Le cas Total est exemplaire de la capacité d’une entreprise/marque/réseau de vente/distributeur, à s’auto-imposer une révolution culturelle pour sortir de l’étau propre à son marché. Pour renforcer la valeur de marque, institutionnelle mais également financière, Total a compris qu’il devait constituer un réseau de stations services (et le second mot est essentiel) plutôt que de se cantonner à des points de vente d’un produit banal, invisible, dont on ne comprend pas toujours la spécificité et qu’on jugera d’abord et avant tout sur le prix.
Ces slides ont été réalisés dans le cadre du projet IONIS Brand Culture.
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2. SYNTHESE
Le cas Total est exemplaire de la capacité d’une
entreprise/marque/réseau de vente/distributeur, à s’auto-imposer
une révolution culturelle pour sortir de l’étau propre à son marché.
Pour renforcer la valeur de marque, institutionnelle mais également
financière, Total a compris qu’il devait constituer un réseau de
stations services (et le second mot est essentiel) plutôt que de se
cantonner à des points de vente d’un produit banal, invisible, dont on
ne comprend pas toujours la spécificité et qu’on jugera d’abord et
avant tout sur le prix.
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3. Total, c’est la réussite du passage d’un stade de « produit de
commodité » à celui d’une marque moderne, qui prend en compte le
client et le met au centre de son offre.
Il faut distinguer la démarche mise en œuvre avec succès par
l’entreprise pour ses stations en France, puis à l’International et les
turpitudes et tensions vécues lors des diverses marées noires (mais
l’unité du nom fait que la critique publique retombe sur l’ensemble de
la marque Total).
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5. 1. CONTEXTE ET DEMARCHE
• La réflexion stratégique débute toujours par l’observation des clients, par la
compréhension de leurs attitudes et de leurs comportements. Quand l’entreprise Total
interroge ses clients, parfaitement épaulée par son agence CLM BBDO et son président
Philippe Michel (l’un des vrais visionnaires de la communication en France), le constat
est toujours identique : on s’arrête plutôt par hasard (ou pour le prix) dans une station
que pour des raisons plus motivantes.
• « C'est depuis 1991, avec l'agence CLM/ BBDO, que Total s'est lancé sur le créneau du
service. ‘Tout a commencé avec un constat : les automobilistes s'arrêtent par hasard dans
une station-service. Peu importe le pétrolier, pour eux l'essence est la même
partout, explique Marie-Christine Dax, directrice générale de l'agence CLM BBDO. Total a
donc cherché un moyen de les faire venir dans ses stations. Il s'est engagé auprès des
automobilistes en leur disant : bientôt "Vous ne viendrez plus chez nous par hasard" et
parallèlement, il a mis en place une politique de services. Durant quelques années, Total a
donc communiqué sur ses services, avec cette volonté de construire l'image d'une marque
tournée vers les autres. Ce sont les films sur le papier toilette, l'accueil... Puis, le pétrolier a
décidé de mettre en avant son personnel .’ »
(Sources : http://www.strategies.fr/actualites/marques/r5036W/total-n-est-pas-en-panne-d-idees.html )
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6. 1. CONTEXTE ET DEMARCHE
• Il est relativement aisé de refaire, a posteriori, la stratégie d’une entreprise ou d’une
marque et de considérer que le choix était évident, facile, indispensable.
• C’est oublier les contraintes qui font que tout devient impossible : transformer les
enseignes, installer du papier dans les wc ou des chauffe-biberons. Il ne faut pas oublier
que le début des années 90 ne peut se comparer à la période actuelle et la problématique
de Total est justement là pour nous le faire comprendre : les stations essence vendaient
de l’essence, des produits alimentaires de qualité médiocre, quelques services, se battant
avant tout sur le prix de vente de l’essence et sur des opérations promotionnelles
estivales de grande envergure pour faire venir les clients… lesquels venaient puisque la
fidélisation était très faible.
• Total a compris qu’il était temps, compte-tenu de l’état des mentalités, de modifier le
« sens de l’histoire » et de rapprocher le système de distribution en France de ce qui se
faisait dans d’autres pays. Total a décidé qu’il était temps d’assumer la raison d’être
d’une station-service et non seulement d’une station vendant de l’essence (produit
banalisé et qui allait rencontrer l’offensive des grands de la distribution moderne).
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7. La campagne « Total vous ne viendrez plus chez
nous par hasard » symbolise la décision
stratégique d’une entreprise qui décide de doter
sa marque d’une raison d’être différente et
supérieure à sa seule fonction historique : un lieu
destiné à vendre du carburant.
Ces stations vont devenir des lieux de
services, des lieux destinés à ce qu’on s’occupe
des clients afin de les fidéliser, de les faire
consommer davantage et d’autres offres, de
garantir alors, qu’ils ne viennent effectivement
pas par hasard.
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8. 2. LES PARTIS PRIS STRATEGIQUES ET
CREATIFS
• Pour réussir cette « révolution culturelle », Total a mis en œuvre un plan de campagne
reposant en premier lieu sur des investissements massifs dans la nouvelle identité des
point de vente, sur un soutien publicitaire important, mais surtout sur des éléments clés
du service qui vont être mis en place et servir à appuyer le discours en matière de
communication.
• La force des recommandations de l’agence tient aussi, surtout, à la signature publicitaire
inventée par Philippe Michel « vous ne viendrez plus chez nous par hasard ».
Proposition complexe, trop longue pour certains… Elle va en réalité permettre à Total de
se différencier en quelques années seulement de ses concurrents.
• Par ce travail sur le service, par cette signature qui engage le personnel en place parce
qu’il est garant du service (et rapidement la communication passera de films autour des
services à la valorisation du personnel), Total va réussir à se démarquer, à gagner le
combat de la modernité d’enseigne, à la fois actuelle et plus orientée vers le client (on
remarquera l’efficacité de la démarche par des campagnes qui touchent à la fois au
problème et à sa solution, mettant en scène celui dont tout dépend, le pompiste).
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9. PRESENTATION DES FILMS
(Cf. RESSOURCES ICONOGRAPHIQUES SUR LE SITE)
• Total 1991 : http://youtu.be/aaY1Qw4M7NA
• Total station-service ''lapin'‘ http://youtu.be/eO8E0s_Uv6g
• Lullaby http://www.culturepub.fr/videos/total-lullaby
• Chagrin d'amour http://www.culturepub.fr/videos/total-chagrin-d-amour
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10. 3. LES RESULTATS
• La campagne, lancée en 1991 par CLM BBDO, est célébrée au cours de cette décennie
comme l’une des plus remarquables. Elle est maintes fois primée, devenant un cas de
référence pour illustrer les capacités de transformation des entreprises.
• Cette campagne trouve sa réputation dans ses résultats tangibles, même si les chiffres ne
sont pas toujours disponibles. Le réseau s’impose comme supérieur aux autres, drainant
une clientèle « qui n’avait pas l’habitude de choisir ». Elle permet de mettre en place la
carte de fidélité et d’aller au bout du processus de reconnaissance et de valorisation.
• La réputation de ce cas vient aussi de la « crise des années 90 », de la remise en cause de
la consommation, elle met l’emphase sur des dimensions qui prennent plus
d’importance : la différenciation des lieux et du contexte (valorisation, design..), le
marketing et son obsession à mettre le client au centre des processus, le service comme
valeur essentielle au produit lui-même, les processus de fidélisation (le « boom » du
« One to One » nait de la crise économique qui marque les débuts de la décennie).
• Cette campagne est réussie pour l’entreprise, sa marque et son réseau, mais Total va
subir des affaiblissements provenant du développement de l’enseigne et de crises
majeures.
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11. 4. LES LENDEMAINS
• Avec le naufrage de l’Erika sur les côtes bretonnes à la fin de l’année 1999, Total doit
affronter une opposition globale, en France comme à l’International, à cause de sa
manière de gérer la crise, pour des propos pour le moins malhabiles de son
président, pour une posture hautaine alors qu’il fallait, d’évidence, se mobiliser et aller à
la rencontre des populations, des institutions.
• La campagne est détournée et le slogan ridiculisé sert de « tête du turc ». D’autant que
l’Erika n’est pas la seule marée noire qui va marquer ces années mais chaque fois, le
souvenir de l’Erika revient à la Une, transformant l’entreprise qui souhaitait être si
proche de ses clients en « anti-consumer brand ».
• Même si la dynamique des stations demeure, l’entreprise doit modifier sa démarche de
communication, quittant la proximité pour prendre un envol mondial, pour
apparaître, en 2005, comme une entreprise exceptionnelle, qui se soucie chaque jour de
l’énergie pour que la nôtre puisse mieux s’exprimer (campagne Harrisson & Wolf et
nouvelle signature de marque « Pour vous, notre énergie est inépuisable »).
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12. A la fin des années 90 et malgré le succès remarquable de
la campagne française, Total pousse au changement
compte-tenu de ses développements et de son exigence à
disposer d’une démarche internationale en matière de
communication. La signature historique fonctionne
toujours bien en France, mais demeure incompréhensible
partout ailleurs. L’année 2013, avec son changement
d’agences et de stratégie déployée, sonne le glas de cette
campagne riche d’enseignements
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13. Total, dans la littérature actuelle
du marketing et de la gestion de
la communication d’une entreprise
est davantage citée pour les gestions
de crise hasardeuses, pour
les divers boycotts, exemple d’une
entreprise qui ne prend pas en compte
ses engagements. On ne peut
oublier, pour l’expertise
marketing, que Total c’est aussi
l’expression d’une nouvelle manière de
communiquer dans un secteur
conventionnel, plus attiré alors par les
opérations promotionnelles
que par la construction durable de
marques fortes.
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14. Face aux enjeux politiques, aux critiques
multiples, aux attaques internationales,
Total a mis en place une stratégie de
communication au cours des années 2000,
moins orientée vers le client final de la
station service que vers le client/citoyen.
L’ effort de la communication institutionnelle
de l’entreprise, comme BP et d’autres, a porté
sur la démonstration de son utilité, sur son
implication dans les efforts de préservation,
sur les techniques « propres », construisant
ainsi, du moins est-ce l’espoir, une « protection »
contre de futures attaques potentielles.
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15. Erika, AZF, Superprofits, Birmanie… Total est une
entreprise trop puissante, trop visible, opérant sur un
secteur trop essentiel et dangereux, pour ne pas être sous les feux des projecteurs. La
communication actuelle de sa marque dépend donc fortement de l’état de l’opinion à un
moment donné, de la plus ou moins forte mobilisation des médias, les deux pouvant
s’enflammer aussi vite et au moindre effet de « buzz » qu’oublier ou passer à un autre sujet.
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16. 5. LES ENSEIGNEMENTS
1. La réussite de la « révolution » mise en œuvre par Total en 1991 tient à une
compréhension, une attention, un respect aussi, des clients. Elle démontre une excellente
connaissance et écoute des aspirations et des attitudes (mais également des publics
internes, en particulier celles et ceux en charge des stations-essence).
2. La réussite est également le fruit d’une grande cohérence, à la fois
opérationnelle, « terrain », mais également au niveau de la formation et de la motivation
des personnels. Se différencier par le service n’est absolument pas viable si l’on se
cantonne à une promesse médiatisée. Les propositions faites, la réalité observée dans la
pratique quotidienne de la station service (apparition de seaux, mise à disposition de
chiffons, propreté des toilettes…), l’état d’esprit des personnels, sont autant de preuves
qui confirment ou infirment la différence voulue et affirmée.
3. Une marque (en l’occurrence les stations services) est dépendante des évolutions et des
incidents de parcours de sa marque mère, surtout quand elle porte son nom. Même si les
combats contre Total, les boycotts, les pétitions ou les détournements publicitaires n’ont
pas atteint profondément la marque, elle a subi une perte de la « cote d’amour » qu’elle
avait su si bien construire au cours des années 90.
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17. Une dimension moins visible de
l’activisme de Total : le rôle de sa
fondation dans le financement
d’initiatives qui facilitent le dialogue
et qui positionnement autrement
l’entreprise pétrolière. Là, le
financement que Total a apporté
au projet porté par Jacques Perrin…
avec les conséquences en matière
d’image, positives quand
l’association semble
convenable, toujours à la merci des
critiques du « greenwashing ».
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18. 6. SOURCES ET BIBLIOGRAPHIE
• STRATEGIES MAGAZINE N°1079 – 27/11/1998 – Total n’est pas en panne d’idées:
http://www.strategies.fr/actualites/marques/r5036W/total-n-est-pas-en-panne-d-idees.html
• LES ECHOS n°21412 – 08/04/2013 – Par Véronique Richebois – Total se rêve en grande marque
mondiale: http://www.lesechos.fr/entreprises-secteurs/medias/actu/0202671712264-total-se-
reve-en-grande-marque-mondiale-555916.php
• Marc Drillech – Le boycott, histoire, actualités, perspectives – Editions FYP – 1991.
• Thomas Porcher L'indécence précède l'essence - Enquête sur un Total scandale – Max Milo Editions –
2012.
• Communicator : Toute la communication d'entreprise Marie-Hélène Westphalen et Thierry Libaert –
Editions Dunod – 5° Edition (2009).
• Les Echos n° 19424 du 31 Mai 2005 - par V. Richebois - Leçons posthumes d'un gourou de la pub
• A. Thévenet-Abitbol - L'Héritage de Philippe Michel - http://vimeo.com/35621287
• A. Thevenet-Abitbol (et propos de Philippe Michel) - C’est quoi l’Idée – Editions Michalon – 2005.
• APPEL, Violaine et BOULANGER, Hélène. La légitimation de l’organisation: les enjeux du dispositif
communicationnel. Le cas de la communication institutionnelle du groupe Total–2005-2008.
Communication. Information médias théories pratiques, 2011, vol. 28, no 2.
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