Dr MEHRI TURKI IMEN - Traitement du double menton : Une nouvelle technique tu...
Brochure biponews
1. Biponews
Information sur les troubles bipolaires
“J’ai des
troubles
de
l’humeur”
N°01
•BIPONEWS N° 1 //>> 1
2. Ce fascicule est le
“J’ai des
premier de la collection
Biponews destinée aux troubles « J’écris des poèmes et des chansons qui vont être publiés
bientôt. D’ailleurs, je vais aussi ouvrir un cabinet de
patients souffrant de
troubles bipolaires. de coaching. Vous allez chez quel coiffeur ? Je pourrais faire
sa publicité. Vous savez que vous êtes très belle.
Il apporte des
informations sur ces
troubles, leurs causes,
l’humeur” J’ai changé d’assureur. Que je t’aime ! Que je t’aime !
Vous entendez cette voix. Il faut que j’enregistre ce CD ».
leurs conséquences Vous avez peut-être vécu des
et leur prise en charge.
Il peut être lu seul ou choses proches de ce que « Personne ne peut rien pour moi. Mon médecin
avec un proche auquel a testé trois antidépresseurs en vain. Je suis de
décrivent ces personnes qui plus en plus sombre. Il ne me reste qu’à
vous aimeriez
mourir, qu’à en finir. De toute façon personne
expliquer vos troubles. souffrent de troubles bipolaires. ne me regrettera ».
Vous pouvez demander
également des
Sachez avant tout que ces
informations troubles touchent à peu près
complémentaires,
à votre médecin 1 % de la population « Je suis nulle, archi-nulle. Je ne vaux rien et
encore moins que ça. J’ai endetté ma
ou à un infirmier.
générale parmi lesquels des famille. Ma mère a été obligée de demander
une mesure de sauvegarde de justice.
hommes politiques, des artistes J’ai acheté une moto neuve alors que je
n’ai même pas le permis moto. J’ai fait
et des sportifs connus. La n’importe quoi. Je ne mérite pas de vivre.
Jamais mes parents ne pourront me
plupart d’entre eux, une fois la pardonner ça ».
crise passée reprennent leur vie
Auteurs :
Dominique Friard, infirmier sociale et leur activité.
de secteur psychiatrique,
avec la collaboration
d’un psychiatre hospitalier. Vous n’êtes donc pas seul « Avec mon nouveau traitement, je me sens
mieux. Je devrais maintenant avoir moins
à vivre cette expérience. de variations de l’humeur. Même si je me
sens mieux, ma vie est un peu grise.
Certes je n’éprouve pas de grandes peines
mais pas de grandes joies, non plus.
Il paraît que ça va se modifier ça aussi ».
Association d’aide aux personnes atteintes de troubles bipolaires
(maniaco-dépressif) et à leur entourage
Maison des associations du 13ème arrondissement
Association ARGOS 2001 - Boîte postale n° 30
11, rue Caillaux - 75013 Paris
Téléphone-répondeur infos-actualités : 01 69 24 22 90
Email : argos.2001@free.fr - Web : http//argos.2001.free.fr/ •BIPONEWS N° 1 //>> 3
3. Questionnaire
“J’ai des Questionnaire
troubles Qu’entendez-vous par humeur ?
de
l’humeur”
Avez-vous repéré des fluctuations importantes dans votre
humeur ? Si oui, comment se manifestent-elles ?
Essayez d’abord de repérer
ce que vous savez à propos
des troubles de l’humeur dont
font partie les troubles
Comment gérez-vous habituellement ces variations ?
bipolaires (que l’on nomme
aussi psychose maniaco-
dépressive).
Ces variations vous semblent-elles liées à des événements de vie
(heureux ou malheureux), si oui lesquels ?
Que savez-vous à propos du traitement de ces troubles de
l’humeur ?
•BIPONEWS N° 1 //>> 5
4. Repérer
Repérer
Que savez-vous à propos des troubles de l’humeur ? P 04
Quand l’humeur
Repérer
est tout en
Quand l’humeur est tout en haut ou tout en bas P 06 haut ou tout
Comprendre en bas
Les causes multiples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .P 14
1 Il est indispensable de reconnaître ce qui vous arrive
Agir
« Je n’avais plus besoin de dormir, je menais cinq projets à la fois, je
Pour retrouver un équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .P 20 prenais des cours de japonais sur Internet, j’avais acheté une voiture neuve
et renouvelé entièrement ma garde-robe. J’avais un moral d’enfer jusqu’au
moment où j’ai voulu distribuer tous mes biens aux pauvres. Mon mari a
trouvé que ça suffisait et m’a emmené voir un psychiatre ». Manon
Cette sensation de ne pas avoir besoin de dormir, cette impossibilité à se
concentrer sur une tâche, ce sentiment de toute puissance, ces dépenses
inconsidérées, sont probablement les manifestations d’un trouble de l’humeur
que l’on nomme accès maniaque.
« Je me sentais nulle, responsable de toutes les catastrophes arrivées dans
la famille. J’avais ruiné mes enfants, mon mari. Je ne méritais pas de vivre.
Je n’avais qu’une idée : en finir, débarrasser la terre une fois pour toutes de
l’être abject que j’étais ». Manon
Ce sentiment de culpabilité, d’indignité, ces affects profondément dépressifs,
cette volonté d’en finir avec la vie, sont des signes du même trouble de
l’humeur, vécu sous sa forme dépressive.
Accès maniaques et dépressifs
D
constituent ce que l’on nomme
aujourd’hui le trouble bipolaire.
Cette notion de bipolarité traduit les
deux versants symptomatiquement
opposés de la maladie dont les
patients peuvent souffrir.
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5. Repérer
L’humeur
L’humeur
Le psychiatre Jean Delay définit l’humeur comme une « disposition affective • Une augmentation de l’estime de soi et
fondamentale riche de toutes les instances émotionnelles et instinctives, qui de ses capacités (sentiment de toute
donne à chacun de nos états d’âme une tonalité agréable ou désagréable, puissance, de grandeur, de pouvoir)
oscillant entre les deux pôles extrêmes du plaisir et de la douleur ». C’est un • Un ressenti des émotions (joie, colère,
terme qui est utilisé couramment par les médecins et les équipes soignantes. etc...) plus vif que d’habitude
Il n’est pas sûr que cette définition générique soit très éclairante mais les
spécialistes, eux-mêmes, ont du mal à proposer une définition évidente de • Très peu de sommeil (la personne est
l’humeur. convaincue de pouvoir s’en passer,
ne ressent pas la fatigue)
L’humeur, au fond, c’est ce que vous nommez « le moral ». Lorsque vous vous • Un débit accéléré de la parole, logorrhée
sentez bien vous direz que vous avez un bon moral, que vous êtes de bonne (la parole coule ininterrompue comme
humeur ; et un mauvais moral ou de mauvaise humeur quand vous vous un flux verbal) , un désir de parler constamment
sentez triste ou énervé. • Une accélération des pensées et des actions (la personne passe d’un sujet
à l’autre sans pouvoir se fixer à un sujet de conversation), elle n’a pas de
Si nous percevons bien l’infinie tristesse de Manon au cours de la phase limite dans ses projets (rien ne lui semble impossible)
dépressive, il est moins évident de rattacher son accès maniaque à de la
• Une grande énergie, des activités inhabituelles, un comportement
bonne humeur. Nous voyons bien le côté forcé, excessif, morbide même de
désinhibé
ce qu’elle exprime. La manie, ce n’est pas la joie…
• Des dépenses inconsidérées d'argent
• Une hyperactivité sexuelle
L’accès maniaque (selon le DSM IV-TR)
• Une distractabilité, une grande difficulté à maintenir son attention sur
quelque chose
Dans le langage courant, une personne
maniaque est extrêmement attachée à ses • Une fuite des idées
habitudes, très méticuleuse et elle peut même
avoir des idées fixes. • Des troubles du jugement
En psychiatrie, la manie (qui signifie en grec • Une irritabilité avec une tendance agressive
« folie ») décrit tout autre chose.
• Une hyperactivité, une agitation
Elle constitue un état de surexcitation du • Parfois un délire et des hallucinations.
psychisme qui se caractérise par :
• L’euphorie
• Le ludisme (la personne donne Ces différents symptômes doivent se
l’impression de jouer de tout, avec tous)
D maintenir plus d’une semaine et être
en rupture avec le fonctionnement
antérieur de la personne pour être
considérés comme caractéristiques
d’un épisode maniaque.
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6. Repérer
L’accès dépressif (selon le DSM IV-TR) • On constate un ralentissement des
gestes et une pauvreté de la mimique
(qui donne à la personne un air figé).
Si le mot « manie » a deux sens selon que l’on se réfère au langage courant Tous les actes de la vie quotidienne
ou au langage médical, le mot dépression décrit toujours une humeur exigent des efforts démesurés. La
triste. personne préfère rester au fond de son
lit (la fatigue est déjà là au réveil).
• Ce sentiment constant s’accompagne de ruminations douloureuses
dominées par le sentiment d’incapacité, d’inutilité, de culpabilité, • Troubles de l'appétit (peu ou trop d’appétit)
d’incurabilité et de pessimisme. avec changement secondaires de poids (le
plus souvent amaigrissement ou parfois prise de
• La personne n’éprouve que désintérêt pour le monde qui l’entoure et une poids).
incapacité absolue à ressentir du plaisir. On parle de douleur morale,
d’anesthésie affective. • Une anxiété, une inquiétude exagérée.
• Elle se met généralement en retrait de toute vie sociale. • Sommeil perturbé (insomnies ou besoin de dormir plus
qu’habituellement).
• La pensée est ralentie, les idées sont
pauvres. • Troubles physiques (douleurs corporelles, troubles digestifs, oppressions
respiratoires, problèmes cutanés).
• La personne ressent une fatigue,
une perte d’énergie. • Perte du plaisir et, plus généralement, perte d'intérêt (notamment pour les
activités agréables).
• Elle éprouve des difficultés
à se concentrer, des trous de • Idées noires, idées de mort ou de suicide.
mémoires et les prises de
décision sont difficiles.
Tout cela contribue à alimenter
la diminution de l’estime
de soi.
Ces différents symptômes doivent être
D
présents pratiquement toute la journée
durant au moins deux semaines et être
en rupture avec le fonctionnement
antérieur de la personne pour être
considérés comme caractéristiques
d’un épisode dépressif que l’on appelle
majeur ou caractérisé.
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7. Repérer
Les troubles bipolaires (selon le DSM IV-TR) 2 Quelles sont les conséquences de ces troubles ?
Le trouble bipolaire est une maladie anciennement appelée psychose
maniaco-dépressive (PMD). Elle se caractérise par une exagération des Ces troubles de l’humeur peuvent entraîner des compor-
variations normales de l'humeur qui vont affecter mentalement et tements à risque et plus particulièrement, une désinsertion
physiquement le patient. L’évolution est chronique et cyclique et oscille socioprofessionnelle et familiale.
entre trois états :
• L’état maniaque avec exaltation de l’humeur Parmi ces conséquences, on note :
• L’état dépressif caractérisé en opposition avec le précédent • Les conséquences professionnelles qui sont caractérisées par le
licenciement (dû au comportement étrange et agité), la démission hâtive et
• Une humeur normale ou parfois quasiment normale entre les phases de irréfléchie, les rapports conflictuels avec les collègues et/ou la hiérarchie,
survenue de ces deux états pathologiques. l’instabilité professionnelle (plus de la moitié des patients perdent leur
emploi) (Romans SE, McPherson HM,1992).
Les symptômes de la maladie sont très variables d'un patient à l'autre (carac-
téristiques des phases, intensités, durées, fréquences, concomitances...). • Les conséquences familiales et sociales sont illustrées par les conflits
conjugaux (en particulier si la maladie est mal expliquée), la séparation ou le
divorce, une mauvaise entente familiale (pouvant aussi avoir aussi des
conséquences sur les enfants), la perte de ses ami(e)s, etc… (Coryel W et al.
1993, Perlick D et coll. 1999).
• D’autres conséquences sont liées à la prise de risque inconsidérée : abus
de toxiques, rapports sexuels non protégés, conduite automobile à vitesse
Si, comme Manon, vous souffrez de ce trouble, excessive, défis dangereux, actes médico-légaux (atteintes aux biens et aux
vous avez du connaître des phases personnes), violence. La consommation d’alcool est également fréquem-
ment retrouvée au cours des troubles bipolaires : les études scientifiques
dépressives et des phases d'exaltation
retrouvent cette association dans 35 à 45% des cas (Rouillon F. 1997,
(dites maniaques) qui ont entraîné des Goodwin 1990).
troubles importants de votre pensée,
de vos actes, de vos sentiments, de • Le risque de suicide est majeur particulièrement dans la phase dépressive
mais aussi maniaque. Parmi les patients souffrant de troubles bipolaires,
votre comportement et de votre
environ 1/3 fait une tentative de suicide et 1/3 présente des idées suicidaires
état physique. (Suppes T et coll. 2001). C’est probablement la pathologie où le risque
suicidaire est le plus important.
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8. Comprendre
Comprendre
Les causes
multiples
Comprendre
Les causes multiples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .P 14 1 Quelle sont les causes de cette maladie ?
Agir « Pourquoi ça m’arrive à moi ? On avait tout pour être heureux. J’avais un
bon travail, des collègues qui m’appréciaient. Avec ma femme, on était un
Pour retrouver un équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .P 20 couple uni, les enfants poussaient bien. Non, je ne comprends pas ».
Jacques
« Pourquoi moi ? », « Pourquoi cette maladie ? », « Qu’est-ce que j’ai fait pour
mériter ça ? ». Lorsque l’on souffre, il est naturel de rechercher l’origine du mal.
De la même façon que l’on veut connaître le virus à l’origine de la grippe, ou
quel organe est atteint lorsqu’une douleur apparaît, on cherche à comprendre
ce qui peut être à l’origine d’un trouble psychique.
On n’est pas plus responsable d’un trouble bipolaire que de la grippe.
Les croyances personnelles voire familiales ou collectives sont pourtant souvent
à l’origine d’idées fausses qui peuvent provoquer différentes réactions :
• « Il faut le cadrer pour que son esprit cesse de battre la campagne »,
« Il faut lui éviter toute émotion trop forte » (on veut corriger) ;
• « C’est de ma faute… Je ne suis pas assez… Elle est trop… » (on accuse) ;
• « Il n’y a rien à faire. C’est mon destin… » (on se résigne) ;
• « On ne sait plus quoi faire quand il est comme ça » (on ne comprend pas).
D Ces réactions bien compréhensibles lorsque
l’on est confronté à une maladie bipolaire sont
souvent préjudiciables pour celui qui souffre.
Il est donc important pour vous et votre
entourage d’essayer de comprendre que les
troubles dont vous souffrez s’inscrivent dans
une maladie.
•BIPONEWS N° 1 //>> 14 •BIPONEWS N° 1 //>> 15
9. Comprendre
Il n’existe pas une seule explication au trouble bipolaire de l’humeur, mais facteurs génétiques est indéniable, un
plusieurs causes intriquées qui sont autant de pistes, de voie de recherche, et parent ne transmet pas de façon
surtout de domaines où l’action thérapeutique pourra s’exprimer. automatique sa pathologie à son enfant
à la fois parce qu’il y a beaucoup de
gènes en jeu et aussi parce qu’il y a pro-
2 Quelles sont les hypothèses scientifiques actuelles ? bablement une interaction entre le terrain
génétique et des facteurs environnemen-
taux qui peuvent être très précoces (durant
Les facteurs biologiques
L’humeur la grossesse).
« Pour être malade de la sorte, il faut bien que quelque chose se soit Certaines personnes pourraient ainsi naître avec
déréglé dans mon cerveau ». Jean-Pierre une « vulnérabilité », une sensibilité particulière aux
évènements de vie stressants. Nous reviendrons sur
Le cerveau est composé d’un très grand nombre de neurones qui com- cette hypothèse liant stress et vulnérabilité.
muniquent entre eux au niveau de jonctions appelées synapses. La
transmission de l’information au niveau de ces synapses s’effectue par le biais
de petites molécules sécrétées par les neurones. Ces « messagers
biologiques » sont appelés neurotransmetteurs. Le trouble bipolaire de
l’humeur pourrait être lié à une perturbation de la transmission de l’information Les facteurs psychologiques
au niveau de ces synapses.
« J’ai eu une enfance traumatisante. Mon père a quitté ma mère après ma
La recherche a fait de nombreux progrès dans ce domaine au cours des naissance. Elle nous a élevé seule, mes sœurs et moi puis a connu un
dernières années et les découvertes ont permis d’améliorer les traitements homme qui s’est installé avec nous. Il buvait, frappait ma mère.
disponibles. Dès que j’ai eu 18 ans, j’ai quitté la maison.
Je pense que cela peut expliquer ma maladie ». Myriam
Les facteurs génétiques Les causes du trouble bipolaire semblent être une combinaison :
« Mon grand-père paternel était maniaco-dépressif. Un de mes oncles • de facteurs innés : génétiques existant indépendamment de l’environ-
s’est suicidé. Chez nous, la dépression, c’est dans les gènes ». Brigitte nement et de la vie de la personne,
• et de facteurs acquis : dépendant de l’environnement, de la qualité de la
Des études auprès des familles de patients bipolaires ont montré l’implication
vie affective, des stress et des traumatismes importants et répétés vécus
de facteurs génétiques dans le risque de survenue de la maladie. Plusieurs
depuis la naissance.
gènes pourraient être impliqué. Les troubles bipolaires appartiennent au
groupe des maladies à hérédité complexe, caractérisées par l’interaction de L’explication psychologique essaie de comprendre comment la personnalité
nombreux facteurs génétiques et de facteurs liés à l’environnement pour du patient s’est construite et de quelle manière le trouble bipolaire pourrait
arriver à l’éclosion de la maladie. Autrement dit, même si l’implication des répondre à des traumatismes psychiques plus ou moins précoces.
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10. Comprendre
Plusieurs approches peuvent s’avérer utiles dans la compréhension de soi :
- L’approche psychodynamique, d’inspiration pschychanalytique psychologique entraînerait des difficultés
Cette approche propose de rechercher l’origine des troubles dans la à surmonter de tels changements sans
construction initiale de la personnalité du sujet et notamment lors de sa toute « passer » par l’expression de troubles
petite enfance (traumatismes, difficultés dans la relation aux proches, en de l’humeur.
particulier les parents). Ces difficultés pourraient avoir un impact sur la Les personnes atteintes de troubles
construction de la personnalité et expliquer en partie la souffrance actuelle du bipolaires deviendraient ainsi, au cours de
sujet. leur vie, hypersensibles et hyper-réactives aux
situations de stress.
- L’approche comportementale et cognitive
Elle consiste à préciser le fonctionnement de la pensée, les liens entre Il est évident que la vie moderne avec ses
pensées et émotions, et ceux entre pensées et comportements. Le vécu contraintes économiques, affectives, sociales et
émotionnel, ainsi que les pensées associées détermineraient le comportement culturelles nourrit abondamment cette hypersensibilité
d’un individu dans une situation donnée. Ce modèle permet d’expliquer en aux stress.
partie les pensées et les comportements problématiques rencontrés dans le
trouble bipolaire, secondaires à un éventuel emballement émotionnel.
Les facteurs environnementaux
En conclusion, le risque de développer un trouble bipolaire serait
« C’est normal que je sois tombé malade. Mon travail est stressant, les constitué par une vulnérabilité neuropsychologique liée à des
cadences sont infernales, mon patron me harcèle : c’est intenable ». interactions entre de nombreux gènes et des facteurs
D
Gérard environnementaux pouvant être très précoces. Ensuite, le contexte
éducatif et affectif de l’enfance, à l’origine de « traumatismes »
Les patients qui souffrent de troubles bipolaires seraient particulièrement importants ou mineurs, pourrait aggraver cette fragilité initiale. Pour
vulnérables aux évènements de vie stressants : qu’un trouble bipolaire se déclenche, il faudrait que l’ensemble de ces
facteurs soient présents. Enfin, la sensibilité particulière aux
- « douloureux » : perte d’un proche, perte d’emploi, déménagement dans une événements de vie stressants positifs et négatifs pourrait être à
région inconnue, séparation d’avec un conjoint, etc… l’origine des épisodes eux-mêmes.
- mais également « heureux » : promotion professionnelle, mariage, naissance, Ces théories soutiennent les différentes approches thérapeutiques qui
sont proposées aux personnes souffrant de troubles bipolaires.
etc...
On nomme « événements de vie stressants » toute modification de votre
environnement qui implique une remise en cause des mécanismes
psychiques que vous utilisez habituellement pour vous adapter à une
nouvelle situation. Votre éventuelle fragilité génétique, biologique ou
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11. Agir
Agir
pour retrouver
un équilibre
1 Comment vous repérer dans la diversité des soins
Afin de vous aider à dépasser la situation de crise, les soignants peuvent vous
proposer d’associer plusieurs types de prise en charge.
En psychiatrie, les soins sont multiples et doivent prendre en compte :
• le stade d’évolution de votre maladie ;
• vos symptômes prédominants ;
• la qualité de votre environnement ;
• votre milieu familial et social ;
• vos ressources matérielles, psychologiques et culturelles.
Concrètement vous pouvez bénéficier :
• de professionnels et de lieux d’accueil et de soins proches : quel que
soit l’endroit où vous habitez, il existe près de chez vous un lieu de soins,
une équipe prête à répondre à vos questions, à vous recevoir ;
• de traitements médicamenteux qui visent à réduire vos symptômes les
plus aigus et à vous proposer un traitement de fond pour réguler votre
humeur et prévenir la survenue de nouveaux épisodes ;
• d’accompagnements soignants autour du quotidien, autour des
difficultés qu’il entraîne et des émotions qu’il suscite en vous : visite à
domicile, entretiens infirmiers, etc…;
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12. Agir
• d’activités psychosociothérapiques dont l’objectif est de vous offrir des Les lieux de soins
techniques et un environnement adapté à votre état psychique afin que vous
puissiez progressivement retrouver vos compétences et vous réadapter à « L’hôpital me terrifiait, j’étais pétrifiée à
une vie sociale et professionnelle ; l’idée de me retrouver enfermée, d’être
privée de ma liberté, pour des semaines».
• de psychothérapies qui ont pour but d’atténuer vos conflits internes, de Brigitte
favoriser un retour sur vous-même dans le but de mieux comprendre vos
difficultés psychiques et leur retentissement sur votre humeur ; L’hôpital psychiatrique n’est plus le seul lieu
de soin existant. Aujourd’hui de petites
• sans oublier vos propres ressources, vos initiatives et tout ce que vous structures, souvent mieux adaptées, permettent
pourrez mobiliser par et pour vous-même. de vous soigner près de chez vous.
Le traitement comporte classiquement deux phases correspondant au On peut citer :
moment que vous traversez :
• Le Centre Médico-Psychologique (CMP), véritable pilier de
• le traitement de l’épisode aigu (de l’accès dépressif ou maniaque) ; la prise en charge et du suivi en dehors des crises, vous pouvez y
• le traitement de fond, dont le but est de stabiliser votre humeur, puis de rencontrer votre psychiatre, vos infirmiers référents, une assistante sociale,
prévenir les récidives. ceux-ci peuvent même parfois aller vous voir chez vous.
• Les Centres d’Accueil et de Crise (CAC), des lieux d’écoute ouverts 24
heures sur 24. Ce dispositif extrêmement souple et adapté n’existe
cependant pas partout en France.
Le traitement médicamenteux
• Les Hôpitaux de jour, pour des soins en ville, aux horaires de bureau, vous
« Au début, j’étais très réticente à prendre des médicaments.
y pratiquerez différents types d’activités à vocation psychothérapique.
Je me sentais très bien, je ne comprenais pas l’intérêt de me « shooter »
avec des pilules ». • Les Centres d’Accueil Thérapeutique à Temps Partiel (CATTP), pour des
Brigitte
soins ponctuels dans la journée ou dans la semaine. Généralement, il s’agit
Dans le traitement des troubles bipolaires, plusieurs classes de psychotropes d’activités en ateliers hebdomadaires.
peuvent s’avérer utiles. Chaque classe à un intérêt thérapeutique particulier.
C’est votre médecin qui adaptera votre traitement en fonction de votre cas. • Les Urgences de l’hôpital général.
• Le Centre Hospitalier Spécialisé (CHS).
D
Les médicaments sont indispensables au
traitement du trouble bipolaire. Il est strictement
déconseillé d’arrêter brusquement votre
traitement sans l’avis d’un médecin.
•BIPONEWS N° 1 //>> 22 •BIPONEWS N° 1 //>> 23
13. Agir
Il est possible de fréquenter certains de ces lieux de soins à différents d’une amélioration compatible avec la
moments de votre parcours, chacun d’eux correspondant à une période poursuite des soins à l’extérieur. La règle
particulière de votre trajectoire. Votre psychiatre, responsable de votre suivi, est que plus les troubles sont pris tôt en
est susceptible d’intervenir dans chacun de ces lieux. Il est la plupart du charge, plus la durée d’hospitalisation peut
temps en lien avec les différents soignants qui y travaillent. être brève. Il est même possible de traiter la
crise à domicile pour peu qu’un certain
Des professionnels libéraux et non rattachés à ces structures de soins nombre de précautions soient prises et que
peuvent également prendre en charge votre maladie : médecins généralistes, l’entourage soit présent et informé des
psychiatres libéraux, psychologues, psychothérapeutes, etc… risques et de la maladie.
La place de l’hospitalisation La protection du patient
« J’avais besoin de rentrer à l’hôpital : seule chez moi, j’aurais fini par faire
Nous avons vu précédemment que l’état maniaque pouvait conduire
une bêtise ».
Myriam
à des excès, notamment des dépenses inconsidérées.
L’hospitalisation peut être utile, voire nécessaire, pour traiter un épisode Il peut alors s’avérer nécessaire de mettre en œuvre des procédures pour
maniaque ou dépressif majeur. Elle permet : protéger vos ressources, notamment par la mise en place d’une mesure
transitoire, la sauvegarde de justice, qui permet de contrôler les dépenses.
• de vous protéger de votre maladie et des comportements qu’elle
peut engendrer (geste suicidaire, excès provoqués par une • La sauvegarde de justice médicale à la demande du médecin traitant est
débauche d’énergie, comportements à risque). Dans ces une mesure de protection immédiate, souple et en général, de courte durée.
moments-là, c’est un « refuge », un endroit où comme Elle peut notamment s’appliquer en urgence, sur décision médicale. Elle est
Myriam vous pouvez vous sentir protégé. régie par le Code civil, des articles 491 à 491-6. Toute personne majeure chez
laquelle il est constaté une altération des facultés mentales et / ou corporelles
• une prise en charge « intensive » : adaptation peut être placée sous sauvegarde de justice Le majeur protégé conserve
rapide des traitements à l’évolution de vos l'exercice de ses droits. Toutefois, les engagements passés, tels que des prêts
symptômes, entretiens fréquents avec peuvent être annulés ou réduits s’ils s’avèrent excessifs. Une sauvegarde est
médecins et infirmiers, possibilité de faire le limitée dans le temps. Elle cesse automatiquement de produire ses effets
point sur vos difficultés sociales. 2 mois après son ouverture. Des renouvellements sont possibles si l'état du
majeur le nécessite. Chaque renouvellement dure 6 mois.
L’hospitalisation n’est pas synonyme
• Tutelle et curatelle sont les deux autres mesures de protection. Elles
d’enfermement. La grande majorité des
limitent davantage l’autonomie de décision de la personne protégée. Elles
patients hospitalisés le sont de leur
s’appliquent sur décision du juge des tutelles et ne sont pas des mesures
propre volonté. La durée d’hospitalisation
d’urgence.
se limite au temps nécessaire à l’obtention
•BIPONEWS N° 1 //>> 24 •BIPONEWS N° 1 //>> 25
14. Agir
2 Comment éviter une rechute ?
« Grâce aux informations que l’on m’a données au cours des groupes de Plusieurs types de psychothérapies
psychoéducation, je sais repérer les variations de ma réactivité sont proposés :
émotionnelle. Dès que je sens une hyperréactivité émotionnelle
inhabituelle, je sais que je risque de débuter un accès maniaque. • La thérapie de type psychanalytique
Je contacte le plus rapidement possible mon psychiatre ». (cure par la parole), fondée sur l’exploration
Simon
de l’inconscient, à travers le transfert et un
travail sur sa vie personnelle (notamment
comment la petite enfance résonne aujourd’hui chez
Parmi les stratégies efficaces pour prévenir les rechutes le sujet en analyse).
il faut souligner :
• Les thérapies familiales agissent non pas sur la personne mais sur
l’ensemble du système familial. Elles ne s’intéressent pas à la cause des
troubles bipolaires, mais à la façon dont la famille réagit autour de ces
La prise régulière des médicaments troubles. Elles aident à identifier et comprendre l’impact du trouble dans les
relations familiales afin de les diminuer.
respecter la posologie et signaler les effets indésirables éventuels au
médecin ou à l’infirmière. • La thérapie cognitive et comportementale (TCC) est une thérapie brève
qui comprend une quinzaine de séances. Elles se pratiquent en séances
individuelles ou en groupes et sont basées sur les théories de l’apprentissage
L’apport de la psychothérapie et du conditionnement. Le thérapeute apprend au patient un certain nombre
de techniques comportementales (comme la technique de résolution de
elle ne constitue pas à elle seule une prise en problème) qu’il pourra utiliser seul et poursuivre après l’arrêt du traitement.
charge suffisante, mais elle permet de
mieux vivre avec sa maladie, de mieux la Ces techniques de « psychoéducation » donnent aux patients les moyens
comprendre et de mieux se comprendre. théoriques et pratiques d’améliorer leur compréhension de la maladie et la
C’est un soutien important. gestion de ses conséquences.
•BIPONEWS N° 1 //>> 26 •BIPONEWS N° 1 //>> 27
15. Agir
Les interactions avec l’entourage Le respect des conseils d’hygiène de vie
Ma femme souffre d’un trouble bipolaire. Avant je ne comprenais pas bien Plusieurs conseils peuvent vous
sa maladie. Du coup ma réaction était vive et ne faisait qu’augmenter son aider à limiter le nombre et
irritabilité. C’était le cercle infernal. Maintenant, j’ai appris à repérer s’il l’impact des crises :
s’agit d’une réaction adaptée à une situation précise, ou d’un signe
précurseur d’une phase maniaque. Dans ce cas, j’évite de prendre cette • Sommeil adéquat (respect des
irritabilité pour moi et d’envenimer la situation. J’aide ma femme à la rythmes veille - sommeil),
repérer pour que nous allions ensemble voir son psychiatre traitant avant
l’urgence ». • Activité régulière (éviter le surmenage),
Jean
• Eviter (ou limiter) les produits excitants : alcool,
Les familles ne doivent pas être tenues à thé, café,
l’écart de la prise en charge et de l’infor-
mation. Avec vous, elles souffrent des effets • Eviter toutes les autres drogues,
négatifs liés à la maladie. Cependant, il est
important qu’elles puissent trouver un juste • Gérer les risques de stress (être attentif aux engagements affectifs,
milieu entre l’absence d’implication et la aux succès et aux échecs),
substitution au soignant. Ces deux com-
portements extrêmes partent souvent de • Pratiquer des activités sportives ou de détente,
bonnes intentions, soit elles ne veulent
pas interférer dans la prise en charge, • Eviter l’inactivité excessive,
soit elles veulent aider au maximum le
patient. • Bien se connaître pour mieux se contrôler : ce contrôle est essentiel pour
prévenir les phases d'excitation et savoir reconnaître les signes
Si les soignants ont un rôle annonciateurs d'un nouvel épisode,
important à remplir, votre
famille et vos amis • Consulter rapidement dès les premiers signes annonciateurs d’une rechute.
ont aussi un rôle
à jouer.
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16. Bibliographie :
Coryell W et coll.
The enduring psychosocial
consequences of mania
and depression. Am. J.
Psychiatry, 1993 ; 150 :
Apprendre à identifier les signes d’alerte de la crise 720-727
Lorsque vous êtes en état maniaque ou plongé dans une grave dépression Cette information sur le DSM-IV®-TR, APA, 2000.
vous êtes rarement conscient qu’il s’agit d’un trouble psychique. Vous ne
pensez donc pas à consulter un médecin. Ce sont souvent vos proches qui trouble bipolaire, ses signes Goodwin FK, Jamison KR.
réagissent, inquiets des troubles du comportement ou des conduites bizarres Manic-depressive illness.
caractéristiques, les Oxford University Press,
qu’ils ne supportent plus ou qui leur paraissent menacer votre santé.
1990, New York, 938 p
Les familles, le médecin, les pompiers, la police peuvent alors intervenir. La loi hypothèses scientifiques à Perlick D et coll. Burden
prévoit des modalités d’hospitalisation sous contrainte lorsque la personne ne experience by care-givers
peut consentir aux soins. Afin d’éviter, les affrontements, la violence qui l’œuvre aujourd’hui, les of persons with bipolar
parfois en découlent, il est indispensable de repérer ses symptômes le plus tôt affective disorder. Br. J.
possible. Certaines personnes qui souffrent de troubles bipolaires ont réussi à différents traitements Psychiatry, 1999; vol
identifier quelques signes annonciateurs, ce qui leur permet de recourir plus 175(7):56-62,
précocement aux soins. proposés, constitue une
Romans SE, McPherson
étape indispensable de HM.
The social networks of
votre prise en charge. bipolar affective disorder
patients. J. Affect. Disord.,
Exemples de signes d’alerte de l’accès maniaque 1992 ; 25(4) : 221-228
(modifications notables par rapport à votre comportement habituel)
Bien connaître et bien
Rouillon F.
comprendre votre maladie Epidémiologie du trouble
• Dormir seulement quelques heures et ne pas se sentir bipolaire. Données
fatigué ; peut vous aider à limiter actuelles. L’Encéphale,
D
1997 ; Sp I : 7-11
• Mes proches me disent que je suis très irritable voir les rechutes et leurs
agressif ; Suppes T et coll.
conséquences. The Stanley foundation
• Faire beaucoup de tâches ménagères à des moments bipolar treatment outcome
inopportuns, par exemple la nuit ; network II. Demographics
and illness caracteristics of
• Parler beaucoup en sautant d’un sujet à l’autre. the first 261 patients. J.
Affect. Disord., 2001 ; 67 :
45-49
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