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UNIVERSITE DE LAUSANNE
FACULTE DES SCIENCES
SOCIALES ET POLITIQUES
                                                 SESSION DE JUIN 2005




   LES AJUSTEMENTS DE LA POLITIQUE AGRICOLE
   POLONAISE FACE AUX NOUVEAUX DEFIS POSES
  PAR L'INTEGRATION DANS L'UNION EUROPEENNE




            Mémoire de licence ès sciences politiques




                          Présenté par

         Marta KOLAKOWSKA DELLA MARTINA




              Directeur: Prof. Pierre de Senarclens

                     Expert: Virgile Perret
Remerciements:

   J'aimerais remercier le Professeur Pierre de Senarclens pour son aide dans la
conception et la réalisation de ce travail.

    J'aimerais également remercier Monsieur Jacek M. Pijanowski, du Département de
l'Environnement et du Développement de la Campagne du Siège du Maréchal de la
Voïévodie de Malopolska, pour l'entretien qu'il a bien voulu m'accorder, ainsi que pour les
références bibliographiques qu'il m'a transmis.

   J'aimerais remercier mon père, Bohdan Kolakowski, employé de la commune de
Libiaz, pour les références bibliographiques qu'il m'a transmis, et, avec ma mère, Krystyna
Kolakowska, pour leur soutien.

   J'aimerais aussi remercier ma sœur et son mari, Katarzyna et Serge Nedrotti, qui m'ont
hébergée et épaulée au début des études que ce travail conclut.

    J'aimerais finalement remercier mon mari, Alberto Della Martina, pour sa patience et
son soutien, ainsi que pour le temps passé à la relecture et à la correction du français de ce
travail.
Table des matières.

1 Introduction. ......................................................................................................... 3
 1.1 Problématique................................................................................................... 8
2 Présentation de la situation. ............................................................................... 10
 2.1 Rappel de l'évolution de la PAC...................................................................... 10
 2.2 Entrée de la Pologne dans l'Union européenne. ............................................... 12
     2.2.1 Négociations Pologne-Europe pour les modalités d'application de la
           PAC. ......................................................................................................... 14
     2.2.2 Nouvelle situation juridique et administrative de la Pologne...................... 17
     2.2.3 Résultats des rapports évaluatifs de la Commission européenne. ............... 19
 2.3 Application de la PAC et de la politique structurelle européenne en
       Pologne d'un point de vue pratique.................................................................. 20
     2.3.1 Aspects du développement rural dans le cadre des instruments
           traditionnels de la PAC. ............................................................................ 20
     2.3.2 Aspects du développement rural dans le cadre de la politique
           structurelle européenne. ............................................................................ 22
     2.3.3 Assistance de l'Union européenne pour l'ajustement de l'agriculture
           polonaise................................................................................................... 24
 2.4 Conclusion...................................................................................................... 30
3 Problèmes relatifs à l'application de la politique structurelle et de la PAC
   en Pologne. .......................................................................................................... 32
 3.1 Facteurs internes. ............................................................................................ 32
     3.1.1 Lacunes administratives et manque de spécialistes et de personnel
           qualifié dans l'administration..................................................................... 32
     3.1.2 Structure de l'éducation dans les zones rurales........................................... 34
     3.1.3 Fragmentation des exploitations. ............................................................... 36
 3.2 Facteur externe: la compétitivité des produits agricoles polonais après
       l'adhésion européenne. .................................................................................... 38
 3.3 Conclusion...................................................................................................... 40
4 Conséquences sociales des ajustements de l'agriculture pour les zones
   rurales. ................................................................................................................ 43
 4.1 Chômage induit............................................................................................... 45
 4.2 Possibilités de réinsertion ou de recyclage....................................................... 47
     4.2.1 Activité touristique comme source de revenus alternative pour les
           zones rurales. ............................................................................................ 49
 4.3 Conclusion...................................................................................................... 50
5 La PAC et la politique structurelle face aux disparités géographiques et
   sociales en Pologne.............................................................................................. 52
 5.1 Etat des disparités géographiques.................................................................... 53
     5.1.1 Disparités entre les régions........................................................................ 53
     5.1.2 Inégalités entre les villes et les campagnes. ............................................... 53



                                                                 1
5.1.3 Paradoxe des conditions d'obtention des aides dans le cadre de la
           politique structurelle.................................................................................. 54
 5.2 Etat des disparités sociales. ............................................................................. 55
     5.2.1 Disparités entre les agriculteurs et les autres catégories sociales. ............... 55
     5.2.2 Inégalités parmi les agriculteurs eux-mêmes.............................................. 55
 5.3 Conclusion...................................................................................................... 57
6 Conclusion........................................................................................................... 59
Bibliographie. ........................................................................................................... 64
Annexe. ..................................................................................................................... 71




                                                                  2
1 Introduction.

    Affranchie de la tutelle soviétique avec l'écroulement du bloc de l'Est en 1989, la
Pologne a rapidement entrepris une série de réformes politiques, économiques et
sociales en vue d'adopter un régime démocratique et de transformer son économie en
économie de marché. En réorientant ses échanges vers l'Ouest, le pays a renforcé ses
liens avec la Communauté européenne, et cette dernière a remplacé l'ex-URSS en
qualité de partenaire commercial principal de la Pologne.
    A l'occasion du passage de la Pologne de l'économie socialiste à l'économie de
marché, le gouvernement issu de "Solidarité" a demandé l'ingérence de la Banque
mondiale et du Fonds monétaire international. Il a ainsi décidé de réaliser les réformes
structurelles imposées par ces institutions, réformes basées sur la privatisation, la
libéralisation des prix et du commerce et la stabilisation macroéconomique.
     Même si le pays a rapidement réalisé une libéralisation des prix presque complète,
accompagnée d'une dévaluation de sa monnaie et de strictes mesures d'austérité
économique, la privatisation et les réformes structurelles dans les secteurs comme
l'agriculture, l'industrie houillère et la sidérurgie (secteurs extensifs, à faible rendement
et largement subventionnés) se sont avérées beaucoup plus lentes.
    Les réformes structurelles, telles qu'elles ont été réalisées en Pologne après 1989,
ont contribué à surmonter rapidement les crises provoquées par la transition et diriger
l'économie vers une croissance accélérée. Néanmoins, elles ont également contribué à
l'accroissement des déséquilibres économiques et des problèmes structurels, parmi
lesquels le chômage massif sur les territoires des anciennes fermes d'Etat.
    Pour lutter contre ces difficultés, le gouvernement au pouvoir en 1998 a décidé de
mettre en place une politique monétaire stricte et d'accélérer les changements
structurels. Parallèlement, il a introduit quatre réformes sociales importantes (système
des retraites, système de santé, éducation et réforme territoriale). La coïncidence de la
politique monétaire stricte, des réformes sociales majeures (accompagnées de multiples
difficultés) et des catastrophes naturelles1, a provoqué un ralentissement économique
important et une montée considérable du chômage2.
    Les énormes coûts économiques et sociaux engendrés par les réformes structurelles
ont provoqué une prise de conscience que la réussite de la transformation amorcée ne
serait pas possible sans une aide extérieure, et que l'adhésion à la Communauté
européenne pourrait apporter une solution à ce problème. L'intégration européenne de la
Pologne, réalisée le 1er mai 2004, a couronné plusieurs années d'efforts engagés par les
gouvernements successifs, initiés par la signature d'un traité d’association en 1991
suivie du dépôt d'une demande officielle d'adhésion en 1994.
    L'équipe alors au pouvoir a mesuré les multiples avantages offerts par l'intégration à
la Communauté européenne, devenue depuis Union européenne3.


1
    Le pays a essuyé des inondations dans sa partie sud-ouest en 1997, en 2001 et en 2002.
2
    A. Nesporova, Why unemployment remains so high in Central and Eastern Europe, International
    Labour Office, Employment Paper, Geneva, 2002/43, p. 20.
3
    A. Jedraszko, Na drodze do zjednoczonej Europy, Warszawa, Akapit-DTP, 2002, pp. 145-155.*
* Les traductions des références en polonais se trouvent dans la bibliographie à la fin de ce travail.


                                                         3
La première conséquence positive de l'adhésion européenne pour la Pologne aurait
été la stabilisation du régime démocratique. En effet il était nécessaire, dans ce pays
post-communiste, de pérenniser les règles de fonctionnement de la démocratie
parlementaire, de l'Etat de droit, de l'économie de marché et de l'autogestion territoriale.
L'adhésion européenne aurait imposé à la Pologne la mise en place de ces règles dans la
vie quotidienne du pays et de la société, ce qui aurait renforcé l'attachement à ces
valeurs et à ces pratiques nouvelles.
    Deuxièmement, l'entrée dans l'Union aurait permis la stabilisation des finances de
l'Etat. La discipline financière imposée par l'Union (surtout en ce qui concerne les
déficits publics admis) aurait eu pour conséquence la stabilisation des prix et la
suppression de l'inflation. L'Union aurait pu servir de garantie en cas de difficultés dans
certains domaines, et ainsi assurer les conditions nécessaires à la stabilité des finances
publiques. En outre, l'introduction, à terme, de la monnaie unique aurait permis de
stabiliser les conditions de fonctionnement de l'économie, à travers l'élimination des
fluctuations des taux de change et la suppression des coûts liés à l'échange des
monnaies. Finalement, la libre circulation des capitaux aurait rendu ceux-ci plus
accessibles.
    Troisièmement, l'Union aurait garanti le maintien de la paix, aussi bien sur le plan
interne (par la résolution des querelles et des conflits portant sur les frontières et la
garantie des droits égaux pour les minorités nationales sur tout le territoire de l'Union)
que sur le plan externe (à travers le potentiel économique et défensif de l'Union,
renforcé par son appartenance à l'OTAN, qui sont des moyens de dissuasion).
    Quatrièmement, l'intégration européenne aurait contribué à la modernisation de la
formation en Pologne. La faible valeur des matières premières dont dispose le pays,
l'obsolescence des industries du temps du socialisme, les conditions généralement
défavorables pour l'agriculture, sont autant de facteurs laissant penser qu'un haut niveau
de formation dans des domaines ayant un caractère novateur constitue un des seuls
capitaux dont dispose le pays (technologies informatiques, biotechnologie,
nanotechnologie, protection de l'environnement, droit, finances, etc.). La qualité de la
formation est aussi très importante lorsque l'on tient compte des changements rapides du
marché du travail et des besoins en formation continue. L'accès aux programmes de
l'Union, ainsi qu'aux différentes formes de coopération transfrontalière et la possibilité
d'étudier à l'étranger, aurait offert aux citoyens polonais la possibilité d'améliorer leur
savoir général et professionnel, en favorisant leur mobilité professionnelle. Pour
l'économie, cela se serait traduit par l'apparition d'incitations à l'innovation et à la
modernisation, et aurait créé les conditions pour la reconstruction de l'intelligentsia
détruite durant la Seconde Guerre mondiale ou ayant émigré après l'instauration de l'état
de guerre en 1981.
    La cinquième conséquence positive de l'adhésion européenne aurait pu être
l'amélioration de l'état de l'environnement naturel polonais. Celui-ci est le résultat de
négligences et de dégradations séculaires de la nature et de la faible conscience sociale
du besoin de protéger l'environnement. La politique européenne en la matière aurait
posé les bases pour l'évolution de cet état des choses, en particulier grâce à la
liquidation des entreprises qui nuisent à l'environnement et à l'assainissement des
mauvaises pratiques agricoles.
     La nationalité européenne aurait été une sixième conséquence positive de
l'intégration européenne pour la Pologne. En plus de la liberté de se déplacer sans visas
à l'intérieur de l'Union et de s'installer dans tous les pays européens, des droits civiques,


                                               4
ainsi que du droit à la protection consulaire et diplomatique à l'extérieur de l'Union, le
statut de citoyen européen aurait garanti aux Polonais la pleine protection des droits de
l'homme.
    Septièmement, la Pologne aurait pu bénéficier des standards mis en place par
l'Union dans le domaine des règles de l'emploi et des conditions de travail, ainsi que de
la protection sociale des travailleurs. L'Union soutient la mobilité des travailleurs, avant
tout par l'intermédiaire du Fonds Social Européen (FSE). Elle cherche à garantir un bon
niveau de santé et de prévention des maladies.
    La huitième conséquence positive que la Pologne aurait tiré de l'adhésion
européenne concerne le domaine de la culture. En effet, l'Union soutient la protection et
la conservation du patrimoine national, la collaboration culturelle entre les pays
membres et les échanges non-commerciaux entre eux. Elle encourage aussi les
programmes de promotion de la culture et de l'histoire des pays membres.
    Neuvièmement, la Pologne aurait pu tirer profit de la lutte commune menée par
l'Union contre le crime organisé international. L'Europe essaie d'instaurer une
collaboration accrue entre les polices nationales et elle soutient la formation et
l'équipement des services frontaliers pour garantir la sécurité des citoyens et du
territoire.
    La dixième conséquence positive de l'adhésion aurait été l'application de la politique
structurelle de l'Union (ou politique régionale) visant une égalisation progressive entre
les régions, aussi bien entre les différents pays membres qu'à l'intérieur d'un même pays.
En effet, dans le domaine des infrastructures techniques, l'Union met en place et aide à
maintenir des standards minimaux, met à disposition de nouvelles technologies et peut
cofinancer la modernisation. Elle tend aussi à la création d'un système de réseaux
européens énergétiques, de transport et de communication, et met en place, dans ce but,
des standards techniques communs, coordonne les travaux et garantit le cofinancement
des principaux investissements. L'ensemble des infrastructures techniques polonaises,
nécessaires au fonctionnement effectif des zones aussi bien urbaines que rurales,
nécessite d'être amélioré. Parallèlement, sur tout le territoire de la Pologne, le PIB par
habitant est inférieur aux 75% de la moyenne communautaire, condition d'accès aux
aides structurelles européennes.
    Finalement, l'adhésion européenne du pays lui aurait donné plein accès au marché
communautaire, grâce à la suppression graduelle des obstacles à la libre circulation des
marchandises (taxes, contingents, etc.). Comme le voudrait la théorie libérale, le
principe de libre concurrence appliqué par l'Union devrait conduire à la baisse des prix
et à l'augmentation du rendement du travail dans le pays. Différents programmes
communautaires auraient soutenu la modernisation de l'économie polonaise, une
meilleure allocation des moyens de production et une meilleure division du travail.
    Les avantages que l'adhésion européenne auraient offerts à l'économie polonaise
auraient pris une signification particulière pour son économie agricole. En effet,
l'importance de l'agriculture dans la vie socio-économique de la Pologne est plus
significative que dans les pays d'Europe occidentale. On y trouve des régions où
l'agriculture reste un des secteurs économiques principaux, avec un fort impact sur le
niveau de développement de la région et sur le niveau de vie des habitants.




                                               5
Dans la période qui a directement précédé l'adhésion européenne de la Pologne,
l'agriculture de ce pays se trouvait dans une crise profonde4. Cela se manifestait
principalement par une baisse importante des revenus agricoles, et surtout par des
possibilités limitées de les augmenter. On n'observait dans ce pays ni une demande
croissante pour les produits agricoles, qui aurait pu entraîner une hausse des prix, ni un
marché du travail capable d'absorber la main-d'œuvre libérée de l'agriculture après les
changements structurels en cours, ni de transferts budgétaires publics importants pour le
domaine agricole, ni un progrès agricole et technologique suffisant pour intensifier la
production et baisser ses coûts, ni même une offre importante de moyens de production
d'origine industrielle à prix modérés.
    L'état dans lequel se trouvait l'agriculture polonaise au moment de l'adhésion était la
conséquence de quarante années d'économie centralement planifiée. A l'époque du
socialisme, le secteur agricole polonais possédait des caractéristiques propres qui le
distinguaient de l'agriculture des autres pays de l'Europe centrale et orientale (PECO).
Notamment, ni les changements de propriété (la dépossession des propriétaires des
terres), ni le processus de concentration de terres à grande échelle, caractéristiques de
l'économie socialiste, n'y ont été réalisés, même si les conditions de gestion économique
en Pologne restaient typiques de ce type d'économie. Ces arrangements ont eu pour
conséquence la formation d'un type d'agriculture orientée vers la propriété privée, et
parallèlement tournée vers un interventionnisme étatique important pour les régulations
relatives aux marchés agricoles (produits, quantités, prix…).
    Pour satisfaire les besoins d'autosuffisance alimentaire, le gouvernement polonais a
mis en places dans les années 1960 des politiques, largement subventionnées,
d'intensification et de modernisation de l'agriculture. Toutefois, même si ces mesures
ont permis d'augmenter les rendements par hectare, les coûts de production du secteur
agricole ont continué à augmenter en raison de dysfonctionnements du système
(allocation irrationnelle des ressources, choix productifs et techniques) et d'une faible
productivité du travail agricole. Ces coûts de production élevés ont été compensés par
des aides publiques importantes (jusqu'à 15% du budget de l'Etat) ce qui a permis
d'éviter leur répercussion sur les prix des aliments.
     L'importante fragmentation des exploitations agricoles, les lourdeurs
administratives, le manque de spécialistes et de personnel qualifié dans l'administration,
le manque d'initiative des populations rurales constituent des réminiscences de cette ère
communiste. Ajoutés au bas niveau d'éducation dans les zones rurales, la faible
compétitivité des exploitations polonaises et l'obligation de se soumettre aux différentes
normes imposées par l'Union, ces facteurs invitent à s'interroger sur le succès de
l'intégration de l'agriculture polonaise à l'agriculture européenne, du moins pour la
première période après l'adhésion, en prenant en compte des différences sociales et
régionales présentes en Pologne.
   Dès le début des réformes structurelles, l'agriculture absorbait le surplus de la main-
d'œuvre. Cela a conduit à une surpopulation des zones agricoles et a encore aggravé le
problème du chômage agricole et du chômage caché5 dans les zones rurales6. Ainsi en


4
    J. S. Zegar, «Strategia polskiego rolnictwa po akcesji do Unii Europejskiej», Zagadnienia Ekonomiki
    Rolnej, n°3, 2003, p. 70.
5
    En Pologne, les personnes exploitant des parcelles d'une superficie supérieure à deux hectares ne sont
    pas enregistrées comme chômeurs.


                                                      6
2002, quand le niveau du chômage a atteint 17,4% en Pologne, il y avait 1 million 368
mille 700 chômeurs dans les zones rurales, ce qui représentait, à cette période, 42,7% du
nombre total des chômeurs. On estime qu'un million de personnes supplémentaires, ne
trouvant pas de travail, gonflaient les rangs du chômage caché et environ 70% des
individus ayant un emploi travaillaient à temps partiel.
    Après 1989, une hausse drastique des prix des denrées alimentaires (auparavant
fixés administrativement), supérieure à la hausse des salaires, a entraîné une baisse de la
consommation intérieure, impossible à compenser par les exportations vers les pays
d'exportation traditionnels, l'Union soviétique et l'Allemagne de l'Est, dont les capacités
d'absorption avaient diminué de manière brutale pour les mêmes raisons. Même une
forte augmentation des droits de douane sur certains produits à partir de 1993 (le lait, la
viande bovine, le sucre, la pomme de terre, certains fruits et légumes frais de saison), n'a
pas permis de protéger durablement les secteurs agricole et agroalimentaire polonais.
    Une très forte diminution des subventions, la baisse en termes réels des prix des
denrées agricoles7, l'augmentation des prix des intrants (matériel, engrais) et la hausse
des taux d'intérêt ont provoqué une forte réduction des marges financières des
exploitations agricoles polonaises8. En conséquence, la baisse de la production,
accompagnée de la réduction des investissements et de la consommation des intrants ont
débouché à une récession forte de l'agriculture, avec un manque de perspectives pour
l'avenir quant à la possibilité de restructuration du secteur agricole, à moins qu'une aide
extérieure considérable lui permette d'entamer ce processus.
    Dans ce sens, l'intégration européenne et l'application de la politique agricole
commune (PAC) en Pologne constituent, pour l'agriculture de ce pays, une grande
opportunité, principalement en raison des transferts financiers qu'elles engendrent (à
travers les Fonds de pré-accession, les paiements directs aux agriculteurs et les Fonds
structurels). En effet, en accord avec le principe de solidarité financière qui est un des
principes fondamentaux de l'Union européenne, il a été décidé d'appliquer la
"responsabilité financière commune" pour la PAC9. Cela se traduit par le fait que, après
le transfert à l'Europe de la compétence dans le secteur agricole, les dépenses dans ce
domaine sont financées par le budget communautaire et non plus par le budget du pays,
même si ce dernier a le droit d'accorder des aides nationales, tout en tenant
obligatoirement compte des réglementations communautaires dans ce domaine.
    L'intégration de la politique agricole polonaise à l'agriculture européenne se réalise à
travers l'adoption du modèle agricole européen, tel qu'il est défendu par la Commission
européenne au sein de l'OMC. Il repose sur une politique de développement rural
globale et cohérente, qui s'ajoute à la politique européenne des marchés agricoles mise
en place jusque-là (instruments traditionnels de la PAC). Ce modèle prône le
développement d'une agriculture moderne et durable, qui s'adresse aux acteurs du


6
    Ministerstwo Rolnictwa i Rozwoju Wsi, Sektorowy Program Operacyjny Restrukturyzacja i
    Modernizacja Sektora Zywnosciowego oraz Rozwoj Obszarow Wejskich, 2003, p. 21.
7
    Les prix des denrées agricoles augmentent beaucoup moins vite que l'inflation, et en conséquence ils
    baissent en termes réels.
8
    Commissariat Général du Plan, L'élargissement de l'Union européenne à l'Est de l'Europe, Paris, La
    Documentation française, 1999, pp. 111-114.
9
    J. Loyat, Y. Petit, La politique agricole commune (PAC): un enjeu de société, Paris, La
    Documentation française, 2002, p. 41.


                                                     7
monde rural, mais également aux consommateurs et à la société dans son ensemble10.
L'agriculture, telle qu'elle est définie dans le modèle européen, prend un caractère
multifonctionnel. Cela signifie qu'elle "n'est pas limitée à la seule fonction de
production de biens agricoles. C'est le secteur en soi qui est multifonctionnel puisqu'il
doit garantir la sécurité alimentaire, protéger l'environnement et maintenir l'emploi
rural. Les caractéristiques propres au secteur agricole sont invoquées pour expliquer la
place spécifique de l'agriculture dans la société: le caractère biologique de la production
agricole, une demande rigide, l'occupation de l'espace et des particularités stratégiques
et culturelles. Ainsi, à l'approche marchande se superpose une approche plus culturelle
et identitaire qui peut motiver l'intervention publique"11.
    L'intégration de la politique agricole polonaise à la PAC devrait faciliter l'inévitable
restructuration de l'agriculture polonaise pour la rendre plus compétitive et lui permettre
un fonctionnement efficace dans le cadre de la globalisation de l'économie. Les fonds
européens apparaissent comme un des rares moyens pour sortir l'agriculture polonaise
de sa situation d'impasse. De nombreux mécanismes de la PAC offrent aux zones
agricoles polonaises les moyens de développer les infrastructures, pour attirer les
investissements en vue de revitaliser l'économie locale, et, aux agriculteurs, un soutien
considérable et une possibilité inédite de s'adapter aux nouveaux défis.


       1.1 Problématique.
    L'analyse approfondie dans toutes ses dimensions de ce sujet très complexe,
dépasserait largement le cadre d'un travail comme celui-ci. Néanmoins, même s'il n'a
pas une vocation à l'exhaustivité, le travail cherchera à aborder brièvement plusieurs
aspects principaux inclus dans le sujet, aussi bien en ce qui concerne l'évolution de la
PAC en général que celle de la politique agricole polonaise de l'époque du socialisme
jusqu'au moment de son accession à l'Europe, et également pendant les premiers mois
qui ont suivi l'adhésion européenne de la Pologne.
    Ainsi, l'enjeu de ce travail consistera à analyser les changements touchant le secteur
agricole polonais pour s'adapter aux exigences posées par l'Union européenne aux
PECO avant leur adhésion le 1er mai 2004, pour s'intégrer au modèle social de
l'agriculture européenne caractérisé par la durabilité et la multifonctionnalité de
l'agriculture et du développement des zones rurales. Il abordera également les solutions
envisagées par la Pologne pour faire face à la nécessité de réduire le surplus de main-
d'œuvre dans l'agriculture et transférer cette masse de travailleurs agricoles vers des
activités alternatives alors que le chômage global avoisine 20%, ainsi que pour réduire
les disparités sociales et géographiques du pays.
    Pour cela, le travail débutera par une présentation du processus des négociations
entre la Pologne et l'Europe et il analysera la nouvelle situation juridique et
administrative de la Pologne, comme résultat de ce processus. Ensuite, il portera sur
l'application de la PAC et de la politique structurelle européenne de développement
rural en Pologne d'un point de vue pratique. Après avoir présenté des aspects du
développement rural dans le cadre de celles-ci, il analysera l'assistance de l'Europe pour



10
     Idem, p. 72.
11
     Idem, pp. 140-141.


                                               8
l'ajustement de l'agriculture polonaise, à travers les Fonds de pré-accession, les
paiements directs aux agriculteurs et les Fonds structurels.
    Les problèmes d'application de la PAC en Pologne, portant aussi bien sur les
difficultés internes (le manque de spécialistes et de personnel qualifié dans
l'administration, le bas taux de formation dans les zones rurales, la fragmentation des
exploitations, etc.) qu'externes (le problème de la compétitivité des produits agricoles
polonais après l'adhésion) seront examinés dans la troisième partie du travail.
    Ensuite, le travail va se concentrer sur les aspects sociaux des ajustements de
l'agriculture polonaise. En analysant la structure de l'emploi dans les zones rurales en
Pologne, il se focalisera sur le problème du chômage induit par ces ajustements et, en
conséquence, sur les efforts du gouvernement visant la réinsertion et le recyclage de la
main-d'œuvre libérée par les restructurations agricoles.
    Finalement, puisque les disparités géographiques (entre les régions et entre les villes
et les campagnes) et les inégalités socio-économiques (entre les agriculteurs et
différentes catégories sociales et parmi les agriculteurs eux-mêmes) sont toujours
considérables en Pologne, le travail va essayer d'examiner l'impact que les réformes en
cours pourraient avoir sur l'évolution de ces disparités.




                                              9
2 Présentation de la situation.

       2.1 Rappel de l'évolution de la PAC.
    La PAC, telle qu'elle a été initiée par le Traité de Rome en 1957 et mise en place en
janvier 1962, s'est trouvée remise en cause à partir du milieu des années 198012.
Premièrement, suite à la crise économique mondiale des années 1970, l'idéologie
économique keynésienne dominante dès le lendemain de la Seconde Guerre mondiale,
protectionniste et interventionniste, s'est vue destituée dans tous les pays membres de
l'Union européenne. Elle y a été remplacée par la doctrine libérale, combinant
désengagement de l'Etat, ouverture commerciale et focalisation de l'action étatique sur
la gestion des équilibres macroéconomiques. Deuxièmement, on observait une
saturation du marché européen à la fin de la décennie 1970, et une impossibilité des
marchés internationaux à absorber les surplus de la production agricole européenne, en
raison de la stagnation de la demande mondiale au début des années 1980. Ces deux
facteurs ont contribué à mettre en lumière la nécessité de réviser la PAC.
     Ainsi, le coût croissant de la PAC, son incapacité à différencier la production pour
répondre aux besoins du marché et l'iniquité des aides (dépendantes de la production)
favorisant les producteurs les plus puissants, sont devenues l'objet de critiques à
l'intérieur de l'Union. Suite à la prise de conscience par la population des enjeux
environnementaux, dans les années 1990, se sont ajoutées à ces critiques celles qui
reprochaient à l'agriculture intensive européenne d'être la cause de pollutions, de
désertifications ou de pertes de biodiversité. En outre, la multiplication des maladies
animales comme la vache folle, la fièvre aphteuse ou la contamination des viandes
comme dans le cas des poulets à la dioxine, généraient des critiques portant sur les
insuffisances du contrôle de la qualité et de la sûreté des aliments par la PAC.
    Ces critiques internes s'accompagnaient de reproches venus des partenaires
commerciaux hors de l'Union. Les pays en développement, sous l'égide des pays
exportateurs de matières premières comme le Brésil, l'Argentine, l'Australie, la
Nouvelle-Zélande et l'Afrique du Sud (le groupe de Cairns) attaquaient au sein du
GATT, puis de l'OMC, le protectionnisme agricole européen. Ils lui reprochaient de
contribuer d'une part à la dépréciation des cours internationaux à cause notamment des
subventions à l'exportation (en usage depuis 1962 et qui permettent à l'Europe de
compenser la différence entre les prix européens et les prix mondiaux), et d'autre part
aux difficultés économiques que ces pays connaissent en raison de l'accès insuffisant au
marché européen. Pour que les négociations commerciales multilatérales puissent
aboutir, les pays en développement exigeaient l'ouverture du marché agroalimentaire
européen. Leurs voix étaient renforcées par celles des représentants des milieux
financiers et commerciaux européens, qui cherchaient à obtenir l'accès au marché des
services dans les pays en développement en échange d'une plus grande ouverture du
marché agroalimentaire européen.
    Toutes ces critiques à l'endroit de la PAC ont abouti à la grande transformation
initiée en 1992. Malgré les pressions libéralistes évoquées plus haut, un désengagement
total de la politique au profit du seul jeu de marché a toutefois été évité par cette


12
     J. Loyat, Y. Petit, op. cit. pp. 8-32.


                                              10
transformation. A partir de cette date, on a réorienté les aides agricoles dans le but de
remplacer la politique de soutien des prix par une politique de soutien des revenus
agricoles à travers des paiements directs, et on s'est employé à assurer la sûreté et la
qualité des denrées alimentaires et une production durable respectueuse de
l'environnement13.
    La perspective de l'élargissement de l'Union aux PECO, dont l'économie repose
principalement sur l'agriculture, et le rapprochement de l'échéance du nouveau cycle des
négociations à l'OMC, ont mis en lumière la nécessité d'une nouvelle réforme de la
PAC. La réforme de 1999 (l'Agenda 2000) tente ainsi de répondre aux nouvelles
demandes des citoyens en matière de fonction sociale de l'agriculture en mettant un
accent important sur le concept d'une agriculture et d'un développement rural durables
et multifonctionnels14. "Les zones rurales sont multifonctionnelles et les agriculteurs
devraient être encouragés à tirer parti de toutes les possibilités qui s'offrent aux
entrepreneurs du monde rural. Car, dans l'avenir, les zones rurales devront remplir des
fonctions d'ordre écologique et récréatif de plus en plus importantes et les exigences
liées à ces fonctions pourraient nécessiter des adaptations de l'agriculture"15. Il a aussi
été prévu par l'Agenda 2000 que cette approche intégrée de l'agriculture et des zones
rurales, ainsi que leur implication en matière de protection de l'environnement,
d'aménagement des territoires, de qualité des produits et de sécurité alimentaire soient
encadrées par le deuxième pilier de la PAC16. En outre, contrairement à l'ancienne PAC,
la PAC réformée tient compte des différentes situations des agriculteurs à l'intérieur de
l'Union, et cherche à soutenir toutes les catégories d'exploitations. Par conséquent, dans
la répartition des aides, elle prend en compte des exploitations qui, faute d'être
compétitives sur les marchés internationaux pour la commercialisation des produits
agricoles, exercent dans des zones rurales des activités de service comme l'agritourisme,
l'entretien des paysages, l'artisanat, etc17.
    Deux changements ont été prévus par la réforme18. Premièrement, il a été décidé de
réduire le soutien des prix des produits agricoles et des marchés agricoles, mesure
complétée par la réduction des taxes à l'importation et des subventions à l'exportation19,
l'objectif final étant de s'aligner sur les prix mondiaux et de ne maintenir à terme que
deux types d'interventions régulatrices. Ces interventions sont, d'un côté, la garantie des
prix minimums pour protéger les producteurs contre les fortes chutes de prix sur les
marchés agricoles instables, d'un autre côté les mécanismes de contrôle de l'offre20 pour
limiter la croissance de la production et lutter contre la baisse des prix réels à long


13
     Protection de l'environnement et développement du potentiel naturel des campagnes à travers le
     boisement des terres agricoles et le développement du tourisme rural.
14
     L'emploi rural, la cohésion sociale, la contribution au maintien d'un tissu social et économique rural.
15
     Commission européenne, 1997, citée par H. Delorme, La politique agricole commune. Anatomie
     d'une transition, Paris, Presses de la Fondation Nationale des Sciences Politiques, 2004, p. 12.
16
     Il représente en 2003 10% du budget agricole communautaire.
17
     H. Delorme, op. cit., pp. 22-23.
18
     Idem, pp. 19-20.
19
     La réduction des taxes à l'importation et des subventions à l'exportation est réalisée à travers l'accord
     de Marrakech de 1994, le texte fondateur de l'OMC, signé à la fin du Cycle d'Uruguay.
20
     Parmi les mécanismes de contrôle de l'offre on énumère les mesures comme le gel des terres, le
     boisement des terres agricoles, les quotas de production garantis, etc.


                                                        11
terme. Deuxièmement, les paiements directs, payés aux agriculteurs par le budget
européen et cofinancé par les budgets nationaux, ont été autorisés pour compenser la
baisse des prix de certains produits.
    Finalement, en accord avec les principes de l'OMC visant à réduire les mesures de
soutien du marché (considérés comme anticoncurrentielles, déséquilibrant le marché et
visant à accroître les revenus des agriculteurs des pays riches), la réforme de juin 2003 a
entériné une réduction des paiements directs, entrant en vigueur après juillet 200421.
Entre 2005 et 2012, les paiements directs, à l'exception de ceux destinés aux
agriculteurs des régions ultrapériphériques22, et des îles de la Mer Égée, sont réduits
chaque année: de 3% en 2005, de 4% en 2006, puis de 5% annuellement, suivant le
principe de dégressivité23. D'un autre côté, cette réduction s'est vue compensée par des
paiements uniques indépendants de la production ou de la surface (le découplage des
aides24). Ces derniers, entrés en vigueur dès 2005, sont dépendants d'objectifs
environnementaux et sociaux. La décentralisation de leur mise en œuvre implique que
ces paiements relèvent dans une grande partie de la compétence des Etats membres,
auxquels revient de décider de la date de leur application, de leur taux, de leur forme et
de l'écoconditionnalité (les prescriptions en matière de protection de l'environnement,
de sécurité alimentaire, de santé des animaux et des végétaux et du bien-être des
animaux). En outre, on permet aux Etats membres de prélever jusqu'à 20% des
paiements compensatoires des baisses de prix, au cas où les exploitants ne rempliraient
pas l'écoconditionnalité. Les fonds provenant de ces prélèvements, ainsi que les sommes
épargnées grâce à la dégressivité des paiements directs, sont destinés à financer l'entrée
en vigueur du régime de paiements uniques par exploitation. Ils peuvent également être
alloués aux mesures de développement rural (transmis au deuxième pilier de la PAC).
Pour compenser aux petites exploitations non-marchandes25 la perte due à la
dégressivité, les agriculteurs bénéficient d'une aide supplémentaire dont le montant est
calculé par les Etats membres26.


       2.2 Entrée de la Pologne dans l'Union européenne.
    La possibilité de l'élargissement de l'Union à l'Est est devenue réalité à la fin des
années 1980, après l'effondrement du socialisme et la fin de la guerre froide. L'entrée
des pays ex-communistes sur la voie de la démocratie parlementaire, de la réalisation de
l'Etat de droit, de l'économie de marché et de la reconstruction de l'autogestion
territoriale, a mis à l'ordre du jour le problème de l'élargissement de l'Union européenne
aux PECO.
    L'effondrement du communisme a provoqué dans les pays de l'Union une sorte
d'euphorie pro-européenne et le rôle de "Solidarité" dans le processus de décomposition

21
     J. Blanchet, A. Revel, L'agriculture européenne face aux enjeux internationaux, Paris, Economica,
     1999, p. 36.
22
     Départements français d'outre-mer, les Açores, Madère et les îles Canaries.
23
     http://www.europa.eu.int/scadplus/leg/fr/lvb/l11089.htm; le 22. 01. 2005.
24
     Elles ne sont en aucune manière conditionnées par une action visant à produire ou par le résultat de la
     production; cette mesure a pour objectif d'éviter les distorsions entre les producteurs.
25
     Exploitations ne commercialisant que peu ou pas du tout de leurs produits.
26
     http://www.europa.eu.int/scadplus/leg/fr/lvb/l11089.htm; le 22. 01. 2005.


                                                       12
du socialisme a contribué à la création de conditions favorables à la formation de
promesses portant sur l'élargissement de l'Union à l'Est. L'accord d'association (l'Accord
européen), signé entre ces pays et l'Union le 16 décembre 1991 à Bruxelles, a constitué
la mise en route vers l'adhésion européenne des PECO. Il portait principalement sur la
coopération commerciale, technique et industrielle27. La décision prise par le Conseil
européen d'Edimbourg en 1992 a constitué l'étape suivante, et en même temps le
premier pas vers l'officialisation du projet d'élargissement de l'Union à l'Est. La même
année, à Lisbonne, le Conseil européen a décidé d'entamer la préparation concrète de
cette accession. L'affaire a été concrétisée lors du Conseil européen de Copenhague en
juin 1993, où la disposition de l'Union à accueillir de nouveaux Etats membres a été
confirmée, en indiquant les conditions générales à remplir par ceux-ci (les critères de
Copenhague). Ils pourraient devenir membres à condition de: disposer d'institutions
stables garantissant la démocratie, la primauté du droit, les droits de l'homme et le
respect des minorités; posséder une économie de marché fiable pour supporter la
pression du marché concurrentiel de l'Union; démontrer leur capacité à assumer des
obligations, notamment de souscrire aux objectifs de l'union politique, économique et
monétaire; et d'avoir créé les bases de leur intégration à travers l'ajustement de leurs
structures de manière à ce que les législations européennes soient transposées
efficacement dans leurs législations nationales28. A la suite du Conseil européen de
Copenhague, la Pologne a posé sa candidature officielle à l'Union le 5 avril 1994.
    La prise de décision par le Conseil européen d'Essen en 1994, concernant le
"programme concret de préparation", a constitué la continuation dans cette nouvelle
direction. Dans le cadre de ce programme, des accords ont été passés avec la Pologne, la
Hongrie, la Tchéquie, la Slovaquie, la Roumanie, la Bulgarie, l'Estonie, la Lettonie, la
Lituanie et la Slovénie. En février de la même année, l'Accord européen est entré en
vigueur en Pologne, après sa ratification par les deux chambres du parlement et par le
président du pays, ainsi que par les parlements des Etats membres de l'Union et le
Parlement européen. En juillet 1997, la Commission européenne a présenté le rapport
évaluant la situation politique et économique dans les pays candidats. Sur la base de ce
rapport, le Conseil européen de Luxembourg en décembre 1997 a décidé de commencer
les négociations portant sur l'adhésion des PECO. Les négociations avec le premier
groupe, formé par les pays relativement les plus avancés, parmi lesquels la Pologne, ont
débuté en mars 199829. Durant le Conseil européen d'Athènes, le 16 avril 2003, le
processus de négociations a été couronné par la signature des Traités d'adhésion par les
dix nouveau Etats membres.
    Dans la suite du sous-chapitre, il s'agira d'examiner le processus de négociations
entre l'Union européenne et la Pologne dans le domaine de l'agriculture. Il s'agira de
savoir quelles décisions ont résulté de ces négociations en ce qui concerne les
ajustements juridiques et administratifs en Pologne. En se basant sur les résultats des
rapports intermédiaires de la Commission européenne, cette partie du travail va
présenter les étapes consécutives de la mise en œuvre des ajustements nécessaires.




27
     Il a été signé suite à la proposition de Jacques Delors, alors président de la Commission européenne,
     présentée au Parlement européen en 1990.
28
     http://europa.eu.int/comm/enlargement/intro/criteria.htm; le 26. 11. 2004.
29
     A. Jedraszko, op. cit., pp. 133-136.


                                                       13
2.2.1 Négociations Pologne-Europe pour les modalités d'application
               de la PAC.
    Les négociations entre la Pologne et l'Union européenne sur les conditions
d'intégration du pays ont débuté le 31 mars 1998 et abouti en décembre 2002. Elles ont
porté sur trente et un chapitres de l'acquis communautaire30. Il s'agissait notamment de
trouver un accord sur les conditions suivant lesquelles la Pologne adoptera, mettra en
oeuvre et appliquera l'acquis communautaire dans le domaine de l'agriculture, et sur la
possibilité de lui accorder des périodes transitoires31 pour la réalisation de ces tâches.
    Ce processus a été précédé par l'analyse de la législation polonaise vis-à-vis de la
législation communautaire. La liste des divergences qui en a résulté a constitué la base
de l'élaboration des positions prises par le gouvernement polonais en vue des
négociations32.
    Les négociations entre la Pologne et l'Europe pour les modalités de l'application de
la PAC ont débuté le 14 juin 2000 et elles ont abouti le 13 décembre 2002, c'est-à-dire
un mois avant la fin officielle des négociations. Ces longueurs sont venues de grandes
controverses suscitées par ce sujet en Pologne, pays où les enjeux agricoles ont une
grande importance. En effet, Poczta explique ces difficultés premièrement par le fait
que l'agriculture polonaise allait devenir la principale bénéficiaire des ressources du
budget européen, et deuxièmement par une grande importance économique et sociale du
secteur agricole en Pologne33.
    Avant de passer à l'examen du processus des négociations, rappelons que l'enjeu
principal de ces négociations portait sur l'application en Pologne du régime de soutien
relatif à la politique des marchés agricoles, après l'adhésion. En effet, l'agriculture
constituait un des domaines où des divergences entre les intérêts de la Pologne et ceux
de certains pays membres de l'Union se sont avérées considérables. Il s'agissait pour la
Pologne d'obtenir pour ses agriculteurs et pour ses zones rurales, l'égalité de traitement
avec les agriculteurs des autres pays de l'Union dans l'application de l'ensemble des
instruments de la PAC (aussi bien au niveau du soutien des prix, qu'à celui du soutien
des revenus et des aides structurelles).
     Les quotas de production, en particulier ceux des produits laitiers, du sucre, de
l'isoglucose, des pommes de terre et du tabac ont constitué une autre question soumise
aux négociations. En outre, la Pologne cherchait à obtenir un accord, pour les premières
années suivant l'adhésion, sur la mise en application des mécanismes de protection, au
cas où les échanges commerciaux entre ce pays et l'Union aboutiraient à des difficultés
graves sur le marché agricole polonais.
    Ainsi, dans les négociations portant sur l'agriculture, un des objectifs principaux de
la Pologne était de garantir aux agriculteurs polonais des conditions de concurrence


30
     L'ensemble des droits et des obligations communs qui lient les Etats membres de l'Union européenne;
     les pays candidats à l'adhésion doivent accepter l'acquis et mettre leur législation en conformité avec
     la législation européenne avant de rejoindre l'Union.
31
     Durant ces périodes les normes communautaires ne sont pas appliquées strictement.
32
     Il s'agit des propositions de ce pays pour trouver une solution aux divergences entre les législations
     polonaise et communautaire et déterminer un calendrier pour leur harmonisation.
33
     W. Poczta, Rolnictwo polskie w przededniu integracji z Unia Europejska, Poznan, Wydawnictwo
     Akademii Rolniczej w Poznaniu, 2003, p. 7.


                                                      14
égales à celle des agriculteurs des autres pays membres. Pour cela, il était important
d'obtenir des mécanismes garantissant la pleine utilisation des moyens financiers alloués
au pays par l'Union européenne.
    En juin 2002, la Pologne est entrée en conflit avec deux groupes de pays européens
au sujet des paiements directs34. Premièrement, elle est entrée en conflit direct avec les
pays grands producteurs agricoles, bénéficiant de subventions communautaires
importantes tels la France, l'Espagne, la Grèce, l'Irlande et le Danemark. Ce conflit
direct l'a surtout opposée à la France, qui est le plus grand producteur et exportateur de
produits agricoles de l'Union, et par là même le plus grand bénéficiaire de la PAC35.
Deuxièmement, la Pologne est entrée en conflit potentiel avec les pays étant des
contributeurs nets36 au budget agricole de l'Union comme l'Allemagne, la Grande
Bretagne, le Pays-Bas et la Suède. En exigeant la réforme de la PAC visant une
réduction graduelle des subventions pour décharger leur contribution au budget agricole
de l'Union, ils ont mis en danger les paiements directs pour les futurs pays membres,
dont la Pologne.
    A l'issue des négociations, la partie européenne a proposé à la Pologne, ainsi qu'aux
autres PECO, la mise en place de paiements directs ne constituant en 2004 que 25% de
ceux pratiqués dans les pays de l'Union européenne à quinze, et ajustés par la suite
graduellement durant les dix années consécutives: 30% en 2005, 35% en 2006, 40% en
2007, avec des augmentations de l'ordre de 10% les années successives, de manière à
atteindre 100% en 2013.
    Cette décision n'a pas été bien accueillie par les PECO. La Pologne, appuyée par la
Hongrie, la République Tchèque et la Slovaquie, a dénoncé la discrimination des
agriculteurs des pays candidats sur le marché européen. Elle y voyait le danger d'une
création de deux classes d'agriculteurs en Europe. "Les paiements directs limités d'abord
à 25% riment trop pour les Polonais avec les idées d'une Europe à «plusieurs vitesses»,
«à géométrie variable» ou «à la carte», idées qui réapparaissent depuis le début des
années 1990 dans la perspective de l'élargissement à l'Est"37.
    Pour sortir de cette situation, la Pologne a cherché à obtenir de l'Europe le
déplacement d'une partie des moyens financiers des Fonds structurels destinés au
développement rural, au profit de l'augmentation des paiements directs aux agriculteurs.
Les négociateurs européens ont donné leur accord, à condition que cette réallocation ne
dépasse pas 20% par année en moyenne. La proposition présentée par les négociateurs
européens portait également sur les compléments aux paiements directs provenant du
budget national. Grâce à cette décision, le niveau des paiements directs pourrait
atteindre 55% en 2004, 60% en 2005, 65% en 2006 et 70% en 2007, avec une
augmentation de l'ordre de 10% dans les années consécutives, pour atteindre les 100%




34
     A. Jedraszko, op. cit., pp. 308-309.
35
     L'égalité des droits pour les agriculteurs des pays candidats signifierait pour la France la renonciation
     à une partie des subventions, proposition à laquelle elle s'est fermement opposée.
36
     Les pays qui versent dans le budget agricole commun plus qu'ils ne reçoivent.
37
     W. Prazuch, «La situation de l'agriculture polonaise et ses perspectives dans l'Union européenne», in
     J.-M. de Waele, La Pologne et l'intégration européenne, Bruxelles, Editions de l'Université de
     Bruxelles, 2003, p. 149.


                                                       15
en 2010. Dès 2007, la Pologne aurait également le droit de compléter les paiements
directs à concurrence de 30% au-dessus du niveau annuel préétabli38.
    La Pologne a adopté, pour une période de trois ans (éventuellement prolongeable
pour deux années supplémentaires), un système de paiements directs proportionnel à la
surface des exploitations39.
    Une autre décision qui a résulté du processus des négociations porte sur la
possibilité de conserver les aides étatiques au secteur agricole auxquelles la Pologne
avait recours avant l'adhésion et qui n'ont pas d'équivalent dans les nouveaux
instruments d'aide mis en place à l'occasion de l'adhésion européenne du pays.
    De même, la proposition de la Pologne, concernant la clause de protection du
marché agricole durant les premières années après l'adhésion, a également été acceptée
par les négociateurs européens, malgré son rejet initial en vertu de son non-respect du
principe de libre-échange des marchandises à l'intérieur de l'Union.
    En outre, suite aux négociations avec la Pologne, la partie européenne a décidé
d'augmenter l'aide supplémentaire aux exploitations non-marchandes (à hauteur de 1250
euros par année, pour une période de trois à cinq ans). Une autre décision a porté sur
une période transitoire de cinq ans accordée à la Pologne pour la création de
groupements de producteurs, accompagnée du support financier européen pour la
réalisation de cette tâche. De plus, la Pologne s'est vue accorder une assistance
financière pour appuyer les investissements dans les exploitations agricoles marchandes
(investissements visant à conformer ces exploitations aux standards de l'Union), ainsi
que pour appuyer l'aide technique, l'amélioration du marketing des produits agricoles et
l'appui aux services du conseil agricole40.
    En ce qui concerne les quotas de production accordés à la Pologne, le pays a été
obligé de réduire sa production laitière de manière considérable. Le quota de 9,38
millions de tonnes qui lui a été accordé, reste inférieur à la proposition de la Pologne qui
voulait un quota de 11,22 millions de tonnes pour 2003, quota qui aurait dû s'accroître
pour atteindre 13,74 millions de tonnes en 2008. Ce quota permet de satisfaire la
demande intérieure actuelle. Néanmoins, face à une augmentation inéluctable de la
demande dans l'avenir, le pays sera obligé d'importer du lait et des produits laitiers, et
ce, alors même que ce besoin pourrait être satisfait grâce à son potentiel productif
actuel. L'inflexibilité de l'Union dans ce domaine qui, avec le sucre, constitue un des
domaines-clés de la production polonaise, a été dictée par le problème de surproduction
de lait auquel l'Europe est confrontée depuis plusieurs décennies. En ce qui concerne le
quota de production du sucre, il avoisine 1,67 millions de tonnes (contre 1,87 millions
dans la proposition polonaise). Toutefois, la proposition polonaise d'augmenter le quota
de sucre bénéficiant de subventions à l'exportation a été rejetée (91,9 mille tonnes
contre 216 mille proposées par la Pologne). Le quota de production de l'isoglucose a été
fixé à 26,8 mille tonnes (contre 20 mille proposées par la Pologne), et celui des pommes
de terre à 145 mille tonnes (contre 260 mille dans la proposition polonaise). En ce qui



38
     http://www.cie.gov.pl/WWW/serce.nsf/0/C007A3BC59E8BC62C1256E84002E9DFF?Open&restric
     ttocategory=Obszary%20tematyczne%3Erolnictwo; le 22. 10. 2004.
39
     Indépendamment du niveau de production et sans tenir compte de la nature des productions.
40
     http://www.cie.gov.pl/WWW/serce.nsf/0/C007A3BC59E8BC62C1256E84002E9DFF?Open&restric
     ttocategory=Obszary%20tematyczne%3Erolnictwo; le 22. 10. 2004.


                                                     16
concerne le quota de production du tabac, il a été arrêté à 37,9 mille tonnes (contre 70
mille proposées par la Pologne)41.
    Pour les céréales et les oléagineux42, la surface d'exploitation qu'il a été décidé de
subventionner par les paiements directs après l'adhésion de la Pologne a été fixée à 9,45
millions d'hectares pour la Pologne, et le rendement maximum de référence pour cette
surface, selon le même principe, à trois tonnes par hectare43. La première limite est
assez proche de la proposition de la Pologne (9,24 millions d'hectares), alors que la
deuxième se révèle inférieure aux aspirations polonaises (3,6 tonnes par hectare).
    En ce qui concerne le nombre total de têtes d'élevage ayant droit aux paiements
directs, les négociateurs européens se sont opposés au projet polonais de développement
de l'élevage animalier en Pologne après l'adhésion européenne, en particulier en ce qui
concerne les vaches allaitantes (326 mille animaux contre 1 million 500 proposés par la
Pologne). Cette décision a probablement résulté de l'instabilité que connaît le marché
européen de la viande bovine depuis les années 1970, problème qui a été aggravé dans
les années 1990 en raison de la maladie de la vache folle44,45.


          2.2.2 Nouvelle situation juridique et administrative de la Pologne.
    Comme les autres pays candidats, la Pologne a engagé des efforts considérables dès
le début du processus des négociations, pour parvenir à intégrer l'acquis communautaire.
Les ajustements dans ce cadre ont été concentrés sur deux domaines: l'harmonisation
juridique et la création de structures administratives adaptées.
    En ce qui concerne les ajustements dans le domaine juridique, la Pologne a dû
élaborer et mettre en œuvre un programme national d'harmonisation des lois avec la
législation communautaire. Cela a généré un foisonnement de nouvelles lois dans des
domaines comme la libre circulation des biens, les marchés publics, les assurances ou la
propriété intellectuelle46.
    Ainsi, dans sa position initiale pour les négociations, la Pologne s'est engagée à
réaliser les ajustements juridiques et institutionnels pour garantir l'harmonisation de la
loi polonaise à la loi européenne dans le domaine vétérinaire et phytosanitaire47. Ces
ajustements concernaient des questions comme le système de contrôle vétérinaire et
phytosanitaire à la frontière avec les pays non-membres de l'Union; le système de


41
     A. Czyzewski, B. Czyzewski, A. Henisz, Rolnictwo polskie w Unii Europejskiej. Wyniki negocjacji
     akcesyjnych, Poznan, Wydawnictwo Akademii Ekonomicznej w Poznaniu, 2003, pp. 8-9.
42
     Les plantes cultivées pour leurs graines ou leurs fruits riches en lipides, dont on tire des huiles
     alimentaires ou industrielles; dans l'exemple cité, il s'agit principalement du colza.
43
     Rada Ministrow, Raport na temat rezultatow negocjacji o czlonkostwo Rzeczypospolitej Polskiej w
     Unii Europejskiej, Warszawa, grudzien 2002.
44
     J. Rowinski, «Stanowisko negocjacyjne Polski w rokowaniach o członkostwo w Unii Europejskiej.
     Problemy gospodarki zywnosciowej», Problemy integracji rolnictwa, Unia Europejska-Polska
     Biuletyn Informancyjny, n°2 [18], 2000, pp. 17-19.
45
     A. Czyzewski et al., op. cit., p. 9.
46
     Dans les années précédant l'accession européenne, la Pologne a adopté en moyenne cent lois
     d'adaptation à la législation communautaire par an.
47
     Relatif aux soins à donner aux plantes, à leur protection contre les ennemis naturels.


                                                        17
sécurité des aliments; les standards vétérinaires et phytosanitaires des aliments; les
conditions sanitaires, hygiéniques et techniques pour la transformation des produits
alimentaires; la création d'un système d'enregistrement et d'identification des animaux;
le système de surveillance des maladies contagieuses des animaux ou l'utilisation des
sous-produits animaliers48.
    A titre d'exemple, dans le cadre de la réalisation des engagements en vue de
l'adhésion, le parlement polonais a voté en juillet 2001 une loi vétérinaire, qui portait
sur la lutte contre les maladies contagieuses des animaux, sur les examens des animaux
d'abattage et de la viande, ainsi que sur le métier de médecin et les cabinets médico-
vétérinaires en Pologne49. Dans la même période, il a également voté une loi relative
aux conditions sanitaires des aliments et une loi concernant la manière de nourrir les
animaux.
    Des périodes transitoires ont été accordées à la Pologne pour l'ajustement structurel
des entreprises de transformation des aliments. Ainsi, le délai d'application de tous les
standards européens pour le lait et les produits laitiers polonais a été fixé à fin 2006
pour les entreprises de production ou de transformation du lait. En ce qui concerne la
viande, ce délai a été fixé à fin 2007. D'ici là, les produits issus de ces entreprises ne
pourront être commercialisés que sur le territoire polonais.
    De même, des périodes transitoires ont été décidées dans le domaine phytosanitaire
en ce qui concerne l'utilisation de certains pesticides (fin 2006) et la culture de certaines
espèces de pommes de terre (fin 2014).
    Les ajustements administratifs concernaient particulièrement la création des
structures chargées d'appliquer les mesures communautaires dans le domaine agricole.
Pour ce faire, la Pologne a entamé la mise en place du Système Intégré de Gestion et de
Contrôle (Integrated Administration and Control System: IACS) pour la gestion des
projets de développement et la surveillance des ressources financières transmises par
l'Union européenne. Ce système à pour but de veiller à ce que les aides parviennent aux
destinataires et d'éviter toute tentative de tromperie de leur part, et ce pour que la
distribution des financements soit efficace et équitable. La création de ce centre de
gestion était une condition nécessaire à l'obtention des paiements directs et des
financements pour le développement des zones rurales. Ce système, dont les débuts
remontent à 1999 devrait prendre sa forme définitive vers 2007, c'est-à-dire trois ans
après l'entrée du pays dans l'Union.
   Dans ce cadre, deux institutions, l'Agence du Marché Agricole et l'Agence de la
Restructuration et de la Modernisation de l'Agriculture, ont été créées comme agences
de paiement, pour gérer la distribution et le contrôle des fonds européens destinés aux
zones agricoles50.




48
     Rada Ministrow, Raport na temat rezultatow negocjacji o czlonkostwo Rzeczypospolitej Polskiej w
     Unii Europejskiej, Warszawa, grudzien 2002, pp. 19-21.
49
     La nouvelle loi est un amendement des lois de 1997 et 1990, portant sur les mêmes questions.
50
     http://www.cie.gov.pl/WWW/serce.nsf/0/C007A3BC59E8BC62C1256E84002E9DFF?Open&restric
     ttocategory=Obszary%20tematyczne%3Erolnictwo; le 22. 10. 2004.


                                                      18
2.2.3 Résultats des rapports évaluatifs de la Commission
               européenne.
    Tout au long du processus des négociations, l'avancement des ajustements dans
différents pays candidats a fait l'objet de rapports annuels préparés par la Commission
européenne. L'objectif de ces rapports était d'évaluer les capacités de ces pays à
reprendre et à mettre en œuvre l'acquis communautaire. Des conclusions ont été tirées
sur la base d'examens portant sur l'état de la législation et de l'administration du pays
concerné.
    En ce qui concerne les progrès réalisés par la Pologne, dont ceux relatifs au domaine
agricole, la première évaluation date de juillet 199751. Le rapport a souligné les
améliorations significatives réalisées en matière d'alignement sur l'acquis
communautaire. Néanmoins, il estimait que le pays devait encore renforcer ses efforts
en la matière.
   Un autre rapport de novembre 1998 avait abouti à des conclusions similaires,
mettant l'accent sur la nécessité de poursuivre la réalisation des ajustements. Dans ce
cadre, le rapport encourageait surtout le renforcement des efforts pour la politique de
développement rural et la restructuration de l'industrie agroalimentaire, avec comme
objectif la modernisation des installations vétérinaires et phytosanitaires.
    Le rapport d'octobre 1999 rejoignait les rapports de 1997 et 1998, en soulignant
encore le retard de la Pologne au niveau des ajustements institutionnels et de l'adoption
d'une politique et d'un programme de restructuration de l'agriculture.
    Toujours dans le cadre des ajustements dans le domaine agricole, le rapport de
novembre 2000 rappelait que des efforts considérables restaient à accomplir au niveau
légal et institutionnel. Notamment, le rôle des institutions responsables de la distribution
et du contrôle des ressources financières en provenance de l'Union européenne restait à
définir. Il fallait encore appliquer des stratégies de commercialisation des produits,
connecter la Pologne au réseau d'information comptable agricole, aligner la législation
polonaise sur l'acquis communautaire en ce qui concerne la gestion des marchés
agricoles et aligner la législation sur l'acquis communautaire en matière phytosanitaire
et vétérinaire.
    Le rapport de novembre 2001, estimait que la Pologne avait accompli des progrès
considérables pour adopter les mécanismes communautaires dans le domaine agricole,
en soulignant la nécessité de poursuivre ses efforts.
    Ensuite, le rapport d'octobre 2002 reconnaissait les progrès réalisés par la Pologne
dans le domaine législatif52. Néanmoins, il soulignait la nécessité d'améliorer la situation
administrative, ainsi que la législation vétérinaire. Il a également souligné trois
domaines où des déficiences institutionnelles ont été observées: l'agriculture, le contrôle
de la nourriture et la protection de l'environnement. Par conséquent, pour remplir les
conditions d'accession à l'Union européenne, la Pologne devait augmenter d'environ
15% le nombre de fonctionnaires ayant une bonne préparation professionnelle. En



51
     Tous les rapports décrits dans cette section du travail, c'est-à-dire jusqu'à 2001 compris, se trouvent
     résumés dans la référence: http://www.europa.eu.int/scadplus/leg/fr/lvb/e04106.htm; le 28. 10. 2004.
52
     A. Jedraszko, op. cit., pp. 224-225. Traite des rapports 2002 et 2003 de la Commission européenne.


                                                      19
chiffres, cela aurait représenté dix-huit mille employés qui auraient dû être embauchés
sur concours.
    Selon le rapport de novembre 2003, l'état de l'adaptation de la loi polonaise à la loi
européenne pouvait être considéré comme avancé, même si des efforts restaient à
réaliser dans plusieurs domaines. La grande majorité des lois communautaires se
trouvait intégrée dans la législation polonaise.


       2.3 Application de la PAC et de la politique structurelle
           européenne en Pologne d'un point de vue pratique.
    Avec l'entrée de la Pologne dans l'Union européenne le 1er mai 2004, le système
d'intervention sur le marché agricole polonais a été remplacé par les solutions
appliquées sur le marché communautaire. Parallèlement a été introduit en Pologne le
système des paiements directs aux agriculteurs en fonction de la surface d'exploitation.
Avec pour objectif l'appui à la restructuration et à la modernisation du secteur agricole,
les programmes pour les années 2004-2006, mis en place par le Ministère de
l'Agriculture et du Développement Rural, ont démarré53. Ainsi ont vu le jour le
«Programme Opérationnel Sectoriel Restructuration et Modernisation du Secteur
Alimentaire et Développement de Zones Rurales»54 et le «Plan de Développement des
Zones Rurales»55.
    Dans la suite du sous-chapitre, il s'agira de présenter les aspects de la politique de
développement rural dans le cadre de la PAC et de la politique structurelle européenne.
Les mesures de la nouvelle politique agricole communautaire seront également
analysées, notamment quant à leur rôle pour l'intégration de l'agriculture polonaise au
marché communautaire. Pour cela, cette partie du travail examinera l'assistance de
l'Europe pour l'ajustement de l'agriculture polonaise à travers les Fonds de pré-
accession, les paiements directs aux agriculteurs et les Fonds structurels.


         2.3.1 Aspects du développement rural dans le cadre des instruments
               traditionnels de la PAC.
    Dans le cadre des préparatifs pour l'élargissement de l'Europe aux PECO et pour le
nouveau cycle des négociations à l'OMC, une nouvelle politique de développement
rural durable a été initiée par l'Union européenne le 1er janvier 2000. Pour répondre aux
nouvelles demandes en matière de fonction sociale de l'agriculture (principalement
après l'intégration des PECO, ayant une économie reposant essentiellement sur le
secteur agricole), l'objectif de promotion de la durabilité et de la multifonctionnalité de
l'agriculture est devenu prioritaire pour l'avenir des zones rurales européennes.




53
     W. Olejniczak, «Agencja Rynku Rolnego - agencja platnicza», Biuletyn Informacyjny Agencji Rynku
     Rolnego, n°4, kwiecien 2004, p. 4.
54
     Ministerstwo Rolnictwa i Rozwoju Wsi, Sektorowy Program Operacyjny Restrukturyzacja i
     Modernizacja Sektora Zywnosciowego oraz Rozwoj Obszarow Wejskich, 2003.
55
     Ministerstwo Rolnictwa i Rozwoju Wsi, Plan Rozwoju Obszarów Wiejskich na lata 2004-2006,
     marzec 2004.


                                                   20
La politique de développement rural durable supposait un lien proche entre les
instruments traditionnels de la PAC et les mesures de développement rural. Pour réaliser
les objectifs assignés à cette nouvelle politique, on cherchait surtout à: améliorer les
exploitations agricoles; assurer la sécurité et la qualité des produits alimentaires;
garantir des revenus équitables et stables pour les agriculteurs; protéger
l'environnement; réaliser des activités complémentaires ou alternatives créatrices
d'emploi pour freiner l'exode rural et renforcer le tissu économique et social des
campagnes; améliorer les conditions de vie et de travail dans les zones rurales; assurer
une égalité de chances aux habitants des zones rurales par rapport aux habitants des
milieux urbains56.
    Ainsi, la politique structurelle de développement rural fait partie intégrante de la
nouvelle PAC, constituant un deuxième pilier de celle-ci, à côté des instruments
traditionnels de la PAC.
     Dans le premier pilier, traditionnel, de la nouvelle PAC il y a: les mesures de
régulation (la mise en place de l'organe d'intervention, les principes de la compétitivité
et les principes du commerce extérieur) et la politique des prix (la mise en place des
prix minimums et le fonds pour le paiement des prix garantis)57. Ces instruments
d'intervention sont soit internes, soit externes. Les premiers ont pour but de contrôler
l'offre sur le marché intérieur. Ces instruments sont, par exemple, les prix d'intervention
(le prix minimum pour un produit sur le marché intérieur, prix auquel l'Etat achète aux
agriculteurs, lors d'un achat d'intervention, les produits qu'ils n'ont pas réussi à
commercialiser à un prix plus élevé sur le marché libre), les achats d'intervention, le
stockage des surplus dans les périodes d'intensification de l'offre ou les quotas de
production. Le rôle des instruments externes est notamment de protéger le pays contre
l'importation des produits meilleur marché provenant de pays non-membres de l'Union.
Il s'agit là de mesures comme les taxes à l'importation, les contingents, les normes
techniques et sanitaires pour les produits importés. A ces instruments externes s'ajoutent
également les subventions à l'exportation.
   Les réformes de la PAC réalisées sous la pression du cycle des négociations au
GATT, puis à l'OMC, ont eu pour conséquence la limitation de cette intervention sur le
marché, au profit des paiements directs aux agriculteurs. Dans le cadre du Cycle
d'Uruguay, les paiements directs n'ont pas été classés comme faisant partie de «la boîte
orange» (c'est-à-dire forme de support à l'agriculture pouvant entraîner des distorsions
aux échanges commerciaux), ce qui aurait signifié l'obligation de réduire les paiements
de 20% aux cours des six années à venir58. Toutefois, ils n'ont pas non plus été définis
comme mesures appartenant à «la boîte verte», c'est-à-dire considérés comme n'ayant
pas d'effet sur les échanges. Le fait que les paiements directs ont été classés comme
appartenant à «la boîte bleue» signifie qu'ils sont perçus comme admis
conditionnellement, uniquement s'ils sont en rapport avec l'objectif de limitation de la
production, d'où l'obligation de mise en jachère de terres agricoles59, et si leur montant

56
     http://www.europa.eu.int/scadplus/leg/fr/lvb/160006.htm; le 27. 10. 2004.
57
     A. Kowalski, «Ewolucja Wspolnej Polityki Rolnej», Biuletyn Informacyjny Agencji Rynku Rolnego,
     n°4, kwiecien 2004, p. 56.
58
     W. Guba, W. Piskorz, Implikacje reform Wspolnej Polityki Rolnej Unii Europejskiej dla Polski,
     Warszawa, Urzad Komitetu Integracji Europejskiej, 2002, pp. 47-49.
59
     Terre non cultivée temporairement pour permettre la reconstitution de la fertilité du sol ou, comme
     dans le cas présent, pour limiter une production jugée trop abondante.


                                                      21
est lié à la surface de base de la production, la récolte référentielle et le nombre total des
animaux étant constants.
    Grâce à la réforme de 2003, un paiement unique, découplé de la production,
commence à entrer en vigueur le 1er janvier 200560. Ainsi, la pression des négociations
commerciales multilatérales a contribué au changement des objectifs assignés aux
paiements directs. Elle a été un des facteurs à l'origine du déplacement du centre de
gravité du soutien agricole européen de la production (excessif au sein de l'Union) vers
la restructuration de l'agriculture et le développement rural61.
    La deuxième raison de ce changement a résulté des revendications de l'opinion
publique après le fléau des maladies animales (la vache folle, la fièvre aphteuse) et la
contamination des viandes (les poulets à la dioxine), portant sur l'abandon du support à
la production intensive au profit de méthodes de production saines et soucieuses de
l'environnement. Les mesures de développement rural durable devraient pouvoir aider à
la réalisation de ces objectifs, grâce aux programmes agro-environnementaux et à la
limitation des pesticides et des engrais minéraux dans la production agricole.
    La troisième raison du déplacement du centre de gravité de la production vers la
restructuration de l'agriculture et le développement des zones rurales, a été l'intention de
freiner l'exode des populations rurales de l'Europe vers les villes. Dans ce sens, les
fonds destinés au développement rural durable ont pour objectif la protection du
patrimoine culturel et du paysage des zones rurales européennes.


         2.3.2 Aspects du développement rural dans le cadre de la politique
               structurelle européenne.
    En ce qui concerne la politique structurelle européenne de développement rural,
deuxième pilier de la nouvelle PAC, elle propose deux catégories de mesures62.
Premièrement, il y a les mesures d'accompagnement à la réforme de 1992 parmi
lesquelles: la préretraite, les programmes agro-environnementaux, le boisement des
terres agricoles et le régime concernant les zones défavorisées. Deuxièmement, il y a les
mesures de modernisation et de diversification des exploitations agricoles comme
l'investissement dans les exploitations, l'installation de jeunes agriculteurs, la formation,
le soutien des investissements dans les installations de transformation et de
commercialisation, l'aide complémentaire à la sylviculture63, la promotion et la
reconversion de l'agriculture.

60
     Cette entrée en vigueur en 2005 concernait dix pays de l'Europe à quinze: l'Autriche, la Belgique, le
     Danemark, l'Allemagne, l'Irlande, l'Italie, le Luxembourg, le Portugal, la Suède et le Royaume-Uni.
     La Finlande, la France, la Grèce, les Pays-Bas et l'Espagne devraient appliquer ce régime en 2006,
     Malte et la Slovénie en 2007. Quant aux huit autres nouveaux États membres, ils devraient le mettre
     en place au plus tard à partir de 2009. A cette date, la réforme aura réduit les mesures de la «boîte
     orange» de 70% par rapport au niveau de 1992. Ce passage des aides de l'Union européenne de la
     «boîte orange» à la «boîte bleue» et à la «boîte verte» signifiera également un transfert plus efficace
     des aides aux agriculteurs et une plus grande transparence des diverses mesures de soutien;
     http://www.delcan.cec.eu.int/fr/press_and_information/speeches/2003/2003-12-11.shtml; le 29. 11.
     2004.
61
     W. Guba, W. Piskorz, op. cit. p. 52.
62
     http://www.europa.eu.int/scadplus/leg/fr/lvb/160006.htm; le 27. 10. 2004.
63
     Entretien et exploitation des forêts.


                                                      22
Au Sommet de Berlin le 24 et le 25 mars 1999 une révision des aides structurelles a
été décidée, pour concentrer les efforts en direction des régions en difficulté. Ainsi, les
Fonds structurels européens (généraux, et non pas seulement ceux dans le cadre de la
PAC) pour la période 2000-2004 se sont concentrés sur trois objectifs64. Le premier
objectif, accaparant 70% du budget, vise le soutien au développement des régions ayant
un PIB par habitant inférieur à 75% de la moyenne communautaire. Le deuxième
objectif, qui représente 11,5% du budget, est l'assistance à la reconversion des zones en
mutation économique et à la diversification des activités dans les zones rurales et les
zones urbaines en difficulté. Le troisième objectif (employant 18,5% du budget) touche
l'adaptation et la modernisation des politiques et des systèmes d'éducation, de formation
et d'emploi.
    Les actions dans le cadre de l'aide structurelle sont menées en partenariat entre la
Commission européenne et les Etats membres (l'autorité nationale, régionale, locale et
les partenaires socio-économiques). Ainsi les aides de l'Union viennent seulement en
complément des aides nationales, régionales et locales, selon le principe d'additionnalité
des fonds. En effet, par ce principe, l'Europe pose comme condition que, pour obtenir
un fond communautaire, le pays doit engager des fonds propres venant s'y ajouter.
   Dans le cadre du deuxième pilier de la PAC, l'Union européenne influe sur les
changements structurels dans différents pays membres à travers quatre Fonds structurels
communautaires65.
    Le Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA) est destiné à la
modernisation de l'agriculture et au développement rural pour assurer le développement
durable du secteur et contribuer à réduire les disparités entre les zones rurales et
urbaines de l'Europe. Créé en 1962, il constitue le budget agricole de l'Union
européenne. Pour une meilleure gestion des actions qu'il finance, le fonds a été divisé en
deux sections visant deux buts distincts: une section de garantie, à travers le soutien des
marchés agricoles, et une section d'orientation, contribuant au développement rural
(cette dernière section étant seule considérée comme Fonds structurel).
    La section orientation du FEOGA s'est vue attribuer trois fonctions principales. Elle
doit tout d'abord financer les investissements favorables au développement rural, c'est-
à-dire promouvoir le développement et l'ajustement structurel des régions en retard de
développement66. Ensuite, elle a pour fonction de financer les projets menés dans le
cadre de l'initiative européenne67 LEADER+ (qui sera abordée plus en détail ci-après)
pour le développement rural. Enfin, elle doit financer les actions spécifiques portant sur
des régions ou des secteurs particuliers: les projets de démonstration, les transferts de
savoir-faire et les études financés directement par l'Union européenne, avec l'appui des
autorités nationales.

64
     http://www.info-europe.fr/europe.web/document.dir/fich.dir/qr000164.htm, le 27. 10. 2004.
65
     http://www.info-europe.fr/europe.web/document.dir/fich.dir/qr000924.htm, le 27. 10. 2004.
66
     La promotion de la qualité des produits agricoles et agroalimentaires; l'amélioration des
     infrastructures rurales; la rénovation et le développement des villages, la protection du patrimoine
     rural et de l'environnement; les activités liées à l'exploitation forestière; la recherche et le
     développement des technologies agricoles et sylvicoles; la formation professionnelle; l'amélioration
     des conditions de vie.
67
     Les initiatives européennes constituent des programmes spécifiques à travers lesquels la Commission
     européenne cherche à résoudre les problèmes ayant un impact au niveau européen sur le
     développement rural, le chômage des jeunes, etc.


                                                     23
Le FEOGA est coordonné par la Commission européenne et la Direction Générale
de l'Agriculture. A l'intérieur de chaque pays membre, les autorités nationales
compétentes en partenariat avec la Commission européenne organisent la sélection des
projets et gèrent les crédits du fonds. Le suivi et l'évaluation de cette action est assuré
par les Comités de suivi, composés des représentants aux niveaux régional, national et
communautaire. Des évaluations ont lieu ex ante, à mi-parcours et ex post. En ce qui
concerne le budget du FEOGA pour les années 2000-2006, selon les décisions prises
durant le Sommet de Berlin, environ 4,3 milliards d'euros seront alloués chaque année
aux mesures de développement rural, c'est-à-dire à la section orientation du fonds.
    Comme il a été mentionné dans l'exemple du FEOGA, les Fonds structurels rendent
possible la réalisation des initiatives communautaires. Au Sommet de Berlin, le nombre
des initiatives communautaires a été fixé à quatre, parmi lesquelles l'initiative
LEADER+. Cette initiative, prévue pour la période 2000-2006 et disposant d'un budget
de 2 milliards 20 millions d'euros68, a pour but la diversification des activités
économiques des territoires ruraux selon une approche décentralisée. Elle est composée
de trois volets. Le premier volet est relatif à la mise en place de stratégies locales de
développement rural innovantes, intégrées et participatives, ayant un caractère pilote69.
Le deuxième volet est lié à la coopération entre les territoires ruraux à l'intérieur d'un
pays membre, la coopération transnationale à l'intérieur de l'Union ou la coopération
transnationale avec un territoire hors de l'Union70. Le troisième volet vise la mise en
réseau des zones rurales dans le cadre de l'Observatoire européen des zones rurales71.


         2.3.3 Assistance de l'Union européenne pour l'ajustement de
               l'agriculture polonaise.
    Le «Plan de Développement des Zones Rurales» et le «Programme Opérationnel
Sectoriel Restructuration et Modernisation du Secteur Alimentaire et Développement
des Zones Rurales» ont été mis en place par le Ministère de l'Agriculture et du
Développement des Zones Rurales avec l'entrée de la Pologne dans l'Union européenne
le 1er mai 2004. Ils définissent la direction donnée au développement des zones rurales
en Pologne pour les années 2004-2006. Le premier s'inscrit dans le cadre de la PAC et
constitue le fondement de l'implémentation en Pologne du modèle européen
d'agriculture et de développement durable des zones rurales. Quant au deuxième, il fait
partie de la politique structurelle communautaire et a la tâche de faciliter l'adaptation du
secteur agroalimentaire polonais au marché européen grâce à l'amélioration de la
qualité, de la compétitivité et du marketing des produits72.


68
     http://www.europa.eu.int/scadplus/leg/fr/lvb/g24208.htm, le 27. 10. 2004.
69
     Programme de développement original, sous forme de test grandeur nature, éventuellement
     transférable par la suite à d'autres régions et ayant pour but, par exemple, de valoriser et de diversifier
     les ressources locales, de développer les petites et les moyennes entreprises, de développer l'artisanat
     et le tourisme, de protéger l'environnement, de maintenir et de développer les services, etc.
70
     Cela concerne la réalisation des projets communs à des acteurs locaux d'un ou de plusieurs Etats, à la
     recherche de complémentarité et d'une critique objective venant du partenaire.
71
     L'objectif visé est la transmission des informations, la stimulation de la coopération, l'échange de
     l'expertise et la diffusion des bonnes pratiques.
72
     K. Piekut, «Kierunki rozwoju obszarow wiejskich w latach 2004-2006 po przystapieniu Polski do
     Unii Europejskiej», Wiadomosci melioracyjne i lakarskie, n°4, 2003, pp. 175-179.


                                                        24
Pour la réalisation de ces deux programmes, la Pologne s'est vue accorder l'accès à
différentes sources de financement, parmi lesquelles les Fonds de pré-adhésion, les
paiements directs et les Fonds structurels.

     Les Fonds de pré-adhésion.

    Au 1er mai 2004, la Pologne et les autres PECO candidats devaient être prêts pour
mettre en œuvre les politiques et les réglementations communautaires. Pour que cette
tâche complexe (en raison du volume de l'acquis communautaire et de la nécessité de
préparer les structures administratives pour son application) puisse être accomplie,
l'Union européenne à quinze a mis à disposition de ces pays des aides financières
considérables pour la période de la pré-accession.
    Le «Poland and Hungary Assistance for the Reconstruction of the Economy»
(PHARE) a été le premier programme d'assistance de l'Union européenne ciblé sur les
PECO, en place depuis la chute du Mur de Berlin en 198973. Destiné initialement à
apporter le support matériel et technique (sous la forme d'un service de conseil, de
formations et de transfert de savoir-faire) à une transformation de l'économie socialiste
en économie de marché, il a été réorienté en 1998 pour servir de fonds financier pour la
préparation de la Pologne à l'adhésion européenne, en soutenant la mise en place des
institutions et l'amélioration des capacités de l'administration étatique et ce, également
dans le domaine de l'agriculture. Son étendue, dans la première phase limitée à la
Pologne et à la Hongrie, a été élargie par la suite aux autres PECO candidats à
l'adhésion européenne. Il a servi également au développement régional, avec l'objectif
de diminuer les inégalités entre les régions et de favoriser la cohésion socio-économique
du pays à travers la promotion de l'activité économique, la création de nouvelles places
de travail et la mise en place d'infrastructures.
    Les objectifs du programme PHARE ont été indiqués dans le document de l'Union
européenne intitulé «Le partenariat pour l'adhésion». Dans la période entre 1990 et
1997, à côté de la restructuration et la privatisation de l'industrie, du développement des
entreprises, de la promotion des exportations et du support pour le développement
régional, les objectifs à réaliser portaient également sur le développement de
l'agriculture et des zones rurales. Dès 1998, des dépenses plus importantes ont été
prévues pour la préparation de l'intégration européenne du pays (voir tableau ci-
dessous).
           Sommes allouées à la Pologne dans le cadre du programme PHARE74.
       Année         Montant total          Somme pour le secteur            Pourcentage pour le
                    [en millions d'euros]   agricole [en millions d'euros]     secteur agricole
        1998              64,7                          7,5                         11,6 %
        1999              213,5                        27,6                         12,9 %
        2000              484,4                        43,6                           9,0 %
        2001              468,5                        32,9                           7,0 %
        2002                -                           35                             -



73
     Ministerstwo Rolnictwa i Rozwoju Wsi, Sektorowy Program Operacyjny Restrukturyzacja i
     Modernizacja Sektora Zywnosciowego oraz Rozwoj Obszarow Wejskich, 2003, p. 56-59.
74
     Idem, p. 58.


                                                         25
Dans l'analyse des Fonds de pré-adhésion pour la Pologne, une attention particulière
devrait être consacrée au programme opérationnel «Special Accession Programme for
Agriculture and Rural Development» (SAPARD)75, programme sectoriel mis en place
comme instrument particulier pour l'adaptation de l'agriculture (destiné exclusivement
au développement des zones rurales et de l'agriculture).
    Pour faciliter l'adoption de l'acquis communautaire et pour préparer l'agriculture et
les habitants des zones rurales aux défis posés par l'intégration européenne, trois
objectifs ont été assignés au programme SAPARD. Le premier visait l'amélioration de
la compétitivité de l'agriculture et de la transformation agroalimentaire sur le marché
intérieur et les marchés externes. Le deuxième objectif concernait l'ajustement du
secteur agroalimentaire aux exigences du marché unique dans le domaine sanitaire, le
domaine de l'hygiène et de la qualité. Finalement, le troisième objectif concernait la
stimulation du développement multifonctionnel des zones rurales, à travers le
développement des infrastructures techniques et la mise en place des conditions
permettant de développer des activités économiques alternatives dans les campagnes.
    Pour atteindre ces objectifs, la réalisation de six tâches était nécessaire:
l'amélioration de la transformation et du marketing des produits agricoles; les
investissements dans les exploitations agricoles; le développement et l'amélioration des
infrastructures des zones rurales; la diversification de l'activité économique dans les
zones agricoles; le développement des formations professionnelles; la mise en place des
aides techniques.
    Il visait également la préparation de la Pologne en vue de l'adoption de l'acquis
communautaire relatif à la PAC, en particulier en ce qui concerne la bonne utilisation
des Fonds structurels après l'accession en mai 2004 grâce à la création des agences de
paiements nationales. En raison de la faible préparation de ces institutions pour affronter
les nouveaux défis (malgré plusieurs années de préparatifs), la mise en oeuvre du
programme SAPARD en Pologne, prévue pour l'année 2000, n'a débuté que le 2 juillet
2002. A cette date seulement, la Commission a pris la décision de transférer à la
Pologne la compétence de la gestion des ressources financières dans le cadre du
programme et donc, par cela, reconnu la préparation des structures polonaises pour sa
réalisation.
    Ce retard dans la prise de décision par la Commission européenne pourrait
s'expliquer par le système de gestion des ressources allouées à la Pologne dans le cadre
du programme SAPARD76. Contrairement à la gestion des ressources transmises au
pays dans le cadre d'autres programmes, celle des ressources allouées dans le cadre du
SAPARD se caractérise par une décentralisation totale, le gouvernement polonais en
étant le seul responsable. C'est l'Agence de la Restructuration et de la Modernisation de
l'Agriculture qui concentre les décisions d'accorder ou non les financements pour les
projets relatifs au programme.
     Parmi les bénéficiaires potentiels de l'aide financière dans le cadre du programme
SAPARD, on énumère: les administrations locales pour les investissements destinés à
l'infrastructure des zones rurales77; les entrepreneurs et les groupements de producteurs

75
     Idem, pp. 59-60.
76
     J. Banski, European Union pre-accession aid in the development of Poland's rural areas, Rzeszow,
     Rozprawy i Monografie Wydzialu Ekonomicznego Uniwersytetu Rzeszowskiego, 2002, pp. 1-7.
77
     Cela concerne tout le territoire du pays, à l'exception des villes de plus de 5 mille habitants.


                                                         26
agricoles pour l'amélioration de la transformation et du marketing des produits d'origine
animale et des fruits et légumes; les agriculteurs, pour la modernisation des
exploitations agricoles spécialisées dans la production du lait et dans l'élevage de bêtes
d'abattage, ainsi que pour la diversification de la production agricole78. Les sommes
attribuées à la Pologne pour les années 2000-2003 par la Commission européenne dans
le cadre du programme SAPARD, sont regroupées dans le tableau ci-dessous.

          Sommes allouées à la Pologne dans le cadre du programme SAPARD79.
                  Année           Montant total               Date de la signature
                                 [en millions d'euros]            de l'accord
                  2000                 171,6                    26 mars 2001
                  2001                 175,1                      6 juin 2002
                  2002                 179,9                     3 avril 2003
                  2003                 181,7                      4 juin 2003

    Les dates de signature des accords de financement du programme SAPARD sont
postérieures à leur année d'application à cause des retards mentionnés plus haut, les
sommes indiquées ayant été allouées rétroactivement. En comparant les montants
provenant des programmes PHARE et SAPARD, il saute aux yeux que ce dernier,
entièrement consacré à l'agriculture, a contribué de manière beaucoup plus importante à
l'évolution du secteur que la partie agricole du premier.
    Ainsi, c'est principalement le programme SAPARD qui a permis à la Pologne
d'entamer les travaux relatifs à la politique structurelle européenne de développement
rural. La préparation des institutions et des cadres, ainsi que la mise en place des
procédures adaptées aux normes communautaires ont été réalisées grâce à ce
programme. Dans ce sens, les programmes de pré-adhésion mis en place par l'Union, et
en particulier le SAPARD, ont préparé les bases pour une intégration réussie de
l'agriculture polonaise au contexte de l'après 1er mai 2004.
   Le «Programme Sectoriel Opérationnel Restructuration et Modernisation du Secteur
Alimentaire et Développement des Zones Rurales» mis en place par le gouvernement
polonais comme partie intégrante du «Plan National de Développement pour les années
2004-2006», cherche, après l'adhésion européenne du pays, à poursuivre sur la voie du
programme SAPARD.

     Les paiements directs aux agriculteurs.
    Les paiements directs aux agriculteurs constituent une des formes d'assistance
financière de l'Union européenne pour les zones rurales qui sont entrées en vigueur
après l'accession de la Pologne. Le versement de ces aides, tel qu'il a été décidé pour la
Pologne suite aux négociations pour son adhésion à l'Europe, fonctionne suivant un
système simplifié de subvention forfaitaire à l'hectare, sans lien avec la production. Les
paiements directs de base peuvent être complétés par des aides complémentaires pour
les terres sur lesquelles on cultive le houblon, le tabac, les pommes de terre destinées à


78
     M. Ciechomski, «SAPARD. Rusza program pomocy finansowej», Technika Rolnicza, n°4, 2002, p.9.
79
     Ministerstwo Rolnictwa i Rozwoju Wsi, Sektorowy Program Operacyjny Restrukturyzacja i
     Modernizacja Sektora Zywnosciowego oraz Rozwoj Obszarow Wejskich, 2003, pp. 59-60.


                                                         27
Ajustements PAC Pologne
Ajustements PAC Pologne
Ajustements PAC Pologne
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Ajustements PAC Pologne

  • 1. UNIVERSITE DE LAUSANNE FACULTE DES SCIENCES SOCIALES ET POLITIQUES SESSION DE JUIN 2005 LES AJUSTEMENTS DE LA POLITIQUE AGRICOLE POLONAISE FACE AUX NOUVEAUX DEFIS POSES PAR L'INTEGRATION DANS L'UNION EUROPEENNE Mémoire de licence ès sciences politiques Présenté par Marta KOLAKOWSKA DELLA MARTINA Directeur: Prof. Pierre de Senarclens Expert: Virgile Perret
  • 2. Remerciements: J'aimerais remercier le Professeur Pierre de Senarclens pour son aide dans la conception et la réalisation de ce travail. J'aimerais également remercier Monsieur Jacek M. Pijanowski, du Département de l'Environnement et du Développement de la Campagne du Siège du Maréchal de la Voïévodie de Malopolska, pour l'entretien qu'il a bien voulu m'accorder, ainsi que pour les références bibliographiques qu'il m'a transmis. J'aimerais remercier mon père, Bohdan Kolakowski, employé de la commune de Libiaz, pour les références bibliographiques qu'il m'a transmis, et, avec ma mère, Krystyna Kolakowska, pour leur soutien. J'aimerais aussi remercier ma sœur et son mari, Katarzyna et Serge Nedrotti, qui m'ont hébergée et épaulée au début des études que ce travail conclut. J'aimerais finalement remercier mon mari, Alberto Della Martina, pour sa patience et son soutien, ainsi que pour le temps passé à la relecture et à la correction du français de ce travail.
  • 3. Table des matières. 1 Introduction. ......................................................................................................... 3 1.1 Problématique................................................................................................... 8 2 Présentation de la situation. ............................................................................... 10 2.1 Rappel de l'évolution de la PAC...................................................................... 10 2.2 Entrée de la Pologne dans l'Union européenne. ............................................... 12 2.2.1 Négociations Pologne-Europe pour les modalités d'application de la PAC. ......................................................................................................... 14 2.2.2 Nouvelle situation juridique et administrative de la Pologne...................... 17 2.2.3 Résultats des rapports évaluatifs de la Commission européenne. ............... 19 2.3 Application de la PAC et de la politique structurelle européenne en Pologne d'un point de vue pratique.................................................................. 20 2.3.1 Aspects du développement rural dans le cadre des instruments traditionnels de la PAC. ............................................................................ 20 2.3.2 Aspects du développement rural dans le cadre de la politique structurelle européenne. ............................................................................ 22 2.3.3 Assistance de l'Union européenne pour l'ajustement de l'agriculture polonaise................................................................................................... 24 2.4 Conclusion...................................................................................................... 30 3 Problèmes relatifs à l'application de la politique structurelle et de la PAC en Pologne. .......................................................................................................... 32 3.1 Facteurs internes. ............................................................................................ 32 3.1.1 Lacunes administratives et manque de spécialistes et de personnel qualifié dans l'administration..................................................................... 32 3.1.2 Structure de l'éducation dans les zones rurales........................................... 34 3.1.3 Fragmentation des exploitations. ............................................................... 36 3.2 Facteur externe: la compétitivité des produits agricoles polonais après l'adhésion européenne. .................................................................................... 38 3.3 Conclusion...................................................................................................... 40 4 Conséquences sociales des ajustements de l'agriculture pour les zones rurales. ................................................................................................................ 43 4.1 Chômage induit............................................................................................... 45 4.2 Possibilités de réinsertion ou de recyclage....................................................... 47 4.2.1 Activité touristique comme source de revenus alternative pour les zones rurales. ............................................................................................ 49 4.3 Conclusion...................................................................................................... 50 5 La PAC et la politique structurelle face aux disparités géographiques et sociales en Pologne.............................................................................................. 52 5.1 Etat des disparités géographiques.................................................................... 53 5.1.1 Disparités entre les régions........................................................................ 53 5.1.2 Inégalités entre les villes et les campagnes. ............................................... 53 1
  • 4. 5.1.3 Paradoxe des conditions d'obtention des aides dans le cadre de la politique structurelle.................................................................................. 54 5.2 Etat des disparités sociales. ............................................................................. 55 5.2.1 Disparités entre les agriculteurs et les autres catégories sociales. ............... 55 5.2.2 Inégalités parmi les agriculteurs eux-mêmes.............................................. 55 5.3 Conclusion...................................................................................................... 57 6 Conclusion........................................................................................................... 59 Bibliographie. ........................................................................................................... 64 Annexe. ..................................................................................................................... 71 2
  • 5. 1 Introduction. Affranchie de la tutelle soviétique avec l'écroulement du bloc de l'Est en 1989, la Pologne a rapidement entrepris une série de réformes politiques, économiques et sociales en vue d'adopter un régime démocratique et de transformer son économie en économie de marché. En réorientant ses échanges vers l'Ouest, le pays a renforcé ses liens avec la Communauté européenne, et cette dernière a remplacé l'ex-URSS en qualité de partenaire commercial principal de la Pologne. A l'occasion du passage de la Pologne de l'économie socialiste à l'économie de marché, le gouvernement issu de "Solidarité" a demandé l'ingérence de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international. Il a ainsi décidé de réaliser les réformes structurelles imposées par ces institutions, réformes basées sur la privatisation, la libéralisation des prix et du commerce et la stabilisation macroéconomique. Même si le pays a rapidement réalisé une libéralisation des prix presque complète, accompagnée d'une dévaluation de sa monnaie et de strictes mesures d'austérité économique, la privatisation et les réformes structurelles dans les secteurs comme l'agriculture, l'industrie houillère et la sidérurgie (secteurs extensifs, à faible rendement et largement subventionnés) se sont avérées beaucoup plus lentes. Les réformes structurelles, telles qu'elles ont été réalisées en Pologne après 1989, ont contribué à surmonter rapidement les crises provoquées par la transition et diriger l'économie vers une croissance accélérée. Néanmoins, elles ont également contribué à l'accroissement des déséquilibres économiques et des problèmes structurels, parmi lesquels le chômage massif sur les territoires des anciennes fermes d'Etat. Pour lutter contre ces difficultés, le gouvernement au pouvoir en 1998 a décidé de mettre en place une politique monétaire stricte et d'accélérer les changements structurels. Parallèlement, il a introduit quatre réformes sociales importantes (système des retraites, système de santé, éducation et réforme territoriale). La coïncidence de la politique monétaire stricte, des réformes sociales majeures (accompagnées de multiples difficultés) et des catastrophes naturelles1, a provoqué un ralentissement économique important et une montée considérable du chômage2. Les énormes coûts économiques et sociaux engendrés par les réformes structurelles ont provoqué une prise de conscience que la réussite de la transformation amorcée ne serait pas possible sans une aide extérieure, et que l'adhésion à la Communauté européenne pourrait apporter une solution à ce problème. L'intégration européenne de la Pologne, réalisée le 1er mai 2004, a couronné plusieurs années d'efforts engagés par les gouvernements successifs, initiés par la signature d'un traité d’association en 1991 suivie du dépôt d'une demande officielle d'adhésion en 1994. L'équipe alors au pouvoir a mesuré les multiples avantages offerts par l'intégration à la Communauté européenne, devenue depuis Union européenne3. 1 Le pays a essuyé des inondations dans sa partie sud-ouest en 1997, en 2001 et en 2002. 2 A. Nesporova, Why unemployment remains so high in Central and Eastern Europe, International Labour Office, Employment Paper, Geneva, 2002/43, p. 20. 3 A. Jedraszko, Na drodze do zjednoczonej Europy, Warszawa, Akapit-DTP, 2002, pp. 145-155.* * Les traductions des références en polonais se trouvent dans la bibliographie à la fin de ce travail. 3
  • 6. La première conséquence positive de l'adhésion européenne pour la Pologne aurait été la stabilisation du régime démocratique. En effet il était nécessaire, dans ce pays post-communiste, de pérenniser les règles de fonctionnement de la démocratie parlementaire, de l'Etat de droit, de l'économie de marché et de l'autogestion territoriale. L'adhésion européenne aurait imposé à la Pologne la mise en place de ces règles dans la vie quotidienne du pays et de la société, ce qui aurait renforcé l'attachement à ces valeurs et à ces pratiques nouvelles. Deuxièmement, l'entrée dans l'Union aurait permis la stabilisation des finances de l'Etat. La discipline financière imposée par l'Union (surtout en ce qui concerne les déficits publics admis) aurait eu pour conséquence la stabilisation des prix et la suppression de l'inflation. L'Union aurait pu servir de garantie en cas de difficultés dans certains domaines, et ainsi assurer les conditions nécessaires à la stabilité des finances publiques. En outre, l'introduction, à terme, de la monnaie unique aurait permis de stabiliser les conditions de fonctionnement de l'économie, à travers l'élimination des fluctuations des taux de change et la suppression des coûts liés à l'échange des monnaies. Finalement, la libre circulation des capitaux aurait rendu ceux-ci plus accessibles. Troisièmement, l'Union aurait garanti le maintien de la paix, aussi bien sur le plan interne (par la résolution des querelles et des conflits portant sur les frontières et la garantie des droits égaux pour les minorités nationales sur tout le territoire de l'Union) que sur le plan externe (à travers le potentiel économique et défensif de l'Union, renforcé par son appartenance à l'OTAN, qui sont des moyens de dissuasion). Quatrièmement, l'intégration européenne aurait contribué à la modernisation de la formation en Pologne. La faible valeur des matières premières dont dispose le pays, l'obsolescence des industries du temps du socialisme, les conditions généralement défavorables pour l'agriculture, sont autant de facteurs laissant penser qu'un haut niveau de formation dans des domaines ayant un caractère novateur constitue un des seuls capitaux dont dispose le pays (technologies informatiques, biotechnologie, nanotechnologie, protection de l'environnement, droit, finances, etc.). La qualité de la formation est aussi très importante lorsque l'on tient compte des changements rapides du marché du travail et des besoins en formation continue. L'accès aux programmes de l'Union, ainsi qu'aux différentes formes de coopération transfrontalière et la possibilité d'étudier à l'étranger, aurait offert aux citoyens polonais la possibilité d'améliorer leur savoir général et professionnel, en favorisant leur mobilité professionnelle. Pour l'économie, cela se serait traduit par l'apparition d'incitations à l'innovation et à la modernisation, et aurait créé les conditions pour la reconstruction de l'intelligentsia détruite durant la Seconde Guerre mondiale ou ayant émigré après l'instauration de l'état de guerre en 1981. La cinquième conséquence positive de l'adhésion européenne aurait pu être l'amélioration de l'état de l'environnement naturel polonais. Celui-ci est le résultat de négligences et de dégradations séculaires de la nature et de la faible conscience sociale du besoin de protéger l'environnement. La politique européenne en la matière aurait posé les bases pour l'évolution de cet état des choses, en particulier grâce à la liquidation des entreprises qui nuisent à l'environnement et à l'assainissement des mauvaises pratiques agricoles. La nationalité européenne aurait été une sixième conséquence positive de l'intégration européenne pour la Pologne. En plus de la liberté de se déplacer sans visas à l'intérieur de l'Union et de s'installer dans tous les pays européens, des droits civiques, 4
  • 7. ainsi que du droit à la protection consulaire et diplomatique à l'extérieur de l'Union, le statut de citoyen européen aurait garanti aux Polonais la pleine protection des droits de l'homme. Septièmement, la Pologne aurait pu bénéficier des standards mis en place par l'Union dans le domaine des règles de l'emploi et des conditions de travail, ainsi que de la protection sociale des travailleurs. L'Union soutient la mobilité des travailleurs, avant tout par l'intermédiaire du Fonds Social Européen (FSE). Elle cherche à garantir un bon niveau de santé et de prévention des maladies. La huitième conséquence positive que la Pologne aurait tiré de l'adhésion européenne concerne le domaine de la culture. En effet, l'Union soutient la protection et la conservation du patrimoine national, la collaboration culturelle entre les pays membres et les échanges non-commerciaux entre eux. Elle encourage aussi les programmes de promotion de la culture et de l'histoire des pays membres. Neuvièmement, la Pologne aurait pu tirer profit de la lutte commune menée par l'Union contre le crime organisé international. L'Europe essaie d'instaurer une collaboration accrue entre les polices nationales et elle soutient la formation et l'équipement des services frontaliers pour garantir la sécurité des citoyens et du territoire. La dixième conséquence positive de l'adhésion aurait été l'application de la politique structurelle de l'Union (ou politique régionale) visant une égalisation progressive entre les régions, aussi bien entre les différents pays membres qu'à l'intérieur d'un même pays. En effet, dans le domaine des infrastructures techniques, l'Union met en place et aide à maintenir des standards minimaux, met à disposition de nouvelles technologies et peut cofinancer la modernisation. Elle tend aussi à la création d'un système de réseaux européens énergétiques, de transport et de communication, et met en place, dans ce but, des standards techniques communs, coordonne les travaux et garantit le cofinancement des principaux investissements. L'ensemble des infrastructures techniques polonaises, nécessaires au fonctionnement effectif des zones aussi bien urbaines que rurales, nécessite d'être amélioré. Parallèlement, sur tout le territoire de la Pologne, le PIB par habitant est inférieur aux 75% de la moyenne communautaire, condition d'accès aux aides structurelles européennes. Finalement, l'adhésion européenne du pays lui aurait donné plein accès au marché communautaire, grâce à la suppression graduelle des obstacles à la libre circulation des marchandises (taxes, contingents, etc.). Comme le voudrait la théorie libérale, le principe de libre concurrence appliqué par l'Union devrait conduire à la baisse des prix et à l'augmentation du rendement du travail dans le pays. Différents programmes communautaires auraient soutenu la modernisation de l'économie polonaise, une meilleure allocation des moyens de production et une meilleure division du travail. Les avantages que l'adhésion européenne auraient offerts à l'économie polonaise auraient pris une signification particulière pour son économie agricole. En effet, l'importance de l'agriculture dans la vie socio-économique de la Pologne est plus significative que dans les pays d'Europe occidentale. On y trouve des régions où l'agriculture reste un des secteurs économiques principaux, avec un fort impact sur le niveau de développement de la région et sur le niveau de vie des habitants. 5
  • 8. Dans la période qui a directement précédé l'adhésion européenne de la Pologne, l'agriculture de ce pays se trouvait dans une crise profonde4. Cela se manifestait principalement par une baisse importante des revenus agricoles, et surtout par des possibilités limitées de les augmenter. On n'observait dans ce pays ni une demande croissante pour les produits agricoles, qui aurait pu entraîner une hausse des prix, ni un marché du travail capable d'absorber la main-d'œuvre libérée de l'agriculture après les changements structurels en cours, ni de transferts budgétaires publics importants pour le domaine agricole, ni un progrès agricole et technologique suffisant pour intensifier la production et baisser ses coûts, ni même une offre importante de moyens de production d'origine industrielle à prix modérés. L'état dans lequel se trouvait l'agriculture polonaise au moment de l'adhésion était la conséquence de quarante années d'économie centralement planifiée. A l'époque du socialisme, le secteur agricole polonais possédait des caractéristiques propres qui le distinguaient de l'agriculture des autres pays de l'Europe centrale et orientale (PECO). Notamment, ni les changements de propriété (la dépossession des propriétaires des terres), ni le processus de concentration de terres à grande échelle, caractéristiques de l'économie socialiste, n'y ont été réalisés, même si les conditions de gestion économique en Pologne restaient typiques de ce type d'économie. Ces arrangements ont eu pour conséquence la formation d'un type d'agriculture orientée vers la propriété privée, et parallèlement tournée vers un interventionnisme étatique important pour les régulations relatives aux marchés agricoles (produits, quantités, prix…). Pour satisfaire les besoins d'autosuffisance alimentaire, le gouvernement polonais a mis en places dans les années 1960 des politiques, largement subventionnées, d'intensification et de modernisation de l'agriculture. Toutefois, même si ces mesures ont permis d'augmenter les rendements par hectare, les coûts de production du secteur agricole ont continué à augmenter en raison de dysfonctionnements du système (allocation irrationnelle des ressources, choix productifs et techniques) et d'une faible productivité du travail agricole. Ces coûts de production élevés ont été compensés par des aides publiques importantes (jusqu'à 15% du budget de l'Etat) ce qui a permis d'éviter leur répercussion sur les prix des aliments. L'importante fragmentation des exploitations agricoles, les lourdeurs administratives, le manque de spécialistes et de personnel qualifié dans l'administration, le manque d'initiative des populations rurales constituent des réminiscences de cette ère communiste. Ajoutés au bas niveau d'éducation dans les zones rurales, la faible compétitivité des exploitations polonaises et l'obligation de se soumettre aux différentes normes imposées par l'Union, ces facteurs invitent à s'interroger sur le succès de l'intégration de l'agriculture polonaise à l'agriculture européenne, du moins pour la première période après l'adhésion, en prenant en compte des différences sociales et régionales présentes en Pologne. Dès le début des réformes structurelles, l'agriculture absorbait le surplus de la main- d'œuvre. Cela a conduit à une surpopulation des zones agricoles et a encore aggravé le problème du chômage agricole et du chômage caché5 dans les zones rurales6. Ainsi en 4 J. S. Zegar, «Strategia polskiego rolnictwa po akcesji do Unii Europejskiej», Zagadnienia Ekonomiki Rolnej, n°3, 2003, p. 70. 5 En Pologne, les personnes exploitant des parcelles d'une superficie supérieure à deux hectares ne sont pas enregistrées comme chômeurs. 6
  • 9. 2002, quand le niveau du chômage a atteint 17,4% en Pologne, il y avait 1 million 368 mille 700 chômeurs dans les zones rurales, ce qui représentait, à cette période, 42,7% du nombre total des chômeurs. On estime qu'un million de personnes supplémentaires, ne trouvant pas de travail, gonflaient les rangs du chômage caché et environ 70% des individus ayant un emploi travaillaient à temps partiel. Après 1989, une hausse drastique des prix des denrées alimentaires (auparavant fixés administrativement), supérieure à la hausse des salaires, a entraîné une baisse de la consommation intérieure, impossible à compenser par les exportations vers les pays d'exportation traditionnels, l'Union soviétique et l'Allemagne de l'Est, dont les capacités d'absorption avaient diminué de manière brutale pour les mêmes raisons. Même une forte augmentation des droits de douane sur certains produits à partir de 1993 (le lait, la viande bovine, le sucre, la pomme de terre, certains fruits et légumes frais de saison), n'a pas permis de protéger durablement les secteurs agricole et agroalimentaire polonais. Une très forte diminution des subventions, la baisse en termes réels des prix des denrées agricoles7, l'augmentation des prix des intrants (matériel, engrais) et la hausse des taux d'intérêt ont provoqué une forte réduction des marges financières des exploitations agricoles polonaises8. En conséquence, la baisse de la production, accompagnée de la réduction des investissements et de la consommation des intrants ont débouché à une récession forte de l'agriculture, avec un manque de perspectives pour l'avenir quant à la possibilité de restructuration du secteur agricole, à moins qu'une aide extérieure considérable lui permette d'entamer ce processus. Dans ce sens, l'intégration européenne et l'application de la politique agricole commune (PAC) en Pologne constituent, pour l'agriculture de ce pays, une grande opportunité, principalement en raison des transferts financiers qu'elles engendrent (à travers les Fonds de pré-accession, les paiements directs aux agriculteurs et les Fonds structurels). En effet, en accord avec le principe de solidarité financière qui est un des principes fondamentaux de l'Union européenne, il a été décidé d'appliquer la "responsabilité financière commune" pour la PAC9. Cela se traduit par le fait que, après le transfert à l'Europe de la compétence dans le secteur agricole, les dépenses dans ce domaine sont financées par le budget communautaire et non plus par le budget du pays, même si ce dernier a le droit d'accorder des aides nationales, tout en tenant obligatoirement compte des réglementations communautaires dans ce domaine. L'intégration de la politique agricole polonaise à l'agriculture européenne se réalise à travers l'adoption du modèle agricole européen, tel qu'il est défendu par la Commission européenne au sein de l'OMC. Il repose sur une politique de développement rural globale et cohérente, qui s'ajoute à la politique européenne des marchés agricoles mise en place jusque-là (instruments traditionnels de la PAC). Ce modèle prône le développement d'une agriculture moderne et durable, qui s'adresse aux acteurs du 6 Ministerstwo Rolnictwa i Rozwoju Wsi, Sektorowy Program Operacyjny Restrukturyzacja i Modernizacja Sektora Zywnosciowego oraz Rozwoj Obszarow Wejskich, 2003, p. 21. 7 Les prix des denrées agricoles augmentent beaucoup moins vite que l'inflation, et en conséquence ils baissent en termes réels. 8 Commissariat Général du Plan, L'élargissement de l'Union européenne à l'Est de l'Europe, Paris, La Documentation française, 1999, pp. 111-114. 9 J. Loyat, Y. Petit, La politique agricole commune (PAC): un enjeu de société, Paris, La Documentation française, 2002, p. 41. 7
  • 10. monde rural, mais également aux consommateurs et à la société dans son ensemble10. L'agriculture, telle qu'elle est définie dans le modèle européen, prend un caractère multifonctionnel. Cela signifie qu'elle "n'est pas limitée à la seule fonction de production de biens agricoles. C'est le secteur en soi qui est multifonctionnel puisqu'il doit garantir la sécurité alimentaire, protéger l'environnement et maintenir l'emploi rural. Les caractéristiques propres au secteur agricole sont invoquées pour expliquer la place spécifique de l'agriculture dans la société: le caractère biologique de la production agricole, une demande rigide, l'occupation de l'espace et des particularités stratégiques et culturelles. Ainsi, à l'approche marchande se superpose une approche plus culturelle et identitaire qui peut motiver l'intervention publique"11. L'intégration de la politique agricole polonaise à la PAC devrait faciliter l'inévitable restructuration de l'agriculture polonaise pour la rendre plus compétitive et lui permettre un fonctionnement efficace dans le cadre de la globalisation de l'économie. Les fonds européens apparaissent comme un des rares moyens pour sortir l'agriculture polonaise de sa situation d'impasse. De nombreux mécanismes de la PAC offrent aux zones agricoles polonaises les moyens de développer les infrastructures, pour attirer les investissements en vue de revitaliser l'économie locale, et, aux agriculteurs, un soutien considérable et une possibilité inédite de s'adapter aux nouveaux défis. 1.1 Problématique. L'analyse approfondie dans toutes ses dimensions de ce sujet très complexe, dépasserait largement le cadre d'un travail comme celui-ci. Néanmoins, même s'il n'a pas une vocation à l'exhaustivité, le travail cherchera à aborder brièvement plusieurs aspects principaux inclus dans le sujet, aussi bien en ce qui concerne l'évolution de la PAC en général que celle de la politique agricole polonaise de l'époque du socialisme jusqu'au moment de son accession à l'Europe, et également pendant les premiers mois qui ont suivi l'adhésion européenne de la Pologne. Ainsi, l'enjeu de ce travail consistera à analyser les changements touchant le secteur agricole polonais pour s'adapter aux exigences posées par l'Union européenne aux PECO avant leur adhésion le 1er mai 2004, pour s'intégrer au modèle social de l'agriculture européenne caractérisé par la durabilité et la multifonctionnalité de l'agriculture et du développement des zones rurales. Il abordera également les solutions envisagées par la Pologne pour faire face à la nécessité de réduire le surplus de main- d'œuvre dans l'agriculture et transférer cette masse de travailleurs agricoles vers des activités alternatives alors que le chômage global avoisine 20%, ainsi que pour réduire les disparités sociales et géographiques du pays. Pour cela, le travail débutera par une présentation du processus des négociations entre la Pologne et l'Europe et il analysera la nouvelle situation juridique et administrative de la Pologne, comme résultat de ce processus. Ensuite, il portera sur l'application de la PAC et de la politique structurelle européenne de développement rural en Pologne d'un point de vue pratique. Après avoir présenté des aspects du développement rural dans le cadre de celles-ci, il analysera l'assistance de l'Europe pour 10 Idem, p. 72. 11 Idem, pp. 140-141. 8
  • 11. l'ajustement de l'agriculture polonaise, à travers les Fonds de pré-accession, les paiements directs aux agriculteurs et les Fonds structurels. Les problèmes d'application de la PAC en Pologne, portant aussi bien sur les difficultés internes (le manque de spécialistes et de personnel qualifié dans l'administration, le bas taux de formation dans les zones rurales, la fragmentation des exploitations, etc.) qu'externes (le problème de la compétitivité des produits agricoles polonais après l'adhésion) seront examinés dans la troisième partie du travail. Ensuite, le travail va se concentrer sur les aspects sociaux des ajustements de l'agriculture polonaise. En analysant la structure de l'emploi dans les zones rurales en Pologne, il se focalisera sur le problème du chômage induit par ces ajustements et, en conséquence, sur les efforts du gouvernement visant la réinsertion et le recyclage de la main-d'œuvre libérée par les restructurations agricoles. Finalement, puisque les disparités géographiques (entre les régions et entre les villes et les campagnes) et les inégalités socio-économiques (entre les agriculteurs et différentes catégories sociales et parmi les agriculteurs eux-mêmes) sont toujours considérables en Pologne, le travail va essayer d'examiner l'impact que les réformes en cours pourraient avoir sur l'évolution de ces disparités. 9
  • 12. 2 Présentation de la situation. 2.1 Rappel de l'évolution de la PAC. La PAC, telle qu'elle a été initiée par le Traité de Rome en 1957 et mise en place en janvier 1962, s'est trouvée remise en cause à partir du milieu des années 198012. Premièrement, suite à la crise économique mondiale des années 1970, l'idéologie économique keynésienne dominante dès le lendemain de la Seconde Guerre mondiale, protectionniste et interventionniste, s'est vue destituée dans tous les pays membres de l'Union européenne. Elle y a été remplacée par la doctrine libérale, combinant désengagement de l'Etat, ouverture commerciale et focalisation de l'action étatique sur la gestion des équilibres macroéconomiques. Deuxièmement, on observait une saturation du marché européen à la fin de la décennie 1970, et une impossibilité des marchés internationaux à absorber les surplus de la production agricole européenne, en raison de la stagnation de la demande mondiale au début des années 1980. Ces deux facteurs ont contribué à mettre en lumière la nécessité de réviser la PAC. Ainsi, le coût croissant de la PAC, son incapacité à différencier la production pour répondre aux besoins du marché et l'iniquité des aides (dépendantes de la production) favorisant les producteurs les plus puissants, sont devenues l'objet de critiques à l'intérieur de l'Union. Suite à la prise de conscience par la population des enjeux environnementaux, dans les années 1990, se sont ajoutées à ces critiques celles qui reprochaient à l'agriculture intensive européenne d'être la cause de pollutions, de désertifications ou de pertes de biodiversité. En outre, la multiplication des maladies animales comme la vache folle, la fièvre aphteuse ou la contamination des viandes comme dans le cas des poulets à la dioxine, généraient des critiques portant sur les insuffisances du contrôle de la qualité et de la sûreté des aliments par la PAC. Ces critiques internes s'accompagnaient de reproches venus des partenaires commerciaux hors de l'Union. Les pays en développement, sous l'égide des pays exportateurs de matières premières comme le Brésil, l'Argentine, l'Australie, la Nouvelle-Zélande et l'Afrique du Sud (le groupe de Cairns) attaquaient au sein du GATT, puis de l'OMC, le protectionnisme agricole européen. Ils lui reprochaient de contribuer d'une part à la dépréciation des cours internationaux à cause notamment des subventions à l'exportation (en usage depuis 1962 et qui permettent à l'Europe de compenser la différence entre les prix européens et les prix mondiaux), et d'autre part aux difficultés économiques que ces pays connaissent en raison de l'accès insuffisant au marché européen. Pour que les négociations commerciales multilatérales puissent aboutir, les pays en développement exigeaient l'ouverture du marché agroalimentaire européen. Leurs voix étaient renforcées par celles des représentants des milieux financiers et commerciaux européens, qui cherchaient à obtenir l'accès au marché des services dans les pays en développement en échange d'une plus grande ouverture du marché agroalimentaire européen. Toutes ces critiques à l'endroit de la PAC ont abouti à la grande transformation initiée en 1992. Malgré les pressions libéralistes évoquées plus haut, un désengagement total de la politique au profit du seul jeu de marché a toutefois été évité par cette 12 J. Loyat, Y. Petit, op. cit. pp. 8-32. 10
  • 13. transformation. A partir de cette date, on a réorienté les aides agricoles dans le but de remplacer la politique de soutien des prix par une politique de soutien des revenus agricoles à travers des paiements directs, et on s'est employé à assurer la sûreté et la qualité des denrées alimentaires et une production durable respectueuse de l'environnement13. La perspective de l'élargissement de l'Union aux PECO, dont l'économie repose principalement sur l'agriculture, et le rapprochement de l'échéance du nouveau cycle des négociations à l'OMC, ont mis en lumière la nécessité d'une nouvelle réforme de la PAC. La réforme de 1999 (l'Agenda 2000) tente ainsi de répondre aux nouvelles demandes des citoyens en matière de fonction sociale de l'agriculture en mettant un accent important sur le concept d'une agriculture et d'un développement rural durables et multifonctionnels14. "Les zones rurales sont multifonctionnelles et les agriculteurs devraient être encouragés à tirer parti de toutes les possibilités qui s'offrent aux entrepreneurs du monde rural. Car, dans l'avenir, les zones rurales devront remplir des fonctions d'ordre écologique et récréatif de plus en plus importantes et les exigences liées à ces fonctions pourraient nécessiter des adaptations de l'agriculture"15. Il a aussi été prévu par l'Agenda 2000 que cette approche intégrée de l'agriculture et des zones rurales, ainsi que leur implication en matière de protection de l'environnement, d'aménagement des territoires, de qualité des produits et de sécurité alimentaire soient encadrées par le deuxième pilier de la PAC16. En outre, contrairement à l'ancienne PAC, la PAC réformée tient compte des différentes situations des agriculteurs à l'intérieur de l'Union, et cherche à soutenir toutes les catégories d'exploitations. Par conséquent, dans la répartition des aides, elle prend en compte des exploitations qui, faute d'être compétitives sur les marchés internationaux pour la commercialisation des produits agricoles, exercent dans des zones rurales des activités de service comme l'agritourisme, l'entretien des paysages, l'artisanat, etc17. Deux changements ont été prévus par la réforme18. Premièrement, il a été décidé de réduire le soutien des prix des produits agricoles et des marchés agricoles, mesure complétée par la réduction des taxes à l'importation et des subventions à l'exportation19, l'objectif final étant de s'aligner sur les prix mondiaux et de ne maintenir à terme que deux types d'interventions régulatrices. Ces interventions sont, d'un côté, la garantie des prix minimums pour protéger les producteurs contre les fortes chutes de prix sur les marchés agricoles instables, d'un autre côté les mécanismes de contrôle de l'offre20 pour limiter la croissance de la production et lutter contre la baisse des prix réels à long 13 Protection de l'environnement et développement du potentiel naturel des campagnes à travers le boisement des terres agricoles et le développement du tourisme rural. 14 L'emploi rural, la cohésion sociale, la contribution au maintien d'un tissu social et économique rural. 15 Commission européenne, 1997, citée par H. Delorme, La politique agricole commune. Anatomie d'une transition, Paris, Presses de la Fondation Nationale des Sciences Politiques, 2004, p. 12. 16 Il représente en 2003 10% du budget agricole communautaire. 17 H. Delorme, op. cit., pp. 22-23. 18 Idem, pp. 19-20. 19 La réduction des taxes à l'importation et des subventions à l'exportation est réalisée à travers l'accord de Marrakech de 1994, le texte fondateur de l'OMC, signé à la fin du Cycle d'Uruguay. 20 Parmi les mécanismes de contrôle de l'offre on énumère les mesures comme le gel des terres, le boisement des terres agricoles, les quotas de production garantis, etc. 11
  • 14. terme. Deuxièmement, les paiements directs, payés aux agriculteurs par le budget européen et cofinancé par les budgets nationaux, ont été autorisés pour compenser la baisse des prix de certains produits. Finalement, en accord avec les principes de l'OMC visant à réduire les mesures de soutien du marché (considérés comme anticoncurrentielles, déséquilibrant le marché et visant à accroître les revenus des agriculteurs des pays riches), la réforme de juin 2003 a entériné une réduction des paiements directs, entrant en vigueur après juillet 200421. Entre 2005 et 2012, les paiements directs, à l'exception de ceux destinés aux agriculteurs des régions ultrapériphériques22, et des îles de la Mer Égée, sont réduits chaque année: de 3% en 2005, de 4% en 2006, puis de 5% annuellement, suivant le principe de dégressivité23. D'un autre côté, cette réduction s'est vue compensée par des paiements uniques indépendants de la production ou de la surface (le découplage des aides24). Ces derniers, entrés en vigueur dès 2005, sont dépendants d'objectifs environnementaux et sociaux. La décentralisation de leur mise en œuvre implique que ces paiements relèvent dans une grande partie de la compétence des Etats membres, auxquels revient de décider de la date de leur application, de leur taux, de leur forme et de l'écoconditionnalité (les prescriptions en matière de protection de l'environnement, de sécurité alimentaire, de santé des animaux et des végétaux et du bien-être des animaux). En outre, on permet aux Etats membres de prélever jusqu'à 20% des paiements compensatoires des baisses de prix, au cas où les exploitants ne rempliraient pas l'écoconditionnalité. Les fonds provenant de ces prélèvements, ainsi que les sommes épargnées grâce à la dégressivité des paiements directs, sont destinés à financer l'entrée en vigueur du régime de paiements uniques par exploitation. Ils peuvent également être alloués aux mesures de développement rural (transmis au deuxième pilier de la PAC). Pour compenser aux petites exploitations non-marchandes25 la perte due à la dégressivité, les agriculteurs bénéficient d'une aide supplémentaire dont le montant est calculé par les Etats membres26. 2.2 Entrée de la Pologne dans l'Union européenne. La possibilité de l'élargissement de l'Union à l'Est est devenue réalité à la fin des années 1980, après l'effondrement du socialisme et la fin de la guerre froide. L'entrée des pays ex-communistes sur la voie de la démocratie parlementaire, de la réalisation de l'Etat de droit, de l'économie de marché et de la reconstruction de l'autogestion territoriale, a mis à l'ordre du jour le problème de l'élargissement de l'Union européenne aux PECO. L'effondrement du communisme a provoqué dans les pays de l'Union une sorte d'euphorie pro-européenne et le rôle de "Solidarité" dans le processus de décomposition 21 J. Blanchet, A. Revel, L'agriculture européenne face aux enjeux internationaux, Paris, Economica, 1999, p. 36. 22 Départements français d'outre-mer, les Açores, Madère et les îles Canaries. 23 http://www.europa.eu.int/scadplus/leg/fr/lvb/l11089.htm; le 22. 01. 2005. 24 Elles ne sont en aucune manière conditionnées par une action visant à produire ou par le résultat de la production; cette mesure a pour objectif d'éviter les distorsions entre les producteurs. 25 Exploitations ne commercialisant que peu ou pas du tout de leurs produits. 26 http://www.europa.eu.int/scadplus/leg/fr/lvb/l11089.htm; le 22. 01. 2005. 12
  • 15. du socialisme a contribué à la création de conditions favorables à la formation de promesses portant sur l'élargissement de l'Union à l'Est. L'accord d'association (l'Accord européen), signé entre ces pays et l'Union le 16 décembre 1991 à Bruxelles, a constitué la mise en route vers l'adhésion européenne des PECO. Il portait principalement sur la coopération commerciale, technique et industrielle27. La décision prise par le Conseil européen d'Edimbourg en 1992 a constitué l'étape suivante, et en même temps le premier pas vers l'officialisation du projet d'élargissement de l'Union à l'Est. La même année, à Lisbonne, le Conseil européen a décidé d'entamer la préparation concrète de cette accession. L'affaire a été concrétisée lors du Conseil européen de Copenhague en juin 1993, où la disposition de l'Union à accueillir de nouveaux Etats membres a été confirmée, en indiquant les conditions générales à remplir par ceux-ci (les critères de Copenhague). Ils pourraient devenir membres à condition de: disposer d'institutions stables garantissant la démocratie, la primauté du droit, les droits de l'homme et le respect des minorités; posséder une économie de marché fiable pour supporter la pression du marché concurrentiel de l'Union; démontrer leur capacité à assumer des obligations, notamment de souscrire aux objectifs de l'union politique, économique et monétaire; et d'avoir créé les bases de leur intégration à travers l'ajustement de leurs structures de manière à ce que les législations européennes soient transposées efficacement dans leurs législations nationales28. A la suite du Conseil européen de Copenhague, la Pologne a posé sa candidature officielle à l'Union le 5 avril 1994. La prise de décision par le Conseil européen d'Essen en 1994, concernant le "programme concret de préparation", a constitué la continuation dans cette nouvelle direction. Dans le cadre de ce programme, des accords ont été passés avec la Pologne, la Hongrie, la Tchéquie, la Slovaquie, la Roumanie, la Bulgarie, l'Estonie, la Lettonie, la Lituanie et la Slovénie. En février de la même année, l'Accord européen est entré en vigueur en Pologne, après sa ratification par les deux chambres du parlement et par le président du pays, ainsi que par les parlements des Etats membres de l'Union et le Parlement européen. En juillet 1997, la Commission européenne a présenté le rapport évaluant la situation politique et économique dans les pays candidats. Sur la base de ce rapport, le Conseil européen de Luxembourg en décembre 1997 a décidé de commencer les négociations portant sur l'adhésion des PECO. Les négociations avec le premier groupe, formé par les pays relativement les plus avancés, parmi lesquels la Pologne, ont débuté en mars 199829. Durant le Conseil européen d'Athènes, le 16 avril 2003, le processus de négociations a été couronné par la signature des Traités d'adhésion par les dix nouveau Etats membres. Dans la suite du sous-chapitre, il s'agira d'examiner le processus de négociations entre l'Union européenne et la Pologne dans le domaine de l'agriculture. Il s'agira de savoir quelles décisions ont résulté de ces négociations en ce qui concerne les ajustements juridiques et administratifs en Pologne. En se basant sur les résultats des rapports intermédiaires de la Commission européenne, cette partie du travail va présenter les étapes consécutives de la mise en œuvre des ajustements nécessaires. 27 Il a été signé suite à la proposition de Jacques Delors, alors président de la Commission européenne, présentée au Parlement européen en 1990. 28 http://europa.eu.int/comm/enlargement/intro/criteria.htm; le 26. 11. 2004. 29 A. Jedraszko, op. cit., pp. 133-136. 13
  • 16. 2.2.1 Négociations Pologne-Europe pour les modalités d'application de la PAC. Les négociations entre la Pologne et l'Union européenne sur les conditions d'intégration du pays ont débuté le 31 mars 1998 et abouti en décembre 2002. Elles ont porté sur trente et un chapitres de l'acquis communautaire30. Il s'agissait notamment de trouver un accord sur les conditions suivant lesquelles la Pologne adoptera, mettra en oeuvre et appliquera l'acquis communautaire dans le domaine de l'agriculture, et sur la possibilité de lui accorder des périodes transitoires31 pour la réalisation de ces tâches. Ce processus a été précédé par l'analyse de la législation polonaise vis-à-vis de la législation communautaire. La liste des divergences qui en a résulté a constitué la base de l'élaboration des positions prises par le gouvernement polonais en vue des négociations32. Les négociations entre la Pologne et l'Europe pour les modalités de l'application de la PAC ont débuté le 14 juin 2000 et elles ont abouti le 13 décembre 2002, c'est-à-dire un mois avant la fin officielle des négociations. Ces longueurs sont venues de grandes controverses suscitées par ce sujet en Pologne, pays où les enjeux agricoles ont une grande importance. En effet, Poczta explique ces difficultés premièrement par le fait que l'agriculture polonaise allait devenir la principale bénéficiaire des ressources du budget européen, et deuxièmement par une grande importance économique et sociale du secteur agricole en Pologne33. Avant de passer à l'examen du processus des négociations, rappelons que l'enjeu principal de ces négociations portait sur l'application en Pologne du régime de soutien relatif à la politique des marchés agricoles, après l'adhésion. En effet, l'agriculture constituait un des domaines où des divergences entre les intérêts de la Pologne et ceux de certains pays membres de l'Union se sont avérées considérables. Il s'agissait pour la Pologne d'obtenir pour ses agriculteurs et pour ses zones rurales, l'égalité de traitement avec les agriculteurs des autres pays de l'Union dans l'application de l'ensemble des instruments de la PAC (aussi bien au niveau du soutien des prix, qu'à celui du soutien des revenus et des aides structurelles). Les quotas de production, en particulier ceux des produits laitiers, du sucre, de l'isoglucose, des pommes de terre et du tabac ont constitué une autre question soumise aux négociations. En outre, la Pologne cherchait à obtenir un accord, pour les premières années suivant l'adhésion, sur la mise en application des mécanismes de protection, au cas où les échanges commerciaux entre ce pays et l'Union aboutiraient à des difficultés graves sur le marché agricole polonais. Ainsi, dans les négociations portant sur l'agriculture, un des objectifs principaux de la Pologne était de garantir aux agriculteurs polonais des conditions de concurrence 30 L'ensemble des droits et des obligations communs qui lient les Etats membres de l'Union européenne; les pays candidats à l'adhésion doivent accepter l'acquis et mettre leur législation en conformité avec la législation européenne avant de rejoindre l'Union. 31 Durant ces périodes les normes communautaires ne sont pas appliquées strictement. 32 Il s'agit des propositions de ce pays pour trouver une solution aux divergences entre les législations polonaise et communautaire et déterminer un calendrier pour leur harmonisation. 33 W. Poczta, Rolnictwo polskie w przededniu integracji z Unia Europejska, Poznan, Wydawnictwo Akademii Rolniczej w Poznaniu, 2003, p. 7. 14
  • 17. égales à celle des agriculteurs des autres pays membres. Pour cela, il était important d'obtenir des mécanismes garantissant la pleine utilisation des moyens financiers alloués au pays par l'Union européenne. En juin 2002, la Pologne est entrée en conflit avec deux groupes de pays européens au sujet des paiements directs34. Premièrement, elle est entrée en conflit direct avec les pays grands producteurs agricoles, bénéficiant de subventions communautaires importantes tels la France, l'Espagne, la Grèce, l'Irlande et le Danemark. Ce conflit direct l'a surtout opposée à la France, qui est le plus grand producteur et exportateur de produits agricoles de l'Union, et par là même le plus grand bénéficiaire de la PAC35. Deuxièmement, la Pologne est entrée en conflit potentiel avec les pays étant des contributeurs nets36 au budget agricole de l'Union comme l'Allemagne, la Grande Bretagne, le Pays-Bas et la Suède. En exigeant la réforme de la PAC visant une réduction graduelle des subventions pour décharger leur contribution au budget agricole de l'Union, ils ont mis en danger les paiements directs pour les futurs pays membres, dont la Pologne. A l'issue des négociations, la partie européenne a proposé à la Pologne, ainsi qu'aux autres PECO, la mise en place de paiements directs ne constituant en 2004 que 25% de ceux pratiqués dans les pays de l'Union européenne à quinze, et ajustés par la suite graduellement durant les dix années consécutives: 30% en 2005, 35% en 2006, 40% en 2007, avec des augmentations de l'ordre de 10% les années successives, de manière à atteindre 100% en 2013. Cette décision n'a pas été bien accueillie par les PECO. La Pologne, appuyée par la Hongrie, la République Tchèque et la Slovaquie, a dénoncé la discrimination des agriculteurs des pays candidats sur le marché européen. Elle y voyait le danger d'une création de deux classes d'agriculteurs en Europe. "Les paiements directs limités d'abord à 25% riment trop pour les Polonais avec les idées d'une Europe à «plusieurs vitesses», «à géométrie variable» ou «à la carte», idées qui réapparaissent depuis le début des années 1990 dans la perspective de l'élargissement à l'Est"37. Pour sortir de cette situation, la Pologne a cherché à obtenir de l'Europe le déplacement d'une partie des moyens financiers des Fonds structurels destinés au développement rural, au profit de l'augmentation des paiements directs aux agriculteurs. Les négociateurs européens ont donné leur accord, à condition que cette réallocation ne dépasse pas 20% par année en moyenne. La proposition présentée par les négociateurs européens portait également sur les compléments aux paiements directs provenant du budget national. Grâce à cette décision, le niveau des paiements directs pourrait atteindre 55% en 2004, 60% en 2005, 65% en 2006 et 70% en 2007, avec une augmentation de l'ordre de 10% dans les années consécutives, pour atteindre les 100% 34 A. Jedraszko, op. cit., pp. 308-309. 35 L'égalité des droits pour les agriculteurs des pays candidats signifierait pour la France la renonciation à une partie des subventions, proposition à laquelle elle s'est fermement opposée. 36 Les pays qui versent dans le budget agricole commun plus qu'ils ne reçoivent. 37 W. Prazuch, «La situation de l'agriculture polonaise et ses perspectives dans l'Union européenne», in J.-M. de Waele, La Pologne et l'intégration européenne, Bruxelles, Editions de l'Université de Bruxelles, 2003, p. 149. 15
  • 18. en 2010. Dès 2007, la Pologne aurait également le droit de compléter les paiements directs à concurrence de 30% au-dessus du niveau annuel préétabli38. La Pologne a adopté, pour une période de trois ans (éventuellement prolongeable pour deux années supplémentaires), un système de paiements directs proportionnel à la surface des exploitations39. Une autre décision qui a résulté du processus des négociations porte sur la possibilité de conserver les aides étatiques au secteur agricole auxquelles la Pologne avait recours avant l'adhésion et qui n'ont pas d'équivalent dans les nouveaux instruments d'aide mis en place à l'occasion de l'adhésion européenne du pays. De même, la proposition de la Pologne, concernant la clause de protection du marché agricole durant les premières années après l'adhésion, a également été acceptée par les négociateurs européens, malgré son rejet initial en vertu de son non-respect du principe de libre-échange des marchandises à l'intérieur de l'Union. En outre, suite aux négociations avec la Pologne, la partie européenne a décidé d'augmenter l'aide supplémentaire aux exploitations non-marchandes (à hauteur de 1250 euros par année, pour une période de trois à cinq ans). Une autre décision a porté sur une période transitoire de cinq ans accordée à la Pologne pour la création de groupements de producteurs, accompagnée du support financier européen pour la réalisation de cette tâche. De plus, la Pologne s'est vue accorder une assistance financière pour appuyer les investissements dans les exploitations agricoles marchandes (investissements visant à conformer ces exploitations aux standards de l'Union), ainsi que pour appuyer l'aide technique, l'amélioration du marketing des produits agricoles et l'appui aux services du conseil agricole40. En ce qui concerne les quotas de production accordés à la Pologne, le pays a été obligé de réduire sa production laitière de manière considérable. Le quota de 9,38 millions de tonnes qui lui a été accordé, reste inférieur à la proposition de la Pologne qui voulait un quota de 11,22 millions de tonnes pour 2003, quota qui aurait dû s'accroître pour atteindre 13,74 millions de tonnes en 2008. Ce quota permet de satisfaire la demande intérieure actuelle. Néanmoins, face à une augmentation inéluctable de la demande dans l'avenir, le pays sera obligé d'importer du lait et des produits laitiers, et ce, alors même que ce besoin pourrait être satisfait grâce à son potentiel productif actuel. L'inflexibilité de l'Union dans ce domaine qui, avec le sucre, constitue un des domaines-clés de la production polonaise, a été dictée par le problème de surproduction de lait auquel l'Europe est confrontée depuis plusieurs décennies. En ce qui concerne le quota de production du sucre, il avoisine 1,67 millions de tonnes (contre 1,87 millions dans la proposition polonaise). Toutefois, la proposition polonaise d'augmenter le quota de sucre bénéficiant de subventions à l'exportation a été rejetée (91,9 mille tonnes contre 216 mille proposées par la Pologne). Le quota de production de l'isoglucose a été fixé à 26,8 mille tonnes (contre 20 mille proposées par la Pologne), et celui des pommes de terre à 145 mille tonnes (contre 260 mille dans la proposition polonaise). En ce qui 38 http://www.cie.gov.pl/WWW/serce.nsf/0/C007A3BC59E8BC62C1256E84002E9DFF?Open&restric ttocategory=Obszary%20tematyczne%3Erolnictwo; le 22. 10. 2004. 39 Indépendamment du niveau de production et sans tenir compte de la nature des productions. 40 http://www.cie.gov.pl/WWW/serce.nsf/0/C007A3BC59E8BC62C1256E84002E9DFF?Open&restric ttocategory=Obszary%20tematyczne%3Erolnictwo; le 22. 10. 2004. 16
  • 19. concerne le quota de production du tabac, il a été arrêté à 37,9 mille tonnes (contre 70 mille proposées par la Pologne)41. Pour les céréales et les oléagineux42, la surface d'exploitation qu'il a été décidé de subventionner par les paiements directs après l'adhésion de la Pologne a été fixée à 9,45 millions d'hectares pour la Pologne, et le rendement maximum de référence pour cette surface, selon le même principe, à trois tonnes par hectare43. La première limite est assez proche de la proposition de la Pologne (9,24 millions d'hectares), alors que la deuxième se révèle inférieure aux aspirations polonaises (3,6 tonnes par hectare). En ce qui concerne le nombre total de têtes d'élevage ayant droit aux paiements directs, les négociateurs européens se sont opposés au projet polonais de développement de l'élevage animalier en Pologne après l'adhésion européenne, en particulier en ce qui concerne les vaches allaitantes (326 mille animaux contre 1 million 500 proposés par la Pologne). Cette décision a probablement résulté de l'instabilité que connaît le marché européen de la viande bovine depuis les années 1970, problème qui a été aggravé dans les années 1990 en raison de la maladie de la vache folle44,45. 2.2.2 Nouvelle situation juridique et administrative de la Pologne. Comme les autres pays candidats, la Pologne a engagé des efforts considérables dès le début du processus des négociations, pour parvenir à intégrer l'acquis communautaire. Les ajustements dans ce cadre ont été concentrés sur deux domaines: l'harmonisation juridique et la création de structures administratives adaptées. En ce qui concerne les ajustements dans le domaine juridique, la Pologne a dû élaborer et mettre en œuvre un programme national d'harmonisation des lois avec la législation communautaire. Cela a généré un foisonnement de nouvelles lois dans des domaines comme la libre circulation des biens, les marchés publics, les assurances ou la propriété intellectuelle46. Ainsi, dans sa position initiale pour les négociations, la Pologne s'est engagée à réaliser les ajustements juridiques et institutionnels pour garantir l'harmonisation de la loi polonaise à la loi européenne dans le domaine vétérinaire et phytosanitaire47. Ces ajustements concernaient des questions comme le système de contrôle vétérinaire et phytosanitaire à la frontière avec les pays non-membres de l'Union; le système de 41 A. Czyzewski, B. Czyzewski, A. Henisz, Rolnictwo polskie w Unii Europejskiej. Wyniki negocjacji akcesyjnych, Poznan, Wydawnictwo Akademii Ekonomicznej w Poznaniu, 2003, pp. 8-9. 42 Les plantes cultivées pour leurs graines ou leurs fruits riches en lipides, dont on tire des huiles alimentaires ou industrielles; dans l'exemple cité, il s'agit principalement du colza. 43 Rada Ministrow, Raport na temat rezultatow negocjacji o czlonkostwo Rzeczypospolitej Polskiej w Unii Europejskiej, Warszawa, grudzien 2002. 44 J. Rowinski, «Stanowisko negocjacyjne Polski w rokowaniach o członkostwo w Unii Europejskiej. Problemy gospodarki zywnosciowej», Problemy integracji rolnictwa, Unia Europejska-Polska Biuletyn Informancyjny, n°2 [18], 2000, pp. 17-19. 45 A. Czyzewski et al., op. cit., p. 9. 46 Dans les années précédant l'accession européenne, la Pologne a adopté en moyenne cent lois d'adaptation à la législation communautaire par an. 47 Relatif aux soins à donner aux plantes, à leur protection contre les ennemis naturels. 17
  • 20. sécurité des aliments; les standards vétérinaires et phytosanitaires des aliments; les conditions sanitaires, hygiéniques et techniques pour la transformation des produits alimentaires; la création d'un système d'enregistrement et d'identification des animaux; le système de surveillance des maladies contagieuses des animaux ou l'utilisation des sous-produits animaliers48. A titre d'exemple, dans le cadre de la réalisation des engagements en vue de l'adhésion, le parlement polonais a voté en juillet 2001 une loi vétérinaire, qui portait sur la lutte contre les maladies contagieuses des animaux, sur les examens des animaux d'abattage et de la viande, ainsi que sur le métier de médecin et les cabinets médico- vétérinaires en Pologne49. Dans la même période, il a également voté une loi relative aux conditions sanitaires des aliments et une loi concernant la manière de nourrir les animaux. Des périodes transitoires ont été accordées à la Pologne pour l'ajustement structurel des entreprises de transformation des aliments. Ainsi, le délai d'application de tous les standards européens pour le lait et les produits laitiers polonais a été fixé à fin 2006 pour les entreprises de production ou de transformation du lait. En ce qui concerne la viande, ce délai a été fixé à fin 2007. D'ici là, les produits issus de ces entreprises ne pourront être commercialisés que sur le territoire polonais. De même, des périodes transitoires ont été décidées dans le domaine phytosanitaire en ce qui concerne l'utilisation de certains pesticides (fin 2006) et la culture de certaines espèces de pommes de terre (fin 2014). Les ajustements administratifs concernaient particulièrement la création des structures chargées d'appliquer les mesures communautaires dans le domaine agricole. Pour ce faire, la Pologne a entamé la mise en place du Système Intégré de Gestion et de Contrôle (Integrated Administration and Control System: IACS) pour la gestion des projets de développement et la surveillance des ressources financières transmises par l'Union européenne. Ce système à pour but de veiller à ce que les aides parviennent aux destinataires et d'éviter toute tentative de tromperie de leur part, et ce pour que la distribution des financements soit efficace et équitable. La création de ce centre de gestion était une condition nécessaire à l'obtention des paiements directs et des financements pour le développement des zones rurales. Ce système, dont les débuts remontent à 1999 devrait prendre sa forme définitive vers 2007, c'est-à-dire trois ans après l'entrée du pays dans l'Union. Dans ce cadre, deux institutions, l'Agence du Marché Agricole et l'Agence de la Restructuration et de la Modernisation de l'Agriculture, ont été créées comme agences de paiement, pour gérer la distribution et le contrôle des fonds européens destinés aux zones agricoles50. 48 Rada Ministrow, Raport na temat rezultatow negocjacji o czlonkostwo Rzeczypospolitej Polskiej w Unii Europejskiej, Warszawa, grudzien 2002, pp. 19-21. 49 La nouvelle loi est un amendement des lois de 1997 et 1990, portant sur les mêmes questions. 50 http://www.cie.gov.pl/WWW/serce.nsf/0/C007A3BC59E8BC62C1256E84002E9DFF?Open&restric ttocategory=Obszary%20tematyczne%3Erolnictwo; le 22. 10. 2004. 18
  • 21. 2.2.3 Résultats des rapports évaluatifs de la Commission européenne. Tout au long du processus des négociations, l'avancement des ajustements dans différents pays candidats a fait l'objet de rapports annuels préparés par la Commission européenne. L'objectif de ces rapports était d'évaluer les capacités de ces pays à reprendre et à mettre en œuvre l'acquis communautaire. Des conclusions ont été tirées sur la base d'examens portant sur l'état de la législation et de l'administration du pays concerné. En ce qui concerne les progrès réalisés par la Pologne, dont ceux relatifs au domaine agricole, la première évaluation date de juillet 199751. Le rapport a souligné les améliorations significatives réalisées en matière d'alignement sur l'acquis communautaire. Néanmoins, il estimait que le pays devait encore renforcer ses efforts en la matière. Un autre rapport de novembre 1998 avait abouti à des conclusions similaires, mettant l'accent sur la nécessité de poursuivre la réalisation des ajustements. Dans ce cadre, le rapport encourageait surtout le renforcement des efforts pour la politique de développement rural et la restructuration de l'industrie agroalimentaire, avec comme objectif la modernisation des installations vétérinaires et phytosanitaires. Le rapport d'octobre 1999 rejoignait les rapports de 1997 et 1998, en soulignant encore le retard de la Pologne au niveau des ajustements institutionnels et de l'adoption d'une politique et d'un programme de restructuration de l'agriculture. Toujours dans le cadre des ajustements dans le domaine agricole, le rapport de novembre 2000 rappelait que des efforts considérables restaient à accomplir au niveau légal et institutionnel. Notamment, le rôle des institutions responsables de la distribution et du contrôle des ressources financières en provenance de l'Union européenne restait à définir. Il fallait encore appliquer des stratégies de commercialisation des produits, connecter la Pologne au réseau d'information comptable agricole, aligner la législation polonaise sur l'acquis communautaire en ce qui concerne la gestion des marchés agricoles et aligner la législation sur l'acquis communautaire en matière phytosanitaire et vétérinaire. Le rapport de novembre 2001, estimait que la Pologne avait accompli des progrès considérables pour adopter les mécanismes communautaires dans le domaine agricole, en soulignant la nécessité de poursuivre ses efforts. Ensuite, le rapport d'octobre 2002 reconnaissait les progrès réalisés par la Pologne dans le domaine législatif52. Néanmoins, il soulignait la nécessité d'améliorer la situation administrative, ainsi que la législation vétérinaire. Il a également souligné trois domaines où des déficiences institutionnelles ont été observées: l'agriculture, le contrôle de la nourriture et la protection de l'environnement. Par conséquent, pour remplir les conditions d'accession à l'Union européenne, la Pologne devait augmenter d'environ 15% le nombre de fonctionnaires ayant une bonne préparation professionnelle. En 51 Tous les rapports décrits dans cette section du travail, c'est-à-dire jusqu'à 2001 compris, se trouvent résumés dans la référence: http://www.europa.eu.int/scadplus/leg/fr/lvb/e04106.htm; le 28. 10. 2004. 52 A. Jedraszko, op. cit., pp. 224-225. Traite des rapports 2002 et 2003 de la Commission européenne. 19
  • 22. chiffres, cela aurait représenté dix-huit mille employés qui auraient dû être embauchés sur concours. Selon le rapport de novembre 2003, l'état de l'adaptation de la loi polonaise à la loi européenne pouvait être considéré comme avancé, même si des efforts restaient à réaliser dans plusieurs domaines. La grande majorité des lois communautaires se trouvait intégrée dans la législation polonaise. 2.3 Application de la PAC et de la politique structurelle européenne en Pologne d'un point de vue pratique. Avec l'entrée de la Pologne dans l'Union européenne le 1er mai 2004, le système d'intervention sur le marché agricole polonais a été remplacé par les solutions appliquées sur le marché communautaire. Parallèlement a été introduit en Pologne le système des paiements directs aux agriculteurs en fonction de la surface d'exploitation. Avec pour objectif l'appui à la restructuration et à la modernisation du secteur agricole, les programmes pour les années 2004-2006, mis en place par le Ministère de l'Agriculture et du Développement Rural, ont démarré53. Ainsi ont vu le jour le «Programme Opérationnel Sectoriel Restructuration et Modernisation du Secteur Alimentaire et Développement de Zones Rurales»54 et le «Plan de Développement des Zones Rurales»55. Dans la suite du sous-chapitre, il s'agira de présenter les aspects de la politique de développement rural dans le cadre de la PAC et de la politique structurelle européenne. Les mesures de la nouvelle politique agricole communautaire seront également analysées, notamment quant à leur rôle pour l'intégration de l'agriculture polonaise au marché communautaire. Pour cela, cette partie du travail examinera l'assistance de l'Europe pour l'ajustement de l'agriculture polonaise à travers les Fonds de pré- accession, les paiements directs aux agriculteurs et les Fonds structurels. 2.3.1 Aspects du développement rural dans le cadre des instruments traditionnels de la PAC. Dans le cadre des préparatifs pour l'élargissement de l'Europe aux PECO et pour le nouveau cycle des négociations à l'OMC, une nouvelle politique de développement rural durable a été initiée par l'Union européenne le 1er janvier 2000. Pour répondre aux nouvelles demandes en matière de fonction sociale de l'agriculture (principalement après l'intégration des PECO, ayant une économie reposant essentiellement sur le secteur agricole), l'objectif de promotion de la durabilité et de la multifonctionnalité de l'agriculture est devenu prioritaire pour l'avenir des zones rurales européennes. 53 W. Olejniczak, «Agencja Rynku Rolnego - agencja platnicza», Biuletyn Informacyjny Agencji Rynku Rolnego, n°4, kwiecien 2004, p. 4. 54 Ministerstwo Rolnictwa i Rozwoju Wsi, Sektorowy Program Operacyjny Restrukturyzacja i Modernizacja Sektora Zywnosciowego oraz Rozwoj Obszarow Wejskich, 2003. 55 Ministerstwo Rolnictwa i Rozwoju Wsi, Plan Rozwoju Obszarów Wiejskich na lata 2004-2006, marzec 2004. 20
  • 23. La politique de développement rural durable supposait un lien proche entre les instruments traditionnels de la PAC et les mesures de développement rural. Pour réaliser les objectifs assignés à cette nouvelle politique, on cherchait surtout à: améliorer les exploitations agricoles; assurer la sécurité et la qualité des produits alimentaires; garantir des revenus équitables et stables pour les agriculteurs; protéger l'environnement; réaliser des activités complémentaires ou alternatives créatrices d'emploi pour freiner l'exode rural et renforcer le tissu économique et social des campagnes; améliorer les conditions de vie et de travail dans les zones rurales; assurer une égalité de chances aux habitants des zones rurales par rapport aux habitants des milieux urbains56. Ainsi, la politique structurelle de développement rural fait partie intégrante de la nouvelle PAC, constituant un deuxième pilier de celle-ci, à côté des instruments traditionnels de la PAC. Dans le premier pilier, traditionnel, de la nouvelle PAC il y a: les mesures de régulation (la mise en place de l'organe d'intervention, les principes de la compétitivité et les principes du commerce extérieur) et la politique des prix (la mise en place des prix minimums et le fonds pour le paiement des prix garantis)57. Ces instruments d'intervention sont soit internes, soit externes. Les premiers ont pour but de contrôler l'offre sur le marché intérieur. Ces instruments sont, par exemple, les prix d'intervention (le prix minimum pour un produit sur le marché intérieur, prix auquel l'Etat achète aux agriculteurs, lors d'un achat d'intervention, les produits qu'ils n'ont pas réussi à commercialiser à un prix plus élevé sur le marché libre), les achats d'intervention, le stockage des surplus dans les périodes d'intensification de l'offre ou les quotas de production. Le rôle des instruments externes est notamment de protéger le pays contre l'importation des produits meilleur marché provenant de pays non-membres de l'Union. Il s'agit là de mesures comme les taxes à l'importation, les contingents, les normes techniques et sanitaires pour les produits importés. A ces instruments externes s'ajoutent également les subventions à l'exportation. Les réformes de la PAC réalisées sous la pression du cycle des négociations au GATT, puis à l'OMC, ont eu pour conséquence la limitation de cette intervention sur le marché, au profit des paiements directs aux agriculteurs. Dans le cadre du Cycle d'Uruguay, les paiements directs n'ont pas été classés comme faisant partie de «la boîte orange» (c'est-à-dire forme de support à l'agriculture pouvant entraîner des distorsions aux échanges commerciaux), ce qui aurait signifié l'obligation de réduire les paiements de 20% aux cours des six années à venir58. Toutefois, ils n'ont pas non plus été définis comme mesures appartenant à «la boîte verte», c'est-à-dire considérés comme n'ayant pas d'effet sur les échanges. Le fait que les paiements directs ont été classés comme appartenant à «la boîte bleue» signifie qu'ils sont perçus comme admis conditionnellement, uniquement s'ils sont en rapport avec l'objectif de limitation de la production, d'où l'obligation de mise en jachère de terres agricoles59, et si leur montant 56 http://www.europa.eu.int/scadplus/leg/fr/lvb/160006.htm; le 27. 10. 2004. 57 A. Kowalski, «Ewolucja Wspolnej Polityki Rolnej», Biuletyn Informacyjny Agencji Rynku Rolnego, n°4, kwiecien 2004, p. 56. 58 W. Guba, W. Piskorz, Implikacje reform Wspolnej Polityki Rolnej Unii Europejskiej dla Polski, Warszawa, Urzad Komitetu Integracji Europejskiej, 2002, pp. 47-49. 59 Terre non cultivée temporairement pour permettre la reconstitution de la fertilité du sol ou, comme dans le cas présent, pour limiter une production jugée trop abondante. 21
  • 24. est lié à la surface de base de la production, la récolte référentielle et le nombre total des animaux étant constants. Grâce à la réforme de 2003, un paiement unique, découplé de la production, commence à entrer en vigueur le 1er janvier 200560. Ainsi, la pression des négociations commerciales multilatérales a contribué au changement des objectifs assignés aux paiements directs. Elle a été un des facteurs à l'origine du déplacement du centre de gravité du soutien agricole européen de la production (excessif au sein de l'Union) vers la restructuration de l'agriculture et le développement rural61. La deuxième raison de ce changement a résulté des revendications de l'opinion publique après le fléau des maladies animales (la vache folle, la fièvre aphteuse) et la contamination des viandes (les poulets à la dioxine), portant sur l'abandon du support à la production intensive au profit de méthodes de production saines et soucieuses de l'environnement. Les mesures de développement rural durable devraient pouvoir aider à la réalisation de ces objectifs, grâce aux programmes agro-environnementaux et à la limitation des pesticides et des engrais minéraux dans la production agricole. La troisième raison du déplacement du centre de gravité de la production vers la restructuration de l'agriculture et le développement des zones rurales, a été l'intention de freiner l'exode des populations rurales de l'Europe vers les villes. Dans ce sens, les fonds destinés au développement rural durable ont pour objectif la protection du patrimoine culturel et du paysage des zones rurales européennes. 2.3.2 Aspects du développement rural dans le cadre de la politique structurelle européenne. En ce qui concerne la politique structurelle européenne de développement rural, deuxième pilier de la nouvelle PAC, elle propose deux catégories de mesures62. Premièrement, il y a les mesures d'accompagnement à la réforme de 1992 parmi lesquelles: la préretraite, les programmes agro-environnementaux, le boisement des terres agricoles et le régime concernant les zones défavorisées. Deuxièmement, il y a les mesures de modernisation et de diversification des exploitations agricoles comme l'investissement dans les exploitations, l'installation de jeunes agriculteurs, la formation, le soutien des investissements dans les installations de transformation et de commercialisation, l'aide complémentaire à la sylviculture63, la promotion et la reconversion de l'agriculture. 60 Cette entrée en vigueur en 2005 concernait dix pays de l'Europe à quinze: l'Autriche, la Belgique, le Danemark, l'Allemagne, l'Irlande, l'Italie, le Luxembourg, le Portugal, la Suède et le Royaume-Uni. La Finlande, la France, la Grèce, les Pays-Bas et l'Espagne devraient appliquer ce régime en 2006, Malte et la Slovénie en 2007. Quant aux huit autres nouveaux États membres, ils devraient le mettre en place au plus tard à partir de 2009. A cette date, la réforme aura réduit les mesures de la «boîte orange» de 70% par rapport au niveau de 1992. Ce passage des aides de l'Union européenne de la «boîte orange» à la «boîte bleue» et à la «boîte verte» signifiera également un transfert plus efficace des aides aux agriculteurs et une plus grande transparence des diverses mesures de soutien; http://www.delcan.cec.eu.int/fr/press_and_information/speeches/2003/2003-12-11.shtml; le 29. 11. 2004. 61 W. Guba, W. Piskorz, op. cit. p. 52. 62 http://www.europa.eu.int/scadplus/leg/fr/lvb/160006.htm; le 27. 10. 2004. 63 Entretien et exploitation des forêts. 22
  • 25. Au Sommet de Berlin le 24 et le 25 mars 1999 une révision des aides structurelles a été décidée, pour concentrer les efforts en direction des régions en difficulté. Ainsi, les Fonds structurels européens (généraux, et non pas seulement ceux dans le cadre de la PAC) pour la période 2000-2004 se sont concentrés sur trois objectifs64. Le premier objectif, accaparant 70% du budget, vise le soutien au développement des régions ayant un PIB par habitant inférieur à 75% de la moyenne communautaire. Le deuxième objectif, qui représente 11,5% du budget, est l'assistance à la reconversion des zones en mutation économique et à la diversification des activités dans les zones rurales et les zones urbaines en difficulté. Le troisième objectif (employant 18,5% du budget) touche l'adaptation et la modernisation des politiques et des systèmes d'éducation, de formation et d'emploi. Les actions dans le cadre de l'aide structurelle sont menées en partenariat entre la Commission européenne et les Etats membres (l'autorité nationale, régionale, locale et les partenaires socio-économiques). Ainsi les aides de l'Union viennent seulement en complément des aides nationales, régionales et locales, selon le principe d'additionnalité des fonds. En effet, par ce principe, l'Europe pose comme condition que, pour obtenir un fond communautaire, le pays doit engager des fonds propres venant s'y ajouter. Dans le cadre du deuxième pilier de la PAC, l'Union européenne influe sur les changements structurels dans différents pays membres à travers quatre Fonds structurels communautaires65. Le Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA) est destiné à la modernisation de l'agriculture et au développement rural pour assurer le développement durable du secteur et contribuer à réduire les disparités entre les zones rurales et urbaines de l'Europe. Créé en 1962, il constitue le budget agricole de l'Union européenne. Pour une meilleure gestion des actions qu'il finance, le fonds a été divisé en deux sections visant deux buts distincts: une section de garantie, à travers le soutien des marchés agricoles, et une section d'orientation, contribuant au développement rural (cette dernière section étant seule considérée comme Fonds structurel). La section orientation du FEOGA s'est vue attribuer trois fonctions principales. Elle doit tout d'abord financer les investissements favorables au développement rural, c'est- à-dire promouvoir le développement et l'ajustement structurel des régions en retard de développement66. Ensuite, elle a pour fonction de financer les projets menés dans le cadre de l'initiative européenne67 LEADER+ (qui sera abordée plus en détail ci-après) pour le développement rural. Enfin, elle doit financer les actions spécifiques portant sur des régions ou des secteurs particuliers: les projets de démonstration, les transferts de savoir-faire et les études financés directement par l'Union européenne, avec l'appui des autorités nationales. 64 http://www.info-europe.fr/europe.web/document.dir/fich.dir/qr000164.htm, le 27. 10. 2004. 65 http://www.info-europe.fr/europe.web/document.dir/fich.dir/qr000924.htm, le 27. 10. 2004. 66 La promotion de la qualité des produits agricoles et agroalimentaires; l'amélioration des infrastructures rurales; la rénovation et le développement des villages, la protection du patrimoine rural et de l'environnement; les activités liées à l'exploitation forestière; la recherche et le développement des technologies agricoles et sylvicoles; la formation professionnelle; l'amélioration des conditions de vie. 67 Les initiatives européennes constituent des programmes spécifiques à travers lesquels la Commission européenne cherche à résoudre les problèmes ayant un impact au niveau européen sur le développement rural, le chômage des jeunes, etc. 23
  • 26. Le FEOGA est coordonné par la Commission européenne et la Direction Générale de l'Agriculture. A l'intérieur de chaque pays membre, les autorités nationales compétentes en partenariat avec la Commission européenne organisent la sélection des projets et gèrent les crédits du fonds. Le suivi et l'évaluation de cette action est assuré par les Comités de suivi, composés des représentants aux niveaux régional, national et communautaire. Des évaluations ont lieu ex ante, à mi-parcours et ex post. En ce qui concerne le budget du FEOGA pour les années 2000-2006, selon les décisions prises durant le Sommet de Berlin, environ 4,3 milliards d'euros seront alloués chaque année aux mesures de développement rural, c'est-à-dire à la section orientation du fonds. Comme il a été mentionné dans l'exemple du FEOGA, les Fonds structurels rendent possible la réalisation des initiatives communautaires. Au Sommet de Berlin, le nombre des initiatives communautaires a été fixé à quatre, parmi lesquelles l'initiative LEADER+. Cette initiative, prévue pour la période 2000-2006 et disposant d'un budget de 2 milliards 20 millions d'euros68, a pour but la diversification des activités économiques des territoires ruraux selon une approche décentralisée. Elle est composée de trois volets. Le premier volet est relatif à la mise en place de stratégies locales de développement rural innovantes, intégrées et participatives, ayant un caractère pilote69. Le deuxième volet est lié à la coopération entre les territoires ruraux à l'intérieur d'un pays membre, la coopération transnationale à l'intérieur de l'Union ou la coopération transnationale avec un territoire hors de l'Union70. Le troisième volet vise la mise en réseau des zones rurales dans le cadre de l'Observatoire européen des zones rurales71. 2.3.3 Assistance de l'Union européenne pour l'ajustement de l'agriculture polonaise. Le «Plan de Développement des Zones Rurales» et le «Programme Opérationnel Sectoriel Restructuration et Modernisation du Secteur Alimentaire et Développement des Zones Rurales» ont été mis en place par le Ministère de l'Agriculture et du Développement des Zones Rurales avec l'entrée de la Pologne dans l'Union européenne le 1er mai 2004. Ils définissent la direction donnée au développement des zones rurales en Pologne pour les années 2004-2006. Le premier s'inscrit dans le cadre de la PAC et constitue le fondement de l'implémentation en Pologne du modèle européen d'agriculture et de développement durable des zones rurales. Quant au deuxième, il fait partie de la politique structurelle communautaire et a la tâche de faciliter l'adaptation du secteur agroalimentaire polonais au marché européen grâce à l'amélioration de la qualité, de la compétitivité et du marketing des produits72. 68 http://www.europa.eu.int/scadplus/leg/fr/lvb/g24208.htm, le 27. 10. 2004. 69 Programme de développement original, sous forme de test grandeur nature, éventuellement transférable par la suite à d'autres régions et ayant pour but, par exemple, de valoriser et de diversifier les ressources locales, de développer les petites et les moyennes entreprises, de développer l'artisanat et le tourisme, de protéger l'environnement, de maintenir et de développer les services, etc. 70 Cela concerne la réalisation des projets communs à des acteurs locaux d'un ou de plusieurs Etats, à la recherche de complémentarité et d'une critique objective venant du partenaire. 71 L'objectif visé est la transmission des informations, la stimulation de la coopération, l'échange de l'expertise et la diffusion des bonnes pratiques. 72 K. Piekut, «Kierunki rozwoju obszarow wiejskich w latach 2004-2006 po przystapieniu Polski do Unii Europejskiej», Wiadomosci melioracyjne i lakarskie, n°4, 2003, pp. 175-179. 24
  • 27. Pour la réalisation de ces deux programmes, la Pologne s'est vue accorder l'accès à différentes sources de financement, parmi lesquelles les Fonds de pré-adhésion, les paiements directs et les Fonds structurels. Les Fonds de pré-adhésion. Au 1er mai 2004, la Pologne et les autres PECO candidats devaient être prêts pour mettre en œuvre les politiques et les réglementations communautaires. Pour que cette tâche complexe (en raison du volume de l'acquis communautaire et de la nécessité de préparer les structures administratives pour son application) puisse être accomplie, l'Union européenne à quinze a mis à disposition de ces pays des aides financières considérables pour la période de la pré-accession. Le «Poland and Hungary Assistance for the Reconstruction of the Economy» (PHARE) a été le premier programme d'assistance de l'Union européenne ciblé sur les PECO, en place depuis la chute du Mur de Berlin en 198973. Destiné initialement à apporter le support matériel et technique (sous la forme d'un service de conseil, de formations et de transfert de savoir-faire) à une transformation de l'économie socialiste en économie de marché, il a été réorienté en 1998 pour servir de fonds financier pour la préparation de la Pologne à l'adhésion européenne, en soutenant la mise en place des institutions et l'amélioration des capacités de l'administration étatique et ce, également dans le domaine de l'agriculture. Son étendue, dans la première phase limitée à la Pologne et à la Hongrie, a été élargie par la suite aux autres PECO candidats à l'adhésion européenne. Il a servi également au développement régional, avec l'objectif de diminuer les inégalités entre les régions et de favoriser la cohésion socio-économique du pays à travers la promotion de l'activité économique, la création de nouvelles places de travail et la mise en place d'infrastructures. Les objectifs du programme PHARE ont été indiqués dans le document de l'Union européenne intitulé «Le partenariat pour l'adhésion». Dans la période entre 1990 et 1997, à côté de la restructuration et la privatisation de l'industrie, du développement des entreprises, de la promotion des exportations et du support pour le développement régional, les objectifs à réaliser portaient également sur le développement de l'agriculture et des zones rurales. Dès 1998, des dépenses plus importantes ont été prévues pour la préparation de l'intégration européenne du pays (voir tableau ci- dessous). Sommes allouées à la Pologne dans le cadre du programme PHARE74. Année Montant total Somme pour le secteur Pourcentage pour le [en millions d'euros] agricole [en millions d'euros] secteur agricole 1998 64,7 7,5 11,6 % 1999 213,5 27,6 12,9 % 2000 484,4 43,6 9,0 % 2001 468,5 32,9 7,0 % 2002 - 35 - 73 Ministerstwo Rolnictwa i Rozwoju Wsi, Sektorowy Program Operacyjny Restrukturyzacja i Modernizacja Sektora Zywnosciowego oraz Rozwoj Obszarow Wejskich, 2003, p. 56-59. 74 Idem, p. 58. 25
  • 28. Dans l'analyse des Fonds de pré-adhésion pour la Pologne, une attention particulière devrait être consacrée au programme opérationnel «Special Accession Programme for Agriculture and Rural Development» (SAPARD)75, programme sectoriel mis en place comme instrument particulier pour l'adaptation de l'agriculture (destiné exclusivement au développement des zones rurales et de l'agriculture). Pour faciliter l'adoption de l'acquis communautaire et pour préparer l'agriculture et les habitants des zones rurales aux défis posés par l'intégration européenne, trois objectifs ont été assignés au programme SAPARD. Le premier visait l'amélioration de la compétitivité de l'agriculture et de la transformation agroalimentaire sur le marché intérieur et les marchés externes. Le deuxième objectif concernait l'ajustement du secteur agroalimentaire aux exigences du marché unique dans le domaine sanitaire, le domaine de l'hygiène et de la qualité. Finalement, le troisième objectif concernait la stimulation du développement multifonctionnel des zones rurales, à travers le développement des infrastructures techniques et la mise en place des conditions permettant de développer des activités économiques alternatives dans les campagnes. Pour atteindre ces objectifs, la réalisation de six tâches était nécessaire: l'amélioration de la transformation et du marketing des produits agricoles; les investissements dans les exploitations agricoles; le développement et l'amélioration des infrastructures des zones rurales; la diversification de l'activité économique dans les zones agricoles; le développement des formations professionnelles; la mise en place des aides techniques. Il visait également la préparation de la Pologne en vue de l'adoption de l'acquis communautaire relatif à la PAC, en particulier en ce qui concerne la bonne utilisation des Fonds structurels après l'accession en mai 2004 grâce à la création des agences de paiements nationales. En raison de la faible préparation de ces institutions pour affronter les nouveaux défis (malgré plusieurs années de préparatifs), la mise en oeuvre du programme SAPARD en Pologne, prévue pour l'année 2000, n'a débuté que le 2 juillet 2002. A cette date seulement, la Commission a pris la décision de transférer à la Pologne la compétence de la gestion des ressources financières dans le cadre du programme et donc, par cela, reconnu la préparation des structures polonaises pour sa réalisation. Ce retard dans la prise de décision par la Commission européenne pourrait s'expliquer par le système de gestion des ressources allouées à la Pologne dans le cadre du programme SAPARD76. Contrairement à la gestion des ressources transmises au pays dans le cadre d'autres programmes, celle des ressources allouées dans le cadre du SAPARD se caractérise par une décentralisation totale, le gouvernement polonais en étant le seul responsable. C'est l'Agence de la Restructuration et de la Modernisation de l'Agriculture qui concentre les décisions d'accorder ou non les financements pour les projets relatifs au programme. Parmi les bénéficiaires potentiels de l'aide financière dans le cadre du programme SAPARD, on énumère: les administrations locales pour les investissements destinés à l'infrastructure des zones rurales77; les entrepreneurs et les groupements de producteurs 75 Idem, pp. 59-60. 76 J. Banski, European Union pre-accession aid in the development of Poland's rural areas, Rzeszow, Rozprawy i Monografie Wydzialu Ekonomicznego Uniwersytetu Rzeszowskiego, 2002, pp. 1-7. 77 Cela concerne tout le territoire du pays, à l'exception des villes de plus de 5 mille habitants. 26
  • 29. agricoles pour l'amélioration de la transformation et du marketing des produits d'origine animale et des fruits et légumes; les agriculteurs, pour la modernisation des exploitations agricoles spécialisées dans la production du lait et dans l'élevage de bêtes d'abattage, ainsi que pour la diversification de la production agricole78. Les sommes attribuées à la Pologne pour les années 2000-2003 par la Commission européenne dans le cadre du programme SAPARD, sont regroupées dans le tableau ci-dessous. Sommes allouées à la Pologne dans le cadre du programme SAPARD79. Année Montant total Date de la signature [en millions d'euros] de l'accord 2000 171,6 26 mars 2001 2001 175,1 6 juin 2002 2002 179,9 3 avril 2003 2003 181,7 4 juin 2003 Les dates de signature des accords de financement du programme SAPARD sont postérieures à leur année d'application à cause des retards mentionnés plus haut, les sommes indiquées ayant été allouées rétroactivement. En comparant les montants provenant des programmes PHARE et SAPARD, il saute aux yeux que ce dernier, entièrement consacré à l'agriculture, a contribué de manière beaucoup plus importante à l'évolution du secteur que la partie agricole du premier. Ainsi, c'est principalement le programme SAPARD qui a permis à la Pologne d'entamer les travaux relatifs à la politique structurelle européenne de développement rural. La préparation des institutions et des cadres, ainsi que la mise en place des procédures adaptées aux normes communautaires ont été réalisées grâce à ce programme. Dans ce sens, les programmes de pré-adhésion mis en place par l'Union, et en particulier le SAPARD, ont préparé les bases pour une intégration réussie de l'agriculture polonaise au contexte de l'après 1er mai 2004. Le «Programme Sectoriel Opérationnel Restructuration et Modernisation du Secteur Alimentaire et Développement des Zones Rurales» mis en place par le gouvernement polonais comme partie intégrante du «Plan National de Développement pour les années 2004-2006», cherche, après l'adhésion européenne du pays, à poursuivre sur la voie du programme SAPARD. Les paiements directs aux agriculteurs. Les paiements directs aux agriculteurs constituent une des formes d'assistance financière de l'Union européenne pour les zones rurales qui sont entrées en vigueur après l'accession de la Pologne. Le versement de ces aides, tel qu'il a été décidé pour la Pologne suite aux négociations pour son adhésion à l'Europe, fonctionne suivant un système simplifié de subvention forfaitaire à l'hectare, sans lien avec la production. Les paiements directs de base peuvent être complétés par des aides complémentaires pour les terres sur lesquelles on cultive le houblon, le tabac, les pommes de terre destinées à 78 M. Ciechomski, «SAPARD. Rusza program pomocy finansowej», Technika Rolnicza, n°4, 2002, p.9. 79 Ministerstwo Rolnictwa i Rozwoju Wsi, Sektorowy Program Operacyjny Restrukturyzacja i Modernizacja Sektora Zywnosciowego oraz Rozwoj Obszarow Wejskich, 2003, pp. 59-60. 27