Lecture georgetown university on disaster resilience
Le point ooas sfmc-strat adviser sur ébola au lundi 06 octobre 2014
1. Le point sur Ébola au lundi 6 octobre
A
Drs Jan-Cédric* et Øivind** Hansen
* Médecin Coordonnateur Hôpital Asselin-Hédelin – Consultant Senior StratAdviser Ltd agence spécialisée en
communication stratégique de crise dans le domaine de la santé ; ** Médecin Anesthésiste-Réanimateur
L’épidémie de fièvre hémorragique virale (FHV) liée au virus Ébola, souche
"Zaïre" qui sévit actuellement depuis le 22 mars 2014 s’est déclarée en
Guinée puis s’est presque immédiatement propagée au Liberia et en Sierra
Leone, pays voisins.
Pour l’instant 5 pays de la zone CEDEAO sont officiellement
touchés mais 3 seulement connaissent une épidémie évolutive
En Guinée 1 179/722 cas/décès soit une létalité de 61,2 %. La
guinée compte 15,2 % des cas d’Ébola (diminution de 0,2 points de la part
relative par rapport au dernier point épidémiologique). L’épicentre de
l’épidémie est situé en zone forestière, au sud-est du pays Guekedou
(frontalier avec la guinée), Macenta, Kissidougou et Nzérékoré (frontalier avec
la Côte d’Ivoire) où se trouve la 2ème plus grande ville du pays, mais d’autres
districts sont touchés : trois districts du Haut-Guinée Diabola, Dinguiraye et
Kouroussa, Conakry, capitale du pays, en Guinée maritime et les préfectures
de Télimélé et Boffa, enfin, Fria et Pita au nord-ouest du pays, Siguiri au nord-est
(frontalier avec le Mali).
Au Libéria 3 786/2 037 cas/décès soit une létalité de 53,8 %. Le
Libéria compte 50,7% des cas d’Ébola (diminution de 2,3 points de la part
relative par rapport au dernier point épidémiologique). La totalité des 13
districts du pays ont signalés des cas : Grand Cape Mount, Bomi, Bong, Lofa
(frontalier avec la Guinée), Margibi, Montserrado (incluant la capitale
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2. Monrovia), Nimba, Grand Bassa et River Cess.
En Sierra Leone 2 485/602 cas/décès soit une létalité de 24,2 %.
La Sierra Leone compte 33,3% des cas d’Ébola (augmentation de 2,3 points
de la part relative par rapport au dernier point épidémiologique). Depuis
l’arrivée de l’épidémie par le district de Kailahun, frontalier avec celui de
Guekedou en Guinée via un voyageur ayant séjourné à Guekedou, ce sont
tous les districts qui sont touchés, y compris la capitale Freetown.
Au Nigeria 21/8 cas/décès. Les cas suspects et les décès sont pour
l’instant limités aux 59 contacts identifiés d’un passager en provenance du
Liberia (via Lomé au Togo et Accra au Ghana) arrivé le 31 juillet à Lagos par
l’aéroport international Murtala-Muhammed. Les 59 contacts identifiés à ce
jour sont 15 personnels de l’aéroport et 44 de l’hôpital où le passager a été
soigné et est décédé. En ce qui concerne les sujets contacts de l’avion, les
autorités du Ghana, du Nigéria et du Togo collaborent avec l’OOAS et l’OMS
pour les identifier. Cependant, depuis près d’un mois, aucun progrès
significatif n’a été signalé. Le 25 septembre 2014 le Nigeria a annoncé la fin
de l’épidémie sur son territoire. Cette annonce est à prendre avec réserve. En
effet on peut considérer qu’au delà de 40 jours, un patient qui n’est pas mort
est en convalescence et immunisé. Il reste que d’autres cas importés sont
possible et donc d’autres contaminations interhumaines. Cependant, à la date
du 6 octobre 2014 aucun nouveau cas n’est signalé.
Au Sénégal 1/0 cas/décès. Le cas princeps est d'un étudiant qui s'est
soustrait à la surveillance des autorités sanitaires Guinéennes (il était identifié
comme cas contact) qui s’est rendu de manière illégale au Sénégal. Lorsqu’il
a développé les premiers symptômes il a caché son exposition à Ébola aux
professionnels de santé qui l’on pris en charge ce qui a retardé d'autant une
stratégie thérapeutique cohérente. Pour l’instant on peut considérer que le
Sénégal a réussi à limiter la propagation de l’épidémie à partir du cas
princeps identifié. À la date du 6 octobre 2014 aucun nouveau cas n’est
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3. signalé.
NB : En RDC on annonce 62 cas dont 35 décès qui ne sont pas à ce jour
comptabilisés car réputés relever d’un foyer de contamination distinct. Il
existerait 1 cas déclaré au Venezuela mais pas de précision si c’est un cas
importé ou non ni de sa provenance.
Cette épidémie est atypique :
· Par le nombre de cas. Le seuil du quadruplement du nombre de cas
déclarés depuis 1976 est franchi : 2 387 cas cumulés entre 1976 et
2013, 9 659 cas pour 2014 à ce jour (+1 200 cas par rapport au
dernier point épidémiologique)
· Par la zone géographique touchée (Afrique de l’Ouest vs Afrique
Centrale) et de son étendue (plusieurs districts de plusieurs pays
limitrophes et sauts de puce de plusieurs centaines de kilomètres – 1
141 km entre Conakry et Dakar via Tambacounda)
· Par la transmission avérée en zone urbaine (vs zone forestières ou
rurales exclusives des épisodes précédents) en suivant apparemment
les axes commerciaux de la zone (terrestres, maritimes et aériens)
· Par l’existence de cas importés (1 cas aux États-Unis) et de cas
rapatriés (2 cas aux États-Unis, 2 cas en Espagne, 1 cas au Royaume
Uni, 1 cas en France)
· Par l’existence du premier cas de contamination intra
Européenne d’une Infirmière ayant traité les deux patients
rapatriés en Espagne
Synthèse au lundi 6 octobre A
Au total, au 6 octobre 2014, 7 472 cas et 3 369 décès ont été rapportés à
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4. l’OOAS pour la CEDEAO. Le temps de doublement actuel est toujours de
l’ordre de 27-28 jours. Même s’il apparaît un infléchissement du nombre de
cas au global le seuil des 12 000 cas devrait être franchit à la fin du mois
d’octobre. La létalité observée continue de chuter, elle était de 49 % à l’avant
dernier point, de 47% au dernier point et elle est de 45,1% à ce jour dans les
5 pays affectés (Figure 1).
Fig1. Nombre cumulé de caset de décès
Cumula ve number of cases& deaths
Infographie : Dr Jan-Cedric Hansen
12,000
10,000
8,000
6,000
4,000
2,000
06/10/14
0
1976
1977
1978
1979
1980
1981
1982
1983
1984
1985
1986
1987
1988
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
AxisTitle
9 548 : seuil de x4
du nombre de cas
cumulés en 2013
6 360 : seuil de x4
du nombre de décès
cumulés en 2013
Cas
Décés
On notera que cette létalité permet paradoxalement une plus grande diffusion
de l’épidémie puisque la moitié des malades ne décédant pas, ils sont
potentiellement contaminant plus longtemps pour un plus grand nombre de
contacts d’une part, ils viennent grossir la part de la population immunisée
d’autre part. On notera aussi que le nombre de cas pauci-symptomatiques est
toujours inconnu à ce jour. Ce paramètre est pourtant essentiel car il
permettrait de savoir si une partie de la population des pays touchés
développe à bas bruit une immunisation qui aboutirait in fine à
« l’endémisation » de l’épidémie dans la région. L’OOAS tente de recueillir
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5. des informations et des statistiques fiables sur ce point mais la tâche est
ardue.
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6. Pour autant, il existe de grandes disparités entre les pays en matière de
létalité (Tableau 1).
Tableau 1
Pays notifiant Cas Décès Taux de létalité
Liberia 3786 2037 53,8%
Sierra-Leone 2485 602 24,2%
Guinée 1179 722 61,2%
Nigeria 21 8 38,1%
Sénégal 1 0 -
CEDEAO 7472 3369 45,1%
La Sierra-Leone se distingue avec une mortalité 2 à 3 fois plus faible que le
Liberia ou la Guinée dans un contexte de cinétique exponentielle (Figure 2). Il
devient de comparer les stratégies de contrôle de l’épidémie de ces trois pays
pour tenter de comprendre pourquoi la Guinée connaît une dissémination
modérée associée à une très forte mortalité, le Liberia une dissémination
explosive avec une mortalité médiane et la Sierra-Leone une dissémination
intermédiaire avec les 2 autres mais une mortalité remarquablement basse.
Pour mémoire, les autres maladies à potentiel épidémiques sévissant
actuellement en Afrique de l’Ouest (choléra, Méningite, Rougeole, Fièvre
Jaune et Fièvre de Lassa) avaient cumulés 67 307 cas déclarés (dont 29 777
pour le seul choléra) et 1 338 décès (dont 606 pour la seule méningite) au 17
août 2014 dernière mise à jour disponible de ces données. En 7 mois
l’épidémie d’Ébola a donc tué 3 fois plus que les 6 autres en 8 mois. Pour
les 4 pays directement concernés le nombre de décès documentés pour les 6
maladies à potentiel épidémique surveillées est de seulement 767. L’épidémie
d’Ébola a donc quadruplé le nombre de décès d’origine épidémique pour
ces 4 pays.
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7. Au niveau de la cinétique on ne constate pas de modification significative
des comportements : l’épidémie Guinéenne a toujours un comportement
(affine) qui contraste avec celle (exponentielle) de deux des pays touchés par
un cas source voyageur en provenance de l’épicentre, le Libéria et la Sierra-
Léone. Les deux courbes suggèrent une contamination interhumaine
autonomisée que rien ne vient contredire à ce jour (figure 2). L’amorce du
comportement exponentiel de la courbe Guinéenne notée précédemment ne
semble pas, finalement, se confirmer pour l’instant. On peut aussi tenter
d’expliquer cette difference par une capacité de contention de l’épidemie
différente pour la Guinée. À suivre. Pour ce qui concerne le Nigeria et
le Sénégal qui eux aussi ont reçus un cas source en provenance de
l’épicentre, il semble que l’épidemie soit sous contrôle pour l’instant, devant
l’absence de nouveaux cas répertoriés.
Fig2. Ciné que descasEbola - Ebola caseskine c
3500
3000
2500
2000
1500
1000
500
0
22-Mar
29-Mar
5-Apr
12-Apr
19-Apr
26-Apr
3-May
10-May
17-May
24-May
31-May
7-Jun
14-Jun
21-Jun
28-Jun
5-Jul
12-Jul
19-Jul
26-Jul
2-Aug
9-Aug
16-Aug
23-Aug
30-Aug
6-Sep
13-Sep
20-Sep
number of cases
26/09/14 Infographie : Dr Jan-Cedric Hansen
Guinée
Libéria
Sierra-Leone
Nigéria
Sénégal
Comme mis en exergue lors du point épidemiologique précédent, il
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8. conviendrait d’avoir des éléments cliniques prédictifs de l’évolution des cas
d’Ébola. Par exemple, la durée de la période de latence ou la température à
J4 de l’irruption des premiers signes sont-ils prédictifs de l’issue ? Il
conviendrait de repérer de tels facteurs prédictifs, s’ils existent, pour identifier
les morituri et concentrer les efforts de prise en charge sur ceux qui ont une
bonne probabilité de survie. Symétriquement, il conviendrait de repérer les
formes bénignes ou pauci-symptomatiques pour limiter, là aussi, un
investissement disproportionné en moyens ou en soignants, compte tenu d’un
pronostic favorable d’emblé, même si cela allonge la durée de la maladie ou
de la convalescence. Il convient de colliger les données cliniques disponibles
et de les analyser pour identifier les facteurs pronostic pertinents. MSF qui est
le mieux placé pour fournir de telles données a été sollicité à la suite du
dernier point épidémiologique mais n’a pas répondu à ce jour.
Pour ce qui est de la dynamique des nouveaux cas (figure 3), après
un net ralentissement durant la première quinzaine d’août et une accelleration
sans précédent pendant la deuxième et début septembre, on constate un
nouveau ralentissement qui amorce une ré-accelleration. La fiabilité des
données notamment les difficultés operationelles du reporting peuvent
expliquer, à elles seules, les variations du nombres de nouveaux cas
constatées à ce jour.
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11. Liberia 187 94 50,3%
Guinée 69 35 50,7%
Senegal 0 0 -
Nigeria - - -
Sierra-Leone - - -
CEDEAO 256 129 50,4%
En ce qui concerne la contamination sur le lieu de travail elle peut survenir
pendant le soin, à la fin du soin et en dehors du soin.
En ce qui concerne l’analyse des images montrant des soignants en train de
s’equiper et de se deséquiper, et des echanges avec des soignants en
mission ou en retour de mission nous avons remarqué :
· que l’usage de masques chirurgicaux semble très répendu ce qui ne
procure pas une protection suffisante
· que le temps de séjour en zone contaminée est trop long car de l’ordre
de 40 minutes ce qui majore la probabilité d’une contamination
· que les procédures de deséquipement telles qu’on les voit comportent
de nombreuses erreurs au regard des standards et recommendations
de la SFMC en la matière
· que les zones contaminées sont contigues aux zones de repos et de
travail
Il conviendrait de recommander :
· l’usage systematique de masques FFP2 pour pénetrer en zone
contaminée
· un temps d’exposition de 20 minutes maximum renouvelable toutes les
heures pour les soignants
· établir une zone d’exclusion plus large separant la zone contaminée de
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12. la zone de vie
· repenser le sas de decontamination et la procédure de deséquipement
en reprenant les bonnes pratiques de la SFMC en matière NRBC
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13. Les discussions au sein du groupe francophone
https://www.linkedin.com/groups/Groupe-Expert-Ebola-SFMC-8156465/about
et au sein du groupe anglophone https://www.linkedin.com/groups/Ebola-outbreak-
management-Group-8150382/about regroupants près de 200
spécialistes en medecine de catastrophe, en prevention de pandémie, en
conception de vaccin, en réponse sanitaire opérationnelle, … issus de
gouvernements, d’agences ou de services publics, d’entreprises spécialisées
publiques ou privées européens, africains de l’ouest et Nord-Americains,
portent essentiellement sur :
1. le risque de contamination aéroportée – à ce jour non formellement
documenté – mais théoriquement possible, ne serait-ce que par les
goutelettes de Pflügge, et pouvant rendre compte du nombre de cas
important parmis les soignants : il a été décidé de recommander le port
de masque FFP2 pour les soignants sur place et de limiter le temps de
prise en charge à 20 min d’affilée pour chaque patient afin de limiter
les risques. Les masques chirurgicaux que l’on voit dans les
reportages sont notoirement insuffisants pour protéger des goutelettes
de Pflügge émisent par les patients. Or l’exposition répétée à un risque
faible conduit asymptotiquement à une probabilité de 1. En l’etat c’est
l’explication la plus plausible du nombre anormalement élevé de
soignants contaminés. Pour la prise en charge des cas importés en
Europe et tant qu’ils restent sporadiques, c’est le port de combinaison
filtrantes qui est recommandé.
2. la cinétique inhomogène des 5 pays concernés avec une cinétique
affine pour la Guinée et le Nigeria et une cinétique exponentielle pour
la Sierra-Leone et le Libéria peut s’expliquer par des problèmes de
retard de diagnostic et de receuil des cas et ne pas reflèter fidèlement
la propagation des cas. Cependant une explication épidémiologique
plus satisfaisante serait la bienvenue.
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14. 3. la sous déclaration multifactorielle des cas (diagnostics differentiels
nombreux, frein economique et social de l’accès au soin, non respect
des rites sociaux et funéraires “sacrés” pour les individus déclarés
contaminés et donc “beneficie/risque” peu ou pas ecceptable pour
l’interessé et son entourage, …). Une estimation de la part immergée
de l’iceberg fait curellement défaut.
4. l’illusion des mesures de confinement qui sont contournées par les
impératifs socioéconomiques locaux et par la pratique
“institutionalisée” du contournment des régles contre rétribution.
L’exemple du Sénégal en est la parfaite démonstration.
5. le risque de cas importés en Europe via l’immigration clandestine et les
passeurs des autres traffics illicites qui, par nature, contournent tous
les systèmes de contrôle. Ce point semble toujours sous-estimé par les
autorités des pays concernés, probablement parce qu’il est
politiquement difficile à aborder en raison de la stigmatisation possible
d’une population déjà largement précarisée et fragile.
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