SlideShare una empresa de Scribd logo
1 de 44
Descargar para leer sin conexión
CNA CEFAG                                  SESSION DE JUILLET 2010
Bagnolet




  La simplicité peut-elle nous aider à
      « mieux » communiquer ?

                                *


            Mémoire en Bachelor Européen Graphic Design
                    Présenté par Elodie JAEGER
Je tiens à remercier Gilles Juan pour ses conseils avisés, le temps qu’il m’a accordé, ainsi
                         que ses références toutes plus intéressantes les unes que les autres.



Une pensée particulière est adressée aux personnes qui ont pris le temps de lire et re-lire ce
       mémoire et qui ont ainsi contribué aux multiples corrections apportées à ce dernier,
                                         Arnaud Rubio, Charles Jaeger et Lucile Bonnaud.




                                                                                            2
Table des matières


Introduction ................................................................................................................................ 5



I -       La simplicité .................................................................................................................... 9 

   1      Un besoin......................................................................................................................... 9 
        1.1      quelque chose de naturel .......................................................................................... 9 

        1.2      un reflexe face au surplus ...................................................................................... 11 

   2      Réduire, synthétiser pour « plus » ................................................................................. 12 
        2.1      une mise en valeur de l’essentiel ........................................................................... 12 

        2.2      un gain de temps .................................................................................................... 13 

        2.3      engager le spectateur .............................................................................................. 14 

   3      Un esthétisme séduisant ................................................................................................ 16 
        3.1      un art bien maitrisé par les Japonais ...................................................................... 16 

        3.2      une grande histoire d’architecture .......................................................................... 17 

        3.3      le design suisse ....................................................................................................... 17



II -      Pas si simple ! ................................................................................................................ 19 

   1      Les risques de simplifier ............................................................................................... 19 
        1.1      perdre des éléments essentiels ............................................................................... 19 

        1.2      tomber dans le simplisme....................................................................................... 20 

        1.3      la simplicité reflet de « pauvreté » ......................................................................... 21 

        1.4      perdre le contrôle ................................................................................................... 22 

   2      Et la complexité dans tout ça......................................................................................... 23 
        2.1      simplicité et complexité: les opposés s’attirent ..................................................... 23 

        2.2      la complexité comme moyen d’expression ............................................................ 23 

   3      « Complexe » et « chaos » ............................................................................................ 24 
        3.1      deux termes à ne pas confondre ............................................................................. 25 

        3.2      organiser la complexité préserve l’information ..................................................... 25

                                                                                                                                             3
III -  L’éloge du sens.............................................................................................................. 27 

   1      Un bon graphiste est un graphiste respectueux ............................................................. 27 
        1.1      produire par nécessité ............................................................................................ 27 

        1.2      investir sans gêne ................................................................................................... 28 

        1.3      ne pas sous-estimer son public ............................................................................... 29 

   2      Un graphiste sait se servir de ces outils......................................................................... 30 
        2.1      les images & les signes parlent .............................................................................. 30 

        2.2      les couleurs aussi.................................................................................................... 31



Conclusion ................................................................................................................................ 32



Bibliographie ............................................................................................................................ 34



Annexes .................................................................................................................................... 35 




                                                                                                                                             4
Introduction


        L'image a acquis un statut privilégié dans notre société. Les moyens de sa diffusion et
de sa consommation n'ont d’ailleurs jamais été aussi nombreux. C’est un fait, nous sommes
dans une « société de l’image » – terme d’ailleurs énormément utilisé à l’heure actuelle. Une
prolifération visuelle incontrôlable a complètement envahi notre quotidien, nos espaces
publics comme privés. « Il y trop d’images. » comme le dit si justement le cinéaste Bernard
Emond « Chaque jour, nous sommes submergés par une quantité monstrueuse d’images
grossières, menteuses, nuisibles publicités imbéciles – ou pire : intelligentes –, émissions de
télévisions stupides et racoleuses, « documentaires » voyeurs, photographies et journaux
d’une invraisemblable vulgarité. L’espace public et privé est envahi par des images qui
vendent et se vendent, l’un étant indissociable de l’autre. » 1 Trop de variété. Trop de
reproduction. Trop de signe. Le trop–plein est palpable.

Plusieurs auteurs ont, depuis la fin des années 60, formulé une critique radicale du rôle de
l'image dans les sociétés contemporaines. Partant d'une critique de la consommation, le
sociologue Jean Baudrillard a progressivement radicalisé son constat sur l'image. Ce que l'on
remarque, c'est la mort du réel et l'ouverture d'une ère de simulation, qui signe la « mise à
mort de toute référence. » 2 L'image a proliféré et s'est autonomisée, elle a fini par ne plus
renvoyer à un quelconque réel, ne signifiant plus rien. Plus on avance dans l'orgie de l'image,
moins on y croit. Lors du 15eme festival Visa pour l’image à Perpignan il déclara « C’est se
faire beaucoup d’illusions que de croire que les images peuvent témoigner de la réalité. […]
Elles sont devenues trop familières pour nous toucher. Nous sommes accoutumés. Il nous en
faut toujours plus. La prolifération des images est telle qu’on a franchi un seuil critique qui
interdit un décodage véritable. » 3 Et pourtant, au XXe siècle jamais la crédibilité de l’image
n’aurait pu être mise en doute. Puisqu’en effet, ce siècle restera comme celui de l’information
et de l’image, la seconde donnant à la première la force et le crédit qui manquaient pour
toucher le plus grand nombre. Si on pouvait opposer d’autres mots aux mots, on ne pouvait
rien opposer à l’image. L’image restait dans les mentalités un témoin de la réalité qui n’était
pas négociable, une part de vérité qui faisait dire aux sociologues, qu’une information sans
image n’existait pas. Quoi de plus vrai que ce que l'on a vu de ses propres yeux ? Ce n’est que
dans la seconde moitié du siècle qu’on remarqua le côté falsificateur des images. D’abord, en

1
   EMOND, Bernard, « Lettre aux jeunes gens qui me demandent comment devenir réalisateur », 2006 
2
   BAUDRILLART Jean, « La société de consommation », Gallimard, 1996 
3
   BAUDRILLART Jean, Interview à l’occasion du 15eme festival Visa pour l’image, Le Monde, 2008
                                                                                                    5
dénonçant les photomontages comme ceux des pays communistes qui sont restés célèbres.
Ensuite, Chris Marker dans son court métrage Lettre de Sibérie (1958) montra comment les
mêmes images pouvaient se prêter à des interprétations totalement contradictoires selon le
point de vue qu’on adoptait, le traitement qu’on faisait subir à ce matériau visuel brut, le
commentaire qui l’accompagnait ou encore le fond sonore sur lequel on le faisait défiler. Dans
le même état d’esprit, l’effet Koulechov – appelé aussi effet-K – désigne la propension d’une
image à influer sur le sens des images qui l’entourent. Pour mettre en évidence cela, le
théoricien Lev Koulechov réalisa une expérience. Il fit trois tirages d’une même photo : un
gros plan de l’acteur russe Mosjoukine inexpressif auquel il fit précéder trois images
différentes : une assiette à soupe, un cadavre dans un cercueil et une femme allongée dans un
canapé. Interrogés après le visionnage de chaque séquence, les spectateurs devaient
caractériser le sentiment exprimé par l'acteur. Dans le premier cas, les spectateurs croyaient
percevoir la faim, dans le second, la tristesse et dans le dernier le désir. L’effet Koulechov
démontre que les images prennent leur sens les unes par rapport aux autres. C’est ainsi que
l’image transita lentement de vérité universelle à interprétation possible donc subjective.
Rapidement, les graphistes et publicitaires prirent conscience du pouvoir manipulateur de
l’image. « Là où il y a de l'image, il y a du désir et de l'amour », affirmait Hugues de Saint-
Victor. La publicité fonctionne largement sur ce principe et permet de vérifier à quel point
l'image est un objet de désir : la pulsion acheteuse, aujourd'hui, s'accroche en grande partie
aux images. En 2002, Rick Poynor dévoile avec violence et ironie une vérité à la fois
ambigüe, dérangeante et inquiétante, dans « La loi du plus fort. La société de l’image ». À
travers ces 36 essais, il commente la place qu’a prit l’image dans notre société à travers le
graphisme la publicité en passant par la photographie et l’art. « L’image a tellement envahi
nos vies que nous ne reconnaissons même plus ces innombrables astuces pour nous séduire,
nous cajoler, nous déranger et nous exciter. C’est tout à fait naturel. Les choses sont ainsi. » 4
On assiste à une « guerre de l’image » ouverte où celui qui parlera le plus fort gagnera. Et
cela, à travers divers moyens : le traitement graphique, la tactique utilisé pour toucher le
spectateur, ou encore l’envergure de la campagne – affiches placardées dix fois dans une seule
station de métro. C’est malheureux, mais les images ne nous parlent plus, elles sont bien trop
occupées à l’heure actuelle à se chamailler entre elles. D’après Guy Debord, la société est
désormais vouée au culte de la marchandise et de la consommation triomphante. Dans son
œuvre majeur « La société du spectacle », cette société se fonde sur « un rapport social entre



4
    POYNOR Rick, « La société de l’image », Pyramyd, 2002
                                                                                                 6
des personnes, médiatisé par des images » 5 qui éloignent de la vraie vie. En effet, il est vrai
que l’image ne peut être inévitablement qu’une représentation, une imitation, un fragment de
vérité tout au mieux du réel. « […] l’image est analogique : elle fonctionne par ressemblance
avec l’objet représenté. » 6 L'urbaniste et philosophe Paul Virilio intègre, lui, l'image dans le
cadre d'une « dromologie » c'est-à-dire science de la vitesse. Il montre que nous vivons dans
une civilisation de l'optique, où l'image participe à une tyrannie du temps réel, de
l'immédiateté, de l'ubiquité. C’est certain, pour communiquer plus facilement et surtout plus
rapidement, l’image semble supérieure au texte. « […] on le voit tous les jours : les
magazines illustrés se vendent plus facilement que les magazines de texte. »6 Entre l'image et
l'écriture, une longue histoire de rivalité existe, qui aujourd'hui ne fait que grandir.

Cependant, il ne faut pas non plus trop blâmer l’image puisque c’est indéniable, elle a sa
place dans notre société tant elle nous apporte. Le philosophe Daniel Bougnoux exprime cette
« nécessité » de l’image dans un article au titre parlant « Il ne faut pas avoir peur des
images » : « […] tant de choses ne passent que dans l'image : si je veux reconnaître
quelqu'un, connaître un pays avant d'y aller, rien ne vaut une bonne photo plutôt qu'une
longue description. » 6 Plus vite et plus fort qu'un long discours, l'image parle. Il y a 50 ans à
peine, la bande dessinée était fortement critiquée, rejetée par de nombreux éducateurs et
parents. On lui reprochait de prendre la place de l’écrit et d’offrir des narrations plus pauvres.
Maintenant on s’aperçoit que la bande dessinée et, plus globalement l’image, est un très bon
outil pédagogique. D’ailleurs, Daniel Bougnoux soutiens l’importance de l’image et plus
précisément de la bande dessinée dans le domaine scolaire : « Non seulement elles nous ont
éduqué, mais elles suscitent autour d'elles une intense communication : Tintin a beaucoup fait
parler de lui dans les préaux d'école, et la « tintinologie » s'enseigne aujourd'hui à
l'université. […] Les programmes, les manuels, incitent à l’exploitation de l’image et les
élèves y sont sensibles. » La « force » de l’image tient aussi au fait qu’elle soit perçue
synthétiquement. Elle éveille nos affects, suscite nos émotions. D'ailleurs Plutarque y fait
allusion dans la « Vie de Brutus », quand il raconte le moment où Porcia son épouse, doit être
séparée de lui: « Elle s'efforçait de cacher l'extrême douleur qu'elle ressentait, mais en dépit
de tout son courage, un tableau l'amena à se trahir ; le sujet était tiré de la littérature
grecque ; Hector était reconduit par Andromaque qui recevait de ses mains leur petit enfant
et avait les yeux fixés sur son mari. La vue de cette peinture qui rappelait à Porcia son
malheur, la fit fondre en larmes, elle alla la regarder à plusieurs reprises dans la journée et


5 DEBORD Guy, « La société du spectacle », Gallimard, 1996 
6
 BOUGNOUX Daniel, Sciences Humaines Hors-Série N°43, Déc2003/Jan Fév2004
                                                                                                7
chaque fois elle pleurait. » 7 De plus, la photographie et les moyens modernes
d'enregistrement ont conféré à l'image un rôle non seulement de conservation mais aussi
d'investigation dans les sciences de la nature, permettant bien souvent de donner à voir
l'invisible, grâce aux capacités d'observations de certaines machines bien supérieures à celle
de l'œil humain. À la suite de cela, on remarque que ce qu’il faut blâmer ce n’est pas l’image
elle-même mais la répétition des mêmes signes sans signifiant, le matraquage publicitaire.
Intoxiqués de se faire « shampooiner » le cerveau à longueur de journée on a choisi de se
méfier de l’image. Peu à peu, on s’est fait à l’idée que, dans un monde envahi d’images
chargées, la simplicité pouvait être un gage d’authenticité. Et à l’inverse, que ce qui était trop
chargé était forcément suspect.




          À la cohue générale, l’atout de la simplicité ne pourrait-il pas redonner aux images la
parole? La simplicité peut-elle nous aider à « mieux » communiquer ?

Dans un premier temps nous étudierons les différentes raisons qui témoignent que la
simplicité est un atout majeur dans notre société. Pourquoi avons-nous tant besoin de
simplicité à l’heure actuelle? Quelles sont les points forts de cette utilisation ? Par la suite,
nous verrons que paradoxalement ce n’est pas si simple de simplifier. Nous étudierons les
dérives qu’engendre son utilisation excessive ou sa mauvaise utilisation. Ensuite, en étudiant
le contraire de la simplicité : la complexité, nous en déduirons que la simplicité au delà d’être
un bon moyen de communication ne peut vivre sans la complexité et ainsi avoir le monopole
dans le domaine de la communication. Ce constat fera naître la dissociation entre
« complexité » et « chaos » qui mettra en évidence l’importance majeur d’une « bonne »
communication : l’organisation. À la suite de tout cela, il m’est apparut essentiel que la
simplicité possédait des « lignes de conduites » qui dans notre société peuvent nous être utile
pour « mieux » communiquer. En effet, la simplicité se démarque de nos jours fortement
puisqu’elle n’agresse pas, elle est respectueuse. D’après mes constats, j’ai donc décidé dans
ma troisième partie de soulever des sujets plus ciblées, tel que la production nécessaire, ou
encore la communication respectueuse envers le public et l’environnement.




7
    PLUTARQUE, « La vie de Brutus, premier consul de Rome », 1730
                                                                                                8
I - La simplicité


Avant même de parler de simplicité, il me semble important de rappeler quelques définitions
issues du dictionnaire – Larousse 2003 – pour qu’il n’y ait pas de confusion entre les
différents termes abordés dans ce mémoire.

« Simplicité : Qui suffit à soi seul, qui n’a besoin de rien d’autre pour produire l’effet
attendu. Qui est constitué d’un petit nombre d’éléments qui s’organisent de manière claire. »
La simplicité s’oppose à la complexité.

« Simpliste : D’une simplicité exagérée, qui ne considère qu’un aspect des choses. » Quelque
chose de simpliste est incomplet, il y a un manque, un oublie volontaire ou involontaire.

« Minimaliste : Recherche de solutions requérant le minimum de moyens. » Le minimalisme
est aussi un mouvement artistique où les formes sont simplifiées à l’extrême et les éléments
orchestrés dans la simplicité la plus radicale.

Après lecture de ces quelques définitions, nous pouvons déjà constater qu’il ne faut pas
confondre le terme « simple », qui exprime le dépouillement de tout superflu avec le terme
« simpliste », qui exprime le fait de donner une vision incomplète des choses.

Plus discret et moins tape à l’œil, nous avons confiance dans la simplicité. Mais pourquoi lui
accordons-nous plus d’attention et de crédibilité? Dans cette première partie nous analyserons
les différents points forts de la simplicité.




          1      Un besoin
          1.1      quelque chose de naturel

La réponse la plus « simple » serait que nous en avons naturellement besoin! John Maeda
auteur « De la simplicité » commence d’ailleurs son ouvrage par cette phrase « La simplicité
c’est sain. » 8 Il y a dans le culte du « moins » quelque chose de rigoureux, de rationnel et de
serein. Econome de ses moyens, il serait ascétique. La Gestalt – psychologie de la forme – a
observé à travers la loi de Prägnanz que notre cerveau recherche toujours la simplicité.
Lorsque des choses se présentent à nous de façon ambigüe de sorte qu’elles peuvent être
interprétées de différentes manières, notre cerveau choisira toujours l’interprétation la plus
8
    MAEDA John, « De la simplicité », Payot & Rivages, 2009
                                                                                              9
simple. Ainsi, de façon naturel, un tout, un ensemble est perçu avant les parties le formant.
L’exemple le plus évocateur est celui du smileys ☺ ce n’est qu’une succession de caractères
spéciaux qui n’a aucun sens et ne fait référence à aucune règle. Pourtant naturellement nous le
regardons dans sa globalité pour l’identifier et ensuite seulement dans un second temps
remarquons de quoi il est constitué. John Maeda, à travers la Gestalt changeante de l’Ipod
Apple, montre à quel point de petits changements d’organisation peuvent créer de grandes
différences dans le design. Il confronte les trois designs des touches de commandes de l’Ipod :




« De gauche à droite, nous pouvons lire les étapes de l’évolution de l’Ipod ainsi : simple au
départ, puis plus complexe, et enfin aussi simple que possible. […] la troisième phase des
commandes de l’Ipod suscite le désir, parce qu’elle estompe toutes les commandes pour
arriver à une seule image simple. » Apple en créant un tout constitué d’un ensemble de
parties organise de façon à ce que notre cerveau soit le plus réceptif. En généralisant un
ensemble complexe, nous simplifions. Ce comportement peut aussi bien être expliqué par
notre cerveau reptilien qui gère notre « instinct de survie ». Nous avons besoin d’identifier le
plus rapidement possible ce qui nous entoure pour y distinguer un éventuel danger. Imaginez
le temps qu’il nous faudrait à identifier une pelouse si nous devions pour cela voir chaque brin
d’herbe individuellement. Cet exemple peut sembler un peu farouche mais pourtant nous
pensons ainsi. John Maeda résume –de façon peu être un peu brutal – que nous sommes des
« […] des animaux organisationnels. Nous ne pouvons nous empêcher de regrouper ce que
nous voyons. »

En fait, simplifier un design soulage l’effort cognitif de l’observateur, d’une certaine manière
on facilite le travail de réflexion. Car naturellement, le cerveau aime que d’une certaine façon
on lui mâche le travaille.



                                                                                             10
1.2      un reflexe face au surplus

La simplicité c’est aussi une réponse face aux communications qui chargent actuellement
notre quotidien. Elle apparait comme un coup de balai dans les oripeaux d’une société qui
croule sous ses propres excès. Graphiste et plasticien, Malte Martin prend le parti pris de
s’opposer à la tendance actuelle de surenchère des images et des couleurs avec son procédé de
« basse tension ». Il entend proposer des signes qui « parlent moins fort » que les signes
commerciaux et le mobilier urbain. Il le dit lui-même lors d’une conférence donné à la
Sorbonne «La société du spectacle produit une course effrénée menant à une surenchère de
signes. Le clignotement permanent et généralisé des enseignes est le symbole de la
marchandisation du monde. Je n’ai pas les moyens de crier plus fort et je n’ai pas envie de
rajouter du bruit au bruit, de la couleur à la couleur. » 9 La « basse tension » c’est en quelque
sorte parler moins fort que les autres personnes qui crient atour de vous afin d’attirer
l’attention. Dans son travail pour le théâtre Athénée, il propose des affiches au graphisme
calme et sans fioriture mêlant des jeux typographiques aux signes. « Les mots, le contraste
typographique, le noir et blanc, et souvent la matière du papier, sont les ingrédients de mes
tentatives de ralentissement du monde. Il s’agit paradoxalement de gagner en force en
susurrant, et d’envoyer de temps en temps des éclats de mots dans la ville « avec excès, près
de leur déchirure. » Même si le traitement graphique de Malte Martin est très épuré, sobre et
minimaliste, il n’en reste pas moins fort, et son impact visuel puissant. Puisque attention, il ne
faut pas croire que la simplicité doit être « discrète » ou « petite », la preuve le graphisme de
Malte Martin est affirmé, ces signes graphiques occupent toute la surface... Un jeune graphiste
français, Florent Guerlain a eu le projet ambitieux de concevoir une identité visuelle
modulable pour la France qu’il appellera « Logographie France », « Logo » comme logotype
et « Graphie » pour graphisme. Du bleu, du blanc, du rouge et des formes géométriques, à
peine plus ! L’objectif est de créer une identité visuelle globale pour la France d’une
modularité extrême. Une charte pour répondre une bonne fois pour toute au désastre
graphique causé par l’infinie alternance gauche /droite au sein des institutions qui remet
quasi-systématiquement en cause la marque graphique du prédécesseur pour mieux marquer
son territoire. Ce début de « charte graphique » –très réussie – tente de répondre à l’actuelle
création d’images multiples des différentes institutions publiques et ministères qui produisent
en continu un patchwork graphique des plus monstrueux et des plus coûteux.




9
    MALTE Martin, conférence du 06 février 2007 à la Sorbonne
                                                                                               11
La simplicité c’est en quelque sorte « une bouffée d’air frais » qui vient au milieu d’une cohue
graphique apporter un peu de tranquillité.




           2       Réduire, synthétiser pour « plus »
           2.1      une mise en valeur de l’essentiel

           1.1.1     cibler sur l’information
La simplicité permet de mettre en valeur certains éléments. « Less is more » – trad : « Moins
est plus ». Le plus célèbre de tous les « éloges du moins » a été fait par un architecte. Et pas
des moindres : au milieu du XXe siècle, Mies van der Rohe symbolisait l’attrait des bâtisseurs
pour le minimalisme. Cette formule signifie que moins vous mettez d’éléments, plus ceux qui
restent sont mis en valeur. En effet, les éléments d’une composition rentrent en compétitions
les uns par rapport aux autres et cela génère ce qu’on appel du « bruit visuel ». Moins il y a
de « compétiteurs » en liste, plus ceux qui restent ont la chance de gagner l’attention du
spectateur. Le dessinateur de bande dessiné Scott McCloud exprime très bien cela dans son
livre « L’art de l’invisible » ou il affirme en parlant du dessin humoristique « Quand nous
faisons tendre une image vers l’abstraction, nous éliminons des détails mais par contre nous
en mettons d’autres en valeurs. En épurant une image pour n’en garder que sa signification
essentielle, le dessinateur amplifie cette signification… » 10 Récemment, des créations
d’affiches ont prouvés qu’avec très peu d’élément ont pouvait résumer facilement un contenu.
« Poster Series of TV Shows » est un formidable travail graphique conçut par le directeur
artistique Albert Exergiant. Une série de posters minimaliste, représentant par des symboles
simples, les séries TV les plus populaires dans le monde. Avec cette collection de quarante
affiches, Albert Exergian propose de redécouvrir les séries sous un nouvel angle, avec des
symboles simples mais fort de sens. Le résultat est tellement convaincant qu'il est facile de
découvrir les séries qui se cachent derrière chaque affiche. En réduisant le nombre d’élément
on focalise le spectateur sur l’essentiel et ainsi l’information n’en ai que plus lisible.

           1.1.2     délivrer de l’émotion
« Le peintre et l’empereur » est un conte Zen qui amène la simplicité de manière très
intéressante dans un contexte fantastique et sensible. Ce conte relate l’histoire d’un empereur
qui commanda à un peintre une fresque pour ses nouveaux appartements. Il demanda « qu’il y
soit représenté deux dragons, l’un bleu et l’autre jaune, symbole des deux énergies

10
     McCLOUD Martin, « L’art de l’invisible », Delcourt, 2007s
                                                                                             12
primordiales dont l’union engendre l’harmonie céleste. » 11 Le temps passa, à tel point que
l’empereur en oublia sa commande passée. « Il découvrit alors avec stupéfaction deux espèces
de zigzags grossièrement esquissés, l'un bleu et l'autre jaune. Cela ressemblait vaguement à
deux calligraphies ! » Furieux du résultat, qui avait demandé tant d’argent et tant de temps il
jeta le peintre en prison. Il dût pourtant se résigner la première nuit à dormir devant cette
fresque qu’il avait malheureusement demandé à être devant son lit. « Au plus profond de la
nuit, des rugissements réveillèrent le maître de la Chine. Celui-ci se tourna vers la fresque et,
dans la pièce tout embrasée par un clair de lune, il crut voir deux éclairs, pareils à des
dragons, l'un bleu et l'autre jaune. Ils s'affrontaient, s'enlaçaient, se repoussaient,
échangeaient leurs places en une danse infinie. » Le lendemain, l’empereur alla demander des
explications au peintre. Ce dernier, l’emmena dans sa caverne là ou il effectuait ses
recherches pour lui donner des réponses. « Sur les parois, tout près de l'entrée, étaient peints
des dragons bleus et jaunes comme l'empereur les avait tant espérés, avec tous les détails les
plus réalistes, les écailles luisantes, les griffes acérées, les naseaux fumants... Mais à mesure
que la torche s'enfonçait dans les profondeurs, elle réveillait des images de plus en plus
épurées pour aboutir à de simples lignes de force. Il ne resta plus à la fin que l'essence
vibrante des dragons, les énergies primordiales figurées par les mêmes traits de couleurs que
ceux tracés sur la fresque. » Ce conte Zen met en évidence que pour délivrer une émotion il
n’est pas obligatoire d’être proche du réalisme. À l’inverse, c’est souvent le superflu, les petits
détails, qui cachent des choses beaucoup plus profondes.

Simplifier un design – par élimination – permet de mettre l’accent sur certains éléments
considérés comme essentiels. Si on ne voit que les éléments primordiaux par ce que les autres
éléments sont tout simplement absents, notre attention n’a d’autre choix que de se focaliser
sur ceux qui existent, c’est à dire l’essentiel. Synthétiser/réduire s’avère être un très bon
moyen de mettre en valeur de l’information mais aussi dans certain cas aussi de délivrer de
l’émotion.

           2.2     un gain de temps

La simplicité nous fait gagner du temps. Et dans un monde où tout va plus vite, où le temps
disponible devient de plus en plus précieux, gagner du temps est primordial. Pourtant
inévitablement nous passons beaucoup de temps à attendre et pour beaucoup de choses :
attendre qu’une page internet charge, attendre que l’eau boue, attendre son repas au
restaurant, attendre un examen… John Maeda aborde cette notion, du temps que nous

11
     YEIAZEL, « Le peintre et l’empereur »
                                                                                                13
n’aimons pas laisser filer. Il affirme « Personne n’aime souffrir de la frustration liée à
l’attente. Les consommateurs et les entreprises essaient tous de trouver l’option la plus rapide
ou tout autre moyen de réduire cette frustration. » Et c’est ainsi que les Fast Food peuvent se
vanter de ne pas vous faire attendre votre repas, les Chronopost vous offre la possibilité
d’envoyer votre courrier plus rapidement, les avions vous proposent des vols direct pour
éviter de vous faire perdre du temps en passant par de pénible escales… Quoi de plus simple
que de fais un vol Paris – New York lorsque l’on veut aller à New York en partant de Paris ?
Et pourtant, « Un vol direct économise du temps par rapport à un trajet avec
correspondances mais il coûte sensiblement plus cher. » En effet, la simplicité est devenue un
formidable atout de vente. Et même plus impressionnant, la simplicité est devenue le sujet
principal d’une publicité. Prenons l’exemple de la publicité qui passe actuellement pour la
nouvelle Nissan Pixo : « Nouvelle Nisan Pixo, economique 103g de CO² par kilomètre, c’est
simple. Welcome to Simplicity. » Nissan joue sur le côté conviviale, la publicité pour une fois
ne cherche pas a en dire trop pour coller à son message. Revenons à notre gain de temps. John
Maeda nous parle dans son livre de l’Ipod Suffle lancé par Apple, qui diffère des autres Ipod
ayant la particularité de ne pas avoir d’écran. Son interface utilisateur est de ce fait largement
simplifiée. L’Ipod Suffle passe aléatoirement des musiques, la seule action possible est de
passer la chanson. « Renoncer à la possibilité de choisir et laisser une machine le faire pour
vous : voila une méthode radicale pour atténuer le temps passé à tripoter la molette. » Le
Shuffle part d’un bon principe même s’il faudrait qu’il sache selon notre humeur, notre envie
ce que l’on veut vraiment entendre. Amazon.com ou la Fnac.com ont très bien compris cela.
Sur ces sites, on vous recommande des livres que vous serez susceptible d’aimer d’après un
choix de livre. Ce gain de temps astucieux est établi en fonction des préférences d’autres
personnes dont le site juge que vous avez le même profil que vous. D’ailleurs Internet reste
l’exemple le plus éloquent, c’est un lieu d’abondance ou l’internaute doit trier et faire des
choix parmi une multitude d’informations pour trouver ce qu’il cherche. De même que plus
un site sera simple, plus il sera claire, et plus rapidement l’internaute trouvera ce qu’il
cherche. Ainsi, les choses simples, claires nous donneront la satisfaction de ne pas avoir perdu
notre temps. Mais pourquoi ne pourrait-on pas apprécier la lenteur ? Est-ce une réaction
inhérente de notre volonté ?

       2.3     engager le spectateur

La simplicité est aussi un moyen d’engager le spectateur. Dans l’art Zen – on peut d’ailleurs
se remémorer le conte « Le peintre et l’empereur » –, les Japonais pensent que si tout est

                                                                                               14
exprimé, l’intérêt de l’observateur disparaît. En décrivant les choses de manière la plus
dépouillée possible, on réduit leur description au strict minimum. Cela permet d’éveiller
l’intérêt et l’imagination de l’observateur en lui laissant une marge d’interprétations. Bien des
fois, l’image révèle trop de choses, ne permettant pas à l’observateur de se projeter. Dans
l’introduction nous avions déjà comparé les mots aux images. Les mots ont tendance à nous
laisser imaginer des représentations à défaut d’avoir une image. Prenons par exemple les
romans adaptés au cinéma – Harry Potter, Le Seigneur des Anneaux… Combien de personne
vous ont dit après avoir vu un film adapté d’un livre : « Je préfère largement le livre.» « Les
acteurs sont mal choisi.» « Je n’imaginais pas du tout cette scène comme ça. » C’est évident,
à travers un livre, aussi bien détaillé soi-t-il, il y aura toujours notre propre interprétation
d’après les mots. Les mots nous laissent une part de liberté, tandis que l’image et surtout
l’audiovisuel figent, et nous donne immédiatement à voir une représentation de la réalité.
C’est d’ailleurs pour cela que les publicités qui utilisent la technique du teasing – ou de
l’aguichage – fonctionnent très bien. Le teasing ne peut dire d’où il provient. Pas de signature,
pas de moyen d’identification de la marque, seulement une énigme, une question, une petite
phrase amusante ou quelque chose de totalement incompréhensible. Peu importe, tant que le
consommateur n’ait qu’une seule envie : celle d’aller voir de l’autre côté de l’affiche, de la
page du journal, ou du spot télévisé pour découvrir de quoi il s’agit. La réponse arrive au
prochain épisode, dans un laps de temps plus ou moins court. On se souvient tous de la
publicité anti-tabac « Maintenant vous savez » qui fonctionne en deux temps. Le premier spot
visuel est un micro trottoir où l’on présente aux gens cette information : « On a décelé dans
un produit de grande consommation des traces d’ACIDE CYANHYDRIQUE, de MERCURE,
d’ACETONE et d’AMMONIAC. » En réponse à cela, les gens pensent à des détergents, du
poison, des produits ménagés… Un peu plus tard un deuxième spot publicitaire donnera la
réponse « Ce produit c’est la cigarette. » Le teasing fonctionne incroyablement bien parce
qu’à la première étape nous n’avons pas de suite, de réponse. Cela suscite la curiosité. Tout ne
nous est pas donné. L’inconvénient du teasing est qu’il coûte plus cher qu’une publicité
traditionnelle – deux affiches, deux spots télévisuels… Mais n’oublions pas que dans le
vacarme publicitaire constant, une seconde d’attention de la part du consommateur n’a pas de
prix. L’image suggérée est un bon moyen d’engager le spectateur et d’attirer son attention.




                                                                                              15
3      Un esthétisme séduisant
          3.1     un art bien maitrisé par les Japonais

La simplicité est aussi une forme d’esthétisme très prisée par certaines cultures. L’Art
Japonais en est le meilleur exemple. Il faut néanmoins souligner que malgré les apparences
leur art est caractérisé par des oppositions esthétiques. Prenons par exemple deux œuvres de la
même période : le Palais de Katsura est un exercice de simplicité mettant l’accent sur les
matériaux naturels et bruts alors que le Mausolée de Töshögu est une structure symétrique
rigide recouverte sur chacune de ses surfaces visibles de gravures en relief colorées avec éclat.
Mais l’art japonais reste néanmoins connu pour sa simplicité étant donné qu’il excelle dans ce
domaine. C’est après la seconde guerre mondiale que les développements du design graphique
de manière général, en matière d'emballages, d'affiches et de magazines, s'inspirent
visiblement du graphisme japonais. Par la suite, les Jeux olympiques de Tokyo en 1964 vont
fournir aux graphistes japonais l'occasion de démontrer leurs talents, et c'est à partir de cette
date que se développa au Japon le mouvement moderne de design graphique, inspiré du
constructivisme européen. Les affiches de Yasuku Kamekura (1969), et notamment celle des
Jeux olympique de Tokyo, sont à travers des formes géométriques simples, sobres et
dynamiques. L’art Japonais à cette philosophie d’apporter une attention toute particulière à la
finesse et la simplicité, aux choix de matériaux et au sens aigu du détail. Différents concepts
guident le design japonais actuel : kawaii – beau –, craft – l’artisanat –, kime – la finesse du
grain, la finition parfaite –, tezawari – sensations tactiles –, minimal – la beauté des formes
dépouillées. Prenons par exemple la célèbre marque : Muji, qui est loin d’être anodine. Muji
est une enseigne de magasins japonais, née à Tokyo en 1980, appartenant à l'entreprise
Ryohin Keikaku. Le mot « Muji » veut littéralement dire « pas de marque, bon produit » –
soit « de qualité sans marque ». D’ailleurs, Nick Currie affirme « Ici, en Occident, nous avons
enfin la chance de découvrir            une marque qui repose sur l'absence de stratégie de
marque. » 12 Le succès de Muji est tel que de nos jours il possède des magasins et des points
de ventes dans beaucoup de villes du monde entier et propose des articles allant des biens
ménagés aux jouets pour enfant, en passant par la papeterie et la vaisselle. Les produits tout
comme la communication visuelle de la « non marque », repose sur le concept du Shibui. Il
s’agit d’une esthétique reposant sur la simplicité et l’inintrusivité. En effet, ce qui unit
l’ensemble des produits de la marque tout comme son graphisme c’est l’absence de couleurs
et de détails inutiles.


12
     CURRIE Nick, The Moment, le blog du Style Magazine du New York Times, 2008
                                                                                              16
3.2     une grande histoire d’architecture

La simplicité occupe une place très importante dans le domaine de l’architecture. L’art
cistercien datant de 1098 est caractérisé par des bâtiments remarquables par la pureté de leurs
lignes, l’économie des matériaux et leurs simplicités. Toute moulure ou tout élément décoratif
était banni. Nous avons bien mentionné « art » cistercien mais cette expression repose sur un
malentendu. Les moines n’avaient aucune intention de faire de l’art, mais justement d’évacuer
l’art de leurs églises. En réalité, les moines de XIIe siècle souhaitaient revenir à la pureté de la
règle de Saint Benoît, fondée sur le renoncement, l’exigence, la pauvreté. Des constructeurs
ont ainsi bâti une série de chef-d’œuvres sans le savoir ; leur quête uniquement spirituelle,
n’était à aucun titre une recherche du beau. En 1134, lors d'une réunion du Chapitre général
de l'ordre, Bernard de Clairvaux qui est au sommet de son influence, recommande « La
simplicité dans toutes les expressions de l'art. » 13 Dès lors, les cisterciens vont développer un
art dépouillé et souvent monochrome. Des architectes comme Le Corbusier, Mies van der
Rohe ou encore Loos ont en commun avec les cisterciens cette haine de l’ornement qui
distrait, cet idéal de pureté. Adolf Loos, architecte Viennois, fut un des précurseurs et
théoricien du « moins ». Son texte le plus célèbre mais aussi le plus incisif, « Ornement et
crime » fit scandale sûrement du fait que l’heure était à la surabondance de l’art nouveau, fort
de ses couleurs luxuriantes et de ses rondeurs voluptueuses. « D'un combat de trente années,
je suis sorti vainqueur. J'ai libéré l'humanité de l'ornement superflu. "Ornement", ce fut
autrefois le qualificatif pour dire "beau". C'est aujourd'hui, grâce au travail de toute ma vie,
un qualificatif pour dire "d'une valeur inférieure". » 14 L’Art nouveau lui semble refléter
l’hypocrisie de la société de son temps. Il met ses idées en application, puisqu’il conçoit son
immeuble de la Michaelerplatz à Vienne, surnommé « La maison sans sourcils » du fait que
les fenêtres ne comportaient aucun ornement. Construite en 1910, on peut faire remarquer que
Loos est peu être quelqu’un d’encore incompris mais qu’il a au moins le mérite d’avoir
quarante ans d’avance sur son temps.

          3.3     le design suisse

Le style typographique international (ou style international), également connu sous le nom de
style suisse, est un courant du design graphique développé en Suisse dans les années 1950
notamment par Armin Hofmann et Paul Rand. Il met l'accent sur le dépouillement, la lisibilité
et l'objectivité. Le design Suisse a sût imposer l’Helvetica et la grille de composition dans le

13
     DE CLAIRVAUX Bernard, « L’essence du christianisme », Gallimard, 1992
14
     LOOS Adolph, « Ornement & Crime », Rivages, 2003
                                                                                                 17
but premier de nous aider à soustraire méthodiquement de nos compositions tout élément
superflu. La police Helvetica est créée en 1957 par Max Miedinger, elle a pour objectif
d’atteindre l’harmonie optique la plus aboutie possible. Son tracé d’une grande neutralité lui
permet de se prêter à tous les usages, si bien qu’elle est une des polices les plus utilisées dans
le monde. Dans ce courant, la photographie est souvent en noir et blanc, elle est préférée aux
illustrations dessinées. Les affiches sont une synthèse entre une « manière allemande » –
monumentalité des représentations, sobriété des traits, contraste des couleurs – et une
« manière à la française » – couleurs et fluidité des traits. Le design suisse répond aux besoins
nouveaux de la société de consommation de masse de l'après-guerre et le monde entier va
l'adopter. Caractérisé par sa grande simplicité ont peut souligner que ce courant a encore
beaucoup d’influence de nos jours.




Nous avons vu que la simplicité améliore la clarté d’un message ou d’une mise en page et
facilite l’effort cognitif de l’observateur tout en l’impliquant. La simplicité a donc beaucoup
d’avantages et répond à un besoin naturel chez l’observateur. Mais, simplifier n’est pas un
acte aisé. Nous évoquerons dans cette seconde partie les dérives de la simplicité. Et dans un
second temps, nous pencherons sur son contraire la complexité. Puisque la simplicité se
montre un si bon atout de communication, pourquoi aurait-on encore besoin de complexité ?




                                                                                               18
II -    Pas si simple !

          1      Les risques de simplifier
La simplicité s’avère paradoxalement une opération délicate et ardue. Faire simple demande
d’investir du temps et de l’énergie. Etrangement, faire simple ce n’est pas simple ! Puisque
mal utilisée la simplicité peut faire des dégâts.

          1.1     perdre des éléments essentiels

Andy Rutledge dans son texte « Complexe Order Simple Chaos » compare l’action de
simplifié à celle de faire de la chimie. « Il parait que simplifier est une action délicate. […]
Tout comme avec la chimie, la simplification peut entraîner la réduction, la distillation. […]
En outre, comme en chimie, si vous ne faîtes pas attention le résultat peut vous exploser au
visage. » 15 Le novlangue – Newsweek en anglais – langue officielle d’Océania, inventée par
George Orwell pour son roman « 1984 » en est un bon exemple. Cette langue a pour but de
rendre impossible l’expression des idées et à éviter toute formulation de critique envers l’Etat
en appauvrissant le lexique et la syntaxe du vocabulaire. Le vocabulaire est réorganisé en trois
classes A, B et C : le A ne contient que les termes nécessaires au travail et à la vie, le B les
termes à des fins politiques et le C à des termes scientifiques et techniques. « Comparé au
notre, le vocabulaire novlangue était minuscule. On imaginait constamment de nouveaux
moyens de le réduire. » 16 L’idée fondamentale du novlangue est de supprimer toutes les
nuances d’une langue. Par exemple, si la langue possède le mot « bon », il est inutile qu’elle
est aussi le mot « mauvais ». On crée le concept « mauvais » en ajoutant un préfixe marquant
la négation : cela donnera « inbon ». « On remarqua qu’en abrégeant ainsi un mot, on
restreignait et changeait subtilement sa signification car on lui enlevait les associations qui,
autrement, y étaient attachées. […] Chaque réduction était un gain puisque, moins le choix
est étendu, moindre est la tentation de réfléchir. » L’idée sous-jacente au novlangue est que
si une chose ne peut pas être dite, cette chose ne peut pas être pensée. La question   soulevée
par cette supposition est de savoir si nous définissons toujours la langue ou sommes parfois
« formatés » par elle. Par exemple, peut-on ressentir l’idée de « liberté » si nous ignorons ce
mot ? Cette théorie est liée à l’hypothèse Sapir-Whorf et à la formule de Ludwig
Wittgenstein : « Les limites de ma langue sont les limites de mon monde ». Le novlangue, en
réduisant son vocabulaire, a soulevé un des risques important de la simplification par la
réduction : à enlever trop on supprime le sens. « La puissance de la simplification est telle

15
     RUTLEGE Andy, « Complexe Order Simple Chaos », 2009
16
     ORWELL George, « 1984 », Folio, 1972
                                                                                             19
qu’elle peut faciliter une communication directe mais elle peut aussi détruire ou corrompre
des renseignements. » 17

        1.2     tomber dans le simplisme

L’autre risque de trop simplifier serait de tomber dans une conception trop simpliste, c'est-à-
dire où il manque des éléments essentiels. Et ainsi, faire trop simple risque d’être interprété
comme quelque chose de « léger ». D’ailleurs, la communication d’Apple commence vis-à-
vis de cela à être fortement critiquée de part et d’autre « (…) des campagnes publicitaire se
rapprochant plus du produit cosmétique. » 18 Comme vous le savez, la pomme communique
depuis quelques années sur la simplicité. Tout le monde connait leurs produits à l’esthétique
pure et sans fioriture. Les publicités et spots télévisuels jouent sur cette intense simplicité :
des fonds immaculés de blanc, un produit placé souvent au centre, et une voix off qui vient
sobrement présenter les fonctionnalités du produit. Leur communication est justifiée
puisqu’elle suit parfaitement les produits Apple ; des outils simples, pratiques et beaux, et
d’ailleurs cela marchait très bien. Mais depuis peu la marque semble manquer cruellement de
créativité en matière de communication et se servir abusivement de leur atout de
communication, si bien que la simplicité caractérisant l’univers Apple tourne dangereusement
au simplisme. Prenons par exemple leur tout dernier produit « L’Ipad », leur plus grande faille
fût de lancer un slogan certes simple, mais sans fond ni message percutant « Qu’est ce que
l’iPad ? L’iPad est fin, l’iPad est beau. » Pourtant cela n’empêche aucunement le produit de
se vendre. Sûrement parce que la marque est déjà bien trop ancrée dans notre culture, l’image
est installée et Apple n’a plus besoin de s’imposer. Cependant, on comprend qu’entre
simplicité et simplisme, existe une frontière ténue difficile à percevoir mais facile à franchir.
« Le problème est qu’il faut choisir ce qui mérite de vivre en sacrifiant ce qui mérite de
périr. » 19 Pour nous aider à faire cela, Jacob Nielsen, ergonome Américain, préconise avant
d’ajouter un élément de se poser deux questions fondamentales :

     1. « Cet élément simplifie-t-il la tâche de l’utilisateur ? »
     2. « Cet élément apporte-t-il une valeur ajoutée ? »

 … si la réponse est « non » éliminez-le.

John Maeda se confronte à la même problématique « Où se trouve l’équilibre entre simplicité
et complexité ? Telle est la question. Jusqu’où les choses peuvent elles être simplifiées ? »

17
   RUTLEGE Andy, « Complexe Order Simple Chaos », 2009
18
   EKINOXE Julien, extrait d’un article de blog, 2010
19
   MAEDA John, « De la simplicité », Payot & Rivages, 2009
                                                                                              20
Naturellement, nous avons tendance à en garder toujours plus, nous n’aimons pas supprimer
les choses. Réduire n’est donc pas un acte aisé. Avant d’ajouter un élément graphique dans un
design il faut se demander si cet élément participe oui ou non à communiquer un message.

           1.3     la simplicité reflet de « pauvreté »

Don Norman, un des vieux gourous de l’utilisabilité, a jeté un pavé dans la mare avec son
article « Simplicity is highly overrated » – « La simplicité est largement surestimé » –, où il
exprime son agacement face à cette nouvelle « tendance » qui incite les designers à
débarrasser nos écrans de toutes les fonctions qui pourraient nous être utiles. « Alors qu’est-ce
que les gens veulent dire quand ils parlent de la simplicité ? D’une seule touche, bien sûr,
mais avec l’ensemble de leur fonctionnalités préférées. » 20 Don Norman dans son article
compare deux grille-pains : le traditionnel avec un bouton pour contrôler la cuisson du pain à
un grille-pain allemand à $ 250 constitué d’un moteur pour abaisser automatiquement le pain
non grillé, d’un écran LCD, avec de nombreuses icônes, des graphiques et des chiffres… « La
simplicité ? Pourquoi un tel grille-pain ? […] Parce qu’il ajoute des fonctionnalités que les
gens veulent avoir. » Très radicale dans ses propos, selon lui la simplicité « est un mythe »
qui ne se vend pas. Plus un objet possédera des caractéristiques qui par conséquent le rendront
plus complexe mieux il se vendra. Les acheteurs assimilent la simplicité au manque de
puissance et de capacité – même si par derrière il peut s’avérer que ce soit tout l’inverse –, et
inversement la complexité s’assimile à la puissance. « […] les gens ont tendance à aller vers
des produits puissants, ils jugent de cela par l’aspect complexe. » C’est assez étrange comme
raisonnement, puisque moi-même j’ai arrêté d’acheter des objets aux fonctions multiples à
partir du moment où je me suis rendu compte qu’en achetant ce genre d’objet, je n’utilisais à
peine les 1/3 du produit. L’objet le plus éloquent serait sans doute l’évolution du téléphone
portable, en plus de téléphoner, d’envoyer des textos, de jouer et de prendre des photos, des
vidéos, ont peut maintenant aller sur internet, regarder la télévision, téléphoner en visio... Une
chose complexe nous demande du temps pour la comprendre et nous avons pourtant
mentionné précédemment que ce qui nous demande du temps ne nous attire franchement
pas. « D’un côté vous voulez un produit ou un service facile à utiliser ; de l’autre, vous voulez
qu’il accomplisse tout ce qu’une personne pourrait rêver qu’il effectue.» L’Iphone a tout à
fait compris cela, le design très épuré et simple cache l’envergure de ce Smartphone. De la
même façon, prenons comme exemple Google. Une page blanche, avec un endroit où écrire,
nous permet en un clique d’accéder à l’immense réseau d’ordinateurs et de bases de données


20
     NORMAN Don, « Simplicity is highly overrated », 2007
                                                                                               21
Google. C’est pour cela que John Maeda expliquer que « Plus semble moins si on s’en tient
éloigné, très éloigné. » Don Norman a tendance à oublier cela, et à généraliser ou plutôt à
penser que les consommateurs généralisent et ainsi avance qu’une esthétique simple
s’assimile forcement à des fonctionnalités pauvres. « Et la vérité est que la simplicité ne se
vend pas. Pourquoi ? […] La réponse est celle-ci : les gens ne sont pas prêts à payer pour un
système qui semble plus simple, car il semble perdre en capacité. » La simplicité peut en effet
rendre sceptique les gens leur laisser penser qu’ils ne paient pas le prix fort pour un produit
dans lequel ils espéraient « plus ». John Maeda aborde ce souci dans son livre. Selon lui
lorsque l’on fait appel à la simplicité on est dans l’obligation de lui « insuffler » de la qualité.
« La perception de la qualité devient un facteur décisif quand il faut choisir moins à plus. »
D’ailleurs, l’industrie du luxe marche énormément avec cela. Si nous ne donnons pas à un
produit simple une valeur technique, prestigieuse ou autre ce dernier peut rapidement tomber
dans l’objet simpliste.

       1.4     perdre le contrôle

L’action de simplifier – que ce soit pour un objet, une affiche ou encore une interface –
revient à ce que quelqu’un fasse le tri à notre place. Et par conséquent, à trop nous faciliter le
travail on perd la diversité qui nous permettait de faire des choix, prendre des décisions.
Comme nous l’avons vu l’Ipod Shuffle d’Apple impose la musique de manière aléatoire et de
ce fait il nous épargne la perte de notre temps à choisir des musiques mais en contre partie il
nous supprime la prise de décision. Est-ce vraiment un avantage ? Pourquoi sommes-nous
prêts à nous en remettre à la simplicité ? John Maeda donne une réponse à cela en affirmant
que « Dans la simplicité nous avons confiance. » La preuve, il n’y a pas longtemps une
machine à laver pas comme les autres est sortie sur le marché la « BEKO ONE ». L’utilisation
de cette machine par l’utilisateur se fait avec un unique bouton ! Les paramètres de lavage ou
autre sont déterminés automatiquement par la machine. Tout ce qu’il vous reste à faire est de
presser l’unique bouton présent sur la machine pour lancer le lavage, rien de plus simple ! La
simplicité ne serait-elle pas destinée aux fainéants ? De la même façon, une affiche qui ne
nous montre que l’essentiel ne va-t-elle pas manquer de « plus » de choses? Le surplus nous
apporte une valeur en plus qui n’est pas forcement nécessaire à la compréhension de l’affiche
mais appréciable. Il y a dans le « moins » quelque chose qui nous plait instinctivement
puisqu’en étant plus direct et plus simple il est beaucoup plus facile à comprendre que les
choses complexes, mais tout simplifier ne rendrait-il pas les choses trop ennuyeuses ?



                                                                                                 22
2     Et la complexité dans tout ça
           2.1     simplicité et complexité: les opposés s’attirent

La simplicité sans la complexité aurait-elle encore une raison d’être ? C’est bien connu, les
opposés vivent de leur opposition. « La complexité et la simplicité sont deux qualités
symbiotiques. […] chacune a besoin de l’autre : sa définition dépend de l’existence de
l’autre. » 21 C’est le propre de la pensée complexe, que de ne pas séparer les contradictions.
La simplicité et la complexité ont besoin l’un de l’autre. Et d’ailleurs on remarque que plus il
y a de complexité sur le marché plus la simplicité ressort. C’est de cette manière que le
journal Telegraph s’est fait remarquer à Londres avec sa nouvelle campagne publicitaire.
Avec la prolifération des quotidiens gratuits la baisse des ventes de la plupart des grands
journaux a été inévitable. On a pu ainsi voir dans le métro Londonien une campagne pour le
journal Telegraph, ou plutôt pour son site internet, sur lequel le journal semble avoir
beaucoup investi. Sur fond blanc, des phrases viennent ponctuer agréablement les montées et
descentes menant aux quais du métro, soigneusement composées dans une typographie qui
rompt avec les caractères à empattements propres au monde des journaux. Ces phrases
vantent avec une sobriété graphique très Suisse la qualité des informations que l'on peut
trouver sur le site du journal, qui en ont fait le site du journal anglais le plus visité.
L'économie de moyens employés est apaisante et vient curieusement faire mouche au milieu
d'une débauche de visuels criards et colorés, qui cherchent tous à attirer l'attention avec
beaucoup d'excès. En choisissant un graphisme sobre et sans fioriture le journal Telegraph a
su se faire remarquer face aux communications beaucoup plus chargées.                Imaginons
maintenant qu’il n’y ait que des communications jouant de leur simplicité, la campagne du
journal Telegraph aurait-il eu autant d’impact ? S’il ne restait que la simplicité, comment
saurait-on ce qui est vraiment simple ? Aurait-on besoin des communications « complexes »
pour faire ressortir les autres ? A-t-on besoin du mal pour savoir ce qui est bien ? Oui, sans
aucun doute. La simplicité ne peut donc en aucun cas exister sans son opposé, la complexité.
Mais la complexité est-elle vraiment responsable des mauvaises communications ?

           2.2     la complexité comme moyen d’expression

On observe globalement que l’art oscille constamment entre deux pôles, le purisme et la
surcharge. L’approche vers une phase de surcharge est progressive, alors que la phase de
dépouillement survient brutalement. Prenons par exemple, l’art baroque. L’art baroque est un


21
     MAEDA John, « De la simplicité », Payot & Rivages, 2009
                                                                                             23
style qui naît au XVIe siècle en Italie à Rome et se repend rapidement dans toute l’Europe. Il
touche tous les domaines artistiques – sculpture, peinture, littérature, architecture et musique –
et se caractérise par l’exagération du mouvement, la surcharge décorative, les effets
dramatiques, l’exubérance et la grandeur parfois pompeuse. Les œuvres baroques avec leurs
extravagances et l’excès d’ornements nous donnent une impression de grande générosité.
Pendant un certain temps, l’art baroque fut jugé décadent jusqu’à ce que la mode – par
définition versatile – rejoue en sa faveur. Ainsi, les œuvres d’un Gaudi à Barcelone, regardées
il y a cinquante ans comme des curiosités issues d’un cerveau malade, attirent aujourd’hui le
monde entier. Son œuvre principal, l’église de la « Sagrada familia » située à Barcelone et
toujours inachevée, joue énormément sur la surabondance d’ornements. Sur certaines parties
du bâtiment on peut remarquer des végétations exubérantes. L’art baroque définit par des
aspects étranges et torturés s’épanouie pourtant dans un art luxuriant. À l’époque, la simplicité
et tout ce qui était de l’ordre d’épurer n’était pas bien perçus car on y voyait dedans une sorte
d’abandon du passé. De nos jours, l’art de la surabondance est beaucoup mieux accepter. Le
collectif de graphiste « Peach Beach », composé de trois artistes et designers basé à Neuköllz
à Berlin – Falk Hoger, Attila Szamosi et Lars Wunderlich – joue dans leurs compositions de
la surcharge. Peach Beach réalise le design de divers événements, édite des tee-shirts, travaille
sur des pochettes d’album... mêlant un goût prononcé pour les comics, le streetart. Il réalise la
couverture de l’ « Ex Berliner » de janvier où ils se font remarquer pour leur graphisme
« joyeusement bordélique et naïf. » 22 D’ailleurs, « So Me » se rapproche fortement de ce
graphisme. Cette artiste de son vrai nom Bertrand Sommie est un graphiste qui joue lui aussi
sur la surabondance graphique. Il réalise d’ailleurs en 2008 le clip de Justice « DVNO » dans
lequel il utilisera uniquement les logos détournés de marques américaines connues pour
critiquer la société de consommation. Toutes ces compositions démontrent que la complexité
est souvent inhérente et voir vitale pour le succès de certaines choses. Et comme le dit
simplement John Maeda « La complexité peut être belle. »




           3     « Complexe » et « chaos »
Les choses complexes sont à dissocier des choses chaotiques. Tout comme nous l’avons fait
remarquer précédemment les choses simples ne sont pas forcement simplistes.




22
     LES LAPINS TECHNO, extrait d’un article en ligne sur http://www.leslapinstechno.com, 2010
                                                                                                 24
3.1     deux termes à ne pas confondre

« Complexité : Qui se compose d’éléments différents, combinés d’une manière qui n’est pas
immédiatement saisissable. »

« Chaos : Ensemble d’éléments désordonnés, confus. »

A la simplicité s’oppose la complexité mais qui n’a rien à voir avec le chaos. La complexité
exprime plus une notion de quantité alors que le chaos, lui, exprime le désordre et la
confusion. Dans le graphisme, la simplicité est souvent vue comme quelque chose de moins
polluant et de ce fait attire notre regard. A contrario, la complexité est quelque chose qui ne
nous attire pas de manière instinctive. Comme nous l’avons vu, l’esprit aime voir les choses
de manière générale – psychologie de la forme – et aller à l’essentiel. Pourtant, Blaise Pascal
disait : « je ne peux comprendre les parties que si je comprends le tout dans lequel sont les
parties et je ne peux comprendre le tout que si je comprends les parties. » Si l’on veut
comprendre une affiche dans sa globalité il faut forcement analyser et comprendre ce qui la
compose. La complexité n’est pas quelque chose que l’ont peut comprendre d’un premier
coup d’œil, alors que la simplicité a pour caractéristique d’être saisissable rapidement.
Comme le dit si justement Edgar Morin « La complexité, c’est le défi qui vous demande de
penser. » La complexité est quelque chose qui est à notre porté qui peut être décodé, alors que
le chaos qui est caractérisé par une absence d’ordre ne peut être compris.

       3.2     organiser la complexité préserve l’information

« Ordre : Ensemble d’éléments organisés, rangés, classés, disposés de manière logique. »

Andy Rudlege dans son écrit « Chaos Ordre complexe, simple » met en évidence que
contrairement aux apparences la simplicité n’est pas la solution à la complexité. Pour définir
quelque chose qui ne fonctionne pas il emploie le terme « chaos » et non « complexité » dont
nous avons expliqué les différences précédemment. À travers l’exemple du site Amazon.com
« qui est un des sites au monde les plus mal conçu et complexe. [… ] » il met en évidence que
la faille du site internet n’est pas la complexité mais le manque d’organisation. La complexité
est efficace, dans le cas et l’unique cas ou elle est ordonnée. « Mais là où la complexité
semble être un problème, il est probable que l’ordre et non la simplicité devrait être
imposée. » Alors la solution serait donc dans l’organisation ? En effet, mettre de l’ordre à la
complexité préserve l’information. Henri Atlan affirmait « Tout se passe comme si notre
raison ne pouvait pas supporter l’absence d’ordre. » La pensée complexe est un concept


                                                                                            25
philosophique introduit par Edgar Morin datant de 1982 qui exprime un peu cette idée de la
même manière. Le terme de complexité est pris au sens de son étymologie « complexus » qui
signifie « ce qui est tissé ensemble ». La complexité ne conduit pas à l’élimination de la
simplicité. La pensée complexe « refuse les conséquences mutilantes, réductrices,
unidimensionnalisantes et finalement aveuglantes d’une simplification […] » mais axe la
complexité dans un cadre d’organisation.




À travers ces deux parties, nous avons constaté que la simplicité est un très bon outil de
communication : pour faire simple, elle nous oblige à garder l’essentiel en éliminant les
éléments surplus. Cependant, mal utilisée elle peut tourner au simplisme, ou être mal
comprise. Puis, nous avons constaté que la simplicité ne peut exister sans son contraire, la
complexité. Et que la complexité ne fait pas forcement référence à une mauvaise
communication lorsque cette dernière est organisée. À la suite de ces constats, il m’a tout de
même semblée important de relever quelques points qu’à soulevé les réflexions sur la
simplicité. Si la simplicité fonctionne si bien c’est en partie parce qu’elle répond à de
nombreux besoin de la société, comme le respect de l’environnement et du public… C’est
pour cela que dans la suite de ce mémoire, nous évoquerons des sujets tels que la nécessité de
productions, le respect de son environnement et de son public ainsi que la bonne utilisation
des couleurs, des signes et des images.




                                                                                           26
III - L’éloge du sens

           1      Un bon graphiste est un graphiste respectueux
           1.1      produire par nécessité

Roy Arden écrit lors d’une exposition sous forme de carte postale « Bien sûr qu’il y a trop
d’images inutiles dans le monde. Mais l’idée que la surabondance d’images signifiant qu’il
est en vain d’en créer d’autres me paraît le raisonnement de quelqu’un qui cherche une
solution de facilité. Je crois qu’il relève de la responsabilité de l’artiste de produire ce qui est
nécessaire. » 23

« Nécessité : Caractère de ce qui est absolument obligatoire, indispensable, de ce dont on ne
peut se passer. »

On pourrait penser que de nos jours, la notion de « nécessité » est un peu oubliée dans la
réflexion des graphistes et des publicitaires. Pour un petit projet il arrive que la quantité
déployée pour en parler soit gigantesque. Pourquoi ? Ne serait-il pas plus juste au contraire
pour coller au sujet de respecter son envergure ? On a tendance à penser que des campagnes
« clignoterons » plus si elles sont plus voyantes. L’exemple le plus aberrant sont les spots
publicitaire qui passent six fois dans le même spot publicitaires d’affiler – ce qui est le
nombre légale autorisé ou la marque ou le produit doit être prononcé dans un spot – :
« Mercurochrome le pansement des héros. Mercurochrome le pansement des héros…» Je ne
classerai même pas ce genre de publicités dans de la communication tout simplement parce
que selon moi elles ne cherchent pas à communiquer en faisant du « forcing ». Ce matraquage
soit la répétition abrutissante d’un message est désagréable pour un grand nombre de
personne. La dernière campagne de Kinder Surprise a lui aussi mais plus subtilement joué sur
le matraquage. Sur un spot de 30 secondes le mot « surprise » est bombardé de manière plus
ou moins subtile. Au final, « surprise » est répété neuf fois et est visible neuf fois à l’écran. La
technique de « la répétition » aussi perfide soit-elle arrive malheureusement à ses fins
puisqu’elle permet un ancrage de la marque dans les esprits. Est-il nécessaire d’en arriver à un
matraquage publicitaire pour se faire entendre? Ne sommes-nous pas assez civilisés pour
parler comme il faut entre nous ? Dove a récemment conçu un petit film – de 79 secondes.
Interdit à la télévision et en salle il n’est visible que sur Internet ce qui ne l’empêche pourtant
pas de se propager comme un virus sur la toile. Ce spot publicitaire s’intitule « Matraquage ».
Conçu par l’agence Ogilvy & Mather à Toronto, il a été traduit en plusieurs langues et diffusé

23
     ARDEN Roy, extrait d’un écrit lors d’une exposition sous forme de carte postale
                                                                                                 27
viralement « au niveau mondial ». Une succession d’affiche se suivent rapidement les unes
après les autres de manière à exprimer la quantité d’affiches indénombrables qui se succèdent
dans notre journée. Il met en avant la prolifération d’images qu’on nous impose. Mais
malheureusement de nos jours, l’objectif premier est de se faire entendre, parler de soi ou de
son produit et cela peu importe la technique pour y arriver. Le besoin de se faire connaitre
dans notre société a en conséquence fait augmenter la quantité de production graphique.
D’ailleurs dans une interview dédiée à la communication à l’entré des villes Michel Serres
affirme « Je ne dis pas que les publicités ne sont pas belles, ou qu’elles sont laides, mais c’est
leur multiplicité à un endroit donné qui produit un effet de guerre ou de chaos tel que la
laideur est l’expérience qu’on en tire le plus facilement. » 24 Dans ce paragraphe concernant la
nécessité, la réduction dont on parlait dans la simplicité pourrait être un bon conseil à prendre
en compte pour éviter de polluer graphiquement notre environnement.

        1.2      investir sans gêne

La communication s’est invitée un peu partout dans notre quotidien et elle en est devenue
gênante. Imposer une image dans un paysage urbain n’est pas une chose aisée. L’affiche est
pour cela quelque chose de très difficile ; elle s’impose ! La première à en souffrir c’est la
ville. « Quartiers sensibles ? Pour une fois une appellation politiquement correcte à fait
naître un sens nouveau : « quartiers sensibles ». Des endroits sensibles ? Mais il en faudrait
partout ! » 25 Notre environnement est quelque chose de sensible et aujourd’hui heureusement
nous en avons pris plus conscience. « Quand Malte Martin créer une affiche pour un théâtre,
quand il réalise un programme publicitaire, l’objet qu’il affectionne n’est pas, dans son
essence, conçu comme un support simplement publicitaire, c'est-à-dire visant à accrocher le
passant, à lui faire désirer la représentation, il est pensé en lui même comme un instant de
théâtre descendu sur le quai du métro. » 26 Communiquer c’est en effet bien plus que plaquer
une image sur un support, il faut donner un sens, créer une atmosphère, dialoguer avec ce qui
l’entour et ceux qui l’a regarde. Les communications à l’entrée des villes font
particulièrement parler d’elles en ce moment. Le Conseil national du paysage a créé un atelier
de réflexion, intitulé « Publicité et entrées de ville ». Il s’agit d’y discuter les bases d’une
réforme de la législation en matière d’affichage publicitaire. La loi de 1979 concernant les
publicités et les enseignes, est souvent transgressée. Michel Blain, président de l’association
Paysages de France, explique : « Il y a eu un consensus autour de la table [de l'atelier] pour

24
   SERRE Michel, interview, « Les pubs polluent nos entrées de ville », 2008
25
   MALTE Martin, conférence du 06 février 2007 à la Sorbonne
26
   WAJCMAN Gérard, « Malte Martin », Pyramid, 2007
                                                                                               28
dire que la loi était mal appliquée. » Le Conseil de Paris a lui aussi décidé de réagir et a
décidé de réduire cette pollution visuelle en interdisant totalement tout affichage publicitaire
dans un rayon de cinquante mètres autour des écoles, sur les bords de Seine, aux abords des
monuments historiques. Le projet est une expérimentation en cours, mais à long terme il vise
à réduire d'un tiers le nombre de panneaux publicitaires d'ici deux ans. Lors de l’interview
concernant la pollution des publicités à l’entrée des villes, Michel Serres affirme : « J’ai
l’impression que ceux qui ont fait les entrées de ville, ceux qui ont sculpté le paysage tel que
nous le voyons aujourd’hui n’ont plus le sens de la beauté et ça, ça me parait très
important. » Les publicités sont arrivées à un point où nous en somme réduit à les refuser, à
lutter contre. En effet, maintenant il est possible d’apposer sur sa boîte aux lettres un
autocollant mentionnant le refus de publicité : « le stop-pub ». Dire non à la publicité nous a
la fois permis de nous débarrasser de la paperasse inutile dans nos boîtes aux lettres mais
aussi a participé à une amélioration économique et environnementale. Sommes-nous rentrés
en guerre contre la publicité ? Pour certaines personnes il n’y pas de doute, oui ! Le groupe
« Ras la pub » vient de neutraliser, par des inscriptions à la peinture, – «RAS LA PUB»,
«NON MERCI» – les 4 écrans publicitaires LCD installé le 1er décembre par la régie
publicitaire Métrobus dans la station de métro Charles de Gaulle Etoile, à Paris. Ces panneaux
sont destinés à remplacer – à terme – les vieilles affiches désormais trop statiques pour nos
contemporains. Dans son communiqué, Ras la pub précise qu' « il est grand temps que les
dirigeants de la RATP comprennent que le métro a pour finalité de transporter des usagers
d'un point à un autre, et non de les transformer en chair à canon pour publicitaire. » 27

          1.3     ne pas sous-estimer son public

Les graphistes et les publicitaires donnent de plus en plus souvent l’impression qu’ils
surestiment leur public en se servant d’astuces, de techniques qui nous laissent maintenant de
glace. Nous ne sommes pas ou du moins plus dupes !             Les mannequins retouchés sur
Photoshop, les sandwiches trop parfaits de chez McDonald’s ou encore des régimes minceurs
qui nous présentent une anorexique c’est fini, on n’y croit plus ! D’ailleurs, je m’étonne
même des fois à lire les textes en petit caractère sur des produits ou même des affiches pour
me satisfaire d’avoir déjoué une possible tentative d’un graphiste ou d’un publicitaire de faire
passer une information importante sous mon nez. Pour redonner du sens aux images il faudrait
déjà comprendre ce qui a du sens pour le public. Mais encore une fois les publicitaires ne
savent pas s’y prendre de la bonne façon pour comprendre nos attentes. Par exemple,


27
     RAS LA PUB, extrait d’un communiqué, 2008
                                                                                             29
concernant l’installation du nouveau principe d’affiches via les ecrans LCD, il est prévu
l’installation d’un dispositif qui mesurerait l'efficacité du message publicitaire avec des
capteurs enregistrant les réactions des visages des passants afin de détecter quel élément de
l'image a retenu leur attention. Ces nouvelles installations font débats et c’est logique vu le
climat actuelle de la publicité au sein de notre société. En nous analysant comme des souris de
laboratoire la publicité tente encore d’aller plus loin dans ces objectifs de vente : « Quelle
image attirera le plus le consommateur ? La peur ? Utilisons la peur alors ! » Les
publicitaires sont-ils conscient d’aller à l’encontre des attentes de son public ? En ce
formatant dans la seule optique de vendre en plus grande quantité ils en viennent à nous
épuiser. Les stop-pub et les luttes anti publicité qui se multiplient ne font que conforter l’idée
que bientôt la publicité sera en guerre bien malgré elle contre nous.




       2     Un graphiste sait se servir de ces outils
De la même manière qu’un chirurgien doit bien savoir se servir de son scalpel et de son
bistouri un graphiste doit savoir manipuler les images, les signes, les typographies et les
couleurs.

       2.1     les images & les signes parlent

L’image et les signes parlent. Les graphistes aujourd’hui ont oublié qu’une image véhicule
beaucoup de choses et que forcement elle a un impact sur son public. Le jeu du rebus est une
façon d’expliquer un peu le principe d’une communication qui fonctionne. Le rebus
souvenez-vous, c’est cette suite de dessins qui, une fois interprétés, donnent les syllabes
permettant de découvrir une phrase ou un mot. Une communication marche exactement
comme cela, c’est une suite de signes graphiques qui une fois interprétés vous permette
d’accéder à l’information. Une communication à un impact visuel, elle nous donne une
impression et cela va même plus loin elle nous donne une idée sur la vie en générale. Le spot
publicitaire de Dove « Matraquage », dénonce d’ailleurs le pouvoir visuel des images au sein
de notre société. Au début du spot, une jeune fille regarde la caméra et sourit dans une
atmosphère naturelle à la limite de la naïveté – qui caractérise bien évidemment l’enfance. A
cela, s’enchaine une vague déferlante d’images qui vantent particulièrement la beauté
féminine, les courbes parfaites, le rajeunissement par des crèmes, les régimes... « Parlez à
votre fille avant que quelqu’un d’autre ne le fasse. » Le message est clair les images nous


                                                                                               30
influencent, et il faut s’en méfier puisqu’elles ne sont pas toutes jolies à voir et
particulièrement pour prendre exemple dessus!

       2.2       les couleurs aussi

Si tous les graphistes avaient pour bible « Le petit livre des couleurs » de Michel Pastoureau
et Dominique Simmonet les couleurs retrouveraient sûrement l’usage qui leur est destiné. En
effet, les couleurs sont souvent mal utilisées, elles sont placées de manière gratuite, à tout va
et vient et ont de ce fait perdues de leur authenticité. C’est ainsi, que l’utilisation du noir et
blanc est devenu un échappatoire à la surenchère de couleur. Comme nous l’avons vu
précédemment, Malte Martin en divorçant des couleurs, et en utilisant le noir et blanc a
renforcé sa communication pour le théâtre Athénée. François Delclaux, directeur de l'agence
de style « Un nouvel air » affirme « Mis à part la parenthèse glamour des années 1990, le
noir et blanc est un classique dont l'impact visuel est fort. C'est une base neutre de
réassurance. »

On remarque, que toutes nos démarches lorsqu’il s’agit de « rattraper la donne » sont souvent
faite dans l’extrême. Je m’explique. On n’arrive plus à communiquer, alors on simplifie tout.
On ne sait plus se servir des couleurs alors on en vient à passer au noir et blanc. Peut-être
qu’avant de trouver une solution diamétralement opposé à ce qui ne va pas il faudrait d’abord
comprendre la cause de ce qui ne fonctionne pas. Le pourquoi




                                                                                               31
Conclusion


Ce mémoire avait pour but de s’interroger sur la simplicité comme moyen de communication.
En me penchant sur « la simplicité », je me suis rendu compte tout d’abord a quel point ce
sujet était très passionnant à étudier mais aussi qu’il regorgeait d’une richesse que j’avais
largement sous-estimée. La simplicité est une notion qui s’est avérée tellement vaste qu’elle
me semble aujourd’hui difficilement résumable. Mais on pourrait retenir principalement que
la simplicité a cette force de réduire à l’essentiel les choses complexes de manière à mettre en
valeur ou/et engager le spectateur tout en nous simplifiant la réflexion elle nous fait gagner du
temps qui est de nos jours si précieux à nos yeux. Ensuite, nous avons vu que la simplicité
s’avérait paradoxalement un art difficile à maîtriser : synonyme de pauvreté, prise de pouvoir
à notre place, trop réduire, risquer de basculer dans le simplisme, changer le sens...

Je ne pensais pas que c’est en analysant le contraire de la simplicité « la complexité » que
j’allais faire perdre de la crédibilité à cette dernière. Bien au contraire, je pensais l’affirmer !
Il c’est révélé que la simplicité ne saurait exister sans son contraire. De plus, nous avons fait
remarquer que la complexité à autant sa place que la simplicité dans notre société, c’est un
outil certes diamétralement opposé à la simplicité mais qui regorge lui aussi de qualités. C’est
ainsi que c’est effondré l’utopie que la simplicité pouvait avoir le monopole de la
communication et ainsi être la solution à tous les problèmes. De ce constat fût abordée la
différence entre « complexité » et « chaos ». Les choses complexes sont certes chargés et pas
du premier coup d’œil compréhensible mais la complexité organisée fonctionne très bien. Le
chaos est défini par une surcharge d’éléments incontrôlés, qui ne sont pas organisé et qui ne
peuvent être compris même après réflexion. Il ne faut pas confondre complexité et chaotique.

La simplicité a fait naitre cependant des pistes riches qui selon moi étaient intéressantes à
explorées. Ce n’est pas pour rien si de nos jours, les communications « simples » ont une
ligne d’avance sur les autres. En effet, en m’intéressant à la simplicité il m’a paru évident que
certaines qualités de cette dernière pouvaient néanmoins répondre à certains soucis de
communication présent dans notre société. Simplifier c’est respecter les images en gardant ce
qui est nécessaire à la compréhension d’un produit ou d’un message. C’est aussi investir un
lieu avec ces images sans gêner l’environnement et le public visé. La simplicité s’adresse sans
fioriture, ni gadget pour séduire, vendre ou informer. Nous avons confiance en elle car elle a
cette façon innocente de se mettre à nu. De nos jours, il me semble que nous sommes
complètement réfractaire aux images tant elles nous ont usé de leurs stratagèmes, de leurs
                                                                                                 32
beautés artificielles et parfois mensongères. Les graphistes et – plus particulièrement – les
publicitaires devraient essayer de considérer plus leur public, se préoccuper un peu plus de
leur attente.

A force de communiquer « n’importe comment », nous en sommes venus à transformer le
paysage urbain, notamment en utilisant mal les couleurs, ou encore les signes et les images.
La mise en place d’un code de déontologie pour les graphistes et – surtout – les publicitaires
ne serai pas du luxe ! Serait-il possible de mettre en place ce genre de chose de manière à faire
promettre aux graphistes de ne pas « abimer » notre environnement et de ne pas matraquer le
public ? Est-on obligé d’en arriver là ?




                                                                                              33
Bibliographie


-   Hors  champs  [En  ligne],  EMOND  Bernard,  Lettre  aux  jeunes  gens  qui  me 
    demandent  comment  devenir  réalisateur,  2006,  [consulté  le  1er  juin  2010], 
    disponible sur : http://www.horschamp.qc.ca
-   BAUDRILLART Jean, La société de consommation, Gallimard, 1996, 318 p.
-   POYNOR Rick, La société de l’image, Pyramyd, 2002, 224 p.
-   BOUGNOUX Daniel, Il ne faut pas avoir peur des images, Sciences Humaines,
    Déc2003/Jan Fév2004, Hors-Série N°43.
-   DEBORD Guy,  La société du spectacle, Gallimard, 1996, 208 p.
-   PLUTARQUE, La vie de Brutus, premier consul de Rome, 1730, 38 p.
-   MAEDA John, De la simplicité, Payot & Rivages, 2009, 190 p.
-   MALTE Martin, conférence du 06 février 2007 à la Sorbonne.
-   MCCLOUD Martin, L’art de l’invisible, Delcourt, 2007, 232 p.
-   Contes et histoires zen, [En ligne], YEIAZEL, Le peintre et l’empereur, 2009,
    [consulté le 28 mai 2010], disponible sur : http://contes-et-histoires-zen. spot.com
-   LOOS Adolph, Ornement & Crime, Rivages, 2003, 277 p.
-   DE CLAIRVAUX Bernard, L’essence du christianisme, Gallimard, 1992, 527 p.
-   Andy Rutlege web site [En ligne], RUTLEGE Andy, Complexe Order Simple Chaos,
    2009, [consulté le 1er juin 2010], disponible sur : http://www.andyrutledge.com
-   ORWELL George, 1984, Folio, 1972, 438 p.
-   Don Norman web site [En ligne], NORMAN Don, Simplicity is highly overrated,
    2007, [consulté le 1 juin 2010], disponible sur : http://www.jnd.org
-   ARDEN Roy, extrait d’un écrit lors d’une exposition sous forme de carte postale
-   WAJCMAN Gérard, Malte Martin, Pyramid, 2007, 120 p.
-   SERRE Michel, interview, Les pubs polluent nos entrées de ville, 2008
-   RAS LA PUB, extrait d’un communiqué, 2008




                                                                                           34
Annexes




          Affiches pour le théâtre Athénée saison 2009-2010, Malte Martin




                                                                       35
« Logographie France », Florent Guerlain, 2009




                                            36
37
« Poster Series of TV Shows »,
        Albert Exergiant, 2009




                       38
« Affiche jeux olympique Tokyo », Yasuku Kamekura , 1964




                                                      39
Le logotype « MUJI » et des produits types de la marque




                                                    40
De haut en bas : L’Ipad d’Apple et l’Ipod Suffle d’Apple




                                                     41
Affiches du journal Telegraph, 2007




                                 42
Peach Beach, 2007




Peach Beach, couverture de l’Ex Berliner de janvier 2009


                                                      43
44

Más contenido relacionado

La actualidad más candente

Rapport de Stage Licence 3
Rapport de Stage Licence 3Rapport de Stage Licence 3
Rapport de Stage Licence 3Dylan Manceau
 
Guide evenementiel
Guide evenementiel Guide evenementiel
Guide evenementiel Asso Asah
 
Rapport de mini stage en publicité
Rapport de mini stage en publicitéRapport de mini stage en publicité
Rapport de mini stage en publicitéYaya Im
 
L'impact des médias sociaux sur l'entreprise
L'impact des médias sociaux sur l'entrepriseL'impact des médias sociaux sur l'entreprise
L'impact des médias sociaux sur l'entrepriseIdnition
 
Thèse professionnelle communication interne, bonheur au travail et marque emp...
Thèse professionnelle communication interne, bonheur au travail et marque emp...Thèse professionnelle communication interne, bonheur au travail et marque emp...
Thèse professionnelle communication interne, bonheur au travail et marque emp...Narimane Bensalem
 
RAPPORT_STAGE_CROSSE_M1_G2S_2013_2014
RAPPORT_STAGE_CROSSE_M1_G2S_2013_2014RAPPORT_STAGE_CROSSE_M1_G2S_2013_2014
RAPPORT_STAGE_CROSSE_M1_G2S_2013_2014Arthur Crosse
 
Marketing postmoderne
Marketing postmoderneMarketing postmoderne
Marketing postmoderneMarketing PME
 
Etude De Cas: Repositionnement de Dior Horlogerie Mba2
Etude De Cas: Repositionnement de Dior Horlogerie Mba2Etude De Cas: Repositionnement de Dior Horlogerie Mba2
Etude De Cas: Repositionnement de Dior Horlogerie Mba2student
 
Comprendre le consommateur - UE 3
Comprendre le consommateur - UE 3Comprendre le consommateur - UE 3
Comprendre le consommateur - UE 3Marion IIM
 
Dossier recommandation événementiel
Dossier recommandation événementielDossier recommandation événementiel
Dossier recommandation événementielPauline Matias
 
Le Marketing Digital et les Nouveaux Séniors | Achraf jamal | PFE
Le Marketing Digital et les Nouveaux Séniors | Achraf jamal | PFE Le Marketing Digital et les Nouveaux Séniors | Achraf jamal | PFE
Le Marketing Digital et les Nouveaux Séniors | Achraf jamal | PFE Achraf JAMAL
 
La communication digitale et l’événementiel [Mémoire de fin d'étude - Master 2]
La communication digitale et l’événementiel [Mémoire de fin d'étude - Master 2]La communication digitale et l’événementiel [Mémoire de fin d'étude - Master 2]
La communication digitale et l’événementiel [Mémoire de fin d'étude - Master 2]Maxime Orven
 
Stratégie de communication - Panning familial
Stratégie de communication - Panning familialStratégie de communication - Panning familial
Stratégie de communication - Panning familialMaster CELSA Mines
 
Memoire de bts marketing de l'offre touristique
Memoire de bts  marketing de l'offre touristiqueMemoire de bts  marketing de l'offre touristique
Memoire de bts marketing de l'offre touristiqueFethi Ferhane
 
Intelligence Économique et Veille Stratégique: Rôle dans le processus d’inno...
Intelligence Économique et  Veille Stratégique: Rôle dans le processus d’inno...Intelligence Économique et  Veille Stratégique: Rôle dans le processus d’inno...
Intelligence Économique et Veille Stratégique: Rôle dans le processus d’inno...Khadija MENGUIT
 
E-réputation et entreprise - Mémoire M2 IDEMM - Marlène Page - Version diffus...
E-réputation et entreprise - Mémoire M2 IDEMM - Marlène Page - Version diffus...E-réputation et entreprise - Mémoire M2 IDEMM - Marlène Page - Version diffus...
E-réputation et entreprise - Mémoire M2 IDEMM - Marlène Page - Version diffus...Marlene Page
 
La mécanique de l'idée / concept créatif / ian gilbert
La mécanique de l'idée / concept créatif / ian gilbertLa mécanique de l'idée / concept créatif / ian gilbert
La mécanique de l'idée / concept créatif / ian gilbertIANTERNAUTE
 

La actualidad más candente (20)

Rapport de Stage Licence 3
Rapport de Stage Licence 3Rapport de Stage Licence 3
Rapport de Stage Licence 3
 
Guide evenementiel
Guide evenementiel Guide evenementiel
Guide evenementiel
 
Rapport de mini stage en publicité
Rapport de mini stage en publicitéRapport de mini stage en publicité
Rapport de mini stage en publicité
 
L'impact des médias sociaux sur l'entreprise
L'impact des médias sociaux sur l'entrepriseL'impact des médias sociaux sur l'entreprise
L'impact des médias sociaux sur l'entreprise
 
Thèse professionnelle communication interne, bonheur au travail et marque emp...
Thèse professionnelle communication interne, bonheur au travail et marque emp...Thèse professionnelle communication interne, bonheur au travail et marque emp...
Thèse professionnelle communication interne, bonheur au travail et marque emp...
 
RAPPORT_STAGE_CROSSE_M1_G2S_2013_2014
RAPPORT_STAGE_CROSSE_M1_G2S_2013_2014RAPPORT_STAGE_CROSSE_M1_G2S_2013_2014
RAPPORT_STAGE_CROSSE_M1_G2S_2013_2014
 
Marketing postmoderne
Marketing postmoderneMarketing postmoderne
Marketing postmoderne
 
Etude De Cas: Repositionnement de Dior Horlogerie Mba2
Etude De Cas: Repositionnement de Dior Horlogerie Mba2Etude De Cas: Repositionnement de Dior Horlogerie Mba2
Etude De Cas: Repositionnement de Dior Horlogerie Mba2
 
Comprendre le consommateur - UE 3
Comprendre le consommateur - UE 3Comprendre le consommateur - UE 3
Comprendre le consommateur - UE 3
 
Mémoire Master Marketing Digital - Sharitiz
Mémoire Master Marketing Digital - SharitizMémoire Master Marketing Digital - Sharitiz
Mémoire Master Marketing Digital - Sharitiz
 
Effectuation
EffectuationEffectuation
Effectuation
 
Dossier recommandation événementiel
Dossier recommandation événementielDossier recommandation événementiel
Dossier recommandation événementiel
 
Le Marketing Digital et les Nouveaux Séniors | Achraf jamal | PFE
Le Marketing Digital et les Nouveaux Séniors | Achraf jamal | PFE Le Marketing Digital et les Nouveaux Séniors | Achraf jamal | PFE
Le Marketing Digital et les Nouveaux Séniors | Achraf jamal | PFE
 
La communication digitale et l’événementiel [Mémoire de fin d'étude - Master 2]
La communication digitale et l’événementiel [Mémoire de fin d'étude - Master 2]La communication digitale et l’événementiel [Mémoire de fin d'étude - Master 2]
La communication digitale et l’événementiel [Mémoire de fin d'étude - Master 2]
 
Stratégie de communication - Panning familial
Stratégie de communication - Panning familialStratégie de communication - Panning familial
Stratégie de communication - Panning familial
 
Memoire de bts marketing de l'offre touristique
Memoire de bts  marketing de l'offre touristiqueMemoire de bts  marketing de l'offre touristique
Memoire de bts marketing de l'offre touristique
 
Intelligence Économique et Veille Stratégique: Rôle dans le processus d’inno...
Intelligence Économique et  Veille Stratégique: Rôle dans le processus d’inno...Intelligence Économique et  Veille Stratégique: Rôle dans le processus d’inno...
Intelligence Économique et Veille Stratégique: Rôle dans le processus d’inno...
 
E-réputation et entreprise - Mémoire M2 IDEMM - Marlène Page - Version diffus...
E-réputation et entreprise - Mémoire M2 IDEMM - Marlène Page - Version diffus...E-réputation et entreprise - Mémoire M2 IDEMM - Marlène Page - Version diffus...
E-réputation et entreprise - Mémoire M2 IDEMM - Marlène Page - Version diffus...
 
Ppt introdutif start up week
Ppt introdutif start up weekPpt introdutif start up week
Ppt introdutif start up week
 
La mécanique de l'idée / concept créatif / ian gilbert
La mécanique de l'idée / concept créatif / ian gilbertLa mécanique de l'idée / concept créatif / ian gilbert
La mécanique de l'idée / concept créatif / ian gilbert
 

Destacado

Analyse d'une tendance - Le minimalisme
Analyse d'une tendance - Le minimalismeAnalyse d'une tendance - Le minimalisme
Analyse d'une tendance - Le minimalismeElodie Marteau
 
Minimalism powerpoint
Minimalism powerpointMinimalism powerpoint
Minimalism powerpointEric Devey
 
Minimalism powerpoint full
Minimalism powerpoint fullMinimalism powerpoint full
Minimalism powerpoint full10polarbears
 

Destacado (6)

Analyse d'une tendance - Le minimalisme
Analyse d'une tendance - Le minimalismeAnalyse d'une tendance - Le minimalisme
Analyse d'une tendance - Le minimalisme
 
Minimalist design
Minimalist designMinimalist design
Minimalist design
 
Minimalism powerpoint
Minimalism powerpointMinimalism powerpoint
Minimalism powerpoint
 
Minimalism powerpoint full
Minimalism powerpoint fullMinimalism powerpoint full
Minimalism powerpoint full
 
Minimalism ppt
Minimalism pptMinimalism ppt
Minimalism ppt
 
Minimalism
MinimalismMinimalism
Minimalism
 

Similar a Mémoire "La simplicité peut-elle nous aider a "mieux" communiquer?"

Le vécu et la perception du deuil
Le vécu et la perception du deuilLe vécu et la perception du deuil
Le vécu et la perception du deuilcsnaf
 
La reprise et l'interprétation dans le domaine musical
La reprise et l'interprétation dans le domaine musicalLa reprise et l'interprétation dans le domaine musical
La reprise et l'interprétation dans le domaine musicalCarole Péraste
 
Dora l'exploratrice à la conquête du monde
Dora l'exploratrice à la conquête du mondeDora l'exploratrice à la conquête du monde
Dora l'exploratrice à la conquête du mondeCamille Passot
 
Entre droit à l'oubli et nouveaux usages digitaux : la naissance du web éphémère
Entre droit à l'oubli et nouveaux usages digitaux : la naissance du web éphémèreEntre droit à l'oubli et nouveaux usages digitaux : la naissance du web éphémère
Entre droit à l'oubli et nouveaux usages digitaux : la naissance du web éphémèreEstelle Aubouin
 
Rapport du Sénat sur la crise de la presse
Rapport du Sénat sur la crise de la presseRapport du Sénat sur la crise de la presse
Rapport du Sénat sur la crise de la pressePresse Papier
 
La strategie culturelle des marques d'alcool, 20 ans apres la loi Evin - Memo...
La strategie culturelle des marques d'alcool, 20 ans apres la loi Evin - Memo...La strategie culturelle des marques d'alcool, 20 ans apres la loi Evin - Memo...
La strategie culturelle des marques d'alcool, 20 ans apres la loi Evin - Memo...Constance Gros
 
Competencias sociales y diagnosticos. francés.
Competencias sociales y diagnosticos. francés.Competencias sociales y diagnosticos. francés.
Competencias sociales y diagnosticos. francés.Marta Montoro
 
ÉTUDE SUR LA DÉMOCRATISATION CULTURELLE
ÉTUDE SUR LA DÉMOCRATISATION CULTURELLEÉTUDE SUR LA DÉMOCRATISATION CULTURELLE
ÉTUDE SUR LA DÉMOCRATISATION CULTURELLELa French Team
 
Im rapport oublies-de-legalite-des-chances
Im rapport oublies-de-legalite-des-chancesIm rapport oublies-de-legalite-des-chances
Im rapport oublies-de-legalite-des-chancesLyonBondyBlog
 
50 pages - Radiohead In Rainbows : La gratuite ou l'art de bien vendre. (Un c...
50 pages - Radiohead In Rainbows : La gratuite ou l'art de bien vendre. (Un c...50 pages - Radiohead In Rainbows : La gratuite ou l'art de bien vendre. (Un c...
50 pages - Radiohead In Rainbows : La gratuite ou l'art de bien vendre. (Un c...Martin Basdevant
 
Mémoire - "Ceux que l'on dit Roms"
Mémoire - "Ceux que l'on dit Roms" Mémoire - "Ceux que l'on dit Roms"
Mémoire - "Ceux que l'on dit Roms" Virginie Schmidt
 
LE PLACEMENT DE PRODUITS ET DE MARQUES DANS LES JEUX EN-LIGNE MASSIVEMENT MUL...
LE PLACEMENT DE PRODUITS ET DE MARQUES DANS LES JEUX EN-LIGNE MASSIVEMENT MUL...LE PLACEMENT DE PRODUITS ET DE MARQUES DANS LES JEUX EN-LIGNE MASSIVEMENT MUL...
LE PLACEMENT DE PRODUITS ET DE MARQUES DANS LES JEUX EN-LIGNE MASSIVEMENT MUL...Cahuzac Alexandre
 
Livre Blanc - partie 1 - "L'accès à l'information et aux Réseaux Sociaux rend...
Livre Blanc - partie 1 - "L'accès à l'information et aux Réseaux Sociaux rend...Livre Blanc - partie 1 - "L'accès à l'information et aux Réseaux Sociaux rend...
Livre Blanc - partie 1 - "L'accès à l'information et aux Réseaux Sociaux rend...Alban Jarry
 
Rapport de-la-commission-de-reflexion-sur-la-fin-de-vie-en-france
Rapport de-la-commission-de-reflexion-sur-la-fin-de-vie-en-franceRapport de-la-commission-de-reflexion-sur-la-fin-de-vie-en-france
Rapport de-la-commission-de-reflexion-sur-la-fin-de-vie-en-franceBâle Région Mag
 
Mémoire final 130611
Mémoire final 130611Mémoire final 130611
Mémoire final 130611laksmy
 
CV Méthode Brutale François Meuleman
CV Méthode Brutale François MeulemanCV Méthode Brutale François Meuleman
CV Méthode Brutale François MeulemanREALIZ
 
[Mémoire] En quoi l’émergence des médias sociaux bouleverse-t-elle les straté...
[Mémoire] En quoi l’émergence des médias sociaux bouleverse-t-elle les straté...[Mémoire] En quoi l’émergence des médias sociaux bouleverse-t-elle les straté...
[Mémoire] En quoi l’émergence des médias sociaux bouleverse-t-elle les straté...Aurore Hondarrague
 
Dossier Obsolescence Programmée
Dossier Obsolescence ProgramméeDossier Obsolescence Programmée
Dossier Obsolescence ProgramméeVincenttnecniv10
 
Les super-héros dans la publicité
Les super-héros dans la publicitéLes super-héros dans la publicité
Les super-héros dans la publicitéMickaël Mougenot
 

Similar a Mémoire "La simplicité peut-elle nous aider a "mieux" communiquer?" (20)

Le vécu et la perception du deuil
Le vécu et la perception du deuilLe vécu et la perception du deuil
Le vécu et la perception du deuil
 
La reprise et l'interprétation dans le domaine musical
La reprise et l'interprétation dans le domaine musicalLa reprise et l'interprétation dans le domaine musical
La reprise et l'interprétation dans le domaine musical
 
Dora l'exploratrice à la conquête du monde
Dora l'exploratrice à la conquête du mondeDora l'exploratrice à la conquête du monde
Dora l'exploratrice à la conquête du monde
 
Entre droit à l'oubli et nouveaux usages digitaux : la naissance du web éphémère
Entre droit à l'oubli et nouveaux usages digitaux : la naissance du web éphémèreEntre droit à l'oubli et nouveaux usages digitaux : la naissance du web éphémère
Entre droit à l'oubli et nouveaux usages digitaux : la naissance du web éphémère
 
Rapport du Sénat sur la crise de la presse
Rapport du Sénat sur la crise de la presseRapport du Sénat sur la crise de la presse
Rapport du Sénat sur la crise de la presse
 
La strategie culturelle des marques d'alcool, 20 ans apres la loi Evin - Memo...
La strategie culturelle des marques d'alcool, 20 ans apres la loi Evin - Memo...La strategie culturelle des marques d'alcool, 20 ans apres la loi Evin - Memo...
La strategie culturelle des marques d'alcool, 20 ans apres la loi Evin - Memo...
 
Competencias sociales y diagnosticos. francés.
Competencias sociales y diagnosticos. francés.Competencias sociales y diagnosticos. francés.
Competencias sociales y diagnosticos. francés.
 
Rapport Papon Martin Senat 2009
Rapport Papon Martin Senat 2009Rapport Papon Martin Senat 2009
Rapport Papon Martin Senat 2009
 
ÉTUDE SUR LA DÉMOCRATISATION CULTURELLE
ÉTUDE SUR LA DÉMOCRATISATION CULTURELLEÉTUDE SUR LA DÉMOCRATISATION CULTURELLE
ÉTUDE SUR LA DÉMOCRATISATION CULTURELLE
 
Im rapport oublies-de-legalite-des-chances
Im rapport oublies-de-legalite-des-chancesIm rapport oublies-de-legalite-des-chances
Im rapport oublies-de-legalite-des-chances
 
50 pages - Radiohead In Rainbows : La gratuite ou l'art de bien vendre. (Un c...
50 pages - Radiohead In Rainbows : La gratuite ou l'art de bien vendre. (Un c...50 pages - Radiohead In Rainbows : La gratuite ou l'art de bien vendre. (Un c...
50 pages - Radiohead In Rainbows : La gratuite ou l'art de bien vendre. (Un c...
 
Mémoire - "Ceux que l'on dit Roms"
Mémoire - "Ceux que l'on dit Roms" Mémoire - "Ceux que l'on dit Roms"
Mémoire - "Ceux que l'on dit Roms"
 
LE PLACEMENT DE PRODUITS ET DE MARQUES DANS LES JEUX EN-LIGNE MASSIVEMENT MUL...
LE PLACEMENT DE PRODUITS ET DE MARQUES DANS LES JEUX EN-LIGNE MASSIVEMENT MUL...LE PLACEMENT DE PRODUITS ET DE MARQUES DANS LES JEUX EN-LIGNE MASSIVEMENT MUL...
LE PLACEMENT DE PRODUITS ET DE MARQUES DANS LES JEUX EN-LIGNE MASSIVEMENT MUL...
 
Livre Blanc - partie 1 - "L'accès à l'information et aux Réseaux Sociaux rend...
Livre Blanc - partie 1 - "L'accès à l'information et aux Réseaux Sociaux rend...Livre Blanc - partie 1 - "L'accès à l'information et aux Réseaux Sociaux rend...
Livre Blanc - partie 1 - "L'accès à l'information et aux Réseaux Sociaux rend...
 
Rapport de-la-commission-de-reflexion-sur-la-fin-de-vie-en-france
Rapport de-la-commission-de-reflexion-sur-la-fin-de-vie-en-franceRapport de-la-commission-de-reflexion-sur-la-fin-de-vie-en-france
Rapport de-la-commission-de-reflexion-sur-la-fin-de-vie-en-france
 
Mémoire final 130611
Mémoire final 130611Mémoire final 130611
Mémoire final 130611
 
CV Méthode Brutale François Meuleman
CV Méthode Brutale François MeulemanCV Méthode Brutale François Meuleman
CV Méthode Brutale François Meuleman
 
[Mémoire] En quoi l’émergence des médias sociaux bouleverse-t-elle les straté...
[Mémoire] En quoi l’émergence des médias sociaux bouleverse-t-elle les straté...[Mémoire] En quoi l’émergence des médias sociaux bouleverse-t-elle les straté...
[Mémoire] En quoi l’émergence des médias sociaux bouleverse-t-elle les straté...
 
Dossier Obsolescence Programmée
Dossier Obsolescence ProgramméeDossier Obsolescence Programmée
Dossier Obsolescence Programmée
 
Les super-héros dans la publicité
Les super-héros dans la publicitéLes super-héros dans la publicité
Les super-héros dans la publicité
 

Mémoire "La simplicité peut-elle nous aider a "mieux" communiquer?"

  • 1. CNA CEFAG SESSION DE JUILLET 2010 Bagnolet La simplicité peut-elle nous aider à « mieux » communiquer ? * Mémoire en Bachelor Européen Graphic Design Présenté par Elodie JAEGER
  • 2. Je tiens à remercier Gilles Juan pour ses conseils avisés, le temps qu’il m’a accordé, ainsi que ses références toutes plus intéressantes les unes que les autres. Une pensée particulière est adressée aux personnes qui ont pris le temps de lire et re-lire ce mémoire et qui ont ainsi contribué aux multiples corrections apportées à ce dernier, Arnaud Rubio, Charles Jaeger et Lucile Bonnaud. 2
  • 3. Table des matières Introduction ................................................................................................................................ 5 I -  La simplicité .................................................................................................................... 9  1  Un besoin......................................................................................................................... 9  1.1  quelque chose de naturel .......................................................................................... 9  1.2  un reflexe face au surplus ...................................................................................... 11  2  Réduire, synthétiser pour « plus » ................................................................................. 12  2.1  une mise en valeur de l’essentiel ........................................................................... 12  2.2  un gain de temps .................................................................................................... 13  2.3  engager le spectateur .............................................................................................. 14  3  Un esthétisme séduisant ................................................................................................ 16  3.1  un art bien maitrisé par les Japonais ...................................................................... 16  3.2  une grande histoire d’architecture .......................................................................... 17  3.3  le design suisse ....................................................................................................... 17 II -  Pas si simple ! ................................................................................................................ 19  1  Les risques de simplifier ............................................................................................... 19  1.1  perdre des éléments essentiels ............................................................................... 19  1.2  tomber dans le simplisme....................................................................................... 20  1.3  la simplicité reflet de « pauvreté » ......................................................................... 21  1.4  perdre le contrôle ................................................................................................... 22  2  Et la complexité dans tout ça......................................................................................... 23  2.1  simplicité et complexité: les opposés s’attirent ..................................................... 23  2.2  la complexité comme moyen d’expression ............................................................ 23  3  « Complexe » et « chaos » ............................................................................................ 24  3.1  deux termes à ne pas confondre ............................................................................. 25  3.2  organiser la complexité préserve l’information ..................................................... 25 3
  • 4. III -  L’éloge du sens.............................................................................................................. 27  1  Un bon graphiste est un graphiste respectueux ............................................................. 27  1.1  produire par nécessité ............................................................................................ 27  1.2  investir sans gêne ................................................................................................... 28  1.3  ne pas sous-estimer son public ............................................................................... 29  2  Un graphiste sait se servir de ces outils......................................................................... 30  2.1  les images & les signes parlent .............................................................................. 30  2.2  les couleurs aussi.................................................................................................... 31 Conclusion ................................................................................................................................ 32 Bibliographie ............................................................................................................................ 34 Annexes .................................................................................................................................... 35  4
  • 5. Introduction L'image a acquis un statut privilégié dans notre société. Les moyens de sa diffusion et de sa consommation n'ont d’ailleurs jamais été aussi nombreux. C’est un fait, nous sommes dans une « société de l’image » – terme d’ailleurs énormément utilisé à l’heure actuelle. Une prolifération visuelle incontrôlable a complètement envahi notre quotidien, nos espaces publics comme privés. « Il y trop d’images. » comme le dit si justement le cinéaste Bernard Emond « Chaque jour, nous sommes submergés par une quantité monstrueuse d’images grossières, menteuses, nuisibles publicités imbéciles – ou pire : intelligentes –, émissions de télévisions stupides et racoleuses, « documentaires » voyeurs, photographies et journaux d’une invraisemblable vulgarité. L’espace public et privé est envahi par des images qui vendent et se vendent, l’un étant indissociable de l’autre. » 1 Trop de variété. Trop de reproduction. Trop de signe. Le trop–plein est palpable. Plusieurs auteurs ont, depuis la fin des années 60, formulé une critique radicale du rôle de l'image dans les sociétés contemporaines. Partant d'une critique de la consommation, le sociologue Jean Baudrillard a progressivement radicalisé son constat sur l'image. Ce que l'on remarque, c'est la mort du réel et l'ouverture d'une ère de simulation, qui signe la « mise à mort de toute référence. » 2 L'image a proliféré et s'est autonomisée, elle a fini par ne plus renvoyer à un quelconque réel, ne signifiant plus rien. Plus on avance dans l'orgie de l'image, moins on y croit. Lors du 15eme festival Visa pour l’image à Perpignan il déclara « C’est se faire beaucoup d’illusions que de croire que les images peuvent témoigner de la réalité. […] Elles sont devenues trop familières pour nous toucher. Nous sommes accoutumés. Il nous en faut toujours plus. La prolifération des images est telle qu’on a franchi un seuil critique qui interdit un décodage véritable. » 3 Et pourtant, au XXe siècle jamais la crédibilité de l’image n’aurait pu être mise en doute. Puisqu’en effet, ce siècle restera comme celui de l’information et de l’image, la seconde donnant à la première la force et le crédit qui manquaient pour toucher le plus grand nombre. Si on pouvait opposer d’autres mots aux mots, on ne pouvait rien opposer à l’image. L’image restait dans les mentalités un témoin de la réalité qui n’était pas négociable, une part de vérité qui faisait dire aux sociologues, qu’une information sans image n’existait pas. Quoi de plus vrai que ce que l'on a vu de ses propres yeux ? Ce n’est que dans la seconde moitié du siècle qu’on remarqua le côté falsificateur des images. D’abord, en 1  EMOND, Bernard, « Lettre aux jeunes gens qui me demandent comment devenir réalisateur », 2006  2 BAUDRILLART Jean, « La société de consommation », Gallimard, 1996  3 BAUDRILLART Jean, Interview à l’occasion du 15eme festival Visa pour l’image, Le Monde, 2008 5
  • 6. dénonçant les photomontages comme ceux des pays communistes qui sont restés célèbres. Ensuite, Chris Marker dans son court métrage Lettre de Sibérie (1958) montra comment les mêmes images pouvaient se prêter à des interprétations totalement contradictoires selon le point de vue qu’on adoptait, le traitement qu’on faisait subir à ce matériau visuel brut, le commentaire qui l’accompagnait ou encore le fond sonore sur lequel on le faisait défiler. Dans le même état d’esprit, l’effet Koulechov – appelé aussi effet-K – désigne la propension d’une image à influer sur le sens des images qui l’entourent. Pour mettre en évidence cela, le théoricien Lev Koulechov réalisa une expérience. Il fit trois tirages d’une même photo : un gros plan de l’acteur russe Mosjoukine inexpressif auquel il fit précéder trois images différentes : une assiette à soupe, un cadavre dans un cercueil et une femme allongée dans un canapé. Interrogés après le visionnage de chaque séquence, les spectateurs devaient caractériser le sentiment exprimé par l'acteur. Dans le premier cas, les spectateurs croyaient percevoir la faim, dans le second, la tristesse et dans le dernier le désir. L’effet Koulechov démontre que les images prennent leur sens les unes par rapport aux autres. C’est ainsi que l’image transita lentement de vérité universelle à interprétation possible donc subjective. Rapidement, les graphistes et publicitaires prirent conscience du pouvoir manipulateur de l’image. « Là où il y a de l'image, il y a du désir et de l'amour », affirmait Hugues de Saint- Victor. La publicité fonctionne largement sur ce principe et permet de vérifier à quel point l'image est un objet de désir : la pulsion acheteuse, aujourd'hui, s'accroche en grande partie aux images. En 2002, Rick Poynor dévoile avec violence et ironie une vérité à la fois ambigüe, dérangeante et inquiétante, dans « La loi du plus fort. La société de l’image ». À travers ces 36 essais, il commente la place qu’a prit l’image dans notre société à travers le graphisme la publicité en passant par la photographie et l’art. « L’image a tellement envahi nos vies que nous ne reconnaissons même plus ces innombrables astuces pour nous séduire, nous cajoler, nous déranger et nous exciter. C’est tout à fait naturel. Les choses sont ainsi. » 4 On assiste à une « guerre de l’image » ouverte où celui qui parlera le plus fort gagnera. Et cela, à travers divers moyens : le traitement graphique, la tactique utilisé pour toucher le spectateur, ou encore l’envergure de la campagne – affiches placardées dix fois dans une seule station de métro. C’est malheureux, mais les images ne nous parlent plus, elles sont bien trop occupées à l’heure actuelle à se chamailler entre elles. D’après Guy Debord, la société est désormais vouée au culte de la marchandise et de la consommation triomphante. Dans son œuvre majeur « La société du spectacle », cette société se fonde sur « un rapport social entre 4 POYNOR Rick, « La société de l’image », Pyramyd, 2002 6
  • 7. des personnes, médiatisé par des images » 5 qui éloignent de la vraie vie. En effet, il est vrai que l’image ne peut être inévitablement qu’une représentation, une imitation, un fragment de vérité tout au mieux du réel. « […] l’image est analogique : elle fonctionne par ressemblance avec l’objet représenté. » 6 L'urbaniste et philosophe Paul Virilio intègre, lui, l'image dans le cadre d'une « dromologie » c'est-à-dire science de la vitesse. Il montre que nous vivons dans une civilisation de l'optique, où l'image participe à une tyrannie du temps réel, de l'immédiateté, de l'ubiquité. C’est certain, pour communiquer plus facilement et surtout plus rapidement, l’image semble supérieure au texte. « […] on le voit tous les jours : les magazines illustrés se vendent plus facilement que les magazines de texte. »6 Entre l'image et l'écriture, une longue histoire de rivalité existe, qui aujourd'hui ne fait que grandir. Cependant, il ne faut pas non plus trop blâmer l’image puisque c’est indéniable, elle a sa place dans notre société tant elle nous apporte. Le philosophe Daniel Bougnoux exprime cette « nécessité » de l’image dans un article au titre parlant « Il ne faut pas avoir peur des images » : « […] tant de choses ne passent que dans l'image : si je veux reconnaître quelqu'un, connaître un pays avant d'y aller, rien ne vaut une bonne photo plutôt qu'une longue description. » 6 Plus vite et plus fort qu'un long discours, l'image parle. Il y a 50 ans à peine, la bande dessinée était fortement critiquée, rejetée par de nombreux éducateurs et parents. On lui reprochait de prendre la place de l’écrit et d’offrir des narrations plus pauvres. Maintenant on s’aperçoit que la bande dessinée et, plus globalement l’image, est un très bon outil pédagogique. D’ailleurs, Daniel Bougnoux soutiens l’importance de l’image et plus précisément de la bande dessinée dans le domaine scolaire : « Non seulement elles nous ont éduqué, mais elles suscitent autour d'elles une intense communication : Tintin a beaucoup fait parler de lui dans les préaux d'école, et la « tintinologie » s'enseigne aujourd'hui à l'université. […] Les programmes, les manuels, incitent à l’exploitation de l’image et les élèves y sont sensibles. » La « force » de l’image tient aussi au fait qu’elle soit perçue synthétiquement. Elle éveille nos affects, suscite nos émotions. D'ailleurs Plutarque y fait allusion dans la « Vie de Brutus », quand il raconte le moment où Porcia son épouse, doit être séparée de lui: « Elle s'efforçait de cacher l'extrême douleur qu'elle ressentait, mais en dépit de tout son courage, un tableau l'amena à se trahir ; le sujet était tiré de la littérature grecque ; Hector était reconduit par Andromaque qui recevait de ses mains leur petit enfant et avait les yeux fixés sur son mari. La vue de cette peinture qui rappelait à Porcia son malheur, la fit fondre en larmes, elle alla la regarder à plusieurs reprises dans la journée et 5 DEBORD Guy, « La société du spectacle », Gallimard, 1996  6 BOUGNOUX Daniel, Sciences Humaines Hors-Série N°43, Déc2003/Jan Fév2004 7
  • 8. chaque fois elle pleurait. » 7 De plus, la photographie et les moyens modernes d'enregistrement ont conféré à l'image un rôle non seulement de conservation mais aussi d'investigation dans les sciences de la nature, permettant bien souvent de donner à voir l'invisible, grâce aux capacités d'observations de certaines machines bien supérieures à celle de l'œil humain. À la suite de cela, on remarque que ce qu’il faut blâmer ce n’est pas l’image elle-même mais la répétition des mêmes signes sans signifiant, le matraquage publicitaire. Intoxiqués de se faire « shampooiner » le cerveau à longueur de journée on a choisi de se méfier de l’image. Peu à peu, on s’est fait à l’idée que, dans un monde envahi d’images chargées, la simplicité pouvait être un gage d’authenticité. Et à l’inverse, que ce qui était trop chargé était forcément suspect. À la cohue générale, l’atout de la simplicité ne pourrait-il pas redonner aux images la parole? La simplicité peut-elle nous aider à « mieux » communiquer ? Dans un premier temps nous étudierons les différentes raisons qui témoignent que la simplicité est un atout majeur dans notre société. Pourquoi avons-nous tant besoin de simplicité à l’heure actuelle? Quelles sont les points forts de cette utilisation ? Par la suite, nous verrons que paradoxalement ce n’est pas si simple de simplifier. Nous étudierons les dérives qu’engendre son utilisation excessive ou sa mauvaise utilisation. Ensuite, en étudiant le contraire de la simplicité : la complexité, nous en déduirons que la simplicité au delà d’être un bon moyen de communication ne peut vivre sans la complexité et ainsi avoir le monopole dans le domaine de la communication. Ce constat fera naître la dissociation entre « complexité » et « chaos » qui mettra en évidence l’importance majeur d’une « bonne » communication : l’organisation. À la suite de tout cela, il m’est apparut essentiel que la simplicité possédait des « lignes de conduites » qui dans notre société peuvent nous être utile pour « mieux » communiquer. En effet, la simplicité se démarque de nos jours fortement puisqu’elle n’agresse pas, elle est respectueuse. D’après mes constats, j’ai donc décidé dans ma troisième partie de soulever des sujets plus ciblées, tel que la production nécessaire, ou encore la communication respectueuse envers le public et l’environnement. 7 PLUTARQUE, « La vie de Brutus, premier consul de Rome », 1730 8
  • 9. I - La simplicité Avant même de parler de simplicité, il me semble important de rappeler quelques définitions issues du dictionnaire – Larousse 2003 – pour qu’il n’y ait pas de confusion entre les différents termes abordés dans ce mémoire. « Simplicité : Qui suffit à soi seul, qui n’a besoin de rien d’autre pour produire l’effet attendu. Qui est constitué d’un petit nombre d’éléments qui s’organisent de manière claire. » La simplicité s’oppose à la complexité. « Simpliste : D’une simplicité exagérée, qui ne considère qu’un aspect des choses. » Quelque chose de simpliste est incomplet, il y a un manque, un oublie volontaire ou involontaire. « Minimaliste : Recherche de solutions requérant le minimum de moyens. » Le minimalisme est aussi un mouvement artistique où les formes sont simplifiées à l’extrême et les éléments orchestrés dans la simplicité la plus radicale. Après lecture de ces quelques définitions, nous pouvons déjà constater qu’il ne faut pas confondre le terme « simple », qui exprime le dépouillement de tout superflu avec le terme « simpliste », qui exprime le fait de donner une vision incomplète des choses. Plus discret et moins tape à l’œil, nous avons confiance dans la simplicité. Mais pourquoi lui accordons-nous plus d’attention et de crédibilité? Dans cette première partie nous analyserons les différents points forts de la simplicité. 1 Un besoin 1.1 quelque chose de naturel La réponse la plus « simple » serait que nous en avons naturellement besoin! John Maeda auteur « De la simplicité » commence d’ailleurs son ouvrage par cette phrase « La simplicité c’est sain. » 8 Il y a dans le culte du « moins » quelque chose de rigoureux, de rationnel et de serein. Econome de ses moyens, il serait ascétique. La Gestalt – psychologie de la forme – a observé à travers la loi de Prägnanz que notre cerveau recherche toujours la simplicité. Lorsque des choses se présentent à nous de façon ambigüe de sorte qu’elles peuvent être interprétées de différentes manières, notre cerveau choisira toujours l’interprétation la plus 8 MAEDA John, « De la simplicité », Payot & Rivages, 2009 9
  • 10. simple. Ainsi, de façon naturel, un tout, un ensemble est perçu avant les parties le formant. L’exemple le plus évocateur est celui du smileys ☺ ce n’est qu’une succession de caractères spéciaux qui n’a aucun sens et ne fait référence à aucune règle. Pourtant naturellement nous le regardons dans sa globalité pour l’identifier et ensuite seulement dans un second temps remarquons de quoi il est constitué. John Maeda, à travers la Gestalt changeante de l’Ipod Apple, montre à quel point de petits changements d’organisation peuvent créer de grandes différences dans le design. Il confronte les trois designs des touches de commandes de l’Ipod : « De gauche à droite, nous pouvons lire les étapes de l’évolution de l’Ipod ainsi : simple au départ, puis plus complexe, et enfin aussi simple que possible. […] la troisième phase des commandes de l’Ipod suscite le désir, parce qu’elle estompe toutes les commandes pour arriver à une seule image simple. » Apple en créant un tout constitué d’un ensemble de parties organise de façon à ce que notre cerveau soit le plus réceptif. En généralisant un ensemble complexe, nous simplifions. Ce comportement peut aussi bien être expliqué par notre cerveau reptilien qui gère notre « instinct de survie ». Nous avons besoin d’identifier le plus rapidement possible ce qui nous entoure pour y distinguer un éventuel danger. Imaginez le temps qu’il nous faudrait à identifier une pelouse si nous devions pour cela voir chaque brin d’herbe individuellement. Cet exemple peut sembler un peu farouche mais pourtant nous pensons ainsi. John Maeda résume –de façon peu être un peu brutal – que nous sommes des « […] des animaux organisationnels. Nous ne pouvons nous empêcher de regrouper ce que nous voyons. » En fait, simplifier un design soulage l’effort cognitif de l’observateur, d’une certaine manière on facilite le travail de réflexion. Car naturellement, le cerveau aime que d’une certaine façon on lui mâche le travaille. 10
  • 11. 1.2 un reflexe face au surplus La simplicité c’est aussi une réponse face aux communications qui chargent actuellement notre quotidien. Elle apparait comme un coup de balai dans les oripeaux d’une société qui croule sous ses propres excès. Graphiste et plasticien, Malte Martin prend le parti pris de s’opposer à la tendance actuelle de surenchère des images et des couleurs avec son procédé de « basse tension ». Il entend proposer des signes qui « parlent moins fort » que les signes commerciaux et le mobilier urbain. Il le dit lui-même lors d’une conférence donné à la Sorbonne «La société du spectacle produit une course effrénée menant à une surenchère de signes. Le clignotement permanent et généralisé des enseignes est le symbole de la marchandisation du monde. Je n’ai pas les moyens de crier plus fort et je n’ai pas envie de rajouter du bruit au bruit, de la couleur à la couleur. » 9 La « basse tension » c’est en quelque sorte parler moins fort que les autres personnes qui crient atour de vous afin d’attirer l’attention. Dans son travail pour le théâtre Athénée, il propose des affiches au graphisme calme et sans fioriture mêlant des jeux typographiques aux signes. « Les mots, le contraste typographique, le noir et blanc, et souvent la matière du papier, sont les ingrédients de mes tentatives de ralentissement du monde. Il s’agit paradoxalement de gagner en force en susurrant, et d’envoyer de temps en temps des éclats de mots dans la ville « avec excès, près de leur déchirure. » Même si le traitement graphique de Malte Martin est très épuré, sobre et minimaliste, il n’en reste pas moins fort, et son impact visuel puissant. Puisque attention, il ne faut pas croire que la simplicité doit être « discrète » ou « petite », la preuve le graphisme de Malte Martin est affirmé, ces signes graphiques occupent toute la surface... Un jeune graphiste français, Florent Guerlain a eu le projet ambitieux de concevoir une identité visuelle modulable pour la France qu’il appellera « Logographie France », « Logo » comme logotype et « Graphie » pour graphisme. Du bleu, du blanc, du rouge et des formes géométriques, à peine plus ! L’objectif est de créer une identité visuelle globale pour la France d’une modularité extrême. Une charte pour répondre une bonne fois pour toute au désastre graphique causé par l’infinie alternance gauche /droite au sein des institutions qui remet quasi-systématiquement en cause la marque graphique du prédécesseur pour mieux marquer son territoire. Ce début de « charte graphique » –très réussie – tente de répondre à l’actuelle création d’images multiples des différentes institutions publiques et ministères qui produisent en continu un patchwork graphique des plus monstrueux et des plus coûteux. 9 MALTE Martin, conférence du 06 février 2007 à la Sorbonne 11
  • 12. La simplicité c’est en quelque sorte « une bouffée d’air frais » qui vient au milieu d’une cohue graphique apporter un peu de tranquillité. 2 Réduire, synthétiser pour « plus » 2.1 une mise en valeur de l’essentiel 1.1.1 cibler sur l’information La simplicité permet de mettre en valeur certains éléments. « Less is more » – trad : « Moins est plus ». Le plus célèbre de tous les « éloges du moins » a été fait par un architecte. Et pas des moindres : au milieu du XXe siècle, Mies van der Rohe symbolisait l’attrait des bâtisseurs pour le minimalisme. Cette formule signifie que moins vous mettez d’éléments, plus ceux qui restent sont mis en valeur. En effet, les éléments d’une composition rentrent en compétitions les uns par rapport aux autres et cela génère ce qu’on appel du « bruit visuel ». Moins il y a de « compétiteurs » en liste, plus ceux qui restent ont la chance de gagner l’attention du spectateur. Le dessinateur de bande dessiné Scott McCloud exprime très bien cela dans son livre « L’art de l’invisible » ou il affirme en parlant du dessin humoristique « Quand nous faisons tendre une image vers l’abstraction, nous éliminons des détails mais par contre nous en mettons d’autres en valeurs. En épurant une image pour n’en garder que sa signification essentielle, le dessinateur amplifie cette signification… » 10 Récemment, des créations d’affiches ont prouvés qu’avec très peu d’élément ont pouvait résumer facilement un contenu. « Poster Series of TV Shows » est un formidable travail graphique conçut par le directeur artistique Albert Exergiant. Une série de posters minimaliste, représentant par des symboles simples, les séries TV les plus populaires dans le monde. Avec cette collection de quarante affiches, Albert Exergian propose de redécouvrir les séries sous un nouvel angle, avec des symboles simples mais fort de sens. Le résultat est tellement convaincant qu'il est facile de découvrir les séries qui se cachent derrière chaque affiche. En réduisant le nombre d’élément on focalise le spectateur sur l’essentiel et ainsi l’information n’en ai que plus lisible. 1.1.2 délivrer de l’émotion « Le peintre et l’empereur » est un conte Zen qui amène la simplicité de manière très intéressante dans un contexte fantastique et sensible. Ce conte relate l’histoire d’un empereur qui commanda à un peintre une fresque pour ses nouveaux appartements. Il demanda « qu’il y soit représenté deux dragons, l’un bleu et l’autre jaune, symbole des deux énergies 10 McCLOUD Martin, « L’art de l’invisible », Delcourt, 2007s 12
  • 13. primordiales dont l’union engendre l’harmonie céleste. » 11 Le temps passa, à tel point que l’empereur en oublia sa commande passée. « Il découvrit alors avec stupéfaction deux espèces de zigzags grossièrement esquissés, l'un bleu et l'autre jaune. Cela ressemblait vaguement à deux calligraphies ! » Furieux du résultat, qui avait demandé tant d’argent et tant de temps il jeta le peintre en prison. Il dût pourtant se résigner la première nuit à dormir devant cette fresque qu’il avait malheureusement demandé à être devant son lit. « Au plus profond de la nuit, des rugissements réveillèrent le maître de la Chine. Celui-ci se tourna vers la fresque et, dans la pièce tout embrasée par un clair de lune, il crut voir deux éclairs, pareils à des dragons, l'un bleu et l'autre jaune. Ils s'affrontaient, s'enlaçaient, se repoussaient, échangeaient leurs places en une danse infinie. » Le lendemain, l’empereur alla demander des explications au peintre. Ce dernier, l’emmena dans sa caverne là ou il effectuait ses recherches pour lui donner des réponses. « Sur les parois, tout près de l'entrée, étaient peints des dragons bleus et jaunes comme l'empereur les avait tant espérés, avec tous les détails les plus réalistes, les écailles luisantes, les griffes acérées, les naseaux fumants... Mais à mesure que la torche s'enfonçait dans les profondeurs, elle réveillait des images de plus en plus épurées pour aboutir à de simples lignes de force. Il ne resta plus à la fin que l'essence vibrante des dragons, les énergies primordiales figurées par les mêmes traits de couleurs que ceux tracés sur la fresque. » Ce conte Zen met en évidence que pour délivrer une émotion il n’est pas obligatoire d’être proche du réalisme. À l’inverse, c’est souvent le superflu, les petits détails, qui cachent des choses beaucoup plus profondes. Simplifier un design – par élimination – permet de mettre l’accent sur certains éléments considérés comme essentiels. Si on ne voit que les éléments primordiaux par ce que les autres éléments sont tout simplement absents, notre attention n’a d’autre choix que de se focaliser sur ceux qui existent, c’est à dire l’essentiel. Synthétiser/réduire s’avère être un très bon moyen de mettre en valeur de l’information mais aussi dans certain cas aussi de délivrer de l’émotion. 2.2 un gain de temps La simplicité nous fait gagner du temps. Et dans un monde où tout va plus vite, où le temps disponible devient de plus en plus précieux, gagner du temps est primordial. Pourtant inévitablement nous passons beaucoup de temps à attendre et pour beaucoup de choses : attendre qu’une page internet charge, attendre que l’eau boue, attendre son repas au restaurant, attendre un examen… John Maeda aborde cette notion, du temps que nous 11 YEIAZEL, « Le peintre et l’empereur » 13
  • 14. n’aimons pas laisser filer. Il affirme « Personne n’aime souffrir de la frustration liée à l’attente. Les consommateurs et les entreprises essaient tous de trouver l’option la plus rapide ou tout autre moyen de réduire cette frustration. » Et c’est ainsi que les Fast Food peuvent se vanter de ne pas vous faire attendre votre repas, les Chronopost vous offre la possibilité d’envoyer votre courrier plus rapidement, les avions vous proposent des vols direct pour éviter de vous faire perdre du temps en passant par de pénible escales… Quoi de plus simple que de fais un vol Paris – New York lorsque l’on veut aller à New York en partant de Paris ? Et pourtant, « Un vol direct économise du temps par rapport à un trajet avec correspondances mais il coûte sensiblement plus cher. » En effet, la simplicité est devenue un formidable atout de vente. Et même plus impressionnant, la simplicité est devenue le sujet principal d’une publicité. Prenons l’exemple de la publicité qui passe actuellement pour la nouvelle Nissan Pixo : « Nouvelle Nisan Pixo, economique 103g de CO² par kilomètre, c’est simple. Welcome to Simplicity. » Nissan joue sur le côté conviviale, la publicité pour une fois ne cherche pas a en dire trop pour coller à son message. Revenons à notre gain de temps. John Maeda nous parle dans son livre de l’Ipod Suffle lancé par Apple, qui diffère des autres Ipod ayant la particularité de ne pas avoir d’écran. Son interface utilisateur est de ce fait largement simplifiée. L’Ipod Suffle passe aléatoirement des musiques, la seule action possible est de passer la chanson. « Renoncer à la possibilité de choisir et laisser une machine le faire pour vous : voila une méthode radicale pour atténuer le temps passé à tripoter la molette. » Le Shuffle part d’un bon principe même s’il faudrait qu’il sache selon notre humeur, notre envie ce que l’on veut vraiment entendre. Amazon.com ou la Fnac.com ont très bien compris cela. Sur ces sites, on vous recommande des livres que vous serez susceptible d’aimer d’après un choix de livre. Ce gain de temps astucieux est établi en fonction des préférences d’autres personnes dont le site juge que vous avez le même profil que vous. D’ailleurs Internet reste l’exemple le plus éloquent, c’est un lieu d’abondance ou l’internaute doit trier et faire des choix parmi une multitude d’informations pour trouver ce qu’il cherche. De même que plus un site sera simple, plus il sera claire, et plus rapidement l’internaute trouvera ce qu’il cherche. Ainsi, les choses simples, claires nous donneront la satisfaction de ne pas avoir perdu notre temps. Mais pourquoi ne pourrait-on pas apprécier la lenteur ? Est-ce une réaction inhérente de notre volonté ? 2.3 engager le spectateur La simplicité est aussi un moyen d’engager le spectateur. Dans l’art Zen – on peut d’ailleurs se remémorer le conte « Le peintre et l’empereur » –, les Japonais pensent que si tout est 14
  • 15. exprimé, l’intérêt de l’observateur disparaît. En décrivant les choses de manière la plus dépouillée possible, on réduit leur description au strict minimum. Cela permet d’éveiller l’intérêt et l’imagination de l’observateur en lui laissant une marge d’interprétations. Bien des fois, l’image révèle trop de choses, ne permettant pas à l’observateur de se projeter. Dans l’introduction nous avions déjà comparé les mots aux images. Les mots ont tendance à nous laisser imaginer des représentations à défaut d’avoir une image. Prenons par exemple les romans adaptés au cinéma – Harry Potter, Le Seigneur des Anneaux… Combien de personne vous ont dit après avoir vu un film adapté d’un livre : « Je préfère largement le livre.» « Les acteurs sont mal choisi.» « Je n’imaginais pas du tout cette scène comme ça. » C’est évident, à travers un livre, aussi bien détaillé soi-t-il, il y aura toujours notre propre interprétation d’après les mots. Les mots nous laissent une part de liberté, tandis que l’image et surtout l’audiovisuel figent, et nous donne immédiatement à voir une représentation de la réalité. C’est d’ailleurs pour cela que les publicités qui utilisent la technique du teasing – ou de l’aguichage – fonctionnent très bien. Le teasing ne peut dire d’où il provient. Pas de signature, pas de moyen d’identification de la marque, seulement une énigme, une question, une petite phrase amusante ou quelque chose de totalement incompréhensible. Peu importe, tant que le consommateur n’ait qu’une seule envie : celle d’aller voir de l’autre côté de l’affiche, de la page du journal, ou du spot télévisé pour découvrir de quoi il s’agit. La réponse arrive au prochain épisode, dans un laps de temps plus ou moins court. On se souvient tous de la publicité anti-tabac « Maintenant vous savez » qui fonctionne en deux temps. Le premier spot visuel est un micro trottoir où l’on présente aux gens cette information : « On a décelé dans un produit de grande consommation des traces d’ACIDE CYANHYDRIQUE, de MERCURE, d’ACETONE et d’AMMONIAC. » En réponse à cela, les gens pensent à des détergents, du poison, des produits ménagés… Un peu plus tard un deuxième spot publicitaire donnera la réponse « Ce produit c’est la cigarette. » Le teasing fonctionne incroyablement bien parce qu’à la première étape nous n’avons pas de suite, de réponse. Cela suscite la curiosité. Tout ne nous est pas donné. L’inconvénient du teasing est qu’il coûte plus cher qu’une publicité traditionnelle – deux affiches, deux spots télévisuels… Mais n’oublions pas que dans le vacarme publicitaire constant, une seconde d’attention de la part du consommateur n’a pas de prix. L’image suggérée est un bon moyen d’engager le spectateur et d’attirer son attention. 15
  • 16. 3 Un esthétisme séduisant 3.1 un art bien maitrisé par les Japonais La simplicité est aussi une forme d’esthétisme très prisée par certaines cultures. L’Art Japonais en est le meilleur exemple. Il faut néanmoins souligner que malgré les apparences leur art est caractérisé par des oppositions esthétiques. Prenons par exemple deux œuvres de la même période : le Palais de Katsura est un exercice de simplicité mettant l’accent sur les matériaux naturels et bruts alors que le Mausolée de Töshögu est une structure symétrique rigide recouverte sur chacune de ses surfaces visibles de gravures en relief colorées avec éclat. Mais l’art japonais reste néanmoins connu pour sa simplicité étant donné qu’il excelle dans ce domaine. C’est après la seconde guerre mondiale que les développements du design graphique de manière général, en matière d'emballages, d'affiches et de magazines, s'inspirent visiblement du graphisme japonais. Par la suite, les Jeux olympiques de Tokyo en 1964 vont fournir aux graphistes japonais l'occasion de démontrer leurs talents, et c'est à partir de cette date que se développa au Japon le mouvement moderne de design graphique, inspiré du constructivisme européen. Les affiches de Yasuku Kamekura (1969), et notamment celle des Jeux olympique de Tokyo, sont à travers des formes géométriques simples, sobres et dynamiques. L’art Japonais à cette philosophie d’apporter une attention toute particulière à la finesse et la simplicité, aux choix de matériaux et au sens aigu du détail. Différents concepts guident le design japonais actuel : kawaii – beau –, craft – l’artisanat –, kime – la finesse du grain, la finition parfaite –, tezawari – sensations tactiles –, minimal – la beauté des formes dépouillées. Prenons par exemple la célèbre marque : Muji, qui est loin d’être anodine. Muji est une enseigne de magasins japonais, née à Tokyo en 1980, appartenant à l'entreprise Ryohin Keikaku. Le mot « Muji » veut littéralement dire « pas de marque, bon produit » – soit « de qualité sans marque ». D’ailleurs, Nick Currie affirme « Ici, en Occident, nous avons enfin la chance de découvrir une marque qui repose sur l'absence de stratégie de marque. » 12 Le succès de Muji est tel que de nos jours il possède des magasins et des points de ventes dans beaucoup de villes du monde entier et propose des articles allant des biens ménagés aux jouets pour enfant, en passant par la papeterie et la vaisselle. Les produits tout comme la communication visuelle de la « non marque », repose sur le concept du Shibui. Il s’agit d’une esthétique reposant sur la simplicité et l’inintrusivité. En effet, ce qui unit l’ensemble des produits de la marque tout comme son graphisme c’est l’absence de couleurs et de détails inutiles. 12 CURRIE Nick, The Moment, le blog du Style Magazine du New York Times, 2008 16
  • 17. 3.2 une grande histoire d’architecture La simplicité occupe une place très importante dans le domaine de l’architecture. L’art cistercien datant de 1098 est caractérisé par des bâtiments remarquables par la pureté de leurs lignes, l’économie des matériaux et leurs simplicités. Toute moulure ou tout élément décoratif était banni. Nous avons bien mentionné « art » cistercien mais cette expression repose sur un malentendu. Les moines n’avaient aucune intention de faire de l’art, mais justement d’évacuer l’art de leurs églises. En réalité, les moines de XIIe siècle souhaitaient revenir à la pureté de la règle de Saint Benoît, fondée sur le renoncement, l’exigence, la pauvreté. Des constructeurs ont ainsi bâti une série de chef-d’œuvres sans le savoir ; leur quête uniquement spirituelle, n’était à aucun titre une recherche du beau. En 1134, lors d'une réunion du Chapitre général de l'ordre, Bernard de Clairvaux qui est au sommet de son influence, recommande « La simplicité dans toutes les expressions de l'art. » 13 Dès lors, les cisterciens vont développer un art dépouillé et souvent monochrome. Des architectes comme Le Corbusier, Mies van der Rohe ou encore Loos ont en commun avec les cisterciens cette haine de l’ornement qui distrait, cet idéal de pureté. Adolf Loos, architecte Viennois, fut un des précurseurs et théoricien du « moins ». Son texte le plus célèbre mais aussi le plus incisif, « Ornement et crime » fit scandale sûrement du fait que l’heure était à la surabondance de l’art nouveau, fort de ses couleurs luxuriantes et de ses rondeurs voluptueuses. « D'un combat de trente années, je suis sorti vainqueur. J'ai libéré l'humanité de l'ornement superflu. "Ornement", ce fut autrefois le qualificatif pour dire "beau". C'est aujourd'hui, grâce au travail de toute ma vie, un qualificatif pour dire "d'une valeur inférieure". » 14 L’Art nouveau lui semble refléter l’hypocrisie de la société de son temps. Il met ses idées en application, puisqu’il conçoit son immeuble de la Michaelerplatz à Vienne, surnommé « La maison sans sourcils » du fait que les fenêtres ne comportaient aucun ornement. Construite en 1910, on peut faire remarquer que Loos est peu être quelqu’un d’encore incompris mais qu’il a au moins le mérite d’avoir quarante ans d’avance sur son temps. 3.3 le design suisse Le style typographique international (ou style international), également connu sous le nom de style suisse, est un courant du design graphique développé en Suisse dans les années 1950 notamment par Armin Hofmann et Paul Rand. Il met l'accent sur le dépouillement, la lisibilité et l'objectivité. Le design Suisse a sût imposer l’Helvetica et la grille de composition dans le 13 DE CLAIRVAUX Bernard, « L’essence du christianisme », Gallimard, 1992 14 LOOS Adolph, « Ornement & Crime », Rivages, 2003 17
  • 18. but premier de nous aider à soustraire méthodiquement de nos compositions tout élément superflu. La police Helvetica est créée en 1957 par Max Miedinger, elle a pour objectif d’atteindre l’harmonie optique la plus aboutie possible. Son tracé d’une grande neutralité lui permet de se prêter à tous les usages, si bien qu’elle est une des polices les plus utilisées dans le monde. Dans ce courant, la photographie est souvent en noir et blanc, elle est préférée aux illustrations dessinées. Les affiches sont une synthèse entre une « manière allemande » – monumentalité des représentations, sobriété des traits, contraste des couleurs – et une « manière à la française » – couleurs et fluidité des traits. Le design suisse répond aux besoins nouveaux de la société de consommation de masse de l'après-guerre et le monde entier va l'adopter. Caractérisé par sa grande simplicité ont peut souligner que ce courant a encore beaucoup d’influence de nos jours. Nous avons vu que la simplicité améliore la clarté d’un message ou d’une mise en page et facilite l’effort cognitif de l’observateur tout en l’impliquant. La simplicité a donc beaucoup d’avantages et répond à un besoin naturel chez l’observateur. Mais, simplifier n’est pas un acte aisé. Nous évoquerons dans cette seconde partie les dérives de la simplicité. Et dans un second temps, nous pencherons sur son contraire la complexité. Puisque la simplicité se montre un si bon atout de communication, pourquoi aurait-on encore besoin de complexité ? 18
  • 19. II - Pas si simple ! 1 Les risques de simplifier La simplicité s’avère paradoxalement une opération délicate et ardue. Faire simple demande d’investir du temps et de l’énergie. Etrangement, faire simple ce n’est pas simple ! Puisque mal utilisée la simplicité peut faire des dégâts. 1.1 perdre des éléments essentiels Andy Rutledge dans son texte « Complexe Order Simple Chaos » compare l’action de simplifié à celle de faire de la chimie. « Il parait que simplifier est une action délicate. […] Tout comme avec la chimie, la simplification peut entraîner la réduction, la distillation. […] En outre, comme en chimie, si vous ne faîtes pas attention le résultat peut vous exploser au visage. » 15 Le novlangue – Newsweek en anglais – langue officielle d’Océania, inventée par George Orwell pour son roman « 1984 » en est un bon exemple. Cette langue a pour but de rendre impossible l’expression des idées et à éviter toute formulation de critique envers l’Etat en appauvrissant le lexique et la syntaxe du vocabulaire. Le vocabulaire est réorganisé en trois classes A, B et C : le A ne contient que les termes nécessaires au travail et à la vie, le B les termes à des fins politiques et le C à des termes scientifiques et techniques. « Comparé au notre, le vocabulaire novlangue était minuscule. On imaginait constamment de nouveaux moyens de le réduire. » 16 L’idée fondamentale du novlangue est de supprimer toutes les nuances d’une langue. Par exemple, si la langue possède le mot « bon », il est inutile qu’elle est aussi le mot « mauvais ». On crée le concept « mauvais » en ajoutant un préfixe marquant la négation : cela donnera « inbon ». « On remarqua qu’en abrégeant ainsi un mot, on restreignait et changeait subtilement sa signification car on lui enlevait les associations qui, autrement, y étaient attachées. […] Chaque réduction était un gain puisque, moins le choix est étendu, moindre est la tentation de réfléchir. » L’idée sous-jacente au novlangue est que si une chose ne peut pas être dite, cette chose ne peut pas être pensée. La question soulevée par cette supposition est de savoir si nous définissons toujours la langue ou sommes parfois « formatés » par elle. Par exemple, peut-on ressentir l’idée de « liberté » si nous ignorons ce mot ? Cette théorie est liée à l’hypothèse Sapir-Whorf et à la formule de Ludwig Wittgenstein : « Les limites de ma langue sont les limites de mon monde ». Le novlangue, en réduisant son vocabulaire, a soulevé un des risques important de la simplification par la réduction : à enlever trop on supprime le sens. « La puissance de la simplification est telle 15 RUTLEGE Andy, « Complexe Order Simple Chaos », 2009 16 ORWELL George, « 1984 », Folio, 1972 19
  • 20. qu’elle peut faciliter une communication directe mais elle peut aussi détruire ou corrompre des renseignements. » 17 1.2 tomber dans le simplisme L’autre risque de trop simplifier serait de tomber dans une conception trop simpliste, c'est-à- dire où il manque des éléments essentiels. Et ainsi, faire trop simple risque d’être interprété comme quelque chose de « léger ». D’ailleurs, la communication d’Apple commence vis-à- vis de cela à être fortement critiquée de part et d’autre « (…) des campagnes publicitaire se rapprochant plus du produit cosmétique. » 18 Comme vous le savez, la pomme communique depuis quelques années sur la simplicité. Tout le monde connait leurs produits à l’esthétique pure et sans fioriture. Les publicités et spots télévisuels jouent sur cette intense simplicité : des fonds immaculés de blanc, un produit placé souvent au centre, et une voix off qui vient sobrement présenter les fonctionnalités du produit. Leur communication est justifiée puisqu’elle suit parfaitement les produits Apple ; des outils simples, pratiques et beaux, et d’ailleurs cela marchait très bien. Mais depuis peu la marque semble manquer cruellement de créativité en matière de communication et se servir abusivement de leur atout de communication, si bien que la simplicité caractérisant l’univers Apple tourne dangereusement au simplisme. Prenons par exemple leur tout dernier produit « L’Ipad », leur plus grande faille fût de lancer un slogan certes simple, mais sans fond ni message percutant « Qu’est ce que l’iPad ? L’iPad est fin, l’iPad est beau. » Pourtant cela n’empêche aucunement le produit de se vendre. Sûrement parce que la marque est déjà bien trop ancrée dans notre culture, l’image est installée et Apple n’a plus besoin de s’imposer. Cependant, on comprend qu’entre simplicité et simplisme, existe une frontière ténue difficile à percevoir mais facile à franchir. « Le problème est qu’il faut choisir ce qui mérite de vivre en sacrifiant ce qui mérite de périr. » 19 Pour nous aider à faire cela, Jacob Nielsen, ergonome Américain, préconise avant d’ajouter un élément de se poser deux questions fondamentales : 1. « Cet élément simplifie-t-il la tâche de l’utilisateur ? » 2. « Cet élément apporte-t-il une valeur ajoutée ? » … si la réponse est « non » éliminez-le. John Maeda se confronte à la même problématique « Où se trouve l’équilibre entre simplicité et complexité ? Telle est la question. Jusqu’où les choses peuvent elles être simplifiées ? » 17 RUTLEGE Andy, « Complexe Order Simple Chaos », 2009 18 EKINOXE Julien, extrait d’un article de blog, 2010 19 MAEDA John, « De la simplicité », Payot & Rivages, 2009 20
  • 21. Naturellement, nous avons tendance à en garder toujours plus, nous n’aimons pas supprimer les choses. Réduire n’est donc pas un acte aisé. Avant d’ajouter un élément graphique dans un design il faut se demander si cet élément participe oui ou non à communiquer un message. 1.3 la simplicité reflet de « pauvreté » Don Norman, un des vieux gourous de l’utilisabilité, a jeté un pavé dans la mare avec son article « Simplicity is highly overrated » – « La simplicité est largement surestimé » –, où il exprime son agacement face à cette nouvelle « tendance » qui incite les designers à débarrasser nos écrans de toutes les fonctions qui pourraient nous être utiles. « Alors qu’est-ce que les gens veulent dire quand ils parlent de la simplicité ? D’une seule touche, bien sûr, mais avec l’ensemble de leur fonctionnalités préférées. » 20 Don Norman dans son article compare deux grille-pains : le traditionnel avec un bouton pour contrôler la cuisson du pain à un grille-pain allemand à $ 250 constitué d’un moteur pour abaisser automatiquement le pain non grillé, d’un écran LCD, avec de nombreuses icônes, des graphiques et des chiffres… « La simplicité ? Pourquoi un tel grille-pain ? […] Parce qu’il ajoute des fonctionnalités que les gens veulent avoir. » Très radicale dans ses propos, selon lui la simplicité « est un mythe » qui ne se vend pas. Plus un objet possédera des caractéristiques qui par conséquent le rendront plus complexe mieux il se vendra. Les acheteurs assimilent la simplicité au manque de puissance et de capacité – même si par derrière il peut s’avérer que ce soit tout l’inverse –, et inversement la complexité s’assimile à la puissance. « […] les gens ont tendance à aller vers des produits puissants, ils jugent de cela par l’aspect complexe. » C’est assez étrange comme raisonnement, puisque moi-même j’ai arrêté d’acheter des objets aux fonctions multiples à partir du moment où je me suis rendu compte qu’en achetant ce genre d’objet, je n’utilisais à peine les 1/3 du produit. L’objet le plus éloquent serait sans doute l’évolution du téléphone portable, en plus de téléphoner, d’envoyer des textos, de jouer et de prendre des photos, des vidéos, ont peut maintenant aller sur internet, regarder la télévision, téléphoner en visio... Une chose complexe nous demande du temps pour la comprendre et nous avons pourtant mentionné précédemment que ce qui nous demande du temps ne nous attire franchement pas. « D’un côté vous voulez un produit ou un service facile à utiliser ; de l’autre, vous voulez qu’il accomplisse tout ce qu’une personne pourrait rêver qu’il effectue.» L’Iphone a tout à fait compris cela, le design très épuré et simple cache l’envergure de ce Smartphone. De la même façon, prenons comme exemple Google. Une page blanche, avec un endroit où écrire, nous permet en un clique d’accéder à l’immense réseau d’ordinateurs et de bases de données 20 NORMAN Don, « Simplicity is highly overrated », 2007 21
  • 22. Google. C’est pour cela que John Maeda expliquer que « Plus semble moins si on s’en tient éloigné, très éloigné. » Don Norman a tendance à oublier cela, et à généraliser ou plutôt à penser que les consommateurs généralisent et ainsi avance qu’une esthétique simple s’assimile forcement à des fonctionnalités pauvres. « Et la vérité est que la simplicité ne se vend pas. Pourquoi ? […] La réponse est celle-ci : les gens ne sont pas prêts à payer pour un système qui semble plus simple, car il semble perdre en capacité. » La simplicité peut en effet rendre sceptique les gens leur laisser penser qu’ils ne paient pas le prix fort pour un produit dans lequel ils espéraient « plus ». John Maeda aborde ce souci dans son livre. Selon lui lorsque l’on fait appel à la simplicité on est dans l’obligation de lui « insuffler » de la qualité. « La perception de la qualité devient un facteur décisif quand il faut choisir moins à plus. » D’ailleurs, l’industrie du luxe marche énormément avec cela. Si nous ne donnons pas à un produit simple une valeur technique, prestigieuse ou autre ce dernier peut rapidement tomber dans l’objet simpliste. 1.4 perdre le contrôle L’action de simplifier – que ce soit pour un objet, une affiche ou encore une interface – revient à ce que quelqu’un fasse le tri à notre place. Et par conséquent, à trop nous faciliter le travail on perd la diversité qui nous permettait de faire des choix, prendre des décisions. Comme nous l’avons vu l’Ipod Shuffle d’Apple impose la musique de manière aléatoire et de ce fait il nous épargne la perte de notre temps à choisir des musiques mais en contre partie il nous supprime la prise de décision. Est-ce vraiment un avantage ? Pourquoi sommes-nous prêts à nous en remettre à la simplicité ? John Maeda donne une réponse à cela en affirmant que « Dans la simplicité nous avons confiance. » La preuve, il n’y a pas longtemps une machine à laver pas comme les autres est sortie sur le marché la « BEKO ONE ». L’utilisation de cette machine par l’utilisateur se fait avec un unique bouton ! Les paramètres de lavage ou autre sont déterminés automatiquement par la machine. Tout ce qu’il vous reste à faire est de presser l’unique bouton présent sur la machine pour lancer le lavage, rien de plus simple ! La simplicité ne serait-elle pas destinée aux fainéants ? De la même façon, une affiche qui ne nous montre que l’essentiel ne va-t-elle pas manquer de « plus » de choses? Le surplus nous apporte une valeur en plus qui n’est pas forcement nécessaire à la compréhension de l’affiche mais appréciable. Il y a dans le « moins » quelque chose qui nous plait instinctivement puisqu’en étant plus direct et plus simple il est beaucoup plus facile à comprendre que les choses complexes, mais tout simplifier ne rendrait-il pas les choses trop ennuyeuses ? 22
  • 23. 2 Et la complexité dans tout ça 2.1 simplicité et complexité: les opposés s’attirent La simplicité sans la complexité aurait-elle encore une raison d’être ? C’est bien connu, les opposés vivent de leur opposition. « La complexité et la simplicité sont deux qualités symbiotiques. […] chacune a besoin de l’autre : sa définition dépend de l’existence de l’autre. » 21 C’est le propre de la pensée complexe, que de ne pas séparer les contradictions. La simplicité et la complexité ont besoin l’un de l’autre. Et d’ailleurs on remarque que plus il y a de complexité sur le marché plus la simplicité ressort. C’est de cette manière que le journal Telegraph s’est fait remarquer à Londres avec sa nouvelle campagne publicitaire. Avec la prolifération des quotidiens gratuits la baisse des ventes de la plupart des grands journaux a été inévitable. On a pu ainsi voir dans le métro Londonien une campagne pour le journal Telegraph, ou plutôt pour son site internet, sur lequel le journal semble avoir beaucoup investi. Sur fond blanc, des phrases viennent ponctuer agréablement les montées et descentes menant aux quais du métro, soigneusement composées dans une typographie qui rompt avec les caractères à empattements propres au monde des journaux. Ces phrases vantent avec une sobriété graphique très Suisse la qualité des informations que l'on peut trouver sur le site du journal, qui en ont fait le site du journal anglais le plus visité. L'économie de moyens employés est apaisante et vient curieusement faire mouche au milieu d'une débauche de visuels criards et colorés, qui cherchent tous à attirer l'attention avec beaucoup d'excès. En choisissant un graphisme sobre et sans fioriture le journal Telegraph a su se faire remarquer face aux communications beaucoup plus chargées. Imaginons maintenant qu’il n’y ait que des communications jouant de leur simplicité, la campagne du journal Telegraph aurait-il eu autant d’impact ? S’il ne restait que la simplicité, comment saurait-on ce qui est vraiment simple ? Aurait-on besoin des communications « complexes » pour faire ressortir les autres ? A-t-on besoin du mal pour savoir ce qui est bien ? Oui, sans aucun doute. La simplicité ne peut donc en aucun cas exister sans son opposé, la complexité. Mais la complexité est-elle vraiment responsable des mauvaises communications ? 2.2 la complexité comme moyen d’expression On observe globalement que l’art oscille constamment entre deux pôles, le purisme et la surcharge. L’approche vers une phase de surcharge est progressive, alors que la phase de dépouillement survient brutalement. Prenons par exemple, l’art baroque. L’art baroque est un 21 MAEDA John, « De la simplicité », Payot & Rivages, 2009 23
  • 24. style qui naît au XVIe siècle en Italie à Rome et se repend rapidement dans toute l’Europe. Il touche tous les domaines artistiques – sculpture, peinture, littérature, architecture et musique – et se caractérise par l’exagération du mouvement, la surcharge décorative, les effets dramatiques, l’exubérance et la grandeur parfois pompeuse. Les œuvres baroques avec leurs extravagances et l’excès d’ornements nous donnent une impression de grande générosité. Pendant un certain temps, l’art baroque fut jugé décadent jusqu’à ce que la mode – par définition versatile – rejoue en sa faveur. Ainsi, les œuvres d’un Gaudi à Barcelone, regardées il y a cinquante ans comme des curiosités issues d’un cerveau malade, attirent aujourd’hui le monde entier. Son œuvre principal, l’église de la « Sagrada familia » située à Barcelone et toujours inachevée, joue énormément sur la surabondance d’ornements. Sur certaines parties du bâtiment on peut remarquer des végétations exubérantes. L’art baroque définit par des aspects étranges et torturés s’épanouie pourtant dans un art luxuriant. À l’époque, la simplicité et tout ce qui était de l’ordre d’épurer n’était pas bien perçus car on y voyait dedans une sorte d’abandon du passé. De nos jours, l’art de la surabondance est beaucoup mieux accepter. Le collectif de graphiste « Peach Beach », composé de trois artistes et designers basé à Neuköllz à Berlin – Falk Hoger, Attila Szamosi et Lars Wunderlich – joue dans leurs compositions de la surcharge. Peach Beach réalise le design de divers événements, édite des tee-shirts, travaille sur des pochettes d’album... mêlant un goût prononcé pour les comics, le streetart. Il réalise la couverture de l’ « Ex Berliner » de janvier où ils se font remarquer pour leur graphisme « joyeusement bordélique et naïf. » 22 D’ailleurs, « So Me » se rapproche fortement de ce graphisme. Cette artiste de son vrai nom Bertrand Sommie est un graphiste qui joue lui aussi sur la surabondance graphique. Il réalise d’ailleurs en 2008 le clip de Justice « DVNO » dans lequel il utilisera uniquement les logos détournés de marques américaines connues pour critiquer la société de consommation. Toutes ces compositions démontrent que la complexité est souvent inhérente et voir vitale pour le succès de certaines choses. Et comme le dit simplement John Maeda « La complexité peut être belle. » 3 « Complexe » et « chaos » Les choses complexes sont à dissocier des choses chaotiques. Tout comme nous l’avons fait remarquer précédemment les choses simples ne sont pas forcement simplistes. 22 LES LAPINS TECHNO, extrait d’un article en ligne sur http://www.leslapinstechno.com, 2010 24
  • 25. 3.1 deux termes à ne pas confondre « Complexité : Qui se compose d’éléments différents, combinés d’une manière qui n’est pas immédiatement saisissable. » « Chaos : Ensemble d’éléments désordonnés, confus. » A la simplicité s’oppose la complexité mais qui n’a rien à voir avec le chaos. La complexité exprime plus une notion de quantité alors que le chaos, lui, exprime le désordre et la confusion. Dans le graphisme, la simplicité est souvent vue comme quelque chose de moins polluant et de ce fait attire notre regard. A contrario, la complexité est quelque chose qui ne nous attire pas de manière instinctive. Comme nous l’avons vu, l’esprit aime voir les choses de manière générale – psychologie de la forme – et aller à l’essentiel. Pourtant, Blaise Pascal disait : « je ne peux comprendre les parties que si je comprends le tout dans lequel sont les parties et je ne peux comprendre le tout que si je comprends les parties. » Si l’on veut comprendre une affiche dans sa globalité il faut forcement analyser et comprendre ce qui la compose. La complexité n’est pas quelque chose que l’ont peut comprendre d’un premier coup d’œil, alors que la simplicité a pour caractéristique d’être saisissable rapidement. Comme le dit si justement Edgar Morin « La complexité, c’est le défi qui vous demande de penser. » La complexité est quelque chose qui est à notre porté qui peut être décodé, alors que le chaos qui est caractérisé par une absence d’ordre ne peut être compris. 3.2 organiser la complexité préserve l’information « Ordre : Ensemble d’éléments organisés, rangés, classés, disposés de manière logique. » Andy Rudlege dans son écrit « Chaos Ordre complexe, simple » met en évidence que contrairement aux apparences la simplicité n’est pas la solution à la complexité. Pour définir quelque chose qui ne fonctionne pas il emploie le terme « chaos » et non « complexité » dont nous avons expliqué les différences précédemment. À travers l’exemple du site Amazon.com « qui est un des sites au monde les plus mal conçu et complexe. [… ] » il met en évidence que la faille du site internet n’est pas la complexité mais le manque d’organisation. La complexité est efficace, dans le cas et l’unique cas ou elle est ordonnée. « Mais là où la complexité semble être un problème, il est probable que l’ordre et non la simplicité devrait être imposée. » Alors la solution serait donc dans l’organisation ? En effet, mettre de l’ordre à la complexité préserve l’information. Henri Atlan affirmait « Tout se passe comme si notre raison ne pouvait pas supporter l’absence d’ordre. » La pensée complexe est un concept 25
  • 26. philosophique introduit par Edgar Morin datant de 1982 qui exprime un peu cette idée de la même manière. Le terme de complexité est pris au sens de son étymologie « complexus » qui signifie « ce qui est tissé ensemble ». La complexité ne conduit pas à l’élimination de la simplicité. La pensée complexe « refuse les conséquences mutilantes, réductrices, unidimensionnalisantes et finalement aveuglantes d’une simplification […] » mais axe la complexité dans un cadre d’organisation. À travers ces deux parties, nous avons constaté que la simplicité est un très bon outil de communication : pour faire simple, elle nous oblige à garder l’essentiel en éliminant les éléments surplus. Cependant, mal utilisée elle peut tourner au simplisme, ou être mal comprise. Puis, nous avons constaté que la simplicité ne peut exister sans son contraire, la complexité. Et que la complexité ne fait pas forcement référence à une mauvaise communication lorsque cette dernière est organisée. À la suite de ces constats, il m’a tout de même semblée important de relever quelques points qu’à soulevé les réflexions sur la simplicité. Si la simplicité fonctionne si bien c’est en partie parce qu’elle répond à de nombreux besoin de la société, comme le respect de l’environnement et du public… C’est pour cela que dans la suite de ce mémoire, nous évoquerons des sujets tels que la nécessité de productions, le respect de son environnement et de son public ainsi que la bonne utilisation des couleurs, des signes et des images. 26
  • 27. III - L’éloge du sens 1 Un bon graphiste est un graphiste respectueux 1.1 produire par nécessité Roy Arden écrit lors d’une exposition sous forme de carte postale « Bien sûr qu’il y a trop d’images inutiles dans le monde. Mais l’idée que la surabondance d’images signifiant qu’il est en vain d’en créer d’autres me paraît le raisonnement de quelqu’un qui cherche une solution de facilité. Je crois qu’il relève de la responsabilité de l’artiste de produire ce qui est nécessaire. » 23 « Nécessité : Caractère de ce qui est absolument obligatoire, indispensable, de ce dont on ne peut se passer. » On pourrait penser que de nos jours, la notion de « nécessité » est un peu oubliée dans la réflexion des graphistes et des publicitaires. Pour un petit projet il arrive que la quantité déployée pour en parler soit gigantesque. Pourquoi ? Ne serait-il pas plus juste au contraire pour coller au sujet de respecter son envergure ? On a tendance à penser que des campagnes « clignoterons » plus si elles sont plus voyantes. L’exemple le plus aberrant sont les spots publicitaire qui passent six fois dans le même spot publicitaires d’affiler – ce qui est le nombre légale autorisé ou la marque ou le produit doit être prononcé dans un spot – : « Mercurochrome le pansement des héros. Mercurochrome le pansement des héros…» Je ne classerai même pas ce genre de publicités dans de la communication tout simplement parce que selon moi elles ne cherchent pas à communiquer en faisant du « forcing ». Ce matraquage soit la répétition abrutissante d’un message est désagréable pour un grand nombre de personne. La dernière campagne de Kinder Surprise a lui aussi mais plus subtilement joué sur le matraquage. Sur un spot de 30 secondes le mot « surprise » est bombardé de manière plus ou moins subtile. Au final, « surprise » est répété neuf fois et est visible neuf fois à l’écran. La technique de « la répétition » aussi perfide soit-elle arrive malheureusement à ses fins puisqu’elle permet un ancrage de la marque dans les esprits. Est-il nécessaire d’en arriver à un matraquage publicitaire pour se faire entendre? Ne sommes-nous pas assez civilisés pour parler comme il faut entre nous ? Dove a récemment conçu un petit film – de 79 secondes. Interdit à la télévision et en salle il n’est visible que sur Internet ce qui ne l’empêche pourtant pas de se propager comme un virus sur la toile. Ce spot publicitaire s’intitule « Matraquage ». Conçu par l’agence Ogilvy & Mather à Toronto, il a été traduit en plusieurs langues et diffusé 23 ARDEN Roy, extrait d’un écrit lors d’une exposition sous forme de carte postale 27
  • 28. viralement « au niveau mondial ». Une succession d’affiche se suivent rapidement les unes après les autres de manière à exprimer la quantité d’affiches indénombrables qui se succèdent dans notre journée. Il met en avant la prolifération d’images qu’on nous impose. Mais malheureusement de nos jours, l’objectif premier est de se faire entendre, parler de soi ou de son produit et cela peu importe la technique pour y arriver. Le besoin de se faire connaitre dans notre société a en conséquence fait augmenter la quantité de production graphique. D’ailleurs dans une interview dédiée à la communication à l’entré des villes Michel Serres affirme « Je ne dis pas que les publicités ne sont pas belles, ou qu’elles sont laides, mais c’est leur multiplicité à un endroit donné qui produit un effet de guerre ou de chaos tel que la laideur est l’expérience qu’on en tire le plus facilement. » 24 Dans ce paragraphe concernant la nécessité, la réduction dont on parlait dans la simplicité pourrait être un bon conseil à prendre en compte pour éviter de polluer graphiquement notre environnement. 1.2 investir sans gêne La communication s’est invitée un peu partout dans notre quotidien et elle en est devenue gênante. Imposer une image dans un paysage urbain n’est pas une chose aisée. L’affiche est pour cela quelque chose de très difficile ; elle s’impose ! La première à en souffrir c’est la ville. « Quartiers sensibles ? Pour une fois une appellation politiquement correcte à fait naître un sens nouveau : « quartiers sensibles ». Des endroits sensibles ? Mais il en faudrait partout ! » 25 Notre environnement est quelque chose de sensible et aujourd’hui heureusement nous en avons pris plus conscience. « Quand Malte Martin créer une affiche pour un théâtre, quand il réalise un programme publicitaire, l’objet qu’il affectionne n’est pas, dans son essence, conçu comme un support simplement publicitaire, c'est-à-dire visant à accrocher le passant, à lui faire désirer la représentation, il est pensé en lui même comme un instant de théâtre descendu sur le quai du métro. » 26 Communiquer c’est en effet bien plus que plaquer une image sur un support, il faut donner un sens, créer une atmosphère, dialoguer avec ce qui l’entour et ceux qui l’a regarde. Les communications à l’entrée des villes font particulièrement parler d’elles en ce moment. Le Conseil national du paysage a créé un atelier de réflexion, intitulé « Publicité et entrées de ville ». Il s’agit d’y discuter les bases d’une réforme de la législation en matière d’affichage publicitaire. La loi de 1979 concernant les publicités et les enseignes, est souvent transgressée. Michel Blain, président de l’association Paysages de France, explique : « Il y a eu un consensus autour de la table [de l'atelier] pour 24 SERRE Michel, interview, « Les pubs polluent nos entrées de ville », 2008 25 MALTE Martin, conférence du 06 février 2007 à la Sorbonne 26 WAJCMAN Gérard, « Malte Martin », Pyramid, 2007 28
  • 29. dire que la loi était mal appliquée. » Le Conseil de Paris a lui aussi décidé de réagir et a décidé de réduire cette pollution visuelle en interdisant totalement tout affichage publicitaire dans un rayon de cinquante mètres autour des écoles, sur les bords de Seine, aux abords des monuments historiques. Le projet est une expérimentation en cours, mais à long terme il vise à réduire d'un tiers le nombre de panneaux publicitaires d'ici deux ans. Lors de l’interview concernant la pollution des publicités à l’entrée des villes, Michel Serres affirme : « J’ai l’impression que ceux qui ont fait les entrées de ville, ceux qui ont sculpté le paysage tel que nous le voyons aujourd’hui n’ont plus le sens de la beauté et ça, ça me parait très important. » Les publicités sont arrivées à un point où nous en somme réduit à les refuser, à lutter contre. En effet, maintenant il est possible d’apposer sur sa boîte aux lettres un autocollant mentionnant le refus de publicité : « le stop-pub ». Dire non à la publicité nous a la fois permis de nous débarrasser de la paperasse inutile dans nos boîtes aux lettres mais aussi a participé à une amélioration économique et environnementale. Sommes-nous rentrés en guerre contre la publicité ? Pour certaines personnes il n’y pas de doute, oui ! Le groupe « Ras la pub » vient de neutraliser, par des inscriptions à la peinture, – «RAS LA PUB», «NON MERCI» – les 4 écrans publicitaires LCD installé le 1er décembre par la régie publicitaire Métrobus dans la station de métro Charles de Gaulle Etoile, à Paris. Ces panneaux sont destinés à remplacer – à terme – les vieilles affiches désormais trop statiques pour nos contemporains. Dans son communiqué, Ras la pub précise qu' « il est grand temps que les dirigeants de la RATP comprennent que le métro a pour finalité de transporter des usagers d'un point à un autre, et non de les transformer en chair à canon pour publicitaire. » 27 1.3 ne pas sous-estimer son public Les graphistes et les publicitaires donnent de plus en plus souvent l’impression qu’ils surestiment leur public en se servant d’astuces, de techniques qui nous laissent maintenant de glace. Nous ne sommes pas ou du moins plus dupes ! Les mannequins retouchés sur Photoshop, les sandwiches trop parfaits de chez McDonald’s ou encore des régimes minceurs qui nous présentent une anorexique c’est fini, on n’y croit plus ! D’ailleurs, je m’étonne même des fois à lire les textes en petit caractère sur des produits ou même des affiches pour me satisfaire d’avoir déjoué une possible tentative d’un graphiste ou d’un publicitaire de faire passer une information importante sous mon nez. Pour redonner du sens aux images il faudrait déjà comprendre ce qui a du sens pour le public. Mais encore une fois les publicitaires ne savent pas s’y prendre de la bonne façon pour comprendre nos attentes. Par exemple, 27 RAS LA PUB, extrait d’un communiqué, 2008 29
  • 30. concernant l’installation du nouveau principe d’affiches via les ecrans LCD, il est prévu l’installation d’un dispositif qui mesurerait l'efficacité du message publicitaire avec des capteurs enregistrant les réactions des visages des passants afin de détecter quel élément de l'image a retenu leur attention. Ces nouvelles installations font débats et c’est logique vu le climat actuelle de la publicité au sein de notre société. En nous analysant comme des souris de laboratoire la publicité tente encore d’aller plus loin dans ces objectifs de vente : « Quelle image attirera le plus le consommateur ? La peur ? Utilisons la peur alors ! » Les publicitaires sont-ils conscient d’aller à l’encontre des attentes de son public ? En ce formatant dans la seule optique de vendre en plus grande quantité ils en viennent à nous épuiser. Les stop-pub et les luttes anti publicité qui se multiplient ne font que conforter l’idée que bientôt la publicité sera en guerre bien malgré elle contre nous. 2 Un graphiste sait se servir de ces outils De la même manière qu’un chirurgien doit bien savoir se servir de son scalpel et de son bistouri un graphiste doit savoir manipuler les images, les signes, les typographies et les couleurs. 2.1 les images & les signes parlent L’image et les signes parlent. Les graphistes aujourd’hui ont oublié qu’une image véhicule beaucoup de choses et que forcement elle a un impact sur son public. Le jeu du rebus est une façon d’expliquer un peu le principe d’une communication qui fonctionne. Le rebus souvenez-vous, c’est cette suite de dessins qui, une fois interprétés, donnent les syllabes permettant de découvrir une phrase ou un mot. Une communication marche exactement comme cela, c’est une suite de signes graphiques qui une fois interprétés vous permette d’accéder à l’information. Une communication à un impact visuel, elle nous donne une impression et cela va même plus loin elle nous donne une idée sur la vie en générale. Le spot publicitaire de Dove « Matraquage », dénonce d’ailleurs le pouvoir visuel des images au sein de notre société. Au début du spot, une jeune fille regarde la caméra et sourit dans une atmosphère naturelle à la limite de la naïveté – qui caractérise bien évidemment l’enfance. A cela, s’enchaine une vague déferlante d’images qui vantent particulièrement la beauté féminine, les courbes parfaites, le rajeunissement par des crèmes, les régimes... « Parlez à votre fille avant que quelqu’un d’autre ne le fasse. » Le message est clair les images nous 30
  • 31. influencent, et il faut s’en méfier puisqu’elles ne sont pas toutes jolies à voir et particulièrement pour prendre exemple dessus! 2.2 les couleurs aussi Si tous les graphistes avaient pour bible « Le petit livre des couleurs » de Michel Pastoureau et Dominique Simmonet les couleurs retrouveraient sûrement l’usage qui leur est destiné. En effet, les couleurs sont souvent mal utilisées, elles sont placées de manière gratuite, à tout va et vient et ont de ce fait perdues de leur authenticité. C’est ainsi, que l’utilisation du noir et blanc est devenu un échappatoire à la surenchère de couleur. Comme nous l’avons vu précédemment, Malte Martin en divorçant des couleurs, et en utilisant le noir et blanc a renforcé sa communication pour le théâtre Athénée. François Delclaux, directeur de l'agence de style « Un nouvel air » affirme « Mis à part la parenthèse glamour des années 1990, le noir et blanc est un classique dont l'impact visuel est fort. C'est une base neutre de réassurance. » On remarque, que toutes nos démarches lorsqu’il s’agit de « rattraper la donne » sont souvent faite dans l’extrême. Je m’explique. On n’arrive plus à communiquer, alors on simplifie tout. On ne sait plus se servir des couleurs alors on en vient à passer au noir et blanc. Peut-être qu’avant de trouver une solution diamétralement opposé à ce qui ne va pas il faudrait d’abord comprendre la cause de ce qui ne fonctionne pas. Le pourquoi 31
  • 32. Conclusion Ce mémoire avait pour but de s’interroger sur la simplicité comme moyen de communication. En me penchant sur « la simplicité », je me suis rendu compte tout d’abord a quel point ce sujet était très passionnant à étudier mais aussi qu’il regorgeait d’une richesse que j’avais largement sous-estimée. La simplicité est une notion qui s’est avérée tellement vaste qu’elle me semble aujourd’hui difficilement résumable. Mais on pourrait retenir principalement que la simplicité a cette force de réduire à l’essentiel les choses complexes de manière à mettre en valeur ou/et engager le spectateur tout en nous simplifiant la réflexion elle nous fait gagner du temps qui est de nos jours si précieux à nos yeux. Ensuite, nous avons vu que la simplicité s’avérait paradoxalement un art difficile à maîtriser : synonyme de pauvreté, prise de pouvoir à notre place, trop réduire, risquer de basculer dans le simplisme, changer le sens... Je ne pensais pas que c’est en analysant le contraire de la simplicité « la complexité » que j’allais faire perdre de la crédibilité à cette dernière. Bien au contraire, je pensais l’affirmer ! Il c’est révélé que la simplicité ne saurait exister sans son contraire. De plus, nous avons fait remarquer que la complexité à autant sa place que la simplicité dans notre société, c’est un outil certes diamétralement opposé à la simplicité mais qui regorge lui aussi de qualités. C’est ainsi que c’est effondré l’utopie que la simplicité pouvait avoir le monopole de la communication et ainsi être la solution à tous les problèmes. De ce constat fût abordée la différence entre « complexité » et « chaos ». Les choses complexes sont certes chargés et pas du premier coup d’œil compréhensible mais la complexité organisée fonctionne très bien. Le chaos est défini par une surcharge d’éléments incontrôlés, qui ne sont pas organisé et qui ne peuvent être compris même après réflexion. Il ne faut pas confondre complexité et chaotique. La simplicité a fait naitre cependant des pistes riches qui selon moi étaient intéressantes à explorées. Ce n’est pas pour rien si de nos jours, les communications « simples » ont une ligne d’avance sur les autres. En effet, en m’intéressant à la simplicité il m’a paru évident que certaines qualités de cette dernière pouvaient néanmoins répondre à certains soucis de communication présent dans notre société. Simplifier c’est respecter les images en gardant ce qui est nécessaire à la compréhension d’un produit ou d’un message. C’est aussi investir un lieu avec ces images sans gêner l’environnement et le public visé. La simplicité s’adresse sans fioriture, ni gadget pour séduire, vendre ou informer. Nous avons confiance en elle car elle a cette façon innocente de se mettre à nu. De nos jours, il me semble que nous sommes complètement réfractaire aux images tant elles nous ont usé de leurs stratagèmes, de leurs 32
  • 33. beautés artificielles et parfois mensongères. Les graphistes et – plus particulièrement – les publicitaires devraient essayer de considérer plus leur public, se préoccuper un peu plus de leur attente. A force de communiquer « n’importe comment », nous en sommes venus à transformer le paysage urbain, notamment en utilisant mal les couleurs, ou encore les signes et les images. La mise en place d’un code de déontologie pour les graphistes et – surtout – les publicitaires ne serai pas du luxe ! Serait-il possible de mettre en place ce genre de chose de manière à faire promettre aux graphistes de ne pas « abimer » notre environnement et de ne pas matraquer le public ? Est-on obligé d’en arriver là ? 33
  • 34. Bibliographie - Hors  champs  [En  ligne],  EMOND  Bernard,  Lettre  aux  jeunes  gens  qui  me  demandent  comment  devenir  réalisateur,  2006,  [consulté  le  1er  juin  2010],  disponible sur : http://www.horschamp.qc.ca - BAUDRILLART Jean, La société de consommation, Gallimard, 1996, 318 p. - POYNOR Rick, La société de l’image, Pyramyd, 2002, 224 p. - BOUGNOUX Daniel, Il ne faut pas avoir peur des images, Sciences Humaines, Déc2003/Jan Fév2004, Hors-Série N°43. - DEBORD Guy,  La société du spectacle, Gallimard, 1996, 208 p. - PLUTARQUE, La vie de Brutus, premier consul de Rome, 1730, 38 p. - MAEDA John, De la simplicité, Payot & Rivages, 2009, 190 p. - MALTE Martin, conférence du 06 février 2007 à la Sorbonne. - MCCLOUD Martin, L’art de l’invisible, Delcourt, 2007, 232 p. - Contes et histoires zen, [En ligne], YEIAZEL, Le peintre et l’empereur, 2009, [consulté le 28 mai 2010], disponible sur : http://contes-et-histoires-zen. spot.com - LOOS Adolph, Ornement & Crime, Rivages, 2003, 277 p. - DE CLAIRVAUX Bernard, L’essence du christianisme, Gallimard, 1992, 527 p. - Andy Rutlege web site [En ligne], RUTLEGE Andy, Complexe Order Simple Chaos, 2009, [consulté le 1er juin 2010], disponible sur : http://www.andyrutledge.com - ORWELL George, 1984, Folio, 1972, 438 p. - Don Norman web site [En ligne], NORMAN Don, Simplicity is highly overrated, 2007, [consulté le 1 juin 2010], disponible sur : http://www.jnd.org - ARDEN Roy, extrait d’un écrit lors d’une exposition sous forme de carte postale - WAJCMAN Gérard, Malte Martin, Pyramid, 2007, 120 p. - SERRE Michel, interview, Les pubs polluent nos entrées de ville, 2008 - RAS LA PUB, extrait d’un communiqué, 2008 34
  • 35. Annexes Affiches pour le théâtre Athénée saison 2009-2010, Malte Martin 35
  • 36. « Logographie France », Florent Guerlain, 2009 36
  • 37. 37
  • 38. « Poster Series of TV Shows », Albert Exergiant, 2009 38
  • 39. « Affiche jeux olympique Tokyo », Yasuku Kamekura , 1964 39
  • 40. Le logotype « MUJI » et des produits types de la marque 40
  • 41. De haut en bas : L’Ipad d’Apple et l’Ipod Suffle d’Apple 41
  • 42. Affiches du journal Telegraph, 2007 42
  • 43. Peach Beach, 2007 Peach Beach, couverture de l’Ex Berliner de janvier 2009 43
  • 44. 44