Présentation donnée dans le cadre du cycle de conférences "JuriTIC" organisé par le Centre de recherches information, droit et société (CRIDS) de l'Université de Namur, en mars 2011.
Cette présentation décrit le cadre juridique du courrier recommandé, les enjeux posés par le recommandé électronique et les évolutions de son régime juridique.
Elle examine ensuite la manière dont le législateur a voulu encadrer la matière par la loi du 31 décembre 2010 et les problèmes posés par cette législation.
NOTE IMPORTANTE : la loi du 31 décembre 2010 a été ultérieurement abrogée et n'est donc plus en vigueur à l'heure actuelle.
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Le recommandé électronique après la loi du 13/12/2010 [2011]
1. Le recommandé électronique
Après la loi du 13 décembre 2010
Journée d’actualités sur le droit des TIC
04|03|2011 @ Namur
François Coppens
Chercheur au CRID
Avocat (De Wolf & Partners)
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2. Introduction
Utilité du recommandé
Se ménager une preuve (d’une certaine qualité) qu’un envoi (et
éventuellement sa réception) a bien eu lieu ;
Dans un certain nombre de cas, la loi rend le recours au
recommandé obligatoire :
• Ex : préavis, demandes, formulaires, réclamations, etc.
Incertitudes juridiques liées au recommandé
électronique:
-
Quelle valeur probatoire ?
Suffisant pour remplir les exigences légales ?
Limité à certains prestataires (monopole, licence, etc.) ?
Quelles obligations pour les prestataires ?
Quelles garanties ?
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3. Le recommandé traditionnel
Définition (Loi du 21 mars 1991, art. 131 8°) :
un service garantissant forfaitairement contre les risques de
perte, vol ou détérioration et fournissant à l'expéditeur, le cas
échéant à sa demande, une preuve de la date du dépôt de
l'envoi postal et/ou de sa remise au destinataire.
4. Fonctions probatoires du
recommandé
Elément à prouver
Recommandé
Recommandé
réception
avec
Réalité de l’envoi
OUI
OUI
Moment de l’envoi
OUI
OUI
Identité de l’émetteur
NON
NON
Réception
NON
OUI
NON (sauf retour à
l’expéditeur)
OUI
En principe, OUI
OUI
Contenu du message
NON
NON
Confère date certaine
NON
NON
Non-réception
Identité du destinataire
-
accusé
de
5. Le recommandé électronique
3 grandes étapes
Loi postale belge (1999 et 2002)
Loi du 15 Mai 2007 fixant un cadre juridique pour certains
prestataires de services de confiance
Loi du 13 décembre 2010
-
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6. Le recommandé électronique
avant 2007
Directive postale 97/67 :
Définition du recommandé sans référence à un support
Pas de monopole sur les « nouveaux services »
Loi postale belge (art. 144octies, version 1999)
Pour la protection de l’intérêt général et de l’ordre public, le
service des envois recommandés utilisés dans le cadre de
procédures judiciaires ou administratives sont également
réservés à La Poste et ce, quel qu’en soit le support
Loi postale belge (art. 144octies, version 2002)
Pour la protection de l'intérêt général et de l'ordre public, le
service des envois (physiques) recommandés utilisés dans le
cadre de procédures judiciaires ou administratives sont
également réservés à La Poste
7. Situation avant 2007 :
Le recommandé électronique existe.
Le recommandé électronique ne peut pas faire l’objet d’un
monopole.
Problème principal :
Incertitude concernant la possibilité d’utiliser le recommandé
électronique pour remplir une obligation légale.
En particulier, lorsque des textes légaux ou réglementaires
obligent le recours au recommandé électronique « à la Poste ».
+ incertitude quant à la valeur probatoire d’un recommandé si la
question se posait en justice.
8. La loi du 15 mai 2007 sur les
tiers de confiance
But : fixer un cadre juridique pour certains services de
confiance :
Archivage électronique
Horodatage électronique
Recommandé électronique
Blocage transitoire des sommes versées (obsolète)
9. Loi du 15 mai 2007 – définition
du recommandé électronique
Service de la société de l’information (directive 98/48/CE)
tout service presté normalement contre rémunération, à distance par
voie électronique et à la demande individuelle d'un destinataire de
services
+ Recommandé (directive et loi postale)
un service garantissant forfaitairement contre les risques de perte, vol ou
détérioration et fournissant à l'expéditeur, le cas échéant à sa demande,
une preuve de la date du dépôt de l'envoi postal et/ou de sa remise au
destinataire.
= Prestataire de service de recommandé électronique
« toute personne physique ou morale qui offre, normalement contre
rémunération et à la demande d'un destinataire du service, un
service de transmission de données électroniques garantissant
forfaitairement contre les risques de perte, vol ou détérioration
des données et fournissant par voie électronique à l'expéditeur,
le cas échéant à sa demande, une preuve de leur envoi et/ou de
leur remise au destinataire des données »
-
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10. La loi du 15 mai 2007
La loi fixe des obligations générales à respecter par le
prestataire ;
Délégation au roi pour :
Fixer la valeur juridique
Déterminer les obligations spécifiques
Établir un régime d’accréditation et/ou de contrôles
ARPS jamais adoptés => loi inapplicable
-
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11. La nouvelle loi du 13
décembre 2010
Loi du 13 décembre 2010 « modifiant la loi du 21 mars
1991 portant réforme de certaines entreprises publiques
économiques, la loi du 17 janvier 2003 relative au statut
du régulateur des secteurs des postes et des
télécommunications belges et modifiant la loi du 9 juillet
2001 fixant certaines règles relatives au cadre juridique
pour les signatures électroniques et les services de
certification »
M.B., 31 décembre 2010
12. Méthode adoptée
Introduction du recommandé électronique dans le
« paquet » de libéralisation postale.
Initialement : quelques dispositions très générales insérées dans
la loi postale + délégation assez large faite au Roi
• Opposition du Conseil d’Etat
Ensuite : Modification de la loi sur la signature électronique (9
juillet 2001)
• Pas soumis au Conseil d’Etat (urgence invoquée)
Abrogation des dispositions concernant le recommandé
électronique dans la loi du 15 mai 2007
Entrée en vigueur reportée au 30 juin 2011 (anticipation
possible par AR)
-
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13. Définitions
« prestataire de service de certification » : toute personne physique
ou morale qui délivre et gère des certificats, [fournit des services de
recommandé électronique,] ou fournit d'autres services liés aux
signatures électroniques;
« recommandé électronique » : tout service de transmission de
données électronique consistant à offrir une garantie sur base
forfaitaire contre les risques de perte, de vol ou de détérioration,
l'expéditeur recevant, le cas échéant à sa demande, une preuve du
dépôt et/ou de la livraison de l'envoi au destinataire. »;
« service de recommandé électronique » : service de recommandé
électronique presté par un prestataire de service de certification
répondant aux dispositions de l'annexe V de la présente loi.
14. Définitions (2)
« prestataire de service de certification » : toute personne physique
ou morale qui délivre et gère des certificats, [fournit des services de
recommandé électronique,] ou fournit d'autres services liés aux
signatures électroniques;
« recommandé électronique » : tout service de transmission de
données électronique consistant à offrir une garantie sur base
forfaitaire contre les risques de perte, de vol ou de détérioration,
l'expéditeur recevant, le cas échéant à sa demande, une preuve du
dépôt et/ou de la livraison de l'envoi au destinataire. »;
« service de recommandé électronique » : service de recommandé
électronique presté par un prestataire de service de certification
répondant aux dispositions de l'annexe V de la présente loi.
15. Principes généraux
Les prestataires établis en Belgique doivent notifier leur
activité à l’Administration
Les prestataires « qui offrent des services de
recommandé électronique » doivent se conformer à une
annexe V contenant une liste d’obligations.
Régime de responsabilité calqué sur la signature
électronique :
Le prestataire est responsable de tout dommage dû au nonrespect des exigences de l’annexe 5, sauf s’il prouve qu’il n’a
commis aucune négligence ;
Le prestataire peut indiquer les limites fixées à l’utilisation de son
service (lesquelles ?) et ne sera pas responsable au-delà.
16. Contrôle et accréditation
Un prestataire peut demander une accréditation à
l’administration (base volontaire).
L’Administration est chargée du contrôle du respect de la
loi par les prestataires.
17. Le recommandé « à la
Poste »?
Article 56 de la loi de 2010
Dans les vingt-quatre mois qui suivent l'entrée en vigueur du
présent article, le Roi peut abroger dans toutes les dispositions
légales et réglementaires relatives aux matières visées à l'article
78 de la Constitution et leurs arrêtés d'exécution en ce qui
concerne les envois recommandés, les mots " à la poste ", " par
la poste " ou toute autre mention du même type.
Pas indispensable (il est acquis que le recommandé
électronique ne peut faire l’objet d’un monopole)
Quid de tous les textes qui échapperont au Roi ?
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18. Effets juridiques
Présomption d’adéquation
Art 4§6 : Sous réserve de l'application d'exigences légales ou
réglementaires spéciales en matière d'envois recommandés, un
recommandé électronique est présumé satisfaire à l'exigence
d'un envoi recommandé.
// signature électronique:
Code Civil, art. 1323 : Peut satisfaire à l'exigence d'une
signature, pour l'application du présent article, un ensemble de
données électroniques pouvant être imputé à une personne
déterminée et établissant le maintien de l'intégrité du contenu de
l'acte ;
Loi sur la signature électronique, art. 4§4 : une signature
électronique avancée réalisée sur la base d’un certificat qualifié
et conçue au moyen d’un dispositif sécurisé est assimilée à une
signature manuscrite.
19. Le recommandé hybride
Réglé dans la partie 2 de l’annexe V.
Service fourni par un prestataire d’un service de
recommandé électronique.
Consistant à matérialiser le recommandé sous forme
papier, à le mettre sous enveloppe et à le confier à un
opérateur postal (disposant d’une licence) au plus tard le
jour ouvrable suivant le dépôt électronique.
Principal (seul ?) effet : l’accusé d’envoi portera la date
de l’envoi électronique.
Problèmes prévisibles : calcul des délais dans les
procédures judiciaires ? Discrimination ?
20. Deux problèmes de droit
européen
Obligation de notification (directive « transparence »
98/34 )
Libre circulation des services : activité en Belgique de
prestataires de services de recommandé électroniques
européens.
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21. Obligation de notification
Directive 98/34 modifiée par la directive 98/48.
Impose de notifier à la Commission tout projet de
règlementation d’un service de la société de l’information.
Objectif : permettre à la Commission et/ou aux Etats membres de
faire valoir leurs observations ou de s’opposer à un texte qui
violerait le droit européen ;
Permettre à la Commission de se saisir de la question et de la
porter au niveau communautaire.
Quand ?« à un stade de préparation où il est encore
possible d’y apporter des amendements substantiels »
Effet : Standstill de 3 mois, prolongeable (interdiction
d’adopter le texte.
Projet belge notifié le 29 nov 2010 (standstill => 31 mars)
Loi adoptée le 13 décembre…
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22. Obligation de notification sanctions
30 avril 1996, affaire C-194/94, CIA Security International
la méconnaissance de l'obligation de notification entraîne
l'inapplicabilité des règles techniques concernées, de sorte qu'elles
ne peuvent pas être opposées aux particuliers, et que les particuliers
peuvent ainsi se prévaloir des articles 8 et 9 de la directive 83/189
devant le juge national, auquel il incombe de refuser d'appliquer une
règle technique nationale qui n'a pas été notifiée conformément à
ladite directive.
arrêt du 16 juin 1998, Lemmens , C-226/97,
l'absence de notification de règles techniques, constituant un vice de
procédure dans leur adoption, rend ces dernières inapplicables en
tant qu'elles entravent l'utilisation ou la commercialisation d'un
produit non conforme à ces règles.
Arrêt du 26 septembre 2000, Unilever, C-443/98,
-
L’inapplicabilité de la norme peut être invoquée dans un litige
national entre particuliers en cas de violation par l’Etat Membre de
toute obligation imposée par la directive (pas uniquement l’obligation
de notification, mais aussi l’obligation de standstill, etc.)
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23. Libre circulation des services
Principe général de libre circulation des services
En matière de services de la société de l’information
(directive 2000/31) :
Interdiction des régimes d’autorisation préalables.
Principe du pays d’origine.
⇒ Les prestataires européen sont soumis à la législation de leur
pays d’origine sur le recommandé électronique.
⇒ Peuvent-ils bénéficier de la présomption instaurée par la nouvelle
loi ?
⇒Si non : discrimination
⇒Si oui : aucune garantie de qualité
⇒ // signature électronique : reconnaissance mutuelle possible car
règles de fond harmonisées
24. Conclusion
Rédaction parfois malheureuse de la nouvelle loi
Régime juridique toujours incertain (présomption)
Intégration dans la loi signature électronique : pas
forcément une bonne idée
Mélange de dispositions harmonisées et non-harmonisées, objet
différent, etc.
Défaut de notification : épée de Damoclès
Sanction : inopposabilité !
Invocable sans limite temporelle.
Une nouvelle loi déjà souhaitable ?
Vraie solution : une directive européenne
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25. Merci de votre attention
François Coppens
Chercheur au CRID
francois.coppens-1@fundp.ac.be
Avocat au Barreau de Bruxelles (De Wolf & Partners)
francois.coppens@dewolf-law.be
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