fort degré de personnalisation ne peuvent être prises en compte par les grandes
entreprises. ANSIAUX, encore lui, reconnut également un avantage aux plus petites entreprises qui
est celui des coûts de contrôle quasiment inexistants.
La réelle prise de conscience vis-à-vis de la PME comme sujet d’étude à part entière est née avec
l’apparition de recherches concernant l’influence de la taille sur l’organisation.
3.2.
La prise de conscience.
Pour citer Olivier TORRÈS (1997) « les premiers jalons de la recherche en PME sont à mettre au crédit
de chercheurs qui ne travaillent pas sur la PME ». C’est à l’école d’ASTON(PUGH et al., 1968, PUGH et
al., 1969) que ces premiers pas sont souvent attribués, pour avoir été des pionniers dans l’étude et la
mise en évidence de l’effet de la taille sur l’organisation. Bien que l’effet-taille fût largement
controversé, on peut néanmoins considérer que, même si elle n’est pas la seule variable explicative,
la taille a une influence (limitée) en matière de structure organisationnelle. Il n’en reste pas moins
que, à ce stade de la recherche, l’effet-taille ne semble pas être suffisant pour différencier la PME et
la grande entreprise sur le point organisationnel.
Les avancées ultérieures se fondent sur le fait que l’effet de la taille semble induire « des
changements abrupts et discontinus»(MINTZBERG, 1982)sur la structure des organisations. Ces
observations constituent le point de départ de ce qui est appelé par GODENER (2002) « Le modèle
des métamorphoses », selon lequel
« Les organisations évoluent par paliers et changent dans l’urgence à l’approche d’un seuil
organisationnel caractérisé par un sursaut dans l’agencement du travail au sein de
l’organisation. Certain de ces paliers, les trois premiers, caractériseraient la petite et moyenne
organisation alors que les deux dernières seraient caractéristiques des grandes et très
grandes entreprises »(GODENER, 2002)
Bien que ces études constituent des avancées non négligeables, la vraie problématique concernant
l’étude des PME est la mise en évidence de seuils critiques permettant d’identifier à quel moment de
son existence une organisation peut être considérée comme une PME. Mais les études empiriques ne
sont pas unanimes et sont donc peu convaincantes. Finalement, certains chercheurs(GERVAIS, 1978)
suggèrent que le modèle des stades de croissance s’avère trop général pour être opérationnel.
Bien que la recherche semble être tenue en échec, les tentatives brièvement décrites ci-dessus n’ont
pas pour autant été vaines. Deux leçons peuvent être tirées de cette dizaine d’années de recherche
(1965-1975).
12
La première est que, malgré son caractère controversé, l’effet-taille reste considéré comme ayant
une relative valeur explicative de la structure des organisations. MINTZBERG l’a, par ailleurs, élevé au
rang de facteur de contingence.
La seconde est une leçon épistémologique. En effet, l’étude de l’effet-taille arévélé deux écoles de
pensée différentes : l’une est l’approche universelle, animée par le souci de généralisation, à laquelle
s’oppose l’autre, l’approche contingente, plus réaliste et plus nuancée. Ce clivage guidera la plupart
des recherches ultérieures en matière de PME.
3.3.

La dualité entre spécificité et diversité.

Partant de ce clivage quasi dogmatique, on peut distinguer deux courants dans la recherche en PME:
le courant de la spécificité, qui peut clairement être associé à l’approche universelle, et le courant de
la diversité, qui se réclame de l’approche contingente.
i.

Le courant de la spécificité.

Après l’échec du découpage par la taille, considéré comme arbitraire par CANDAU (1981), le
moment est venu de « jeter un regard neuf sur la question »(Bayad, 1995) de la PME. Parce que les
petites organisations n’ont, jusque-là, été étudiées que comparativement aux grandes organisations,
la cible est dorénavant « de passer d'une phase de vision du phénomène de la petite entreprise,
perçue comme institution spécifique d'un capitalisme à une phase de découpage et d'abstraction, où
la réalité est conçue autour du type idéal de firme représentative. »(MARCHESNAY, 1982). Cette
étape importante de conceptualisation fait de la PME un objet de recherche à part entière.
Partant de là un grand nombre de chercheurs vont s’efforcer de trouver des caractéristiques
communes aux PME. Entre 1975 et 1985, les auteurs vont tenter de mettre en évidence une certaine
uniformité liée à la petite taille en examinant toute les constantes, permanences et tendances
permettant de caractériser la PME. On passe donc de la « reconnaissance à la connaissance des
PME »(GUILHON, 1994).
Mais la volonté normative de tous ces auteurs rencontre assez rapidement la critique qui leur
reproche d’idéaliser l’uniformité de la nature de la PME. Olivier TORRÈS (1997) associe le courant de
la spécificité à une dérive dogmatique de l’universalisme de la spécificité. Ajoutant à cela que les
théories de la spécificité se sont établies sur un postulat non vérifié empiriquement : la thèse de la
petite taille, il n’en a pas fallu d’avantage au défenseur de la contingence pour remettre très
sérieusement en question le courant de la spécificité.
Dès lors, et en opposition avec la volonté de généralisation de leurs pairs, d’autre chercheurs vont
entamer des travaux empiriques afin d’établir l’hétérogénéité de la population des PME. C’est le
courant de la diversité
13
ii.
Le courant de la diversité.
Les défenseurs du courant de la diversité tel que BERNARD et RAVIX (1988) ont pu démonter la
théorie de la spécificité en s’attaquant au fondement de celle-ci, c’est-à-dire l’homogénéité
organisationnelle au sein d’une tranche d’entreprises de tailles similaires. Ces études montrent
souvent que le terme « PME » désigne des réalités multiples se trouvant au carrefour d’un certain
nombre de facteurs de contingence.
Certains praticiens porteront l’analyse descriptive des facteurs de contingence si loin qu’ils en
arrivent à considérer chaque entreprise comme un cas unique. Confrontant les dérives casuistiques
des deux courants, O.TORRÈS (1997) dira qu’ « à l’irréalisme des modèles universels s’oppose le
surréalisme des approches contingentes ».
Pour conclure cette section, il est important d’avoir à l’esprit la naissance d’une forme de dualité
spécificité-contingence dans la recherche en PME entre 1975 et 1985. Cet antagonisme est
considéré comme un véritable dilemme (JULIEN et MACHESNAY, 1988) pour le chercheur devant
nécessairement se positionner.
3.4.

Complexification.

Les fondements de la recherche en PME que sont la spécification et la diversité, on l’a vu, n’ont pas
su apporter une définition valide de la petite organisation. C’est pourquoi depuis le milieu des
années 80 jusqu’à nos jours, la recherche théorique sur ce sujet n’a cessé de se développer en se
complexifiant très fortement. D’une part les praticiens des sciences de gestion se sont essayés à aller
plus loin sur base des théories existantes. Et, d’autre part, des apports nouveaux ont été véhiculés
par des sciences périphériques, de près ou de loin rattachées à l’étude de l’organisation.
Cela donne naissance à ce qui est désigné par Olivier TORRÈS comme le courant de la synthèse et le
courant de la dénaturation.
i.

Courant de la synthèse.

Ce courant est véritablement le prolongement des théories précédentes car il combine la thèse de la
spécificité de la PME avec son antithèse la diversité. En intégrant la diversité dans la spécificité on
rend cette dernière modulable (TORRÈS, 1997), polymorphe (JULIEN, 1994).
Cette théorie de la synthèse offre un cadre d’analyse intéressant car il prend en compte la diversité
apparemment inhérente au monde de la petite entreprise tout en permettant la mise en relief de la
spécificité.
Le concept de PME est alors considéré par Martinet (1986) tel « une forme, invariable pour un temps,
ne couvrant pas une réalité intangible et délimitée »(MARTINET, 1986) qui tolère « l’ambiguïté »
(MARTINET, 1986). Allant dans le même sens, plusieurs auteurs parleront de typologie « ad hoc »
permettant de catégoriser les organisations par rapport à un échantillon de référence préalablement
caractérisé par certains traits spécifiques aux PME.
14
La synthèse semble prometteuse tant elle semble faire le compromis de la spécificité et de la
diversité. Mais, à l’instar du courant de la spécificité, la synthèse pêche par excès d’universalisme et
Olivier Torrès lui objectera que c’est à nouveau la spécificité, pourtant non validée, qui est utilisée
comme postulat de départ.
Malgré l’hétérogénéité, certains chercheurs tels que CANDEAU (1981) ou BAUER (1995) admettent
que la PME puisse avoir une nature caractéristique à elle-même. Mais si l’on admet cela, certains
réclament que l’on admette sa dénaturation.
ii.

Courant de la dénaturation.

Le courant de la dénaturation part du principe que la spécificité de la PME, souvent prise comme
postulat à la base de la recherche en PME, n’est rien d’autre qu’une hypothèse réfutable. Les acteurs
de ce courant, le plus récent, vont faire la critique de la spécificité en démontrant que, dans certains
contextes, les frontières fixées par la spécificité ne sont pas aussi généralisantes qu’elle le voudrait.
Ce dernier courant cherche à interroger l’identité de la PME en travaillant souvent sur les zones
grises de sa définition. Les chercheurs évoluent par le jeu de la réfutation empirique appuyée le plus
souvent par la réfutation logique dans le but de repousser les limites caractéristiques du concept de
PME. On notera d’ailleurs, à titre d’exemple, les travaux sur la caractéristique d’indépendance
financière des PME qui, après avoir été passée au crible de la dénaturation, est devenue la nondépendance financière des PME.
3.5.

Conclusion.

L’évolution du concept de PME au travers des années témoigne bien de l’intérêt de la communauté
scientifique pour ce domaine d’étude. Même si la présence des PME d’un point de vue empirique,
économique et, plus récemment, politique n’est plus à prouver, on a pu s’apercevoir que sur le plan
théorique, le concept organisationnel de la petite et de la moyenne entreprise est toujours remis en
question et n’a de cesse de se métamorphoser. Les limites de la PME sont continuellement
repoussées, contestées, mises à l’épreuve puis renforcées, ce qui donne au concept un caractère
vivant, une forme quasi organique.
Au-delà des nombreuses preuves de l’existence d’une entité organisationnelle particulière et
caractérisée, la recherche a aussi démontré que le concept de PME souffrait d’une vraie faiblesse
épistémologique. En effet, il est admis que la plus grande part des thèses énoncées en faveur de la
spécificité de la petite entreprise résiste difficilement à la critique. Ainsi les thèses liées à la
recherche en PME sont rarement validées dans l’absolu.
Il n’en reste pas moins que, dans la recherche en PME, à l’image du courant de la contingence qui
existe en réponse à l’universalisme, la dénaturation existe en réponse à la spécificité de la PME. Dans
la mesure où certaines théories existent par leur opposabilité, dans laquelle elles se renforcent
d’ailleurs mutuellement, on peut considérer que la spécificité de la PME dans sa version augmentée,
la synthèse, n’exclue pas une relative dénaturation par des éléments de contexte.
15
Si ce raisonnement n’est pas infaillible, il révèle en tout cas une prise de position claire en faveur du
courant de la synthèse. Le concept de PME sera donc considéré dans la suite de ce mémoire comme
un ensembled’entreprises hétérogènes aux caractéristiques communes. A défaut, de la
démonstration de cette hypothèse, la spécificité de la PME sera postulée.
Partant de là,

il semble acceptable de vouloir caractériser la PME à l’aide d’une série de

caractéristiques qualitatives, non contraignantes et non exclusives, tout en gardant l’esprit ouvert à
la critique et à la dénaturation. C’est l’exercice qui est proposé dans la section suivante

4. Vers une définition : les caractéristiques.
La caractérisation qualitative de la PME, en opposition avec une approche quantitative décrite
précédemment, est souvent consacrée comme étant la plus complète car permettant une approche
socio-économique relativement flexible de la PME. Beaucoup d’auteurs se sont essayés à la
caractérisation de la PME ces dernières décennies, mais aucun n’a jamais fait l’unanimité. En
conséquence, c’est en toute humilité qu’un tour d’horizon des caractéristiques de la PME est
proposé dans cette section.
Ces caractéristiques rapportées de la littérature sont réparties selon trois grands axes :
-

les caractéristiques liées au dirigeant de la PME,

-

celles qui sont sous-tendues par un mécanisme de proximité,

-

et toutes les caractéristiques qui sont déduites des rapports qu’entretient la PME avec
l’extérieur.
4.1.

Caractéristiques liées au dirigeant.

Suivant l’idée de Bayad et Nebenhaus (1994), pourtant qualifiée de trop universelle, qui affirmait que
le rôle du dirigeant est en réalité une des idées centralesde tout travail théorique enPME , R.
Wtterwulghe dans son ouvrage « les P.M.E., une entreprise à taille humaine » déclare que la
tempérament du dirigeant est décisif pour appréhender ce phénomène économique qu’est la
PME(WTTERWULGHE, 1998).
Ainsi, il appartient de citer en premier lieu BAUER (1995) et sa loi fondamentale décrivant le dirigeant
de PME comme agissant sous l’emprise d’une triple rationalité : une rationalité économique, une
rationalité politique et une rationalité familiale. Cet entrepreneur, un être à trois têtes, serait habité
par un homo economicus se souciant des résultats économiques et financiers de son entreprise, par
un homo politicus qui aurait à cœur d’asseoir ou de développer son pouvoir au sein de son entreprise
et par un pater familias qui tente à sa manière d’aider ses enfants. Avant BAUER, c’est CANDEAU qui,
en 1981, met en relief l’importance du rôle du chef d’entreprise. Et c’est d’ailleurs le lien unissant le
dirigeant au mode de gestion personnalisée de la PME qui constituera un postulat de départ pour son
ouvrage « Pour une taxonomie de l’hypofirme »(CANDAU, 1981). Plus récemment, LOUCHE et
MICHOTTE (2008)notent que dans les PME une plus grande place est donnée aux valeurs et aux
motivations personnelles. La définition de la Confédération Générale du Patronat des Petites et
16
Moyennes Entreprises (CGPME -1983) souligne la responsabilité directe du dirigeant envers son
entreprise. L’idée selon laquelle le chef d’entreprise est souvent un dirigeant-propriétaire est
partagée par plusieurs institutions telles que CGPME (France), Small Business administration (EtatsUnis), le rapport BOLTON (Angleterre) et la Commission Européenne. S’appuyant sur le fait que le
dirigeant de PME se doit également d’être propriétaire de l’entreprise, certains, dont WYNARCZYK et
al. (1993) et HIRIGOYEN (1984), ont mis le doigt sur la tendance qu’a le dirigeant à maximiser sa
propre fonction d’utilité plutôt que le profit de l’entreprise.
Le dirigeant de PME est le plus souvent actif à tous les niveaux de l’entreprise. Devant à la fois être
stratèges et opérateurs, les dirigeants de PME sont reconnus pour leurs compétences multitâches. Le
revers de cette particularité est la faible spécialisation fonctionnelle et un manque
d’expertise(VERHEES and MEULENBERG, 2004). LEPOUTRE et HEENE (2006) expliquent qu’en plus de
ce manque de connaissance, les dirigeants de PME sont connus pour constamment manquer de
temps. Alors qu’ils travaillent en flux tendu, les patrons sont peu enclins à déléguer leurs
responsabilités multiples. Ces deux caractéristiques – le manque de temps et le manque de
connaissance – influencent négativement la capacité d’absorption1 de l’entreprise(LEPOUTRE and
HEENE, 2006).
Les conceptions personnelles du dirigeant influencent beaucoup l’orientation et la manière de
fonctionner de la PME. « Or, le monde des PME se caractérise par une très grande hétérogénéité des
profils dirigeants, tant du point de vue de la formation que du parcours professionnel ou de l’origine
sociale. »(COURRENT and CAPRON, 2012). Ainsi, les recherches ont tenté d’établir une typologie du
profil des dirigeants et ont conduit à l’identification d’une variété d’entrepreneurs-types. Il y a les
dirigeants à la recherche d’opportunité et ceux qui protègent et développent un patrimoine. Il y a
ceux qui cherchent la satisfaction que leur apporte l’indépendance de l’entrepreneuriat et ceux qui
ont été forcés de créer une entreprise par défaut d’emploi salarié. On conçoit dès lors que la
diversité des profils dirigeants est en grande partie explicative de l’hétérogénéité de la PME-objet.
4.2.

Caractéristiques liées à la proximité.

Dans son livre «Les PME » Olivier TORRÈS (1999) « cherche à dresser une énumération plus ou moins
exhaustive des traits communs aux PME[et les]regroupe sous un mécanisme fédérateur »(COHEN et
al., 1990)qu’il estime être la proximité. Bien que fortement inspirée de cet ouvrage, cette section
tente aussi de rassembler les caractéristiques évoquées par d’autres auteurs qu’il semble bon de
rallier au groupe de caractéristiques liées à la proximité.
Pour commencer, les PME sont régulièrement qualifiées d’organisations peu hiérarchisées. En effet,
le dirigeant est souvent proche de ses salariés hiérarchiquement. Un organigramme plat représente
assez bien ce contact vertical étroit (WOITRIN et al., 1966)et confère aux petites entreprises le
caractère profondément humain souligné dans l’ouvrage de R. WTTERWULGHE (1999).

1

Capacité à reconnaître et à exploiter les opportunités issues de l’environnement extérieur à l’entreprise
(COHEN ET LEVINTHAL, 1990, pp. 128-152)
17
Si, dans les grandes entreprises, les fonctions sont souvent clairement différenciées, ce n’est que
rarement le cas au sein des PME. En effet, ces dernières peuvent être caractérisées par une forte
imbrication des fonctions et le dirigeant de petite entité doit souvent revêtir des casquettes très
différentes, passant de stratège à exécutant ou de commercial à gestionnaire des ressources
humaines. SelonJULIEN, cette faible spécialisation du dirigeant vaut également pour ses employés.
La proximité à l’œuvre dans les PME induit une communication plutôt directe, informelle et souvent
orale. Les informations sont échangées avec un minimum de formalités et les mécanismes de
coordination sont peu standardisés. Le degré extrêmement bas de formalisation(LOUCHE,
2011)s’explique également par le fait d’un modèle de gestion centrée sur le dirigeant.
Le dernier point de cette section est avancé par JULIEN (1984). C’est la proximité qu’affichent les
PME avec leurs marchés. On parle ici aussi bien d’une proximité géographique que d’une proximité
psychologique. En effet - et TORRÈS le confirme - on constate souvent que les petites entreprises
sont le plus actives sur des marchés locaux. Lorsque ce n’est pas le cas, et que la PME se tourne vers
l’international, elle aura une préférence pour des marchés ayant une culture ou des pratiques
similaires. Ainsi, les PME Américaines auront une tendance à pénétrer le marché européen en
commençant par le Royaume-Unis.
4.3.

Caractéristiques liées aux interactions.

Les éléments caractérisant la relation entre la PME et son environnement (clientèle, marché des
capitaux, autres entreprises, etc.) ont régulièrement été utilisés par de grandes institutions telles que
la Small Business Administration ou la Commission Européennedans leurs tentatives de
catégorisations qualitatives. Mais d’autres, tels que M. WOITRIN (1966), ont mis le doigt sur le
caractère

singulier

des

relations

qu’entretiennent

les

PME

avec

leur

environnement

socioéconomique. La particularité de ces relations résulte de la petite taille de la PME
(WTTERWULGHE et JANSSEN. 1998).
La faible dimension absolue de la PME lui confère, selon WOITRIN (1966), un pouvoir de négociation
diminué, tant pour les achats que pour les ventes. Tributaire de sa petite taille, la petite entreprise se
voit souvent reléguée dans la catégorie des preneurs de prix. Cette situation de preneurde prix place
la PME dans un climat d’incertitude. Cette incertitude, caractéristique de la PME selon WYNARCZYK
(1993), est accentuée par une offre souvent réduite à un monoproduit et à une clientèle restreinte.
La Pme est considérée comme étant indépendante. Le Rapport BOLTON met en avant
l’indépendance financière des PME (les tenants du courant de la dénaturation parleront plutôt de
« non-dépendance financière ») et leur autonomie de gestion, excluant d’emblée les filiales et
certaines sous-traitances. La Commission Européenne attache elle aussi une grande importance à
l’indépendance de l’organisation dans sa nouvelle définition des PME (Commission Européenne,
2006).
18
Cette indépendance rend les PME difficiles à réguler. En effet, selon JENKINS (2004), les PME sont
peu enclines à adopter les régulations car elles manifestent une grande méfiance à l’égard de la
bureaucratie (SPENCE, 1999) et répondent peu aux pressions institutionnelles.
Néanmoins, et en dépit de leur caractère indépendant, les PME semblent entretenir de meilleures
relations stratégiques avec leurs parties prenantes que les grandes entreprises (FULLER and TIAN,
2006, LEPOUTRE and HEENE, 2006, MOORE and SPENCE, 2006, PARSA and KOUHY, 2008) et ce afin
de dépasser les différentes difficultés et contraintes auxquelles elles font typiquement face1.
Relevons comme dernier critère mentionné à plusieurs reprises dans la littérature que la PME a
généralement des ressources financières fort limitées. Ceci s’explique par des difficultés à se fournir
sur le marché des capitaux et par le fait que l’accès au crédit est rarement aisé. C’est pourquoi les
PME croissent souvent sur base de l’autofinancement ou d’un financement acquis dans un entourage
proche.

5. Conclusion.
Les sections précédentes ont démontré l’intérêt d’une définition qualitative. En effet, par sa capacité
à expliquer le comportement de l’organisation qui rentre dans son champ d’application, la définition
qualitative permettra d’élaborer un argumentaire circonstancié.
La définition qualitative n’est pas aisée. Plus de trente années de recherche n’ont pas réussi à asseoir
un consensus sur la nature et les propriétés de la notion de PME. Il semble que le chercheur désireux
d’utiliser le concept se doive de prendre position. Dans le cas présent, il est choisi d’accepter la PME
dans sa spécificité mais on n’exclut pas que l’objet-PME puisse englober une grande diversité. C’est
donc le courant de la synthèse qui est favorisé et qui guidera la suite de la réflexion.
Ayant accepté la spécificité de la PME-objet, la dernière section s’est attelée à caractériser les petites
et moyennes entreprises. Les caractéristique dégagées et structurées en 3 catégories ont permis une
meilleure compréhension des enjeux auxquels font face ce type d’organisation. La synthèse de ces
caractéristiques peut être observée dans le tableau ci-dessous.
En révélant les principes à l’œuvre à l’intérieur de la PME, ces éléments permettent de comprendre
et peut-être d’anticiper les interactions que ce type d’organisation noue avec l’extérieur. Être
capable de discerner les forces en présence semble tout à fait essentiel pour comprendre comment
la PME peut interagir avec la norme ISO 26000, puisque la responsabilité sociétale prétend moduler
le comportement de l’entreprise en fonction de ses rapports à l’environnement naturel et social.

1

L’accès au capital, le recrutement d’employé de qualité, accès au marché, etc.
19

Tableau 1 - Caractéristiques spécifique à la PME

Caractéristiques
liées au dirigeant.

Caractéristiques
liées à la
proximité.

Caractéristiques
liées aux
interactions

Mode de gestion personnalisé suivant une triple rationalité : économique,
politique et familiale.
Responsabilité directe du dirigeant.
Multitâche.
Faible spécialisation fonctionnelle.
Faible délégation des responsabilités.
Capacité d’absorption faible due au manque de temps et de connaissance.
Variété des profils du dirigeant explique en partie l’hétérogénéité des PME
Organisation peu hiérarchisée.
Forte imbrication des fonctions.
Faible spécialisation du personnel.
Communication directe et informelle.
Proximité avec le marché.
Faible pouvoir de négociation.
Tributaire du marché (preneur de prix, incertitude, monoproduit, clientèle
restreinte).
Indépendante financière.
Autonomie de gestion.
Ressources financières limitée

Le concept de PME maintenant clarifié, c’est la notion de RSE qui va être étudiée.
20

Chapitre II -

La RSE.

La Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) est un concept qui arrive des Etats-Unis en Europe
dans le courant des années 1960. Le terme est issu de la locution anglo-américaine Corporate Social
Responsability(CSR) et peut être considéré comme décrivant la contribution des organisations au
développement durable. Comme on le voit dans ce chapitre, la RSE est originellement appliquée aux
grandes entreprises et se justifie par l’encastrement de ces organisations dans la société. L’idée est
ici que, puisque la société permet l’existence des entreprises, celles-ci lui sontredevables(COURRENT
et CAPRON, 2012).
Cette conception moderne est le fruit d’une évolution de près d’une soixantaine d’années. La
première partie parcourtl’essentiel de cette évolution et explique comment on est passé d’une
responsabilité de type paternaliste à une pratique de gestion dont les enjeux sont devenus
résolument stratégiques.
La seconde partie de ce chapitre approfondit la notion de RSE comme elle est perçue aujourd’hui en
offrant un panel de définitionsassorties d’un tableau de la RSE contemporaine oùsont identifiés les
acteurs.

1. L’évolution de la RSE : une revue théorique.
La littérature s’accorde en tout cas sur ce point : le concept de Responsabilité Sociétale des
Entreprisesest enraciné dans une histoire longue et variée au cours de laquelle, celle qu’on appelle
par voie de facilité la RSE a subi une évolution toute caractérisée par les transformations parallèles
de l’opinion publique, des pratiques et théories de gestion, qui lui ont permis d’être rationalisée tout
au long de ces 60 dernières années.
C’est Mon-Dong Paul LEE (2008) qui, dans la rétrospection qu’il fait de la théorie en RSE(LEE, 2008),
qualifie l’évolution historique du concept de rationalisation progressive. Selon lui, cette
rationalisation est le fruit des deux grands changements conceptuels qui se sont opérés sur le niveau
d’analyse de la RSE et sur l’orientation théorique qu’a pu prendre la recherche en la matière. En
effet, les développements théoriques sur le sujet de la RSE sont, à l’origine, partis d’une analyse de
niveau macroéconomique pour évoluer vers une analyse plus centrée sur le niveau organisationnel.
L’orientation théorique de la RSE a, elle aussi, évolué pour devenir plus spécifique et, bien
qu’explicitementnormative et basée sur l’éthique au début de la recherche dans les années 50-60,
elle tend aujourd’hui, près de soixante années plus tard, à être beaucoup plus liée à la performance
des organisations et se réclame d’une normativité implicite. Ceci est développé plus loin.
1.1.
1950-1960 : le début de l’époque moderne en matière de RSE.
Dans la première moitié du XXème siècle, l’époque du Fordisme, on voit la RSE naître sous la forme
d’un paternalisme que les « businessmen » se devaient d’assumer et qui relevait principalement de
certaines considérations éthiques et religieuses(DUPUIS J.C., 2006). En effet, certaines
préoccupations à l’égard de l’impact de l’entreprise sur la société ont été exprimées avant les années
21
cinquante. Le personnage d’Henry Ford, pour ne citer que lui, incarnebien les pionniers de la RSE
puisque c’est lui qui, en 1917, tenta d’asseoir son idée du « business » comme étant un service à la
société(LEE, 2008).
Néanmoins, c’est l’ouvrage « Social Responsibilities of Businessman » (1953) de Howard Bowen,
rédigé à la demande du « Federal Council of the Churches of Christ in America » (conseil constitué
d’églises protestantes et orthodoxes) , qui est retenu par la communauté académique comme étant
la première tentative de théorisation des relations entre les entreprises et la société(LEE, 2008). Cet
auteur est aujourd’hui considéré par les académiques – par CARROLL notamment(CARROLL, 1999) –
comme étant le père de la RSE.
Une fois consacrée par Bowen dans son ouvrage, la RSE a conservé ses fondamentaux. Elle prend
toujours ses sources dans l’éthique et elle est considérée comme étant « une mesure
complémentaire et corrective de certaines défaillances sociales »(LEE, 2008, p56) donnant au concept
une vocation macro-sociale. Aussi, Bowen ne tente pas de cacher son orientation normative puisque
- par deux fois - il exhorte tantôt les businessmen, tantôt les entreprises à faire face à « l’obligation »
d’assumer leur responsabilité vis-à-vis de la société.
1.2.

1960 : Formalisation sur fond de changement culturel et légal.

La fin des années 50 et les années 60 sont marquées par une accélération dans l’évolution des
mentalités américaines qui a abouti àde nombreuses lois promulguées1 dans le but de « réguler la
[bonne] conduite dans les affaires ainsi que de protéger employés et consommateurs »(LEE, 2008,
p57).
Parallèlement, la littérature fait état d’une croissance significative de l’intérêt porté à la RSE et sa
théorisation. En effet, un certain nombre d’auteurs – avec Keith DAVIS en chef de file - se sont donné
la réplique sur le sujet pour définir le concept de RSE. Il est intéressant de noter que, dans leurs
définitions, Davis et ses pairs2 ont continué à mettre la personne du manager au centre de la
responsabilité sociétale.
La croissance parallèle de l’intérêt du corps académique à l’égard de la RSE et de la législation pour le
même sujet n’est pas sans rappeler les propos tenus par Bowen en 1953 qui établissait que « les
changements institutionnels forcent, persuadent et rendent plus simple et plus favorable la
considération de la responsabilité sociétale par les entreprises » (LEE, 2008, p57).
1.3.

1970 : La critique d’abord, la prolifération ensuite.

Durant les années 60, certains évènements malheureux ont fortement dégradé les relations entre le
public et certaines grandes entreprises, poussant ces dernières à utiliser la RSE comme outil de
relation publique. Cette instrumentalisation attira les foudres de bon nombre d’opposants à la RSE.
1

Par exemple: Textile Fiber Products Identification Act of1958, Fair Packaging and Labeling Act
of1960, Equal Pay Act of 1963, National Trafficand Motor Safety Act of 1966, NationalEnvironmental
Policy Act of 1969, Truth inLending Act of 1969, Clean Air Act of 1970and so on)
2

William C. Frederick, Joseph W. McGuire, Robert Blomstrom, Clarence C. Walton,
22
C’est Milton FRIEDMAN qui s’opposa le premier, en 1962 déjà, à ce qu’il appela une « doctrine
subversive »(FRIEDMAN, 1962)tout en agitant l’argument économique le plus suivi qui consiste à dire
quel’entreprise n’a pas d’autre responsabilité sociétale que celle de faire autant d’argent qu’il est
possible de faire pour ses actionnaires (FRIEDMAN, 1962).
Suite à cela, une prise de conscience s’effectue dans les années 70 : tant qu’elle ne sera pas
conforme à l’intérêt des actionnaires, la RSE restera sujette à controverse. C’est aux auteurs
WALLICH an MCGOWAN (1970) qu’il revient d’attribuer cette avancée. Poussant plus loin leurs
recherches, ils arriveront à fournir un nouveau référentiel (« new rationale ») allant jusqu’à la remise
en question des fondamentaux de la RSE.
Cette nouvelle manière d’aborder les choses permet de faire prendre à la recherche une orientation
plus positive que normative. D’une part, WALLICH et MCGOWAN démontrent que les intérêts à long
terme d’actionnaires détenteurs de portefeuilles d’actions relativement diversifiées ne sont pas
incompatibles avec un comportement socialement responsable des entreprises. Bien au contraire,
Davis surenchérit, en mettant en lumière que toute entreprise se doit de protéger la société dans
laquelle elle évolue sous peine de vicier les ressources qu’elle en tire (structure, force de travail,…) et
de détériorer sa base de clients.
Ces deux exemples illustrent bienque la recherche en RSE a, durant les années 70, connu un tournant
de son évolution puisqu’apparaissent des liens de causalité entre elle et les performances
organisationnelles. C’est aussi à cette période que le concept de RSE se voit assorti d’une
caractéristique qui survivra, c’est son caractère volontaire(MCGUIRE, 1963, BACKMAN et al., 1975,
MANNE and WALLICH, 1973).
Durant les années 70, dynamisés par l’apparition du nouveau référentiel lancé par WALLICH
etMCGOWAN (1970), un bon nombre d’auteurs se sont essayés à développer la théorie du concept
de RSE pour tenter de le lier à la performance de l’entreprise. Malgré la prolifération des définitions,
Min-Dong Paul LEE (2008) précise qu’à la fin de cette décennie, aucun cadre théorique permettant de
coupler la RSE à la performance de l’entreprise ne fut véritablement développé.
1.4.

1980 : le modèle de performance sociétale des entreprises.

Celui qui marqua la recherche en RSE durant les années 80, c’est incontestablement CARROLL (1979)
et son modèle conceptuel tridimensionnel de la performance sociétale des entreprises. Ce modèle
définit un cadre conceptuel ayant pour but d’aider les managers à conceptualiser les principales
problématiques sociétales en systématisant la réflexion sur le sujet. Le modèle permet ainsi
d’améliorer la planification et le diagnostic de la performance sociétale de l’entreprise. Ce modèle
tridimensionnel regroupe et articule trois visions différentes de la responsabilité sociétale de
l’entreprise: (1) la définition claire de la responsabilité sociétale, (2) l’identification des
problématiques sociétales pouvant être traitées par l’entreprise et (3) la philosophie de réponse à la
responsabilité sociétale.
23
Après avoir bénéficié d’une acceptation très large au sein de la communauté académique, le modèle
de CARROLL (1979) fut retravaillé par quelques-uns de ses contemporains et développé plus tard par
certains de ses partisans.
A l’image de cette étude, l’attention de la recherche en RSE des années 80 a beaucoup plus porté sur
son opérationnalisation que sur un affinement de sa définition. En même temps que le pragmatisme
recherché dans les tentatives de modélisation, il est intéressant de s’apercevoir qu’à la place du
« businessman » et son éthique, on retrouve à présent l’organisation et ses intérêts au centre des
développements théoriques.
D’autres modèles furent développés durant cette décennie et ont tenté d’introduire des éléments
issus d’autres corpus théoriques sous l’appellation CSP (« corporate social performance ») consacrée
par CARROLL (1979). Ces modèles ont rarement été suivis ou mis en application. En cause, un
manque de mesurabilité des intrants et extrants en matière de RSE impliquant une faible
comparabilité et des tests empiriques impossibles. Ces faiblesses méthodologiques ne permettent
pas encore de lier de manière probante la RSE et la performance des entreprises.
1.5.

1990 : La CSR étudiée au travers du management.

Bien que peu de contributions originales y soient apparues en ce qui concerne la définition de la RSE,
les années 90 n’en ont pas moins apporté leur lot de contribution à son évolution afin de rendre le
concept de plus en plus applicable. L’étude de la RSE s’est différenciée pour être approfondie à
travers les paradigmes des différentes théories du management en vogue telles que la CSP, la
théorie des stakeholders, l’éthique des affaires, la citoyenneté d’entreprise, etc. De cette manière, la
RSE acquiert un niveau d’étude organisationnel et se trouve directement liée aux intérêts de
l’entreprise
L’une des pratiques de management à travers laquelle la RSE a le plus évolué est l’analyse des parties
prenantes (« stakeholder analysis ») au début des années 90. L’étude conjuguée des deux conceptsa
permis à la RSE d’identifier et de spécifier plus finement les acteurs sur lesquelles l’entreprisea un
impact. Cette plus grande spécification a l’avantage de compenser partiellement l’insuffisante
mesurabilité qui fut l’un des grands problèmes de la RSE dans les décennies précédentes.
CLARCKSON (1995) et JONES (1995) ont tous deux permis une plus grande opérationnalisation et une
plus grande instrumentalisation de la RSE grâce à leurs travaux(CLARKSON, 1995, JONES, 1995).
Les tentatives d’adaptation du cadre analytique de l’analyse des parties prenantes à la CSR ont forcé
les chercheurs à spécifier la RSE plus en profondeur, ce qui a eu pour résultat d’élargir non seulement
le sens mais aussi la portée de laRSE (LEE, 2008).
1.6.

2000 : La RSE résolument stratégique.

Depuis la fin des années 90 jusqu’à maintenant, « la responsabilité sociétale des entreprises n’est plus
conçue comme étant une responsabilité morale des managers *…+ mais comme une ressource
stratégique qui doit être utilisée pour améliorer la performance de l’entreprise »( Lee, 2008, p62). La
24
RSE a connu des avancées toujours plus pratiques grâce au management stratégique et aux
contributions d’académiques comme Philip KOTLER, Nancy LEE, Rosabeth Moss KANTER, Stuart
HART, etc.
Alors que le monde de l’entreprise semble désormais bien sensibilisé à la responsabilité sociétale,
l’application de la RSE reste, dans beaucoup de cas, inefficace. Une politique RSE piètrement mise en
pratique peut engendrer des coûts importants qui ne mettent pas seulement en péril la politique en
elle-même, mais qui peut aussi avoir un impact négatif sur le résultat, sur la réputation, sur la
crédibilité du management de l’entreprise.Un manque d’efficacité récurrent est épinglé par Michel
PORTER et Mark KRAMER qui l’expliquent par 2 raisons dans leur article de 2006 (PORTER and
KRAMER, 2006) qui fait aujourd’hui référence : l’opposition entre l’entreprise et la société ainsi que
l’abord trop général des problématiques de responsabilité sociétale par les entreprises.
La première explication pointe la dualité systématique de l’entreprise et de la société. En effet les 2
auteurs argumentent que les 4 principales justifications à la RSE (appel de la morale, principes de
durabilité, la permission d’exploiter et la réputation) « focalisent sur la tension entre entreprise et
société plutôt que sur leur interdépendance »(PORTER et KRAMER,2007, p83) et créent de facto une
logique qui met en opposition l’action socialement responsable d’une entreprise et la société.
La seconde raison du manque d’efficacité des actions RSE est l’abord trop générique des
problématiques de responsabilité sociétale par le corps académique et par le monde managérial. En
effet, PORTER et KRAMER (2006) affirment que si la politique RSE n’est pas adaptée à l’entreprise et
pleinement embrassée par sa stratégie, le risque est grand de passer à côté de véritables
opportunités puisque l’entreprise se trouvera dans l’incapacité « d’identifier, de prioriser et
d’adresser les problèmes sociaux qui importent le plus ou ceux sur lequel elles peuvent avoir le plus
d’impact » (PORTER et KRAMER, 2007, p83).
En réponse à ces problématiques qu’ils soulèvent, Porter et Kramer proposent une démarche en 5
points visant à intégrer l’entreprise et la société. Ces 5 points assortis de quelques explications sont
repris ci-dessous.
Identifier les points d’intersections entre l’entreprise et la société. Pour ce faire, il faut observer la
relation d’incidence entre entreprise et société dans les 2 sens. D’une part, il est important de relever
les impacts de l’entreprise et sa chaîne de valeurs sur la société (« inside-out linkange ») en tenant
compte du fait que celle-ci, non seulement varie en fonction du lieu, mais aussi évolue avec le
temps. D’autre part, il faut également considérer les impacts du contexte concurrentiel sur
l’entreprise (« outside-in linkage ») qui peuvent se révéler d’une importance stratégique tout à fait
significative même si trop peu considérée.
Choisir quelle problématique sociétale aborder. La problématique sociétale traitée doit être à
l’intersection de l’entreprise et de la société et doit présenter des opportunités de création de valeur
commune (« shared value »). Selon les auteurs, ce choix se fait par la classification des
25
problématiques sociétales en trois catégories que sont : les problématiques sociétales génériques, les
impacts sociétaux de la chaîne de valeurs et les dimensions sociétales du contexte concurrentiel. Une
priorisation des deux dernières catégories semble évidente.
Créer l’agenda sociétal de l’entreprise. PORTER et KRAMER (2006) affirme que l’agenda sociétal
d’une entreprise doit avant tout commencer par la mise en place de politiques RSE réactives qui
viendront commander des pratiques citoyennes et doivent assurer l’atténuation du tort commis par
l’entreprise et sa chaîne de valeurs sur la société. Mais l’agenda sociétal ne devrait en aucun cas
s’arrêter là. Selon les auteurs, les entreprises doivent aller au-delà des attentes de la
communauté.Afin de générer simultanément un bénéfice sociétal et un bénéfice économique, elles
doivent adopter une RSE stratégique.
Intégrer les pratiques « inside-out » et « outside-in ». Afin d’élaborer l’agenda sociétal de manière
stratégique, les entreprises devront intégrer à la fois les pratiques responsables au niveau de la
chaîne de valeurs et des investissements durables sur le contexte concurrentiel.
Ajouter une dimension sociétale aux valeurs fondamentales de l’entreprise. C’est ainsi que la RSE
prend son sens le plus stratégique. En effet, l’intégration de considérations sociétales dans les
valeurs fondamentales de l’entreprise est la garantie d’une RSE intégrée et de long terme, la garantie
d’une RSE stratégique.

2. La RSE aujourd’hui.
Comme on a pu le voir, l’évolution du concept de RSE s’est fait au travers de différentes approches.
La première fut l’approche « éthique » de la responsabilité sociétale qui est originellement fondée
sur les valeurs morales. La seconde approche a manifesté un penchant utilitariste et a fait de la RSE
un enjeu stratégique servant la performance de l’entreprise. Une troisième et dernière approche est
celle qui est appelée l’approche « business and society » par les initiés. Elle pose les fondements de
la RSE d’aujourd’hui en considérant« l’entreprise *comme étant+ assimilée à une institution sociale
légitimement redevable envers la société » (BERGER-DOUCE, 2008, p11). Progressivement délestée
des reliquats la liant exclusivement à l’éthique et la morale, la définition de la RSE a été rationnalisée
à travers la lunette de différentes pratiques de gestion pour finalement aboutir dans des versions
tantôt volontaristes (vision anglo-saxonne), tantôt institutionnalistes (vision européenne).
Les nouvelles définitionsde la RSE ont fleuri avec le début de la période d’activité des institutions peu
après les années 2000 et l’initiative Global Compact lancée par les Nations Unies en juillet de cette
année-là. Juste après, c’est l’édition par l’Union Européenne d’un livret vert en 2001 qui fixa la
définition de la RSE dans sa version européenne en décrivant « ce concept comme l'intégration
volontaire des préoccupations sociales et écologiques des entreprises à leurs activités commerciales
et leurs relations avec leurs parties prenantes » (Commission Des Communautés Européennes,
2001,pp.7). Elle se base donc largement sur une approche volontaire de la RSE.
26
A la même époque (en 2010), le Ministère français pour le développement durable propose, quant à
lui, un énoncé plus claire et plus simple en déclarant que la RSE est « la contribution des entreprises
aux enjeux du développement durable » (Ministère du Développement Durable, 2010) liant ainsi les
concept de RSE et de développement durable.
La dernière communication de la commission qui fait état de sa stratégie de développement de la
RSE pour 2011-2014 avance une nouvelle définition de la RSE comme étant « la responsabilité des
entreprises vis-à-vis des effets qu’elles exercent sur la société »(Commission de l’Union Européenne,
2011, p8). Pour assumer cette responsabilité, il faut au préalable que les entreprises respectent les
lois en vigueur et les conventions collectives conclues entre partenaires sociaux. « Afin de s’acquitter
pleinement de leur responsabilité sociale, il convient que les entreprises aient engagé, en
collaboration étroite avec leurs parties prenantes, un processus destiné à intégrer les préoccupations
en matière sociale, environnementale, éthique, de droits de l’homme et de consommateurs dans leurs
activités commerciales et leur stratégie de base, ce processus visant:
-

à optimiser la création d’une communauté de valeurs pour leurs propriétaires/actionnaires,
ainsi que pour les autres parties prenantes et l’ensemble² de la société;

-

à recenser, prévenir et atténuer les effets négatifs potentiels que les entreprises peuvent
exercer. » (Commission de l’Union Européenne, 2011, p8)

Les références à la loi, aux conventions sociales et aux droits de l’homme confèrent à cette définition
un caractère institutionnaliste indéniable.
La dernière référence en matière de définition du concept de RSE est la norme internationale ISO
26000(ISO, 2010) qui fournit des lignes directrices relatives à la responsabilité sociétale. On observe
que la définition proposée par la norme rassemble les trois dernières caractéristiques modernes que
sont le caractère volontaire et institutionnaliste ainsi que l’intégration de la notion de
développement durable dans celle de RSE.
« Responsabilité d’une organisation vis-à-vis des impacts de ses décisions et de ses activités sur la
société et sur l’environnement, se traduisant par un comportement transparent et éthique qui:
-

contribue au développement durable y compris à la santé des personnes et au bien-être de
la société

-

prend en compte les attentes des parties prenantes

-

respecte les lois en vigueur et est compatible avec les normes internationales

-

et est intégré dans l’ensemble de l’organisation et mis en œuvre dans ses relations » (ISO
26000, 2010, p 4).

On observe également l’intégration du concept de parties prenantes (stakeholder) qui a été
mentionné plus tôt. En effet la prise en compte des intérêts des stakeholder est indissociable du
concept de RSE depuis les travaux de FREEMAN (1984).
27
De par le caractère consensuel et la large légitimité (notion discutée dans le chapitre V) qu’on lui
attribue, c’est cette définition qui est sous-entendue à chaque fois que le concept de RSE est évoqué
dans la suite du mémoire.
2.1.

Dans la pratique des affaires.

Longtemps reléguée aux rangs des abstractions, des pratiques idéalisées, des possibilités
stratégiques et des théories managériales prometteuses, la RSE fait, aujourd’hui, partie de la réalité
des entreprises. Toujours en évolution, elle est devenue une pratique tangible et on la retrouve dans
un nombre croissant d’entreprises de tous types. Si bien que, ces dernières années, des enquêtes ont
révélé jusqu’à 70% d’entreprises ayant désormais placé la durabilité à leur agenda(HAANAES et al.,
2011b). C’est un fait qui n’est plus à démontrer, une majorité des entreprises (deux-tiers en
2011(HAANAES et al., 2011b)sont maintenant convaincues que s’inscrire dans une optique durable
est une nécessité pour être compétitif sur les marchés. Et le fait que, même en période de recul
économique, l’implication des entreprises(HAANAES et al., 2011a) (en termes d’investissement et
d’attentions managériales) dans les domaines liés à la RSE va croissant illustre la volonté inébranlable
des entreprises d’aller vers plus de responsabilité dans leurs activités. La RSE, moquée à ses débuts
par les pragmatiques, a dorénavant acquis ses lettres de noblesse et continue son inexorable
évolution vers, précisément, plus de pragmatisme et plus de stratégie.
Afin d’établir le Business Case, on cite régulièrement, dans cet ordre(HAANAES et al., 2011a), la
réputation d’une marque, l’accroissement de l’avantage compétitif, l’accès à de nouveaux marchés
ou à certains marchés spécifiques tels que les marchés publics, la réduction des coûts énergétiques
et ceux liés au traitement des déchets, l’accroissement des marges grâce à un positionnement plus
durable et différencié, les opportunités d’innovation pour le développement des produits , services
et procédés, l’attraction et la rétention d’employés qualifiés, la facilité d’accès aux capitaux, comme
autant d’éléments motivant une organisation à mettre en place une politique RSE.
Mais l’évolution de la RSE dans les organisations connait aussi quelques freins. L’implémentation
d’une politique RSE requiert, notamment, des ressources extensives en termes humains. De plus, elle
exige d’avoir de bonnes connaissances RSE ainsi que des compétences managériales solides. Enfin,
l’implémentation d’un programme RSE intégré peut nécessiter un apport financier substantiel.
A la lumière des éléments avancés par le Business Case RSE, on comprend que les grandes
entreprises ouvrent la marche en matière de RSE. D’une part, les grandes entreprises sont celles qui
ont le plus à y gagner car elles peuvent bénéficier des avantages de la RSE en minimisant le coût de
sa mise en œuvre grâce aux économies d’échelle et de champs. D’autre part, les plus grandes
entreprises ont souvent incorporé la RSE dans leur politique de gestion des risques afin d’atténuer
ceux-ci. On imagine bien les effets dévastateurs d’une réputation d’une marque gâchée par une
mauvaise conduite rendue publique.
28
Mais où en sont les PME par rapport à ces considérations ? Il est proposé d’étudier comment la PME
se positionne par rapport à la RSE dans le chapitre suivant.
29

Chapitre III - La RSE en PME.
Bien qu’on ait pu douter pendant quelques temps de la pertinence d’un engagement des PME dans
le débat RSE, les PME ne sont pas tout à fait absentes du mouvement. Ainsi, le Livre Vert de la
Commission Européenne insiste sur le fait que la RSE « soit plus largement appliquée dans les PME, y
compris les micro-entreprises puisque ce sont elles qui contribuent le plus à l’économie et à l’emploi »
(Commission Européenne, 2001, p .8).
Comme cela a été expliqué plus haut, l’implémentation et la diffusion de la RSE en entreprise peut se
heurter à quelques barrières. Anodines pour certaines organisations, ces barrières peuvent s’avérer
rédhibitoires pour d’autres. Les PME font généralement partie de cette deuxième catégorie. C’est le
manque de ressources des plus petites entreprises qui est souvent épinglé comme principale entrave
au développement d’action ou de politique RSE dans les PME. Mais ce n’est pas le seul frein. En effet,
comme nous le verrons, un certain nombre de caractéristiques propres au PME creusent encore un
fossé bien plus large entre PME et RSE.
Nous discuterons dans ce chapitre des raisons pour lesquelles il semble pertinent d’inclure les PME
dans le débat RSE et comment les PME en sont venuesà être incorporées au débat petit à petit.
Ensuite, la RSE en PME est étudiée au moyen de l’analyse des facteurs de motivations et des freins à
l’engagement sociétal des PME. Cette analyse permet de dégager l’aspect singulier de la RSE en PME.
Enfin, la dernière section pose la question de la spécificité de la RSE en PME et la nécessité d’une
étude différenciée.

1. La nécessité de pratique responsable de la part des PME.
L’acronyme PME rassemble environ 97% des entreprises mondiales et rien qu’en Union Européenne,
on en compte plus de 24 millions(European Commission 2007). Or les PME participent pour des
proportions allant de 40 à 60% du PIB de leur pays respectifs et emploient jusqu’à 70% de la
population active dans certains pays membres de l’OCDE (plus de 65% en Belgique). Les statistiques
européennes parlent d’elles-mêmes (voir figure 2), les PME constituent le pan le plus important de
l’économie et ses agents économiques forment une masse qui ne peut être négligée.
30
Figure 2 - Nombre d'entreprises, emploi, et contribution au PIB dans UE--27

Source : European Commission et DG-Enterprise, Annual Report on EU SMEs 2010/2011, 2011. Disponible sur :
http://ec.europa.eu/enterprise/policies/sme/facts-figures-analysis/performance-review/index_en.htm

En plus, de cette masse tout à fait significative, les PME sont d’autant plus concernées par la RSE que
ce sont les agents économiques les plus proches de leur environnement économique. En effet, La
proximité des PME avec leurs marchés n’est pas seulement psychologique ou géographique (comme
annoncé dans le second chapitre), elle est aussi économique de telle sorte que la santé économique
d’un marché aura une grande influence sur la santé économique des PME qui y sont actives. Dès lors,
il paraît évident que ces entreprises tellement sujettes aux fluctuations de leurs marchés se doivent
de mettre en œuvre tout ce qui est possible pour conserver un climat stable et favorable à leurs
activités. Dans ces conditions, la RSE et ses impacts fondamentaux semblent être incontournables
pour les PME.
En outre, Il semble tout à fait naturel que les PME s’investissent dans la RSE puisque cette pratique
fait déjà partie de leur quotidien, bien souvent à leur insu. Des considérations de réduction des
déchets, de réduction de la consommation énergétique, d’aménagement des espaces et des temps
de travail, les interactions avec la communauté locale ou encore l’emploi, sont autant de pratiques
que les PME mettent en place et qui relèvent notamment de la responsabilité sociétale. Les petites
et moyennes entreprises œuvrent donc souvent pour la RSE mais sans le savoir. Une prise de
conscience et une organisation de ces pratiques permettraient aux entreprises de mettre celles-ci en
valeur et d’aller plus loin sur le chemin de la RSE, tout en se retrouvant elles-mêmes valorisées.

2. Une révolution qui est en marche.
Développer la prise de conscience chez les petites ou moyennes entreprises peut sembler une tâche
ardue. En effet, la plupart de celles-ci sont reconnues comme étant orientées vers la survie à court
terme et elles ont l’habitude de ne pas considérer les problématiques sociétales ou
environnementales comme étant directement liées à leur survie. Malgré une prise de conscience
accrue, les préoccupations RSE n’occupent que le second plan. En effet, les PME n’abordent
généralement ces préoccupations qu’une fois la responsabilité économique assurée (BERGERDOUCE, 2008).
31
Malgré cela, les chiffres de ces dernières années sont significatifs. En 2006, une étude française de
Sandrine Berger-Douce révélait qu’environ un tiers des PME semblait agir en faveur de la
RSE(BERGER-DOUCE, 2008). Le baromètre 2011 de la responsabilité sociétale en Belgique déclare
que 65% des PME et 44% des TPE disposent d’une personne ayant la charge de faire le suivi RSE dans
l’entreprise (BUSINESS & SOCIETY BELGIUM, 2011).Bien que ces chiffres mis en comparaison ne
représentent pas des preuves irréfutables, ils semblent tout de même afficher une tendance que le
foisonnement de la littérature vient confirmer : La RSE a atteint la sphère des PME et se développe
en son sein de manière progressive.
De plus, on peut affirmer sans risquer de se tromper que la prise de conscience des considérations
responsables dans leurs formes environnementales, sociétales ou économiques se sont fortement
généralisées depuis 2004 (SAULQUIN etSCHIER, 2007). Dans les institutions, les fédérations, les
réseaux, les médias, même dans le système éducatif, il est devenu commun de retrouver un volet
responsable, durable ou citoyen. Le développement durable et responsable est présent avec plus ou
moins de ferveur sur une majorité des canaux de communication utilisés par les PME de sorte qu’il
est aujourd’hui rare de rencontrer un entrepreneur ou gérant de PME qui ne perçoive l’importance
de la RSE. C’est un fait (les études françaises de DUPUIS et al (2006) et celle de BERGER-DOUCE de
2008 en attestent), une très large majorité de dirigeants de PME (entre 88 et 92%) déclarent
poursuivre leurs activités tout en intégrant les préoccupations de la RSE. La conscience et la
désirabilité de la RSE chez les PME sont aujourd’hui des éléments très bien intégrés.
Le développement de la RSE chez les PME est donc aujourd’hui une réalité avérée, notamment, par
une littérature spécifique de plus en plus foisonnante (LOUCHE et MICHOTTE, 2008). Par ailleurs, on
constate que la RSE en PME prend une direction qui diffère des grandes entreprises. La singularité de
la RSE dans les petites et moyennes entreprises donne même naissance à une définition spécifique
de la RSE par les PME, apportée par JENKINS (2009) en ces termes : « la RSE est avant tout définie
dans les PME comme le fait d’être non seulement conscient des impacts de l’entreprise mais aussi
comme la volonté de rendre cet impact positif pour un large ensemble de parties prenantes à travers
les décisions managériales qui sont prises. »(JENKINS, 2009).
D’autres (VIVES, 2006, ELLERUP,NIELSEN etTHOMSEN, 2009, RUSSO etTENCATI, 2009) définissent la
RSE au travers de trois thématiques : parties prenantes internes, parties prenantes externes et la
question environnementale

3. Spécificité de la RSE en PME.
Comme on a pu le découvrir dans le premier chapitre, il n’est pas simple de définir le concept
dePME. Néanmoins, l’hypothèse a été faite que la PME a pu se démarquer en tant qu’organisation
spécifique dont les caractéristiques sontdifférenciées par rapport aux autres organisationsDès lors, il
faut se demander comment la RSE est spécifiquement exercée au sein des PME car « la vision
monolithique [de la RSE] est trompeuse car elle cache les spécificités de la RSE en PME. »(LOUCHE et
MICHOTTE, 2011, p15).
32
Cette section va tenter de discerner les caractéristique de la RSE pratiquée en PME au travers de
l’étude des motivations et des freins avec comme ligne de mire la démonstration du fait que la RSE
en PME, au même titre que la PME, mérite une étude différenciée de celle de la RSE en général.
3.1.

Les facteurs motivants la RSE en PME.

La majorité des questions de recherche faisant l’étude de la RSE en PME portent sur les moteurs et
les freins (LOUCHE et MICHOTTE, 2011). C’est aussi à travers cette analyse qu’il est envisagé de faire
apparaître la spécificité de la RSE en PME.
Cette analyse est structurée de manière similaire à celle qui avait pour but de recenser les
caractéristiques propres à la PME. En effet, nous aborderons ici les particularités de la RSE en PME au
travers de l’analyse du dirigeant, de la structure organisationnelle des PME (fortement caractérisée
par la proximité) et des parties prenantes.
i.

Le dirigeant.

Pour l’ensemble des organisations, la mobilisation personnelle du cadre dirigeant est considérée
comme un moteur tout à fait essentiel du choix d’investissement dans le domaine responsable
(BUSINESS & SOCIETY BELGIUM, 2011). Cet investissement des dirigeants dans le développement
durable est capital pour que la stratégie RSE remplisse son triple objectif (social, environnemental et
économique). Ce n’est d’ailleurs pas une surprise si la grande majorité (75%)(HAANAES et al., 2011b)
des entreprises à qui la responsabilité sociétale réussit déclarent profiter d’un appui fort des
dirigeants(HAANAES et al., 2011b).
Pour les PME, définies par un mode de gestion indépendant et personnalisé et caractérisées par une
structure organisationnelle plate, le directeur propriétaire est d’autant plus influent qu’il est seul
responsable de son organisation, régulièrement unique garant de la direction suivie par l’entreprise.
En effet, Il existe des preuves empiriques (JENKINS, 2009) qui mettent en avant le rôle significatif
des valeurs et des motivations propres du dirigeant-propriétaire dans le processus d’intégration de
la RSE au sein des petites et moyennes organisations (HOIVIK et SHANKAR, 2010).
Les facteurs influençant directement le dirigeant sont donc largement responsables de l’orientation,
durable ou non, prise par les PME. Les facteurs amenant le propriétaire dirigeant à s’engager de
manière concrète dans des actions RSE sont répertoriés par SAULQUIN et SCHIER (2007) comme
étant les connaissances propres de l’entrepreneur. Les connaissances du dirigeant sont diffractées
en un degré de conscience et degré d’attitude du dirigeant (GADENNE et al., 2009).
Les actions RSE seront largement motivées par la conscience que le dirigeant a des moyens qui sont à
sa disposition et des impacts que peuvent avoir de telles actions sur l’environnement
socioéconomique d’une part et sur sa propre entreprise d’autre part.
Le degré d’attitude du dirigeant est construit sur les valeurs et les croyances de celui-ci. L’attitude du
dirigeant par rapport aux pratiques durables en entreprise est généralement forte et difficilement
altérable. Quelle que soit la nature de l’attitude, celle-ci ne conduira généralement qu’à plus ou
33
moins de soutien à des initiatives RSE externes à l’entreprise et rarement à une réflexion RSE mettant
les actions et impacts propres à l’entreprise au centre d’un débat (GADENNE et al.,2009)
Parallèlement, un très grand nombre d’auteurs consacrent les valeurs personnelles de l’entrepreneur
comme moteur prépondérant à l’engagement des PME vers la RSE (MURILLO &LOZANO, 2006 ;
WORTHINGTON et al., 2006 (a) & (b); VIVES, 2006 ; CAMBRA et al., 2008b ; CILIBERTI, 2008 ;
DAHLMANN et al., 2008 ; NHIEM et al., 2008 ; PERRINI &MINOJA, 2008 ; WORTHINGTON et al., 2008 ;
JENKINS, 2009 ; ELLERUP NIELSEN &THOMSEN, 2009 ; RUSSO &TENCATI, 2009 in Louche et
MICHOTTE). Aussi explicatives les valeurs du dirigeant soit elles, d’aucun pourrait s’étonner de
l’inadéquation entre valeurs motivant l’engagement sociétal et le manque d’actions concrètes. Une
interprétation serait de concevoir les valeurs et l’attitude favorable à la RSE d’un dirigeant comme
des prérequis à toute action durable sans toutefois qu’elles soient nécessairement suffisante aux
déploiements de ces actions.
Outre les connaissances et les valeurs du dirigeant, LEPOUTRE et HEENE (2006), soulignent que celuici peut posséder certaines capacités qui, elles aussi, forceront le passage à l’acte responsable. On
considère ici que la capacité d’ouverture (aux nouveautés, aux réseaux) et de mise à jour du patron
de PME facilite ce passage à l’acte RSE. Le niveau de compétence et la capacité d’absorption des
entrepreneurs étant généralement limités, on note l’effet bénéfique des réseaux qui repoussent les
limites capacitaires des entrepreneurs qui s’y engagent (ATHERTON, 2003; MEREDITH, 2000).
ii. Les caractéristiques organisationnelles.
Il est reconnu que les grandes entreprises sont clairement en avance sur la PME en matière de RSE et
s’il est une explication qui apparaît dans chaque texte traitant du sujet, c’est que les premières usent
de leur capacité à dégager des moyens humains et financiers dont le détachement ne procure pas un
retour direct sur investissement. La facilité d’allocation de ressources est généralement
accompagnée d’une réserve de compétences plus spécifiques et plus poussées, en matière de RSE
notamment mais en termes de management et de stratégie aussi. Ces capacités à dégager du temps
et de l’argent, à acquérir les compétences nécessaires et à s’imposer un recul stratégique sont des
éléments clefs pour l’implémentation d’une politique RSEheureuse.
Mais ces capacités semblent être principalement l’apanage des plus grandes sociétés. Malgré
l’évidence de la relation existant entre la taille de l’entreprise et son comportement sociétalement
responsable, certains résultats montrent une relative ambiguïté du lien causal (LEPOUTRE et HEENE,
2006).
Apportant plus de clarté au phénomène, LEPOUTRE et HEENE (2006) déclarent que cette relation
dépend d’un large panel de caractéristiques organisationnelles. Ces caractéristiques, toutes dérivées
de la petite taille, influencent différemment la mise en œuvre des politiques durables en entreprise.
Dans le paragraphe suivant sont repris les éléments organisationnels servant de moteur à la RSE en
PME. Ils sont bien moins présents que les obstacles.
Intégration de la RSE en PME au moyen de la norme ISO 26000 : spécificités et adaptations.
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  • 1. I UNIVERSITE CATHOLIQUE DE LOUVAIN LOUVAIN SCHOOL OF MANAGEMENT Intégration de la RSE en PME au moyen de la norme ISO 26000 : spécificités et adaptations. Directeur : Mme. Valérie Swaen Mémoire-recherche présenté par Quentin Lambert (3008-05-00) en vue de l'obtention du titre de « Master en Ingénieur de Gestion » ANNEE ACADEMIQUE 2011-2012
  • 2. II En préambule de ce mémoire, j’aimerais adresser mes remerciements les plus sincères aux personnes qui ont aidé, de près ou de loin, à la réalisation de ce travail. Ainsi, je remercie : - Mme. Valérie Swaen, promotrice de ce mémoire, pour sa disponibilité, et son efficacité. - M. Thierry Vandebroeck, maître de stage chez POSECO, pour m’avoir fait confiance et m’avoir fait découvrir l’entrepreneuriat sociétal, ses valeurs et ses passions. Enfin, je remercie ma famille et mes proches pour leur encouragement, leur soutien et leurs conseils qui m’ont permis d’arriver au bout de ce mémoire. Je tiens à remercier tout particulièrement, Jean-Pierre Gillet et Charlotte Duquenne, pour leurs relectures et leur patience. Merci à tous
  • 3. III Table des matières Introduction............................................................................................................................................. 1 Guide de lecture et questions de recherche. ...................................................................................... 1 Méthodologie .......................................................................................................................................... 3 Présentation ........................................................................................................................................ 3 Limites ................................................................................................................................................. 4 Chapitre I - La PME ............................................................................................................................. 6 1. Définition opérationnelle. ........................................................................................................... 6 2. PME : un concept nébuleux. ........................................................................................................ 9 3. La recherche et les courants de pensée. ................................................................................... 10 4. Vers une définition : les caractéristiques. ................................................................................. 15 5. Conclusion. ................................................................................................................................ 18 Chapitre II - La RSE............................................................................................................................. 20 1. L’évolution de la RSE : une revue théorique. ............................................................................ 20 2. La RSE aujourd’hui. .................................................................................................................... 25 Chapitre III - La RSE en PME. .............................................................................................................. 29 1. La nécessité de pratique responsable de la part des PME. ....................................................... 29 2. Une révolution qui est en marche. ............................................................................................ 30 3. Spécificité de la RSE en PME...................................................................................................... 31 4. Une étude différentiée de la RSE en PME. ................................................................................ 44 5. Tentatives d’intégration de la RSE en PME. .............................................................................. 47 Chapitre IV - La normalisation de la RSE. ....................................................................................... 49 1. Les normes. ............................................................................................................................... 49 2. Normes et PME.......................................................................................................................... 51 3. Pourquoi vouloir normaliser la RSE ? ........................................................................................ 53 4. La norme ISO 26000, une norme hors norme !......................................................................... 57 5. L’ISO 26000 : le point de vue des PME. ..................................................................................... 60 Chapitre V - Adapter l’ISO 26000 aux PME ? ..................................................................................... 64 1. Adapter : répondre à la spécificité de l’objet-PME. ................................................................. 65 1. Spécialiser : répondre à la diversité des PME. .......................................................................... 68 3. Conclusion. ................................................................................................................................ 72 Conclusion générale .............................................................................................................................. 74 Bibliographie.......................................................................................................................................... 76 Annexes ................................................................................................................................................. 81 Annexe 1 – vue schématique de l’ISO 26000 .................................................................................... 81 Annexe 2 - Sensibiliser à la RSE : Communication de masse............................................................. 81 Annexe 3 – Le cluster pour dépasser les barrières........................................................................... 82
  • 4. 1 Introduction. Qui est responsable de la dure crise économique qui frappe aujourd’hui de plein fouet les populations de la planète ? Les tentatives d’explication sont nombreuses mais toutes accablent le monde financier et dénoncent son irresponsabilité sociétale. Depuis le début des années 60, le monde a pris conscience du fait que les entreprises sont redevables envers la société dans laquelle elles s’enracinent. Ainsi est né le principe de Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE). D’abord mise en œuvre au sein des grandes entreprises et multinationales, après quelques maladies de jeunesse, la RSE a atteint aujourd’hui le stade de la maturité sous la forme de la norme ISO 26000. De manière schématique, la RSE est considérée comme la contribution des organisations au développement durable. Le constat est réjouissant mais ne peut pas être généralisé à toutes les entreprises. En effet, les petites et Moyennes Entreprises (PME) ont largement été tenues à l’écart du débat sociétal jusqu’au début des années 1990. La relation des petites entreprises à la RSE est depuis lors le sujet d’un certain nombre d’étude et la quantité de publications académiques s’est accrue de manière significative ces dernières années. Malgré cet intérêt croissant, le champ de recherche reste jeune et beaucoup de questions restent inexplorées (LOUCHE et MICHOTTE, 2011). Cette jeunesse, elle se ressent aussi sur le terrain. Malgré l’accroissement de la volonté des dirigeants de PME à engager leur entreprise dans la RSE, il semble que l’intégration effective des principes RSE à la gestion de l’entreprise ne suive pas le même rythme. Cela amène la problématique abordée dans le mémoire, celle de l’intégration de la RSE en PME. Guide de lecture et questions de recherche. L’écart constaté entre la maturité des champs de recherche pourtant proches interroge. L’ISO 26000 fixe principes et définitions de la responsabilité sociétale et prétend fournir des lignes directrices pour guider son intégration dans toutes les organisations, tandis que la RSE en PME n’en est qu’à ses débuts et que les tentatives, académiques ou autres, d’intégration de la RSE dans les pratiques de gestion des petites et moyennes entreprises se heurtent à de nombreuses limites. Ceci donne naissance à la question de recherche principale traitée dans le mémoire : La norme internationale ISO 26000 est-elle à même d’intégrer la responsabilité sociétale au sein des petites et moyennes entreprises ? Assez naturellement, la question de recherche principale en a amené d’autres plus spécifiques. D’abord, il a été nécessaire de s’interroger sur le concept de PME et celui de RSE que l’on présente cidessous sous la forme de questions de recherche et questions dérivées. - Qu’est-ce qu’une PME ? o LA PME est-elle une organisation spécifique ?
  • 5. 2 o - Quelle sont les éléments caractéristiques d’une PME ? Qu’est-ce que la RSE ? o Quelles sont les origines de la RSE ? o Qu’elles sont les moyens d’intégration de la RSE ? Le développement de ces questions constitue la trame de fond des 2 premiers chapitres. L’étude de la PME au premier chapitre révèle une certaine dualité entre les cadres conceptuels la définissant. Une prise de position a dû être nécessaire afin de construire la suite du raisonnement. Le choix qui a été fait est celui du caractère « spécifique » de l’objet-PME qu’il convient de reléguer au rang d’hypothèse. Le second chapitre fait état de la littérature en RSE depuis ses origines jusqu’à nos jours en épinglant les diverses influences qui ont construit le concept. Ensuite, la conjugaison des 2 concepts abordés permet une analyse approfondie de la RSE en PME. Les questions ayant sous-tendu cette analyse sont les suivantes - Comment aborder la RSE en PME ? o Quelle pertinence pour la RSE en PME ? o Quelles sont les spécificités de la RSE en PME ?  Est-ce que l’hypothèse de la spécificité des PME se vérifie dans la pratique de la RSE ? C’est ainsi que le troisième chapitre, après avoir justifié la RSE en PME rentre dans une analyse descriptive visant à faire ressortir le plus clair des caractéristiques spécifiques. Le chapitre IV, traite de la normalisation de la RSE et de son implication sur l’intégration de la RSE en PME. Le chapitre aborde la norme ISO 26000 et la question de recherche principale. On y posepose d’abord 2 questions majeures qui en appellent d’autres : - Pourquoi vouloir normaliser la RSE ? o o Quel est le rapport de la PME à la normalisation ? o - Quelssont les apports de la normalisation ? Quels sont les effets de la normalisation sur la RSE ? La norme internationale ISO 26000 est-elle à même d’intégrer la responsabilité sociétale au sein des petites et moyennes entreprises ? o Quel est le niveau d’applicabilité pour l’ISO 26000 en PME ? o Quelle est la légitimité de L’ISO 26000 pour réguler la RSE des PME ? Le dernier chapitre propose quelques suggestions pour rendre la norme plus légitime, plus accessible, plus pertinente et plus applicable à la PME. Il interroge notamment sur : - Comment peut-on améliorer l’impact de l’ISO 26000 sur les PME ?
  • 6. 3 Méthodologie Présentation Chapitre II Chapitre I Mémoire Recherche documentaire: PME Recherche documentaire: RSE Théorie PME Théorie RSE Chapitre III PME Définition et Caractéristiques PME Recherche documentaire RSE&PME Analyse RSE&PME Définition RSE Normalisation Définition et caractéristiques RSE&PME ISO 26000/PME ISO 26000 ISO 26000 & PME Chapitre IV ISO 26000/PME Chapitre V La méthode employée tout au long du mémoire est exclusivement qualitative et essentiellement basée sur une revue et une critique de la littérature qui, à chaque étape, a été mise en vis-à-vis avec une expérience empirique personnelle faite d’observation et de travail sur le terrain1. 1 Malgréle manque d’objectivité de cette méthode de recherche, l’expérience personnelle n’en est pas moins un moyen d’acquisition de connaissance qui est utile à la recherche scientifique (N’Da, 2007). Compte tenu de cela il s’emblait important de spécifier au lecteur la teneur de cette expérience personnelle.
  • 7. 4 Le chapitre I a parcouru la littérature sur le concept de PME. Ce parcours est organisé selon le cadre utilisée par TORRÈS (1997) dans son approche contingente de la spécificité de la PME1 enrichi par les apports de JULIEN (2008) et d’autres. La littérature étant indécise, une réflexion basée sur un schéma dialectique a permis de postuler la spécificité (thèse) de la PME et accepter sa diversité (antithèse) afin de pouvoir réaliser une analyse critique des caractéristiques spécifiques aux PME. Cette analyse s’est axée autour de trois composantes fortes : le dirigeant, la proximité et les relations externes, en s’appuyant à la fois sur la littérature et l’expérience empirique accumulée. Le chapitre II, -organisé de manière chronologique, passe en revue la littérature relative à la RSE et son évolution décennie par décennie de 1953 à 2010. Une analyse plus critique des définitions actuelles est fournie. Le chapitre III fait intervenir les acquis théoriques des deux précédents chapitres, les données empiriques secondaires issues de l’étude de BERGER-DOUCE (2008) ainsi que les acquis d’expérience dans une analyse approfondie qui a pour but la construction d’un profil caractéristique de la RSE en PME. Le chapitre IV fait intervenir la théorie de la normalisation puis présente la norme ISO 26000. Ensuite, une analyse critique est effectuée avec les apports du profil caractéristique de la RSE en PME ainsi que les données empiriques secondaires spécifiques à la question (PERERA, 2008)et conclut à l’inadéquation partielle de la norme ISO 26000 à intégrer la RSE en PME. Le chapitre V analyse plus en profondeur l’incapacité partielle de la norme ISO 26000 à intégrer la RSE en PME et y repère 2 niveaux d’inadéquation (la spécificité et la diversité) qui sont tout droit issus de la définition de la PME. Ensuite, le chapitre suggère un modèle de développement de l’ISO 26000 au moyen d’une spécialisation sur trois degrés qui devrait lui permettrede rendre la connaissance normative actionnable auprès des PME et ainsi de favoriser l’intégration de la RSE dans ces organisations. Limites Le mémoire présente un sujet très large et très jeune sur lequel peu de chercheurs se sont encore essayés à effectuer des analyses quantitatives. En effet le sujet de la RSE en PME ne semble avoir été traité de manière empirique que par une seule personne en France jusqu’à présent (BERGER-DOUCE, 2008). En cause, la très grande hétérogénéité de l’échantillon-PME qui interdit toute généralisation des résultats et l’accessibilité difficile de leurs dirigeants. Dès lors, plutôt que de fournir un travail empirique duquel peu de conclusions peuvent être tirées, il a été choisi de travailler de manière qualitative et descriptive afin de donner à la recherche la profondeur que nécessitait le mémoire. 1 Le stage effectué comme coordinateur du réseau d’entreprise « Positive Entrepreneurs » a permis au mémorant d’emmagasiner des connaissances empiriques tout à fait spécifiques au sujet de l’intégration de la RSE en PME. Grâce au contact quotidien avec des gérants et gérantes de PME qui se déclarent entrepreneurs sociétaux, les préceptes de la RSE en PME ont été acquis de la manière qui semble la plus naturelle, et certainement la plus répandue, la tradition orale et informelle. Pour renforcer encore l’idée selon laquelle le mémorant a pu acquérir le discernement nécessaire à la bonne conduite du mémoire est qu’il est lui-même et depuis trois ans un entrepreneur qui a su intégrer les principes de responsabilité sociétale au cœur de ses activités.
  • 8. 5 En outre, Le mémoire ayant pour objet une norme internationale, il a semblé normal d’avoir une approche globale. D’ailleurs, le niveau d’observation semble justifié puisque « les enjeux de la RSE et du Développement Durable, ne peuvent être abordés efficacement qu’au niveau international » (HELFRICH, 2010). L’analyse de la littérature et l’étude empirique de PERERA (2008) montrent que le Norme ISO 26000 n’est pas applicable en l’état aux PME, du fait de leur spécificité et de leur diversité. Il nous a paru judicieux de nous en tenir à des propositions d’aménagement dont la pertinence pourrait être alors testée par un autre mémoire.
  • 9. 6 Chapitre I - La PME Afin de bien comprendre comment la norme internationale ISO 26000 peut intervenir dans le processus d’intégration des considérations sociétales au sein des PME, il semble judicieux de commencer par fournir une définition des petites et moyennes entreprises. Mais définir les PME, en tant qu’objet ou en tant que concept, n’est pas chose aisée. Pour commencer, nous rappellerons la définition opérationnelle de la PME, celle qui est utilisée par les institutions. Ensuite, afin d’explorer les différentes facettes du concept de PME, près de trente ans de théorie seront passés en revue dans la deuxième section. Nous y épinglerons les principaux courants de pensée ayant porté très haut la réflexion sur la PME. La troisième section tentera de cristalliser toute ces réflexions en une série de caractéristiques non exclusives et non contraignantes mais, néanmoins, éclairantes sur la PME. Pour entrer rapidement dans le sujet du chapitre, voici la définition vulgarisée de la PME : Entreprise d'importance petite et moyenne, « dans laquelle le chef d'entreprise assume personnellement et directement les responsabilités financières, techniques, sociales et morales de l'entreprise, quelle que soit la forme juridique de celle-ci. » (LAROUSSE, 2012). 1. Définition opérationnelle. Parce que la définition opérationnelle permet un repérage relativement aisé des entreprises au moyen de critères facilement mesurables, elle est souvent choisie par la sphère politique afin d’appliquer aux entreprise ainsi identifiées des programme ciblés. Du fait de sa corrélation avec le politique, la définition opérationnelle sera précédée des considérations européennes à l’égard des PME. Celles-ci permettront de mieux comprendre l’ampleur du sujet. 1.1. La PME au centre de la politique économique européenne. Depuis mars 2000 et le Conseil de Lisbonne, l’entreprise est au centre de la stratégie économique européenne. Pour atteindre ses objectifs, l’économie européenne doit devenir la plus compétitive et la plus dynamique des économies de la connaissance. Pour le Conseil de Lisbonne, les entreprises, en particulier les PME, doivent être des moteurs de croissance économique durable et de développement de la cohésion sociale. La même année, la Charte Européenne des Petites Entreprises confère aux PME le rôle de moteur de l’innovation et de la création d’emplois en Europe (Commission Européenne, 2007). C’est pourquoi, lors du Conseil européen de Feira (Portugal), les dirigeants soulignèrent la « nécessité de faciliter le développement des petites entreprises »(Commission Européenne, 2007). Cela doit passer par le renforcement des capacités technologiques des petites entreprises. En particulier, la charte doit consolider « les programmes existants qui visent à promouvoir la dissémination technologique vers les petites entreprises ainsi que renforcer la capacité des petites entreprises à identifier, sélectionner et adapter les technologies »(Commission Européenne, 2007). La charte prévoit également de
  • 10. 7 « développer et d’adapter les systèmes de qualité et de certification aux petites entreprises » (Commission Européenne, 2006, pp.19). En 2003, la Commission publie le « Green PaperEntrepreneurship » qui établit les forces et faiblesses de l’entrepreneuriat en Europe tout en dégageant des suggestions d’action possible en termes de politique économique. L’« Action Plan » qui en découle établit une stratégie pour l’entrepreneuriat pour les années à venir. L’objectif est alors de développer un environnement dans lequel les PME survivent et prospèrent. Mais les PME et, plus particulièrement, les micro-entreprises, qui constituent plus de 90% des effectifs, n’ont pas les ressources pour affronter les défis que sont l’adaptation aux nouvelles technologies et la mise en conformité aux exigences réglementaires. De plus, les PME font face à une pression concurrentielle grandissante en grande partie due à la globalisation et à l’ouverture des marchés rendues possibles notamment par les nouvelles technologies. Si les dirigeants européens veulent voir les objectifs de croissance durable et de compétitivité atteints avec le concours des PME, ils doivent impérativement mettre en œuvre les politiques nécessaires afin de protéger les plus petites entreprises de leurs propres faiblesses. Pour assurer la bonne santé des PME qui garantissent près de 66% (voir figure 2) de l’emploi en Europe, les interactions entre les états et l’Europe doivent nécessairement être profondes. Il s’agit d’assurer la cohérence et l’efficacité des mécanismes pouvant limiter les distorsions de la concurrence tout en encourageant l’innovation et en facilitant l’accès au financement. Profondeur, cohérence et efficacité dans la mise en place d’un programme sont trois des principales raisons pour une définition commune de la PME. 1.2. La nouvelle définition de la PME. Selon la Commission Européenne, une définition commune est nécessaire à l’application d’une stratégie économique visant plusieurs objectifs. Ces objectifs sont probablement ceux consignés dans le « Small Business Act » européen mais les promesses explicites de la définition commune sont celles-ci : - Promouvoir les micros entreprises, - Améliorer l’accès au capital en privilégiant certains types d’investisseurs (fonds régionaux, sociétés de capital-risque, business angels), - Promouvoir l’innovation et améliorer l’accès à la recherche et au développement en encourageant la collaboration avec les universités et les centres de recherche. - Soutenir les entreprises qui en ont réellement besoin, celles qui n’ont pas d’autres alternatives. Pour la Commission Européenne, une PME est une entreprise dont les effectifs et le chiffre d’affaires annuel ou le bilan annuel sont limités. Il est important de souligner que la PME est d’abord une
  • 11. 8 entreprise, c’est-à-dire une « entité, indépendamment de sa forme juridique, exerçant une activité économique ». Les limitations sont, quant à elles, reprises dans la figure 1 ci-dessous. Figure 1 - Seuils de définition d'une PME Source : Communautés européennes, 2006, La nouvelle défintion des PME ; http://europa.eu.int/comm/enterprise/enterprise_policy/sme_definition/index_fr.htm En plus de ces seuils limites, plaçant l’entreprise dans l’une ou l’autre catégorie, la recommandation de la Commission établit de manière formelle la manière de calculer les données propres à l’organisation. Ainsi, lorsque l’entreprise entretient des relations particulières (sous la forme d’une participation en capital ou de droit de vote) avec une ou plusieurs autres entreprises, le calcul doit incorporer une partie ou la totalité des données des entreprises en relation. C’est pourquoi la Commission Européenne distingue les entreprises autonomes qui ne doivent considérer que leurs données propres, les entreprises partenaires qui doivent intégrer une partie des données des partenaires, et les entreprises liées qui doivent intégrer la totalité des effectifs et du chiffre d’affaire ou du montant bilantaire à leurs calculs. Il est intéressant de relever que, dans la catégorisation quantitative des petites et moyennes entreprises effectuée par la Commission Européenne, on retrouve certaines caractéristiques issues des tentatives de spécification qualitative des PME dont il est fait mention dans la section suivante. Les seuils sont le reflet quantitatif et arbitraire de la petite taille de l’organisation. De manière équivalente, les réflexions faites sur les relations des PME avec les autres entreprises et les considérations liées à la contrôlabilité, c’est-à-dire l’autonomie de la gestion et la non-dépendance financière, ont probablement trouvé, nous le verrons, dans cette recommandation leur pendant qualitatif, à savoir : la règlementation en termes de droit de vote et de participation financière.
  • 12. 9 1.3. Conclusion. « Pour utiles qu’elle soient, les définitions quantitatives de la PME se révèlent insatisfaisantes lorsque l’on s’intéresse aux enjeux de gestion et aux méthodes adaptées à ces organisations » (COURRENT et CAPRON, 2012). La responsabilité sociétale d’une entreprise étant d’intégrer dans sa gouvernance l’impact de ses activités sur l’environnement naturel et social, il semble nécessaire d’adopter une définition permettant d’en savoir plus long sur les pratiques de gestion des PME. Puisqu’il semble qu’un découpage quantitatifn’apporte pas le sens recherché au concept de PME, la section suivante propose de se frayer un chemin vers une définition qualitative. 2. PME : un concept nébuleux. Comme souvent en science sociale et, plus généralement, dans la recherche, donner une définition claire d’un concept n’est pas chose aisée. Cela est d’autant plus vrai pour l’un des plus jeunes paradigmes des sciences de gestion (BYGRAVE, 1989) que sont l’entrepreneuriat et le concept de PME. Il n’en reste pas moins que cette définition est nécessaire, non seulement, pour que le concept existe mais aussi pour qu’il puisse être un élément constitutif d’autres avancées théoriques. La difficulté d’une définition et la raison d’être de celle-ci sont les matières discutées dans les deux sous-sections suivantes. 2.1. Difficulté d’une définition. Comme D’Amboise en 1993, on pourrait reprocher au corpus théorique attaché à la PME son caractère fragmenté. Plus récemment, on « considère l’étude du sujet*-PME] comme étant un potpourri »(LOW, 2001) cherchant « dans toutes les directions sans théorie encore solide »(JULIEN, 2008). Pour expliquer le flou autour de ce concept,WTTERWULGHE (1998) invoque une grande diversité des PME, du fait de leur taille d’abord, mais aussi du fait de leur environnement économique et de leur statut juridique. Mais la nature de l’objet n’explique pas à elle seule la difficulté. En effet, la recherche, censée amener la définition, y est pour quelque chose. D’après la lecture de trente ans de théorie en PME»(JULIEN, 2008),celle-ci a vu une diversité tellement grande de chercheurs (économistes, sociologues, psychologues, anthropologues, géographes, … ) s’intéresser au cas de la PME que Olivier Torres en 1997 dit de la recherche en PME qu’elle est « fondée sur un projet cognitif nécessairement flou et instable et dont les frontières sont nécessairement contingentes. »(TORRES, 1997 pp.26). 2.2. Raison d’être. Il n’en reste pas moins que l’existence du concept de PME, son étude et sa définition sont justifiées à plus d’un titre. En effet, TORRÈS (1997) affirme encore qu’il y a trois bonnes raisons pour la recherche de se pencher sur les PME. La première est empirique. « Les micro-, les petites et les moyennes entreprise (PME) sont le moteur de l’économie » (Commission Européenne, 2006). En outre les PME représentaient, en 2006, 99% de l’ensemble des entreprises de l’UE pour un total de 23 millions de PME fournissant environ 75 millions d’emplois, soit environ 40% de la mise à l’emploi de la population en activité. Le soutien aux
  • 13. 10 PME étant une des priorités de la Commission Européenne, une définition commune de la PME est une nécessité qui s’impose. La deuxième raison est d’ordre méthodologique. Comme d’autres avant lui (D’AMBOISE, 1988)TORRÈS(2007) relève que les PME sont un terrain d’expérimentation où tous les phénomènes sont plus lisibles. En ce sens SARNIN (1990) ira même jusqu’à affirmer que la pertinence de « l'objet PME tient plus dans sa valeur heuristique d'analyse des changements que dans la construction d'une catégorie, d'un concept empirique particulièrement utile »(SARNIN, 1990). La troisième raison relevée par TORRÈS (2007) s’appuie sur certains fondements théoriques qui expliqueraient l’élévation de l’objet-PME au rang d’objet de recherche scientifique à proprement parlé. Parmi d’autres, et sur base du recensement effectué par JULIEN (1993), il cite : le rôle de l'entrepreneuriat, la théorie des interstices, les critiques à l'égard des économies d'échelle ou de champ, les besoins de flexibilité et les mutations de nos systèmes productifs. Une dernière justification a été ajoutée en 2007 par Olivier TORRÈS dans son compte rendu sur « La recherche académique française en PME » où il souligne l’attention accrue qui est portée sur les petites entreprises par le monde politique. En effet, il semble que depuis plus d’une dizaine d’années, les PME soient au centre de bon nombre de politiques macroéconomiques. Le domaine de la PME constituerait donc bien un domaine d’étude à part entière et le besoin d’une définition de la PME serait donc réel. Difficile de l’infirmer tant les recherches, qu’elles soient en faveur ou en défaveur de la petite et la moyenne entreprise, ont fleuri durant ces trente dernières années. 3. La recherche et les courants de pensée. Dans le but de mettre en lumière un certain nombre de caractéristiques associées aux petites et moyennes organisations, cette section présente brièvement les différents courants de pensée ayant influencé la recherche en PME. En premier lieu, la vision primaire des économistes classiques est présentée. Elle est directement suivie par la réponse néo-classique en la matière. Ensuite, nous verrons comment, d’une approche purement économique, la recherche est passée entre les mains d’un grand nombre de praticiens pour finalement peaufiner le concept de PME. 3.1. Les balbutiements. Il est souvent admis dans la littérature que, bien avant qu’il soit considéré par la recherche dans la deuxième partie du XXème, le sujet-PME a été effleuré à de nombreuses reprises par quelques-uns des piliers de l’économie moderne. Durant le 19ème siècle, les économistes classiques ont toujours considéré l’entreprise, petite ou grande, comme une boîte noire agissant pour maximiser son profit et permettant ainsi la répartition optimale des ressources en vertu du principe de la main invisible d’Adam SMITH. Bien que ce dernier, quand il parlait d’entreprise, ne considérait quasi exclusivement que les petites entreprises (les
  • 14. 11 grandes entreprises, issues des colonies, libérales). Ce n’est qu’au début du XX ème ne se comportaient pas exactement comme entités que certains « défricheurs » se sont intéressés aux caractéristiques des PME. On peut citer, à titre d’exemple, VEBLEN (1904), qui mettra le doigt sur une rupture croissante entre les entrepreneurs et les capitalistes de la grande entreprise, ou ANSIAUX (1926), qui affirme qu’il y aura toujours des PME du fait que certaines productions à faible demande et à fort degré de personnalisation ne peuvent être prises en compte par les grandes entreprises. ANSIAUX, encore lui, reconnut également un avantage aux plus petites entreprises qui est celui des coûts de contrôle quasiment inexistants. La réelle prise de conscience vis-à-vis de la PME comme sujet d’étude à part entière est née avec l’apparition de recherches concernant l’influence de la taille sur l’organisation. 3.2. La prise de conscience. Pour citer Olivier TORRÈS (1997) « les premiers jalons de la recherche en PME sont à mettre au crédit de chercheurs qui ne travaillent pas sur la PME ». C’est à l’école d’ASTON(PUGH et al., 1968, PUGH et al., 1969) que ces premiers pas sont souvent attribués, pour avoir été des pionniers dans l’étude et la mise en évidence de l’effet de la taille sur l’organisation. Bien que l’effet-taille fût largement controversé, on peut néanmoins considérer que, même si elle n’est pas la seule variable explicative, la taille a une influence (limitée) en matière de structure organisationnelle. Il n’en reste pas moins que, à ce stade de la recherche, l’effet-taille ne semble pas être suffisant pour différencier la PME et la grande entreprise sur le point organisationnel. Les avancées ultérieures se fondent sur le fait que l’effet de la taille semble induire « des changements abrupts et discontinus»(MINTZBERG, 1982)sur la structure des organisations. Ces observations constituent le point de départ de ce qui est appelé par GODENER (2002) « Le modèle des métamorphoses », selon lequel « Les organisations évoluent par paliers et changent dans l’urgence à l’approche d’un seuil organisationnel caractérisé par un sursaut dans l’agencement du travail au sein de l’organisation. Certain de ces paliers, les trois premiers, caractériseraient la petite et moyenne organisation alors que les deux dernières seraient caractéristiques des grandes et très grandes entreprises »(GODENER, 2002) Bien que ces études constituent des avancées non négligeables, la vraie problématique concernant l’étude des PME est la mise en évidence de seuils critiques permettant d’identifier à quel moment de son existence une organisation peut être considérée comme une PME. Mais les études empiriques ne sont pas unanimes et sont donc peu convaincantes. Finalement, certains chercheurs(GERVAIS, 1978) suggèrent que le modèle des stades de croissance s’avère trop général pour être opérationnel. Bien que la recherche semble être tenue en échec, les tentatives brièvement décrites ci-dessus n’ont pas pour autant été vaines. Deux leçons peuvent être tirées de cette dizaine d’années de recherche (1965-1975).
  • 15. 12 La première est que, malgré son caractère controversé, l’effet-taille reste considéré comme ayant une relative valeur explicative de la structure des organisations. MINTZBERG l’a, par ailleurs, élevé au rang de facteur de contingence. La seconde est une leçon épistémologique. En effet, l’étude de l’effet-taille arévélé deux écoles de pensée différentes : l’une est l’approche universelle, animée par le souci de généralisation, à laquelle s’oppose l’autre, l’approche contingente, plus réaliste et plus nuancée. Ce clivage guidera la plupart des recherches ultérieures en matière de PME. 3.3. La dualité entre spécificité et diversité. Partant de ce clivage quasi dogmatique, on peut distinguer deux courants dans la recherche en PME: le courant de la spécificité, qui peut clairement être associé à l’approche universelle, et le courant de la diversité, qui se réclame de l’approche contingente. i. Le courant de la spécificité. Après l’échec du découpage par la taille, considéré comme arbitraire par CANDAU (1981), le moment est venu de « jeter un regard neuf sur la question »(Bayad, 1995) de la PME. Parce que les petites organisations n’ont, jusque-là, été étudiées que comparativement aux grandes organisations, la cible est dorénavant « de passer d'une phase de vision du phénomène de la petite entreprise, perçue comme institution spécifique d'un capitalisme à une phase de découpage et d'abstraction, où la réalité est conçue autour du type idéal de firme représentative. »(MARCHESNAY, 1982). Cette étape importante de conceptualisation fait de la PME un objet de recherche à part entière. Partant de là un grand nombre de chercheurs vont s’efforcer de trouver des caractéristiques communes aux PME. Entre 1975 et 1985, les auteurs vont tenter de mettre en évidence une certaine uniformité liée à la petite taille en examinant toute les constantes, permanences et tendances permettant de caractériser la PME. On passe donc de la « reconnaissance à la connaissance des PME »(GUILHON, 1994). Mais la volonté normative de tous ces auteurs rencontre assez rapidement la critique qui leur reproche d’idéaliser l’uniformité de la nature de la PME. Olivier TORRÈS (1997) associe le courant de la spécificité à une dérive dogmatique de l’universalisme de la spécificité. Ajoutant à cela que les théories de la spécificité se sont établies sur un postulat non vérifié empiriquement : la thèse de la petite taille, il n’en a pas fallu d’avantage au défenseur de la contingence pour remettre très sérieusement en question le courant de la spécificité. Dès lors, et en opposition avec la volonté de généralisation de leurs pairs, d’autre chercheurs vont entamer des travaux empiriques afin d’établir l’hétérogénéité de la population des PME. C’est le courant de la diversité
  • 16. 13 ii. Le courant de la diversité. Les défenseurs du courant de la diversité tel que BERNARD et RAVIX (1988) ont pu démonter la théorie de la spécificité en s’attaquant au fondement de celle-ci, c’est-à-dire l’homogénéité organisationnelle au sein d’une tranche d’entreprises de tailles similaires. Ces études montrent souvent que le terme « PME » désigne des réalités multiples se trouvant au carrefour d’un certain nombre de facteurs de contingence. Certains praticiens porteront l’analyse descriptive des facteurs de contingence si loin qu’ils en arrivent à considérer chaque entreprise comme un cas unique. Confrontant les dérives casuistiques des deux courants, O.TORRÈS (1997) dira qu’ « à l’irréalisme des modèles universels s’oppose le surréalisme des approches contingentes ». Pour conclure cette section, il est important d’avoir à l’esprit la naissance d’une forme de dualité spécificité-contingence dans la recherche en PME entre 1975 et 1985. Cet antagonisme est considéré comme un véritable dilemme (JULIEN et MACHESNAY, 1988) pour le chercheur devant nécessairement se positionner. 3.4. Complexification. Les fondements de la recherche en PME que sont la spécification et la diversité, on l’a vu, n’ont pas su apporter une définition valide de la petite organisation. C’est pourquoi depuis le milieu des années 80 jusqu’à nos jours, la recherche théorique sur ce sujet n’a cessé de se développer en se complexifiant très fortement. D’une part les praticiens des sciences de gestion se sont essayés à aller plus loin sur base des théories existantes. Et, d’autre part, des apports nouveaux ont été véhiculés par des sciences périphériques, de près ou de loin rattachées à l’étude de l’organisation. Cela donne naissance à ce qui est désigné par Olivier TORRÈS comme le courant de la synthèse et le courant de la dénaturation. i. Courant de la synthèse. Ce courant est véritablement le prolongement des théories précédentes car il combine la thèse de la spécificité de la PME avec son antithèse la diversité. En intégrant la diversité dans la spécificité on rend cette dernière modulable (TORRÈS, 1997), polymorphe (JULIEN, 1994). Cette théorie de la synthèse offre un cadre d’analyse intéressant car il prend en compte la diversité apparemment inhérente au monde de la petite entreprise tout en permettant la mise en relief de la spécificité. Le concept de PME est alors considéré par Martinet (1986) tel « une forme, invariable pour un temps, ne couvrant pas une réalité intangible et délimitée »(MARTINET, 1986) qui tolère « l’ambiguïté » (MARTINET, 1986). Allant dans le même sens, plusieurs auteurs parleront de typologie « ad hoc » permettant de catégoriser les organisations par rapport à un échantillon de référence préalablement caractérisé par certains traits spécifiques aux PME.
  • 17. 14 La synthèse semble prometteuse tant elle semble faire le compromis de la spécificité et de la diversité. Mais, à l’instar du courant de la spécificité, la synthèse pêche par excès d’universalisme et Olivier Torrès lui objectera que c’est à nouveau la spécificité, pourtant non validée, qui est utilisée comme postulat de départ. Malgré l’hétérogénéité, certains chercheurs tels que CANDEAU (1981) ou BAUER (1995) admettent que la PME puisse avoir une nature caractéristique à elle-même. Mais si l’on admet cela, certains réclament que l’on admette sa dénaturation. ii. Courant de la dénaturation. Le courant de la dénaturation part du principe que la spécificité de la PME, souvent prise comme postulat à la base de la recherche en PME, n’est rien d’autre qu’une hypothèse réfutable. Les acteurs de ce courant, le plus récent, vont faire la critique de la spécificité en démontrant que, dans certains contextes, les frontières fixées par la spécificité ne sont pas aussi généralisantes qu’elle le voudrait. Ce dernier courant cherche à interroger l’identité de la PME en travaillant souvent sur les zones grises de sa définition. Les chercheurs évoluent par le jeu de la réfutation empirique appuyée le plus souvent par la réfutation logique dans le but de repousser les limites caractéristiques du concept de PME. On notera d’ailleurs, à titre d’exemple, les travaux sur la caractéristique d’indépendance financière des PME qui, après avoir été passée au crible de la dénaturation, est devenue la nondépendance financière des PME. 3.5. Conclusion. L’évolution du concept de PME au travers des années témoigne bien de l’intérêt de la communauté scientifique pour ce domaine d’étude. Même si la présence des PME d’un point de vue empirique, économique et, plus récemment, politique n’est plus à prouver, on a pu s’apercevoir que sur le plan théorique, le concept organisationnel de la petite et de la moyenne entreprise est toujours remis en question et n’a de cesse de se métamorphoser. Les limites de la PME sont continuellement repoussées, contestées, mises à l’épreuve puis renforcées, ce qui donne au concept un caractère vivant, une forme quasi organique. Au-delà des nombreuses preuves de l’existence d’une entité organisationnelle particulière et caractérisée, la recherche a aussi démontré que le concept de PME souffrait d’une vraie faiblesse épistémologique. En effet, il est admis que la plus grande part des thèses énoncées en faveur de la spécificité de la petite entreprise résiste difficilement à la critique. Ainsi les thèses liées à la recherche en PME sont rarement validées dans l’absolu. Il n’en reste pas moins que, dans la recherche en PME, à l’image du courant de la contingence qui existe en réponse à l’universalisme, la dénaturation existe en réponse à la spécificité de la PME. Dans la mesure où certaines théories existent par leur opposabilité, dans laquelle elles se renforcent d’ailleurs mutuellement, on peut considérer que la spécificité de la PME dans sa version augmentée, la synthèse, n’exclue pas une relative dénaturation par des éléments de contexte.
  • 18. 15 Si ce raisonnement n’est pas infaillible, il révèle en tout cas une prise de position claire en faveur du courant de la synthèse. Le concept de PME sera donc considéré dans la suite de ce mémoire comme un ensembled’entreprises hétérogènes aux caractéristiques communes. A défaut, de la démonstration de cette hypothèse, la spécificité de la PME sera postulée. Partant de là, il semble acceptable de vouloir caractériser la PME à l’aide d’une série de caractéristiques qualitatives, non contraignantes et non exclusives, tout en gardant l’esprit ouvert à la critique et à la dénaturation. C’est l’exercice qui est proposé dans la section suivante 4. Vers une définition : les caractéristiques. La caractérisation qualitative de la PME, en opposition avec une approche quantitative décrite précédemment, est souvent consacrée comme étant la plus complète car permettant une approche socio-économique relativement flexible de la PME. Beaucoup d’auteurs se sont essayés à la caractérisation de la PME ces dernières décennies, mais aucun n’a jamais fait l’unanimité. En conséquence, c’est en toute humilité qu’un tour d’horizon des caractéristiques de la PME est proposé dans cette section. Ces caractéristiques rapportées de la littérature sont réparties selon trois grands axes : - les caractéristiques liées au dirigeant de la PME, - celles qui sont sous-tendues par un mécanisme de proximité, - et toutes les caractéristiques qui sont déduites des rapports qu’entretient la PME avec l’extérieur. 4.1. Caractéristiques liées au dirigeant. Suivant l’idée de Bayad et Nebenhaus (1994), pourtant qualifiée de trop universelle, qui affirmait que le rôle du dirigeant est en réalité une des idées centralesde tout travail théorique enPME , R. Wtterwulghe dans son ouvrage « les P.M.E., une entreprise à taille humaine » déclare que la tempérament du dirigeant est décisif pour appréhender ce phénomène économique qu’est la PME(WTTERWULGHE, 1998). Ainsi, il appartient de citer en premier lieu BAUER (1995) et sa loi fondamentale décrivant le dirigeant de PME comme agissant sous l’emprise d’une triple rationalité : une rationalité économique, une rationalité politique et une rationalité familiale. Cet entrepreneur, un être à trois têtes, serait habité par un homo economicus se souciant des résultats économiques et financiers de son entreprise, par un homo politicus qui aurait à cœur d’asseoir ou de développer son pouvoir au sein de son entreprise et par un pater familias qui tente à sa manière d’aider ses enfants. Avant BAUER, c’est CANDEAU qui, en 1981, met en relief l’importance du rôle du chef d’entreprise. Et c’est d’ailleurs le lien unissant le dirigeant au mode de gestion personnalisée de la PME qui constituera un postulat de départ pour son ouvrage « Pour une taxonomie de l’hypofirme »(CANDAU, 1981). Plus récemment, LOUCHE et MICHOTTE (2008)notent que dans les PME une plus grande place est donnée aux valeurs et aux motivations personnelles. La définition de la Confédération Générale du Patronat des Petites et
  • 19. 16 Moyennes Entreprises (CGPME -1983) souligne la responsabilité directe du dirigeant envers son entreprise. L’idée selon laquelle le chef d’entreprise est souvent un dirigeant-propriétaire est partagée par plusieurs institutions telles que CGPME (France), Small Business administration (EtatsUnis), le rapport BOLTON (Angleterre) et la Commission Européenne. S’appuyant sur le fait que le dirigeant de PME se doit également d’être propriétaire de l’entreprise, certains, dont WYNARCZYK et al. (1993) et HIRIGOYEN (1984), ont mis le doigt sur la tendance qu’a le dirigeant à maximiser sa propre fonction d’utilité plutôt que le profit de l’entreprise. Le dirigeant de PME est le plus souvent actif à tous les niveaux de l’entreprise. Devant à la fois être stratèges et opérateurs, les dirigeants de PME sont reconnus pour leurs compétences multitâches. Le revers de cette particularité est la faible spécialisation fonctionnelle et un manque d’expertise(VERHEES and MEULENBERG, 2004). LEPOUTRE et HEENE (2006) expliquent qu’en plus de ce manque de connaissance, les dirigeants de PME sont connus pour constamment manquer de temps. Alors qu’ils travaillent en flux tendu, les patrons sont peu enclins à déléguer leurs responsabilités multiples. Ces deux caractéristiques – le manque de temps et le manque de connaissance – influencent négativement la capacité d’absorption1 de l’entreprise(LEPOUTRE and HEENE, 2006). Les conceptions personnelles du dirigeant influencent beaucoup l’orientation et la manière de fonctionner de la PME. « Or, le monde des PME se caractérise par une très grande hétérogénéité des profils dirigeants, tant du point de vue de la formation que du parcours professionnel ou de l’origine sociale. »(COURRENT and CAPRON, 2012). Ainsi, les recherches ont tenté d’établir une typologie du profil des dirigeants et ont conduit à l’identification d’une variété d’entrepreneurs-types. Il y a les dirigeants à la recherche d’opportunité et ceux qui protègent et développent un patrimoine. Il y a ceux qui cherchent la satisfaction que leur apporte l’indépendance de l’entrepreneuriat et ceux qui ont été forcés de créer une entreprise par défaut d’emploi salarié. On conçoit dès lors que la diversité des profils dirigeants est en grande partie explicative de l’hétérogénéité de la PME-objet. 4.2. Caractéristiques liées à la proximité. Dans son livre «Les PME » Olivier TORRÈS (1999) « cherche à dresser une énumération plus ou moins exhaustive des traits communs aux PME[et les]regroupe sous un mécanisme fédérateur »(COHEN et al., 1990)qu’il estime être la proximité. Bien que fortement inspirée de cet ouvrage, cette section tente aussi de rassembler les caractéristiques évoquées par d’autres auteurs qu’il semble bon de rallier au groupe de caractéristiques liées à la proximité. Pour commencer, les PME sont régulièrement qualifiées d’organisations peu hiérarchisées. En effet, le dirigeant est souvent proche de ses salariés hiérarchiquement. Un organigramme plat représente assez bien ce contact vertical étroit (WOITRIN et al., 1966)et confère aux petites entreprises le caractère profondément humain souligné dans l’ouvrage de R. WTTERWULGHE (1999). 1 Capacité à reconnaître et à exploiter les opportunités issues de l’environnement extérieur à l’entreprise (COHEN ET LEVINTHAL, 1990, pp. 128-152)
  • 20. 17 Si, dans les grandes entreprises, les fonctions sont souvent clairement différenciées, ce n’est que rarement le cas au sein des PME. En effet, ces dernières peuvent être caractérisées par une forte imbrication des fonctions et le dirigeant de petite entité doit souvent revêtir des casquettes très différentes, passant de stratège à exécutant ou de commercial à gestionnaire des ressources humaines. SelonJULIEN, cette faible spécialisation du dirigeant vaut également pour ses employés. La proximité à l’œuvre dans les PME induit une communication plutôt directe, informelle et souvent orale. Les informations sont échangées avec un minimum de formalités et les mécanismes de coordination sont peu standardisés. Le degré extrêmement bas de formalisation(LOUCHE, 2011)s’explique également par le fait d’un modèle de gestion centrée sur le dirigeant. Le dernier point de cette section est avancé par JULIEN (1984). C’est la proximité qu’affichent les PME avec leurs marchés. On parle ici aussi bien d’une proximité géographique que d’une proximité psychologique. En effet - et TORRÈS le confirme - on constate souvent que les petites entreprises sont le plus actives sur des marchés locaux. Lorsque ce n’est pas le cas, et que la PME se tourne vers l’international, elle aura une préférence pour des marchés ayant une culture ou des pratiques similaires. Ainsi, les PME Américaines auront une tendance à pénétrer le marché européen en commençant par le Royaume-Unis. 4.3. Caractéristiques liées aux interactions. Les éléments caractérisant la relation entre la PME et son environnement (clientèle, marché des capitaux, autres entreprises, etc.) ont régulièrement été utilisés par de grandes institutions telles que la Small Business Administration ou la Commission Européennedans leurs tentatives de catégorisations qualitatives. Mais d’autres, tels que M. WOITRIN (1966), ont mis le doigt sur le caractère singulier des relations qu’entretiennent les PME avec leur environnement socioéconomique. La particularité de ces relations résulte de la petite taille de la PME (WTTERWULGHE et JANSSEN. 1998). La faible dimension absolue de la PME lui confère, selon WOITRIN (1966), un pouvoir de négociation diminué, tant pour les achats que pour les ventes. Tributaire de sa petite taille, la petite entreprise se voit souvent reléguée dans la catégorie des preneurs de prix. Cette situation de preneurde prix place la PME dans un climat d’incertitude. Cette incertitude, caractéristique de la PME selon WYNARCZYK (1993), est accentuée par une offre souvent réduite à un monoproduit et à une clientèle restreinte. La Pme est considérée comme étant indépendante. Le Rapport BOLTON met en avant l’indépendance financière des PME (les tenants du courant de la dénaturation parleront plutôt de « non-dépendance financière ») et leur autonomie de gestion, excluant d’emblée les filiales et certaines sous-traitances. La Commission Européenne attache elle aussi une grande importance à l’indépendance de l’organisation dans sa nouvelle définition des PME (Commission Européenne, 2006).
  • 21. 18 Cette indépendance rend les PME difficiles à réguler. En effet, selon JENKINS (2004), les PME sont peu enclines à adopter les régulations car elles manifestent une grande méfiance à l’égard de la bureaucratie (SPENCE, 1999) et répondent peu aux pressions institutionnelles. Néanmoins, et en dépit de leur caractère indépendant, les PME semblent entretenir de meilleures relations stratégiques avec leurs parties prenantes que les grandes entreprises (FULLER and TIAN, 2006, LEPOUTRE and HEENE, 2006, MOORE and SPENCE, 2006, PARSA and KOUHY, 2008) et ce afin de dépasser les différentes difficultés et contraintes auxquelles elles font typiquement face1. Relevons comme dernier critère mentionné à plusieurs reprises dans la littérature que la PME a généralement des ressources financières fort limitées. Ceci s’explique par des difficultés à se fournir sur le marché des capitaux et par le fait que l’accès au crédit est rarement aisé. C’est pourquoi les PME croissent souvent sur base de l’autofinancement ou d’un financement acquis dans un entourage proche. 5. Conclusion. Les sections précédentes ont démontré l’intérêt d’une définition qualitative. En effet, par sa capacité à expliquer le comportement de l’organisation qui rentre dans son champ d’application, la définition qualitative permettra d’élaborer un argumentaire circonstancié. La définition qualitative n’est pas aisée. Plus de trente années de recherche n’ont pas réussi à asseoir un consensus sur la nature et les propriétés de la notion de PME. Il semble que le chercheur désireux d’utiliser le concept se doive de prendre position. Dans le cas présent, il est choisi d’accepter la PME dans sa spécificité mais on n’exclut pas que l’objet-PME puisse englober une grande diversité. C’est donc le courant de la synthèse qui est favorisé et qui guidera la suite de la réflexion. Ayant accepté la spécificité de la PME-objet, la dernière section s’est attelée à caractériser les petites et moyennes entreprises. Les caractéristique dégagées et structurées en 3 catégories ont permis une meilleure compréhension des enjeux auxquels font face ce type d’organisation. La synthèse de ces caractéristiques peut être observée dans le tableau ci-dessous. En révélant les principes à l’œuvre à l’intérieur de la PME, ces éléments permettent de comprendre et peut-être d’anticiper les interactions que ce type d’organisation noue avec l’extérieur. Être capable de discerner les forces en présence semble tout à fait essentiel pour comprendre comment la PME peut interagir avec la norme ISO 26000, puisque la responsabilité sociétale prétend moduler le comportement de l’entreprise en fonction de ses rapports à l’environnement naturel et social. 1 L’accès au capital, le recrutement d’employé de qualité, accès au marché, etc.
  • 22. 19 Tableau 1 - Caractéristiques spécifique à la PME Caractéristiques liées au dirigeant. Caractéristiques liées à la proximité. Caractéristiques liées aux interactions Mode de gestion personnalisé suivant une triple rationalité : économique, politique et familiale. Responsabilité directe du dirigeant. Multitâche. Faible spécialisation fonctionnelle. Faible délégation des responsabilités. Capacité d’absorption faible due au manque de temps et de connaissance. Variété des profils du dirigeant explique en partie l’hétérogénéité des PME Organisation peu hiérarchisée. Forte imbrication des fonctions. Faible spécialisation du personnel. Communication directe et informelle. Proximité avec le marché. Faible pouvoir de négociation. Tributaire du marché (preneur de prix, incertitude, monoproduit, clientèle restreinte). Indépendante financière. Autonomie de gestion. Ressources financières limitée Le concept de PME maintenant clarifié, c’est la notion de RSE qui va être étudiée.
  • 23. 20 Chapitre II - La RSE. La Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) est un concept qui arrive des Etats-Unis en Europe dans le courant des années 1960. Le terme est issu de la locution anglo-américaine Corporate Social Responsability(CSR) et peut être considéré comme décrivant la contribution des organisations au développement durable. Comme on le voit dans ce chapitre, la RSE est originellement appliquée aux grandes entreprises et se justifie par l’encastrement de ces organisations dans la société. L’idée est ici que, puisque la société permet l’existence des entreprises, celles-ci lui sontredevables(COURRENT et CAPRON, 2012). Cette conception moderne est le fruit d’une évolution de près d’une soixantaine d’années. La première partie parcourtl’essentiel de cette évolution et explique comment on est passé d’une responsabilité de type paternaliste à une pratique de gestion dont les enjeux sont devenus résolument stratégiques. La seconde partie de ce chapitre approfondit la notion de RSE comme elle est perçue aujourd’hui en offrant un panel de définitionsassorties d’un tableau de la RSE contemporaine oùsont identifiés les acteurs. 1. L’évolution de la RSE : une revue théorique. La littérature s’accorde en tout cas sur ce point : le concept de Responsabilité Sociétale des Entreprisesest enraciné dans une histoire longue et variée au cours de laquelle, celle qu’on appelle par voie de facilité la RSE a subi une évolution toute caractérisée par les transformations parallèles de l’opinion publique, des pratiques et théories de gestion, qui lui ont permis d’être rationalisée tout au long de ces 60 dernières années. C’est Mon-Dong Paul LEE (2008) qui, dans la rétrospection qu’il fait de la théorie en RSE(LEE, 2008), qualifie l’évolution historique du concept de rationalisation progressive. Selon lui, cette rationalisation est le fruit des deux grands changements conceptuels qui se sont opérés sur le niveau d’analyse de la RSE et sur l’orientation théorique qu’a pu prendre la recherche en la matière. En effet, les développements théoriques sur le sujet de la RSE sont, à l’origine, partis d’une analyse de niveau macroéconomique pour évoluer vers une analyse plus centrée sur le niveau organisationnel. L’orientation théorique de la RSE a, elle aussi, évolué pour devenir plus spécifique et, bien qu’explicitementnormative et basée sur l’éthique au début de la recherche dans les années 50-60, elle tend aujourd’hui, près de soixante années plus tard, à être beaucoup plus liée à la performance des organisations et se réclame d’une normativité implicite. Ceci est développé plus loin. 1.1. 1950-1960 : le début de l’époque moderne en matière de RSE. Dans la première moitié du XXème siècle, l’époque du Fordisme, on voit la RSE naître sous la forme d’un paternalisme que les « businessmen » se devaient d’assumer et qui relevait principalement de certaines considérations éthiques et religieuses(DUPUIS J.C., 2006). En effet, certaines préoccupations à l’égard de l’impact de l’entreprise sur la société ont été exprimées avant les années
  • 24. 21 cinquante. Le personnage d’Henry Ford, pour ne citer que lui, incarnebien les pionniers de la RSE puisque c’est lui qui, en 1917, tenta d’asseoir son idée du « business » comme étant un service à la société(LEE, 2008). Néanmoins, c’est l’ouvrage « Social Responsibilities of Businessman » (1953) de Howard Bowen, rédigé à la demande du « Federal Council of the Churches of Christ in America » (conseil constitué d’églises protestantes et orthodoxes) , qui est retenu par la communauté académique comme étant la première tentative de théorisation des relations entre les entreprises et la société(LEE, 2008). Cet auteur est aujourd’hui considéré par les académiques – par CARROLL notamment(CARROLL, 1999) – comme étant le père de la RSE. Une fois consacrée par Bowen dans son ouvrage, la RSE a conservé ses fondamentaux. Elle prend toujours ses sources dans l’éthique et elle est considérée comme étant « une mesure complémentaire et corrective de certaines défaillances sociales »(LEE, 2008, p56) donnant au concept une vocation macro-sociale. Aussi, Bowen ne tente pas de cacher son orientation normative puisque - par deux fois - il exhorte tantôt les businessmen, tantôt les entreprises à faire face à « l’obligation » d’assumer leur responsabilité vis-à-vis de la société. 1.2. 1960 : Formalisation sur fond de changement culturel et légal. La fin des années 50 et les années 60 sont marquées par une accélération dans l’évolution des mentalités américaines qui a abouti àde nombreuses lois promulguées1 dans le but de « réguler la [bonne] conduite dans les affaires ainsi que de protéger employés et consommateurs »(LEE, 2008, p57). Parallèlement, la littérature fait état d’une croissance significative de l’intérêt porté à la RSE et sa théorisation. En effet, un certain nombre d’auteurs – avec Keith DAVIS en chef de file - se sont donné la réplique sur le sujet pour définir le concept de RSE. Il est intéressant de noter que, dans leurs définitions, Davis et ses pairs2 ont continué à mettre la personne du manager au centre de la responsabilité sociétale. La croissance parallèle de l’intérêt du corps académique à l’égard de la RSE et de la législation pour le même sujet n’est pas sans rappeler les propos tenus par Bowen en 1953 qui établissait que « les changements institutionnels forcent, persuadent et rendent plus simple et plus favorable la considération de la responsabilité sociétale par les entreprises » (LEE, 2008, p57). 1.3. 1970 : La critique d’abord, la prolifération ensuite. Durant les années 60, certains évènements malheureux ont fortement dégradé les relations entre le public et certaines grandes entreprises, poussant ces dernières à utiliser la RSE comme outil de relation publique. Cette instrumentalisation attira les foudres de bon nombre d’opposants à la RSE. 1 Par exemple: Textile Fiber Products Identification Act of1958, Fair Packaging and Labeling Act of1960, Equal Pay Act of 1963, National Trafficand Motor Safety Act of 1966, NationalEnvironmental Policy Act of 1969, Truth inLending Act of 1969, Clean Air Act of 1970and so on) 2 William C. Frederick, Joseph W. McGuire, Robert Blomstrom, Clarence C. Walton,
  • 25. 22 C’est Milton FRIEDMAN qui s’opposa le premier, en 1962 déjà, à ce qu’il appela une « doctrine subversive »(FRIEDMAN, 1962)tout en agitant l’argument économique le plus suivi qui consiste à dire quel’entreprise n’a pas d’autre responsabilité sociétale que celle de faire autant d’argent qu’il est possible de faire pour ses actionnaires (FRIEDMAN, 1962). Suite à cela, une prise de conscience s’effectue dans les années 70 : tant qu’elle ne sera pas conforme à l’intérêt des actionnaires, la RSE restera sujette à controverse. C’est aux auteurs WALLICH an MCGOWAN (1970) qu’il revient d’attribuer cette avancée. Poussant plus loin leurs recherches, ils arriveront à fournir un nouveau référentiel (« new rationale ») allant jusqu’à la remise en question des fondamentaux de la RSE. Cette nouvelle manière d’aborder les choses permet de faire prendre à la recherche une orientation plus positive que normative. D’une part, WALLICH et MCGOWAN démontrent que les intérêts à long terme d’actionnaires détenteurs de portefeuilles d’actions relativement diversifiées ne sont pas incompatibles avec un comportement socialement responsable des entreprises. Bien au contraire, Davis surenchérit, en mettant en lumière que toute entreprise se doit de protéger la société dans laquelle elle évolue sous peine de vicier les ressources qu’elle en tire (structure, force de travail,…) et de détériorer sa base de clients. Ces deux exemples illustrent bienque la recherche en RSE a, durant les années 70, connu un tournant de son évolution puisqu’apparaissent des liens de causalité entre elle et les performances organisationnelles. C’est aussi à cette période que le concept de RSE se voit assorti d’une caractéristique qui survivra, c’est son caractère volontaire(MCGUIRE, 1963, BACKMAN et al., 1975, MANNE and WALLICH, 1973). Durant les années 70, dynamisés par l’apparition du nouveau référentiel lancé par WALLICH etMCGOWAN (1970), un bon nombre d’auteurs se sont essayés à développer la théorie du concept de RSE pour tenter de le lier à la performance de l’entreprise. Malgré la prolifération des définitions, Min-Dong Paul LEE (2008) précise qu’à la fin de cette décennie, aucun cadre théorique permettant de coupler la RSE à la performance de l’entreprise ne fut véritablement développé. 1.4. 1980 : le modèle de performance sociétale des entreprises. Celui qui marqua la recherche en RSE durant les années 80, c’est incontestablement CARROLL (1979) et son modèle conceptuel tridimensionnel de la performance sociétale des entreprises. Ce modèle définit un cadre conceptuel ayant pour but d’aider les managers à conceptualiser les principales problématiques sociétales en systématisant la réflexion sur le sujet. Le modèle permet ainsi d’améliorer la planification et le diagnostic de la performance sociétale de l’entreprise. Ce modèle tridimensionnel regroupe et articule trois visions différentes de la responsabilité sociétale de l’entreprise: (1) la définition claire de la responsabilité sociétale, (2) l’identification des problématiques sociétales pouvant être traitées par l’entreprise et (3) la philosophie de réponse à la responsabilité sociétale.
  • 26. 23 Après avoir bénéficié d’une acceptation très large au sein de la communauté académique, le modèle de CARROLL (1979) fut retravaillé par quelques-uns de ses contemporains et développé plus tard par certains de ses partisans. A l’image de cette étude, l’attention de la recherche en RSE des années 80 a beaucoup plus porté sur son opérationnalisation que sur un affinement de sa définition. En même temps que le pragmatisme recherché dans les tentatives de modélisation, il est intéressant de s’apercevoir qu’à la place du « businessman » et son éthique, on retrouve à présent l’organisation et ses intérêts au centre des développements théoriques. D’autres modèles furent développés durant cette décennie et ont tenté d’introduire des éléments issus d’autres corpus théoriques sous l’appellation CSP (« corporate social performance ») consacrée par CARROLL (1979). Ces modèles ont rarement été suivis ou mis en application. En cause, un manque de mesurabilité des intrants et extrants en matière de RSE impliquant une faible comparabilité et des tests empiriques impossibles. Ces faiblesses méthodologiques ne permettent pas encore de lier de manière probante la RSE et la performance des entreprises. 1.5. 1990 : La CSR étudiée au travers du management. Bien que peu de contributions originales y soient apparues en ce qui concerne la définition de la RSE, les années 90 n’en ont pas moins apporté leur lot de contribution à son évolution afin de rendre le concept de plus en plus applicable. L’étude de la RSE s’est différenciée pour être approfondie à travers les paradigmes des différentes théories du management en vogue telles que la CSP, la théorie des stakeholders, l’éthique des affaires, la citoyenneté d’entreprise, etc. De cette manière, la RSE acquiert un niveau d’étude organisationnel et se trouve directement liée aux intérêts de l’entreprise L’une des pratiques de management à travers laquelle la RSE a le plus évolué est l’analyse des parties prenantes (« stakeholder analysis ») au début des années 90. L’étude conjuguée des deux conceptsa permis à la RSE d’identifier et de spécifier plus finement les acteurs sur lesquelles l’entreprisea un impact. Cette plus grande spécification a l’avantage de compenser partiellement l’insuffisante mesurabilité qui fut l’un des grands problèmes de la RSE dans les décennies précédentes. CLARCKSON (1995) et JONES (1995) ont tous deux permis une plus grande opérationnalisation et une plus grande instrumentalisation de la RSE grâce à leurs travaux(CLARKSON, 1995, JONES, 1995). Les tentatives d’adaptation du cadre analytique de l’analyse des parties prenantes à la CSR ont forcé les chercheurs à spécifier la RSE plus en profondeur, ce qui a eu pour résultat d’élargir non seulement le sens mais aussi la portée de laRSE (LEE, 2008). 1.6. 2000 : La RSE résolument stratégique. Depuis la fin des années 90 jusqu’à maintenant, « la responsabilité sociétale des entreprises n’est plus conçue comme étant une responsabilité morale des managers *…+ mais comme une ressource stratégique qui doit être utilisée pour améliorer la performance de l’entreprise »( Lee, 2008, p62). La
  • 27. 24 RSE a connu des avancées toujours plus pratiques grâce au management stratégique et aux contributions d’académiques comme Philip KOTLER, Nancy LEE, Rosabeth Moss KANTER, Stuart HART, etc. Alors que le monde de l’entreprise semble désormais bien sensibilisé à la responsabilité sociétale, l’application de la RSE reste, dans beaucoup de cas, inefficace. Une politique RSE piètrement mise en pratique peut engendrer des coûts importants qui ne mettent pas seulement en péril la politique en elle-même, mais qui peut aussi avoir un impact négatif sur le résultat, sur la réputation, sur la crédibilité du management de l’entreprise.Un manque d’efficacité récurrent est épinglé par Michel PORTER et Mark KRAMER qui l’expliquent par 2 raisons dans leur article de 2006 (PORTER and KRAMER, 2006) qui fait aujourd’hui référence : l’opposition entre l’entreprise et la société ainsi que l’abord trop général des problématiques de responsabilité sociétale par les entreprises. La première explication pointe la dualité systématique de l’entreprise et de la société. En effet les 2 auteurs argumentent que les 4 principales justifications à la RSE (appel de la morale, principes de durabilité, la permission d’exploiter et la réputation) « focalisent sur la tension entre entreprise et société plutôt que sur leur interdépendance »(PORTER et KRAMER,2007, p83) et créent de facto une logique qui met en opposition l’action socialement responsable d’une entreprise et la société. La seconde raison du manque d’efficacité des actions RSE est l’abord trop générique des problématiques de responsabilité sociétale par le corps académique et par le monde managérial. En effet, PORTER et KRAMER (2006) affirment que si la politique RSE n’est pas adaptée à l’entreprise et pleinement embrassée par sa stratégie, le risque est grand de passer à côté de véritables opportunités puisque l’entreprise se trouvera dans l’incapacité « d’identifier, de prioriser et d’adresser les problèmes sociaux qui importent le plus ou ceux sur lequel elles peuvent avoir le plus d’impact » (PORTER et KRAMER, 2007, p83). En réponse à ces problématiques qu’ils soulèvent, Porter et Kramer proposent une démarche en 5 points visant à intégrer l’entreprise et la société. Ces 5 points assortis de quelques explications sont repris ci-dessous. Identifier les points d’intersections entre l’entreprise et la société. Pour ce faire, il faut observer la relation d’incidence entre entreprise et société dans les 2 sens. D’une part, il est important de relever les impacts de l’entreprise et sa chaîne de valeurs sur la société (« inside-out linkange ») en tenant compte du fait que celle-ci, non seulement varie en fonction du lieu, mais aussi évolue avec le temps. D’autre part, il faut également considérer les impacts du contexte concurrentiel sur l’entreprise (« outside-in linkage ») qui peuvent se révéler d’une importance stratégique tout à fait significative même si trop peu considérée. Choisir quelle problématique sociétale aborder. La problématique sociétale traitée doit être à l’intersection de l’entreprise et de la société et doit présenter des opportunités de création de valeur commune (« shared value »). Selon les auteurs, ce choix se fait par la classification des
  • 28. 25 problématiques sociétales en trois catégories que sont : les problématiques sociétales génériques, les impacts sociétaux de la chaîne de valeurs et les dimensions sociétales du contexte concurrentiel. Une priorisation des deux dernières catégories semble évidente. Créer l’agenda sociétal de l’entreprise. PORTER et KRAMER (2006) affirme que l’agenda sociétal d’une entreprise doit avant tout commencer par la mise en place de politiques RSE réactives qui viendront commander des pratiques citoyennes et doivent assurer l’atténuation du tort commis par l’entreprise et sa chaîne de valeurs sur la société. Mais l’agenda sociétal ne devrait en aucun cas s’arrêter là. Selon les auteurs, les entreprises doivent aller au-delà des attentes de la communauté.Afin de générer simultanément un bénéfice sociétal et un bénéfice économique, elles doivent adopter une RSE stratégique. Intégrer les pratiques « inside-out » et « outside-in ». Afin d’élaborer l’agenda sociétal de manière stratégique, les entreprises devront intégrer à la fois les pratiques responsables au niveau de la chaîne de valeurs et des investissements durables sur le contexte concurrentiel. Ajouter une dimension sociétale aux valeurs fondamentales de l’entreprise. C’est ainsi que la RSE prend son sens le plus stratégique. En effet, l’intégration de considérations sociétales dans les valeurs fondamentales de l’entreprise est la garantie d’une RSE intégrée et de long terme, la garantie d’une RSE stratégique. 2. La RSE aujourd’hui. Comme on a pu le voir, l’évolution du concept de RSE s’est fait au travers de différentes approches. La première fut l’approche « éthique » de la responsabilité sociétale qui est originellement fondée sur les valeurs morales. La seconde approche a manifesté un penchant utilitariste et a fait de la RSE un enjeu stratégique servant la performance de l’entreprise. Une troisième et dernière approche est celle qui est appelée l’approche « business and society » par les initiés. Elle pose les fondements de la RSE d’aujourd’hui en considérant« l’entreprise *comme étant+ assimilée à une institution sociale légitimement redevable envers la société » (BERGER-DOUCE, 2008, p11). Progressivement délestée des reliquats la liant exclusivement à l’éthique et la morale, la définition de la RSE a été rationnalisée à travers la lunette de différentes pratiques de gestion pour finalement aboutir dans des versions tantôt volontaristes (vision anglo-saxonne), tantôt institutionnalistes (vision européenne). Les nouvelles définitionsde la RSE ont fleuri avec le début de la période d’activité des institutions peu après les années 2000 et l’initiative Global Compact lancée par les Nations Unies en juillet de cette année-là. Juste après, c’est l’édition par l’Union Européenne d’un livret vert en 2001 qui fixa la définition de la RSE dans sa version européenne en décrivant « ce concept comme l'intégration volontaire des préoccupations sociales et écologiques des entreprises à leurs activités commerciales et leurs relations avec leurs parties prenantes » (Commission Des Communautés Européennes, 2001,pp.7). Elle se base donc largement sur une approche volontaire de la RSE.
  • 29. 26 A la même époque (en 2010), le Ministère français pour le développement durable propose, quant à lui, un énoncé plus claire et plus simple en déclarant que la RSE est « la contribution des entreprises aux enjeux du développement durable » (Ministère du Développement Durable, 2010) liant ainsi les concept de RSE et de développement durable. La dernière communication de la commission qui fait état de sa stratégie de développement de la RSE pour 2011-2014 avance une nouvelle définition de la RSE comme étant « la responsabilité des entreprises vis-à-vis des effets qu’elles exercent sur la société »(Commission de l’Union Européenne, 2011, p8). Pour assumer cette responsabilité, il faut au préalable que les entreprises respectent les lois en vigueur et les conventions collectives conclues entre partenaires sociaux. « Afin de s’acquitter pleinement de leur responsabilité sociale, il convient que les entreprises aient engagé, en collaboration étroite avec leurs parties prenantes, un processus destiné à intégrer les préoccupations en matière sociale, environnementale, éthique, de droits de l’homme et de consommateurs dans leurs activités commerciales et leur stratégie de base, ce processus visant: - à optimiser la création d’une communauté de valeurs pour leurs propriétaires/actionnaires, ainsi que pour les autres parties prenantes et l’ensemble² de la société; - à recenser, prévenir et atténuer les effets négatifs potentiels que les entreprises peuvent exercer. » (Commission de l’Union Européenne, 2011, p8) Les références à la loi, aux conventions sociales et aux droits de l’homme confèrent à cette définition un caractère institutionnaliste indéniable. La dernière référence en matière de définition du concept de RSE est la norme internationale ISO 26000(ISO, 2010) qui fournit des lignes directrices relatives à la responsabilité sociétale. On observe que la définition proposée par la norme rassemble les trois dernières caractéristiques modernes que sont le caractère volontaire et institutionnaliste ainsi que l’intégration de la notion de développement durable dans celle de RSE. « Responsabilité d’une organisation vis-à-vis des impacts de ses décisions et de ses activités sur la société et sur l’environnement, se traduisant par un comportement transparent et éthique qui: - contribue au développement durable y compris à la santé des personnes et au bien-être de la société - prend en compte les attentes des parties prenantes - respecte les lois en vigueur et est compatible avec les normes internationales - et est intégré dans l’ensemble de l’organisation et mis en œuvre dans ses relations » (ISO 26000, 2010, p 4). On observe également l’intégration du concept de parties prenantes (stakeholder) qui a été mentionné plus tôt. En effet la prise en compte des intérêts des stakeholder est indissociable du concept de RSE depuis les travaux de FREEMAN (1984).
  • 30. 27 De par le caractère consensuel et la large légitimité (notion discutée dans le chapitre V) qu’on lui attribue, c’est cette définition qui est sous-entendue à chaque fois que le concept de RSE est évoqué dans la suite du mémoire. 2.1. Dans la pratique des affaires. Longtemps reléguée aux rangs des abstractions, des pratiques idéalisées, des possibilités stratégiques et des théories managériales prometteuses, la RSE fait, aujourd’hui, partie de la réalité des entreprises. Toujours en évolution, elle est devenue une pratique tangible et on la retrouve dans un nombre croissant d’entreprises de tous types. Si bien que, ces dernières années, des enquêtes ont révélé jusqu’à 70% d’entreprises ayant désormais placé la durabilité à leur agenda(HAANAES et al., 2011b). C’est un fait qui n’est plus à démontrer, une majorité des entreprises (deux-tiers en 2011(HAANAES et al., 2011b)sont maintenant convaincues que s’inscrire dans une optique durable est une nécessité pour être compétitif sur les marchés. Et le fait que, même en période de recul économique, l’implication des entreprises(HAANAES et al., 2011a) (en termes d’investissement et d’attentions managériales) dans les domaines liés à la RSE va croissant illustre la volonté inébranlable des entreprises d’aller vers plus de responsabilité dans leurs activités. La RSE, moquée à ses débuts par les pragmatiques, a dorénavant acquis ses lettres de noblesse et continue son inexorable évolution vers, précisément, plus de pragmatisme et plus de stratégie. Afin d’établir le Business Case, on cite régulièrement, dans cet ordre(HAANAES et al., 2011a), la réputation d’une marque, l’accroissement de l’avantage compétitif, l’accès à de nouveaux marchés ou à certains marchés spécifiques tels que les marchés publics, la réduction des coûts énergétiques et ceux liés au traitement des déchets, l’accroissement des marges grâce à un positionnement plus durable et différencié, les opportunités d’innovation pour le développement des produits , services et procédés, l’attraction et la rétention d’employés qualifiés, la facilité d’accès aux capitaux, comme autant d’éléments motivant une organisation à mettre en place une politique RSE. Mais l’évolution de la RSE dans les organisations connait aussi quelques freins. L’implémentation d’une politique RSE requiert, notamment, des ressources extensives en termes humains. De plus, elle exige d’avoir de bonnes connaissances RSE ainsi que des compétences managériales solides. Enfin, l’implémentation d’un programme RSE intégré peut nécessiter un apport financier substantiel. A la lumière des éléments avancés par le Business Case RSE, on comprend que les grandes entreprises ouvrent la marche en matière de RSE. D’une part, les grandes entreprises sont celles qui ont le plus à y gagner car elles peuvent bénéficier des avantages de la RSE en minimisant le coût de sa mise en œuvre grâce aux économies d’échelle et de champs. D’autre part, les plus grandes entreprises ont souvent incorporé la RSE dans leur politique de gestion des risques afin d’atténuer ceux-ci. On imagine bien les effets dévastateurs d’une réputation d’une marque gâchée par une mauvaise conduite rendue publique.
  • 31. 28 Mais où en sont les PME par rapport à ces considérations ? Il est proposé d’étudier comment la PME se positionne par rapport à la RSE dans le chapitre suivant.
  • 32. 29 Chapitre III - La RSE en PME. Bien qu’on ait pu douter pendant quelques temps de la pertinence d’un engagement des PME dans le débat RSE, les PME ne sont pas tout à fait absentes du mouvement. Ainsi, le Livre Vert de la Commission Européenne insiste sur le fait que la RSE « soit plus largement appliquée dans les PME, y compris les micro-entreprises puisque ce sont elles qui contribuent le plus à l’économie et à l’emploi » (Commission Européenne, 2001, p .8). Comme cela a été expliqué plus haut, l’implémentation et la diffusion de la RSE en entreprise peut se heurter à quelques barrières. Anodines pour certaines organisations, ces barrières peuvent s’avérer rédhibitoires pour d’autres. Les PME font généralement partie de cette deuxième catégorie. C’est le manque de ressources des plus petites entreprises qui est souvent épinglé comme principale entrave au développement d’action ou de politique RSE dans les PME. Mais ce n’est pas le seul frein. En effet, comme nous le verrons, un certain nombre de caractéristiques propres au PME creusent encore un fossé bien plus large entre PME et RSE. Nous discuterons dans ce chapitre des raisons pour lesquelles il semble pertinent d’inclure les PME dans le débat RSE et comment les PME en sont venuesà être incorporées au débat petit à petit. Ensuite, la RSE en PME est étudiée au moyen de l’analyse des facteurs de motivations et des freins à l’engagement sociétal des PME. Cette analyse permet de dégager l’aspect singulier de la RSE en PME. Enfin, la dernière section pose la question de la spécificité de la RSE en PME et la nécessité d’une étude différenciée. 1. La nécessité de pratique responsable de la part des PME. L’acronyme PME rassemble environ 97% des entreprises mondiales et rien qu’en Union Européenne, on en compte plus de 24 millions(European Commission 2007). Or les PME participent pour des proportions allant de 40 à 60% du PIB de leur pays respectifs et emploient jusqu’à 70% de la population active dans certains pays membres de l’OCDE (plus de 65% en Belgique). Les statistiques européennes parlent d’elles-mêmes (voir figure 2), les PME constituent le pan le plus important de l’économie et ses agents économiques forment une masse qui ne peut être négligée.
  • 33. 30 Figure 2 - Nombre d'entreprises, emploi, et contribution au PIB dans UE--27 Source : European Commission et DG-Enterprise, Annual Report on EU SMEs 2010/2011, 2011. Disponible sur : http://ec.europa.eu/enterprise/policies/sme/facts-figures-analysis/performance-review/index_en.htm En plus, de cette masse tout à fait significative, les PME sont d’autant plus concernées par la RSE que ce sont les agents économiques les plus proches de leur environnement économique. En effet, La proximité des PME avec leurs marchés n’est pas seulement psychologique ou géographique (comme annoncé dans le second chapitre), elle est aussi économique de telle sorte que la santé économique d’un marché aura une grande influence sur la santé économique des PME qui y sont actives. Dès lors, il paraît évident que ces entreprises tellement sujettes aux fluctuations de leurs marchés se doivent de mettre en œuvre tout ce qui est possible pour conserver un climat stable et favorable à leurs activités. Dans ces conditions, la RSE et ses impacts fondamentaux semblent être incontournables pour les PME. En outre, Il semble tout à fait naturel que les PME s’investissent dans la RSE puisque cette pratique fait déjà partie de leur quotidien, bien souvent à leur insu. Des considérations de réduction des déchets, de réduction de la consommation énergétique, d’aménagement des espaces et des temps de travail, les interactions avec la communauté locale ou encore l’emploi, sont autant de pratiques que les PME mettent en place et qui relèvent notamment de la responsabilité sociétale. Les petites et moyennes entreprises œuvrent donc souvent pour la RSE mais sans le savoir. Une prise de conscience et une organisation de ces pratiques permettraient aux entreprises de mettre celles-ci en valeur et d’aller plus loin sur le chemin de la RSE, tout en se retrouvant elles-mêmes valorisées. 2. Une révolution qui est en marche. Développer la prise de conscience chez les petites ou moyennes entreprises peut sembler une tâche ardue. En effet, la plupart de celles-ci sont reconnues comme étant orientées vers la survie à court terme et elles ont l’habitude de ne pas considérer les problématiques sociétales ou environnementales comme étant directement liées à leur survie. Malgré une prise de conscience accrue, les préoccupations RSE n’occupent que le second plan. En effet, les PME n’abordent généralement ces préoccupations qu’une fois la responsabilité économique assurée (BERGERDOUCE, 2008).
  • 34. 31 Malgré cela, les chiffres de ces dernières années sont significatifs. En 2006, une étude française de Sandrine Berger-Douce révélait qu’environ un tiers des PME semblait agir en faveur de la RSE(BERGER-DOUCE, 2008). Le baromètre 2011 de la responsabilité sociétale en Belgique déclare que 65% des PME et 44% des TPE disposent d’une personne ayant la charge de faire le suivi RSE dans l’entreprise (BUSINESS & SOCIETY BELGIUM, 2011).Bien que ces chiffres mis en comparaison ne représentent pas des preuves irréfutables, ils semblent tout de même afficher une tendance que le foisonnement de la littérature vient confirmer : La RSE a atteint la sphère des PME et se développe en son sein de manière progressive. De plus, on peut affirmer sans risquer de se tromper que la prise de conscience des considérations responsables dans leurs formes environnementales, sociétales ou économiques se sont fortement généralisées depuis 2004 (SAULQUIN etSCHIER, 2007). Dans les institutions, les fédérations, les réseaux, les médias, même dans le système éducatif, il est devenu commun de retrouver un volet responsable, durable ou citoyen. Le développement durable et responsable est présent avec plus ou moins de ferveur sur une majorité des canaux de communication utilisés par les PME de sorte qu’il est aujourd’hui rare de rencontrer un entrepreneur ou gérant de PME qui ne perçoive l’importance de la RSE. C’est un fait (les études françaises de DUPUIS et al (2006) et celle de BERGER-DOUCE de 2008 en attestent), une très large majorité de dirigeants de PME (entre 88 et 92%) déclarent poursuivre leurs activités tout en intégrant les préoccupations de la RSE. La conscience et la désirabilité de la RSE chez les PME sont aujourd’hui des éléments très bien intégrés. Le développement de la RSE chez les PME est donc aujourd’hui une réalité avérée, notamment, par une littérature spécifique de plus en plus foisonnante (LOUCHE et MICHOTTE, 2008). Par ailleurs, on constate que la RSE en PME prend une direction qui diffère des grandes entreprises. La singularité de la RSE dans les petites et moyennes entreprises donne même naissance à une définition spécifique de la RSE par les PME, apportée par JENKINS (2009) en ces termes : « la RSE est avant tout définie dans les PME comme le fait d’être non seulement conscient des impacts de l’entreprise mais aussi comme la volonté de rendre cet impact positif pour un large ensemble de parties prenantes à travers les décisions managériales qui sont prises. »(JENKINS, 2009). D’autres (VIVES, 2006, ELLERUP,NIELSEN etTHOMSEN, 2009, RUSSO etTENCATI, 2009) définissent la RSE au travers de trois thématiques : parties prenantes internes, parties prenantes externes et la question environnementale 3. Spécificité de la RSE en PME. Comme on a pu le découvrir dans le premier chapitre, il n’est pas simple de définir le concept dePME. Néanmoins, l’hypothèse a été faite que la PME a pu se démarquer en tant qu’organisation spécifique dont les caractéristiques sontdifférenciées par rapport aux autres organisationsDès lors, il faut se demander comment la RSE est spécifiquement exercée au sein des PME car « la vision monolithique [de la RSE] est trompeuse car elle cache les spécificités de la RSE en PME. »(LOUCHE et MICHOTTE, 2011, p15).
  • 35. 32 Cette section va tenter de discerner les caractéristique de la RSE pratiquée en PME au travers de l’étude des motivations et des freins avec comme ligne de mire la démonstration du fait que la RSE en PME, au même titre que la PME, mérite une étude différenciée de celle de la RSE en général. 3.1. Les facteurs motivants la RSE en PME. La majorité des questions de recherche faisant l’étude de la RSE en PME portent sur les moteurs et les freins (LOUCHE et MICHOTTE, 2011). C’est aussi à travers cette analyse qu’il est envisagé de faire apparaître la spécificité de la RSE en PME. Cette analyse est structurée de manière similaire à celle qui avait pour but de recenser les caractéristiques propres à la PME. En effet, nous aborderons ici les particularités de la RSE en PME au travers de l’analyse du dirigeant, de la structure organisationnelle des PME (fortement caractérisée par la proximité) et des parties prenantes. i. Le dirigeant. Pour l’ensemble des organisations, la mobilisation personnelle du cadre dirigeant est considérée comme un moteur tout à fait essentiel du choix d’investissement dans le domaine responsable (BUSINESS & SOCIETY BELGIUM, 2011). Cet investissement des dirigeants dans le développement durable est capital pour que la stratégie RSE remplisse son triple objectif (social, environnemental et économique). Ce n’est d’ailleurs pas une surprise si la grande majorité (75%)(HAANAES et al., 2011b) des entreprises à qui la responsabilité sociétale réussit déclarent profiter d’un appui fort des dirigeants(HAANAES et al., 2011b). Pour les PME, définies par un mode de gestion indépendant et personnalisé et caractérisées par une structure organisationnelle plate, le directeur propriétaire est d’autant plus influent qu’il est seul responsable de son organisation, régulièrement unique garant de la direction suivie par l’entreprise. En effet, Il existe des preuves empiriques (JENKINS, 2009) qui mettent en avant le rôle significatif des valeurs et des motivations propres du dirigeant-propriétaire dans le processus d’intégration de la RSE au sein des petites et moyennes organisations (HOIVIK et SHANKAR, 2010). Les facteurs influençant directement le dirigeant sont donc largement responsables de l’orientation, durable ou non, prise par les PME. Les facteurs amenant le propriétaire dirigeant à s’engager de manière concrète dans des actions RSE sont répertoriés par SAULQUIN et SCHIER (2007) comme étant les connaissances propres de l’entrepreneur. Les connaissances du dirigeant sont diffractées en un degré de conscience et degré d’attitude du dirigeant (GADENNE et al., 2009). Les actions RSE seront largement motivées par la conscience que le dirigeant a des moyens qui sont à sa disposition et des impacts que peuvent avoir de telles actions sur l’environnement socioéconomique d’une part et sur sa propre entreprise d’autre part. Le degré d’attitude du dirigeant est construit sur les valeurs et les croyances de celui-ci. L’attitude du dirigeant par rapport aux pratiques durables en entreprise est généralement forte et difficilement altérable. Quelle que soit la nature de l’attitude, celle-ci ne conduira généralement qu’à plus ou
  • 36. 33 moins de soutien à des initiatives RSE externes à l’entreprise et rarement à une réflexion RSE mettant les actions et impacts propres à l’entreprise au centre d’un débat (GADENNE et al.,2009) Parallèlement, un très grand nombre d’auteurs consacrent les valeurs personnelles de l’entrepreneur comme moteur prépondérant à l’engagement des PME vers la RSE (MURILLO &LOZANO, 2006 ; WORTHINGTON et al., 2006 (a) & (b); VIVES, 2006 ; CAMBRA et al., 2008b ; CILIBERTI, 2008 ; DAHLMANN et al., 2008 ; NHIEM et al., 2008 ; PERRINI &MINOJA, 2008 ; WORTHINGTON et al., 2008 ; JENKINS, 2009 ; ELLERUP NIELSEN &THOMSEN, 2009 ; RUSSO &TENCATI, 2009 in Louche et MICHOTTE). Aussi explicatives les valeurs du dirigeant soit elles, d’aucun pourrait s’étonner de l’inadéquation entre valeurs motivant l’engagement sociétal et le manque d’actions concrètes. Une interprétation serait de concevoir les valeurs et l’attitude favorable à la RSE d’un dirigeant comme des prérequis à toute action durable sans toutefois qu’elles soient nécessairement suffisante aux déploiements de ces actions. Outre les connaissances et les valeurs du dirigeant, LEPOUTRE et HEENE (2006), soulignent que celuici peut posséder certaines capacités qui, elles aussi, forceront le passage à l’acte responsable. On considère ici que la capacité d’ouverture (aux nouveautés, aux réseaux) et de mise à jour du patron de PME facilite ce passage à l’acte RSE. Le niveau de compétence et la capacité d’absorption des entrepreneurs étant généralement limités, on note l’effet bénéfique des réseaux qui repoussent les limites capacitaires des entrepreneurs qui s’y engagent (ATHERTON, 2003; MEREDITH, 2000). ii. Les caractéristiques organisationnelles. Il est reconnu que les grandes entreprises sont clairement en avance sur la PME en matière de RSE et s’il est une explication qui apparaît dans chaque texte traitant du sujet, c’est que les premières usent de leur capacité à dégager des moyens humains et financiers dont le détachement ne procure pas un retour direct sur investissement. La facilité d’allocation de ressources est généralement accompagnée d’une réserve de compétences plus spécifiques et plus poussées, en matière de RSE notamment mais en termes de management et de stratégie aussi. Ces capacités à dégager du temps et de l’argent, à acquérir les compétences nécessaires et à s’imposer un recul stratégique sont des éléments clefs pour l’implémentation d’une politique RSEheureuse. Mais ces capacités semblent être principalement l’apanage des plus grandes sociétés. Malgré l’évidence de la relation existant entre la taille de l’entreprise et son comportement sociétalement responsable, certains résultats montrent une relative ambiguïté du lien causal (LEPOUTRE et HEENE, 2006). Apportant plus de clarté au phénomène, LEPOUTRE et HEENE (2006) déclarent que cette relation dépend d’un large panel de caractéristiques organisationnelles. Ces caractéristiques, toutes dérivées de la petite taille, influencent différemment la mise en œuvre des politiques durables en entreprise. Dans le paragraphe suivant sont repris les éléments organisationnels servant de moteur à la RSE en PME. Ils sont bien moins présents que les obstacles.