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Monsieur Seong-Phil Hong,
Président-Rapporteur
du Groupe de Travail sur la Détention Arbitraire,
Haut Commissariat des Nations Unies
pour les Droits de l’Homme
Palais des Nations
1211 Genève, 10
Suisse
NOTE
DU GOUVERNEMENT DU SENEGAL
AU
GROUPE DE TRAVAIL SUR LA DETENTION ARBITRAIRE
(Au sujet de sujet de l’Avis n° 4/2015 (Sénégal) adopté par le Groupe le 20 avril
2015)
Le Gouvernement de la République du Sénégal accuse réception de la lettre du
Président-Rapporteur du Groupe de Travail sur la détention arbitraire, datée du 15 mai
2015, par laquelle il lui transmet l’avis n° 4/2015 (Sénégal) adopté le 20 avril
2015 par le distingué Groupe et l’en remercie.
Qu’il soit cependant permis, de prime abord, de souligner que cet avis ne
laisse pas de surprendre tant par les éléments factuels et de droit qu’il consigne
que par la démarche empruntée par ledit groupe en vue de son élaboration et de
son adoption.
Dans l’appréciation de cet avis, ne sera ici pris en considération,
essentiellement, que les règles qui constituent le corpus des « Méthodes de
Travail » révisées du Groupe (Doc. A/HRC/16/47) et la pratique consolidée de
celui-ci qui, au demeurant, fait jurisprudence.
Il importe de relever que l’analyse de l’application, en l’espèce, de ces
règles et méthodes, suffirait amplement pour révéler la dimension hasardeuse de
la démarche du Groupe et le caractère tendancieux de l’avis rendu, tant auront
été largement ignorés ou écartés les principes fondamentaux du contradictoire et
du traitement équitable.
I - SUR LA DEMARCHE DU GROUPE DE TRAVAIL AYANT CONDUIT A NE
PAS TENIR COMPTE DES ELEMENTS DE REPONSE DU SENEGAL
Les éléments de réponse apportés par le Sénégal au résumé du cas soumis au Groupe
de Travail et transmis par son Président-Rapporteur par lettre datée du 25 juin 2014,
ont été communiqués audit Groupe par la Mission Permanente du Sénégal auprès de
l’Office des Nations Unies à Genève le 26 août 2014, soit le lendemain de l’expiration
du délai de deux mois retenu par le Groupe de Travail.
Contre toute attente, le Groupe de Travail, qui ne pouvait avoir entamé l’examen du
cas soumis avant l’échéance du délai de réponse, a pourtant décidé d’écarter la
réponse du Sénégal en s’appuyant sur le motif qu’elle serait parvenue à son secrétariat
le lendemain de l’expiration de ce délai.
L’éclairage que paraît jeter le Groupe de Travail, lui-même, sur le fondement de
l’extrême sévérité de la sanction qu’il a ainsi décidé d’appliquer, apparaît à la lecture
du passage de l’avis figurant dans son paragraphe 22 qui énonce que : « cette réponse
n’a été soumise au secrétariat du Groupe de travail que le 26 août 2015, sans que le
Gouvernement n’ait solllicité des délais supplémentaires ni apporté quelque
explication».
Cette dernière indication laisse entendre que l’irrecevabilité, à ce stade, n’était pas
obligatoirement constituée ou établie et que des « explications » auraient pu justifier la
prise en compte des réponses du Sénégal. Un tel constat ne laisse pas d’étonner quant
à la place et à l’importance que le Groupe de Travail réserverait, dans la mise en
œuvre de son mandat, à la coopération des Etats avec un mécanisme aussi utile que ce
Groupe et avec une institution aussi pertinente que le Conseil des Droits de l’Homme
eu égard à son rôle dans la promotion d’un dialogue universel en faveur des droits
humains.
Pourtant, rien dans les « Méthodes de travail » de ce Groupe n’invite à une telle
rigidité, parfaitement contreproductive. Dans la pratique, les Méthodes de travail du
Groupe se sont plutôt accommodées d’une application la plus souple, dès lors qu’une
telle souplesse permettrait d’accueillir les contributions et éclairages des deux Parties,
de favoriser un courant d’échanges contradictoire entre elles et de garantir les
conditions de transparence, d’équité et d’objectivité nécessaires à la manifestation de
la vérité et à l’élaboration d’un avis équilibré.
Il importe de rappeler que, dans cette affaire, le Président-Rapporteur du Groupe de
travail, dans sa lettre précitée du 25 juin 2014, avait demandé au Gouvernement
sénégalais, au moment de l’informer de la saisine du Groupe par l’autre Partie, de
communiquer ses réponses à ce Groupe « afin (de permettre à ce dernier) d’être en
mesure de rendre un avis sur ce cas ». L’on comprend mal, dès lors, que ce Groupe se
soit volontairement privé des moyens de rendre un tel avis en rejetant les réponses du
Gouvernement et, de décider, néanmoins, de rendre cet avis dans un tel contexte alors
que, dans d’autres cas, il ne s’est pas privé de réclamer et d’obtenir, pour les exploiter,
même hors délai, des réponses plus que tardivement servies.
Il est, dès lors, difficile d’admettre que le traitement des réponses du Gouvernement
soit placé sous l’égide d’un rigorisme nouveau qu’aucune réforme connue des
« Méthodes de travail » du Groupe ne justifie et que la main du hasard aura fait,
contre toute logique, subir au Sénégal.
Un tel accueil réservé aux réponses du Gouvernement semble ainsi jurer d’avec
l’affirmation contenue à ce sujet dans le site des Nations Unies selon laquelle
“le Groupe attache une grande importance au caractère contradictoire de sa
procédure” (Fiche d'information n° 26).
Cet accueil s’oppose totalement, en revanche, au sort qui a été celui d’autres
réponses gouvernementales comme dans l’Affaire François Nyamoya qui a fait l’objet
de l’avis n° 17/2012 (Burundi) adopté par le Groupe de travail à sa 64ème session,
27-31 août 2012. Le Groupe de travail, au paragraphe 25 de ce avis, a recueilli la
réponse de l’Etat burundais, présentée hors délai, en ces termes : « Bien que le
Gouvernement du Burundi n’ait pas répondu à la communication du Groupe de travail
dans les délais prévus selon les méthodes de travail du groupe, le Groupe de travail a
décidé, à titre exceptionnel, de prendre en compte les éléments mis à la disposition du
Groupe avant sa délibération ».
Par ailleurs, le Groupe de travail a déclaré dans l’avis concernant le Sénégal
(paragraphe 23) que jusqu’à sa délibération, il continuait à être alimenté en
informations par “la source” (le plaignant), informations venant préciser sa requête
initiale. De telles informations, contrairement aux Méthodes de travail et au respect dû
au principe du contradictoire, principe général de droit, n’ont jamais été
communiquées à l’Etat du Sénégal.
Dans ces conditions, le Groupe de travail, soucieux du respect du principe du
contradictoire aurait dû œuvrer pour recueillir la réaction du Gouvernement au sujet
de ces informations ou, tout au moins, écarter toute nouvelle information provenant de
la source ou de plusieurs associations ou organismes privés désireux, comme ce fut le
cas, d’influer sur le cours du traitement de la requête soumise au Groupe.
Le Groupe de Travail, contre toute attente, eu égard aux principes fondamentaux
qui structurent ses méthodes de travail et fondent un exercice digne de respect du
mandat qui lui est confié, a préféré garder un silence le plus complet, neuf mois
durant, sur la suite qu’il a entendu réserver aux réponses du Gouvernement sénégalais
qui n’aura même pas reçu le plus simple des « accusés de réception » de ses réponses.
Le Gouvernement s’est ainsi trouvé privé de toute information au sujet de la
Communication et de toute opportunité de poursuivre sa coopération avec ledit
Groupe dans l’intérêt d’un traitement équilibré et équitable du dossier qui lui est
soumis.
Le Gouvernement ne peut manquer de déplorer que le Groupe de travail n’ait pas
fait siennes les recommandations faites dans le « Code de Conduite pour les titulaires
de mandat au titre des procédures spéciales du Conseil des Droits de l’Homme »,
adopté le 18 juin 2007, notamment celle contenue en son Article 13 qui exprime
l’obligation, pour les titulaires de mandat, de veiller « à ce que leurs déclarations sur
la situation des droits de l’homme dans le pays soient en permanence compatibles
avec leur mandat et avec l’intégrité, l’indépendance et l’impartialité qu’exige leur
statut, et soient de nature à instaurer un dialogue constructif entre les parties
prenantes et à favoriser la coopération en vue de promouvoir et protéger les droits de
l’homme » (souligné par la Note).
En conséquence de ce qui précède, l’Etat du Sénégal dénonce avec vigueur le
traitement déséquilibré, incohérent, voire tendancieux et donc inacceptable que
le Groupe a réservé à la cause dont il est saisi.
La démarche regrettable adoptée par le Groupe de travail n’occulte pas quelques
autres remarques péjoratives relativement à des points importants de l’avis.
II – SUR QUELQUES REMARQUES RELATIVES A CERTAINS POINTS DE
L’AVIS
Ces remarques touchent la question du respect, par le Groupe de travail, des limites de
sa propre compétence ainsi que du principe du contradictoire et quelques
approximations affectant sérieusement sa démarche.
1 - Le dépassement des limites de sa compétence par le Groupe de
travail
A travers l’adoption de son avis du 20 avril 2015, le Groupe de travail semble
n’accorder aucun crédit aux juridictions sénégalaises qui ont eu, en toute
indépendance, à se prononcer sur la détention de M. WADE en application de la loi
sénégalaise et des normes internationales applicables. Le Groupe de Travail ne s’est
pas, en effet, limité à émettre un avis sur un cas de détention supposé arbitraire qui lui
a été soumis, mais s’est évertué à jeter une appréciation négative sur les institutions
d’un Etat souverain, membre respecté des Nations Unies, sans prendre le soin d’exiger
les pièces de procédure se rapportant aux allégations de «la source» qui en est
détentrice. Le Groupe de travail, comme dans l’avis précité n°17/2012 (Burundi), se
permet souvent d’infirmer des décisions judiciaires rendues en se livrant à des
développements dignes d’une juridiction d’appel ou de cassation. Ce qui ne sied pas à
un groupe d’experts chargé strictement d’émettre un avis sur le caractère arbitraire ou
non de la détention d’une personne.
2 - Le non respect du principe du contradictoire
La démarche du Groupe de Travail apparaît pour le moins paradoxale quand ce
dernier prend en considération des allégations nouvelles de « la source » qui viennent
en modifier d’autres contenues dans la requête initiale après avoir purement écarté les
éléments de réponse du Sénégal et ce, en dépit de la précaution discursive, qui ne peut
faire diversion et qui lui fait dire que «la source a constamment rapporté des
informations actualisées tant que le Groupe n’avait pas vidé son délibéré. Ces
informations n’ajoutant rien de plus (selon le Groupe) à la substance de la requête
initiale, il n’y avait pas lieu de les communiquer au gouvernement pour une réponse.
Mais certaines de ces informations (toujours selon le Groupe) sont venues préciser la
requête initiale». Le Groupe n’a apporté aucune précision sur le sens et la portée de
ces précisions se rapportant à la requête initiale. Ce mutisme ne saurait écarter un réel
doute, voire une suspicion légitime sur l’objectivité et la célérité de sa décision
consistant à soustraire ces « précisions » de la connaissance du Gouvernement.
La question de la privation de visite au détenu Karim WADE démontre à suffisance la
méthode biaisée de la démarche du Groupe de Travail. A cet égard, il a manifestement
accueilli, dans son avis, la modification des éléments contenus dans la requête initiale
et, plus grave encore, ces précisions et modifications ont été obtenues suivant «la
sollicitation du Groupe de travail, lui-même.
En effet, celui-ci, après avoir écarté la réponse du Sénégal, a procédé à une sorte
d’enquête conciliante en direction et selon la convenance de “la source”. Enquête dont
les résultats n’ont pas été soumis au débat contradictoire.
C’est ainsi qu’au point 7 de l’avis, il est indiqué que d’après “la source”, «depuis le 17
avril 2013, Karim Wade est détenu à la maison d’arrêt et de correction de Rebeuss à
Dakar, et serait dans l’impossiblité de recevoir des visites, mis (sic) à part celle de sa
mère». Cette indication est rigoureusement conforme au texte du paragraphe 5 de la
requête initiale. Toutefois, au point 24 du même avis, le Groupe de Travail retiendra
une nouvelle version de l’allégation consistant dans une série de trois périodes
pendant lesquelles le détenu a eu à recevoir, dans une première phase, 50 visites par
semaine, puis, dans une deuxième phase, un « nombre de visiteurs ... sensiblement
réduit » et, enfin, depuis le début du procès, période pendant laquelle «seule la mère
de Karim Wade aurait pu lui rendre visite, à l’exception, le 11 août, de trois autres
personnes » autorisées à lui rendre visite.
Comment expliquer cette posture du Groupe de Travail qui, après avoir séchement
rejeté les éléments de réponse d’une Partie, peut autoriser, voire inciter l’autre à
articuler des faits différents de ceux initialement énoncés et estimer ne pas devoir
communiquer les élements recueillis au motif surfait qu’ils n’ajouteraient «rien » à la
requête initiale, comme s’il ne saurait y avoir de différence entre une interdiction
générale de visite, sauf pour la mère du détenu et de ses avocats, et un régime ouvert
d’autorisations accordées à cinquante personnes par semaine?. Mais cette présentation
serait moins inquiétante si elle ne reposait pas sur des contrevérités comme le souligne
le relevé des visites établi par l’Administration pénitentiaire (joint à la présente Note),
pour la période allant du 22 mai 2013 au 18 mai 2015, qui révèle que le détenu Karim
Wade a reçu 3246 visites.
Bien plus grave, et pour conclure sur ce qui précède par une remarque générale, il y a
lieu de relever cette méconnaissance notoire par le Groupe de travail d’une règle
fondamentale régissant l’exercice de son mandat et qui interdit l’introduction, dans le
texte d’un avis, de toute modification des termes du document de saisine originelle.
Bien plus, ledit Groupe ne saurait faire figurer de telles inflexions dans le texte de
l’avis, même si le Groupe de travail n’en tire aucune conséquence. Il s’agit-là d’un
principe constant d’une abondante « jurisprudence » du Groupe de travail qui ne
saurait s’accommoder d’entorses manifestes et multiples comme en atteste le texte de
l’avis qui exhibe, sur de nombreux passages à partir du paragraphe 33, outre les
paragraphes 24 et 25 relatifs aux visites, des évocations de substance tirées
d’informations nouvelles souvent contestables et dont aucune n’est portée à la
connaissance du Gouvernement.
3 - Sur quelques approximations dans la démarche du Groupe de travail
• L’avis du Groupe de travail formé après une “discussion” pour le moins
sommaire des arguments présentés apparaît en définitive comme une
compilation d’arguments de « la source » et ceux provenant de quelques
communiqués d’associations de défense des droits de l’homme intéressées,
auxquels le Groupe de travail n’a pas hésité à conférer un crédit le plus
complet.
• Dans les quelques considérants se rapportant à cette “discussion”, le Groupe de
travail estime, notamment au paragraphe 45 de l’avis, que le bénéfice d’une
liberté provisoire accordée à certains des coinculpés durant l’instruction ou
pendant la phase de jugement, peut être considéré comme “une différence de
traitement” entre Karim Wade et les autres prévenus qui ont bénéficié de cette
liberté provisoire, venant ainsi aggraver une prétendue violation du droit à un
procès équitable de Karim Wade.
Or, non seulement les faits qui sont reprochés au prévenu ne sont pas identiques à
ceux concernant les autres codétenus , mais, même à supposer qu’ils le soient, il
d e m e u r e q u e
les personnes souhaitant bénéficier d’une mise en liberté provisoire peuvent présenter
un profil spécifique, notamment sanitaire, qui peut leur faire bénéficier, dans certaines
conditions strictes, d’une telle mesure dont l’octroi n’est pas exclusivement
conditionné par leur situation de codétenus. Au demeurant, Monsieur WADE n’était
pas seul dans la situation qu’il déplore puisqu’un autre prévenu était détenu, comme
lui, jusqu’à la fin de la procédure.
• L’affirmation et l’argument péremptoires dont le Groupe de travail s’approprie
et selon lesquels la deuxième mise en demeure qui a été servie au prévenu
porte sur les mêmes faits, sans que n’aient été exigées les pièces de procédure
qui pourrraient éventuellement en attester et dont «la source» est détentrice,
révèle une certaine précipitation dans la démarche d’endossement du Groupe
aux fins de l’adoption de son avis.
La conclusion de l’avis, en dépit de la référence à des éléments qualifiés de
« crédibles » et de « concordants » fournis par la source, semble ne reposer que sur un
grief de non respect des délais de détention, sans autre souci de précision. Or s’il y a
eu deux mises en demeure, elles correspondent à des faits ou motifs différents de
détention. Ce que le Groupe n’a pas cru devoir vérifier.
III - QUELQUES OBSERVATIONS SUR LES GRIEFS SOULEVÉS PAR “LA
SOURCE”
• Le fait de qualifier une juridiction nationale, en l’occurrence la Cour de
répresssion de l’Enrichissement illicte, de juridiction d’exception sans
démontrer en quoi cette juridiction serait une juridiction d’exception tout en
convenant, comme le Sénégal l’avait d’ailleurs exposé dans sa réponse, que la
poursuite de l’enrichissement illicite doit être encouragée conformément aux
instruments juridiques internationaux pertinents, mérite d’être relevé comme
une incongruité. En effet, cette juridiction est seulement spécialisée dans une
matière déterminée à savoir la répression de l’enrichissement illicite et des
délits connexes.
• A la suite d’une juridiction sous régionale, qui n’était pas habilitée à indiquer la
juridiction compétente pour connaître des faits d’enrichissement illicite
reproché à un ancien Ministre, le Groupe de travail a, comme cette juridiction,
méconnu les limites de sa compétence qui consiste à rechercher le caractère
arbitraire ou non de la détention d’une personne et non à se substituer à
l’appareil judiciaire national qui a eu à se prononcer, dans toutes ses
composantes saisies et à tous les niveaux de la procédure, sur des recours
répétitifs dont l’unique objet était d’empêcher le déroulement normal du
procès.
Cette question de la compétence de la juridiction devant connaître des faits
reprochés à M. WADE est d’ailleurs une illustration parfaite de cet état de fait.
En effet, préconiser la poursuite de la personne, dont le caractère arbitraire de
la détention arbitraire est allégué, par la Haute Cour de Justice, procéde d’une
mauvaise compréhension de l’organisation judiciaire et des mécanismes mis en
place pour la poursuite de cette infraction au Sénégal.
En suivant «la source» dans cette voie, le Groupe s’est laissé entraîner sur un terrain
dont il ignore les contours. Il faut relever à ce propos que la Haute Cour de Justice,
dont la compétence est presque révendiquée dans la requête, est un héritage du droit
français. Elle n’a eu à juger, depuis l’indépendance du Sénégal, qu’une seule affaire.
Elle est composée essentiellement de députés de l’Assemblée Nationale et ses
décisions «ne sont susceptibles, ni d’appel ni de pourvoi en cassation » ; de même,
«les actes de sa Commission d’Instruction ne sont susceptibles d’aucun
recours» (Articles 35 et 23, alinéa 2 de la loi organique n° 2002-10 du 22 février 2002
sur la Haute Cour de Justice).
Cette réclamation relève d’un pur opportunisme procédural car le choix de le traduire
devant cette Haute Cour de justice ne peut en aucun cas être dans l’intérêt de M.
WADE qui a comparu devant une Cour composée de magistrats professionnels de
haut niveau et fonctionnant suivant des règles respectant les principes fondamentaux
de la procédure pénale comme cela a été exposé dans les éléments de réponse
proposés par le Sénégal.
IV - SUR LA SUITE A DONNER A LA NOTIFICATION DE L’AVIS DU
GROUPE DE TRAVAIL
En conclusion de ce qui précède, le Gouvernement de la République du Sénégal,
demande solennellement au distingué Groupe de travail de reconsidérer son avis à la
lumière de la présente contribution et de ses éléments de réponse initiale dont le texte
est de nouveau transmis, ci-joint.
Il souhaite également que le Groupe de travail accède à sa demande d’être convié à
rencontrer, en délegation restreinte, les membres dudit groupe, lors de sa prochaine
session du mois d’août 2015, à Genève. Les rencontres dont la tenue est envisagée
lors de cette session seront mises à profit pour un réel approfondissement des
échanges autour de la saisine dont il est l’objet.
Le Gouvernement remercie d’avance le Groupe de travail pour les dispositions idoines
qu’il voudra bien prendre à cet effet.
Dakar, le 29 mai 2015
DOCUMENTS JOINTS
• Réponses initiales du Gouvernement du Sénégal à la communication adressée
par la Source au Groupe de Travail sur la Détention Arbitraire
• Relevé des visites au détenu Karim WADE infirmant totalement les allégations
d’interdictions de visite de la Source contenues dans sa communication
Sénégal -Groupe de travail Onu

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Sénégal -Groupe de travail Onu

  • 1. Monsieur Seong-Phil Hong, Président-Rapporteur du Groupe de Travail sur la Détention Arbitraire, Haut Commissariat des Nations Unies pour les Droits de l’Homme Palais des Nations 1211 Genève, 10 Suisse NOTE DU GOUVERNEMENT DU SENEGAL AU GROUPE DE TRAVAIL SUR LA DETENTION ARBITRAIRE (Au sujet de sujet de l’Avis n° 4/2015 (Sénégal) adopté par le Groupe le 20 avril 2015) Le Gouvernement de la République du Sénégal accuse réception de la lettre du Président-Rapporteur du Groupe de Travail sur la détention arbitraire, datée du 15 mai 2015, par laquelle il lui transmet l’avis n° 4/2015 (Sénégal) adopté le 20 avril 2015 par le distingué Groupe et l’en remercie. Qu’il soit cependant permis, de prime abord, de souligner que cet avis ne laisse pas de surprendre tant par les éléments factuels et de droit qu’il consigne que par la démarche empruntée par ledit groupe en vue de son élaboration et de son adoption. Dans l’appréciation de cet avis, ne sera ici pris en considération, essentiellement, que les règles qui constituent le corpus des « Méthodes de Travail » révisées du Groupe (Doc. A/HRC/16/47) et la pratique consolidée de celui-ci qui, au demeurant, fait jurisprudence. Il importe de relever que l’analyse de l’application, en l’espèce, de ces règles et méthodes, suffirait amplement pour révéler la dimension hasardeuse de la démarche du Groupe et le caractère tendancieux de l’avis rendu, tant auront été largement ignorés ou écartés les principes fondamentaux du contradictoire et du traitement équitable. I - SUR LA DEMARCHE DU GROUPE DE TRAVAIL AYANT CONDUIT A NE PAS TENIR COMPTE DES ELEMENTS DE REPONSE DU SENEGAL Les éléments de réponse apportés par le Sénégal au résumé du cas soumis au Groupe de Travail et transmis par son Président-Rapporteur par lettre datée du 25 juin 2014,
  • 2. ont été communiqués audit Groupe par la Mission Permanente du Sénégal auprès de l’Office des Nations Unies à Genève le 26 août 2014, soit le lendemain de l’expiration du délai de deux mois retenu par le Groupe de Travail. Contre toute attente, le Groupe de Travail, qui ne pouvait avoir entamé l’examen du cas soumis avant l’échéance du délai de réponse, a pourtant décidé d’écarter la réponse du Sénégal en s’appuyant sur le motif qu’elle serait parvenue à son secrétariat le lendemain de l’expiration de ce délai. L’éclairage que paraît jeter le Groupe de Travail, lui-même, sur le fondement de l’extrême sévérité de la sanction qu’il a ainsi décidé d’appliquer, apparaît à la lecture du passage de l’avis figurant dans son paragraphe 22 qui énonce que : « cette réponse n’a été soumise au secrétariat du Groupe de travail que le 26 août 2015, sans que le Gouvernement n’ait solllicité des délais supplémentaires ni apporté quelque explication». Cette dernière indication laisse entendre que l’irrecevabilité, à ce stade, n’était pas obligatoirement constituée ou établie et que des « explications » auraient pu justifier la prise en compte des réponses du Sénégal. Un tel constat ne laisse pas d’étonner quant à la place et à l’importance que le Groupe de Travail réserverait, dans la mise en œuvre de son mandat, à la coopération des Etats avec un mécanisme aussi utile que ce Groupe et avec une institution aussi pertinente que le Conseil des Droits de l’Homme eu égard à son rôle dans la promotion d’un dialogue universel en faveur des droits humains. Pourtant, rien dans les « Méthodes de travail » de ce Groupe n’invite à une telle rigidité, parfaitement contreproductive. Dans la pratique, les Méthodes de travail du Groupe se sont plutôt accommodées d’une application la plus souple, dès lors qu’une telle souplesse permettrait d’accueillir les contributions et éclairages des deux Parties, de favoriser un courant d’échanges contradictoire entre elles et de garantir les conditions de transparence, d’équité et d’objectivité nécessaires à la manifestation de la vérité et à l’élaboration d’un avis équilibré. Il importe de rappeler que, dans cette affaire, le Président-Rapporteur du Groupe de travail, dans sa lettre précitée du 25 juin 2014, avait demandé au Gouvernement sénégalais, au moment de l’informer de la saisine du Groupe par l’autre Partie, de communiquer ses réponses à ce Groupe « afin (de permettre à ce dernier) d’être en mesure de rendre un avis sur ce cas ». L’on comprend mal, dès lors, que ce Groupe se soit volontairement privé des moyens de rendre un tel avis en rejetant les réponses du Gouvernement et, de décider, néanmoins, de rendre cet avis dans un tel contexte alors que, dans d’autres cas, il ne s’est pas privé de réclamer et d’obtenir, pour les exploiter, même hors délai, des réponses plus que tardivement servies. Il est, dès lors, difficile d’admettre que le traitement des réponses du Gouvernement
  • 3. soit placé sous l’égide d’un rigorisme nouveau qu’aucune réforme connue des « Méthodes de travail » du Groupe ne justifie et que la main du hasard aura fait, contre toute logique, subir au Sénégal. Un tel accueil réservé aux réponses du Gouvernement semble ainsi jurer d’avec l’affirmation contenue à ce sujet dans le site des Nations Unies selon laquelle “le Groupe attache une grande importance au caractère contradictoire de sa procédure” (Fiche d'information n° 26). Cet accueil s’oppose totalement, en revanche, au sort qui a été celui d’autres réponses gouvernementales comme dans l’Affaire François Nyamoya qui a fait l’objet de l’avis n° 17/2012 (Burundi) adopté par le Groupe de travail à sa 64ème session, 27-31 août 2012. Le Groupe de travail, au paragraphe 25 de ce avis, a recueilli la réponse de l’Etat burundais, présentée hors délai, en ces termes : « Bien que le Gouvernement du Burundi n’ait pas répondu à la communication du Groupe de travail dans les délais prévus selon les méthodes de travail du groupe, le Groupe de travail a décidé, à titre exceptionnel, de prendre en compte les éléments mis à la disposition du Groupe avant sa délibération ». Par ailleurs, le Groupe de travail a déclaré dans l’avis concernant le Sénégal (paragraphe 23) que jusqu’à sa délibération, il continuait à être alimenté en informations par “la source” (le plaignant), informations venant préciser sa requête initiale. De telles informations, contrairement aux Méthodes de travail et au respect dû au principe du contradictoire, principe général de droit, n’ont jamais été communiquées à l’Etat du Sénégal. Dans ces conditions, le Groupe de travail, soucieux du respect du principe du contradictoire aurait dû œuvrer pour recueillir la réaction du Gouvernement au sujet de ces informations ou, tout au moins, écarter toute nouvelle information provenant de la source ou de plusieurs associations ou organismes privés désireux, comme ce fut le cas, d’influer sur le cours du traitement de la requête soumise au Groupe. Le Groupe de Travail, contre toute attente, eu égard aux principes fondamentaux qui structurent ses méthodes de travail et fondent un exercice digne de respect du mandat qui lui est confié, a préféré garder un silence le plus complet, neuf mois durant, sur la suite qu’il a entendu réserver aux réponses du Gouvernement sénégalais qui n’aura même pas reçu le plus simple des « accusés de réception » de ses réponses. Le Gouvernement s’est ainsi trouvé privé de toute information au sujet de la Communication et de toute opportunité de poursuivre sa coopération avec ledit Groupe dans l’intérêt d’un traitement équilibré et équitable du dossier qui lui est soumis. Le Gouvernement ne peut manquer de déplorer que le Groupe de travail n’ait pas fait siennes les recommandations faites dans le « Code de Conduite pour les titulaires
  • 4. de mandat au titre des procédures spéciales du Conseil des Droits de l’Homme », adopté le 18 juin 2007, notamment celle contenue en son Article 13 qui exprime l’obligation, pour les titulaires de mandat, de veiller « à ce que leurs déclarations sur la situation des droits de l’homme dans le pays soient en permanence compatibles avec leur mandat et avec l’intégrité, l’indépendance et l’impartialité qu’exige leur statut, et soient de nature à instaurer un dialogue constructif entre les parties prenantes et à favoriser la coopération en vue de promouvoir et protéger les droits de l’homme » (souligné par la Note). En conséquence de ce qui précède, l’Etat du Sénégal dénonce avec vigueur le traitement déséquilibré, incohérent, voire tendancieux et donc inacceptable que le Groupe a réservé à la cause dont il est saisi. La démarche regrettable adoptée par le Groupe de travail n’occulte pas quelques autres remarques péjoratives relativement à des points importants de l’avis. II – SUR QUELQUES REMARQUES RELATIVES A CERTAINS POINTS DE L’AVIS Ces remarques touchent la question du respect, par le Groupe de travail, des limites de sa propre compétence ainsi que du principe du contradictoire et quelques approximations affectant sérieusement sa démarche. 1 - Le dépassement des limites de sa compétence par le Groupe de travail A travers l’adoption de son avis du 20 avril 2015, le Groupe de travail semble n’accorder aucun crédit aux juridictions sénégalaises qui ont eu, en toute indépendance, à se prononcer sur la détention de M. WADE en application de la loi sénégalaise et des normes internationales applicables. Le Groupe de Travail ne s’est pas, en effet, limité à émettre un avis sur un cas de détention supposé arbitraire qui lui a été soumis, mais s’est évertué à jeter une appréciation négative sur les institutions d’un Etat souverain, membre respecté des Nations Unies, sans prendre le soin d’exiger les pièces de procédure se rapportant aux allégations de «la source» qui en est détentrice. Le Groupe de travail, comme dans l’avis précité n°17/2012 (Burundi), se permet souvent d’infirmer des décisions judiciaires rendues en se livrant à des développements dignes d’une juridiction d’appel ou de cassation. Ce qui ne sied pas à un groupe d’experts chargé strictement d’émettre un avis sur le caractère arbitraire ou non de la détention d’une personne. 2 - Le non respect du principe du contradictoire La démarche du Groupe de Travail apparaît pour le moins paradoxale quand ce dernier prend en considération des allégations nouvelles de « la source » qui viennent
  • 5. en modifier d’autres contenues dans la requête initiale après avoir purement écarté les éléments de réponse du Sénégal et ce, en dépit de la précaution discursive, qui ne peut faire diversion et qui lui fait dire que «la source a constamment rapporté des informations actualisées tant que le Groupe n’avait pas vidé son délibéré. Ces informations n’ajoutant rien de plus (selon le Groupe) à la substance de la requête initiale, il n’y avait pas lieu de les communiquer au gouvernement pour une réponse. Mais certaines de ces informations (toujours selon le Groupe) sont venues préciser la requête initiale». Le Groupe n’a apporté aucune précision sur le sens et la portée de ces précisions se rapportant à la requête initiale. Ce mutisme ne saurait écarter un réel doute, voire une suspicion légitime sur l’objectivité et la célérité de sa décision consistant à soustraire ces « précisions » de la connaissance du Gouvernement. La question de la privation de visite au détenu Karim WADE démontre à suffisance la méthode biaisée de la démarche du Groupe de Travail. A cet égard, il a manifestement accueilli, dans son avis, la modification des éléments contenus dans la requête initiale et, plus grave encore, ces précisions et modifications ont été obtenues suivant «la sollicitation du Groupe de travail, lui-même. En effet, celui-ci, après avoir écarté la réponse du Sénégal, a procédé à une sorte d’enquête conciliante en direction et selon la convenance de “la source”. Enquête dont les résultats n’ont pas été soumis au débat contradictoire. C’est ainsi qu’au point 7 de l’avis, il est indiqué que d’après “la source”, «depuis le 17 avril 2013, Karim Wade est détenu à la maison d’arrêt et de correction de Rebeuss à Dakar, et serait dans l’impossiblité de recevoir des visites, mis (sic) à part celle de sa mère». Cette indication est rigoureusement conforme au texte du paragraphe 5 de la requête initiale. Toutefois, au point 24 du même avis, le Groupe de Travail retiendra une nouvelle version de l’allégation consistant dans une série de trois périodes pendant lesquelles le détenu a eu à recevoir, dans une première phase, 50 visites par semaine, puis, dans une deuxième phase, un « nombre de visiteurs ... sensiblement réduit » et, enfin, depuis le début du procès, période pendant laquelle «seule la mère de Karim Wade aurait pu lui rendre visite, à l’exception, le 11 août, de trois autres personnes » autorisées à lui rendre visite. Comment expliquer cette posture du Groupe de Travail qui, après avoir séchement rejeté les éléments de réponse d’une Partie, peut autoriser, voire inciter l’autre à articuler des faits différents de ceux initialement énoncés et estimer ne pas devoir communiquer les élements recueillis au motif surfait qu’ils n’ajouteraient «rien » à la requête initiale, comme s’il ne saurait y avoir de différence entre une interdiction générale de visite, sauf pour la mère du détenu et de ses avocats, et un régime ouvert d’autorisations accordées à cinquante personnes par semaine?. Mais cette présentation serait moins inquiétante si elle ne reposait pas sur des contrevérités comme le souligne le relevé des visites établi par l’Administration pénitentiaire (joint à la présente Note), pour la période allant du 22 mai 2013 au 18 mai 2015, qui révèle que le détenu Karim
  • 6. Wade a reçu 3246 visites. Bien plus grave, et pour conclure sur ce qui précède par une remarque générale, il y a lieu de relever cette méconnaissance notoire par le Groupe de travail d’une règle fondamentale régissant l’exercice de son mandat et qui interdit l’introduction, dans le texte d’un avis, de toute modification des termes du document de saisine originelle. Bien plus, ledit Groupe ne saurait faire figurer de telles inflexions dans le texte de l’avis, même si le Groupe de travail n’en tire aucune conséquence. Il s’agit-là d’un principe constant d’une abondante « jurisprudence » du Groupe de travail qui ne saurait s’accommoder d’entorses manifestes et multiples comme en atteste le texte de l’avis qui exhibe, sur de nombreux passages à partir du paragraphe 33, outre les paragraphes 24 et 25 relatifs aux visites, des évocations de substance tirées d’informations nouvelles souvent contestables et dont aucune n’est portée à la connaissance du Gouvernement. 3 - Sur quelques approximations dans la démarche du Groupe de travail • L’avis du Groupe de travail formé après une “discussion” pour le moins sommaire des arguments présentés apparaît en définitive comme une compilation d’arguments de « la source » et ceux provenant de quelques communiqués d’associations de défense des droits de l’homme intéressées, auxquels le Groupe de travail n’a pas hésité à conférer un crédit le plus complet. • Dans les quelques considérants se rapportant à cette “discussion”, le Groupe de travail estime, notamment au paragraphe 45 de l’avis, que le bénéfice d’une liberté provisoire accordée à certains des coinculpés durant l’instruction ou pendant la phase de jugement, peut être considéré comme “une différence de traitement” entre Karim Wade et les autres prévenus qui ont bénéficié de cette liberté provisoire, venant ainsi aggraver une prétendue violation du droit à un procès équitable de Karim Wade. Or, non seulement les faits qui sont reprochés au prévenu ne sont pas identiques à ceux concernant les autres codétenus , mais, même à supposer qu’ils le soient, il d e m e u r e q u e les personnes souhaitant bénéficier d’une mise en liberté provisoire peuvent présenter un profil spécifique, notamment sanitaire, qui peut leur faire bénéficier, dans certaines conditions strictes, d’une telle mesure dont l’octroi n’est pas exclusivement conditionné par leur situation de codétenus. Au demeurant, Monsieur WADE n’était pas seul dans la situation qu’il déplore puisqu’un autre prévenu était détenu, comme lui, jusqu’à la fin de la procédure. • L’affirmation et l’argument péremptoires dont le Groupe de travail s’approprie et selon lesquels la deuxième mise en demeure qui a été servie au prévenu
  • 7. porte sur les mêmes faits, sans que n’aient été exigées les pièces de procédure qui pourrraient éventuellement en attester et dont «la source» est détentrice, révèle une certaine précipitation dans la démarche d’endossement du Groupe aux fins de l’adoption de son avis. La conclusion de l’avis, en dépit de la référence à des éléments qualifiés de « crédibles » et de « concordants » fournis par la source, semble ne reposer que sur un grief de non respect des délais de détention, sans autre souci de précision. Or s’il y a eu deux mises en demeure, elles correspondent à des faits ou motifs différents de détention. Ce que le Groupe n’a pas cru devoir vérifier. III - QUELQUES OBSERVATIONS SUR LES GRIEFS SOULEVÉS PAR “LA SOURCE” • Le fait de qualifier une juridiction nationale, en l’occurrence la Cour de répresssion de l’Enrichissement illicte, de juridiction d’exception sans démontrer en quoi cette juridiction serait une juridiction d’exception tout en convenant, comme le Sénégal l’avait d’ailleurs exposé dans sa réponse, que la poursuite de l’enrichissement illicite doit être encouragée conformément aux instruments juridiques internationaux pertinents, mérite d’être relevé comme une incongruité. En effet, cette juridiction est seulement spécialisée dans une matière déterminée à savoir la répression de l’enrichissement illicite et des délits connexes. • A la suite d’une juridiction sous régionale, qui n’était pas habilitée à indiquer la juridiction compétente pour connaître des faits d’enrichissement illicite reproché à un ancien Ministre, le Groupe de travail a, comme cette juridiction, méconnu les limites de sa compétence qui consiste à rechercher le caractère arbitraire ou non de la détention d’une personne et non à se substituer à l’appareil judiciaire national qui a eu à se prononcer, dans toutes ses composantes saisies et à tous les niveaux de la procédure, sur des recours répétitifs dont l’unique objet était d’empêcher le déroulement normal du procès. Cette question de la compétence de la juridiction devant connaître des faits reprochés à M. WADE est d’ailleurs une illustration parfaite de cet état de fait. En effet, préconiser la poursuite de la personne, dont le caractère arbitraire de la détention arbitraire est allégué, par la Haute Cour de Justice, procéde d’une mauvaise compréhension de l’organisation judiciaire et des mécanismes mis en place pour la poursuite de cette infraction au Sénégal. En suivant «la source» dans cette voie, le Groupe s’est laissé entraîner sur un terrain dont il ignore les contours. Il faut relever à ce propos que la Haute Cour de Justice,
  • 8. dont la compétence est presque révendiquée dans la requête, est un héritage du droit français. Elle n’a eu à juger, depuis l’indépendance du Sénégal, qu’une seule affaire. Elle est composée essentiellement de députés de l’Assemblée Nationale et ses décisions «ne sont susceptibles, ni d’appel ni de pourvoi en cassation » ; de même, «les actes de sa Commission d’Instruction ne sont susceptibles d’aucun recours» (Articles 35 et 23, alinéa 2 de la loi organique n° 2002-10 du 22 février 2002 sur la Haute Cour de Justice). Cette réclamation relève d’un pur opportunisme procédural car le choix de le traduire devant cette Haute Cour de justice ne peut en aucun cas être dans l’intérêt de M. WADE qui a comparu devant une Cour composée de magistrats professionnels de haut niveau et fonctionnant suivant des règles respectant les principes fondamentaux de la procédure pénale comme cela a été exposé dans les éléments de réponse proposés par le Sénégal. IV - SUR LA SUITE A DONNER A LA NOTIFICATION DE L’AVIS DU GROUPE DE TRAVAIL En conclusion de ce qui précède, le Gouvernement de la République du Sénégal, demande solennellement au distingué Groupe de travail de reconsidérer son avis à la lumière de la présente contribution et de ses éléments de réponse initiale dont le texte est de nouveau transmis, ci-joint. Il souhaite également que le Groupe de travail accède à sa demande d’être convié à rencontrer, en délegation restreinte, les membres dudit groupe, lors de sa prochaine session du mois d’août 2015, à Genève. Les rencontres dont la tenue est envisagée lors de cette session seront mises à profit pour un réel approfondissement des échanges autour de la saisine dont il est l’objet. Le Gouvernement remercie d’avance le Groupe de travail pour les dispositions idoines qu’il voudra bien prendre à cet effet. Dakar, le 29 mai 2015 DOCUMENTS JOINTS • Réponses initiales du Gouvernement du Sénégal à la communication adressée par la Source au Groupe de Travail sur la Détention Arbitraire • Relevé des visites au détenu Karim WADE infirmant totalement les allégations d’interdictions de visite de la Source contenues dans sa communication