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UNIVERSITÉ DE MONTRÉAL
LES MÉDIAS SOCIAUX
OU
lA CONNIVENCE DES CONSTRUCTIVISMES RELATIONNELS ?
PAR
FRANÇOIS TREMBLAY
CERTIFICAT DE RELATIONS PUBLIQUES
FACULTÉ DE L’ÉDUCATION PERMANENTE
TRAVAIL PRÉSENTÉ À M. LEROUX PATRICE
DANS LE CADRE DU COURS REP2400
INTERNET ET RELATIONS PUBLIQUES
OCTOBRE 2010
1
« Nous vivons tous sous le même ciel, mais
avec des horizons différents. »1
Konrad Adenauer
Berlin-Est, 1989, quelque temps après la chute mur…
Au chevet de sa mère, Alexander Kerner, voit disparaître un univers de certitudes.
Hier encore, lui et ses proches étaient convaincus de la pérennité de cette société
« fantastique », la République démocratique allemande (RDA). Comateuse au moment de
l’effritement du « mur de protection antifasciste »2
, Mme Kerner ignore tout des récents
événements qui ont foudroyé le régime communiste en RDA. Voulant protéger sa mère
d’un choc émotif fatal, Alexander s’efforce à reconstituer un passé perdu, témoin d’un
idéal matriarcal existentiel3
.
De ce contexte historique allemand, émane la fabrication conceptuelle d’un
espace associatif. La démocratisation proposée soumet l’individu aux codes
d’engagements et sa participation active s’exprime à l’écho de ses « camarades »
socialisants. Le maintien du système est alors imbriqué dans un échange vertical de
valeurs transmises en autarcie. Le développement d’un constructivisme relationnel est ici
représenté par la constitution de rapports réels dans une structure close, où l’apparence de
vérité affiche la dépendance de l’individualité cognitive des schèmes philosophiques.
1
Paroles prononcées lors d’une allocution publique par le chancelier fédéral de la République fédérale
allemande, Konrad Adenauer, le 14 août 1961 au lendemain de la construction du mur de Berlin par les
autorités soviétiques de Berlin-Est. Pour en apprendre davantage sur cette période historique :
http://www.mauermuseum.de/
2
Justification émise par le pouvoir central moscovite auprès des habitants de la RDA.
3
Récit fictif inspiré de faits vécus. Scène tirée du film de Wolfgang Becker intitulé Goodbye Lenin !
(2003). Voici un lien vers un extrait vidéo : http://www.youtube.com/watch?v=A_PhR7988lo
2
Obséquieux du progrès technologique, clament les vertus des médias sociaux
contemporains et ne jurent que part cette « révolution communicationnelle »4
.
L’évolution de la technologie rehausse-t-elle vraiment la qualité des interactions? L’accès
aux vecteurs de l’information a-t-il sincèrement ouvert la voie à une redéfinition des
comportements politiques, économiques et sociaux des entités sociétales?
La présente analyse, succincte, a pour mandat de décrypter la transformation des
déterminantes philosophiques, prospectives, techniques et politiques prédominantes à
l’ère de l’instantanéité cybernétique.
4
Lien vers une présentation vidéo décrivant le phénomène des médias sociaux :
http://www.youtube.com/watch?v=sIFYPQjYhv8
3
Théorie du constructivisme relationnel
Empreintes des déterminismes sociaux, les modes de transmissions de
l’information matérialisent les évolutions – spécificités techniques – contextuelles. Les
changements opérés, motivés par les bouleversements inhérents à une période sociale en
attribuent la perspective. La constante ainsi structurée procède au découpage d’un concret
issu des mécanismes tributaires au sens du réel, image d’une vérité collectivement
soutenue.
Le dévoilement, transformation du modèle opérant, agit simultanément sur le
contenu et la disposition du message. Les communications « modernes » empruntent à
Pierre Bourdieu5
(1982-2001) – sociologue français, professeur titulaire au Collège de
France – l’application systématique d’une « violence symbolique », mécanisme de
hiérarchisation des rapports au profit d’une domination construite. La nomenclature des
plateformes communicationnelles informatiques – médias sociaux – malgré la pluralité de
ses dispositions se heurte au concessionnel et sectorise implicitement le discours.
La télévision, traduit sur une myriade de sujets, le vécu. La collecte informative
repose en théorie sur la contradiction d’une perception face à l’objet, l’analyse de cas. La
présentation des données recueillies, subie l’influence de l’habitus. La réception du
contenu est alors induite au procédé de livraison de la missive et en a conséquemment
modifié le cadre perceptuel. L’appropriation de l’opinion devient subséquemment sécable
et favorise la catégorisation des actions véhiculées. Défendue par Bourdieu, cette
« théorie de l’action » invite les agents sociaux au développement de stratégies, reposant
5
Pour en apprendre davantage sur Pierre Bourdieu et sa production littéraire : http://www.college-de-
france.fr/default/EN/all/ins_dis/pierre_bourdieu.htm
4
sur une idéation assimilée par socialisation qui malgré son état d’inconscience s’adapte
au climat de l’univers conceptuel. Consacrée aux prismes interventionnistes actuels –
blogues, forums virtuels, Twitter, Facebook, etc. –, la pensée de Bourdieu complimente
l’accès généralisé en Occident aux canaux informatifs. Toutefois, la mécanique
conceptuelle demeure sous l’influence de la forme orientée de la discussion et valorise la
normalisation d’une doctrine opiniâtre socialement convenue. Tablant sur la participation
au médium télévisuel, Pierre Bourdieu s’explique ainsi : « La télévision à cette propriété
extraordinaire quelle donne presque toujours la parole sur le monde social à ceux, qui
n’en connaissent rien et qu’elle donne très peu la parole à ceux qui pourraient en
parler. »6
L’unanimisme ici évoqué renvoie intrinsèquement aux courants de l’opinion.
Contagion évidente, ce constat souligne pour cause l’interdépendance des paradigmes
d’unification, procédés du consensus. Mixité des valeurs et opacité des déclinaisons
insistent sur le dérapage en information. Les questions de l’heure où les enjeux sont
évidemment l’affaire de conceptions et davantage d’attraits spécifiques.
La confrontation des idées exécutantes demeure l’exclusivité d’une minorité de la
population. La transmission d’éléments par l’intervention des médias sociaux propulse
avantageusement la quantité au détriment de la qualité des interventions. Une
globalisation factuelle – la démocratisation des plateformes est indéniable7
– suppose le
développement des horizons thématiques et l’ouverture aux analyses dissidentes.
6
Extrait d’une conversation entretenue sur le plateau télévisuel de l’émission « Arrêt sur images » diffusée
le 20 janvier 1996 sur les ondes de France 5. Pour visionner l’intégralité de l’émission consacrée au
décryptage des médias : http://www.mefeedia.com/watch/29257869
7
Sur ce sujet le conseiller au secrétaire d’État des États-Unis en matière d’innovations technologiques,
Alec Ross donne son point de vue sur l’émergence globale des médias sociaux. Vous pouvez accéder au
document vidéo via ce lien : http://bigthink.com/ideas/16041
5
L’actualité internationale indique pourtant une polarisation des champs
exploratoires8
. La dissension conceptuelle n’est plus que l’objet de groupuscules
marginaux. Les récentes rencontres à la Conférence9
de l’Organisation des
Nations Unies (ONU) sur les changements climatiques tenue à Copenhague en
2009 en ont exprimé l’innocuité accablante au ressortissant d’un propos
assermenté. La question des changements climatiques – afin de cerner un exemple
– est pour l’heure convenue malgré une preuve scientifique inexistante.
L’émissaire souhaitant la relativisation du « dogme » est dans ce cas de figure
considéré à titre d’énergumène ou d’inculte10
. Automatiquement saisie de l’acabit
du pitre, l’opinion contraire est considérée comme discursive et est décriée par
l’ensemble « informé de la vérité ».
Les perspectives orientées reprochées aux médias traditionnels11
s’activent
au cœur des médias sociaux du web. Dorénavant, le public s’informe et participe
à l’élaboration des contenus. La création de réseaux d’affinités – blogues
consacrés aux sports, arts, etc. – a pour effet de canaliser l’opinion et ainsi mieux
la répertorier. La multiplicité des matières exposées se voit chapeautée à l’égide
du vase communicant. Les lieux de démonstrations oratoires se veulent
administrés par une négation auto magnifiée. L’agent annonciateur de la liberté
d’expression se soumet à son tour aux exigences de la censure. Pour délimiter
8
Les penchants Internet des médias traditionnels en sont un exemple probant. Malgré la proposition de
« discussions » avec des intervenants « qualifiés », les contenus sont sagement sectorisés en lieux d’intérêts
tels que les sports, la politique ou l’économie. Le site du prestigieux New York Times n’y fait pas
exception : http://www.nytimes.com/
9
Site dédié à ce sommet environnemental : http://unfccc.int/meetings/cop_15/items/5257.php
10
Article de Didier Fessou sur l’intangibilité des perceptions sociales face à la théorie des changements
climatiques. Publication, Le Soleil (Québec) , 28 février 2010 : http://www.cyberpresse.ca/le-soleil/arts-et-
spectacles/livres/201002/27/01-4256050-nous-sommes-tous-pour-la-vertu.php
11
Sur cet aspect des médias Noam Chomsky a développé une théorie élaborée :
http://www.youtube.com/watch?v=OJuqoDvyXOk
6
l’ambiance et ainsi limiter les discours « corrosifs » au « profit » du débat, un
modérateur est associé à la préservation d’une certaine pudeur. Curieusement, le
rôle prescrit répond au descriptif de tâches des censeurs employés aux
technologies précédentes.
La personnalisation de l’information en menace son intégrité. Le blogueur
est dorénavant le chevalier d’une cause12
. La popularité de certains acteurs du
web étant si imposante qu’ils se méritent le statut de célébrités. L’accointance des
objectifs, déterminés par les diffuseurs13
privés laisse planer un doute sur l’indice
de crédibilité des intervenants. L’apparition massive des commandites web14
ne se
fait plus par la simple présentation d’une marque ou d’une société, mais bien à
l’intérieur d’un contenu propagé. Les comptes d’entreprises sur des plateaux à
portée mobilisatrice influencent inéluctablement la gestion d’une logique
associative. D’un médium d’ouverture, les médias sociaux glissent vers une
coordination des positions.
Annonciatrice de progrès, la technologie articule sa prophétie à l’ébauche
de projets révolutionnaires. L’époque – bassin des intégrations motrices créatives
– en dessine les principaux objectifs. L’universalisation des moyens de
communication, malgré son développement ahurissant, n’échappe pas à une
logique productiviste. La croissance des moyens étant justifiable au comparable
des besoins dénombrés.
12
L’ouvrage intitulé Blogwars de David d. Perlmutter, paru chez Oxford University Press en 2008
s’attaque à cette problématique. Voici un lien vers une version sommaire numérisée :
http://books.google.fr/books?id=nn8Bw-O16CQC&printsec=frontcover&dq=blogwars&hl=fr&ei=-
nW8TIuhC9CNjAf16824Dg&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=1&ved=0CCgQ6AEwAA#v=one
page&q&f=false
13
Information émise par le CRTC : http://www.crtc.gc.ca/fra/INFO_SHT/t1003.htm
14
Blogue sur la publicité et les médias sociaux : http://sharemarketing.wordpress.com/2009/03/05/social-
media-is-advertising
7
Les apôtres de la prospective
Les lancements de projets technologiques15
ont ceci de particulier que tous ou
presque y adhèrent. Dans ces dossiers, nul n’est usurpateur ou fabulateur. Le mérite est
notoire et tous souhaitent la mise au monde de la prochaine merveille technique,
responsable du bien-être de l’homme. L’avis des sceptiques n’atteint que dans de rares
complexités les pages frontispices des quotidiens et se limitent généralement aux
officines du savoir.
Dans nos sociétés « évoluées », nul n’ignore les préoccupations mondiales
personnifiées par les organismes étendards. Le débat sur le rôle ou la mission d’une
institution soulève à peine quelques encriers. Notre monde hyper médiatisé semble se
conforter dans une ignorance relative. Les quantités innombrables d’avancées techniques
demeurées sur les planches à dessin sont reléguées aux oubliettes.
L’ingéniosité a ce point commun avec l’art qu’elle engage une réflexion créative.
De cette gestation naît la théorisation des approches globalisantes. La lutte au cancer, le
séquençage de l’ADN, la conquête de l’espace ont tous été des objectifs motivés par une
vision romantique du futur16
. L’avenir17
et sa science, la prospective18
, insufflent aux
individus l’espoir d’une solution prochaine aux maux qui affligent l’humanité19
.
15
À ce propos, le livre suivant offre une approche intrigante : Chevassus-AU-Louis, Nicolas, Un iceberg
dans mon whisky. Quand la technologie dérape, Paris, Science Ouverte Seuil, 2009, 185p.
16
Ce romantisme futuriste meubla l’enfance télévisuelle des baby-boomers, les séries américaines de
l’époque, puisant abondamment dans cette projection de l’avenir. Le dessin animé The Jetsons, se veut
l’archétype de l’idéal futuriste de l’époque. Lien vidéo : http://www.youtube.com/watch?v=OZL3l8iCA4k
http://www.youtube.com/watch?v=OZL3l8iCA4k
17
Gaston Berger est une figure emblématique de ce mouvement. Afin de continuer la découverte, une
portion des écrits de Berger est disponible au lien suivant : http://books.google.com/books?id=kjU-
bik1h9EC&pg=PA73&lpg=PA73&dq=gaston+berger+centre+international+de+prospective&source=bl&o
ts=OksR6FficH&sig=xixEuFSxPozq5tLsCVPCRvqwKDs&hl=fr&ei=xdS9TOPaBoG78gbA69j9Bg&sa=X
&oi=book_result&ct=result&resnum=8&ved=0CC8Q6AEwBw#v=onepage&q&f=false
8
En ce contexte, la valorisation d’une rationalité est sublimée au rêve. La
communication et ces prototypes de calibrages s’inscrivent dans la suite d’une
construction empirique. Les médias sociaux, issus de l’informatisation des réseaux,
accèdent quant à eux au modernisme conceptuel. Leurs fonctionnalités mutables offrent
des options conviviales et n’exploitent pas le procédé d’élimination des contraintes.
Imaginés avec le souci de faciliter l’accès et la dissémination de données
stratégiques, ces dispositifs ne jouent qu’un rôle secondaire dans la bonification des
rapports humains.
La participation à la société virtuelle a pour effet de distancer l’individu de ses
moyens primaires. Réuni en une collectivité du futur – les moyens utilisés étant au sens
du relationnel fictifs –, le membre socialisé atrophie son pouvoir d’action inné. Pour
Sherry Turkle20
– professeur au Massachusetts Insititute of Technology (MIT),
spécialisée en études sociales et technologiques –, l’être social tend à segmenter sa
personnalité. Cette observation circonscrit l’éveil d’une personnification virtuelle,
comportement assimilable aux rapports entretenus entre l’ordinateur, l’individu et la
présentation du message. Triphasé, le psychologique ainsi décomposé, intervient sur la
dynamique de groupe, liant l’individu à un organigramme séquentiel des commodités
associatives. Dans l’expectative du progrès acquis, l’humain s’attend à davantage de la
technologie que de ses semblables.
18
La prospective connut son apogée au croisement des années 1950 et 1960. Un document de l’Institut
National de l’audiovisuel révèle l’importance qui lui fut consacrée. Lien vidéo :
http://www.ina.fr/video/CPF08009124/l-avenir-prospectives.fr.html
19
En 1957 fut fondé par Gaston Berger, le Centre international de prospective. Enfant de ce projet, subsiste
aujourd’hui, la Société Internationale des Conseillers de Synthèse (SICS) :
http://prospective.fr/etude_prospective_strategique/etude_prospective_strategique.htm
20
Pour approfondir ce sujet, voici un lien du MIT à propos des travaux de Sherry Turkle :
http://mitpress.mit.edu/catalog/author/default.asp?aid=3954
9
La réalisation de ces projets d’envergure nécessite une conjoncture favorable à
leur épanouissement. La complétion d’un mandat ou son abandon peut s’expliquer par un
alignement de composantes essentielles. D’entre-elles le pouvoir politique a pour devoir
d’orienter ses forces au service des « intérêts » nationaux.
La promesse d’un monde meilleur ou le bêtisier des politiques
Rares sont les politiques prédisant à leurs électeurs un avenir grisâtre21
. Il serait
trop lourd ici de présenter toutes ces aventures extraordinaires et d’en circonscrire les
facteurs. En la matière, certains États se sont donnés pour mission la concrétisation
d’œuvres à la gloire de leurs ancêtres. Cénotaphes, monuments commémoratifs
appartiennent aux reliquats d’un passé glorieux ou accablé de souffrances.
L’expérience américaine (EUA) s’oppose à ce dictat de l’abîme ancestral. Bien
que les gouvernements américains successifs aient eu un respect indéniable pour leur
passé populaire – monuments aux morts et lieux de mémoires –, la vision nationale est
orientée sur l’avancement de la nation. Chaque année présidentielle voit la proposition
d’une avancée technologique phare. En cette année 2010, le président Obama a lancé
ouvertement un plan misant sur la modernisation du chemin de fer par l’ajout de
segments ferroviaires munis de trains à grande vitesse (TGV)22
.
21
La seule exception notoire répertoriée est celle de Winston Churchill, qui en 1940 promettait à son
peuple sang, efforts, larmes et sueur lors d’un discours mobilisateur. Voici un lien vers un extrait sonore du
discours : http://www.youtube.com/watch?v=gVg7rnRheK8
22
Conférence de presse de président Obama sur le sujet :
http://abcnews.go.com/video/playerIndex?id=7352105
10
L’orientation des politiques devient alors favorable au projet ferroviaire.
L’exemple ici choisi tend à démontrer l’impact conceptuel des orientations stratégiques
priorisées par une organisation tributaire de ses relations publiques.
L’élection de Barack Obama à la Maison Blanche est souvent présentée comme
un tournant majeur dans l’application des médias sociaux auprès des institutions
décisionnelles. Cette analyse place au cœur du mouvement populaire une action civile en
regard de l’État. Pourtant, l’armada 2.0 du candidat Obama fut vraisemblablement une
opération charme au goût du jour. L’orchestration fut avant tout, l’affaire de spécialistes
nichés au sein des Think Tanks. Tentant d’élucider le mythe du « citoyen réformateur »,
Matthew Hindman déconstruit l’idée convenue, qui entrevoit l’action communautaire par
l’entremise des médias sociaux. D’après Hindman23
, l’impact des réseaux sociaux ce veut
davantage commander par les bonnets du milieu financier, que par le désir populaire de
se faire entendre.
Les mouvements de protestations au moment de la crise iranienne de 2009 furent
aussi largement attribués au syndrome Twitter24
. Encore fois, l’analyse repose sur une
interaction pressentie de la dominante technologique des médias sociaux. Certes, les
réseaux sociaux ont contribué à la visibilité des affrontements. Cependant, la simple
qualification de « révolution » technologique associée à l’éclatement du conflit demeure
faible25
. La lecture du contentieux iranien doit être revisitée suivant une grille
contextuelle. L’instantanéité des médias sociaux a pour obstacle sa promiscuité du sujet.
23
Voici un lien vers des extraits de l’ouvrage de Hindman intitulé The Myth of Digital Democraty :
http://books.google.fr/books?id=DaA6MQ0mOYUC&printsec=frontcover&dq=The+Myth+of+Digital+De
mocracy&hl=fr&ei=0Xa8TLj1IYGC8gaOrPHBAg&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=1&ved=0
CC4Q6AEwAA#v=onepage&q&f=false
24
Un article du Washington Times sur le sujet : http://www.washingtontimes.com/news/2009/jun/16/irans-
twitter-revolution
25
Reportage vidéo traitant du phénomène Twitter en Iran au moment des manifestations de 2009 :
http://www.metacafe.com/watch/3009441/iran_not_a_twitter_revolution
11
Le recul historique étant indéniablement essentiel à une reconstitution des événements.
Le journalisme se trouve ainsi coincé entre l’information et le spectacle.
Révision conceptuelle
Ainsi démontré, le constructivisme relationnel fait état d’une dislocation cognitive
du sujet témoin. Stimulé par un panurgisme intellectuel, l’être social s’acclimate
inconsciemment aux déterminantes conceptuelles. Le pouvoir in situ de l’action
stratégique mise sur le foisonnement consultatif. Les réseaux sociaux exposent la
problématique d’une assimilation intégrationniste de l’individu. La notion d’opinion
implique la caractérisation déterminée par un code de valeurs et un système de réflexion
orienté vers une attribution de préférences.
Bien qu’ouverts sur le plan statistique à une mixité des rapports, les médias
sociaux contemporains procèdent à partir de canaux de diffusions où l’action
mobilisatrice restreint l’apport qualitatif de l’agent social.
Les comportements sociaux ici en exégèse cristallisent l’interdépendance des
contrastes identitaires en société. Le média social 2.0 est un élément central du
développement critique. Son institutionnalisation menace sa valeur arbitraire propre à
l’individu, moteur des évolutions humaines. La transformation des manifestations de
l’opinion doit protéger la collectivité au regard de l’individu. Une technologie méritoire
demeure libre seulement si l’intégrité individuelle lui permet d’assumer sa collectivité,
source du cadre vital au genre humain.
12

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"Le nouveau décor des politiques de la science" Hommage à J.-.J SALOMON
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Web 2.0 ! Histoire 2.0 ?!
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Tp constructivisme relationnel.doc

  • 1. UNIVERSITÉ DE MONTRÉAL LES MÉDIAS SOCIAUX OU lA CONNIVENCE DES CONSTRUCTIVISMES RELATIONNELS ? PAR FRANÇOIS TREMBLAY CERTIFICAT DE RELATIONS PUBLIQUES FACULTÉ DE L’ÉDUCATION PERMANENTE TRAVAIL PRÉSENTÉ À M. LEROUX PATRICE DANS LE CADRE DU COURS REP2400 INTERNET ET RELATIONS PUBLIQUES OCTOBRE 2010
  • 2. 1 « Nous vivons tous sous le même ciel, mais avec des horizons différents. »1 Konrad Adenauer Berlin-Est, 1989, quelque temps après la chute mur… Au chevet de sa mère, Alexander Kerner, voit disparaître un univers de certitudes. Hier encore, lui et ses proches étaient convaincus de la pérennité de cette société « fantastique », la République démocratique allemande (RDA). Comateuse au moment de l’effritement du « mur de protection antifasciste »2 , Mme Kerner ignore tout des récents événements qui ont foudroyé le régime communiste en RDA. Voulant protéger sa mère d’un choc émotif fatal, Alexander s’efforce à reconstituer un passé perdu, témoin d’un idéal matriarcal existentiel3 . De ce contexte historique allemand, émane la fabrication conceptuelle d’un espace associatif. La démocratisation proposée soumet l’individu aux codes d’engagements et sa participation active s’exprime à l’écho de ses « camarades » socialisants. Le maintien du système est alors imbriqué dans un échange vertical de valeurs transmises en autarcie. Le développement d’un constructivisme relationnel est ici représenté par la constitution de rapports réels dans une structure close, où l’apparence de vérité affiche la dépendance de l’individualité cognitive des schèmes philosophiques. 1 Paroles prononcées lors d’une allocution publique par le chancelier fédéral de la République fédérale allemande, Konrad Adenauer, le 14 août 1961 au lendemain de la construction du mur de Berlin par les autorités soviétiques de Berlin-Est. Pour en apprendre davantage sur cette période historique : http://www.mauermuseum.de/ 2 Justification émise par le pouvoir central moscovite auprès des habitants de la RDA. 3 Récit fictif inspiré de faits vécus. Scène tirée du film de Wolfgang Becker intitulé Goodbye Lenin ! (2003). Voici un lien vers un extrait vidéo : http://www.youtube.com/watch?v=A_PhR7988lo
  • 3. 2 Obséquieux du progrès technologique, clament les vertus des médias sociaux contemporains et ne jurent que part cette « révolution communicationnelle »4 . L’évolution de la technologie rehausse-t-elle vraiment la qualité des interactions? L’accès aux vecteurs de l’information a-t-il sincèrement ouvert la voie à une redéfinition des comportements politiques, économiques et sociaux des entités sociétales? La présente analyse, succincte, a pour mandat de décrypter la transformation des déterminantes philosophiques, prospectives, techniques et politiques prédominantes à l’ère de l’instantanéité cybernétique. 4 Lien vers une présentation vidéo décrivant le phénomène des médias sociaux : http://www.youtube.com/watch?v=sIFYPQjYhv8
  • 4. 3 Théorie du constructivisme relationnel Empreintes des déterminismes sociaux, les modes de transmissions de l’information matérialisent les évolutions – spécificités techniques – contextuelles. Les changements opérés, motivés par les bouleversements inhérents à une période sociale en attribuent la perspective. La constante ainsi structurée procède au découpage d’un concret issu des mécanismes tributaires au sens du réel, image d’une vérité collectivement soutenue. Le dévoilement, transformation du modèle opérant, agit simultanément sur le contenu et la disposition du message. Les communications « modernes » empruntent à Pierre Bourdieu5 (1982-2001) – sociologue français, professeur titulaire au Collège de France – l’application systématique d’une « violence symbolique », mécanisme de hiérarchisation des rapports au profit d’une domination construite. La nomenclature des plateformes communicationnelles informatiques – médias sociaux – malgré la pluralité de ses dispositions se heurte au concessionnel et sectorise implicitement le discours. La télévision, traduit sur une myriade de sujets, le vécu. La collecte informative repose en théorie sur la contradiction d’une perception face à l’objet, l’analyse de cas. La présentation des données recueillies, subie l’influence de l’habitus. La réception du contenu est alors induite au procédé de livraison de la missive et en a conséquemment modifié le cadre perceptuel. L’appropriation de l’opinion devient subséquemment sécable et favorise la catégorisation des actions véhiculées. Défendue par Bourdieu, cette « théorie de l’action » invite les agents sociaux au développement de stratégies, reposant 5 Pour en apprendre davantage sur Pierre Bourdieu et sa production littéraire : http://www.college-de- france.fr/default/EN/all/ins_dis/pierre_bourdieu.htm
  • 5. 4 sur une idéation assimilée par socialisation qui malgré son état d’inconscience s’adapte au climat de l’univers conceptuel. Consacrée aux prismes interventionnistes actuels – blogues, forums virtuels, Twitter, Facebook, etc. –, la pensée de Bourdieu complimente l’accès généralisé en Occident aux canaux informatifs. Toutefois, la mécanique conceptuelle demeure sous l’influence de la forme orientée de la discussion et valorise la normalisation d’une doctrine opiniâtre socialement convenue. Tablant sur la participation au médium télévisuel, Pierre Bourdieu s’explique ainsi : « La télévision à cette propriété extraordinaire quelle donne presque toujours la parole sur le monde social à ceux, qui n’en connaissent rien et qu’elle donne très peu la parole à ceux qui pourraient en parler. »6 L’unanimisme ici évoqué renvoie intrinsèquement aux courants de l’opinion. Contagion évidente, ce constat souligne pour cause l’interdépendance des paradigmes d’unification, procédés du consensus. Mixité des valeurs et opacité des déclinaisons insistent sur le dérapage en information. Les questions de l’heure où les enjeux sont évidemment l’affaire de conceptions et davantage d’attraits spécifiques. La confrontation des idées exécutantes demeure l’exclusivité d’une minorité de la population. La transmission d’éléments par l’intervention des médias sociaux propulse avantageusement la quantité au détriment de la qualité des interventions. Une globalisation factuelle – la démocratisation des plateformes est indéniable7 – suppose le développement des horizons thématiques et l’ouverture aux analyses dissidentes. 6 Extrait d’une conversation entretenue sur le plateau télévisuel de l’émission « Arrêt sur images » diffusée le 20 janvier 1996 sur les ondes de France 5. Pour visionner l’intégralité de l’émission consacrée au décryptage des médias : http://www.mefeedia.com/watch/29257869 7 Sur ce sujet le conseiller au secrétaire d’État des États-Unis en matière d’innovations technologiques, Alec Ross donne son point de vue sur l’émergence globale des médias sociaux. Vous pouvez accéder au document vidéo via ce lien : http://bigthink.com/ideas/16041
  • 6. 5 L’actualité internationale indique pourtant une polarisation des champs exploratoires8 . La dissension conceptuelle n’est plus que l’objet de groupuscules marginaux. Les récentes rencontres à la Conférence9 de l’Organisation des Nations Unies (ONU) sur les changements climatiques tenue à Copenhague en 2009 en ont exprimé l’innocuité accablante au ressortissant d’un propos assermenté. La question des changements climatiques – afin de cerner un exemple – est pour l’heure convenue malgré une preuve scientifique inexistante. L’émissaire souhaitant la relativisation du « dogme » est dans ce cas de figure considéré à titre d’énergumène ou d’inculte10 . Automatiquement saisie de l’acabit du pitre, l’opinion contraire est considérée comme discursive et est décriée par l’ensemble « informé de la vérité ». Les perspectives orientées reprochées aux médias traditionnels11 s’activent au cœur des médias sociaux du web. Dorénavant, le public s’informe et participe à l’élaboration des contenus. La création de réseaux d’affinités – blogues consacrés aux sports, arts, etc. – a pour effet de canaliser l’opinion et ainsi mieux la répertorier. La multiplicité des matières exposées se voit chapeautée à l’égide du vase communicant. Les lieux de démonstrations oratoires se veulent administrés par une négation auto magnifiée. L’agent annonciateur de la liberté d’expression se soumet à son tour aux exigences de la censure. Pour délimiter 8 Les penchants Internet des médias traditionnels en sont un exemple probant. Malgré la proposition de « discussions » avec des intervenants « qualifiés », les contenus sont sagement sectorisés en lieux d’intérêts tels que les sports, la politique ou l’économie. Le site du prestigieux New York Times n’y fait pas exception : http://www.nytimes.com/ 9 Site dédié à ce sommet environnemental : http://unfccc.int/meetings/cop_15/items/5257.php 10 Article de Didier Fessou sur l’intangibilité des perceptions sociales face à la théorie des changements climatiques. Publication, Le Soleil (Québec) , 28 février 2010 : http://www.cyberpresse.ca/le-soleil/arts-et- spectacles/livres/201002/27/01-4256050-nous-sommes-tous-pour-la-vertu.php 11 Sur cet aspect des médias Noam Chomsky a développé une théorie élaborée : http://www.youtube.com/watch?v=OJuqoDvyXOk
  • 7. 6 l’ambiance et ainsi limiter les discours « corrosifs » au « profit » du débat, un modérateur est associé à la préservation d’une certaine pudeur. Curieusement, le rôle prescrit répond au descriptif de tâches des censeurs employés aux technologies précédentes. La personnalisation de l’information en menace son intégrité. Le blogueur est dorénavant le chevalier d’une cause12 . La popularité de certains acteurs du web étant si imposante qu’ils se méritent le statut de célébrités. L’accointance des objectifs, déterminés par les diffuseurs13 privés laisse planer un doute sur l’indice de crédibilité des intervenants. L’apparition massive des commandites web14 ne se fait plus par la simple présentation d’une marque ou d’une société, mais bien à l’intérieur d’un contenu propagé. Les comptes d’entreprises sur des plateaux à portée mobilisatrice influencent inéluctablement la gestion d’une logique associative. D’un médium d’ouverture, les médias sociaux glissent vers une coordination des positions. Annonciatrice de progrès, la technologie articule sa prophétie à l’ébauche de projets révolutionnaires. L’époque – bassin des intégrations motrices créatives – en dessine les principaux objectifs. L’universalisation des moyens de communication, malgré son développement ahurissant, n’échappe pas à une logique productiviste. La croissance des moyens étant justifiable au comparable des besoins dénombrés. 12 L’ouvrage intitulé Blogwars de David d. Perlmutter, paru chez Oxford University Press en 2008 s’attaque à cette problématique. Voici un lien vers une version sommaire numérisée : http://books.google.fr/books?id=nn8Bw-O16CQC&printsec=frontcover&dq=blogwars&hl=fr&ei=- nW8TIuhC9CNjAf16824Dg&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=1&ved=0CCgQ6AEwAA#v=one page&q&f=false 13 Information émise par le CRTC : http://www.crtc.gc.ca/fra/INFO_SHT/t1003.htm 14 Blogue sur la publicité et les médias sociaux : http://sharemarketing.wordpress.com/2009/03/05/social- media-is-advertising
  • 8. 7 Les apôtres de la prospective Les lancements de projets technologiques15 ont ceci de particulier que tous ou presque y adhèrent. Dans ces dossiers, nul n’est usurpateur ou fabulateur. Le mérite est notoire et tous souhaitent la mise au monde de la prochaine merveille technique, responsable du bien-être de l’homme. L’avis des sceptiques n’atteint que dans de rares complexités les pages frontispices des quotidiens et se limitent généralement aux officines du savoir. Dans nos sociétés « évoluées », nul n’ignore les préoccupations mondiales personnifiées par les organismes étendards. Le débat sur le rôle ou la mission d’une institution soulève à peine quelques encriers. Notre monde hyper médiatisé semble se conforter dans une ignorance relative. Les quantités innombrables d’avancées techniques demeurées sur les planches à dessin sont reléguées aux oubliettes. L’ingéniosité a ce point commun avec l’art qu’elle engage une réflexion créative. De cette gestation naît la théorisation des approches globalisantes. La lutte au cancer, le séquençage de l’ADN, la conquête de l’espace ont tous été des objectifs motivés par une vision romantique du futur16 . L’avenir17 et sa science, la prospective18 , insufflent aux individus l’espoir d’une solution prochaine aux maux qui affligent l’humanité19 . 15 À ce propos, le livre suivant offre une approche intrigante : Chevassus-AU-Louis, Nicolas, Un iceberg dans mon whisky. Quand la technologie dérape, Paris, Science Ouverte Seuil, 2009, 185p. 16 Ce romantisme futuriste meubla l’enfance télévisuelle des baby-boomers, les séries américaines de l’époque, puisant abondamment dans cette projection de l’avenir. Le dessin animé The Jetsons, se veut l’archétype de l’idéal futuriste de l’époque. Lien vidéo : http://www.youtube.com/watch?v=OZL3l8iCA4k http://www.youtube.com/watch?v=OZL3l8iCA4k 17 Gaston Berger est une figure emblématique de ce mouvement. Afin de continuer la découverte, une portion des écrits de Berger est disponible au lien suivant : http://books.google.com/books?id=kjU- bik1h9EC&pg=PA73&lpg=PA73&dq=gaston+berger+centre+international+de+prospective&source=bl&o ts=OksR6FficH&sig=xixEuFSxPozq5tLsCVPCRvqwKDs&hl=fr&ei=xdS9TOPaBoG78gbA69j9Bg&sa=X &oi=book_result&ct=result&resnum=8&ved=0CC8Q6AEwBw#v=onepage&q&f=false
  • 9. 8 En ce contexte, la valorisation d’une rationalité est sublimée au rêve. La communication et ces prototypes de calibrages s’inscrivent dans la suite d’une construction empirique. Les médias sociaux, issus de l’informatisation des réseaux, accèdent quant à eux au modernisme conceptuel. Leurs fonctionnalités mutables offrent des options conviviales et n’exploitent pas le procédé d’élimination des contraintes. Imaginés avec le souci de faciliter l’accès et la dissémination de données stratégiques, ces dispositifs ne jouent qu’un rôle secondaire dans la bonification des rapports humains. La participation à la société virtuelle a pour effet de distancer l’individu de ses moyens primaires. Réuni en une collectivité du futur – les moyens utilisés étant au sens du relationnel fictifs –, le membre socialisé atrophie son pouvoir d’action inné. Pour Sherry Turkle20 – professeur au Massachusetts Insititute of Technology (MIT), spécialisée en études sociales et technologiques –, l’être social tend à segmenter sa personnalité. Cette observation circonscrit l’éveil d’une personnification virtuelle, comportement assimilable aux rapports entretenus entre l’ordinateur, l’individu et la présentation du message. Triphasé, le psychologique ainsi décomposé, intervient sur la dynamique de groupe, liant l’individu à un organigramme séquentiel des commodités associatives. Dans l’expectative du progrès acquis, l’humain s’attend à davantage de la technologie que de ses semblables. 18 La prospective connut son apogée au croisement des années 1950 et 1960. Un document de l’Institut National de l’audiovisuel révèle l’importance qui lui fut consacrée. Lien vidéo : http://www.ina.fr/video/CPF08009124/l-avenir-prospectives.fr.html 19 En 1957 fut fondé par Gaston Berger, le Centre international de prospective. Enfant de ce projet, subsiste aujourd’hui, la Société Internationale des Conseillers de Synthèse (SICS) : http://prospective.fr/etude_prospective_strategique/etude_prospective_strategique.htm 20 Pour approfondir ce sujet, voici un lien du MIT à propos des travaux de Sherry Turkle : http://mitpress.mit.edu/catalog/author/default.asp?aid=3954
  • 10. 9 La réalisation de ces projets d’envergure nécessite une conjoncture favorable à leur épanouissement. La complétion d’un mandat ou son abandon peut s’expliquer par un alignement de composantes essentielles. D’entre-elles le pouvoir politique a pour devoir d’orienter ses forces au service des « intérêts » nationaux. La promesse d’un monde meilleur ou le bêtisier des politiques Rares sont les politiques prédisant à leurs électeurs un avenir grisâtre21 . Il serait trop lourd ici de présenter toutes ces aventures extraordinaires et d’en circonscrire les facteurs. En la matière, certains États se sont donnés pour mission la concrétisation d’œuvres à la gloire de leurs ancêtres. Cénotaphes, monuments commémoratifs appartiennent aux reliquats d’un passé glorieux ou accablé de souffrances. L’expérience américaine (EUA) s’oppose à ce dictat de l’abîme ancestral. Bien que les gouvernements américains successifs aient eu un respect indéniable pour leur passé populaire – monuments aux morts et lieux de mémoires –, la vision nationale est orientée sur l’avancement de la nation. Chaque année présidentielle voit la proposition d’une avancée technologique phare. En cette année 2010, le président Obama a lancé ouvertement un plan misant sur la modernisation du chemin de fer par l’ajout de segments ferroviaires munis de trains à grande vitesse (TGV)22 . 21 La seule exception notoire répertoriée est celle de Winston Churchill, qui en 1940 promettait à son peuple sang, efforts, larmes et sueur lors d’un discours mobilisateur. Voici un lien vers un extrait sonore du discours : http://www.youtube.com/watch?v=gVg7rnRheK8 22 Conférence de presse de président Obama sur le sujet : http://abcnews.go.com/video/playerIndex?id=7352105
  • 11. 10 L’orientation des politiques devient alors favorable au projet ferroviaire. L’exemple ici choisi tend à démontrer l’impact conceptuel des orientations stratégiques priorisées par une organisation tributaire de ses relations publiques. L’élection de Barack Obama à la Maison Blanche est souvent présentée comme un tournant majeur dans l’application des médias sociaux auprès des institutions décisionnelles. Cette analyse place au cœur du mouvement populaire une action civile en regard de l’État. Pourtant, l’armada 2.0 du candidat Obama fut vraisemblablement une opération charme au goût du jour. L’orchestration fut avant tout, l’affaire de spécialistes nichés au sein des Think Tanks. Tentant d’élucider le mythe du « citoyen réformateur », Matthew Hindman déconstruit l’idée convenue, qui entrevoit l’action communautaire par l’entremise des médias sociaux. D’après Hindman23 , l’impact des réseaux sociaux ce veut davantage commander par les bonnets du milieu financier, que par le désir populaire de se faire entendre. Les mouvements de protestations au moment de la crise iranienne de 2009 furent aussi largement attribués au syndrome Twitter24 . Encore fois, l’analyse repose sur une interaction pressentie de la dominante technologique des médias sociaux. Certes, les réseaux sociaux ont contribué à la visibilité des affrontements. Cependant, la simple qualification de « révolution » technologique associée à l’éclatement du conflit demeure faible25 . La lecture du contentieux iranien doit être revisitée suivant une grille contextuelle. L’instantanéité des médias sociaux a pour obstacle sa promiscuité du sujet. 23 Voici un lien vers des extraits de l’ouvrage de Hindman intitulé The Myth of Digital Democraty : http://books.google.fr/books?id=DaA6MQ0mOYUC&printsec=frontcover&dq=The+Myth+of+Digital+De mocracy&hl=fr&ei=0Xa8TLj1IYGC8gaOrPHBAg&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=1&ved=0 CC4Q6AEwAA#v=onepage&q&f=false 24 Un article du Washington Times sur le sujet : http://www.washingtontimes.com/news/2009/jun/16/irans- twitter-revolution 25 Reportage vidéo traitant du phénomène Twitter en Iran au moment des manifestations de 2009 : http://www.metacafe.com/watch/3009441/iran_not_a_twitter_revolution
  • 12. 11 Le recul historique étant indéniablement essentiel à une reconstitution des événements. Le journalisme se trouve ainsi coincé entre l’information et le spectacle. Révision conceptuelle Ainsi démontré, le constructivisme relationnel fait état d’une dislocation cognitive du sujet témoin. Stimulé par un panurgisme intellectuel, l’être social s’acclimate inconsciemment aux déterminantes conceptuelles. Le pouvoir in situ de l’action stratégique mise sur le foisonnement consultatif. Les réseaux sociaux exposent la problématique d’une assimilation intégrationniste de l’individu. La notion d’opinion implique la caractérisation déterminée par un code de valeurs et un système de réflexion orienté vers une attribution de préférences. Bien qu’ouverts sur le plan statistique à une mixité des rapports, les médias sociaux contemporains procèdent à partir de canaux de diffusions où l’action mobilisatrice restreint l’apport qualitatif de l’agent social. Les comportements sociaux ici en exégèse cristallisent l’interdépendance des contrastes identitaires en société. Le média social 2.0 est un élément central du développement critique. Son institutionnalisation menace sa valeur arbitraire propre à l’individu, moteur des évolutions humaines. La transformation des manifestations de l’opinion doit protéger la collectivité au regard de l’individu. Une technologie méritoire demeure libre seulement si l’intégrité individuelle lui permet d’assumer sa collectivité, source du cadre vital au genre humain.
  • 13. 12