3. Préambule
Comme toutes les entreprises, celles de l’économie sociale sont concernées par les enjeux
actuels de santé au travail (accidents, invalidité, absentéisme, pénibilité, stress, etc.) et ne sont
donc pas exemptes d’une réflexion sur ces sujets.
Dans l’évaluation et la prévention des risques professionnels résident plusieurs enjeux, essentiels à
la vie d’une structure :
Les enjeux humains (intégrité physique et mentale des salariés, épanouissement, respect des
valeurs de l’économie sociale, dialogue social, etc.) ;
Les enjeux liés à l’organisation du travail (coopération dans le travail, absentéisme, turn-over, conflits,
etc.) ;
Les enjeux économiques (coûts induits, qualité des réalisations, etc.).
Le secteur social et médico-social se caractérise par la grande diversité des établissements et services qui en
relèvent et qui sont régis par le code de l’action sociale et des familles. Le secteur médico-social associatif prend
en charge 62,4% des places dans le secteur de l’aide sociale à l’enfance et de la protection judiciaire de la jeunesse,
88,5% des places dans le secteur du handicap, et 93,7% dans celui de l’exclusion 1.
Depuis 2009, CHORUM, par l’intermédiaire de CIDES, son centre de ressources et d’action, a mis en place diverses
actions d’accompagnement des établissements adhérents en prévoyance, en matière de prévention des risques 3
professionnels. De même, l’ARACT 2 Nord-Pas-de-Calais a accompagné différents établissements de ce secteur
sur des problématiques telles que celles de l’intégration des nouveaux salariés, de la gestion des âges et des
seniors, de la mise en place du volet social du projet d’établissement, de la prévention des risques. Depuis 2009
plus particulièrement, les demandes sont nombreuses concernant un accompagnement dans la prévention des
risques psychosociaux.
Trois questions reviennent de façon systématique dans les interventions de CHORUM et celles de l’ARACT :
celle de la violence des usagers, celle de l’usure des professionnels (l’ancienneté est importante, parfois 20 ou
30 ans sur le même poste, dans le même établissement, avec les mêmes usagers), celle des transformations
du secteur liées aux évolutions législatives (principalement la loi 2002-2) et leurs impacts sur le travail.
Pour y répondre, il était nécessaire de disposer d’outils de prévention adaptés. C’est pourquoi CIDES et
l’ARACT Nord/Pas-de-Calais, dans le cadre du projet « Prévention des risques psychosociaux dans le
secteur médico-social », ont décidé de développer et de diffuser un outil permettant la mise en œuvre
de démarches de prévention des risques psychosociaux dans les établissements de ce secteur.
_______________________
1 : « Les activités et les métiers du secteur social, médico-social et de la petite enfance », version 1, juillet 2009,
DGAS, Ministère du Travail, des Relations Sociales, de la Famille, des Solidarités et de la Ville, page 9.
2 : Association régionale pour l’amélioration des conditions de travail. Voir page 73.
6. Le guide que vous allez découvrir a été réalisé grâce à plusieurs associations, qui ont
accepté d’expérimenter une démarche de prévention des risques psychosociaux modélisée
par l’ARACT Nord/Pas-de-Calais et par CIDES, et d’autres qui ont participé à la validation de ces
travaux.
La première partie fait le point sur les risques psychosociaux. En comprendre les enjeux constitue
la première étape de toute démarche de prévention.
La deuxième partie du guide précise ce qui va fonder la démarche à mettre en place, et les conditions
de sa mise en œuvre.
La troisième partie présente l’ensemble des étapes concrètes de la démarche proposée : conditions de
lancement, mise en place d’un comité de pilotage, identification des animateurs de la démarche, mise en place et
conduite de groupes de travail, restitution des travaux, passage au plan d’action, évaluation, etc.
La quatrième partie fait le point sur quelques situations rencontrées dans le cadre des accompagnements.
Enfin, la cinquième partie du guide aborde la question de l’accompagnement éventuel par un intervenant
6 extérieur.
Tout au long du guide, des « fiches-repères » viennent compléter les éléments de méthode présentés. L’objectif est
d’apporter des précisions sur les risques psychosociaux : obligations légales, modèle de compréhension, rôle du
CHSCT, etc. Il s’agit également de guider le lecteur et les acteurs dans l’entreprise dans la mise en place concrète
de la démarche : système de veille, présentation de la démarche aux salariés, sensibilisation des participants, etc.
Nous vous en souhaitons bonne lecture.
Perrine HANICOTTE, Chargée de mission, ARACT Nord/Pas-de-Calais
Emmanuelle PARADIS, Chef de projet « Prévention des risques professionnels », CIDES
7. Partie 1 :
Comprendre les
Comprendre les
risques psychosociaux
risques psychosociaux
[1. 1.] - Quels liens avec le travail, quelles conséquences pour la santé ? p. 08
[1. 2.] - Comment prévenir les risques psychosociaux ? p. 09
- Fiche-repères « Modèle de compréhension des risques psychosociaux » p. 12
12. Fiche-repères
Modèle de compréhension des risques psychosociaux
Que signifie l’évaluation des risques professionnels lorsqu’il s’agit de risques psychosociaux ?
Comment identifier, décrire et analyser ces risques ?
L’ANACT a mis en place un modèle d’analyse des risques psychosociaux permettant d’appréhender leur
complexité et de repérer leurs causes, pour guider l’action : l’approche contraintes - ressources - régulations.
Ce modèle permet de remonter aux causes, toujours plurielles, des risques psychosociaux, en aidant à repérer
les décalages trop importants entre les objectifs et les exigences des établissements et ceux des salariés. Ces
décalages s’expriment dans les situations de travail et se comprennent en référence à ces situations de travail.
C’est pourquoi l’outil principal dans les démarches de prévention des risques psychosociaux reste le travail tel
qu’il se fait vraiment et tel qu’il se vit par les salariés. Il existe toujours une différence entre le travail demandé
à un salarié par une direction ou un responsable (travail prescrit) et le travail tel que le fait le salarié (travail
réel). Cette différence s’explique par une variabilité, forte dans les établissements du médico-social. Dans ce
secteur, les aléas sont nombreux, notamment ceux liés aux situations ou demandes spécifiques de l’usager, de
sa famille, des tutelles, des partenaires. Ces situations ou demandes ne sont pas forcément anticipées ou ne
peuvent pas l’être. Ce sont ces variabilités qui sont susceptibles de creuser des décalages, voire de créer des
contradictions, entre ce qui est demandé et ce qui peut être fait ou encore entre ce que souhaite faire le salarié
et ce qu’il est amené à faire ou ce qu’on lui demande de faire. Dans le schéma suivant, la notion de situation
de travail reprend à la fois le travail tel qu’il se fait vraiment mais aussi le rapport au travail. Pour se saisir de
12 ce travail réel, pour comprendre ces variabilités et ces contradictions, susceptibles de générer des risques
psychosociaux, les démarches de prévention supposent une dimension participative forte.
[ Fiche-repères - Modèle de compréhension des risques psychosociaux ]
Pour comprendre cette tension entre les objectifs et exigences des salariés et ceux des établissements, et agir
dessus, il faut repérer les éléments qui influencent cette relation. Ces éléments, qui peuvent aggraver (facteurs
de contraintes) ou réduire (facteurs-ressources) cette tension entre salariés et établissements, sont regroupés
en quatre catégories.
Les objectifs et exigences de l’établissement : il s’agit du cadre du travail défini par la direction,
l’encadrement, et en partie par les autorités de tutelle de ces établissements qui relèvent d’une économie
administrée. Plus précisément, ces objectifs et exigences prennent corps dans l’organisation du travail
(répartition du travail entre les différentes fonctions, temps de travail, charge de travail, travail attendu,
exigences dans la réalisation du service : démarche qualité, quantité, etc.), la gestion des ressources
humaines et le management (formes d’emploi, rémunération, formation, parcours professionnel, évaluation,
etc.), l’environnement de travail (espaces de travail, moyens de communication, outils informatiques, etc.).
Les objectifs et exigences des salariés eux-mêmes font référence aux conditions permettant de faire
de la réalisation du travail une occasion de se réaliser, ou du moins de ne pas se sentir en contradiction
avec soi. Il s’agit des exigences en termes d’autonomie, de qualité et de sens du travail et donc des moyens
permettant de réaliser un travail de qualité selon les critères des salariés (moyens notamment liés à la
quantité de travail ou à la charge de travail), de valeurs professionnelles et d’éthique, de reconnaissance
et de sentiment de justice, de participation, d’intégration, de développement des compétences, de stabilité
d’emploi et de construction de parcours professionnels, d’équilibre entre vie au travail et vie hors travail.
Le contexte socio-économique et les changements font référence à l’identité de l’établissement, son
histoire, sa culture, son projet, ses perspectives. Il s’agit aussi de rendre compte des changements : de leur
nature, de leur fréquence, de leur sens, des modes d’association des salariés.
13. Fiche-repères
Modèle de compréhension des risques psychosociaux
Le contexte des relations professionnelles et des relations à l’occasion du travail constitue un
élément déterminant de la relation, voire de la tension, entre les salariés et l’établissement. Il s’agit des
relations entre collègues (possibilité de travail collectif, de coopération, de soutien social), des relations à
l’encadrement (taux d’encadrement, rôle attribué à l’encadrement, formes de soutien, formes de contrôle,
etc.), des relations aux bénéficiaires (nature de la relation, fréquence, qualité de la relation, relations à la
famille des bénéficiaires, etc.), des relations aux représentants du personnel et syndicaux (soutien possible,
rôle effectif, etc.).
Contexte socio-
éco et des
changements
Objectifs et Objectifs et
exigences de Situations exigences des
l’organisation de travail salariés
Contexte des relations
professionnelles et réseau
13
relations à l’occasion
du travail
Ce modèle permet de mettre en relation les contraintes susceptibles, à terme, de porter atteinte à la santé.
En effet, il existe des facteurs qui contribuent à augmenter les tensions entre les salariés et l’établissement, à
affaiblir le sens donné au travail, à un désengagement, à dégrader la santé. Ce sont ces facteurs de contraintes
qu’il faut repérer pour agir dessus : une rationalisation budgétaire plus présente associée à une exigence
qualité plus grande, un temps plus important consacré aux activités de gestion et administratives et un temps
plus réduit pour la relation directe à l’usager…
Mais le seul travail sur les contraintes ne peut permettre de réduire les risques psychosociaux, s’il n’est pas
complété par un travail sur les ressources. En effet, le plus souvent, malgré les contraintes, le salarié réalise
son travail en s’appuyant sur différentes ressources (sa formation, son expérience, ses valeurs mais aussi ses
collègues, son supérieur hiérarchique, les moyens qui lui sont alloués, etc.). Il faut donc également rechercher
ces facteurs-ressources qui contribuent à mettre ou remettre du lien entre les salariés et l’établissement, à
augmenter ou entretenir la capacité à réaliser son travail, un travail qui fait sens.
Lorsque les facteurs de contraintes sont trop importants, que les facteurs-ressources sont insuffisants ou qu’ils
ne peuvent être effectivement mobilisés, le travail pourra avoir des conséquences importantes pour la santé
des salariés et l’efficacité des établissements. Repérer collectivement ces situations à risque, c’est-à-dire des
situations de débordement ou d’impasse, est une étape essentielle pour remonter aux causes et agir dessus.
14. Fiche-repères
Modèle de compréhension des risques psychosociaux
L’objectif des démarches de prévention des risques psychosociaux est donc de s’assurer que la combinaison
entre les facteurs de contraintes et les facteurs-ressources permet de protéger la santé des salariés en même
temps que la qualité de service, en :
vérifiant que les ressources existantes soient effectivement mobilisables en situation de travail (ce qui fait
référence à la notion de régulation) ;
développant des ressources manquantes ;
réduisant ou modifiant les contraintes de travail.
Ce modèle qui se base sur la nécessité d’échanger sur le travail concret et réel est un moyen de mettre en
débat ce qui est attendu par l’organisation et ce qui est attendu par les salariés.
14
15. Partie 2 :
Pourquoi mettre en place
Pourquoi place
une démarche de prévention
une démarche prévention
des risques psychosociaux ?
des psychosociaux ?
[2. 1.] - Risques psychosociaux :
quelles spécificités du secteur médico-social ? p. 16
[2. 2.] - Au-delà de l’obligation légale,
quels sont les enjeux de la prévention ? p. 19
[2. 3.] - « Quand » agir contre les risques psychosociaux ? p. 22
[2. 4.] - Le passage d’un questionnaire est-il un point d’appui ? p. 24
27. Partie 3 :
Mettre en place
place
une démarche de prévention
une démarche prévention
[3. 1.] - Conditions de lancement de la démarche p. 29
- Fiche-repères « La responsabilité de l’employeur
en matière de santé au travail » p. 31
- Fiche-repères « La veille » p. 33
- Fiche-repères « Les moyens d’action du CHSCT » p. 35
[3. 2.] - Premières phases de travail du comité de pilotage p. 37
[3. 3.] - Mise en oeuvre et lancement de la démarche p. 39
- Fiche-repères « L’appel au volontariat » p. 42
- Fiche-repères « La présentation de la démarche aux salarié » p. 43
[3. 4.] - Animation des groupes de travail p. 45
- Fiche-repères « La grille d’analyse
des facteurs de risques psychosociaux » p. 51
[3. 5.] - Exploitation des résultats, passage à l’action p. 54
[3. 6.] - Suivi de la démarche p. 56
- Fiche-repères « Exemple de questionnaire
de suivi utilisé dans une assoiation » p. 57