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Executive Master Marketing Management 2013-2014 - Cours d’Intelligence Economique de
Monsieur Christian HARBULOT, professeur à l’ESSEC.
Rapport d'Etude sur "les stratégies d'influence
gouvernementales sur l'Open Data" – décembre 2013
Auteurs :
Charles-Antoine d’HOOP (rapporteur)
Aude DEFRETIERE
Mar GARRIDO
Frédéric LARCHIER
Soumaya LOUATI
Esther PETIT
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REMERCIEMENTS
Les auteurs remercient chaleureusement les 10 personnes qui ont bien voulu répondre à leurs
sollicitations, parfois pressantes, pour constituer ce rapport dans lequel chacun des membres de
l’équipe s’est investi avec intérêt, méthode et patience. La diversité des interlocuteurs et la qualité des
échanges auront permis, nous l’espérons, de rendre plus intéressant et pertinent ce rapport, et l’Open
Data nous est apparu au fil des entretiens comme étant économiquement stratégique, politiquement
incontournable et démocratiquement exigeant.
L’exercice académique de rédaction d’un rapport sur un sujet aussi « ouvert », sans jeux de
mots, a été très formateur, et prépare la rédaction de la thèse professionnelle du Master qui validera
notre diplôme ESSEC en Marketing Management.
Pour des raisons de confidentialité, nous ne mentionnons pas les noms des personnes
interviewées dans ce rapport. Néanmoins, afin de conserver au rapport son intérêt, nous portons à la
connaissance du lecteur les différentes organismes et institutions interviewés : institutions publiques,
journalistes, patron de start-up, collectivités locales, associations, partis politiques, grandes entreprises
impliquées dans le domaine, juristes.
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ABSTRACT
The “Competitive Intelligence” class of M.. Christian Harbulot is part of the ESSEC
Marketing & Management Executive Master Program. It aims at learning the proper ways to discover
real information out of what is pure demagoguery. M. Harbulot demanded to write a paper that would
allow us to leverage information according to his methods. “The big data shift”, “smart grids issues”,
or “risks of a cooperation agreement” were as many suggested topics, but our group decided to
specifically focus on “The influential strategies of governments on Open Data.”
Indeed, the Open Data movement, which consists in delivering public data on the Internet for
public or private use, is inherent with the decisions of the political sphere. Most of democracies, as
well as many local authorities, have already widely opened their databases. In order to reach an
impartial judgment about the strategies of the past and present French governments on this matter, we
decided to compare them with the one held in the USA, the UK, India, or on the African and the
European continents.
As a consequence, our team organized several meetings with influential politicians, legal experts,
senior officials, association leaders and, last but not least, with people who create and share Open
Data, like start-up’s CEOs and project manager of local authorities. We also studied terms of law and
official reports. Some members of the team attended events planned by Etalab or Sorbonne law
schools.
This paper analyzes and synthetizes the strategies of many different countries, illustrated with actual
examples of open data policies.
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RESUME
Le cursus académique de l’exécutive Master ESSEC en Marketing Management comporte un
cours d’Intelligence Economique dispensé par M. Christian HARBULOT. Il est demandé pour
l’apprentissage de ce cours de rédiger un rapport d’étude de façon à apprendre à chercher de
l’information et discerner le réel de la démagogie. Parmi les sujets proposés : « pourquoi la France a
raté le virage du big data, les smart grid, les risques d’un accord de coopération, etc… », les auteurs
ont choisi le sujet « les stratégies d’influence gouvernementales sur l’Open Data ».
Le principe de l’Open Data consiste à rendre disponible par internet les données numériques
publiques pour une utilisation privée ou publique, et l’Open Data est donc par nature un sujet où
l’impulsion politique joue un rôle prépondérant. Les premières analyses ont montré que la plupart des
démocraties mondiales, ainsi que de nombreuses collectivités locales, ont ouvert leurs bases de
données. Afin de porter un jugement plus objectif sur la stratégie des gouvernements français passés
et présents, nous avons fait le choix d’étudier les stratégies d’influence américaines, anglaises,
indiennes, panafricaines et européennes.
En France, l’équipe de rédaction a ciblé ses efforts sur la rencontre d’acteurs influents tels que
des hommes politiques, des juristes, des hauts fonctionnaires et des responsables d’associations, mais
aussi ceux qui « font l’Open Data » au quotidien, à savoir des patrons de start-up et des responsables
de projets Open Data dans les collectivités. Une recherche bibliographique complémentaire a été
orientée sur les textes juridiques et les rapports officiels, et plusieurs membres de l’équipe ont
participé à des évènements organisés par Etalab ou des facultés de droit parisiennes.
Le présent rapport restitue une synthèse des stratégies, illustrée d’exemples concrets de réutilisation
des données dans les pays étudiés, pondérée par des jugements sur celles qui ont été observées.
MOTS CLES
Etalab, Open Data, cada, sgmap, cnil, anssi, disic, libertic, popi, foia, raw_data, semantic data, Linked
data, metadata, opendatasoft, datarepublica, OpenKnowledgeFoundation, bigdata, dspl, PublicData,
democratie2.0, intelligence économique, statistiques, données personnelles, indexation, startup,
stratégies, influence, numérique, transparence
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TABLE DES MATIERES
Remerciements.........................................................................................................................1
Abstract ....................................................................................................................................2
Resumé......................................................................................................................................3
Mots clés ...................................................................................................................................3
Table des matières ...................................................................................................................4
Table des figures......................................................................................................................6
Introduction .............................................................................................................................8
1. L’Open Data dans le monde..........................................................................................12
1.1. Aux Etats-Unis ......................................................................................................................12
1.2. En Grande-Bretagne ............................................................................................................15
1.3. En Inde...................................................................................................................................17
1.3.1. Contexte et enjeux............................................................................................................17
1.3.2. Le cadre juridique en Inde................................................................................................18
1.3.3. L’admnistration indienne : culture et organisation ..........................................................18
1.3.4. Illustration du modèle indien ...........................................................................................20
1.4. L’Open Data panafricain .....................................................................................................24
1.4.1. Genèse..............................................................................................................................24
1.4.2. L’Open Data de la banque africaine du développement ..................................................25
1.4.3. Le développement économique et la lutte contre la corruption .......................................26
1.4.4. Exemple de l’Afrique du Sud...........................................................................................27
1.4.5. La protection des données personnelles en Afrique du Sud : un frein pour l’Open Data ?
29
1.5. Conclusion sur l’Open Data dans les pays étrangers étudiés...........................................29
2. La politique européenne sur l’Open Data....................................................................31
2.1. La Mise en place d’un cadre juridique : la directive 2003/98/CE....................................31
2.2. Les apports de la directive 13/06/2013................................................................................32
2.3. La mise en place de programme de R&D&I......................................................................34
2.4. Le portail européen de l’Open Data ...................................................................................34
3. La politique affichée en France.....................................................................................34
3.1. Un besoin de démocratie ......................................................................................................34
3.2. Un vecteur de modernisation de l’Etat...............................................................................36
3.3. Etat des lieux de la législation..............................................................................................39
4. Un mouvement d’ouverture entravé ............................................................................42
4.1. Les faits en contradiction avec les paroles..........................................................................42
4.1.1. Un gouvernement impliqué, mais pas trop … .................................................................42
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4.1.2. Un écosysteme défaillant .................................................................................................44
4.2. La défiance numérique, une exception culturelle française .............................................44
4.3. Les difficultés juridiques : sont-elles des prétextes pour ne pas faire ?...........................46
4.4. Les difficultés techniques : qu’en est-il réellement ?.........................................................49
4.4.1. Les étapes principales pour mettre techniquement en œuvre un Open Data ...................49
4.4.2. Les leviers d’influence : qui sont les métiers concernés ? ...............................................54
4.4.3. Organiser l’influence........................................................................................................55
5. Les enjeux économiques de l’Open Data......................................................................58
5.1. Quels avantages pour l’Europe ? ........................................................................................58
5.2. Un outil stratégique pour l’économie française.................................................................58
5.3. L’Open Data, une stratégie business dans le secteur privé...............................................60
5.4. L’ouverture et utilisation des données : exemples d’applications....................................61
5.4.1. Opendatasoft, une start-up innovante qui rend facile la réutilisation des données. .........61
5.4.2. Dataveyes, une start-up innovante de visualisations interactives de données. ................65
5.5. Les opportunités de l’ouverture des données.....................................................................68
5.6. Le rôle de Google, en tant qu’acteur privé.........................................................................72
5.6.1. Indexation des données avec le moteur de recherche ......................................................72
5.6.2. Le service de stockage et de présentation des données publiques de Google..................74
5.6.3. Le cas de la start-up francaise Datarepublica...................................................................76
5.7. Le cas d’Orange France ......................................................................................................76
5.7.1. Enjeux et perspectives......................................................................................................76
5.7.2. Un exemple concret proposé par Orange pour comprendre l’Open Data : « Où habitez-
vous vraiment ? »...........................................................................................................................78
5.7.3. L’expérimentation : « Empreinte de mouvement »..........................................................80
6. Conclusion.......................................................................................................................82
7. Référence des sources.....................................................................................................84
7.1. Personnes interviewées .........................................................................................................84
7.2. Liste des évènements auxquels les auteurs ont participé ..................................................84
7.3. Références des textes législatifs ...........................................................................................84
7.4. Bibliographie (livres, rapports, livres blancs)....................................................................87
7.5. Liens et références ................................................................................................................88
8. Annexes ...........................................................................................................................92
8.1. Méthodologie pour la production du rapport...................................................................92
8.2. Google trends : évolution des audiences du mot clé Open Data.......................................92
8.3. L’analyse des consignes d’indexation par les robots.........................................................92
8.4. Définitions complémentaires : caractéristiques essentielles des données ouvertes.........93
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TABLE DES FIGURES
Figure 1 : historique des ouvertures des sites gouvernementaux (source : Wikipédia) 8
Figure 2 : carte des initiatives locales Open Data en France, Source : association Libertic (Novembre 2013) 9
Figure 3 : acteurs interrogés pour le rapport ESSEC 11
Figure 4 : localisation des dépenses en formation versus le taux de chômage 12
Figure 5 : copies d’écran de l’application FBI’s most wanted 13
Figure 6 : le DATA Act doit permettre de suivre chaque dollar dépensé par l’administration 14
Figure 7 : répartition des crimes commis dans Londres et sa banlieue 16
Figure 8 : vue d’un bureau de l’administration indienne 18
Figure 9 : bureau de vote informatisé en Inde 19
Figure 10 : exemple de vue du portail indien 20
Figure 11 : carte de couverture des accès à internet 22
Figure 12 : les objectifs de la déclaration du Millénaire 24
Figure 13 : vue du portail Open Data de la Banque Mondiale 25
Figure 14 : le logo de L’Open Data for Africa 25
Figure 15 : principales catégories de jeux de données disponibles sur le portail global Open Data Africa. 26
Figure 16 : vue du portail Open Data Africain : accès aux sites des pays 27
Figure 17 : vue du portail Open Data de l’Afrique du Sud : http://southafrica.opendataforafrica.org 28
Figure 18 : extrait du portail de la ville de Johannesburg 28
Figure 19 : évolution de l’abstention Vième République 35
Figure 20 : sphères de circulation de l’information des décisions 37
Figure 21 : dynamique vertueuse de l’Open Data dans la transformation 39
Figure 22 : le président Hollande dans l’émission Des paroles et des actes 42
Figure 23 : les freins à l‘Open Data par peur de transparence 44
Figure 24 : La licence de l’Etalab 47
Figure 25 : la démarche d’analyse technique 49
Figure 26 : les étapes d’un plan directeur Open Data 50
Figure 27 : les décisions d’architecture pour la mise en œuvre d’un Open Data 51
Figure 28 : les risques techniques de conception d’un Open data 52
Figure 30 : verbatim les risques des données temps réel 53
Figure 31 : les métiers concernés par les problématiques techniques de l’Open Data 54
Figure 32 : les actions pour palier aux risques 55
Figure 33 : les leviers de la promotion de l’Open Data 56
Figure 34 : le financement de l’Open Data 56
Figure 35 : influer sur la recherche et le savoir 57
Figure 36 : Illustration du métier Data Scientist 57
Figure 37 : infographie source Opendatasoft.com 62
Figure 38 : infographie Opendatasoft.com : la cartographie 62
Figure 39 : infographie Opendatasoft.com 63
Figure 40 : vue d’écran Kelquartier.com 64
Figure 41 : vue d’écran : Dataveyes.com 66
Figure 42 : vue d’écran application Dataveyes 66
Figure 43 : vue d’écran Site Rennesmetropole.com 67
Figure 44 : vue d’écran site Rennesmetropole.com 67
Figure 45 : vue site ilovedemocracy.com 68
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Figure 46 : les principales données qui seraient réutilisées par une entreprise, source : Etude Bluenove-BVA 69
Figure 47 : les bénéfices attendus de l’ouverture des données (Source Etude Bluenove-BVA) 70
Figure 48 : les principaux obstacles d’un projet Open Data pour une entreprise - Source : Etude Bluenove-BVA
71
Figure 49 : résultats comparés des recherches sur www.data.gouv.fr et Google 73
Figure 50 : résultat recherche « military death » sur open.data.uk 73
Figure 51 : résultats comparés des recherches sur www.data.gov 73
Figure 52 : exemple de captcha et de mire d’authentification 74
Figure 53 : le service Public Data de Google 75
Figure 54 : comment importer un contenu sur le service public data de Google 75
Figure 55 : la fiche de M. Guillaume Bacuvier, membre du conseil stratégique (source : site Data Republica) 76
Figure 56 : Open Data, enjeux et perspectives dans les télécommunications (Source Orange Labs) 77
Figure 57 : vue d’écran Application « Où habitez vous vraiment ? » -1 78
Figure 58 : vue d’écran Application « Où habitez vous vraiment ? » -2 79
Figure 59 : vue d’écran Application « Où habitez vous vraiment ? » -3 79
Figure 60 : vue d’écran Application « Où habitez vous vraiment ? » -4 79
Figure 61 : vue d’écran Application « Où habitez vous vraiment ? » -5 80
Figure 62 : site « empreinte.orange.com » -1 80
Figure 63 : site « empreinte.orange.com » -2&3 81
Figure 64 : vue Google Trends mot Open Data 92
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INTRODUCTION
Ce rapport s’inscrit dans le cadre du cours d’intelligence économique de Monsieur Christian
HARBULOT, professeur à l’executive Master en Marketing Management de l’ESSEC.
Il a pour objectif d’analyser « les stratégies d’influence gouvernementales sur l’Open Data ».
Dans cette introduction, après une brève présentation de l’Open Data dans le monde et en France,
nous présenterons l’analyse sémantique du sujet ainsi que la méthodologie utilisée.
Origines et principes de l’Open Data
Le principe de l’Open Data consiste à rendre disponible les données numériques publiques
via Internet pour une utilisation privée ou publique. C’est une démarche qui prend racine dans le
mouvement de démocratie ouverte né dès 1966 aux Etats-Unis avec le Freedom Of Information Act
(FOIA), qui définit, dans le chapitre 5, le rôle de l’organisation gouvernementale et de ses employés :
« Except as otherwise required by statute, matters of official record shall be made available, in
accordance with published rule, to persons properly and directly concerned, except information held
confidential for good cause found ». Ce mouvement prône une transparence des institutions via un
nouveau contrat de société
efficace entre gouvernants et
gouvernés, avec un
renforcement du processus
démocratique.
De nombreux pays, quelque
soient leur stade de
développement, ont ouvert
leur site gouvernemental
d’Open Data, comme le
montre l’infographie ci-
contre.
Figure 1 : historique des ouvertures des sites gouvernementaux (source : Wikipédia)
Pour les collectivités et les organismes publics, l’Open Data consiste donc à publier, sur une
plateforme ouverte, le patrimoine statistique, cartographique, économique et financier des territoires.
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La mise à disposition des données déjà produites est une obligation légale en France. Un cadre
juridique strict définit cependant les informations qui peuvent être rendues publiques et celles qui ne
peuvent pas l’être pour des raisons de confidentialité. Les données sensibles et à caractère personnel
sont exclues, de fait, de la démarche d’Open Data.
L’Open Data 1
permet de constituer et d’entretenir une source d’informations fiables,
structurée (appelée Meta Data) ou non (Raw Data) pour les chercheurs, les journalistes et les citoyens.
L’Open Data ouvre la voie à la création d’applications pratiques où les données sont reliées entre
elles (Linked Data) par des champs en commun. Par exemple , la mairie publie des données sur
internet : horaires de bus, géolocalisation des arrêts, hauteur des trottoirs…Les développeurs peuvent
réutiliser librement ces données via des Application Purpose Interface (API) pour innover et
développer des applications pour faciliter l’accès aux transports des personnes à mobilité réduite.
L’Open Data ouvre donc de
nouvelles opportunités de
développement économique avec
l’émergence de nouveaux services
innovants et originaux.
Il contribue à rendre
accessible, lisible et
compréhensible l’action
publique : décisions, projets,
finances publiques, encourageant
ainsi la transparence de l’action
des l’administrations
internationales, nationales,
régionales ou locales. La carte ci-
contre montre les collectivités qui
ont ouvert, ou ont l’intention
d’ouvrir leur données.
Figure 2 : carte des initiatives locales Open Data en France, Source : association Libertic (Novembre 2013)
L’Open Data offre enfin une perspective et une opportunité de modernisation des services
publics, en les rendant toujours plus efficaces, accessibles et collaboratifs, en phase avec les enjeux du
XXIième siècle, notamment celui de la réduction de la dette publique, via l’optimisation des services
publics. Le potentiel de développement économique avec l’Open Data dans les secteurs décentralisés
comme le tourisme ou plus régalien comme la santé représentera une part importante de la croissance
future des économies avec le digital.
La mise en œuvre de l’Open Data au sein d’un pays est régie par deux facteurs essentiels, qui
sont d’une part « l’offre », c’est à dire la volonté exercée par « le politique », qui a autorité sur son
1
Le texte s’inspire du script de la vidéo http://youtu.be/aHxv_2BMJfw
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administration centrale et plus largement les élus locaux, décideurs sur des budgets alloués aux
systèmes d’information pour produire et exposer les données, et d’autre part « la demande » en
provenance des utilisateurs des données qui trouvent un intérêt et un bénéfice à l’exploiter. La
réutilisation des données, qui est la condition du succès de l’Open Data, repose sur plusieurs critères,
comme par exemple son exploitabilité, son accessibilité et notamment le coût d’accès, qui est un
levier d’influence important pour le politique, puisqu’il peut être gratuit, ou payant avec diverses
formes de tarification (abonnement, forfaitaire, fonction de l’usage).
En France, la mise en œuvre de l’Open Data, encore appelée donnée ouverte en français, est
confiée à l’Etalab, qui est une mission interministérielle en charge de la coordination de
l’ouverture des données publiques. Créée en février 2011 par François Fillon, elle est rattachée en
octobre 2012 au Secrétariat Général à la Modernisation de l’Action Publique (SGMAP) lors de la
création de cette structure par Jean-Marc Ayrault. En parallèle et bien souvent de façon spontanée et
autonome, l’essor de l’Open Data en France s’est au début concrétisé par des initiatives territoriales
concrètes et ambitieuses.
Les stratégies gouvernementales
Le présent rapport doit analyser les stratégies d’influence gouvernementales, c’est à dire les
actions, les dispositifs et les choix des moyens mis en œuvre, au niveau du pouvoir exécutif et
législatif d’un Etat, pour atteindre ses objectifs sur l’Open Data. On veillera donc à identifier et
comparer les objectifs des gouvernements s’ils sont communiqués, selon leur nature (qualitatif,
quantitatif), leur ambition, leur pertinence et leur mesurabilité. En d’autres termes, on observera la
« propagande » et la pédagogie déclinée par les gouvernements pour « faire bouger » leurs
administrations, qui ont déjà par ailleurs de nombreuses autres priorités.
L’analyse définira d’une part qui sont les acteurs qui composent son écosystème et les procédés
déployés pour susciter, motiver ou promouvoir leurs actions en faveur de l’Open Data, et d’autre part,
la nature des freins liés à la mise en œuvre des ressources.
L’Histoire nous montre que l’information a été synonyme de pouvoir et de puissance, et la
mise en œuvre d’une démarche volontaire et régalienne de transparence et de partage des données ne
va pas de soi, même si cela peut apparaître comme un principe démocratique fort, et un juste retour de
la ponction fiscale. En cette période de forte pression sur la réduction des déficits publics et de
« chasse aux rentes de situation », la mise sur internet de données peut mettre en exergue les
contradictions ou aberrations des systèmes en place. Certains acteurs ou lobbies n’ont de fait aucun
intérêt à voir certains jeux de données publiés en ligne, qui seraient repris par les médias pour
informer les citoyens et demander plus de transparence et de réformes.
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Une méthodologie adaptée pour identifier les « non-écrits »
Afin d’identifier les freins véritables « non-écrits», notamment ceux induits par l’Histoire, les
auteurs ont donné une part importante aux interviews des acteurs qui ont bien voulu répondre à nos
sollicitations, afin d’obtenir les informations non
disponibles en ligne et de forger une conviction
sur les pertinences des stratégies.
Le mouvement Open Data est largement
déployé à l’échelle internationale, et une
priorisation des recherches et analyses a été faite
avec une focalisation sur les Etats-Unis, la
Grande-Bretagne, l’Inde, l’Afrique, l’Union
Européenne et la France pour intégrer les pays
référents, des nations émergentes et en voie de
développement.
Figure 3 : acteurs interrogés pour le rapport ESSEC
Un calendrier favorable
Le calendrier a permis de participer à des évènements riches en contacts et informations tels que le
Colloque « gouvernance des données à l’ère numérique » et la remise des prix #dataconnexions3
organisée par l’Etalab dans les locaux de Microsoft à Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine).
Politiques
Administrations
Associations
Collectivités
Start-up
Juristes
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1. L’OPEN DATA DANS LE MONDE
Nous abordons dans ce paragraphe les différentes approches de politique d’Open Data à
travers quatre exemples : les Etats-Unis, le Royaume-Uni, l’Inde, le continent africain et l’Afrique du
Sud. Nous étudierons brièvement les programmes d’Open Data, les instruments, les freins et les
moteurs de la politique d’implémentation de l’Open Data et les effets de la politique d’Open Data.
1.1. AUX ETATS-UNIS
Lors de son premier jour en tant que président des Etats-Unis en janvier 2009, Barack
Obama annonçait que son administration appliquerait une stratégie de transparence qui impliquerait
un degré d’ouverture sans précédent de son gouvernement. Dans un communiqué aux responsables
gouvernementaux, il déclarait 2
«Nous travaillerons ensemble afin de nous assurer la confiance des
citoyens et d’établir un système de transparence, de participation publique, et de collaboration.
L’ouverture renforcera notre démocratie et promouvra l’efficience et l’efficacité au sein du
Gouvernement. »
La stratégie de transparence du gouvernement américain met l’emphase sur la relation
entre le gouvernement et les citoyens 3
« La transparence promeut le fait de devoir rendre compte de
ses actes et donne aux citoyens l’information sur ce que leur gouvernement fait. » Elle met en avant
l’augmentation du contrôle
démocratique et de la
participation politique. De fait,
le sous-titre du portail
gouvernemental dédié à l’Open
Data data.gov est « donner plus
de pouvoir aux personnes ».
Plus concrètement, des rapports
sur les dépenses fédérales sont
publiées sur le site
www.recovery.gov que le
gouvernement a lancé en 2009,
comme l’illustre la figure ci-
contre.
Figure 4 : localisation des dépenses en formation versus le taux de chômage
Une motivation supplémentaire pour la mise à disposition de données gouvernementales est
l’implication plus importante des citoyens dans l’action de la police. Le FBI a de fait développé
2
The White House. (2009). Memorandum for the Heads of Executive Departments and Agencies, Transparency and Open Government,
Washington: OMB.
3
U.S. Department of State. (2010). Open Government Plan, Washington: U.S. Department of State.
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l’application iPhone « FBI most wanted »4
permettant d’identifier les criminels les plus recherchés ou
les personnes disparus.
Figure 5 : copies d’écran de l’application FBI’s most wanted
Les instruments permettant la mise en œuvre des politiques d’Open Data sont regroupés sur
le portail www.data.gov. Ils sont d’ordres divers : politiques, techniques, collaboratifs, éducatifs…
Le portail permet en effet d’accéder à la stratégie et aux initiatives gouvernementales sur l’Open Data.
En outre, il autorise les citoyens à contrôler la mise en œuvre de cette stratégie dans les différents
départements, agences ou organisations fédérales. Il met par ailleurs gracieusement à disposition les
divers jeux de données (91054 étaient disponibles au 27/10/2013) et les applications développées par
les citoyens. Enfin il met en relation les acteurs de l’Open Data au travers de forum et blogs. Bien que
présente, la section dédiée à l’enseignement est cependant moins mis en avant.
A noter, il n’y a pas eu de loi spécifique afin de développer initialement l’Open Data. En
effet, le gouvernement s’est appuyé sur les textes existants. Le Freedom of Information Act (FOIA),
aussi appelé Public Information Act, et qui date tout de même de 1966 ( !), représentait une avancée
majeure en permettant à tout citoyen qui en faisait la demande écrite d’accéder aux archives
d’agences fédérales. Mais les multiples réécritures de ce texte 5
illustraient déjà les difficultés des
l’administration à réellement s’ouvrir. Plus récemment, Vivek Kundra, ancien CTO de Washington
D.C. recruté par Obama pour assurer le même rôle au niveau fédéral, s’est appuyé sur le Funding
Accountability and Transparency Act (FATA), promulgué en 2006, pour que les agences fédérales
fournissent les données de dépenses publiques aux sites usaspending.gov et recovery.gov. Néanmoins,
il s’avère maintenant nécessaire d’industrialiser le processus de mise à disposition des données et pour
cela de l’encadrer avec le DATA Act qui vient d’être promulgué le 18 novembre 20136
.
4
http://apps.usa.gov/fbis-most-wanted/
5
http://uspolitics.about.com/od/usgovernment/a/foia.htm
6
http://www.datacoalition.org/issues/data-act.html
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Figure 6 : le DATA Act doit permettre de suivre chaque dollar dépensé par l’administration
Cependant, le débat concernant la priorité donnée à l’ouverture par les Etats-Unis resurgit alors
qu’en 2011 le gouvernement fédéral dépense quatre fois plus à sécuriser ses données qu’à les ouvrir :
le budget fédéral dédié à la sécurité informatique est de 4,2 milliards de dollars tandis que celui dédié
au partage d'information n’est que de 0,9 milliards. Déjà en 2009, la journaliste Maura Reynolds avait
critiqué la stratégie d’ouverture d’Obama en déclarant 7
(Reynolds, 2009) qu’ « en pratique, les
agissements du nouveau président sur la confidentialité et la transparence se sont révélés ambigus,
son administration semblant faire autant de pas vers la protection de l’information gouvernementale
que vers une exposition au grand jour.» Cependant, cette asymétrie ironique semble se produire dans
la plupart des pays ayant des stratégies gouvernementales d’Open Data.
Rentrons dans le détail des moteurs de l’implémentation de la politique d’Open Data. Les
Etats-Unis font partie des pays précurseurs en matière d’Open Data et entendent de ce fait continuer à
faire la course en tête. Le discours volontariste d’Obama illustre et appuie ce propos. En parallèle, des
initiatives locales comme Apps for Democracy8
à Washington D.C. ont favorisé la prise de
conscience nationale du potentiel de l’Open Data. Vivek Kundra déclarait « Apps for Democracy a
permis plus d’économies pour Washington D.C. qu’aucune autre initiative. » Bien entendu, les
innovations et initiatives citoyennes provenant de la mise à disposition de données publiques
encouragent le gouvernement à poursuivre dans cette voie. Ainsi, la Sunlight Foundation
(sunlightfoundation.com), fondée en 2006, a produit à ce jour 1189 API (Application Programming
Interface) facilitant l’appropriation et l’utilisation des données publiques.
7
Reynolds, M. (2009). Open government or ‘Transparency Theater? Msnbc, July 24, 2009,
http://www.msnbc.msn.com/id/32128642/ns/politics-cq_politics/.
8
www.appsfordemocracy.org
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Afin d’évaluer la politique d’Open Data, le Département du Budget a appelé le gouvernement à
évaluer sa politique d’ouverture. Cette auto-évaluation9
(White House, 2005) contient trente critères,
lesquels sont basés sur la déclaration du président Obama. Bien que cette auto-évaluation aborde le
processus de déploiement, la complétude et mise en œuvre des plans d’ouverture, elle n’aborde pas
les impacts en cas de défaut de conformité.
1.2. EN GRANDE-BRETAGNE
Différents pays dont le Royaume Uni se sont inspirés de la déclaration d’Obama sur
l’ouverture et ont suivi les Etats-Unis en émettant des déclarations similaires. En décembre 2009, le
gouvernement britannique publia le rapport « Putting the Frontline First : Smarter Government » dans
lequel il est argumenté que le gouvernement doit s’ouvrir et promouvoir la transparence 10
(Chief
Secretary to the Tresury, 2009).
La stratégie du gouvernement britannique met l’emphase sur l’engagement des citoyens et de
la société civile. « En fin de compte, un citoyen plus informé est un citoyen qui a plus de pouvoir.
Dans une démocratie moderne, les citoyens attendent de droit de savoir comment le gouvernement a
dépensé leur argent et quel en a été le résultat. […] Les données peuvent aussi être utilisées de
manière innovante en apportant des bénéfices économiques aux citoyens et aux entreprises à travers
un entrepreneuriat inexploité. » Des entreprises seront en mesure de développer une activité au
travers de services numériques et de contenus basés sur des données publiques, et les citoyens
pourront transformer leurs idées et leur créativité en solution concrète aux problèmes quotidiens. Une
étude de l’Université de Cambridge a mis en lumière que la croissance de l’économie britannique liée
à la mise à disposition gratuite d’une partie des données du secteur publique qui sont actuellement
vendues pourrait être de £160 millions la première année seulement 11
(Newbery et al, 2008). Comme
aux Etats-Unis, la mise en ligne de données publiques est un moyen d’informer les citoyens sur leur
sécurité. La ville de Londres publie ainsi une carte détaillant l’activité criminelle sur son site WEB12
.
9
http://www.whitehouse.gov/open/around/eop/omb/self-evaluation
10
Centre for Technology Policy Research. Chief Secretary to the Treasury (2009). Putting the Frontline First: Smarter Government, London:
HMGovernment.
11
Newbery, B. Bently, L. & Pollock, R. (2008). Models of Public Sector Information Provision via Trading Funds, London: BERR and HM
Treasury
12
http://maps.met.police.uk.
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Figure 7 : répartition des crimes commis dans Londres et sa banlieue
De même qu’aux Etats-Unis, le portail institutionnel central data.gov.uk regroupe les
différents instruments permettant la mise en œuvre de la stratégie d’Open Data. Il est actuellement en
refonte. Néanmoins, la partie liée à la mise à disposition des données (10462 au 27/10/13) et la partie
communautaire sont particulièrement mises en avant.
Légalement, la mise à disposition des données s’appuie sur le Freedom of Information Act
2000. Il permet aux citoyens britanniques d’accéder aux informations détenues par les autorités
publiques. Environ 120 000 requêtes sont formulées chaque année, dont 60% à titre privée, les autres
demandes étant le fait de journalistes ou d’entreprises.
Nous pouvons remarquer que la stratégie d’Open Data du Royaume-Uni s’inspire
beaucoup de celle des Etats-Unis. En effet, l’un des principaux moteurs pour les politiques d’Open
Data provient des initiatives que les pays copient les uns sur les autres. Le concours britannique
« Show us a better way » est en effet à l’origine du concours australien « MashUp Australia »
(mashupaustralia.org) 13
(Athur C, 2008). Ces concours ont été lancés afin de favoriser la création
d’applications par le grand public à partir de données gouvernementales rendues publiques.
Bien que Gordon Brown se soit inspiré de Barack Obama, des organismes extra-gouvernementaux ont
aussi contribué à l’ouverture des données publiques. Le journal The Gardian a ainsi lancé la
campagne « Free our data » dans laquelle il était demandé aux citoyens de réclamer l’accès aux
données gouvernementales 14
(Arthur & Cross, 2006). L’Open Knowledge Foundation (okfn.org),
13
Arthur, C. (2008). Are the Show Us A Better Way winners safe from Ordnance Survey? November 12, 2008,
http://www.guardian.co.uk/technology/blog/2008/nov/12/ordnance-survey-google-maps-copyright
14
Arthur, C. & Cross, M. (2006). Give us back our crown jewels. Guardian, March 9, 2006,
http://www.guardian.co.uk/technology/2006/mar/09/education.epublic
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organisation à but non lucratif, a été fondée en 2004 au Royaume-Uni mais son action est maintenant
internationale. Elle donne l’accès à treize millions de dépenses gouvernementales à travers le monde.
Avec les Etats-Unis, le Royaume-Uni est le seul pays à avoir évalué sa politique d’Open Data. Dans
son rapport « Open Government – some next steps for the UK » le Center for Technology Policy
Research (2010) décrit la politique d’Open Data du gouvernement britannique et donne les
orientations pour de futures politiques. Bien que ce rapport donne des détails sur les instruments
utilisés par le gouvernement pour mettre en œuvre sa stratégie d’ouverture, il n’en aborde pas les
impacts économiques et sociaux.
1.3. EN INDE
1.3.1. CONTEXTE ET ENJEUX
La République de l’Inde est une République fédérale avec vingt huit Etats membres de
l’Union ainsi que sept territoires de l’Union. La Constitution indienne répartit les différentes
compétences entre le gouvernement de l’Union et les Etats de l’Union. Cette autonomie dans la
gestion et le développement économique de l’Etat de l’Union a conduit à un développement
disparate des différents Etats de l’Union.
Le développement de l’e-administration s’est produit à la fois de manière volontaire et
spontanée dans certains Etats de l’Union (Kerala, Tamil Nadu) et par une politique nationale de
modernisation par le gouvernement de l’Union, avec l’introduction du Plan Nationale de l’e-
Gouvernance, afin de permettre une harmonisation et une convergence de l’e-administration
indienne. Le développement de l’e-administration a conduit à la reconnaissance de la signature
électronique et des documents électroniques avec l’Information Technology Act en 2000, au
développement des machines électroniques de vote dès 2002, à l’instauration de téléservices et de e-
mobile services, jusqu’à la création d’UID (Unique Identification- Identifiant Unique), permettant
d’attribuer à chaque citoyen indien une carte d’identifiant unique contenant de nombreuses
informations personnelles (projet Aadhaar réalisé par Safran, développeur des cartes biométriques en
Inde). Grâce à l’exploitation des données numériques, l’Inde a su moderniser son administration.
Pour Kapil Sibal, ministre de la communication et des technologies de l’information, l’enjeu est
immense pour le pays : « Le gouvernement n’est pas l’unique propriétaire des données. Toutes les
données doivent être partagées sauf celles qui sont importantes pour la sécurité. Il y a également une
responsabilité du côté de ceux qui utilisent et interprètent les données. Ils doivent comprendre qu’il y
a un enjeu de développement ».
La société civile en elle-même ne peut réellement en profiter directement, de part la fracture
numérique et l'incapacité d'appréhender ces données brutes. Il s'agit avant tout pour le moment d'une
opportunité considérable pour les entrepreneurs indiens de réaliser des d'applications facilitant la
vie quotidienne des indiens, à titre d'exemple des applications relatives aux rations alimentaires en
ville, etc.
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1.3.2. LE CADRE JURIDIQUE EN INDE
Le cadre juridique en Inde a évolué de façon régulière. Plusieurs lois ont été mises en place de
façon progressive, y compris pour donner droit aux individus à l’accès aux données de
l’administration, comme stipulé dans la loi « Right to information » en 2005 qui permet aux citoyens
d’obtenir une réponse de l’administration sous un délai de 30 jours. En 2006, la loi « e-governance » a
vu le jour légiférant sur la proximité entre les services de l’Etat et les citoyens.
Dans le projet de modernisation de l’administration, le département des technologies de
l’information a préparé un projet de loi significatif, The electronic service delivery bill, 201115
dont
l’objet est d’assurer que les prestations des services publics soient réalisées via le mode électronique
pour améliorer la transparence, l’efficacité, l’accessibilité et la fiabilité dans la livraison des services
de l’Etat. Ce projet de loi veut instaurer l’obligation pour les services publics de faire usage du
courrier électronique, lorsqu’il lui est écrit via cette forme. Il indique également que tous les
services publics doivent être délivrés en mode électronique dans les 5 années à compter de l’entrée en
vigueur de ce projet de loi. Pour le moment, ce projet n’a toujours pas été voté, mais les services du
département se sont engagés à faire passer ce projet de loi, ce qui facilitera la consécration de l’e-
administration dans sa globalité, de son instauration dans l’administration indienne à la livraison de la
prestation au citoyen.
A l’image de ce qui a été fait en France (circulaire, directive européenne), en lien avec
l’ouverture des données publiques, l’Inde a publié via le ministère des sciences et de la technologie du
Gouvernement le National Data Sharing and Accessibility Policy (NDSAP), le 17 mars 2012. L'un de
ces objectifs est de réaliser une transmission verticale des informations non sensibles collectées par
l'administration indienne.
1.3.3. L’ADMNISTRATION INDIENNE : CULTURE ET ORGANISATION
1.3.3.1. UN PEU D’HISTOIRE
L'administration indienne est un « monstre colossal» qui
permet de relier le simple village aux autorités administratives
centrales de New Delhi. Cette énorme structure fait aussi les
frais d'une fracture administrative, en effet les simples
villageois se perdent facilement lors de recherche d'interlocuteurs
compétents pour leurs questions administratives que ce soit en
matière foncière (agrément sur les terres cultivables,
autorisation…), en matière civile (acte de mariage, passeport…).
Figure 8 : vue d’un bureau de l’administration indienne
15
Source : http://mit.gov.in/content/draft-electronic-delivery-services-bill-2011
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1.3.3.2. VERS LA MODERNISATION
L'arrivée des nouvelles technologies de
l’information et de la communication a été une réelle
opportunité pour administration indienne obsolète.
L'instauration du « National e-Governance Plan », à
partir de 2008 est la clé de la mutation de
l'administration indienne vers l'e-administration.
Le « National e-Governance Plan » a été approuvé
par le gouvernement de l’Union le 18 mai 2006 à
l’initiative du département de la technologie
d’information, du département de la réforme de
l’administration et sous la pression des griefs publics.
Figure 9 : bureau de vote informatisé en Inde
Ce plan16
a pour objectif d’améliorer les services administratifs aux citoyens et aux entreprises :
« Make all government services accessible to the common man in his locality, through common
service delibery outlets and ensure efficiency, transparency and reliability of such services at
affordable costs to realise the basic needs of the common man. »
Le plan fédéral se compose de 27 missions en mode projet et de 8 missions relatives au
support. Chaque projet consiste à faire évoluer un service administratif sous l’ère de l’e-
administration, il s’agit du passage des services administratifs aux télé-services.
Afin de faciliter l’implémentation, le National e-Governance Plan impose quelques points
fondamentaux à la modernisation de l’administration indienne17
.
• les structures de support communes
• l’initiative centralisée pour une mise en œuvre décentralisée
• le partenariat public-privé
• la gestion directe par les ministères
16
http://negp.gov.in
17
11th Report – Promoting e-Governance, Second Administraive Reforms Commission, GoI, Décembre 2008
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1.3.4. ILLUSTRATION DU MODELE INDIEN
1.3.4.1. LE PORTAIL
L’Inde a lancé son portail Open Data le 8 août 201318
. Plusieurs secteurs y sont représentés comme la
santé, le transport, le sanitaire, l’agriculture.
L’ouverture de la plateforme fait suite aux différentes initiatives prises par le gouvernement
pour stimuler l’utilisation des données publiques dans le pays. Au début de l’année 2013, l’Inde avait
ainsi lancé son premier hacktaton (48h pour imaginer des applications mobiles innovantes). Et pour
inciter les développeurs à se saisir des données du portail, le gouvernement organise des challenges
avec des récompenses à l’image de
dataconnexion en France.
Le site compte 4 678 ensembles de
données représentant 53 ministères et
départements et 7 applications représentant 5
départements. Le portail data.gov.in est
structuré, animé et très riche en informations
comparé à celui d’Etalab. On y trouve à la fois
des tableurs Excel avec des statistiques
d’audience et l’évaluation par les visiteurs, des
applications développées grâce à l’ouverture des
données, des représentations graphique, des
tableaux de bords…
Figure 10 : exemple de vue du portail indien
1.3.4.2. LES COULISSES
La caractéristique du projet indien est d’être orchestré et porté par le savoir faire
indien en IT. Ce paragraphe illustre la capacité de l’Inde à développer des infrastructures
adaptées permettant de fournir l’ensemble des téléservices, avec une approche centralisée à
l’échelle nationale. Le renouveau des services de l’administration nécessite la transformation
des infrastructures de l’Etat, au niveau fédéral et pour les différents Etats de l’Union. Le
National e-Governance Plan a mené une politique de transformation et de création
harmonisée des infrastructures électroniques. A commencer par l’instauration des trois pivots
du National e-Governance Plan, à savoir les centres de données Etatiques, la création du
réseau étendu indien (SWAN) et la création de centre commun de services.
18
data.gov.in
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Figure 11 : portail du National Service Delivery Gateway
- Les centres de données Etatiques ou State Data Centers sont la colonne vertébrale du projet de
modernisation et regroupent l’ensemble des données qui seront partagées par la suite. A noter tout de
même la résistance de certains Etats qui ne souhaitent pas transférer les données locales, d’où
l’apparition de centres de données construits et maintenus uniquement par les instances de l’Etat de
l’Union.
A noter que le gouvernement de l’Union a alloué un budget de 19 millions d’euros sur une période
de 5 années19
.
- Le State Wide Area Network (SWAN) correspond au réseau créé pour relier l’ensemble des
infrastructures électroniques.
19
National e-Governance Plan, meeting of the National e-Governance Advisory Group, DIT, GoI, 12/11/2010
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- Le National Service Delivery Gateway (NSDG) a pour objectif de fournir des services
gouvernementaux standardisés avec un développement d’infrastructures à moindre coût. Parmi les
objectifs établis par le National e-Governance Plan, il y a l’objectif de mettre en place des standards
d’interopérabilité entre les différents téléservices mis en œuvre à la fois par l’Union et les Etats de
l’Union, le NSDG doit agir comme un catalyseur en permettant la construction de normes standards
…
1.3.4.3. ET POURTANT, L’INDE EST DECONNECTEE…
Comment un pays avec une fracture numérique aussi importante peut réussir à franchir le pas et
mettre en ligne un portail plus puissant que la
France ?
On ne compte à fin 2012 que 12,6%
d’utilisateurs internet en Inde sur une
population de 1,2 milliards d’habitants20
et
68,84% de la population indienne vit en zone
rural.
La moyenne nationale d’accès en zone rurale
s’établissant pour 2009-2010 à 0,35% des
foyers.
Illustration de la fracture
numérique (image ci-contre) : en rouge les
Etats dont le taux d’accès en zone rurale est
inférieur à dix pour mille foyer (soit inférieur
à 1%), en jaune ceux dont l’accès est
supérieur à 1% mais inférieur à 5% et en vert
ceux dont l’accès est supérieur à 5% de la
population.
Figure 11 : carte de couverture des accès à internet
Sur les 35 Etats et districts de la fédération indienne, seuls six dépassent la zone rouge, pour une
population totale de 44,5 millions d’Indiens. Les 29 autres comptent pour 1,165 milliards d’habitants.
Comment connecter les citoyens à un Open Data avec un
tel constat ?
Si l’Inde accuse un énorme retard pour Internet, sur la téléphonie mobile, la situation est
complètement différente et le taux de pénétration à fin 2012 est de près de 70%21
.
La démocratisation du mobile en milieu rural et urbain a permis à l'administration indienne de se
20
Source INSEE
21
Source INSEE
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rapprocher plus rapidement de ses citoyens. Pour les milieux plus pauvres, l'administration indienne a
développé des services publics "common services centers", des points de connexion Internet public,
permettant d'accéder aux nouveaux téléservices et à Internet (avec des fonctionnaires compétents et
pédagogues pour former les citoyens à l'usage de l'ordinateur).
Peut-être l’Etat indien devrait-il créer le premier portail mobile Open Data dédié aux smartphones ?
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1.4. L’OPEN DATA PANAFRICAIN
1.4.1. GENESE
Sous l’égide des Nations Unies, en
septembre 2000, 147 chefs d'État et de gouvernement
et 189 pays se sont engagés dans la Déclaration du
Millénaire définissant 8 domaines (infographie ci-
contre).
L’objectif n°8, « Mettre en place un partenariat
mondial pour le développement », s’est traduit en
Afrique par la mise en œuvre d’un grand projet sur les
« autoroutes de l’information ».
A cette occasion, les banques multilatérales de
développement se sont entendues pour poursuivre
ces objectifs communs. C’est notamment le cas de la
Banque Africaine de Développement (BAD), créée en
1963 par 23 pays africains indépendants, et qui est
devenue au fil des ans la première institution
financière de développement en Afrique. Le rapport
annuel 201222
de la banque précise : « La Banque a la
volonté et les ressources nécessaires pour devenir la
première source d’informations et d’analyses sur les
économies africaines ».
En l’absence d’Instituts Nationaux de la
statistiques dignes de ce nom, la BAD joue donc un
rôle similaire à celui de l’INSEE en France, et a donc
un rôle important pour le pilotage du développement
des pays avec des taux de croissance élevés.
Figure 12 : les objectifs de la déclaration du Millénaire
La banque, qui propose déjà un portail très riche sur ses propres données statistiques, a donc financé
et fédéré le portail Open Data de l’Afrique 23
22
http://www.afdb.org/fileadmin/uploads/afdb/Documents/Publications/Rapport%20annuel%202012.pdf
23
http://www.afdb.org/fr/knowledge/statistics/data-portal/
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Cette plateforme de données en ligne fait donc partie de l’initiative ‘Autoroute africaine de
l’information’ pour intensifier la collecte, la gestion, l’analyse et le partage de statistiques de qualité
sur le développement du continent.
Remarque importante :il existe d’autres banques de données internationales avec des informations sur
l’Afrique, mais la démarche est privée dans ce cas.
Exemple de l’Open Data de la banque mondiale sur l’Afrique du Sud24
:
Figure 13 : vue du portail Open Data de la Banque Mondiale
1.4.2. L’OPEN DATA DE LA BANQUE AFRICAINE DU DEVELOPPEMENT
Essentiellement orientée pour livrer des statistiques relatives aux réalités économiques et
sociales, l’initiative a pour ambition d’établir des
liens directs entre la BAD, les bureaux nationaux
de statistiques, les banques centrales et les
ministères de tutelle dans les pays africains. Elle
vise aussi à établir des liens entre les
organisations sous-régionales, les organisations
internationales de développement et une
communauté mondiale d’usagers .
Figure 14 : le logo de L’Open Data for Africa
24 http://data.worldbank.org/country/south-africa
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La banque estime que : « Les données fiables demeurent essentielles pour fixer les objectifs et les
cibles, ainsi que l’évaluation de l’impact des projets. »25
.
La BAD a ainsi déposé le nom de domaine http://opendataforafrica.org le 1er
décembre 201126
.
La plateforme facilite également la collecte, l’analyse et le partage des informations sur des sujets de
développement nouveaux et cruciaux tels que la sécurité, l’égalité de genre et le changement
climatique. La figure ci-dessous montre les thèmes principaux des jeux de données que l’on peut y
trouver, au niveau le plus élevé, c’est à dire « global Afrique ».
Figure 15 : principales catégories de jeux de données disponibles sur le portail global Open Data Africa.
1.4.3. LE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE ET LA LUTTE CONTRE LA
CORRUPTION
Comme le précise l’onglet « About » du site Open Data for Africa27
, la mission du portail est
de fournir des statistiques pour apporter une base cohérente, pour la conception et le pilotage des
25 http://www.afdb.org/fr/knowledge/statistics/about-us/
26 cf l’interrogation de la base des noms de domaine internet (requête
http://www.dynadot.com/domain/whois.html?domain=opendataforafrica.org)
27
http://opendataforafrica.org/about/us
Nombre de jeux de données par catégories (>3)
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politiques pour la lutte contre la pauvreté sur le continent africain.
Un des objectifs de cette plate-forme est aussi de lutter contre la corruption comme le précise
M. Mohamadou Diallo, membre de l’Observatoire sur les Systèmes d’Information, les Réseaux et les
Inforoutes au Sénégal28
: « …Ce qui reviendrait alors à publier des données, naguère réservées à
l’usage interne des organisations notamment sur les budgets des organismes de l’Etat ou l’attribution
des marchés publics. Une transparence totale en vue de lutter contre toute forme de corruption ou
autre dérive pouvant mener à une quelconque dictature. »
1.4.4. EXEMPLE DE L’AFRIQUE DU SUD
Le portail Open Data for Africa permet d’aller ensuite vers les portails des pays, avec une
déclinaison par pays. Ci-dessous une vue d’écran du portail de l’Afrique du Sud :
Figure 16 : vue du portail Open Data Africain : accès aux sites des pays
28
http://www.osiris.sn/Open-data-un-gisement-d.html
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Figure 17 : vue du portail Open Data de l’Afrique du Sud : http://southafrica.opendataforafrica.org
On remarque que les états mais aussi les collectivités locales (villes , régions) bénéficient ainsi d’un
portail d’accès à leur données (exemple dans la première ligne: Cape Town) pour adresser avec une
granularité plus fine une plus grande diversité de sujets. L’influence supranationale de la BAD
s’exerce donc sur la fourniture d’un espace de
stockage, d’une interface de présentation et
d’indexation des données.
Remarque sur la qualité des données : une
analyse rapide du site montre par exemple sur la
ville de Johannesbourg, la complétude des
données est imparfaite : les données après 2009
ne sont pas présentes.
Figure 18 : extrait du portail de la ville de Johannesburg
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1.4.5. LA PROTECTION DES DONNEES PERSONNELLES EN AFRIQUE DU
SUD : UN FREIN POUR L’OPEN DATA ?
A ce jour, le texte en vigueur en Afrique du Sud est appelé POPI (Protection of Personal
Information) et date de 200629
et n’adresse pas les enjeux de protection des données personnelles avec
les usages existants (par exemple, les emailing de campagnes marketing) et les technologies
émergentes comme le Cloud et l’Open Data. Le nouveau texte en vigueur, approuvé par le parlement
Sud-Africain, est en cours de signature par le Président, et certains juristes locaux évoquent le fait que
les évolutions sont de nature à impacter l’économie numérique, de part l’élargissement du périmètre
et la nature des sanctions en cas de non respect de la loi.
Le nouveau texte30
vise surtout à renforcer la protection des données personnelles en
instaurant des sanctions importantes en cas de « negligent disclosure of personal information ». Le
périmètre de la définition d’une donnée personnelle y est défini (chapitre 1, ligne 55). Le texte31
durcit
également les conditions autorisées de capture, stockage et de sécurisation des données.
Les données figurant à ce jour sur l’Open Data sud-africain sont essentiellement statistiques et ne sont
donc pas concernées par l’évolution de la loi. Par contre, le terme « anonymization est absent, ce qui
tend à prouver que ce texte est bien une mise à niveau pour répondre aux exigences de respect de la
vie privée dans les usages déjà répandus (campagnes marketing, stockage et manipulation de données
clients), mais ne prend pas encore les problématiques inhérentes à l’Open Data.
1.5.CONCLUSION SUR L’OPEN DATA DANS LES PAYS ETRANGERS
ETUDIES
Dans un nombre croissant de pays, suivant l’exemple des organisations internationales
telle que l’ONU qui a ouvert son site Web en 2008, l’Open Data se retrouve dans l’agenda politique et
administratif. Mais alors que des gouvernements nationaux ou régionaux ont défini des stratégies
d’Open Data, certains services administratifs sont encore réticents à les mettre en œuvre. Les barrières
importantes à leur déploiement effectif sont d’une part la culture du secret à l’intérieur des
administrations, causée par la peur de rendre publique des dysfonctionnements ou des actes de
corruption, ou d’autre part l’utilisation politique qui peut en être fait. Parfois même, ce sont des « abus
de biens sociaux" des élus qui ont réveillé les consciences et servi de catalyseur pour aboutir in fine à
une grande transparence sur le fonctionnement de l’Etat, comme en témoigne la diffusion intégrale
sur internet de l’historique des notes de frais des députés britanniques32
.
29
http://www.justice.gov.za/legislation/bills/B9-2009_ProtectionofPersonalInformation.pdf, MINISTER OF JUSTICE AND
CONSTITUTIONAL DEVELOPMENT, Août 2009
30
https://www.saica.co.za/Portals/0/Technical/LegalAndGovernance/POPI%20final.pdf, MINISTER OF JUSTICE AND
CONSTITUTIONAL DEVELOPMENT, 2009
31
http://www.humanipo.com/news/34240/popi-set-to-cause-complications-for-data-management/, Ayanda Dlamini. Octobre 2013
32
http://tempsreel.nouvelobs.com/monde/20090522.OBS7705/chronologie-du-scandale-des-notes-de-frais-des-deputes-britanniques.html, le
nouvel Observateur, 2009
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Un autre point soulevé est le manque de compréhension de l’impact précis de ces
stratégies, ce qui rend les administrations hésitantes à être proactives. Les stratégies d’ouverture sont
à l’heure actuelle très orientées sur le renforcement de la participation démocratique et l’amélioration
de la protection publique. Les instruments d’ouverture sont quant à eux principalement basés sur le
volontariat et les aspects techniques et légaux, alors que la partie éducative reste à développer. On
note enfin que plusieurs pays ont promulgué des textes pour donner une impulsion au déploiement de
l’Open Data.
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2. LA POLITIQUE EUROPEENNE SUR L’OPEN DATA
L’Europe a décidé de s’impliquer sur la question de l’Open Data via l’édition de normes
juridiques et la mise en place de programmes d’encouragement autour de la recherche et du
développement d’une part, et la mise en place d’un portail européen de l’Open Data d’autre part.
2.1. LA MISE EN PLACE D’UN CADRE JURIDIQUE : LA DIRECTIVE
2003/98/CE
La législation, comme la fiscalité d’ailleurs, constituent un levier puissant de l’influence
gouvernementale et une place importante y est consacrée dans ce rapport.
Le cadre juridique européen autour de l’Open Data s’est déroulé en deux temps, une première
directive en 2003 modifiée par la directive de 2013. La première intervention de l’Europe dans le
domaine de l’Open Data a lieu avec l’adoption de la directive n°2003/98/CE du Parlement Européen
et du Conseil du 17 novembre 2003 concernant la réutilisation des informations du secteur public.
Les instances européennes partent du constat suivant : « les informations émanant du secteur
public constituent une matière première importante pour les produits et les services de contenu
numérique et deviendront une ressource de plus en plus importante sur le plan du contenu à mesure
que les services de contenu sans fil se développeront ». Saisissant ainsi son rôle d’harmonisateur
des normes dans l’Union Européenne, le Parlement Européen édicte donc une directive en 2003 visant
à fixer un cadre général autour de la réutilisation des informations du secteur public afin d’éviter les
importantes divergences entre les Etats membres en matière d’exploitation de ces informations. Et
ceci dans le but de « permettre aux entreprises européennes d’exploiter le potentiel de ces
informations et de contribuer à la croissance économique et à la création d’emplois ».
Malgré cette bonne volonté clairement exprimée, et une juste prise en compte des enjeux
économiques autour de l’Open Data, la portée de cette directive restera limitée. Ceci est, tout
d’abord, lié à la nature même de la directive, qui contrairement au règlement européen ne s’applique
pas directement en droit interne et laisse donc aux Etats la liberté de transposer les grands principes
dans leur droit interne. L’édiction d’un règlement aurait peut-être montré une volonté d’harmonisation
plus forte de l’Europe et l’aurait poussée à entrer plus dans le détail des modalités de l’harmonisation.
Au final, cette directive reste un texte assez flou et très peu contraignant.
La directive a cependant le mérite de proposer une définition de la donnée publique susceptible
d’englober toute représentation d’actes, de faits ou d’informations – ainsi que leur compilation quel
que soit leur support (écrit sur papier ou stocké sous forme électronique ou enregistrement sonore,
visuel ou audiovisuel), détenus par un organisme public.
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En revanche, en ne prenant pas clairement partie sur un principe de gratuité de la mise à disposition
des données publiques, elle vient entretenir une ambiguïté sur la question de la tarification :
article 6 : « lorsque les redevances sont prélevées, le total des recettes provenant de la fourniture et
des autorisations de réutilisation de ces documents ne dépasse pas le coût de collecte, de production,
de reproduction et de diffusion » en ajoutant « tout en permettant un retour sur investissement
raisonnable ».
2.2. LES APPORTS DE LA DIRECTIVE 13/06/2013
En décembre 2011, la Commission Européenne propose une recommandation riche autour de
l’ouverture des données publiques, qui ne sera que partiellement reprise par la directive du 13 juin
2013.
La recommandation de la Commission
Européenne
Le 12 décembre 2011, la Commission publie une recommandation nommée « L’ouverture des
données publiques : un moteur pour l’innovation, la croissance et une gouvernance transparente ». La
commission commence par traduire la démarche d’ouverture des données publiques en potentiel
économique, en citant quelques exemples :
• 2007, le marché allemand des informations géographiques représente 1,4 milliards d’euros
(soit une croissance de 50% depuis 2000)
• 2008, 15000 postes dédiés au même sujet dans les Pays-Bas
• 2008, une étude estime le marché total de l’information du secteur public dans l’Union
Européenne à 28 milliards d’euros
• Cette même étude prétend que les avantages globaux liés à une plus grande ouverture des
informations du secteur public représenteraient 40 milliards d’euros
• Enfin pour l’ensemble des 27 pays membres de l’Union Européenne, le total des gains
économiques directs et indirects découlant de l’utilisation des informations du secteur public
et applications fondées sur ces données serait de l’ordre de 140 milliards d’euros par an.
Bien que l’on puisse reprocher à la Commission de ne pas trop faire la part des choses dans ce bilan
économique, entre le chiffre d’affaires qui proviendrait d’économie de gestion dans les
administrations et celui qui proviendrait de réelles innovations (cf. Interview OpenDataSoft), son
constat a le mérite de forcer la prise de conscience de l’enjeu stratégique que représente l’ouverture
des données publiques.
La commission pointe du doigt ce qu’elle juge être des obstacles persistants dans l’ouverture de ces
données publiques :
• cadre juridique : disparités considérables entre les pays membres (surtout dans les système de
tarification entre récupération des coûts et gratuité),
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• manque de sensibilisation des organismes du secteur public et des entreprises,
• obstacles pratiques et techniques (barrière linguistique, questions d’interopérabilité).
Une traduction à minima de ces recommandations dans la directive du 13
juin 2013
Dans ce contexte, on aurait pu s’attendre à ce que la modification de la directive de 2003 soit plus
contraignant et permette ainsi d’arriver enfin aux harmonisations attendues entre pays membres.
On note cependant quelques avancées :
Par rapport à l’ancienne version de la directive de 2003, le texte affirme un véritable droit à la
réutilisation du secteur public. L’ancienne version définissait les champs d’informations où la
réutilisation était autorisée ; la nouvelle fait l’inverse, et exige que tout document entrant dans le
champ d’application doit être réutilisable pour des usages commerciaux et non commerciaux.
Ce texte vient aussi apporter une obligation de transparence dans le calcul des redevances.
Toute personne le demandant doit pouvoir avoir accès au mode de calcul utilisé pour l’établissement
de la redevance. Ceci est perçu comme une excellente nouvelle pour Pierre Chrzanowski (groupe de
l’Open Knowledge Foundation) : « Cette exigence de rendre les modes de tarifications complètement
transparents en amont, c’est-à-dire avant même qu’une demande de réutilisation soit soumise,
pourrait avoir des conséquences intéressantes. Il est peu probable que les organismes publics iront
jusqu’à calculer des coûts marginaux pour tous les jeux de données qu’ils possèdent; cela signifie que
les données ne pourront pas être soumises à tarification, puisqu’aucun mode de calcul n’aurait alors
été défini, justifié et publié en amont. C’est un très bon outil pour empêcher les administrations de
pratiquer des tarifications de données injustifiées. »
La directive élargit son champ d’application aux musées, bibliothèques et archives.
Cependant, cette extension est assortie d’un nombre important d’exceptions et de règles qui viennent
pour beaucoup enlever l’intérêt de cette dernière. Par exemple, concernant les voies de recours, en cas
de décision négative, le texte prévoit que « les organismes du secteur public communiquent au
demandeur les raisons du refus ; les bibliothèques, y compris les bibliothèques universitaires, les
musées et les archives ne sont pas tenus d’indiquer cette mention ».
Autre déception du texte, bien que la directive précise que les données du secteur doivent être mise à
disposition dans des formats ouverts lisibles par machine, elle n’impose aucun format.
Pour finir, la directive réaffirme, dans son article 6, le principe d’un coût marginal : « Lorsque la
réutilisation de documents est soumise à des redevances, lesdites redevances sont limitées aux coûts
marginaux de reproduction, de mise à disposition et de diffusion. » Mais la présence de nombreuses
exceptions comme les bibliothèques, musées et archives fait perdre beaucoup d’intérêt à ce principe.
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2.3. LA MISE EN PLACE DE PROGRAMME DE R&D&I
La commission européenne fait état d’un budget d’environ 100 millions d’euros dédiés à la recherche,
le développement et l’innovation.
Dans les faits, cela profite peu aux acteurs économiques du marché français, la démarche de demande
de subventions est lourde et longue, alors que le marché demande une forte réactivité « le temps de
procéder à la demande de subvention, on est déjà passé à autre chose tellement cela évolue vite » Cf.
interview OpenDataSoft.
On note cependant différents projets en cours pour favoriser la R&D&I :
-­‐ Linked Open Data (exploitation du web pour l’intégration des données et des informations et
sur l’utilisation des technologies sémantiques)
-­‐ OpenAIRE (créer une infrastructure participative pour l’initiative pilote de l’UE dans le
domaine)
-­‐ ISA sur l’interopérabilité sémantique (faire de l’utilisation des métadonnées publiques
ouvertes une première étape vers l’alignement des métadonnées)
On a cependant du mal à voir une réelle concrétisation de ces encouragements en R&D.
2.4. LE PORTAIL EUROPEEN DE L’OPEN DATA
Un des objectifs de la Commission Européenne est de mettre en place un portail des données de
l’Union Européenne.
Le portail http://open-data.europa.eu propose un accès gratuit et centralisé aux données produites par
les institutions et organes de l’Union Européennes. A ce jour, on comptabilise 6323 jeux de données
publiées sur ce site. Ce nombre peut paraître très faible comparé au 353 226 jeux de données
présentes sur le site http://data.gouv.fr.
Le problème réside dans le fait que la commission n’a que peu de pouvoir pour mener à bien ce
projet. En effet, on peut lire dans une communication sur l'ouverture des données publiée par
l'exécutif européen : « La Commission invite le Parlement Européen et le Conseil, dans le cadre de
leurs compétences respectives, à créer les conditions-cadres appropriées pour la réutilisation des
informations du secteur public dans l'Union Européenne ».
3. LA POLITIQUE AFFICHEE EN FRANCE
L’analyse du développement de l’Open Data dans plusieurs pays du monde permet une mise en
perspective plus objective du projet en France
3.1. UN BESOIN DE DEMOCRATIE
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Henri Verdier, directeur d’Etalab depuis janvier 2013, classe la France parmi « les 5
pays qui en font le plus et le mieux en matière d’Open Data »33
. Toutefois, la France accuse un certain
retard notamment sur les Etats-Unis et à la Grande-
Bretagne et risque de manquer des opportunités
d’envergure à l’heure où le besoin de démocratie se fait
pressant et l’efficacité de l’appareil d’Etat est remise en
cause.
Phénomène historique, la côte de popularité de
l’exécutif n’a jamais été aussi faible dans les sondages,
preuve en est les résultats du dernier sondage BVA et à
son directeur général adjoint d’ajouter « Jamais, en
trente-deux ans de mesures, un président n'était tombé
en dessous de 30% de bonnes opinions dans une
enquête BVA »34
.
Figure 19 : évolution de l’abstention Vième République
Mais plus singulier encore Marine Le Pen (FN) rattrape le niveau d’opinion favorable du président
François Hollande. Du jamais vu sous la Ve République. On assiste à une montée des extrêmes et
une radicalisation résultant d’une crise économique, sociale et politique installée depuis maintenant
plusieurs années.
A cette tendance s’ajoute une abstention grandissante aux élections de représentants au niveau
national, régional ou local. Le taux d’abstention atteignait près de 43% aux dernières élections
législatives. Les questions politiques semblent de moins en moins intéresser les citoyens.
Ce désenchantement est nuancé par une société civile en demande d’action et de
participation dans le débat public. Ce mouvement n’est d’ailleurs pas nouveau, le parti socialiste
avait initié les conseils de la vie lycéenne lorsque Jack Lang était ministre de l’Education Nationale,
concept repris et élargi par Lionel Jospin, avec la loi de démocratie locale qui institue les conseils de
quartiers. Plus récemment Ségolène Royal alors en course pour la primaire socialiste, fait de la
démocratie participative le socle de son programme. Les citoyens sont mis au cœur du processus
démocratique. Ces fondements démocratiques participatifs s’appuient sur un tissu associatif français
dense et influent. La France est le pays de l’UE qui compte le plus d’associations35
. Une culture
associative forte et une capacité de la part des parties prenantes à prendre la parole dans le débat
public sont des spécificités culturelles françaises.
Dans ce paysage démocratique contrasté, à la fois teinté de désillusions et
d’opportunités, le numérique ouvre une nouvelle voie à l’action citoyenne, l’exemple des
33
Supplément à STRATEGIES n°1729 juin 2013
34
Sondage BVA réalisé par internet les 24 et 25 octobre 2013
35
Source : Deloitte 2013 pour le Ministre des Sports, de la Jeunesse, de l’Education populaire et de la Vie associative
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entrepreneurs avec le mouvement des « pigeons » illustre bien ce phénomène. L’administration décide
de prendre une disposition fiscale sur la taxation des plus-values de cession. Et à l’interlocuteur
interviewé, en charge de l'Open gov à l'UMP, de rappeler que cette décision entraine un mouvement
insaisissable par les politiques, ponctuel et totalement spontané grâce notamment aux réseaux
sociaux. Forts de ce rassemblement, les « pigeons » font entendre leur voix et le gouvernement est
contraint de prendre en compte leurs revendications. Dans la même veine, les auto-entrepreneurs,
rassemblés dans le mouvement des « poussins », se servent des mêmes outils numériques pour
prendre la parole et dialoguer avec les pouvoirs publics. Le numérique facilite l’expression citoyenne,
et crée des ponts entre les administrations et leurs administrés.
L’Open Data : une tendance pérenne
L’Open Data s’inscrit dans cette tendance pérenne. Preuve en est la nouvelle orientation
d’Etalab. La mission interministérielle ne se borne désormais plus qu’à la coordination de l’ouverture
des données publiques, elle met l’accent sur la compréhension et la réutilisation des données par le
grand public : les citoyens, les associations, les chercheurs, les journalistes… Critiqué en raison de
l’opacité des données livrées sur son portail numérique data.gouv.fr, Etalab lance en décembre 2013
une nouvelle version de son site, afin de « mettre l’accent sur l’enrichissement des jeux de données
». Ainsi le portail dans sa nouvelle version proposera 3 000 fichiers de données contrairement à la
première mouture qui en dénombrait jusqu’à 350 000. L’objectif est véritablement de livrer un
contenu plus qualitatif que quantitatif. Chaque jeu de données sera illustré par des projets concrets
réalisés à partir des données ouvertes, pour une meilleure compréhension et une plus grande
interactivité entre les producteurs et les réutilisateurs des données ainsi que le grand public.
Le premier ministre Jean-Marc Ayrault, à l’occasion du festival du numérique « Futur en
Seine », qui s’est tenu le 13 juin 2013, a réaffirmé le soutien et l’engagement du gouvernement dans
la politique d’ouverture des données : « Le gouvernement a demandé à toutes ses administrations et à
tous les opérateurs publics de jouer le jeu et mettre au service leurs données ». 36
La France prend la mesure de son retard en matière d’ouverture des données et tend à
renforcer les moyens d’un Open Data fort et plus systématique. A l’heure où le dialogue avec les
citoyens se crispe, l’ouverture des données publiques répond non seulement à un besoin de
démocratie participative mais également à une opportunité de modernisation de l’Etat et de ses
administrations. Le défi est de taille dans un pays pétri dans la culture de l’opacité bureaucratique,
mais le potentiel est plus grand encore.
3.2. UN VECTEUR DE MODERNISATION DE L’ETAT
36
http://www.dailymotion.com/video/x10vcw4_continuer-a-appuyer-de-toutes-nos-forces-le-developpement-du-numerique_news, Jean-
Marc AYRAULT, Juin 2013
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L’Open Data comme vecteur de transformation de l’administration se joue à deux niveaux : le
premier revêt une dimension interne, avec une meilleure efficacité de l’appareil étatique et une
meilleure coopération entre les différents organes, et le second est axé sur l’externe et sur la qualité de
service fournie et perçue par les citoyens.
La volonté de dépoussiérer l’appareil étatique ne date pas d’hier. En 1998, le
gouvernement JOSPIN lance la PAGSI, le
Programme d’Action Gouvernemental pour la
Société de l’Information. L’une des principales
missions de ce programme consiste à moderniser
les services publics. A cette époque déjà, Internet
et les NTIC viennent ébranler les rouages de
l’administration. En 2000 Bruno Lasserre,
président d’un groupe de travail du commissariat
au plan, réfléchissant sur l’apport des technologies
à la modernisation de l’Etat, souligne combien les
NTIC conduisent à un « accroissement de la
productivité, à une accélération de la circulation
des informations mais surtout à une redéfinition du
rôle de la hiérarchie, à un décloisonnement des
services ».37
Figure 20 : sphères de circulation de l’information des décisions
Le 30 octobre 2012 le SGMAP, le Secrétariat général pour la modernisation de l’action
publique, est placé sous l’autorité du premier ministre avec pour objectif de coordonner, favoriser et
soutenir, au niveau interministériel, les travaux conduits par les administrations en vue d’évaluer et de
moderniser l’action publique, notamment dans le domaine des systèmes d’information et de
communication. Ce secrétariat coordonne également la réutilisation la plus large possible des
informations publiques. A travers la DISIC, la Direction Interministérielle des Systèmes
d’Information et de Communication de l’Etat, piloté par la SGMAP, il s’agit de constituer un réseau
interministériel, pour rationnaliser les coûts et harmoniser les politiques de gestion de réseaux
uniques.
Un chemin encore long
Malgré les efforts déployés, le chemin qui mène à la modernisation des administrations
semble encore bien long. Les ministères peinent à partager leurs données. Pour exemple le ministère
du logement n’a pas accès aux informations sur les taxes d’habitation détenues par le ministère des
finances, mais grâce à l’ouverture des données ce dernier parvient à obtenir les informations
recherchées sans passer par Bercy. En ce sens, l’Open Data est un puissant levier d’interconnexion
entre les ministères et un vecteur de circulation de l’information qui à terme favorise une plus grande
efficacité. L’Open Data tend également à décentraliser les initiatives et le stockage d’informations. Le
37
Internet et Politique, Projet collectif de Sciences Po - 2005
Le grand
public
Les partenaires
professionnels
Les partenaires
de
l'administation
L'administratio
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9 octobre 2013, les collectivités de Rennes, PACA, Gironde, Montpellier, Bordeaux, Saône et Loire
créent l’association Open Data France, elle rassemble l’ensemble des collectivités à l’initiative de
cette création. Ces dernières s'organisent autour de cette association pour avoir une légitimité vis à vis
de l'état et leur objectif est de partager leurs réalisations et pratiques et d’aborder l’éventuelle
mutualisation de plates-formes techniques en travaillant sur les formats.
Grâce à l’Open Data et à son récent élargissement, les acteurs dans les ministères, les administrations
et les collectivités deviennent de véritables parties prenantes actives, dans une logique de co-création
et de meilleur partage de l’information. Cette logique tend à fluidifier les processus et permet
d’identifier et de prévenir les doublons qui peuvent apparaître dans un système plus opaque. Notre
interlocuteur à l’ UMP rappelle que « aux Etats-Unis, en 2009, le président Obama demande la mise
en ligne des procédures de mise à jour du parc informatique au niveau fédéral. Suite à cette ouverture
des données, le constat est frappant : les redondances administratives coûteraient jusqu’à 3 milliards
de dollars». Une meilleure visibilité sur les activités des différents organes de l’appareil étatique
permettrait non seulement plus d’efficacité mais des économies considérables. Dans un contexte
d’austérité budgétaire l’Open Data semble avoir de quoi séduire.
L’opportunité d’améliorer la qualité de service
Si l’ouverture des données représente une opportunité d’amélioration de la performance
interne de l’Etat, elle représente également un moyen d’améliorer la qualité du service rendu aux
citoyens et permet d’afficher une plus grande transparence.38
Tandis que dans la relation classique de l’administration avec ses administrés, le rôle du
service publique n’était pas questionnable, avec l’Open Data et la tendance à la plus grand
transparence, les services rendus peuvent être améliorés en tenant compte des remontées des citoyens
et plus largement de la société civile. En effet l’ouverture des données entraine une utilisation des
données et une évaluation par les utilisateurs. Les organisations publiques productrices de données
vont de plus en plus devoir tenir compte des retours des administrés, sans quoi elles feraient perdre
tout le sens de l’ouverture et de la circulation des données. La transparence permet l’évaluation des
politiques publiques et améliore la confiance des citoyens dans leurs administrations. Le schéma de
gouvernance change dans un contexte numérique qui valorise les échanges et la coopération.
Notre interlocuteur interviewé de l’association nantaise LIBERTIC créée fin 2009 afin de promouvoir
l’ouverture des données publiques, précise qu’à l’heure actuelle « ne font foi que les données
collectées par les agents en interne » et que sans la prise en compte du retours des utilisateurs sur
l’ouverture des données « on risque de passer à coté d’un potentiel d’amélioration ».
38
Colloque de la DILA : intervention de M. Camille DOMANGE, Chef du département des programmes numériques du ministère de la
Culture et de la Communication
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L’UDI dans son cahier de propositions 39
insiste sur cet aspect : « La gouvernance renouvelée par le
citoyen, plus qu'utilisateur de services publics, devient co-acteur de ces services publics. La
gouvernance de demain n'est plus uniquement ‘’descendante’’ mais aussi plus ‘’ascendante’’ ».
L’Open Data favorise la transparence et la
co-création avec les citoyens qui sont de
puissants leviers de modernisation de
l’action publique, toutefois il faudra veiller
à un accompagnement des agents
notamment pour désamorcer des craintes
liées à un contrôle jugé excessif sur la
sphère publique. Le mouvement
d’ouverture des données aux résultats
prometteurs semble s’inscrire dans la
durée, et notre interlocuteur interviewé
dans la Collectivité Territoriale de Saône
et Loire, de préciser « la France est en
train « d’inventer l’Open Data » et il faut
compter 10 à 15 ans pour son
déploiement ».
Figure 21 : dynamique vertueuse de l’Open Data dans la transformation
L’obligation de transparence des administrations améliore la confiance des usagers,
particulièrement dans un contexte morose à plusieurs égards, teintés parfois de scandales de
corruption ou de fraudes aux plus hauts niveaux de l’Etat. Notre interlocuteur interviewé à l’UMP
rappelle l’exemple du Québec où des scandales de corruption dans l’attribution de marchés publics
ont entrainé un puissant mouvement Open Data40
. Le besoin de retrouver de la confiance entraine la
transparence et l’Open Data est l’un des outils favorisés par les pouvoirs publics pour tisser ou retisser
un lien parfois rompu avec les citoyens.
Sur bien des aspects, l’Open Data, qui malheureusement peine à se généraliser dans les
administrations, représente un formidable vecteur de modernisation de l’Etat, tant en fluidifiant les
mécaniques internes propres à l’appareil étatique, que dans la relation et l’action publique délivrée
aux citoyens. Dans un monde numérique où l’ensemble des informations est davantage accessible,
l’Etat et ses administrations ne semblent pas pouvoir rester en retrait de ce mouvement d’ouverture.
3.3. ETAT DES LIEUX DE LA LEGISLATION
39
Source : Rapport « - L'Open Data un levier majeur pour moderniser la démocratie, fabriquer de la croissance durable et augmenter nos
recettes fiscales », Alain Dolium, 2013
40
http://www.huffingtonpost.ca/2012/11/18/quebec-corruption-scandal_n_2153602.html, By Benjamin Shingler, The Canadian Press,
Novembre 2012
amélioration
de la qualité
de service
rendue et
perçue
Améliorati
on de
l'action
publique
en interne
Open
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Avant la loi « CADA » (liberté d’accès aux documents administratifs) du 17 janvier 1978,
l’Administration française est une institution fermée qui refuse de communiquer tous les documents
que les administrés peuvent être amenés à lui demander.
Cette loi est donc une petite révolution qui vient instaurer un véritable « droit à l’information ».
C’est en ce point qu’on peut considérer que la loi CADA a pu être une première étape dans l’édiction
du principe d’ouvertures des données publiques.
On peut regretter en revanche qu’il ait fallu ensuite attendre l’édiction de la directive européenne de
2003 et sa transcription en droit interne pour qu’une nouvelle avancée ait lieu. On peut noter une
timide avancée avec la circulaire du premier ministre du 14 février 1994, elle est considérée comme
un coup d’essai, qui avait le mérite d’identifier clairement les questions auxquelles le droit positif se
devait d’apporter des solutions propres à concilier les différents intérêts en présence : ceux,
commerciaux, des opérateurs privés et ceux des personnes publiques détentrices des données
défendant l’immuable principe d’intérêt général.
Il faudra donc attendre la directive européenne du 17 novembre 2003 et sa transposition en
droit interne par l’ordonnance n°2005-650 du 6 juin 2005 relative à la liberté d’accès aux documents
administratifs et à la réutilisation des informations publiques pour que soit finalement ajouté dans la
loi du 17 juillet 1978 des dispositions spécifiques portant notamment sur les conditions de
réutilisation des « informations publiques ». Cette ordonnance viendra notamment intégrer dans la loi
de 1978 un article 10 venant affirmer que les données publiques peuvent être utilisées librement à des
fins commerciales, c’est à dire exploitées par des acteurs privés. Cette liberté de réutilisation est totale
à condition de ne pas altérer et dénaturer de leur sens les données publiques et de respecter les
dispositions législatives concernant les données à caractère personnel.
La circulaire du 26 mai 2011, relative à la création du portail unique des informations publiques de
l’Etat « data.gouv.fr » par la mission « Etalab », et l’application des dispositions régissant le droit de
réutilisation des informations publiques, réaffirment le principe général de la mise à disposition
gratuite du plus grand nombre d’information. La soumission à redevance doit rester l’exception et être
« dûment justifiée par des circonstances particulières ».
Malgré cette affirmation du principe de gratuité, dans la réalité l’application de ce dernier
reste l’exception là où la règle consiste à mettre en place quasi systématiquement des redevances
(Rapport Trojette, novembre 2013). Pour le rapporteur, l’application de ces redevances constitue des
freins qui « risquent de limiter les démarches en faveur de la transparence et la modernisation de
l’action publique et de porter atteinte au développement économique ».
En ce qui concerne la protection des données personnelles, certains s’élèvent contre l’Open
Data, comme Gaëtan Gorce, Sénateur PS, qui s’alarme des « menaces considérables qu’il représente
déjà pour le respect de la vie privée », voire « la perspective d’un fichage généralisé à des fins privées
», par « recoupement des données brutes [...] voire avec celles (le Big-Data) dont des entreprises sont
déjà en possession ».
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Pour d’autres cela reste un « non-sujet » dans la mesure où des textes régissent déjà la
protection des données individuelles (Loi informatique et libertés du 6 juin 1978). A ce titre, la CNIL
rappelle que « les informations figurant dans des documents produits ou reçus par les administrations,
peuvent être utilisées par toute personne qui le souhaite à d’autres fins que celles de la mission de
service public pour les besoins de laquelle les documents ont été produits ou reçus » sauf si leur «
communication porte atteinte à la protection de la vie privée, au secret médical et au secret en matière
commerciale et industrielle. »
La réutilisation est possible dans trois cas :
• la personne concernée y a consenti,
• les données ont été anonymisées,
• une disposition législative ou réglementaire le permet.
Les	
  stratégies	
  d'influence	
  gouvernementales	
  sur	
  l'Open	
  Data	
   42	
  
4. UN MOUVEMENT D’OUVERTURE ENTRAVE
4.1.LES FAITS EN CONTRADICTION AVEC LES PAROLES
4.1.1. UN GOUVERNEMENT IMPLIQUE, MAIS PAS TROP …
L’organisation actuelle d’Etalab laisse penser que le gouvernement n’a pas encore mis le
coup d’accélérateur sur le développement de l’Open Data en France. En effet, à date l’équipe
Etalab est composée de 8 collaborateurs et
dispose d’un budget de 4 millions d’euros, ce qui
peut paraître faible pour un projet d’une telle
envergure (d’autant plus que les SI historiques
ont des formats divers et variés et ne sont pas
conçus pour faciliter l’Open Data), mais cela est
peut être cohérent eu égard des actions entreprises
et de l’ambition actuelle de l’Etat. Notre
correspondante Etalab indique que « s’il y avait
des moyens financiers, 1 million d’euros de plus,
on pourrait explorer une thématique de bout en
bout ».
Figure 22 : le président Hollande dans l’émission Des paroles et des actes
Certes l’Etat ne met pas les moyens suffisants pour l’ascension de l’Open Data, mais nous pouvons
imaginer que le frein ne se situe pas là, en comparant notamment avec un pays émergeant comme
l’Inde, qui malgré une organisation administrative beaucoup plus complexe et disparate arrive à créer
une administration numérique.
En plus d’une équipe de taille modeste et d’un budget laissant déduire la limite de l’ambition, nous
pouvons noter le choix du rattachement d’Etalab à un secrétariat général (SGMAP) et non pas à un
ministère, cela reflète peut-être le manque d’importance accordée à la problématique.
Les missions d’Etalab manquent crucialement de structuration, d’objectifs tangibles et de
planning. La démarche actuelle repose sur une libération progressive et une assistance auprès des
différentes administrations de l’Etat, sans avoir une indication claire sur la cible.
Nous pouvons noter qu’il n y a pas de projet global avec une méthodologie commune et organisée. En
effet, il n’existe pas de méthodologie projet indiquant les étapes de modernisation de l’Etat, ni de
projet commun et centralisé lié à la refonte du système d’information. Ce qui peut paraître absurde car
pour moderniser, il faut des données harmonisées et centralisées et une démarche nationale : si l’Inde
l’a fait avec autant d’Etats, la France peut le faire.
De même au niveau des collectivités locales, chacun a sa méthodologie et l’avancement sur le sujet
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  • 1. Executive Master Marketing Management 2013-2014 - Cours d’Intelligence Economique de Monsieur Christian HARBULOT, professeur à l’ESSEC. Rapport d'Etude sur "les stratégies d'influence gouvernementales sur l'Open Data" – décembre 2013 Auteurs : Charles-Antoine d’HOOP (rapporteur) Aude DEFRETIERE Mar GARRIDO Frédéric LARCHIER Soumaya LOUATI Esther PETIT
  • 2. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   1   REMERCIEMENTS Les auteurs remercient chaleureusement les 10 personnes qui ont bien voulu répondre à leurs sollicitations, parfois pressantes, pour constituer ce rapport dans lequel chacun des membres de l’équipe s’est investi avec intérêt, méthode et patience. La diversité des interlocuteurs et la qualité des échanges auront permis, nous l’espérons, de rendre plus intéressant et pertinent ce rapport, et l’Open Data nous est apparu au fil des entretiens comme étant économiquement stratégique, politiquement incontournable et démocratiquement exigeant. L’exercice académique de rédaction d’un rapport sur un sujet aussi « ouvert », sans jeux de mots, a été très formateur, et prépare la rédaction de la thèse professionnelle du Master qui validera notre diplôme ESSEC en Marketing Management. Pour des raisons de confidentialité, nous ne mentionnons pas les noms des personnes interviewées dans ce rapport. Néanmoins, afin de conserver au rapport son intérêt, nous portons à la connaissance du lecteur les différentes organismes et institutions interviewés : institutions publiques, journalistes, patron de start-up, collectivités locales, associations, partis politiques, grandes entreprises impliquées dans le domaine, juristes.
  • 3. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   2   ABSTRACT The “Competitive Intelligence” class of M.. Christian Harbulot is part of the ESSEC Marketing & Management Executive Master Program. It aims at learning the proper ways to discover real information out of what is pure demagoguery. M. Harbulot demanded to write a paper that would allow us to leverage information according to his methods. “The big data shift”, “smart grids issues”, or “risks of a cooperation agreement” were as many suggested topics, but our group decided to specifically focus on “The influential strategies of governments on Open Data.” Indeed, the Open Data movement, which consists in delivering public data on the Internet for public or private use, is inherent with the decisions of the political sphere. Most of democracies, as well as many local authorities, have already widely opened their databases. In order to reach an impartial judgment about the strategies of the past and present French governments on this matter, we decided to compare them with the one held in the USA, the UK, India, or on the African and the European continents. As a consequence, our team organized several meetings with influential politicians, legal experts, senior officials, association leaders and, last but not least, with people who create and share Open Data, like start-up’s CEOs and project manager of local authorities. We also studied terms of law and official reports. Some members of the team attended events planned by Etalab or Sorbonne law schools. This paper analyzes and synthetizes the strategies of many different countries, illustrated with actual examples of open data policies.
  • 4. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   3   RESUME Le cursus académique de l’exécutive Master ESSEC en Marketing Management comporte un cours d’Intelligence Economique dispensé par M. Christian HARBULOT. Il est demandé pour l’apprentissage de ce cours de rédiger un rapport d’étude de façon à apprendre à chercher de l’information et discerner le réel de la démagogie. Parmi les sujets proposés : « pourquoi la France a raté le virage du big data, les smart grid, les risques d’un accord de coopération, etc… », les auteurs ont choisi le sujet « les stratégies d’influence gouvernementales sur l’Open Data ». Le principe de l’Open Data consiste à rendre disponible par internet les données numériques publiques pour une utilisation privée ou publique, et l’Open Data est donc par nature un sujet où l’impulsion politique joue un rôle prépondérant. Les premières analyses ont montré que la plupart des démocraties mondiales, ainsi que de nombreuses collectivités locales, ont ouvert leurs bases de données. Afin de porter un jugement plus objectif sur la stratégie des gouvernements français passés et présents, nous avons fait le choix d’étudier les stratégies d’influence américaines, anglaises, indiennes, panafricaines et européennes. En France, l’équipe de rédaction a ciblé ses efforts sur la rencontre d’acteurs influents tels que des hommes politiques, des juristes, des hauts fonctionnaires et des responsables d’associations, mais aussi ceux qui « font l’Open Data » au quotidien, à savoir des patrons de start-up et des responsables de projets Open Data dans les collectivités. Une recherche bibliographique complémentaire a été orientée sur les textes juridiques et les rapports officiels, et plusieurs membres de l’équipe ont participé à des évènements organisés par Etalab ou des facultés de droit parisiennes. Le présent rapport restitue une synthèse des stratégies, illustrée d’exemples concrets de réutilisation des données dans les pays étudiés, pondérée par des jugements sur celles qui ont été observées. MOTS CLES Etalab, Open Data, cada, sgmap, cnil, anssi, disic, libertic, popi, foia, raw_data, semantic data, Linked data, metadata, opendatasoft, datarepublica, OpenKnowledgeFoundation, bigdata, dspl, PublicData, democratie2.0, intelligence économique, statistiques, données personnelles, indexation, startup, stratégies, influence, numérique, transparence
  • 5. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   4   TABLE DES MATIERES Remerciements.........................................................................................................................1 Abstract ....................................................................................................................................2 Resumé......................................................................................................................................3 Mots clés ...................................................................................................................................3 Table des matières ...................................................................................................................4 Table des figures......................................................................................................................6 Introduction .............................................................................................................................8 1. L’Open Data dans le monde..........................................................................................12 1.1. Aux Etats-Unis ......................................................................................................................12 1.2. En Grande-Bretagne ............................................................................................................15 1.3. En Inde...................................................................................................................................17 1.3.1. Contexte et enjeux............................................................................................................17 1.3.2. Le cadre juridique en Inde................................................................................................18 1.3.3. L’admnistration indienne : culture et organisation ..........................................................18 1.3.4. Illustration du modèle indien ...........................................................................................20 1.4. L’Open Data panafricain .....................................................................................................24 1.4.1. Genèse..............................................................................................................................24 1.4.2. L’Open Data de la banque africaine du développement ..................................................25 1.4.3. Le développement économique et la lutte contre la corruption .......................................26 1.4.4. Exemple de l’Afrique du Sud...........................................................................................27 1.4.5. La protection des données personnelles en Afrique du Sud : un frein pour l’Open Data ? 29 1.5. Conclusion sur l’Open Data dans les pays étrangers étudiés...........................................29 2. La politique européenne sur l’Open Data....................................................................31 2.1. La Mise en place d’un cadre juridique : la directive 2003/98/CE....................................31 2.2. Les apports de la directive 13/06/2013................................................................................32 2.3. La mise en place de programme de R&D&I......................................................................34 2.4. Le portail européen de l’Open Data ...................................................................................34 3. La politique affichée en France.....................................................................................34 3.1. Un besoin de démocratie ......................................................................................................34 3.2. Un vecteur de modernisation de l’Etat...............................................................................36 3.3. Etat des lieux de la législation..............................................................................................39 4. Un mouvement d’ouverture entravé ............................................................................42 4.1. Les faits en contradiction avec les paroles..........................................................................42 4.1.1. Un gouvernement impliqué, mais pas trop … .................................................................42
  • 6. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   5   4.1.2. Un écosysteme défaillant .................................................................................................44 4.2. La défiance numérique, une exception culturelle française .............................................44 4.3. Les difficultés juridiques : sont-elles des prétextes pour ne pas faire ?...........................46 4.4. Les difficultés techniques : qu’en est-il réellement ?.........................................................49 4.4.1. Les étapes principales pour mettre techniquement en œuvre un Open Data ...................49 4.4.2. Les leviers d’influence : qui sont les métiers concernés ? ...............................................54 4.4.3. Organiser l’influence........................................................................................................55 5. Les enjeux économiques de l’Open Data......................................................................58 5.1. Quels avantages pour l’Europe ? ........................................................................................58 5.2. Un outil stratégique pour l’économie française.................................................................58 5.3. L’Open Data, une stratégie business dans le secteur privé...............................................60 5.4. L’ouverture et utilisation des données : exemples d’applications....................................61 5.4.1. Opendatasoft, une start-up innovante qui rend facile la réutilisation des données. .........61 5.4.2. Dataveyes, une start-up innovante de visualisations interactives de données. ................65 5.5. Les opportunités de l’ouverture des données.....................................................................68 5.6. Le rôle de Google, en tant qu’acteur privé.........................................................................72 5.6.1. Indexation des données avec le moteur de recherche ......................................................72 5.6.2. Le service de stockage et de présentation des données publiques de Google..................74 5.6.3. Le cas de la start-up francaise Datarepublica...................................................................76 5.7. Le cas d’Orange France ......................................................................................................76 5.7.1. Enjeux et perspectives......................................................................................................76 5.7.2. Un exemple concret proposé par Orange pour comprendre l’Open Data : « Où habitez- vous vraiment ? »...........................................................................................................................78 5.7.3. L’expérimentation : « Empreinte de mouvement »..........................................................80 6. Conclusion.......................................................................................................................82 7. Référence des sources.....................................................................................................84 7.1. Personnes interviewées .........................................................................................................84 7.2. Liste des évènements auxquels les auteurs ont participé ..................................................84 7.3. Références des textes législatifs ...........................................................................................84 7.4. Bibliographie (livres, rapports, livres blancs)....................................................................87 7.5. Liens et références ................................................................................................................88 8. Annexes ...........................................................................................................................92 8.1. Méthodologie pour la production du rapport...................................................................92 8.2. Google trends : évolution des audiences du mot clé Open Data.......................................92 8.3. L’analyse des consignes d’indexation par les robots.........................................................92 8.4. Définitions complémentaires : caractéristiques essentielles des données ouvertes.........93
  • 7. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   6   TABLE DES FIGURES Figure 1 : historique des ouvertures des sites gouvernementaux (source : Wikipédia) 8 Figure 2 : carte des initiatives locales Open Data en France, Source : association Libertic (Novembre 2013) 9 Figure 3 : acteurs interrogés pour le rapport ESSEC 11 Figure 4 : localisation des dépenses en formation versus le taux de chômage 12 Figure 5 : copies d’écran de l’application FBI’s most wanted 13 Figure 6 : le DATA Act doit permettre de suivre chaque dollar dépensé par l’administration 14 Figure 7 : répartition des crimes commis dans Londres et sa banlieue 16 Figure 8 : vue d’un bureau de l’administration indienne 18 Figure 9 : bureau de vote informatisé en Inde 19 Figure 10 : exemple de vue du portail indien 20 Figure 11 : carte de couverture des accès à internet 22 Figure 12 : les objectifs de la déclaration du Millénaire 24 Figure 13 : vue du portail Open Data de la Banque Mondiale 25 Figure 14 : le logo de L’Open Data for Africa 25 Figure 15 : principales catégories de jeux de données disponibles sur le portail global Open Data Africa. 26 Figure 16 : vue du portail Open Data Africain : accès aux sites des pays 27 Figure 17 : vue du portail Open Data de l’Afrique du Sud : http://southafrica.opendataforafrica.org 28 Figure 18 : extrait du portail de la ville de Johannesburg 28 Figure 19 : évolution de l’abstention Vième République 35 Figure 20 : sphères de circulation de l’information des décisions 37 Figure 21 : dynamique vertueuse de l’Open Data dans la transformation 39 Figure 22 : le président Hollande dans l’émission Des paroles et des actes 42 Figure 23 : les freins à l‘Open Data par peur de transparence 44 Figure 24 : La licence de l’Etalab 47 Figure 25 : la démarche d’analyse technique 49 Figure 26 : les étapes d’un plan directeur Open Data 50 Figure 27 : les décisions d’architecture pour la mise en œuvre d’un Open Data 51 Figure 28 : les risques techniques de conception d’un Open data 52 Figure 30 : verbatim les risques des données temps réel 53 Figure 31 : les métiers concernés par les problématiques techniques de l’Open Data 54 Figure 32 : les actions pour palier aux risques 55 Figure 33 : les leviers de la promotion de l’Open Data 56 Figure 34 : le financement de l’Open Data 56 Figure 35 : influer sur la recherche et le savoir 57 Figure 36 : Illustration du métier Data Scientist 57 Figure 37 : infographie source Opendatasoft.com 62 Figure 38 : infographie Opendatasoft.com : la cartographie 62 Figure 39 : infographie Opendatasoft.com 63 Figure 40 : vue d’écran Kelquartier.com 64 Figure 41 : vue d’écran : Dataveyes.com 66 Figure 42 : vue d’écran application Dataveyes 66 Figure 43 : vue d’écran Site Rennesmetropole.com 67 Figure 44 : vue d’écran site Rennesmetropole.com 67 Figure 45 : vue site ilovedemocracy.com 68
  • 8. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   7   Figure 46 : les principales données qui seraient réutilisées par une entreprise, source : Etude Bluenove-BVA 69 Figure 47 : les bénéfices attendus de l’ouverture des données (Source Etude Bluenove-BVA) 70 Figure 48 : les principaux obstacles d’un projet Open Data pour une entreprise - Source : Etude Bluenove-BVA 71 Figure 49 : résultats comparés des recherches sur www.data.gouv.fr et Google 73 Figure 50 : résultat recherche « military death » sur open.data.uk 73 Figure 51 : résultats comparés des recherches sur www.data.gov 73 Figure 52 : exemple de captcha et de mire d’authentification 74 Figure 53 : le service Public Data de Google 75 Figure 54 : comment importer un contenu sur le service public data de Google 75 Figure 55 : la fiche de M. Guillaume Bacuvier, membre du conseil stratégique (source : site Data Republica) 76 Figure 56 : Open Data, enjeux et perspectives dans les télécommunications (Source Orange Labs) 77 Figure 57 : vue d’écran Application « Où habitez vous vraiment ? » -1 78 Figure 58 : vue d’écran Application « Où habitez vous vraiment ? » -2 79 Figure 59 : vue d’écran Application « Où habitez vous vraiment ? » -3 79 Figure 60 : vue d’écran Application « Où habitez vous vraiment ? » -4 79 Figure 61 : vue d’écran Application « Où habitez vous vraiment ? » -5 80 Figure 62 : site « empreinte.orange.com » -1 80 Figure 63 : site « empreinte.orange.com » -2&3 81 Figure 64 : vue Google Trends mot Open Data 92
  • 9. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   8   INTRODUCTION Ce rapport s’inscrit dans le cadre du cours d’intelligence économique de Monsieur Christian HARBULOT, professeur à l’executive Master en Marketing Management de l’ESSEC. Il a pour objectif d’analyser « les stratégies d’influence gouvernementales sur l’Open Data ». Dans cette introduction, après une brève présentation de l’Open Data dans le monde et en France, nous présenterons l’analyse sémantique du sujet ainsi que la méthodologie utilisée. Origines et principes de l’Open Data Le principe de l’Open Data consiste à rendre disponible les données numériques publiques via Internet pour une utilisation privée ou publique. C’est une démarche qui prend racine dans le mouvement de démocratie ouverte né dès 1966 aux Etats-Unis avec le Freedom Of Information Act (FOIA), qui définit, dans le chapitre 5, le rôle de l’organisation gouvernementale et de ses employés : « Except as otherwise required by statute, matters of official record shall be made available, in accordance with published rule, to persons properly and directly concerned, except information held confidential for good cause found ». Ce mouvement prône une transparence des institutions via un nouveau contrat de société efficace entre gouvernants et gouvernés, avec un renforcement du processus démocratique. De nombreux pays, quelque soient leur stade de développement, ont ouvert leur site gouvernemental d’Open Data, comme le montre l’infographie ci- contre. Figure 1 : historique des ouvertures des sites gouvernementaux (source : Wikipédia) Pour les collectivités et les organismes publics, l’Open Data consiste donc à publier, sur une plateforme ouverte, le patrimoine statistique, cartographique, économique et financier des territoires.
  • 10. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   9   La mise à disposition des données déjà produites est une obligation légale en France. Un cadre juridique strict définit cependant les informations qui peuvent être rendues publiques et celles qui ne peuvent pas l’être pour des raisons de confidentialité. Les données sensibles et à caractère personnel sont exclues, de fait, de la démarche d’Open Data. L’Open Data 1 permet de constituer et d’entretenir une source d’informations fiables, structurée (appelée Meta Data) ou non (Raw Data) pour les chercheurs, les journalistes et les citoyens. L’Open Data ouvre la voie à la création d’applications pratiques où les données sont reliées entre elles (Linked Data) par des champs en commun. Par exemple , la mairie publie des données sur internet : horaires de bus, géolocalisation des arrêts, hauteur des trottoirs…Les développeurs peuvent réutiliser librement ces données via des Application Purpose Interface (API) pour innover et développer des applications pour faciliter l’accès aux transports des personnes à mobilité réduite. L’Open Data ouvre donc de nouvelles opportunités de développement économique avec l’émergence de nouveaux services innovants et originaux. Il contribue à rendre accessible, lisible et compréhensible l’action publique : décisions, projets, finances publiques, encourageant ainsi la transparence de l’action des l’administrations internationales, nationales, régionales ou locales. La carte ci- contre montre les collectivités qui ont ouvert, ou ont l’intention d’ouvrir leur données. Figure 2 : carte des initiatives locales Open Data en France, Source : association Libertic (Novembre 2013) L’Open Data offre enfin une perspective et une opportunité de modernisation des services publics, en les rendant toujours plus efficaces, accessibles et collaboratifs, en phase avec les enjeux du XXIième siècle, notamment celui de la réduction de la dette publique, via l’optimisation des services publics. Le potentiel de développement économique avec l’Open Data dans les secteurs décentralisés comme le tourisme ou plus régalien comme la santé représentera une part importante de la croissance future des économies avec le digital. La mise en œuvre de l’Open Data au sein d’un pays est régie par deux facteurs essentiels, qui sont d’une part « l’offre », c’est à dire la volonté exercée par « le politique », qui a autorité sur son 1 Le texte s’inspire du script de la vidéo http://youtu.be/aHxv_2BMJfw
  • 11. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   10   administration centrale et plus largement les élus locaux, décideurs sur des budgets alloués aux systèmes d’information pour produire et exposer les données, et d’autre part « la demande » en provenance des utilisateurs des données qui trouvent un intérêt et un bénéfice à l’exploiter. La réutilisation des données, qui est la condition du succès de l’Open Data, repose sur plusieurs critères, comme par exemple son exploitabilité, son accessibilité et notamment le coût d’accès, qui est un levier d’influence important pour le politique, puisqu’il peut être gratuit, ou payant avec diverses formes de tarification (abonnement, forfaitaire, fonction de l’usage). En France, la mise en œuvre de l’Open Data, encore appelée donnée ouverte en français, est confiée à l’Etalab, qui est une mission interministérielle en charge de la coordination de l’ouverture des données publiques. Créée en février 2011 par François Fillon, elle est rattachée en octobre 2012 au Secrétariat Général à la Modernisation de l’Action Publique (SGMAP) lors de la création de cette structure par Jean-Marc Ayrault. En parallèle et bien souvent de façon spontanée et autonome, l’essor de l’Open Data en France s’est au début concrétisé par des initiatives territoriales concrètes et ambitieuses. Les stratégies gouvernementales Le présent rapport doit analyser les stratégies d’influence gouvernementales, c’est à dire les actions, les dispositifs et les choix des moyens mis en œuvre, au niveau du pouvoir exécutif et législatif d’un Etat, pour atteindre ses objectifs sur l’Open Data. On veillera donc à identifier et comparer les objectifs des gouvernements s’ils sont communiqués, selon leur nature (qualitatif, quantitatif), leur ambition, leur pertinence et leur mesurabilité. En d’autres termes, on observera la « propagande » et la pédagogie déclinée par les gouvernements pour « faire bouger » leurs administrations, qui ont déjà par ailleurs de nombreuses autres priorités. L’analyse définira d’une part qui sont les acteurs qui composent son écosystème et les procédés déployés pour susciter, motiver ou promouvoir leurs actions en faveur de l’Open Data, et d’autre part, la nature des freins liés à la mise en œuvre des ressources. L’Histoire nous montre que l’information a été synonyme de pouvoir et de puissance, et la mise en œuvre d’une démarche volontaire et régalienne de transparence et de partage des données ne va pas de soi, même si cela peut apparaître comme un principe démocratique fort, et un juste retour de la ponction fiscale. En cette période de forte pression sur la réduction des déficits publics et de « chasse aux rentes de situation », la mise sur internet de données peut mettre en exergue les contradictions ou aberrations des systèmes en place. Certains acteurs ou lobbies n’ont de fait aucun intérêt à voir certains jeux de données publiés en ligne, qui seraient repris par les médias pour informer les citoyens et demander plus de transparence et de réformes.
  • 12. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   11   Une méthodologie adaptée pour identifier les « non-écrits » Afin d’identifier les freins véritables « non-écrits», notamment ceux induits par l’Histoire, les auteurs ont donné une part importante aux interviews des acteurs qui ont bien voulu répondre à nos sollicitations, afin d’obtenir les informations non disponibles en ligne et de forger une conviction sur les pertinences des stratégies. Le mouvement Open Data est largement déployé à l’échelle internationale, et une priorisation des recherches et analyses a été faite avec une focalisation sur les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, l’Inde, l’Afrique, l’Union Européenne et la France pour intégrer les pays référents, des nations émergentes et en voie de développement. Figure 3 : acteurs interrogés pour le rapport ESSEC Un calendrier favorable Le calendrier a permis de participer à des évènements riches en contacts et informations tels que le Colloque « gouvernance des données à l’ère numérique » et la remise des prix #dataconnexions3 organisée par l’Etalab dans les locaux de Microsoft à Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine). Politiques Administrations Associations Collectivités Start-up Juristes
  • 13. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   12   1. L’OPEN DATA DANS LE MONDE Nous abordons dans ce paragraphe les différentes approches de politique d’Open Data à travers quatre exemples : les Etats-Unis, le Royaume-Uni, l’Inde, le continent africain et l’Afrique du Sud. Nous étudierons brièvement les programmes d’Open Data, les instruments, les freins et les moteurs de la politique d’implémentation de l’Open Data et les effets de la politique d’Open Data. 1.1. AUX ETATS-UNIS Lors de son premier jour en tant que président des Etats-Unis en janvier 2009, Barack Obama annonçait que son administration appliquerait une stratégie de transparence qui impliquerait un degré d’ouverture sans précédent de son gouvernement. Dans un communiqué aux responsables gouvernementaux, il déclarait 2 «Nous travaillerons ensemble afin de nous assurer la confiance des citoyens et d’établir un système de transparence, de participation publique, et de collaboration. L’ouverture renforcera notre démocratie et promouvra l’efficience et l’efficacité au sein du Gouvernement. » La stratégie de transparence du gouvernement américain met l’emphase sur la relation entre le gouvernement et les citoyens 3 « La transparence promeut le fait de devoir rendre compte de ses actes et donne aux citoyens l’information sur ce que leur gouvernement fait. » Elle met en avant l’augmentation du contrôle démocratique et de la participation politique. De fait, le sous-titre du portail gouvernemental dédié à l’Open Data data.gov est « donner plus de pouvoir aux personnes ». Plus concrètement, des rapports sur les dépenses fédérales sont publiées sur le site www.recovery.gov que le gouvernement a lancé en 2009, comme l’illustre la figure ci- contre. Figure 4 : localisation des dépenses en formation versus le taux de chômage Une motivation supplémentaire pour la mise à disposition de données gouvernementales est l’implication plus importante des citoyens dans l’action de la police. Le FBI a de fait développé 2 The White House. (2009). Memorandum for the Heads of Executive Departments and Agencies, Transparency and Open Government, Washington: OMB. 3 U.S. Department of State. (2010). Open Government Plan, Washington: U.S. Department of State.
  • 14. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   13   l’application iPhone « FBI most wanted »4 permettant d’identifier les criminels les plus recherchés ou les personnes disparus. Figure 5 : copies d’écran de l’application FBI’s most wanted Les instruments permettant la mise en œuvre des politiques d’Open Data sont regroupés sur le portail www.data.gov. Ils sont d’ordres divers : politiques, techniques, collaboratifs, éducatifs… Le portail permet en effet d’accéder à la stratégie et aux initiatives gouvernementales sur l’Open Data. En outre, il autorise les citoyens à contrôler la mise en œuvre de cette stratégie dans les différents départements, agences ou organisations fédérales. Il met par ailleurs gracieusement à disposition les divers jeux de données (91054 étaient disponibles au 27/10/2013) et les applications développées par les citoyens. Enfin il met en relation les acteurs de l’Open Data au travers de forum et blogs. Bien que présente, la section dédiée à l’enseignement est cependant moins mis en avant. A noter, il n’y a pas eu de loi spécifique afin de développer initialement l’Open Data. En effet, le gouvernement s’est appuyé sur les textes existants. Le Freedom of Information Act (FOIA), aussi appelé Public Information Act, et qui date tout de même de 1966 ( !), représentait une avancée majeure en permettant à tout citoyen qui en faisait la demande écrite d’accéder aux archives d’agences fédérales. Mais les multiples réécritures de ce texte 5 illustraient déjà les difficultés des l’administration à réellement s’ouvrir. Plus récemment, Vivek Kundra, ancien CTO de Washington D.C. recruté par Obama pour assurer le même rôle au niveau fédéral, s’est appuyé sur le Funding Accountability and Transparency Act (FATA), promulgué en 2006, pour que les agences fédérales fournissent les données de dépenses publiques aux sites usaspending.gov et recovery.gov. Néanmoins, il s’avère maintenant nécessaire d’industrialiser le processus de mise à disposition des données et pour cela de l’encadrer avec le DATA Act qui vient d’être promulgué le 18 novembre 20136 . 4 http://apps.usa.gov/fbis-most-wanted/ 5 http://uspolitics.about.com/od/usgovernment/a/foia.htm 6 http://www.datacoalition.org/issues/data-act.html
  • 15. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   14   Figure 6 : le DATA Act doit permettre de suivre chaque dollar dépensé par l’administration Cependant, le débat concernant la priorité donnée à l’ouverture par les Etats-Unis resurgit alors qu’en 2011 le gouvernement fédéral dépense quatre fois plus à sécuriser ses données qu’à les ouvrir : le budget fédéral dédié à la sécurité informatique est de 4,2 milliards de dollars tandis que celui dédié au partage d'information n’est que de 0,9 milliards. Déjà en 2009, la journaliste Maura Reynolds avait critiqué la stratégie d’ouverture d’Obama en déclarant 7 (Reynolds, 2009) qu’ « en pratique, les agissements du nouveau président sur la confidentialité et la transparence se sont révélés ambigus, son administration semblant faire autant de pas vers la protection de l’information gouvernementale que vers une exposition au grand jour.» Cependant, cette asymétrie ironique semble se produire dans la plupart des pays ayant des stratégies gouvernementales d’Open Data. Rentrons dans le détail des moteurs de l’implémentation de la politique d’Open Data. Les Etats-Unis font partie des pays précurseurs en matière d’Open Data et entendent de ce fait continuer à faire la course en tête. Le discours volontariste d’Obama illustre et appuie ce propos. En parallèle, des initiatives locales comme Apps for Democracy8 à Washington D.C. ont favorisé la prise de conscience nationale du potentiel de l’Open Data. Vivek Kundra déclarait « Apps for Democracy a permis plus d’économies pour Washington D.C. qu’aucune autre initiative. » Bien entendu, les innovations et initiatives citoyennes provenant de la mise à disposition de données publiques encouragent le gouvernement à poursuivre dans cette voie. Ainsi, la Sunlight Foundation (sunlightfoundation.com), fondée en 2006, a produit à ce jour 1189 API (Application Programming Interface) facilitant l’appropriation et l’utilisation des données publiques. 7 Reynolds, M. (2009). Open government or ‘Transparency Theater? Msnbc, July 24, 2009, http://www.msnbc.msn.com/id/32128642/ns/politics-cq_politics/. 8 www.appsfordemocracy.org
  • 16. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   15   Afin d’évaluer la politique d’Open Data, le Département du Budget a appelé le gouvernement à évaluer sa politique d’ouverture. Cette auto-évaluation9 (White House, 2005) contient trente critères, lesquels sont basés sur la déclaration du président Obama. Bien que cette auto-évaluation aborde le processus de déploiement, la complétude et mise en œuvre des plans d’ouverture, elle n’aborde pas les impacts en cas de défaut de conformité. 1.2. EN GRANDE-BRETAGNE Différents pays dont le Royaume Uni se sont inspirés de la déclaration d’Obama sur l’ouverture et ont suivi les Etats-Unis en émettant des déclarations similaires. En décembre 2009, le gouvernement britannique publia le rapport « Putting the Frontline First : Smarter Government » dans lequel il est argumenté que le gouvernement doit s’ouvrir et promouvoir la transparence 10 (Chief Secretary to the Tresury, 2009). La stratégie du gouvernement britannique met l’emphase sur l’engagement des citoyens et de la société civile. « En fin de compte, un citoyen plus informé est un citoyen qui a plus de pouvoir. Dans une démocratie moderne, les citoyens attendent de droit de savoir comment le gouvernement a dépensé leur argent et quel en a été le résultat. […] Les données peuvent aussi être utilisées de manière innovante en apportant des bénéfices économiques aux citoyens et aux entreprises à travers un entrepreneuriat inexploité. » Des entreprises seront en mesure de développer une activité au travers de services numériques et de contenus basés sur des données publiques, et les citoyens pourront transformer leurs idées et leur créativité en solution concrète aux problèmes quotidiens. Une étude de l’Université de Cambridge a mis en lumière que la croissance de l’économie britannique liée à la mise à disposition gratuite d’une partie des données du secteur publique qui sont actuellement vendues pourrait être de £160 millions la première année seulement 11 (Newbery et al, 2008). Comme aux Etats-Unis, la mise en ligne de données publiques est un moyen d’informer les citoyens sur leur sécurité. La ville de Londres publie ainsi une carte détaillant l’activité criminelle sur son site WEB12 . 9 http://www.whitehouse.gov/open/around/eop/omb/self-evaluation 10 Centre for Technology Policy Research. Chief Secretary to the Treasury (2009). Putting the Frontline First: Smarter Government, London: HMGovernment. 11 Newbery, B. Bently, L. & Pollock, R. (2008). Models of Public Sector Information Provision via Trading Funds, London: BERR and HM Treasury 12 http://maps.met.police.uk.
  • 17. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   16   Figure 7 : répartition des crimes commis dans Londres et sa banlieue De même qu’aux Etats-Unis, le portail institutionnel central data.gov.uk regroupe les différents instruments permettant la mise en œuvre de la stratégie d’Open Data. Il est actuellement en refonte. Néanmoins, la partie liée à la mise à disposition des données (10462 au 27/10/13) et la partie communautaire sont particulièrement mises en avant. Légalement, la mise à disposition des données s’appuie sur le Freedom of Information Act 2000. Il permet aux citoyens britanniques d’accéder aux informations détenues par les autorités publiques. Environ 120 000 requêtes sont formulées chaque année, dont 60% à titre privée, les autres demandes étant le fait de journalistes ou d’entreprises. Nous pouvons remarquer que la stratégie d’Open Data du Royaume-Uni s’inspire beaucoup de celle des Etats-Unis. En effet, l’un des principaux moteurs pour les politiques d’Open Data provient des initiatives que les pays copient les uns sur les autres. Le concours britannique « Show us a better way » est en effet à l’origine du concours australien « MashUp Australia » (mashupaustralia.org) 13 (Athur C, 2008). Ces concours ont été lancés afin de favoriser la création d’applications par le grand public à partir de données gouvernementales rendues publiques. Bien que Gordon Brown se soit inspiré de Barack Obama, des organismes extra-gouvernementaux ont aussi contribué à l’ouverture des données publiques. Le journal The Gardian a ainsi lancé la campagne « Free our data » dans laquelle il était demandé aux citoyens de réclamer l’accès aux données gouvernementales 14 (Arthur & Cross, 2006). L’Open Knowledge Foundation (okfn.org), 13 Arthur, C. (2008). Are the Show Us A Better Way winners safe from Ordnance Survey? November 12, 2008, http://www.guardian.co.uk/technology/blog/2008/nov/12/ordnance-survey-google-maps-copyright 14 Arthur, C. & Cross, M. (2006). Give us back our crown jewels. Guardian, March 9, 2006, http://www.guardian.co.uk/technology/2006/mar/09/education.epublic
  • 18. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   17   organisation à but non lucratif, a été fondée en 2004 au Royaume-Uni mais son action est maintenant internationale. Elle donne l’accès à treize millions de dépenses gouvernementales à travers le monde. Avec les Etats-Unis, le Royaume-Uni est le seul pays à avoir évalué sa politique d’Open Data. Dans son rapport « Open Government – some next steps for the UK » le Center for Technology Policy Research (2010) décrit la politique d’Open Data du gouvernement britannique et donne les orientations pour de futures politiques. Bien que ce rapport donne des détails sur les instruments utilisés par le gouvernement pour mettre en œuvre sa stratégie d’ouverture, il n’en aborde pas les impacts économiques et sociaux. 1.3. EN INDE 1.3.1. CONTEXTE ET ENJEUX La République de l’Inde est une République fédérale avec vingt huit Etats membres de l’Union ainsi que sept territoires de l’Union. La Constitution indienne répartit les différentes compétences entre le gouvernement de l’Union et les Etats de l’Union. Cette autonomie dans la gestion et le développement économique de l’Etat de l’Union a conduit à un développement disparate des différents Etats de l’Union. Le développement de l’e-administration s’est produit à la fois de manière volontaire et spontanée dans certains Etats de l’Union (Kerala, Tamil Nadu) et par une politique nationale de modernisation par le gouvernement de l’Union, avec l’introduction du Plan Nationale de l’e- Gouvernance, afin de permettre une harmonisation et une convergence de l’e-administration indienne. Le développement de l’e-administration a conduit à la reconnaissance de la signature électronique et des documents électroniques avec l’Information Technology Act en 2000, au développement des machines électroniques de vote dès 2002, à l’instauration de téléservices et de e- mobile services, jusqu’à la création d’UID (Unique Identification- Identifiant Unique), permettant d’attribuer à chaque citoyen indien une carte d’identifiant unique contenant de nombreuses informations personnelles (projet Aadhaar réalisé par Safran, développeur des cartes biométriques en Inde). Grâce à l’exploitation des données numériques, l’Inde a su moderniser son administration. Pour Kapil Sibal, ministre de la communication et des technologies de l’information, l’enjeu est immense pour le pays : « Le gouvernement n’est pas l’unique propriétaire des données. Toutes les données doivent être partagées sauf celles qui sont importantes pour la sécurité. Il y a également une responsabilité du côté de ceux qui utilisent et interprètent les données. Ils doivent comprendre qu’il y a un enjeu de développement ». La société civile en elle-même ne peut réellement en profiter directement, de part la fracture numérique et l'incapacité d'appréhender ces données brutes. Il s'agit avant tout pour le moment d'une opportunité considérable pour les entrepreneurs indiens de réaliser des d'applications facilitant la vie quotidienne des indiens, à titre d'exemple des applications relatives aux rations alimentaires en ville, etc.
  • 19. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   18   1.3.2. LE CADRE JURIDIQUE EN INDE Le cadre juridique en Inde a évolué de façon régulière. Plusieurs lois ont été mises en place de façon progressive, y compris pour donner droit aux individus à l’accès aux données de l’administration, comme stipulé dans la loi « Right to information » en 2005 qui permet aux citoyens d’obtenir une réponse de l’administration sous un délai de 30 jours. En 2006, la loi « e-governance » a vu le jour légiférant sur la proximité entre les services de l’Etat et les citoyens. Dans le projet de modernisation de l’administration, le département des technologies de l’information a préparé un projet de loi significatif, The electronic service delivery bill, 201115 dont l’objet est d’assurer que les prestations des services publics soient réalisées via le mode électronique pour améliorer la transparence, l’efficacité, l’accessibilité et la fiabilité dans la livraison des services de l’Etat. Ce projet de loi veut instaurer l’obligation pour les services publics de faire usage du courrier électronique, lorsqu’il lui est écrit via cette forme. Il indique également que tous les services publics doivent être délivrés en mode électronique dans les 5 années à compter de l’entrée en vigueur de ce projet de loi. Pour le moment, ce projet n’a toujours pas été voté, mais les services du département se sont engagés à faire passer ce projet de loi, ce qui facilitera la consécration de l’e- administration dans sa globalité, de son instauration dans l’administration indienne à la livraison de la prestation au citoyen. A l’image de ce qui a été fait en France (circulaire, directive européenne), en lien avec l’ouverture des données publiques, l’Inde a publié via le ministère des sciences et de la technologie du Gouvernement le National Data Sharing and Accessibility Policy (NDSAP), le 17 mars 2012. L'un de ces objectifs est de réaliser une transmission verticale des informations non sensibles collectées par l'administration indienne. 1.3.3. L’ADMNISTRATION INDIENNE : CULTURE ET ORGANISATION 1.3.3.1. UN PEU D’HISTOIRE L'administration indienne est un « monstre colossal» qui permet de relier le simple village aux autorités administratives centrales de New Delhi. Cette énorme structure fait aussi les frais d'une fracture administrative, en effet les simples villageois se perdent facilement lors de recherche d'interlocuteurs compétents pour leurs questions administratives que ce soit en matière foncière (agrément sur les terres cultivables, autorisation…), en matière civile (acte de mariage, passeport…). Figure 8 : vue d’un bureau de l’administration indienne 15 Source : http://mit.gov.in/content/draft-electronic-delivery-services-bill-2011
  • 20. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   19   1.3.3.2. VERS LA MODERNISATION L'arrivée des nouvelles technologies de l’information et de la communication a été une réelle opportunité pour administration indienne obsolète. L'instauration du « National e-Governance Plan », à partir de 2008 est la clé de la mutation de l'administration indienne vers l'e-administration. Le « National e-Governance Plan » a été approuvé par le gouvernement de l’Union le 18 mai 2006 à l’initiative du département de la technologie d’information, du département de la réforme de l’administration et sous la pression des griefs publics. Figure 9 : bureau de vote informatisé en Inde Ce plan16 a pour objectif d’améliorer les services administratifs aux citoyens et aux entreprises : « Make all government services accessible to the common man in his locality, through common service delibery outlets and ensure efficiency, transparency and reliability of such services at affordable costs to realise the basic needs of the common man. » Le plan fédéral se compose de 27 missions en mode projet et de 8 missions relatives au support. Chaque projet consiste à faire évoluer un service administratif sous l’ère de l’e- administration, il s’agit du passage des services administratifs aux télé-services. Afin de faciliter l’implémentation, le National e-Governance Plan impose quelques points fondamentaux à la modernisation de l’administration indienne17 . • les structures de support communes • l’initiative centralisée pour une mise en œuvre décentralisée • le partenariat public-privé • la gestion directe par les ministères 16 http://negp.gov.in 17 11th Report – Promoting e-Governance, Second Administraive Reforms Commission, GoI, Décembre 2008
  • 21. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   20   1.3.4. ILLUSTRATION DU MODELE INDIEN 1.3.4.1. LE PORTAIL L’Inde a lancé son portail Open Data le 8 août 201318 . Plusieurs secteurs y sont représentés comme la santé, le transport, le sanitaire, l’agriculture. L’ouverture de la plateforme fait suite aux différentes initiatives prises par le gouvernement pour stimuler l’utilisation des données publiques dans le pays. Au début de l’année 2013, l’Inde avait ainsi lancé son premier hacktaton (48h pour imaginer des applications mobiles innovantes). Et pour inciter les développeurs à se saisir des données du portail, le gouvernement organise des challenges avec des récompenses à l’image de dataconnexion en France. Le site compte 4 678 ensembles de données représentant 53 ministères et départements et 7 applications représentant 5 départements. Le portail data.gov.in est structuré, animé et très riche en informations comparé à celui d’Etalab. On y trouve à la fois des tableurs Excel avec des statistiques d’audience et l’évaluation par les visiteurs, des applications développées grâce à l’ouverture des données, des représentations graphique, des tableaux de bords… Figure 10 : exemple de vue du portail indien 1.3.4.2. LES COULISSES La caractéristique du projet indien est d’être orchestré et porté par le savoir faire indien en IT. Ce paragraphe illustre la capacité de l’Inde à développer des infrastructures adaptées permettant de fournir l’ensemble des téléservices, avec une approche centralisée à l’échelle nationale. Le renouveau des services de l’administration nécessite la transformation des infrastructures de l’Etat, au niveau fédéral et pour les différents Etats de l’Union. Le National e-Governance Plan a mené une politique de transformation et de création harmonisée des infrastructures électroniques. A commencer par l’instauration des trois pivots du National e-Governance Plan, à savoir les centres de données Etatiques, la création du réseau étendu indien (SWAN) et la création de centre commun de services. 18 data.gov.in
  • 22. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   21   Figure 11 : portail du National Service Delivery Gateway - Les centres de données Etatiques ou State Data Centers sont la colonne vertébrale du projet de modernisation et regroupent l’ensemble des données qui seront partagées par la suite. A noter tout de même la résistance de certains Etats qui ne souhaitent pas transférer les données locales, d’où l’apparition de centres de données construits et maintenus uniquement par les instances de l’Etat de l’Union. A noter que le gouvernement de l’Union a alloué un budget de 19 millions d’euros sur une période de 5 années19 . - Le State Wide Area Network (SWAN) correspond au réseau créé pour relier l’ensemble des infrastructures électroniques. 19 National e-Governance Plan, meeting of the National e-Governance Advisory Group, DIT, GoI, 12/11/2010
  • 23. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   22   - Le National Service Delivery Gateway (NSDG) a pour objectif de fournir des services gouvernementaux standardisés avec un développement d’infrastructures à moindre coût. Parmi les objectifs établis par le National e-Governance Plan, il y a l’objectif de mettre en place des standards d’interopérabilité entre les différents téléservices mis en œuvre à la fois par l’Union et les Etats de l’Union, le NSDG doit agir comme un catalyseur en permettant la construction de normes standards … 1.3.4.3. ET POURTANT, L’INDE EST DECONNECTEE… Comment un pays avec une fracture numérique aussi importante peut réussir à franchir le pas et mettre en ligne un portail plus puissant que la France ? On ne compte à fin 2012 que 12,6% d’utilisateurs internet en Inde sur une population de 1,2 milliards d’habitants20 et 68,84% de la population indienne vit en zone rural. La moyenne nationale d’accès en zone rurale s’établissant pour 2009-2010 à 0,35% des foyers. Illustration de la fracture numérique (image ci-contre) : en rouge les Etats dont le taux d’accès en zone rurale est inférieur à dix pour mille foyer (soit inférieur à 1%), en jaune ceux dont l’accès est supérieur à 1% mais inférieur à 5% et en vert ceux dont l’accès est supérieur à 5% de la population. Figure 11 : carte de couverture des accès à internet Sur les 35 Etats et districts de la fédération indienne, seuls six dépassent la zone rouge, pour une population totale de 44,5 millions d’Indiens. Les 29 autres comptent pour 1,165 milliards d’habitants. Comment connecter les citoyens à un Open Data avec un tel constat ? Si l’Inde accuse un énorme retard pour Internet, sur la téléphonie mobile, la situation est complètement différente et le taux de pénétration à fin 2012 est de près de 70%21 . La démocratisation du mobile en milieu rural et urbain a permis à l'administration indienne de se 20 Source INSEE 21 Source INSEE
  • 24. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   23   rapprocher plus rapidement de ses citoyens. Pour les milieux plus pauvres, l'administration indienne a développé des services publics "common services centers", des points de connexion Internet public, permettant d'accéder aux nouveaux téléservices et à Internet (avec des fonctionnaires compétents et pédagogues pour former les citoyens à l'usage de l'ordinateur). Peut-être l’Etat indien devrait-il créer le premier portail mobile Open Data dédié aux smartphones ?
  • 25. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   24   1.4. L’OPEN DATA PANAFRICAIN 1.4.1. GENESE Sous l’égide des Nations Unies, en septembre 2000, 147 chefs d'État et de gouvernement et 189 pays se sont engagés dans la Déclaration du Millénaire définissant 8 domaines (infographie ci- contre). L’objectif n°8, « Mettre en place un partenariat mondial pour le développement », s’est traduit en Afrique par la mise en œuvre d’un grand projet sur les « autoroutes de l’information ». A cette occasion, les banques multilatérales de développement se sont entendues pour poursuivre ces objectifs communs. C’est notamment le cas de la Banque Africaine de Développement (BAD), créée en 1963 par 23 pays africains indépendants, et qui est devenue au fil des ans la première institution financière de développement en Afrique. Le rapport annuel 201222 de la banque précise : « La Banque a la volonté et les ressources nécessaires pour devenir la première source d’informations et d’analyses sur les économies africaines ». En l’absence d’Instituts Nationaux de la statistiques dignes de ce nom, la BAD joue donc un rôle similaire à celui de l’INSEE en France, et a donc un rôle important pour le pilotage du développement des pays avec des taux de croissance élevés. Figure 12 : les objectifs de la déclaration du Millénaire La banque, qui propose déjà un portail très riche sur ses propres données statistiques, a donc financé et fédéré le portail Open Data de l’Afrique 23 22 http://www.afdb.org/fileadmin/uploads/afdb/Documents/Publications/Rapport%20annuel%202012.pdf 23 http://www.afdb.org/fr/knowledge/statistics/data-portal/
  • 26. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   25   Cette plateforme de données en ligne fait donc partie de l’initiative ‘Autoroute africaine de l’information’ pour intensifier la collecte, la gestion, l’analyse et le partage de statistiques de qualité sur le développement du continent. Remarque importante :il existe d’autres banques de données internationales avec des informations sur l’Afrique, mais la démarche est privée dans ce cas. Exemple de l’Open Data de la banque mondiale sur l’Afrique du Sud24 : Figure 13 : vue du portail Open Data de la Banque Mondiale 1.4.2. L’OPEN DATA DE LA BANQUE AFRICAINE DU DEVELOPPEMENT Essentiellement orientée pour livrer des statistiques relatives aux réalités économiques et sociales, l’initiative a pour ambition d’établir des liens directs entre la BAD, les bureaux nationaux de statistiques, les banques centrales et les ministères de tutelle dans les pays africains. Elle vise aussi à établir des liens entre les organisations sous-régionales, les organisations internationales de développement et une communauté mondiale d’usagers . Figure 14 : le logo de L’Open Data for Africa 24 http://data.worldbank.org/country/south-africa
  • 27. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   26   La banque estime que : « Les données fiables demeurent essentielles pour fixer les objectifs et les cibles, ainsi que l’évaluation de l’impact des projets. »25 . La BAD a ainsi déposé le nom de domaine http://opendataforafrica.org le 1er décembre 201126 . La plateforme facilite également la collecte, l’analyse et le partage des informations sur des sujets de développement nouveaux et cruciaux tels que la sécurité, l’égalité de genre et le changement climatique. La figure ci-dessous montre les thèmes principaux des jeux de données que l’on peut y trouver, au niveau le plus élevé, c’est à dire « global Afrique ». Figure 15 : principales catégories de jeux de données disponibles sur le portail global Open Data Africa. 1.4.3. LE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE ET LA LUTTE CONTRE LA CORRUPTION Comme le précise l’onglet « About » du site Open Data for Africa27 , la mission du portail est de fournir des statistiques pour apporter une base cohérente, pour la conception et le pilotage des 25 http://www.afdb.org/fr/knowledge/statistics/about-us/ 26 cf l’interrogation de la base des noms de domaine internet (requête http://www.dynadot.com/domain/whois.html?domain=opendataforafrica.org) 27 http://opendataforafrica.org/about/us Nombre de jeux de données par catégories (>3)
  • 28. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   27   politiques pour la lutte contre la pauvreté sur le continent africain. Un des objectifs de cette plate-forme est aussi de lutter contre la corruption comme le précise M. Mohamadou Diallo, membre de l’Observatoire sur les Systèmes d’Information, les Réseaux et les Inforoutes au Sénégal28 : « …Ce qui reviendrait alors à publier des données, naguère réservées à l’usage interne des organisations notamment sur les budgets des organismes de l’Etat ou l’attribution des marchés publics. Une transparence totale en vue de lutter contre toute forme de corruption ou autre dérive pouvant mener à une quelconque dictature. » 1.4.4. EXEMPLE DE L’AFRIQUE DU SUD Le portail Open Data for Africa permet d’aller ensuite vers les portails des pays, avec une déclinaison par pays. Ci-dessous une vue d’écran du portail de l’Afrique du Sud : Figure 16 : vue du portail Open Data Africain : accès aux sites des pays 28 http://www.osiris.sn/Open-data-un-gisement-d.html
  • 29. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   28   Figure 17 : vue du portail Open Data de l’Afrique du Sud : http://southafrica.opendataforafrica.org On remarque que les états mais aussi les collectivités locales (villes , régions) bénéficient ainsi d’un portail d’accès à leur données (exemple dans la première ligne: Cape Town) pour adresser avec une granularité plus fine une plus grande diversité de sujets. L’influence supranationale de la BAD s’exerce donc sur la fourniture d’un espace de stockage, d’une interface de présentation et d’indexation des données. Remarque sur la qualité des données : une analyse rapide du site montre par exemple sur la ville de Johannesbourg, la complétude des données est imparfaite : les données après 2009 ne sont pas présentes. Figure 18 : extrait du portail de la ville de Johannesburg
  • 30. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   29   1.4.5. LA PROTECTION DES DONNEES PERSONNELLES EN AFRIQUE DU SUD : UN FREIN POUR L’OPEN DATA ? A ce jour, le texte en vigueur en Afrique du Sud est appelé POPI (Protection of Personal Information) et date de 200629 et n’adresse pas les enjeux de protection des données personnelles avec les usages existants (par exemple, les emailing de campagnes marketing) et les technologies émergentes comme le Cloud et l’Open Data. Le nouveau texte en vigueur, approuvé par le parlement Sud-Africain, est en cours de signature par le Président, et certains juristes locaux évoquent le fait que les évolutions sont de nature à impacter l’économie numérique, de part l’élargissement du périmètre et la nature des sanctions en cas de non respect de la loi. Le nouveau texte30 vise surtout à renforcer la protection des données personnelles en instaurant des sanctions importantes en cas de « negligent disclosure of personal information ». Le périmètre de la définition d’une donnée personnelle y est défini (chapitre 1, ligne 55). Le texte31 durcit également les conditions autorisées de capture, stockage et de sécurisation des données. Les données figurant à ce jour sur l’Open Data sud-africain sont essentiellement statistiques et ne sont donc pas concernées par l’évolution de la loi. Par contre, le terme « anonymization est absent, ce qui tend à prouver que ce texte est bien une mise à niveau pour répondre aux exigences de respect de la vie privée dans les usages déjà répandus (campagnes marketing, stockage et manipulation de données clients), mais ne prend pas encore les problématiques inhérentes à l’Open Data. 1.5.CONCLUSION SUR L’OPEN DATA DANS LES PAYS ETRANGERS ETUDIES Dans un nombre croissant de pays, suivant l’exemple des organisations internationales telle que l’ONU qui a ouvert son site Web en 2008, l’Open Data se retrouve dans l’agenda politique et administratif. Mais alors que des gouvernements nationaux ou régionaux ont défini des stratégies d’Open Data, certains services administratifs sont encore réticents à les mettre en œuvre. Les barrières importantes à leur déploiement effectif sont d’une part la culture du secret à l’intérieur des administrations, causée par la peur de rendre publique des dysfonctionnements ou des actes de corruption, ou d’autre part l’utilisation politique qui peut en être fait. Parfois même, ce sont des « abus de biens sociaux" des élus qui ont réveillé les consciences et servi de catalyseur pour aboutir in fine à une grande transparence sur le fonctionnement de l’Etat, comme en témoigne la diffusion intégrale sur internet de l’historique des notes de frais des députés britanniques32 . 29 http://www.justice.gov.za/legislation/bills/B9-2009_ProtectionofPersonalInformation.pdf, MINISTER OF JUSTICE AND CONSTITUTIONAL DEVELOPMENT, Août 2009 30 https://www.saica.co.za/Portals/0/Technical/LegalAndGovernance/POPI%20final.pdf, MINISTER OF JUSTICE AND CONSTITUTIONAL DEVELOPMENT, 2009 31 http://www.humanipo.com/news/34240/popi-set-to-cause-complications-for-data-management/, Ayanda Dlamini. Octobre 2013 32 http://tempsreel.nouvelobs.com/monde/20090522.OBS7705/chronologie-du-scandale-des-notes-de-frais-des-deputes-britanniques.html, le nouvel Observateur, 2009
  • 31. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   30   Un autre point soulevé est le manque de compréhension de l’impact précis de ces stratégies, ce qui rend les administrations hésitantes à être proactives. Les stratégies d’ouverture sont à l’heure actuelle très orientées sur le renforcement de la participation démocratique et l’amélioration de la protection publique. Les instruments d’ouverture sont quant à eux principalement basés sur le volontariat et les aspects techniques et légaux, alors que la partie éducative reste à développer. On note enfin que plusieurs pays ont promulgué des textes pour donner une impulsion au déploiement de l’Open Data.
  • 32. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   31   2. LA POLITIQUE EUROPEENNE SUR L’OPEN DATA L’Europe a décidé de s’impliquer sur la question de l’Open Data via l’édition de normes juridiques et la mise en place de programmes d’encouragement autour de la recherche et du développement d’une part, et la mise en place d’un portail européen de l’Open Data d’autre part. 2.1. LA MISE EN PLACE D’UN CADRE JURIDIQUE : LA DIRECTIVE 2003/98/CE La législation, comme la fiscalité d’ailleurs, constituent un levier puissant de l’influence gouvernementale et une place importante y est consacrée dans ce rapport. Le cadre juridique européen autour de l’Open Data s’est déroulé en deux temps, une première directive en 2003 modifiée par la directive de 2013. La première intervention de l’Europe dans le domaine de l’Open Data a lieu avec l’adoption de la directive n°2003/98/CE du Parlement Européen et du Conseil du 17 novembre 2003 concernant la réutilisation des informations du secteur public. Les instances européennes partent du constat suivant : « les informations émanant du secteur public constituent une matière première importante pour les produits et les services de contenu numérique et deviendront une ressource de plus en plus importante sur le plan du contenu à mesure que les services de contenu sans fil se développeront ». Saisissant ainsi son rôle d’harmonisateur des normes dans l’Union Européenne, le Parlement Européen édicte donc une directive en 2003 visant à fixer un cadre général autour de la réutilisation des informations du secteur public afin d’éviter les importantes divergences entre les Etats membres en matière d’exploitation de ces informations. Et ceci dans le but de « permettre aux entreprises européennes d’exploiter le potentiel de ces informations et de contribuer à la croissance économique et à la création d’emplois ». Malgré cette bonne volonté clairement exprimée, et une juste prise en compte des enjeux économiques autour de l’Open Data, la portée de cette directive restera limitée. Ceci est, tout d’abord, lié à la nature même de la directive, qui contrairement au règlement européen ne s’applique pas directement en droit interne et laisse donc aux Etats la liberté de transposer les grands principes dans leur droit interne. L’édiction d’un règlement aurait peut-être montré une volonté d’harmonisation plus forte de l’Europe et l’aurait poussée à entrer plus dans le détail des modalités de l’harmonisation. Au final, cette directive reste un texte assez flou et très peu contraignant. La directive a cependant le mérite de proposer une définition de la donnée publique susceptible d’englober toute représentation d’actes, de faits ou d’informations – ainsi que leur compilation quel que soit leur support (écrit sur papier ou stocké sous forme électronique ou enregistrement sonore, visuel ou audiovisuel), détenus par un organisme public.
  • 33. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   32   En revanche, en ne prenant pas clairement partie sur un principe de gratuité de la mise à disposition des données publiques, elle vient entretenir une ambiguïté sur la question de la tarification : article 6 : « lorsque les redevances sont prélevées, le total des recettes provenant de la fourniture et des autorisations de réutilisation de ces documents ne dépasse pas le coût de collecte, de production, de reproduction et de diffusion » en ajoutant « tout en permettant un retour sur investissement raisonnable ». 2.2. LES APPORTS DE LA DIRECTIVE 13/06/2013 En décembre 2011, la Commission Européenne propose une recommandation riche autour de l’ouverture des données publiques, qui ne sera que partiellement reprise par la directive du 13 juin 2013. La recommandation de la Commission Européenne Le 12 décembre 2011, la Commission publie une recommandation nommée « L’ouverture des données publiques : un moteur pour l’innovation, la croissance et une gouvernance transparente ». La commission commence par traduire la démarche d’ouverture des données publiques en potentiel économique, en citant quelques exemples : • 2007, le marché allemand des informations géographiques représente 1,4 milliards d’euros (soit une croissance de 50% depuis 2000) • 2008, 15000 postes dédiés au même sujet dans les Pays-Bas • 2008, une étude estime le marché total de l’information du secteur public dans l’Union Européenne à 28 milliards d’euros • Cette même étude prétend que les avantages globaux liés à une plus grande ouverture des informations du secteur public représenteraient 40 milliards d’euros • Enfin pour l’ensemble des 27 pays membres de l’Union Européenne, le total des gains économiques directs et indirects découlant de l’utilisation des informations du secteur public et applications fondées sur ces données serait de l’ordre de 140 milliards d’euros par an. Bien que l’on puisse reprocher à la Commission de ne pas trop faire la part des choses dans ce bilan économique, entre le chiffre d’affaires qui proviendrait d’économie de gestion dans les administrations et celui qui proviendrait de réelles innovations (cf. Interview OpenDataSoft), son constat a le mérite de forcer la prise de conscience de l’enjeu stratégique que représente l’ouverture des données publiques. La commission pointe du doigt ce qu’elle juge être des obstacles persistants dans l’ouverture de ces données publiques : • cadre juridique : disparités considérables entre les pays membres (surtout dans les système de tarification entre récupération des coûts et gratuité),
  • 34. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   33   • manque de sensibilisation des organismes du secteur public et des entreprises, • obstacles pratiques et techniques (barrière linguistique, questions d’interopérabilité). Une traduction à minima de ces recommandations dans la directive du 13 juin 2013 Dans ce contexte, on aurait pu s’attendre à ce que la modification de la directive de 2003 soit plus contraignant et permette ainsi d’arriver enfin aux harmonisations attendues entre pays membres. On note cependant quelques avancées : Par rapport à l’ancienne version de la directive de 2003, le texte affirme un véritable droit à la réutilisation du secteur public. L’ancienne version définissait les champs d’informations où la réutilisation était autorisée ; la nouvelle fait l’inverse, et exige que tout document entrant dans le champ d’application doit être réutilisable pour des usages commerciaux et non commerciaux. Ce texte vient aussi apporter une obligation de transparence dans le calcul des redevances. Toute personne le demandant doit pouvoir avoir accès au mode de calcul utilisé pour l’établissement de la redevance. Ceci est perçu comme une excellente nouvelle pour Pierre Chrzanowski (groupe de l’Open Knowledge Foundation) : « Cette exigence de rendre les modes de tarifications complètement transparents en amont, c’est-à-dire avant même qu’une demande de réutilisation soit soumise, pourrait avoir des conséquences intéressantes. Il est peu probable que les organismes publics iront jusqu’à calculer des coûts marginaux pour tous les jeux de données qu’ils possèdent; cela signifie que les données ne pourront pas être soumises à tarification, puisqu’aucun mode de calcul n’aurait alors été défini, justifié et publié en amont. C’est un très bon outil pour empêcher les administrations de pratiquer des tarifications de données injustifiées. » La directive élargit son champ d’application aux musées, bibliothèques et archives. Cependant, cette extension est assortie d’un nombre important d’exceptions et de règles qui viennent pour beaucoup enlever l’intérêt de cette dernière. Par exemple, concernant les voies de recours, en cas de décision négative, le texte prévoit que « les organismes du secteur public communiquent au demandeur les raisons du refus ; les bibliothèques, y compris les bibliothèques universitaires, les musées et les archives ne sont pas tenus d’indiquer cette mention ». Autre déception du texte, bien que la directive précise que les données du secteur doivent être mise à disposition dans des formats ouverts lisibles par machine, elle n’impose aucun format. Pour finir, la directive réaffirme, dans son article 6, le principe d’un coût marginal : « Lorsque la réutilisation de documents est soumise à des redevances, lesdites redevances sont limitées aux coûts marginaux de reproduction, de mise à disposition et de diffusion. » Mais la présence de nombreuses exceptions comme les bibliothèques, musées et archives fait perdre beaucoup d’intérêt à ce principe.
  • 35. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   34   2.3. LA MISE EN PLACE DE PROGRAMME DE R&D&I La commission européenne fait état d’un budget d’environ 100 millions d’euros dédiés à la recherche, le développement et l’innovation. Dans les faits, cela profite peu aux acteurs économiques du marché français, la démarche de demande de subventions est lourde et longue, alors que le marché demande une forte réactivité « le temps de procéder à la demande de subvention, on est déjà passé à autre chose tellement cela évolue vite » Cf. interview OpenDataSoft. On note cependant différents projets en cours pour favoriser la R&D&I : -­‐ Linked Open Data (exploitation du web pour l’intégration des données et des informations et sur l’utilisation des technologies sémantiques) -­‐ OpenAIRE (créer une infrastructure participative pour l’initiative pilote de l’UE dans le domaine) -­‐ ISA sur l’interopérabilité sémantique (faire de l’utilisation des métadonnées publiques ouvertes une première étape vers l’alignement des métadonnées) On a cependant du mal à voir une réelle concrétisation de ces encouragements en R&D. 2.4. LE PORTAIL EUROPEEN DE L’OPEN DATA Un des objectifs de la Commission Européenne est de mettre en place un portail des données de l’Union Européenne. Le portail http://open-data.europa.eu propose un accès gratuit et centralisé aux données produites par les institutions et organes de l’Union Européennes. A ce jour, on comptabilise 6323 jeux de données publiées sur ce site. Ce nombre peut paraître très faible comparé au 353 226 jeux de données présentes sur le site http://data.gouv.fr. Le problème réside dans le fait que la commission n’a que peu de pouvoir pour mener à bien ce projet. En effet, on peut lire dans une communication sur l'ouverture des données publiée par l'exécutif européen : « La Commission invite le Parlement Européen et le Conseil, dans le cadre de leurs compétences respectives, à créer les conditions-cadres appropriées pour la réutilisation des informations du secteur public dans l'Union Européenne ». 3. LA POLITIQUE AFFICHEE EN FRANCE L’analyse du développement de l’Open Data dans plusieurs pays du monde permet une mise en perspective plus objective du projet en France 3.1. UN BESOIN DE DEMOCRATIE
  • 36. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   35   Henri Verdier, directeur d’Etalab depuis janvier 2013, classe la France parmi « les 5 pays qui en font le plus et le mieux en matière d’Open Data »33 . Toutefois, la France accuse un certain retard notamment sur les Etats-Unis et à la Grande- Bretagne et risque de manquer des opportunités d’envergure à l’heure où le besoin de démocratie se fait pressant et l’efficacité de l’appareil d’Etat est remise en cause. Phénomène historique, la côte de popularité de l’exécutif n’a jamais été aussi faible dans les sondages, preuve en est les résultats du dernier sondage BVA et à son directeur général adjoint d’ajouter « Jamais, en trente-deux ans de mesures, un président n'était tombé en dessous de 30% de bonnes opinions dans une enquête BVA »34 . Figure 19 : évolution de l’abstention Vième République Mais plus singulier encore Marine Le Pen (FN) rattrape le niveau d’opinion favorable du président François Hollande. Du jamais vu sous la Ve République. On assiste à une montée des extrêmes et une radicalisation résultant d’une crise économique, sociale et politique installée depuis maintenant plusieurs années. A cette tendance s’ajoute une abstention grandissante aux élections de représentants au niveau national, régional ou local. Le taux d’abstention atteignait près de 43% aux dernières élections législatives. Les questions politiques semblent de moins en moins intéresser les citoyens. Ce désenchantement est nuancé par une société civile en demande d’action et de participation dans le débat public. Ce mouvement n’est d’ailleurs pas nouveau, le parti socialiste avait initié les conseils de la vie lycéenne lorsque Jack Lang était ministre de l’Education Nationale, concept repris et élargi par Lionel Jospin, avec la loi de démocratie locale qui institue les conseils de quartiers. Plus récemment Ségolène Royal alors en course pour la primaire socialiste, fait de la démocratie participative le socle de son programme. Les citoyens sont mis au cœur du processus démocratique. Ces fondements démocratiques participatifs s’appuient sur un tissu associatif français dense et influent. La France est le pays de l’UE qui compte le plus d’associations35 . Une culture associative forte et une capacité de la part des parties prenantes à prendre la parole dans le débat public sont des spécificités culturelles françaises. Dans ce paysage démocratique contrasté, à la fois teinté de désillusions et d’opportunités, le numérique ouvre une nouvelle voie à l’action citoyenne, l’exemple des 33 Supplément à STRATEGIES n°1729 juin 2013 34 Sondage BVA réalisé par internet les 24 et 25 octobre 2013 35 Source : Deloitte 2013 pour le Ministre des Sports, de la Jeunesse, de l’Education populaire et de la Vie associative
  • 37. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   36   entrepreneurs avec le mouvement des « pigeons » illustre bien ce phénomène. L’administration décide de prendre une disposition fiscale sur la taxation des plus-values de cession. Et à l’interlocuteur interviewé, en charge de l'Open gov à l'UMP, de rappeler que cette décision entraine un mouvement insaisissable par les politiques, ponctuel et totalement spontané grâce notamment aux réseaux sociaux. Forts de ce rassemblement, les « pigeons » font entendre leur voix et le gouvernement est contraint de prendre en compte leurs revendications. Dans la même veine, les auto-entrepreneurs, rassemblés dans le mouvement des « poussins », se servent des mêmes outils numériques pour prendre la parole et dialoguer avec les pouvoirs publics. Le numérique facilite l’expression citoyenne, et crée des ponts entre les administrations et leurs administrés. L’Open Data : une tendance pérenne L’Open Data s’inscrit dans cette tendance pérenne. Preuve en est la nouvelle orientation d’Etalab. La mission interministérielle ne se borne désormais plus qu’à la coordination de l’ouverture des données publiques, elle met l’accent sur la compréhension et la réutilisation des données par le grand public : les citoyens, les associations, les chercheurs, les journalistes… Critiqué en raison de l’opacité des données livrées sur son portail numérique data.gouv.fr, Etalab lance en décembre 2013 une nouvelle version de son site, afin de « mettre l’accent sur l’enrichissement des jeux de données ». Ainsi le portail dans sa nouvelle version proposera 3 000 fichiers de données contrairement à la première mouture qui en dénombrait jusqu’à 350 000. L’objectif est véritablement de livrer un contenu plus qualitatif que quantitatif. Chaque jeu de données sera illustré par des projets concrets réalisés à partir des données ouvertes, pour une meilleure compréhension et une plus grande interactivité entre les producteurs et les réutilisateurs des données ainsi que le grand public. Le premier ministre Jean-Marc Ayrault, à l’occasion du festival du numérique « Futur en Seine », qui s’est tenu le 13 juin 2013, a réaffirmé le soutien et l’engagement du gouvernement dans la politique d’ouverture des données : « Le gouvernement a demandé à toutes ses administrations et à tous les opérateurs publics de jouer le jeu et mettre au service leurs données ». 36 La France prend la mesure de son retard en matière d’ouverture des données et tend à renforcer les moyens d’un Open Data fort et plus systématique. A l’heure où le dialogue avec les citoyens se crispe, l’ouverture des données publiques répond non seulement à un besoin de démocratie participative mais également à une opportunité de modernisation de l’Etat et de ses administrations. Le défi est de taille dans un pays pétri dans la culture de l’opacité bureaucratique, mais le potentiel est plus grand encore. 3.2. UN VECTEUR DE MODERNISATION DE L’ETAT 36 http://www.dailymotion.com/video/x10vcw4_continuer-a-appuyer-de-toutes-nos-forces-le-developpement-du-numerique_news, Jean- Marc AYRAULT, Juin 2013
  • 38. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   37   L’Open Data comme vecteur de transformation de l’administration se joue à deux niveaux : le premier revêt une dimension interne, avec une meilleure efficacité de l’appareil étatique et une meilleure coopération entre les différents organes, et le second est axé sur l’externe et sur la qualité de service fournie et perçue par les citoyens. La volonté de dépoussiérer l’appareil étatique ne date pas d’hier. En 1998, le gouvernement JOSPIN lance la PAGSI, le Programme d’Action Gouvernemental pour la Société de l’Information. L’une des principales missions de ce programme consiste à moderniser les services publics. A cette époque déjà, Internet et les NTIC viennent ébranler les rouages de l’administration. En 2000 Bruno Lasserre, président d’un groupe de travail du commissariat au plan, réfléchissant sur l’apport des technologies à la modernisation de l’Etat, souligne combien les NTIC conduisent à un « accroissement de la productivité, à une accélération de la circulation des informations mais surtout à une redéfinition du rôle de la hiérarchie, à un décloisonnement des services ».37 Figure 20 : sphères de circulation de l’information des décisions Le 30 octobre 2012 le SGMAP, le Secrétariat général pour la modernisation de l’action publique, est placé sous l’autorité du premier ministre avec pour objectif de coordonner, favoriser et soutenir, au niveau interministériel, les travaux conduits par les administrations en vue d’évaluer et de moderniser l’action publique, notamment dans le domaine des systèmes d’information et de communication. Ce secrétariat coordonne également la réutilisation la plus large possible des informations publiques. A travers la DISIC, la Direction Interministérielle des Systèmes d’Information et de Communication de l’Etat, piloté par la SGMAP, il s’agit de constituer un réseau interministériel, pour rationnaliser les coûts et harmoniser les politiques de gestion de réseaux uniques. Un chemin encore long Malgré les efforts déployés, le chemin qui mène à la modernisation des administrations semble encore bien long. Les ministères peinent à partager leurs données. Pour exemple le ministère du logement n’a pas accès aux informations sur les taxes d’habitation détenues par le ministère des finances, mais grâce à l’ouverture des données ce dernier parvient à obtenir les informations recherchées sans passer par Bercy. En ce sens, l’Open Data est un puissant levier d’interconnexion entre les ministères et un vecteur de circulation de l’information qui à terme favorise une plus grande efficacité. L’Open Data tend également à décentraliser les initiatives et le stockage d’informations. Le 37 Internet et Politique, Projet collectif de Sciences Po - 2005 Le grand public Les partenaires professionnels Les partenaires de l'administation L'administratio n elle-même
  • 39. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   38   9 octobre 2013, les collectivités de Rennes, PACA, Gironde, Montpellier, Bordeaux, Saône et Loire créent l’association Open Data France, elle rassemble l’ensemble des collectivités à l’initiative de cette création. Ces dernières s'organisent autour de cette association pour avoir une légitimité vis à vis de l'état et leur objectif est de partager leurs réalisations et pratiques et d’aborder l’éventuelle mutualisation de plates-formes techniques en travaillant sur les formats. Grâce à l’Open Data et à son récent élargissement, les acteurs dans les ministères, les administrations et les collectivités deviennent de véritables parties prenantes actives, dans une logique de co-création et de meilleur partage de l’information. Cette logique tend à fluidifier les processus et permet d’identifier et de prévenir les doublons qui peuvent apparaître dans un système plus opaque. Notre interlocuteur à l’ UMP rappelle que « aux Etats-Unis, en 2009, le président Obama demande la mise en ligne des procédures de mise à jour du parc informatique au niveau fédéral. Suite à cette ouverture des données, le constat est frappant : les redondances administratives coûteraient jusqu’à 3 milliards de dollars». Une meilleure visibilité sur les activités des différents organes de l’appareil étatique permettrait non seulement plus d’efficacité mais des économies considérables. Dans un contexte d’austérité budgétaire l’Open Data semble avoir de quoi séduire. L’opportunité d’améliorer la qualité de service Si l’ouverture des données représente une opportunité d’amélioration de la performance interne de l’Etat, elle représente également un moyen d’améliorer la qualité du service rendu aux citoyens et permet d’afficher une plus grande transparence.38 Tandis que dans la relation classique de l’administration avec ses administrés, le rôle du service publique n’était pas questionnable, avec l’Open Data et la tendance à la plus grand transparence, les services rendus peuvent être améliorés en tenant compte des remontées des citoyens et plus largement de la société civile. En effet l’ouverture des données entraine une utilisation des données et une évaluation par les utilisateurs. Les organisations publiques productrices de données vont de plus en plus devoir tenir compte des retours des administrés, sans quoi elles feraient perdre tout le sens de l’ouverture et de la circulation des données. La transparence permet l’évaluation des politiques publiques et améliore la confiance des citoyens dans leurs administrations. Le schéma de gouvernance change dans un contexte numérique qui valorise les échanges et la coopération. Notre interlocuteur interviewé de l’association nantaise LIBERTIC créée fin 2009 afin de promouvoir l’ouverture des données publiques, précise qu’à l’heure actuelle « ne font foi que les données collectées par les agents en interne » et que sans la prise en compte du retours des utilisateurs sur l’ouverture des données « on risque de passer à coté d’un potentiel d’amélioration ». 38 Colloque de la DILA : intervention de M. Camille DOMANGE, Chef du département des programmes numériques du ministère de la Culture et de la Communication
  • 40. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   39   L’UDI dans son cahier de propositions 39 insiste sur cet aspect : « La gouvernance renouvelée par le citoyen, plus qu'utilisateur de services publics, devient co-acteur de ces services publics. La gouvernance de demain n'est plus uniquement ‘’descendante’’ mais aussi plus ‘’ascendante’’ ». L’Open Data favorise la transparence et la co-création avec les citoyens qui sont de puissants leviers de modernisation de l’action publique, toutefois il faudra veiller à un accompagnement des agents notamment pour désamorcer des craintes liées à un contrôle jugé excessif sur la sphère publique. Le mouvement d’ouverture des données aux résultats prometteurs semble s’inscrire dans la durée, et notre interlocuteur interviewé dans la Collectivité Territoriale de Saône et Loire, de préciser « la France est en train « d’inventer l’Open Data » et il faut compter 10 à 15 ans pour son déploiement ». Figure 21 : dynamique vertueuse de l’Open Data dans la transformation L’obligation de transparence des administrations améliore la confiance des usagers, particulièrement dans un contexte morose à plusieurs égards, teintés parfois de scandales de corruption ou de fraudes aux plus hauts niveaux de l’Etat. Notre interlocuteur interviewé à l’UMP rappelle l’exemple du Québec où des scandales de corruption dans l’attribution de marchés publics ont entrainé un puissant mouvement Open Data40 . Le besoin de retrouver de la confiance entraine la transparence et l’Open Data est l’un des outils favorisés par les pouvoirs publics pour tisser ou retisser un lien parfois rompu avec les citoyens. Sur bien des aspects, l’Open Data, qui malheureusement peine à se généraliser dans les administrations, représente un formidable vecteur de modernisation de l’Etat, tant en fluidifiant les mécaniques internes propres à l’appareil étatique, que dans la relation et l’action publique délivrée aux citoyens. Dans un monde numérique où l’ensemble des informations est davantage accessible, l’Etat et ses administrations ne semblent pas pouvoir rester en retrait de ce mouvement d’ouverture. 3.3. ETAT DES LIEUX DE LA LEGISLATION 39 Source : Rapport « - L'Open Data un levier majeur pour moderniser la démocratie, fabriquer de la croissance durable et augmenter nos recettes fiscales », Alain Dolium, 2013 40 http://www.huffingtonpost.ca/2012/11/18/quebec-corruption-scandal_n_2153602.html, By Benjamin Shingler, The Canadian Press, Novembre 2012 amélioration de la qualité de service rendue et perçue Améliorati on de l'action publique en interne Open Data
  • 41. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   40   Avant la loi « CADA » (liberté d’accès aux documents administratifs) du 17 janvier 1978, l’Administration française est une institution fermée qui refuse de communiquer tous les documents que les administrés peuvent être amenés à lui demander. Cette loi est donc une petite révolution qui vient instaurer un véritable « droit à l’information ». C’est en ce point qu’on peut considérer que la loi CADA a pu être une première étape dans l’édiction du principe d’ouvertures des données publiques. On peut regretter en revanche qu’il ait fallu ensuite attendre l’édiction de la directive européenne de 2003 et sa transcription en droit interne pour qu’une nouvelle avancée ait lieu. On peut noter une timide avancée avec la circulaire du premier ministre du 14 février 1994, elle est considérée comme un coup d’essai, qui avait le mérite d’identifier clairement les questions auxquelles le droit positif se devait d’apporter des solutions propres à concilier les différents intérêts en présence : ceux, commerciaux, des opérateurs privés et ceux des personnes publiques détentrices des données défendant l’immuable principe d’intérêt général. Il faudra donc attendre la directive européenne du 17 novembre 2003 et sa transposition en droit interne par l’ordonnance n°2005-650 du 6 juin 2005 relative à la liberté d’accès aux documents administratifs et à la réutilisation des informations publiques pour que soit finalement ajouté dans la loi du 17 juillet 1978 des dispositions spécifiques portant notamment sur les conditions de réutilisation des « informations publiques ». Cette ordonnance viendra notamment intégrer dans la loi de 1978 un article 10 venant affirmer que les données publiques peuvent être utilisées librement à des fins commerciales, c’est à dire exploitées par des acteurs privés. Cette liberté de réutilisation est totale à condition de ne pas altérer et dénaturer de leur sens les données publiques et de respecter les dispositions législatives concernant les données à caractère personnel. La circulaire du 26 mai 2011, relative à la création du portail unique des informations publiques de l’Etat « data.gouv.fr » par la mission « Etalab », et l’application des dispositions régissant le droit de réutilisation des informations publiques, réaffirment le principe général de la mise à disposition gratuite du plus grand nombre d’information. La soumission à redevance doit rester l’exception et être « dûment justifiée par des circonstances particulières ». Malgré cette affirmation du principe de gratuité, dans la réalité l’application de ce dernier reste l’exception là où la règle consiste à mettre en place quasi systématiquement des redevances (Rapport Trojette, novembre 2013). Pour le rapporteur, l’application de ces redevances constitue des freins qui « risquent de limiter les démarches en faveur de la transparence et la modernisation de l’action publique et de porter atteinte au développement économique ». En ce qui concerne la protection des données personnelles, certains s’élèvent contre l’Open Data, comme Gaëtan Gorce, Sénateur PS, qui s’alarme des « menaces considérables qu’il représente déjà pour le respect de la vie privée », voire « la perspective d’un fichage généralisé à des fins privées », par « recoupement des données brutes [...] voire avec celles (le Big-Data) dont des entreprises sont déjà en possession ».
  • 42. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   41   Pour d’autres cela reste un « non-sujet » dans la mesure où des textes régissent déjà la protection des données individuelles (Loi informatique et libertés du 6 juin 1978). A ce titre, la CNIL rappelle que « les informations figurant dans des documents produits ou reçus par les administrations, peuvent être utilisées par toute personne qui le souhaite à d’autres fins que celles de la mission de service public pour les besoins de laquelle les documents ont été produits ou reçus » sauf si leur « communication porte atteinte à la protection de la vie privée, au secret médical et au secret en matière commerciale et industrielle. » La réutilisation est possible dans trois cas : • la personne concernée y a consenti, • les données ont été anonymisées, • une disposition législative ou réglementaire le permet.
  • 43. Les  stratégies  d'influence  gouvernementales  sur  l'Open  Data   42   4. UN MOUVEMENT D’OUVERTURE ENTRAVE 4.1.LES FAITS EN CONTRADICTION AVEC LES PAROLES 4.1.1. UN GOUVERNEMENT IMPLIQUE, MAIS PAS TROP … L’organisation actuelle d’Etalab laisse penser que le gouvernement n’a pas encore mis le coup d’accélérateur sur le développement de l’Open Data en France. En effet, à date l’équipe Etalab est composée de 8 collaborateurs et dispose d’un budget de 4 millions d’euros, ce qui peut paraître faible pour un projet d’une telle envergure (d’autant plus que les SI historiques ont des formats divers et variés et ne sont pas conçus pour faciliter l’Open Data), mais cela est peut être cohérent eu égard des actions entreprises et de l’ambition actuelle de l’Etat. Notre correspondante Etalab indique que « s’il y avait des moyens financiers, 1 million d’euros de plus, on pourrait explorer une thématique de bout en bout ». Figure 22 : le président Hollande dans l’émission Des paroles et des actes Certes l’Etat ne met pas les moyens suffisants pour l’ascension de l’Open Data, mais nous pouvons imaginer que le frein ne se situe pas là, en comparant notamment avec un pays émergeant comme l’Inde, qui malgré une organisation administrative beaucoup plus complexe et disparate arrive à créer une administration numérique. En plus d’une équipe de taille modeste et d’un budget laissant déduire la limite de l’ambition, nous pouvons noter le choix du rattachement d’Etalab à un secrétariat général (SGMAP) et non pas à un ministère, cela reflète peut-être le manque d’importance accordée à la problématique. Les missions d’Etalab manquent crucialement de structuration, d’objectifs tangibles et de planning. La démarche actuelle repose sur une libération progressive et une assistance auprès des différentes administrations de l’Etat, sans avoir une indication claire sur la cible. Nous pouvons noter qu’il n y a pas de projet global avec une méthodologie commune et organisée. En effet, il n’existe pas de méthodologie projet indiquant les étapes de modernisation de l’Etat, ni de projet commun et centralisé lié à la refonte du système d’information. Ce qui peut paraître absurde car pour moderniser, il faut des données harmonisées et centralisées et une démarche nationale : si l’Inde l’a fait avec autant d’Etats, la France peut le faire. De même au niveau des collectivités locales, chacun a sa méthodologie et l’avancement sur le sujet