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1. BENODET
LE FORT DU COQ ET LA COMMUNE DE BENODET
APRES 128 ANNEES DE QUERELLES
Connaîtra-t-on le sort du fort
Le fort du Coq, historiquement connu sous le nom de " batterie de Bénodet ", fut construit
en 1862 comme l'atteste une plaque de fonte scellée au-dessus de l'entrée. Nous étions sous le
Second Empire, les soldats de Napoléon III étaient au Mexique tandis que l'Empereur faisait
construire le long du littoral atlantique tout un chapelet d'ouvrages en vue d'une nouvelle
guerre.
A Bénodet, sur la commune de Perguet, la batterie côtière fut construite à l'entrée de la
rivière, derrière la grande butte de terre que les navigateurs connaissent bien avec ses trois
lettres blanches " Y C O " et qui, sans nul doute,est aussi de la main de l'hamme. Outre le fort
que nous connaissons, la batterie comportait une autre petite bâtisse, la poudrière, côté mer,
au niveau de la route actuelle qui n'existait pas. La batterie a disparu mais quelques anciens se
souviennent de l'avoir vue au début du siècle.
Le fort du Coq fut-il occupé
quelque temps par des militaires, des
gardes côtes ? On imagine les canons
sur la butte, braqués vers le large et
les guetteurs scrutant l'horizon, prêts
à donner l'alarme à la vue du bateau
ennemi qui n'est jamais venu.
On ne trouve aucune trace de ces
défenseurs sur les registres de la
commune de Perguet. Etaient-ils
recrutes, requis sur place ? Ont-ils
seulement existé ?
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2. Avant le fort actuel il y avait déjà des ouvrages de défense sur cet emplacement; ils
figurent sur le cadastre de la commune de 1850. La route n'existait pas encore~mais il y avait
autour de la batterie une bande de terre non numérotée qui aurait donc été la propriété
communale.
Au sujet de la construction du fort, on relève dans la session ordinaire du conseil
municipal en date du le mai 1861:
" Le Maire a donné lecture d'une lettre du Préfet par laquelle le
" Magistrat fait connaître qu'un décret impérial du 27 mars dernier " a déclaré d'utilité
publique l'acquisition de parcelles de terrain " nécessaires à l'établissement de la batterie de
Bénodet; l'une " d'elles appartenant à la commune de Perguet. A cette lettre s'en trouve jointe
une autre de M le capitaine de génie militaire de " la place de Concarneau offrant à la
commune) pour la parcelle de terre contenant 8 ares 60, la somme de 63,30 fc.
« …à la suite de cette communication M. le Maire engage le conseil à débattre
sur les offres qui lui sont faites. Le conseil " après délibérations autorise le Maire à
traiter aux meilleurs conditions pour la commune."
C'est la seule mention relative au fort que l'on trouve sur le registre des délibérations
de la commune de Perguet dans les années de sa construction et celles où il aurait pu avoir
une destination, un rôle de défense, c'est-à-dire jusqu'à la guerre de 1870. Il est vrai, que le
Maire, Pierre LE CAIN, ou Jean-Marie FRIANT qui lui succéda en 1865, semblent surtout
préoccupés de prélever des centimes pour payer le cantonnier ou le secrétaire de mairie, ou
encore de répondre aux lettres du Préfet qui les pressait d'ouvrir une école dans la commune.
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3. La Mémoire de nos anciens
Deux anciens de la commune nous ont conté leurs souvenirs du Fort du Coq dans les
toutes premières années du siècle. Ce sont Corentin LE GOARDET qui a vu le jour à Bénodet
en 1893 et Alain CORPOREAU qui y est né avec le siècle. Tous deux étaient, comme ils le
disent avec une certaine fierté, de ceux que l’on appelait alors « chas ar vorh » (les chiens du
bourg). Toujours dans la nature, connaissant les moindres recoins du village. Et espiègles,
prompts à s'amuser, fut-ce parfois aux dépens du « paour kez den » (pauvre bonhomme).
Tous deux ont bien connu, à quelques années d'intervalle, la batterie de Bénodet (le
fort, la butte et la poudrière). Les deux bâtiments étaient alors habités et ils ont gardé le
souvenir de familles déshéritées parce que mal logées. Le fort était humide et sombre, seul un
rais de lumière filtrait par les meurtrières; et pas une cheminée pour t'aire une flambée. La
poudrière était un simple refuge sans fenêtre et il fallait en ouvrir la porte pour se rendre s'il
faisait jour.
Dans le fort vivaient VICEN BRAZ et MlARZANIC VIHAN, avec leur nombreuse
famille. Corentin y Allait fréquemment car il était le copain de l'un des enfants, du même âge,
et prénommé Corentin comme lui-même. Un de leurs amusements préférés consistait à
descendre dans le souterrain, un étroit boyau qui partait de l'intérieur du bâtiment et
débouchait devant la mer en passant par dessous la butte.
Les occupants de la poudrière, LAOUIC BRAZ et JULIE, n'étaient pas très ingambes
et ils étaient la cible de ces garnements qui prenaient un malin plaisir à bombarder leur porte à
coups de pierre et à détaler dès qu'ils l'ouvraient.
Ni l'un ni l'autre de nos anciens ne se souvient d'avoir vu le moindre vestige d'arme dans le
fort ou sur la butte ; pas davantage d'avoir entendu leurs aînés parler de soldats qui auraient
occupé le fort. Il nous faut donc conclure que l'ouvrage construit en 1862 n’a pas d'histoire
militaire.
Le fort du Coq fut-il occupé quelque temps par des militaires, des gardes côtes ? On
imagine les canons sur la butte, braqués vers le large et les guetteurs scrutant l'horizon, prêts à
donner l'alarme à la vue du bateau ennemi qui n'est jamais venu.
On ne trouve aucune trace de ces défenseurs sur les registres de la commune de
Perguet. Etaient-ils recrutes, requis sur place ? Ont-ils seulement existé ?
Le fort et la poudrière étaient-ils « squattés » avant la lettre? Étaient-ils loués aux
familles par la Marine ? Directement ou par l'intermédiaire de la commune ? Nous n'avons
pas de réponse à la question mais nos anciens pensent qu'ils ont été occupés spontanément
par des familles, victimes de quelque calamité.
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4. LE FORT DANS LES REGISTRES DE LA. COMMUNEE
Après la décision de sa construction, il faut attendre 1926 pour voir le Fort du Coq (ou
la batterie de Bénodet) à l’ordre du jour du conseil municipal de Bénodet. Cette année là, le
Maire fait part à ses conseillers de la location du fort à un célèbre chirurgien de Paris, le
docteur HEITZ BOYER, pour un loyer de 500 f par an et de l'émotion de la population à cette
nouvelle.
Le bail sera renouvelé en 1929, le prix sera augmenté, et l'acte précise qu'il sera utilisé
pour « faire culture de plantes médicinales ». Il y eut sans doute alors quelques arrangements,
un sentier était laissé à la disposition du public entre l'ouvrage et la mer, et on n’en parlera
plus pendant de longues, années .
Puis) au début de 1944, le docteur HEITZ B0YER dont la villa, jouxte le Fort
(actuellement Hôtel le Minaret), s’adresse à la municipalité pour lui demander de lui
« laisser »" la batterie contre un champ qu'il possède à la pointe Saint-Gilles. Le conseil
municipal refuse l’offre du docteur, entreprend l’expropriation qui échouera (le décret
l'autorisant ayant été abrogé le 2 avril 1944).Mais la grande brouille surviendra dans les
années 1945 1946.
Le 1er juillet 1945 le conseil municipal de Bénodet est réuni en séance extraordinaire.
Le maire, Paul TROADEC informe les élus qu'il sait de source sûre que la Marine st sur le
point de céder la batterie au docteur HEITZ BOYER. Le procès-verbal de séance mentionne
que Il les élus sont indignés de se voir menacés de céder à un particulier un site qui, par sa
position dominante et son caractère archaïque, présente un intérêt touristique de premier
ordre. Et à l'unanimité le conseil affirme son intention d'alerter l’opinion par une démission
collective, une pétition, des réunions publiques
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5. Mais le docteur HEITZ BOYER ne renonce pas. Le 8 juin 1946 le conseil examine
une autre requête dans laquelle il propose à la commune de lui céder les deux tiers de la
surface de la batterie (7.000 M2) et il conserverait le reste pour « accroître sa propriété ». En
outre, il aménagerai t la partie cédée à la commune par un paysagiste de sa connaissance et
céderait également à la commune son terrain de la pointe Saint-Gilles. Le conseil repousse la
proposition et revendique la totalité de l'ouvrage.
Nous arrivons à la fin de l'année 1949 et la commune de Bénodet demande à la Marine
de lui louer le fort. Quatre mois plus tard le 27 avril 195O, le Maire informe les conseillers du
refus opposé par le Secrétaire d'Etat chargé de la Marine.
Une autre fois, en 1962, la municipalité cherche à acquérir le fort et se propose d'y grouper
toutes les activités nautiques de la station; le Maire est habilité à mener la négociation. Le 23
avril nous dit un journal de l'époque, le Maire informe le conseil de la décision des services de
la Marine: " le fort restera propriété de l'Etat ". Le rédacteur concluait que des interventions
s’étaient produites et que la déception était grande à Bénodet.
LE YACHT CLUB DE L'ODET ET PIERRE LE NOACl
Le deuxième locataire de la batterie, après le docteur HERTZ BOYER, sera le Yacht Club de
l'Odet, qui y entre en 1958. Elle sert d'abord de pied-à-terre à l'association et d'entrepôt de
matériel. Les belles années du fort commenceront en 1962, avec l'arrivée de Pierre LE
NOACH comme chef de centre, et comme la commune se proposait de l'acheter.
" A mon arrivée, dit Pierre, le bâtiment était tout délabré, toutes les pièces portaient les traces
de l'ancienne occupation par " les familles. Dans chacune, le plafond était percé pour le
passage d'un tuyau de poêle. Les murs suintaient, couverts de champignons et de sa1pètre. La
terrasse était surmontée d'un toit en et éverite sur des piliers qui n'empêchait pas la pluie de
tomber à l'intérieur.
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6. "Après les premières annees difficiles sont venues les améliorations. En 1968 a été
construite la grande salle de l'étage, financée par le Y.C.O. avec l'aide du Crédit Hôtelier.
C'est celle qui servira ensuite à toutes les réunions, les réceptions, les remises de prix. "
" Et lorsque le bâtiment a été hors d'eau, l'aménagement a commencé du rez-dechaussée. L'épaisse couche de noir de fumée sur les murs a d'abord été recouverte de bambous
fendus, puis il a fallu tout recrépir. Et des fenêtres étaient percées au droit des meurtrières. Les
conditions de travail étaient considérablement améliorées. L'éverite et la charpente récupérées
sur le toit servaient à construire le hangar accolé au mur Sud du fort."
Le fort du Coq a alors connu de belles années d'activité nautique, poursuit Pierre. " A
mon arrivée, il y avait un embryon d'école de voile. Je l’ai créée officiellement, affiliée à la
Fédération Nationale. Le succès a été spectaculaire. Au cours des étés 1972, 1973, 1974, nous
dépassions 1000 élèves. Curieusement, le déclin de l'école a coïncidé avec le développement
de la plaisance; beaucoup d'enfants, au lieu de suivre des cours, accompagnaient leurs parents
sur le nouveau yacht."
Les marins pêcheurs à l'école: " Peu après mon arrivée, continue Pierre LE NOACH,
les pêcheurs ont été dans l'obligation d'avoir le brevet de capacité pour conduire leur bateau.
Avec l'accord des Affaires Maritimes, je leur ai donné des leçons, ce qui leur a permis, à
Bénodet et à Mousterlin, de se mettre en règle et ensuite d'améliorer leur retraite. "
Au départ de Pierre LE NOACH, c'est Georges JAMES qui devient le Chef de Centre
du Yacht Club de l'Odet; il y reste jusqu'en 1987 année où l'association décide, pour raison
économique, de supprimer le poste de permanent. Un an plus tard, l'école de voile ne
fonctionnera plus.
Après l'ouragan de 1987 on a vu les plaisanciers avoir un vrai coup de coeur pour le fort.
Avec tronçonneuses, serpes et faucilles, pelles et pioches, ils ont passé plusieurs week-ends à
couper, débroussailler ; ils ont même découvert un parcours de mini-golf que la génération
d'avant avait aménagé sur les contreforts de la butte.
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7. Ces mêmes années, la municipalité accordait au Yacht Club de l'Odet la .jouissance
d'un local du rez-de-chaussée de la nouvelle capitainerie du port de plaisance, et il y faisait
son club house. Dès lors, il n’utilisait plus guère les locaux du fort. Par contre il est très
attaché à l'installation de départs de courses implantés sur la butte, et il est difficile de rêver
meilleur emplacement pour le jury comme pour les équipiers.
LE COUP DE TONNERRE DE BREST
En 1988, la Préfecture Maritime de Brest provoquait la surprise à Bénodet en
annonçant la mise en vente de la batterie. Le bail du Yacht Club de l'Odet était résilié et
l'association continuait de l'occuper sans pouvoir envisager l'achat des lieux. Immédiatement,
la municipalité se mettait sur le rang des acheteurs et le Maire étai informé que la vente se
ferai t au plus offrant avec clause de préemption en faveur de la commune. En mars 1989, la
municipalité a changé et les nouveaux élus montrent autant de détermination que leurs
devanciers pour que le fort devienne propriété communale.
On s'acheminait vers l'achèvement de la procédure quand un deuxième coup de
tonnerre éclate à Paris. Au ministère on n'est pas satisfait des offres reçues à la Préfecture
Maritime et on fait dire que la batterie de 3énodet sera vendue aux enchères publiques sur une
base d'offre de 1.1OO.OOO francs, avec pas d'enchères de 100.000 francs.
Toute la population est attentive à l'affaire et attend que le fort soit acheté par la
commune. Au cours de leur réunion du 20 décembre 1989, les conseillers ont été unanimes
dans cette même volonté. Dans le prochain bulletin de notre association, nous vous parlerons
de la vente.
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