1. L’HYPERTHYROÏDIE
J. BELKHADIR - Hôpital Ibn Sina
Les hyperthyroïdies désignent l’ensemble des hyperfonctionnements thyroïdiens en
rapport avec un accroissement du taux des hormones thyroïdiennes et dont la conséquence est
la thyrotoxicose.
SYMPTOMATOLOGIE CLINIQUE :
FORMES TYPIQUES :
Le tableau clinique est très évocateur :
- amaigrissement rapide contrastant avec une polyphagie paradoxale ;
- tachycardie, palpitations, augmentation de la pression artérielle systolique ;
- asthénie physique, psychique et sexuelle ;
- thermophobie et hypersudation ;
- irritabilité, tremblements, insomnies ;
- diarrhée.
FORMES FRUSTES ET TROMPEUSES :
Elles sont nombreuses et le diagnostic doit être évoqué devant :
- formes cardiaques avec extrasystoles, crises de tachycardie paroxystique, fibrillation
auriculaire ;
- formes digestives avec amaigrissement et diarrhée ;
- formes prurigineuses ;
- formes myopathiques pseudoparalytiques
- formes osseuses avec douleurs osseuses, ostéoporose et tassements vertébraux ;
- formes aiguës avec hyperthermie, déshydratation, insuffisance cardiaque
d’installation rapide et agitation.
DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE :
- augmentation du taux des hormones thyroïdiennes : T4 libre (et exceptionnellement T3 libre).
- TSH-US très basse.
- dans les formes frustes, seule la TSH-US est abaissée.
Le biologiste doit indiquer la méthode d’analyse utilisée et préciser les valeurs de
l'intervalle de référence à prendre en compte pour l'interprétation. La méthode de dosage de la
TSH fait appel de préférence aux dosages de 3ème
génération.
FORMES ÉTIOLOGIQUES :
Le tableau d’hyperthyroïdie est commun à ces différentes formes.
MALADIE DE BASEDOW : est la cause la plus fréquente et la plus typique de
l’hyperthyroïdie. On retrouve un goitre vasculaire, des signes ophtalmologiques (exophtalmie,
rétraction palpébrale, œdème des paupières) et parfois des signes cutanées (myxoedème
prétibial).
2. NODULE ET GOITRE MULTINODULAIRE TOXIQUE : se caractérisent par la
présence respectivement d’un nodule et d’un goitre multinodulaire hyperfixant à la
cartographie thyroïdienne.
HYPERTHYROÏDIE INDUITE PAR SURCHARGE IODÉE : se caractérise par la
baisse de la fixation de l’iode.
THYROTOXICOSE FACTICE avec cartographie thyroïdienne blanche.
TRAITEMENT :
MALADIE DE BASEDOW :
elle est traitée en ambulatoire dans la majorité des cas, l’hospitalisation reste réservée
aux formes graves (troubles du rythme cardiaque, ophtalmopathies sévères, crise aiguë
thyrotoxique).
MOYENS THÉRAPEUTIQUES :
* Traitement Symptomatique
- repos avec arrêt de travail si nécessaire.
- bêtabloquants :
* utilisés pour diminuer les manifestations adrénergiques de l'hyperthyroïdie:
* propanolol (Avlocardyl*, Avlocan*, Betaryl*), inhibe la conversion périphérique
de T4 en T3, cp à 40 mg: 1/2 à 1 cp x 3/j, à adapter selon la fréquence cardiaque.
- anxiolytiques:
* prescription non systématique: benzodiazépines : à petites doses, 2 à 3 fois par jour.
* Traitement médical par antithyroïdiens de synthèse
- examens préthérapeutiques: Béta HCG chez la femme sans contraception, NFS.
- dérivés du mercapto-imidazole : carbimazole: Néo-Mercazole* cp à 5 mg.
- dérivés du thiouracile: propylthiouracile: Propylthiouracile*, cp à 25 mg (non
commercialisé). Intérét: inhibe la désiodation périphérique de T4 en T3.
- modalités de prescription :
* traitement d'attaque de 4 à 6 semaines;
* néo-Mercazole* 40 à 60 mg/j en trois prises;
* diminution progressive des doses tous les 2 à 3 mois en fonction de la clinique et du
contrôle de la T4 libre et de la TSH-US.
- poursuivre par une dose d'entretien habituellement entre 10 et 20 mg de Néo-Mercazole*.
Durée totale variable, en moyenne de 18 mois.
- surveillance:
* NFS (risque agranulocytose) toutes les semaines durant les premiers mois, puis
tous les mois;
* surtout noter sur l'ordonnance: "en cas de fièvre ou d'angine, faire pratiquer une
numération formule sanguine en urgence et communiquer les résultats au médecin
avant de poursuivre le traitement".
- prescrire une contraception chez la femme jeune.
_
- en cas de réaction allergique, prescrire un dérivé du thiouracile.
3. * Traitements radicaux
- chirurgie:
* thyroïdectomie subtotale bilatérale après préparation médicale chez un sujet en
euthyroïdie;
* contre-indiquée en cas d'ophtalmopathie évolutive avec exophtalmie;
* suivie de la prescription d'un traitement substitutif par hormonothérapie
thyroïdienne L-Thyroxine.
- lode radio-actif (iode 131)
• après préparation médicale;
• efficacité retardée (plusieurs mois);
• risques de rechute si dose insuffisante ou d'hypothyroïdie définitive à plus
ou moins long terme, justifiant une surveillance régulière et prolongée.
INDICATIONS :
- Traitement médical toujours en première intention.
- Le traitement radical est discuté:
• en cas de rechutes itératives à l'arrêt du traitement médical bien conduit; en cas
de non observance du traitement médical.
• chez une femme désirant une grossesse rapidement.
* Le choix se portera:
• sur la chirurgie si le goitre est volumineux:
• sur l'iode radio-actif si le goitre est de volume modéré, en cas de contre-
indication chirurgicale ou si le patient refuse l'intervention.
CAS PARTICULIERS :
Femme enceinte
- utiliser le Néo-Mercazole* à faible dose, en moyenne 4 à 6 cp/j et diminuer
progressivement (ou de préférence le PTU qui passe moins la barrière
fœto-placentaire que le Néo-Mercazole*). Il vaut mieux rester à la limite de
l'hyperthyroïdie que de prendre le risque d'une hypothyroïdie néonatale.
- ne jamais associer avec de la Lévothyroxine (Lévothyrox*) qui ne passe pas la
barrière fœtoplacentaire.
Cardiothyréose
- troubles du rythme: indication des bêtabloquants, anticoagulation.
- insuffisance cardiaque: traitement digitalo-diurétique.
Ophtalmopathie
- formes bénignes:
• larmes artificielles;
• collyre à la méthyl-cellulose;
• protection oculaire (lunettes teintées, occlusion palpébrale nocturne par adhésif).
/~ li
- formes sévères:
* soins locaux toujours indiqués;
* corticothérapie (1 mg/kg/j);
* en cas d'échec, discuter d'abord la radiothérapie (associée à la corticothérapie)
puis la chirurgie de :
• décompression orbitaire;
4. • la chirurgie des muscles oculomoteurs (résection des muscles fibrosés
rétractés) ne doit être discutée que lorsque l'état ophtalmologique est
parfaitement stabilisé depuis plusieurs mois.
ADÉNOME TOXIQUE :
- traitement chirurgical après préparation médicale.
- IRAthérapie réservée aux sujets ayant une contre-indication chirurgicale.
- traitement par injections transcutanées intranodulaires répétées d’éthanol, guidées
par échographie.
GOITRE MULTINODULAIRE TOXIQUE :
- traitement chirurgical après préparation médicale.
- IRAthérapie réservée aux sujets ayant une contre-indication chirurgicale.
- chez le sujet âgé, le traitement médical peut être poursuivi à vie.
HYPERTHYROÏDIE PAR SURCHARGE IODÉE :
- formes mineures non compliquées :
* suppression de la surcharge iodée.
* traitement symptomatique (Propanolol).
- formes sévères
* suppression de la surcharge iodée.
* traitement symptomatique.
* Néo-Mercazole* à fortes doses 16 à 20 cp/j ou PTU à forte dose 16 à 24 cp/j.
* surveillance rapprochée (passage en hypothyroïdie lorsque la surcharge iodée
est éliminée).
- formes graves
- néo-Mercazole* à fortes doses 16 à 20 cp/j ou PTU à forte dose 16 à 24 cp/j.
- glucocorticoïdes 0,5 à 1 mg/kg/j.
- perchlorate de potassium 200 à 500 mg x 3 à 4 /j.