« L’ordonnance du 12 mars 2014 et la nouvelle procédure de rétablissement professionnel sans liquidation : parution du décret d’application » par Karim JAKOULOFF
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Perspectives
ÉTUDE
L’ordonnance du 12 mars 2014 et la nouvelle
procédure de rétablissement professionnel sans
liquidation : parution du décret d’application
La nouvelle procédure de rétablissement professionnel instaurée par l’ordonnance n° 2014-326
du 12 mars 2014 constitue assurément une avancée majeure dans les droits des professionnels
endettés. Son décret d’application, paru in extremis le 30 juin 2014 à la veille de son entrée
en vigueur prévue le 1er juillet 2014, apporte les précisions nécessaires à la compréhension
d’une procédure inédite mais ressemblant fortement à son homologue consumériste qu’est la
procédure de rétablissement personnel.
Par Karim JAKOULOFF
Docteur en droit
ATER à l’Université Paris-Est Créteil Val-de-
Marne
Î RLDA 5271
L ’ordonnance adoptée le 12 mars 2014 portant réforme de la
prévention des difficultés des entreprises et des procédures
collectives (Ord. n° 2014-326, 12 mars 2014, JO 14 mars), ainsi
que son décret d’application en date du 30 juin 2014 (D. n° 2014-
736, 30 juin 2014, pris pour l’application de l’ordonnance n° 2014-326 du
12 mars 2014 portant réforme de la prévention des difficultés des entre-prises
et des procédures collectives, JO 1er juill.) constituera, à n’en pas
douter, un tournant dans la vie des affaires. Composée de 117
articles très variés, applicables à compter du 1er juillet 2014, elle
touche de nombreux pans du droit des entreprises en difficulté
(cf. Lienhard A., Réforme du droit des entreprises en difficulté : présen-tation
de l’ordonnance du 12 mars 2014, D. actualité, 17 mars 2014 ;
Roussel Galle P., La réforme du droit des entreprises en difficulté par l’or-donnance
du 12 mars 2014, Rev. sociétés 2014, p. 351 ; Fabre A., Aspects
sociaux de l’ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014 réformant le droit
des entreprises en difficultés, RDT 2014, p. 259 ; Le Corre P.-M., Premiers
regards sur l’ordonnance du 12 mars 2014 réformant le droit des entre-prises
en difficulté, D. 2014, p. 733 ; Dekeuwer F., Une nouvelle procédure
pour les débiteurs, personnes physiques, dont la situation financière est ir-rémédiablement
compromise : le rétablissement professionnel, LPA 20 mai
2014, n° 100, p. 6 ; Sénéchal M., Le rétablissement professionnel par effa-cement
relatif de certaines dettes, Bull. Joly Entreprises en difficulté 2014,
p. 196 ; Roussel Galle P., Le rétablissement professionnel : de l’effacement
des dettes au rebond, Gaz. Pal. 8 avr. 2014, n° 98, p. 32). Parmi toutes ses
dispositions, celle qui retiendra plus particulièrement notre atten-tion
est incluse à l’article 85 du texte, figurant lui-même dans un
Titre IV intitulé « De la liquidation judiciaire et du rétablissement
professionnel » et dans un Chapitre V – qui lui est réservé – intitulé
« Du rétablissement professionnel ».
Ce nouveau chapitre a vocation à introduire les articles L. 645-1
et suivants au sein du Titre IV du Livre VI du code de commerce.
L’article L. 645-1 nouveau du code de commerce instaure donc
« une procédure de rétablissement professionnel sans liquidation
ouverte à tout débiteur, personne physique, mentionné au premier
alinéa de l’article L. 640-2, qui ne fait l’objet d’aucune procédure
collective en cours, n’a employé aucun salarié au cours des six der-niers
mois et dont l’actif déclaré a une valeur inférieure à un mon-tant
fixé par décret en Conseil d’État » (l’article R. 645-1 issu du décret
du 30 juin 2014 fixe le montant maximal à 5 000 euros).
Cette procédure inédite s’inspire très largement des travaux ré-cents
de MM. Lucas et Sénéchal (Lucas F.-X., Sénéchal M., La procédure
d’enquête pour le rétablissement professionnel, D. 2013, chr., p. 1852), qui
l’avaient appelée de leurs voeux, la présentant comme une alter-native
à la liquidation judiciaire telle que régie aux articles L. 640-1
et suivants du code de commerce. Selon eux, la liquidation judi-ciaire,
peu appréciée du public, souffre d’un « déficit d’image » qui
nécessitait d’introduire dans notre droit un mécanisme nouveau
susceptible d’être employé par les professionnels.
Ce rétablissement professionnel, qui aboutit, au terme de la pro-cédure,
à un « effacement des dettes à l’égard des créanciers dont
la créance est née antérieurement au jugement d’ouverture de la
Numéro 96 I Septembre 2014 RLDA I 73