3. • “A l’instant de la mort, le cadavre s’est
transformé pour sa part en image figée qui
ne fait plus que ressembler au corps vivant.
Aussi Blanchot écrit-il que “le cadavre est sa
propre image”. Il n’est plus un corps, il n’en
est qu’une image. Personne ne peut se
ressembler, sinon en image ou en tant que
que cadavre.”
• Hans Belting, Pour une anthropologie des
images, début du chapitre 5.
4. • « Lorsque ces appareils seront livrés au
public, lorsque tous pourront photographier
les êtres qui leur sont chers (…) dans leur
mouvement, dans leur action, dans leurs
gestes familiers, avec la parole au bout des
lèvres, la mort cessera d’être absolue. »
• Journal « La poste » du 30 décembre 1895. cité par Vincent Pinel in
Louis Lumière, inventeur et cinéaste, p.58.
6. • « En utilisant lui aussi la terre, le potier
Butadès de Sicyone découvrit le premier
l’art de modeler des portraits en argile ;
cela se passait à Corinthe et il dut son
invention à sa fille, qui était amoureuse
d’un jeune homme ; celui-ci partant pour
l’étranger, elle entoura d’une ligne l’ombre
de son visage projetée sur le mur par la
lumière d’une lanterne ; son père appliqua
l’argile sur l’esquisse, en fit un relief qu’il
mit à durcir au feu avec le reste de ses
poteries, après l’avoir fait sécher. »
7. • « Ce que Maurizio Bettini appelle « l’astuzia malinconica della
fanciulla » (" l'astuce mélancolique de la fille") consiste donc en ceci
qu’elle substitue à une absence à venir la trace d’une présence qui est
encore là. L’image, qui est le résultat de cette substitution, apparaît
donc immédiatement comme ce qu’elle sera toujours : substitut d’une
d’une absence, trace d’une présence en allée, offrande d’un simulacre.
Lorsque, dans le petit traité sur la mémoire et la réminiscence,
Aristote évoque la fonction centrale de la mémoire (se souvenir de ce
qui n’est pas présent), il ajoute aussitôt qu’il s’agit d’un « phénomène
comparable à un tableau », ce qui prouve l’ancienneté de cette
association-réflexe que l’on retrouvera à toutes les époques et dont
Alberti donne, au début du livre II du De pictura, la formulation la plus
célèbre et la plus condensée : « La peinture a en elle une force tout à
fait divine qui lui permet non seulement de rendre présents, comme
on le dit de l’amitié, ceux qui sont absents, mais aussi de montrer
plusieurs siècles après les morts aux vivants. »
•
8. • « En cette première ombre et cette
première image se tenait l’histoire d’une
union, naissante aussi sans doute, mais dès
le commencement marquée par le départ et
la séparation, par une absence dont la
souffrance se réfléchissait en miroir,
inversée, dans le plaisir de contourner une
forme, comme en une caresse à distance
retenue dans la précision d’un trait destiné
à survivre à l’adieu. »
•
9. • « Quelle différence y a-t-il entre Picture et Image ? Partons
du vernaculaire, d’une distinction anglaise intraduisible en
français : « Vous pouvez accrocher une picture, mais vous
ne pouvez pas accrocher une image. » La picture est un
objet matériel, une chose que vous pouvez brûler ou
abîmer. L’image est ce qui apparaît dans une picture et qui
survit à sa destruction – dans la mémoire, dans le récit,
dans des copies et des traces au sein d’autres médias. (…)
Dès lors, la picture est l’image telle qu’elle apparaît sur un
support matériel ou à un endroit donné ; picture mentale y
compris, dont l’image apparaît – ainsi que l’a relevé Hans
Belting – dans un corps, une mémoire ou une
imagination. »
• W.J.T Mitchell, Iconologie, p. 21
10. • « La représentation trahit toujours, en
quelque point, l’absence de l’objet et le
désir de sa présence »
• Jean-Claude Lebensztejn, Zig-zag,
Flammarion, p. 289
11. • « D’abord j’inscris sur la surface à peindre
un quadrilatère à angles droits aussi grand
qu’il me plaît, qui est pour moi en vérité
comme une fenêtre ouverte à partir de
laquelle l’histoire représentée pourra être
considérée »
• Alberti, De pictura, p.83.
26. • « Le tableau n’est pas à lire, comme le
disent les sémiologues d’aujourd’hui, Klee
disait qu’il est à brouter, il fait voir, il s’offre
à l’œil comme une chose exemplaire,
comme une nature naturante, disait encore
Klee, puisqu’il fait voir ce qu’est voir. Or il
fait voir que voir est une danse. »
• J-F Lyotard, Discours, figure, p.14.
27. • « Et par «image» nous entendons une
certaine existence qui est plus que ce que
l’idéaliste appelle une représentation, mais
moins que ce que le réaliste appelle une
chose, - une existence située à mi-chemin
entre la « chose » et la « représentation ».
• Henri Bergson, Matière et Mémoire, 7ème
éd.
Quadrige, puf, p.1.
29. • "J'ai honte, j'ai pris la mauvaise décision" , déclare-t-il
dans un communiqué de l'agence. "Vous pouvez
cependant passer les archives en revue, c'est l'unique fois
où je l'ai fait" . Contreras se justifie en évoquant le stress
intense inhérent à la situation et "est prêt à en assumer
les conséquences" . La première est donc cette fin de
collaboration brutale entre lui et l'AP. Du côté de l'agence,
on cherche à protéger sa réputation contre les faussaires.
"Nous réagissons vigoureusement quand elle est ternie
par une violation de notre code éthique" , indique-t-elle
dans son communiqué.
31. • « L’objectivité de la photographie lui confère une
puissance de crédibilité absente de toute œuvre picturale.
Quelles que soient les objections de notre esprit critique
nous sommes obligés de croire à l’existence de l’objet
représenté, effectivement re-présenté, c’est à dire rendu
présent dans le temps et dans l’espace. La photographie
bénéficie d’un transfert de réalité de la chose sur sa
production. »
• André Bazin, « Ontologie de la photographie » in Qu’est-
ce que le cinéma ? , p. 13 et 14.
32. • « Toute photographie est le résultat d'une
empreinte physique qui a été transférée sur
une surface sensible par les réflexions de la
lumière. La photographie est donc le type
d'icône ou de représentation visuelle qui a
avec son objet une relation indicielle. »
• Rosalind Krauss, « Notes sur l'index » (trad. de l'anglais
par J.-P. Criqui), L'Originalité de l'avant-garde et autres
mythes modernistes, Paris, Macula, 1993, p. 69.
33. • « la peinture, elle, peut feindre la réalité sans l’avoir vue.
Le discours combine des signes qui ont certes des
référents, mais ces référents peuvent être et sont le plus
souvent des « chimères ». Au contraire de ces imitations,
dans la photographie, je ne puis jamais nier que la chose a
été là. »
• Roland Barthes, op. cit. p. 120.
• « Le noème de la photographie est simple, banal, aucune
profondeur : « ça a été ».
• P. 179
34. Définition de l’indicialité
« La photographie est une graphie par la lumière et n’est pas
une graphie par l’homme au moyen de la lumière. C’est une
graphie de et par la lumière même, que l’homme peut
seulement recueillir et provoquer. (…) Donnons une définition
suffisante. Une photo, épreuve négative ou positive, est une
empreinte photochimique d’un volume de sources lumineuses
distantes et localisées, empreintes qui peuvent être
éventuellement saisies comme des indices d’objets et
d’événement, surtout si elles ont été munies d’index à cette
intention. »
Henri Van Lier, « Le non-acte photographique » in Les cahiers
de la photographie, n° 8, L’acte photographique. Colloque de
la Sorbonne. Paris, 1983, p. 28.
35. • CS PEIRCE : trichotomie du signe
• l'icône (un signe par ressemblance avec
l'objet),
• l'indice (un signe relié comme un
symptôme à son objet)
• et le symbole (un signe doté d'une
signification abstraite).
•
36. « C’est le témoin assermenté de tout ce qui se présente à sa vue.
Que sont ses enregistrements infaillibles pour le compte de la mécanique,
du génie industriel, de la géologie et de l’histoire naturelle, sinon des faits
du genre le plus authentique et le plus têtu ? »
Elizabeth Eastlake ,“[Photography]”, The Quarterly Review, vol. 101, Londres, 1857, p. 442-468
Elizabeth Eastlake et François Brunet, « “Et pourtant des choses mineures…” »,
Études photographiques, 14 | janvier 2004,
[En ligne], mis en ligne le 16 septembre 2008.
URL : http://etudesphotographiques.revues.org/index381.html. Consulté le 03 janvier 2013.
37. 4 réfutations/contestations de l’empreinte par André Gunthert :
1) A partir de la notion d’image latente :
André Gunthert, La conquête de l’instantané, archéologie de l’imaginaire photographique en France
(1841-1895), thèse de doctorat d’Histoire de l’Art, sous la direction d’Hubert Damisch, Paris, EHESS,
soutenue en février 1999. Version numérique disponible à l’adresse :
<http://issuu.com/lhivic/docs/la-conquete-de-l-instantane> p. 60-62.
2) Sur la question de l’optique et des photons :
André Gunthert, « L’empreinte digitale. Théorie et pratique de la photographie à l’ère numérique »
article publié en pré-print sur le blog de l’auteur ARHV le 3 octobre 2007.
(http://www.arhv.lhivic.org/index.php/2007/10/03/506-l-empreinte-digitale - pnote-506-14) et
publié in Giovanni Careri, Bernhard Rüdiger (dir), Face au réel. Éthique de la forme dans l'art
contemporain, Paris, Archibooks, 2008, p. 85-95.
3) Sur la question de l’échelle de l’empreinte :
André Gunthert, « Au revoir Monsieur Peirce », article publié le 12 février 2012 sur son blog L’atelier des
icônes (http://culturevisuelle.org/icones/2313). André Gunthert, « Au revoir Monsieur Peirce », article
publié le 12 février 2012 sur son blog L’atelier des icônes (http://culturevisuelle.org/icones/2313).
4) Sur la question de l’apparence comme présence :
Le court billet sur Totem : « La photo ne voit que les apparences »
http://culturevisuelle.org/totem/1592
38. • « De nombreuses expériences d’impression par contact avaient été pratiquées
depuis la fin du XVIII ème siècle, et plusieurs chercheurs avaient imaginé que
l’on pouvait fixer par un tel moyen l’image projetée dans la camera obscura.
(…) En choisissant une résine de préférence à un sel d’argent Nièpce ne
modifiait pas les données du problème. (…) Le pas suivant sera accompli par
Daguerre qui, le premier, imagine la possibilité d’un intervalle entre la prise de
vue et le fixage de l’image, occupé par une opération chimique d’amplification
de la réaction photosensible : un renforcement de l’impression trop faible de
la chambre noire, une multiplication de l’information optique de l’ordre de
plusieurs millions de fois – bien plus que ce qu’aurait pu permettre toute
amélioration de la substance photogénique elle-même. Il s’agit de la
découverte de l’image latente, et du principe corollaire du développement.
Fondée sur un état d’invisibilité de l’image, cette opération d’après-coup
représente un haut degré d’abstraction et de maîtrise du processus
photochimique, qui transfère l’essentiel de la question de la sensibilité du
support sensible à l’agent révélateur, et déplace le moment clé du processus
du stade optique (l’enregistrement de l’information) au stade chimique (la
formation de l’image). »
• André Gunthert, La conquête de l’instantané, archéologie de l’imaginaire photographique en France
(1841-1895), thèse de doctorat d’Histoire de l’Art, sous la direction d’Hubert Damisch, Paris, EHESS,
soutenue en février 1999. Version numérique disponible à l’adresse :
(http://issuu.com/lhivic/docs/la-conquete-de-l-instantane) p. 60-62.
43. • « il faut donc que l’image soit présente et
passée, encore présente et déjà passée, à la
fois, en même temps, si elle n’était pas déjà
passée en même temps que présente,
jamais le présent ne passerait. Le passé ne
succède pas au présent qu’il n’est plus, il
coexiste avec le présent qu’il a été. »
• Gilles Deleuze, L’image-temps, p. 106
44. La méthode warburgienne implique
l’articulation de trois démarches :
•L’analyse iconologique au sens strict
•L’interprétation du contenu
•La recherche du sens de « l’histoire des
styles »
45. • « La nouveauté de ma méthode tient en ceci que, pour
rendre compte de la psychologie de la création artistique,
je rassemble des documents venus du domaine de la
langue aussi bien que des arts plastiques ou du monde du
drame religieux. Pour y parvenir, moi et mes compagnons
de recherche devons avoir devant nous les documents, i.e.
les livres et ces images doivent être à portée de main sans
difficulté et instantanément. Aussi ai-je besoin d’une
véritable arène avec des tables afin d’avoir sous la main
les livres usuels et le matériel iconographique. »
• Aby Warburg cité par T Von Stockhausen,
46. • « Nous envisageons l’œuvre d’Art en tant que symptôme
de quelque « autre chose », qui s’exprime en une infinie
diversité d’autres symptômes ; et nous interprétons les
caractères de sa composition et de son iconographie en
tant que manifestations plus particulières de cette « autre
chose ». La découverte et l’interprétation de ces valeurs
« symboliques » (en général ignorées de l’artiste, parfois
même fort différentes de ce qu’il se proposait
consciemment d’exprimer) est l’objet de ce que nous
pouvons appeler « iconographie au sens large »
• Erwin Panofsky, Essais d’iconologie, préface, p. 21
47. • Chez Panofsky :
• 1) Significations primaires ou naturelles. (niveau iconographique)
• signification factuelle : « je la saisis en identifiant tout simplement certaines
formes visibles à certains objets connus de moi par expérience pratique. » p.
14 de l’introduction aux Essais d’iconologie.
• signification expressive : « Elle diffère de la signification de fait en ceci qu’elle
n’est pas plus saisie par simple identification perceptive mais par
« empathie ». p.14
•
• 2) Signification secondaire ou conventionnelle. (niveau iconographique)
• « Elle diffère de la signification primaire ou naturelle en ce qu’elle relève de
l’entendement, non de la perception sensible, et qu’elle a été délibérément
communiquée à l’acte pratique chargé de la transmettre. » p.15
•
• 3) signification intrinsèque ou contenu. (niveau iconologique)
• « Elle relève de l’essence, alors que les deux autres sortes de signification, la
primaire ou naturelle et la secondaire ou conventionnelle, sont du domaine de
l’apparaître. » p. 16