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PRÉPOSITION À ÉCLIPSES

                                                                                                         Claire Blanche-Benveniste

                                                                                                         De Boeck Université | Travaux de linguistique

                                                                                                         2001/1 - no42-43
                                                                                                         pages 83 à 95


                                                                                                         ISSN 0082-6049




                                                                                                         Article disponible en ligne à l'adresse:
                                                                                                         --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
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                                                                                                         --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
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                                                                                                                                                                                                                                         Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université
                                                                                                         Pour citer cet article :
                                                                                                         --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
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                                                                                                         Travaux de linguistique, 2001/1 no42-43, p. 83-95. DOI : 10.3917/tl.042.083
                                                                                                         --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------




                                                                                                         Distribution électronique Cairn.info pour De Boeck Université.
                                                                                                         © De Boeck Université. Tous droits réservés pour tous pays.


                                                                                                         La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des
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                                                                                                         France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit.
Préposition à éclipses

                                                                                                                           PRÉPOSITION À ÉCLIPSES

                                                                                                                                Claire BLANCHE-BENVENISTE *

                                                                                                                        École Pratique des Hautes Études, Paris




                                                                                                               Les prépositions spécifiques des valences verbales sont généralement
                                                                                                         considérées comme indispensables pour une bonne réalisation des
                                                                                                         compléments qu’elles « introduisent ». Le verbe confier a un complément
                                                                                                         de valence à valeur de « bénéficaire ». Lorsque ce complément est réalisé
                                                                                                         sous forme de syntagme nominal, il doit être précédé de la préposition à :
                                                                                                               Elle a confié la robe à sa mère.
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                                                                                                                                                                                                     Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université
                                                                                                         Sans cette préposition, la tournure serait grammaticalement mal formée
                                                                                                               Elle a confié la robe *sa mère

                                                                                                         C’est seulement lorsque ce complément « bénéficiaire » est réalisé sous la
                                                                                                         forme d’un pronom clitique, me, te, se, lui, leur, qu’il se réalise sans la
                                                                                                         présence de la préposition à :
                                                                                                               Elle m’a confié la robe, elle la lui a confiée, elles la leur ont confiée, elles se
                                                                                                               la sont confiée, etc.

                                                                                                         Par là s’explique l’habitude de dire que ces compléments sont « introduits »
                                                                                                         par une préposition et de considérer ce type de prépositions comme des
                                                                                                         « introducteurs ». Mais pourtant, dans d’autres situations, par exemple entre
                                                                                                         c’est et qu-, la préposition à exigée par le verbe confier devant le complément
                                                                                                         nominal a un statut plus compliqué. Elle peut figurer une fois devant le
                                                                                                         complément nominal, ce qui paraît le plus « normal » :
                                                                                                               [1]    C’est à sa mère qu’elle a confié la robe
                                                                                                                      c’est [ + prép N ] [ - prép que] V a confié

                                                                                                         Elle peut être absente devant le complément nominal, mais présente devant
                                                                                                         qu- (réalisé sous forme du pronom qui) :


                                                                                                         *     21 avenue Jules-Ferry, F. 13100 Aix-en-Provence (France) – Tél : 00 33 4 42 27 66
                                                                                                               18 – claire.benveniste@pop.freesbee.net



                                                                                                                                                                                               83
Claire BLANCHE -BENVENISTE

                                                                                                                [2]      C’est sa mère à qui elle a confié sa robe
                                                                                                                         c’est [ - prép N ] [ + prép que] V a confié

                                                                                                         Elle peut aussi figurer deux fois, aussi bien devant le complément nominal
                                                                                                         que devant qu- :
                                                                                                                [3]      C’est à sa mère à qui elle a confié sa robe
                                                                                                                         c’est [ + prép N ] [ + prép que] V a confié

                                                                                                         La première tournure [1] a une meilleure réputation normative que les deux
                                                                                                         autres, mais tout le monde s’accorde généralement à reconnaître que les
                                                                                                         deux autres, [2] et [3], sont aussi grammaticalement bien formées.

                                                                                                                 Cette particularité est mentionnée depuis longtemps par les
                                                                                                         grammairiens français, qui pourtant, pour la plupart, ont été gênés par la
                                                                                                         coexistence de trois tournures grammaticalement si proches (de Wailly 1803,
                                                                                                         Bescherelle 1867, Martinon 1927, Grevisse 1986). Plusieurs ont cherché à
                                                                                                         y mettre de l’ordre, en supposant par exemple qu’elles n’avaient pas la
                                                                                                         même histoire diachronique ou en cherchant à en dévaluer au moins une sur
                                                                                                         les trois. Une remarque célèbre de l’Académie française avait déjà tenté de
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                                                                                                                                                                                              Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université
                                                                                                         discréditer l’usage de la double préposition chez Boileau (cf. N. Fournier
                                                                                                         1998: 134-6) :
                                                                                                                 C’est à vous mon esprit à qui je veux parler (Boileau 1668, Satire IX, 1).

                                                                                                         Les générativistes ont suivi le même raisonnement, en présentant la tournure
                                                                                                         à deux prépositions comme un archaïsme (Jones 1996), la tournure à
                                                                                                         préposition devant qui comme une sorte d’étape intermédiaire dans le
                                                                                                         développement et la tournure la plus normative comme un aboutissement
                                                                                                         moderne de l’évolution. Comme il arrive très souvent dans ce type de
                                                                                                         présentation, tout se passe comme si un « bon complot » avait guidé
                                                                                                         l’évolution historique pour l’amener vers la seule bonne forme normative.
                                                                                                                Il me semble que cette interprétation est fondée sur des bases peu
                                                                                                         solides et qu’on doit accepter l’idée que les trois tournures coexistent
                                                                                                         actuellement, et qu’elles ont sans doute coexisté à d’autres époques. Dans
                                                                                                         cette perspective, il faudrait admettre que ce phénomène de « préposition à
                                                                                                         éclipses » n’est pas un accident de l’évolution mais qu’il fait partie de la
                                                                                                         grammaire. Comme d’autres langues semblent présenter des faits analogues
                                                                                                         (Dixon 1991 : 14, 48, 66, 68, 281-286), on peut être tenté d’y voir un
                                                                                                         phénomène plus général, qui ne serait pas spécifiquement français.
                                                                                                                Je propose de rappeler les principales circonstances dans lesquelles
                                                                                                         s’observe ce phénomène de la « préposition à éclipses », et d’en envisager
                                                                                                         quelques interprétations1.




                                                                                                         84
Préposition à éclipses

                                                                                                         1.     La répartition entre prépositions, pronoms et
                                                                                                                conjonctions dans les clivées et les restrictives
                                                                                                         Je m’intéresse aux « compléments prépositionnels » qui apparaissent en
                                                                                                         position focalisée dans les constructions clivées en c’est… qu-… et les
                                                                                                         restrictives en il n’y a que….qu-…. Dans les deux cas, ces compléments
                                                                                                         prépositionnels forment un syntagme autonome, qui n’est aucunement
                                                                                                         déterminé par la suite en qu-, comme ce serait le cas avec un antécédent et
                                                                                                         une relative. On peut prendre comme prototypes des syntagmes autonomes
                                                                                                         et non-autonomes les formes de pronoms celui-ci et celui- (Cf. Blanche-
                                                                                                         Benveniste et alii, 1987) :
                                                                                                                C’est à celui-ci que je l’ai demandé
                                                                                                                Il n’y a qu’à celui-ci que je l’ai demandé
                                                                                                                C’est celui à qui je l’ai demandé
                                                                                                                Il n’y a que celui à qui je l’ai demandé

                                                                                                         Dans les constructions clivées et dans les restrictives, qui présentent un
                                                                                                         syntagme autonome, la forme du complément prépositionnel est dictée par
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                                                                                                                                                                                                   Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université
                                                                                                         la valence du verbe placé après que. Le relevé des exemples contemporains
                                                                                                         amène à distinguer trois modèles.

                                                                                                         1.1.   Le modèle de réalisation le plus simple est celui qui fait apparaître la
                                                                                                                préposition suivie du syntagme nominal dans la position privilégiée
                                                                                                                entre d’une part c’est , il n’y a que et d’autre part la conjonction que,
                                                                                                                soit, schématiquement :

                                                                                                                [+prép N] [- prép Que]
                                                                                                                C’est [à toi] que ces choses-là arrivent
                                                                                                                Il n’y a qu’[à toi] que ces choses-là arrivent

                                                                                                         Exemples en français parlé :
                                                                                                                ce n’est pas à nous que vous feriez croire cela (Plaidoyer 19,4)
                                                                                                                c’est pas à vous qu’il faut le demander (BusE36)
                                                                                                                c’est pas pour moi que je parle (BusE49)
                                                                                                                c’est sur moi que maman comptait (Barallier 45,12)
                                                                                                                c’est sur la goupille qu’il y a marqué les numéros de série (Poi98 Vengeance
                                                                                                                45,12)

                                                                                                         Exemples en français écrit contemporain :
                                                                                                                Et c’est avec son mari et leur serveuse qu’elle a dégusté le plat, à l’abri des
                                                                                                                regards désapprobateurs (Presse)




                                                                                                                                                                                             85
Claire BLANCHE -BENVENISTE

                                                                                                         Exemple en français écrit du XVe siècle :
                                                                                                                 C’est à vous mesme que je parle (Pathelin, ca 1456, DMF, p. 176,
                                                                                                                 communiqué par M. Rouquier)

                                                                                                         1.2. Dans le deuxième modèle, la préposition ne figure pas devant le
                                                                                                                 syntagme clivé ou restreint, mais devant l’élément Qu-, qui est en ce
                                                                                                                 cas un pronom, qui, quoi, lequel, dont, où, soit schématiquement :

                                                                                                                 [- prép N] [+ prép Qu-]2
                                                                                                         Exemples en français parlé
                                                                                                                 C’est sûrement elle à qui il pensait l’offrir (Cl89-90)

                                                                                                         Exemples en français écrit contemporain
                                                                                                                 c’est certainement cela dont j’ai peur (Gide, d’après Togeby)
                                                                                                                 Parce que c’est elle à qui Monica avait confié la Robe, qu’elle garda dans
                                                                                                                 son appartement du Watergate à Washington (Presse 0508981)
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                                                                                                         Exemple en français écrit du XVe siècle




                                                                                                                                                                                                     Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université
                                                                                                                 Ouy, Monseigneur, c’est Gervaise à qui je donnay ma main et ma foy (Le
                                                                                                                 Jouvencel, ca.1461-6, DMF 1,224, communiqué par M. Rouquier)

                                                                                                         1.3. Dans le troisième modèle, la préposition figure dans les deux
                                                                                                                 emplacements :

                                                                                                                 [+prép N] [+ prép Qu-]
                                                                                                         Exemples en français parlé
                                                                                                                 c’est de ça dont j’ai parlé dans la dernière réunion où je suis allée (Beaumettes
                                                                                                                 7,8)
                                                                                                                 c’est évidemment d’information dont nous allons parler (Charrier 61287)
                                                                                                                 et c’est là où il y a la caserne (Poi 98, incendie 33,3)
                                                                                                                 c’est à peu près à ce moment-là où moi je suis venu m’installer définitivement
                                                                                                                 (Barrad 17,14)
                                                                                                                 c’est là où vous vous rendez compte qu’en fait vous êtes rien (Poi98 Attentat
                                                                                                                 4,24)
                                                                                                                 c’est là où justement il y avait beaucoup plus de dangers (Poi 98 Hold up
                                                                                                                 27,3)

                                                                                                         Exemples en français écrit contemporain
                                                                                                                 ce n’est pas de pain, en effet, selon lui, dont les Indiens avaient besoin
                                                                                                                 (Ionesco, d’après Togeby)




                                                                                                         86
Préposition à éclipses

                                                                                                         Exemple en français écrit du XVe siècle
                                                                                                                  C’est à vous à qui je vendi six aulnes de drap, maître Pierre (Pathelin, DMF,
                                                                                                                  p. 160, communiqué par M. Rouquier).

                                                                                                         Lorsque l’on rassemble des exemples pris aux différentes époques, on se
                                                                                                         convainc assez facilement que ces tournures existent sous leurs trois formes
                                                                                                         depuis le XVe siècle, qu’elles ont été toutes trois exploitées à l’époque
                                                                                                         classique (cf. Haase 1914, Fournier 1998), qu’elles existent encore
                                                                                                         aujourd’hui et qu’on ne peut pas les placer l’une derrière l’autre dans une
                                                                                                         perspective d’évolution historique, comme l’ont supposé de nombreux
                                                                                                         grammairiens.
                                                                                                                 On peut considérer qu’il y a actuellement un supplétisme entre les
                                                                                                         deux grands types morphologiques : la réalisation [préposition + pronom]
                                                                                                         et la réalisation [absence de préposition + conjonction que]. La répartition
                                                                                                         peut être ainsi résumée :

                                                                                                          [(à) elle] [ à qui]      [(à) cela] [ à quoi] [(de) cela] [ dont]   [(à) celle-ci] [ à laquelle]
                                                                                                          [(à) cet endroit]        [où]                                       [où]
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                                                                                                                                                                                                                        Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université
                                                                                                          [à elle] [ - que]        [à cela] [ - que]    [de cela] [ - que]    [à celle-ci] [ - que]
                                                                                                          [à cet endroit] [ - que]

                                                                                                         Les grammairiens qui se sont intéressés à la question ont souvent été
                                                                                                         obnubilés par le problème de la « partie du discours » (cf. Riegel et alii
                                                                                                         (1994 : 537), et se sont surtout attachés à définir la nature de l’élément qu.
                                                                                                         Ils ont été gênés d’avoir à accepter que cet élément doive être analysé, selon
                                                                                                         les cas, tantôt comme une conjonction que et tantôt comme un pronom
                                                                                                         relatif, qui, quoi, dont, où. Lorsque la concurrence est possible, l’usage de
                                                                                                         la conjonction leur paraît plus « pauvre », parce qu’elle ne fait ressortir
                                                                                                         aucun cas de « flexion ». Mais il était bien difficile d’analyser que comme
                                                                                                         un pronom dans des exemples comme :
                                                                                                                  C’est là qu’il habitait
                                                                                                                  C’est à ce moment qu’il est parti
                                                                                                                  C’est ainsi que nous l’appelons

                                                                                                         Cela fait partie des cas que mentionne Dixon où la préposition disparaît
                                                                                                         devant les « measure phrases »,
                                                                                                                  He runs (for) three miles,
                                                                                                                  She stood in the pouring rain twenty minutes (Dixon 1991 : 285).

                                                                                                         Cette omission de préposition correspondrait, selon lui, pour l’anglais, à un
                                                                                                         effet particulier de la focalisation portant sur des éléments aspectuels des


                                                                                                                                                                                                                  87
Claire BLANCHE -BENVENISTE

                                                                                                         compléments. Mais l’analyse se prolonge pour les cas où, en français, le
                                                                                                         dispositif clivé permet des constructions sans préposition, qui seraient
                                                                                                         impossibles dans un dispositif direct :
                                                                                                                 Elle y est *des années / Il y a des années qu’elle y est
                                                                                                                 Je joue *la dernière fois / C’est la dernière fois que je joue
                                                                                                                 Il était ouvert *deux ou trois mois / ça faisait deux ou trois mois qu’il était
                                                                                                                 ouvert
                                                                                                         Une autre solution, qui est un peu un renoncement, consiste à voir ici une
                                                                                                         « grammaticalisation », difficile à analyser morphème par morphème. Une
                                                                                                         autre solution, qui suppose une sorte de « complémentarité » entre pronom
                                                                                                         et conjonction, consiste à considérer que, dans une même construction clivée
                                                                                                         ou restrictive, avec la même valeur syntaxique, deux réalisations
                                                                                                         morphologiques sont également possibles, l’une avec un pronom qui
                                                                                                         supporte une préposition et une autre avec une conjonction que qui renvoie
                                                                                                         la préposition devant le syntagme clivé. Il ne s’agirait pas d’une marque
                                                                                                         d’une différenciation fonctionnelle entre les tournures proprement relatives :
                                                                                                         dans un cas la préposition est conservée auprès de l’élément qu-, un touriste
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                                                                                                                                                                                                   Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université
                                                                                                         à qui :
                                                                                                                 C’est un touriste déjà assez blasé à qui on promet un dépaysement certain
                                                                                                                 (Presse),

                                                                                                         et dans l’autre la préposition serait auprès de l’élément clivé, à un touriste
                                                                                                         que :
                                                                                                                 C’est à un touriste déjà assez blasé qu’on promet un dépaysement certain.

                                                                                                         Il faudrait admettre que les deux coexistent sans aucune différence
                                                                                                         sémantique.

                                                                                                         2.      Les que-phrases incompatibles avec une préposition
                                                                                                         Je m’intéresse maintenant aux rencontres à prévoir entre une préposition et
                                                                                                         une « que-phrase ». Certains verbes ont un complément de valence qui se
                                                                                                         réalise par une préposition suivie d’un syntagme nominal ou d’un verbe à
                                                                                                         l’infinitif
                                                                                                                 Je me souviens de cela
                                                                                                                 Je me souviens de lui
                                                                                                                 Je me souviens de l’arrivée de Jean
                                                                                                                 Je me souviens d’avoir vu Jean arriver

                                                                                                         Lorsque cette valence complément comporte également une que-phrase, il
                                                                                                         est impossible de la faire précéder d’une préposition faible comme de, à,
                                                                                                         en :

                                                                                                         88
Préposition à éclipses

                                                                                                               Je me souviens de *que Jean est arrivé très tard
                                                                                                               Je me plains de*qu’il arrive si tard3

                                                                                                         Deux solutions se présentent, l’une morphologiquement « riche » et l’autre
                                                                                                         « pauvre ». La « riche » consiste à étoffer le que en ce que :
                                                                                                               Je me souviens, je m’étonne, je me plains de ce que Jean arrive très tard

                                                                                                         Magali Rouquier (1988, 1990) a étudié le développement diachronique de
                                                                                                         cette tournure en ce que, qui semble s’être restreinte au cours de l’histoire.
                                                                                                         La solution « pauvre » consiste à faire tomber la préposition et à ne garder
                                                                                                         que le que :
                                                                                                               (Je me souviens, je m’étonne, je me plains) que Jean arrive si tard

                                                                                                         Les grammaires d’usage donnent des listes de verbes à solution riche,
                                                                                                               (aider à ce que, s’excuser, etc.) de ce que….
                                                                                                               (tenir, se plaire , etc) à ce que….

                                                                                                         d’autres à solution pauvre,
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                                                                                                                                                                                                 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université
                                                                                                               (avertir, avoir besoin, se désoler, s’indigner, se souvenir, etc.) que…

                                                                                                         et de ceux pour lesquels l’usage est hésitant :
                                                                                                               s’attendre à ce / que … – se rendre compte de ce / que…

                                                                                                         Les choix varient selon les usagers. Grevisse (1986) recommande je demande
                                                                                                         à ce qu’on m’oublie, là où l’usage le plus général semblerait plutôt être Je
                                                                                                         demande qu’on m’oublie. La tendance semble être, du reste, de choisir que,
                                                                                                         comme en témoigne cet exemple de sensibiliser, ordinairement construit
                                                                                                         avec à (sensibiliser à quelque chose), tel qu’il apparaît avec une que-phrase
                                                                                                         dans une conversation :
                                                                                                               Il faudrait sensibiliser les gens que le feu rouge c’est quand même dans le
                                                                                                               code de la route (Sardier 6,8)

                                                                                                         Le problème existe aussi dans les réalisations pseudo-clivées, par exemple
                                                                                                         pour être sûr, être conscient de (Cf. Roubaud 2000) :
                                                                                                               Ce dont je suis sûr, c’est de cela
                                                                                                               Ce dont je suis sûr, c’est d’avoir très bien compris
                                                                                                               Ce dont je suis sûr, c’est *de qu’il va pleuvoir

                                                                                                         La réalisation tend généralement vers que :
                                                                                                               Ce dont on est sûr, c’est que ces orages vont se déplacer (Roubaud 2000 :
                                                                                                               409).



                                                                                                                                                                                           89
Claire BLANCHE -BENVENISTE

                                                                                                                 Ce dont les Américains sont conscients, c’est que Bill Clinton va aller piocher
                                                                                                                 dans les poches de certains d’entre eux (Roubaud 2000 : 393)

                                                                                                         Dixon (1991) mentionne des phénomènes analogues en anglais. Il en fait
                                                                                                         même un argument privilégié pour poser l’existence d’une forme sous-
                                                                                                         jacente de la préposition :
                                                                                                                 « Omission of a preposition before complementisers that, for or to. The
                                                                                                                 preposition is retained before an NP or an Ing complement clause, but must
                                                                                                                 be omitted before a complement clause introduced by that, for or to (and
                                                                                                                 may optionally be omitted before a complement clause beginning in wh- :

                                                                                                                 He boasted about his victory
                                                                                                                 He boasted – that he had won
                                                                                                                 They decided on John
                                                                                                                 They decided – that John would be chosen
                                                                                                                 It was decided that John would be chosen
                                                                                                                 I was surprised by the fact that the plumber came
                                                                                                                 I was surprised – that the plumber came » (Dixon 1991 : 66).
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                                                                                                         Pour lui, il existe en ce cas en anglais une préposition sous-jacente, parce




                                                                                                                                                                                                   Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université
                                                                                                         qu’elle peut réapparaître dans la même construction verbale, au passif :
                                                                                                                 Everyone hoped (*for ) that England would win
                                                                                                                 That England would win was hoped for by everyone (Dixon 1991 : 14).

                                                                                                         En français, comme on ne peut pas miser sur une « stranded » préposition
                                                                                                         de ce type, on peut vérifier qu’il y a une préposition en recourant à une
                                                                                                         dislocation, qui fait surgir, auprès de l’élément disloqué, un pronom clitique
                                                                                                         dont la forme n’est pas le, mais en :
                                                                                                                 On en est sûr, que les orages vont se déplacer

                                                                                                         On se donnera donc le droit de poser également en français l’existence d’une
                                                                                                         préposition sous-jacente.

                                                                                                         3.      Rencontre entre deux prépositions appartenant à
                                                                                                                 deux valences verbales distinctes
                                                                                                         La rencontre se produit lorsqu’un verbe qui construit un complément de
                                                                                                         valence avec une préposition admet, dans le même paradigme, une
                                                                                                         « interrogative indirecte », qui commence elle-même par une préposition.
                                                                                                         On construit très aisément se rendre compte de, avec un syntagme nominal,
                                                                                                         en gardant la préposition de :
                                                                                                                 Te rends-tu compte de la situation ?



                                                                                                         90
Préposition à éclipses

                                                                                                         Avec une que-phrase, cette préposition se perd :
                                                                                                               Te rends-tu compte (*de) que c’est dangereux ?

                                                                                                         Avec des interrogatives indirectes qui commencent par ces interrogatifs
                                                                                                         comme comment, quel, non précédés de préposition, la tournure est possible :
                                                                                                               Ça dépendra de comment ça se passe (oral Répondeur 4,2)

                                                                                                               On peut s’interroger sur quelles étaient les circonstances quand le décrochage
                                                                                                               est intervenu (oral, Radio Informations 08/2000),

                                                                                                         Mais avec des interrogatives comme de qui il était question, de quoi j’ai
                                                                                                         l’air, à qui tu l’as confiée, avec qui je dois travailler, qui commencent elles-
                                                                                                         mêmes par une préposition, la décision est plus délicate. Les locuteurs
                                                                                                         peuvent-ils tolérer une suite de prépositions de+de, de+à, de+avec, comme
                                                                                                         il s’en produit dans les exemples suivants, à la jonction des deux grands
                                                                                                         constituants ?
                                                                                                               Te rends-tu compte de de qui il était question ?
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université




                                                                                                               Te rends-tu compte de de quoi j’ai l’air ?




                                                                                                                                                                                                 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université
                                                                                                               Te rends-tu compte de à qui tu l’as confiée ?
                                                                                                               Te rends-tu compte de avec qui je dois travailler ?

                                                                                                         Les exemples sont rarement attestés; lorsqu’on sollicite des usagers, leurs
                                                                                                         réponses semblent diverses et peu fiables : « pas joli, mais pas impossible ».
                                                                                                         Meyer-Lübke allait jusqu’à dire que le français moderne serait « plutôt
                                                                                                         antipathique à la juxtaposition de prépositions » (T. III, p. 132, cité par
                                                                                                         Damourette et Pichon VII : 266). Les locuteurs acceptent à la rigueur les
                                                                                                         rencontres de de+à, de+avec, mais ils préfèrent nettement les solutions
                                                                                                         dans lesquelles la préposition valencielle « se perd » devant celle du terme
                                                                                                         interrogatif :
                                                                                                               [Te rends-tu compte ] [de qui il était question] ?
                                                                                                               [Te rends-tu compte ] [de quoi j’ai l’air] ?
                                                                                                               [Te rends-tu compte ] [où nous allons] ?
                                                                                                               [Te rends-tu compte ] [ à qui tu l’as confiée] ?
                                                                                                               [Te rends-tu compte ] [avec qui je dois travailler] ?

                                                                                                         C’est la situation que P. Le Goffic (1994) décrit comme celle de la
                                                                                                         « percontative pseudo-directe », qu’il illustre par un exemple :
                                                                                                               Réfléchissez ( ) dans quelle aventure vous vous embarquez ici (P. Le Goffic
                                                                                                               (1994 : 265).

                                                                                                         Dans les exemples oraux attestés, comment se comportent les verbes d’usage
                                                                                                         fréquent comme dépendre de, s’intéresser à, réfléchir à, s’interroger sur,



                                                                                                                                                                                           91
Claire BLANCHE -BENVENISTE

                                                                                                         se renseigner sur ? Il semble qu’un certain nombre de combinaisons
                                                                                                         virtuellement possibles soient exclues de l’usage, à cause des difficultés de
                                                                                                         rencontre des prépositions. Comme on l’a vu, on peut effacer les prépositions
                                                                                                         valencielles comme de ou à, quand elles sont faibles. Mais, malgré l’exemple
                                                                                                         cité par Le Goffic, il est apparemment plus difficile d’effacer des prépositions
                                                                                                         plus « fortes » comme sur :
                                                                                                                 *Je l’ai interrogé – de quoi il était question
                                                                                                                 *Je l’ai interrogé – à qui il l’a confiée
                                                                                                                 *Je l’ai interrogé – où nous allons

                                                                                                                 *Je l’ai interrogé – avec qui je dois travailler

                                                                                                         Il est également difficile de conserver cette préposition devant l’autre
                                                                                                         préposition, appartenant à l’interrogative qui suit, car ces combinaisons
                                                                                                         paraissent toujours « bizarres » :
                                                                                                                 Je l’ai interrogé sur de quoi il était question
                                                                                                                 Je l’ai interrogé sur à qui il l’a confiée
                                                                                                                 Je l’ai interrogé sur où nous allons
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                                                                                                                                                                                            Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université
                                                                                                                 Je l’ai interrogé sur avec qui je dois travailler

                                                                                                         Le résultat est que l’on tombe là sur des « indicibles » de la langue.

                                                                                                         4.      Conclusion
                                                                                                         La conclusion est provisoire. Elle porte à la fois sur les données et sur
                                                                                                         l’analyse. Pour les données, d’abord. La « préposition à éclipse » n’a
                                                                                                         généralement pas reçu une bonne légitimation grammaticale, que ce soit
                                                                                                         chez les grammairiens classiques ou chez les linguistes contemporains. Ce
                                                                                                         n’est pas par hasard. Elle oblige à considérer deux situations désagréables.
                                                                                                         Dans l’une, on doit convenir qu’il y a des combinatoires syntaxiques
                                                                                                         virtuelles qu’on ne peut pas réaliser facilement. C’est le domaine des
                                                                                                         « indicibles ». Dans l’autre, on doit admettre qu’une seule et même « chose »
                                                                                                         syntaxique puisse se dire de trois façons différentes, sans qu’il soit possible
                                                                                                         d’installer sérieusement, entre les trois, des nuances de style, de contenu ou
                                                                                                         d’âge diachronique. Certains grammairiens du XVIIe dotés d’un peu
                                                                                                         d’humour avaient réfléchi à cette question avec plus de liberté qu’on ne le
                                                                                                         fait aujourd’hui. A l’époque où, pour standardiser la langue selon les
                                                                                                         consignes officielles, ils étaient sommés de se prononcer entre plusieurs
                                                                                                         usages, ils étaient bien convaincus que, s’ils devaient déclarer mauvais
                                                                                                         certains usages, c’était uniquement par conformisme, et que les formes
                                                                                                         officiellement écartées n’en continuaient pas moins à exister dans la langue.



                                                                                                         92
Préposition à éclipses

                                                                                                         De deux tournures, disait Andry de Boisregard, ils veulent toujours qu’il y
                                                                                                         en ait « une de mauvaise » :
                                                                                                               C’est un défaut ordinaire à nos grammairiens de s’imaginer que dès qu’une
                                                                                                               chose se dit de deux façons, il faut condamner l’une pour autoriser l’autre.
                                                                                                               Pourquoy ne pourront-elles pas estre toutes deux bonnes ? […] Il semble
                                                                                                               qu’il ne leur soit pas libre de les admettre toutes deux et qu’il faille
                                                                                                               necessairement qu’il y en ait une de mauvaise, en quoy ils se trompent fort »
                                                                                                               (Andry de Boisregard, 1689, Réflexions sur l’Usage présent de la Langue
                                                                                                               Française, p. 420).

                                                                                                         Pour l’analyse, la clef des embarras vient du statut grammatical à accorder
                                                                                                         à qu-. Les grammaires orientées vers les solutions morphologiques ont
                                                                                                         tendance à décider que deux constructions différentes se manifestent dans
                                                                                                         les clivées, selon qu’il s’agit d’un pronom relatif, qui supporte les
                                                                                                         prépositions :
                                                                                                               C’est vous à qui je veux en parler

                                                                                                         ou d’une conjonction, qui rejette la préposition :
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                                                                                                                                                                                                Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université
                                                                                                               C’est à vous que je veux en parler

                                                                                                                Berrendonner (1997), convaincu que ce sont des constructions
                                                                                                         distinctes, envisageait même que les locuteurs puissent s’y embrouiller en
                                                                                                         produisant des « hybrides », qui seraient les formes à double préposition,
                                                                                                               C’est à vous à qui je veux parler.

                                                                                                         Je ferais plutôt l’hypothèse qu’il s’agit, dans les trois cas cités, d’une seule
                                                                                                         et même structure syntaxique clivée, quelle que soit la réalisation
                                                                                                         morphologique qui en est donnée, soit par des pronoms qui supportent les
                                                                                                         prépositions, soit par une conjonction qui les refuse. La réalisation
                                                                                                         morphologique se situerait au niveau des réalisations et non au niveau de la
                                                                                                         structure syntaxique.
                                                                                                                 C’était déjà la position qu’avaient adoptée Moreau (1971), Kayne
                                                                                                         (1975) et Tranel (1978) pour analyser les emplois non-prépositionnels du
                                                                                                         relatif, qui et que, où ils voyaient des manifestations d’une conjonction.
                                                                                                         Ces linguistes fondaient leurs analyses essentiellement sur les phénomènes
                                                                                                         de « relatives emboîtées ». Je proposerai d’étendre l’analyse aux emplois
                                                                                                         prépositionnels manifestés dans les tournures syntaxiques focalisantes que
                                                                                                         je viens de citer. Le pronom et la conjonction y ont une distribution réglée
                                                                                                         par le phénomène de la « préposition à éclipse » : préposition présente avec
                                                                                                         la réalisation de pronom; préposition absente avec la réalisation de
                                                                                                         conjonction. Cela reviendrait à dissocier, dans les deux cas, le niveau des
                                                                                                         structures syntaxiques et le niveau des réalisations morphologiques.


                                                                                                                                                                                          93
Claire BLANCHE -BENVENISTE

                                                                                                                                              NOTES

                                                                                                             1. J’ai déjà abordé une partie de cette question dans une communication faite
                                                                                                         au XXIIe Congrès de Linguistique et Philologie Romanes, à Bruxelles, en juillet
                                                                                                         1998. J’essayais alors d’y englober des énoncés non-normatifs relevés en français
                                                                                                         parlé. Ici je ne retiendrai que des énoncés réputés normatifs.
                                                                                                             2. Il est usuel de considérer que dont représente [de + que ] et que où représente
                                                                                                         [locatif + que].
                                                                                                             3. Damourette et Pichon en citent quelques exemples qu’ils auraient entendus
                                                                                                         oralement, et qui paraissent assez isolés, comme Il a joué à qu’il serait un horrible
                                                                                                         monstre (Damourette et Pichon VII, 257). Nous n’en avons pas rencontré dans les
                                                                                                         corpus de français parlé actuels.


                                                                                                                                         RÉFÉRENCES

                                                                                                         B ERRENDONNER A., 1997, Conférence EPHE, « Les hybridations ».
                                                                                                         BLANCHE-B ENVENISTE C., 1998, « Présence et absence de prépositions dans les clivées
                                                                                                             et les pseudo-clivées », in A. ENGLEBERT, M. PIERRARD, L. ROSIER, D. VAN
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                                                                                                             RAEMDONCK (éds) ; XXIIe Congrès de Linguistique et de Philologie Romanes,




                                                                                                                                                                                                  Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université
                                                                                                             (Bruxelles, 1998), Tübingen, Niemeyer, vol. VI, p. 55-65.
                                                                                                         B LANCHE-BENVENISTE C., DEULOFEU, J., STEFANINI, J. et VAN DEN EYNDE , K., 1997,
                                                                                                             L’Approche pronominale et son application au français. Paris, SELAF.
                                                                                                         DAMOURETTE J. et PICHON E., 1911-1940, Des mots à la pensée. Essai de Grammaire
                                                                                                             française. Paris, d’Artrey.
                                                                                                         DIXON R.M.W., 1991, A New Approach to English Grammar on Semantic Principles.
                                                                                                             Oxford, Clarendon Press.
                                                                                                         FOURNIER N., 1998, Grammaire du français classique. Paris, Belin (Collection SUP).
                                                                                                         HAASE A., 1914, Syntaxe française du XVII e siècle. Paris, Delagrave.
                                                                                                         HADERMANN P., 1993, Étude morphosyntaxique du mot « où ». Louvain-la-Neuve,
                                                                                                             Duculot (Collection « Champs Linguistiques »).
                                                                                                         JONES M.A., 1996, A Grammar of Modern French. Cambridge University Press.
                                                                                                         KAYNE R., 1974-1975, « French relative QUE », Recherches Linguistiques 2-3,
                                                                                                             p. 40-61 ; 27-92.
                                                                                                         LE GOFFIC P., 1994, Grammaire de la phrase française. Paris, Hachette.
                                                                                                         MARTINON Ph., 1927, Comment on parle en français. Paris, Larousse.
                                                                                                         MEYER-L ÜBKE W., 1890-1902, Grammaire des Langues Romanes (traduction
                                                                                                             française), 4 volumes, Paris, Welter.
                                                                                                         MOREAU M.-L., 1971, « L’homme que je crois qui est venu. QUI, QUE, relatifs et
                                                                                                             conjonctions », Langue française 11, p. 77-90.
                                                                                                         MULLER Cl., 1992, « Remarques sur la jonction qu- du français dans les interrogatives
                                                                                                             et les relatives », in TASMOWSKI et ZRIBI-HERTZ (éds.), Hommage à Nicolas Ruwet.
                                                                                                             De la musique à la linguistique, Numéro spécial de Communication et Cognition,
                                                                                                             p. 398-409.
                                                                                                         R IEGEL M., PELLAT J.C. et RIOUL R., 1994, Grammaire méthodique du français.



                                                                                                         94
Préposition à éclipses

                                                                                                             Paris, PUF.
                                                                                                         ROUBAUD M.-N., 2000, Les constructions pseudo-clivées en français contemporain.
                                                                                                             Paris, Champion (Collection « Les Français parlés, textes et études »).
                                                                                                         ROUQUIER M., 1988, Les ce-que phrases en ancien français. Thèse, Paris-VII.
                                                                                                         ROUQUIER M., 1990, « Le terme ce que régissant une complétive en ancien français »,
                                                                                                             Revue Romane, 25, p. 48-72.
                                                                                                         SCAPPINI S., Thèse en cours sur les constructions clivées en français contemporain.
                                                                                                             Université de Provence.
                                                                                                         SEIJIDO M., Thèse en cours sur le « remarqueur » Andry de Boisregard, Université
                                                                                                             de Provence.
                                                                                                         TRANEL B., 1978, « On the elision of i in French qui », Studies in French Linguistics,
                                                                                                             1, p. 53-75.
                                                                                                         WAILLY de, 1803, Principes généraux et particuliers de la langue française. Paris,
                                                                                                             H. Barbou.
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Préposition à éclipses

  • 1. PRÉPOSITION À ÉCLIPSES Claire Blanche-Benveniste De Boeck Université | Travaux de linguistique 2001/1 - no42-43 pages 83 à 95 ISSN 0082-6049 Article disponible en ligne à l'adresse: -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- http://www.cairn.info/revue-travaux-de-linguistique-2001-1-page-83.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Blanche-Benveniste Claire , « Préposition à éclipses » , Travaux de linguistique, 2001/1 no42-43, p. 83-95. DOI : 10.3917/tl.042.083 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour De Boeck Université. © De Boeck Université. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit.
  • 2. Préposition à éclipses PRÉPOSITION À ÉCLIPSES Claire BLANCHE-BENVENISTE * École Pratique des Hautes Études, Paris Les prépositions spécifiques des valences verbales sont généralement considérées comme indispensables pour une bonne réalisation des compléments qu’elles « introduisent ». Le verbe confier a un complément de valence à valeur de « bénéficaire ». Lorsque ce complément est réalisé sous forme de syntagme nominal, il doit être précédé de la préposition à : Elle a confié la robe à sa mère. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université Sans cette préposition, la tournure serait grammaticalement mal formée Elle a confié la robe *sa mère C’est seulement lorsque ce complément « bénéficiaire » est réalisé sous la forme d’un pronom clitique, me, te, se, lui, leur, qu’il se réalise sans la présence de la préposition à : Elle m’a confié la robe, elle la lui a confiée, elles la leur ont confiée, elles se la sont confiée, etc. Par là s’explique l’habitude de dire que ces compléments sont « introduits » par une préposition et de considérer ce type de prépositions comme des « introducteurs ». Mais pourtant, dans d’autres situations, par exemple entre c’est et qu-, la préposition à exigée par le verbe confier devant le complément nominal a un statut plus compliqué. Elle peut figurer une fois devant le complément nominal, ce qui paraît le plus « normal » : [1] C’est à sa mère qu’elle a confié la robe c’est [ + prép N ] [ - prép que] V a confié Elle peut être absente devant le complément nominal, mais présente devant qu- (réalisé sous forme du pronom qui) : * 21 avenue Jules-Ferry, F. 13100 Aix-en-Provence (France) – Tél : 00 33 4 42 27 66 18 – claire.benveniste@pop.freesbee.net 83
  • 3. Claire BLANCHE -BENVENISTE [2] C’est sa mère à qui elle a confié sa robe c’est [ - prép N ] [ + prép que] V a confié Elle peut aussi figurer deux fois, aussi bien devant le complément nominal que devant qu- : [3] C’est à sa mère à qui elle a confié sa robe c’est [ + prép N ] [ + prép que] V a confié La première tournure [1] a une meilleure réputation normative que les deux autres, mais tout le monde s’accorde généralement à reconnaître que les deux autres, [2] et [3], sont aussi grammaticalement bien formées. Cette particularité est mentionnée depuis longtemps par les grammairiens français, qui pourtant, pour la plupart, ont été gênés par la coexistence de trois tournures grammaticalement si proches (de Wailly 1803, Bescherelle 1867, Martinon 1927, Grevisse 1986). Plusieurs ont cherché à y mettre de l’ordre, en supposant par exemple qu’elles n’avaient pas la même histoire diachronique ou en cherchant à en dévaluer au moins une sur les trois. Une remarque célèbre de l’Académie française avait déjà tenté de Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université discréditer l’usage de la double préposition chez Boileau (cf. N. Fournier 1998: 134-6) : C’est à vous mon esprit à qui je veux parler (Boileau 1668, Satire IX, 1). Les générativistes ont suivi le même raisonnement, en présentant la tournure à deux prépositions comme un archaïsme (Jones 1996), la tournure à préposition devant qui comme une sorte d’étape intermédiaire dans le développement et la tournure la plus normative comme un aboutissement moderne de l’évolution. Comme il arrive très souvent dans ce type de présentation, tout se passe comme si un « bon complot » avait guidé l’évolution historique pour l’amener vers la seule bonne forme normative. Il me semble que cette interprétation est fondée sur des bases peu solides et qu’on doit accepter l’idée que les trois tournures coexistent actuellement, et qu’elles ont sans doute coexisté à d’autres époques. Dans cette perspective, il faudrait admettre que ce phénomène de « préposition à éclipses » n’est pas un accident de l’évolution mais qu’il fait partie de la grammaire. Comme d’autres langues semblent présenter des faits analogues (Dixon 1991 : 14, 48, 66, 68, 281-286), on peut être tenté d’y voir un phénomène plus général, qui ne serait pas spécifiquement français. Je propose de rappeler les principales circonstances dans lesquelles s’observe ce phénomène de la « préposition à éclipses », et d’en envisager quelques interprétations1. 84
  • 4. Préposition à éclipses 1. La répartition entre prépositions, pronoms et conjonctions dans les clivées et les restrictives Je m’intéresse aux « compléments prépositionnels » qui apparaissent en position focalisée dans les constructions clivées en c’est… qu-… et les restrictives en il n’y a que….qu-…. Dans les deux cas, ces compléments prépositionnels forment un syntagme autonome, qui n’est aucunement déterminé par la suite en qu-, comme ce serait le cas avec un antécédent et une relative. On peut prendre comme prototypes des syntagmes autonomes et non-autonomes les formes de pronoms celui-ci et celui- (Cf. Blanche- Benveniste et alii, 1987) : C’est à celui-ci que je l’ai demandé Il n’y a qu’à celui-ci que je l’ai demandé C’est celui à qui je l’ai demandé Il n’y a que celui à qui je l’ai demandé Dans les constructions clivées et dans les restrictives, qui présentent un syntagme autonome, la forme du complément prépositionnel est dictée par Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université la valence du verbe placé après que. Le relevé des exemples contemporains amène à distinguer trois modèles. 1.1. Le modèle de réalisation le plus simple est celui qui fait apparaître la préposition suivie du syntagme nominal dans la position privilégiée entre d’une part c’est , il n’y a que et d’autre part la conjonction que, soit, schématiquement : [+prép N] [- prép Que] C’est [à toi] que ces choses-là arrivent Il n’y a qu’[à toi] que ces choses-là arrivent Exemples en français parlé : ce n’est pas à nous que vous feriez croire cela (Plaidoyer 19,4) c’est pas à vous qu’il faut le demander (BusE36) c’est pas pour moi que je parle (BusE49) c’est sur moi que maman comptait (Barallier 45,12) c’est sur la goupille qu’il y a marqué les numéros de série (Poi98 Vengeance 45,12) Exemples en français écrit contemporain : Et c’est avec son mari et leur serveuse qu’elle a dégusté le plat, à l’abri des regards désapprobateurs (Presse) 85
  • 5. Claire BLANCHE -BENVENISTE Exemple en français écrit du XVe siècle : C’est à vous mesme que je parle (Pathelin, ca 1456, DMF, p. 176, communiqué par M. Rouquier) 1.2. Dans le deuxième modèle, la préposition ne figure pas devant le syntagme clivé ou restreint, mais devant l’élément Qu-, qui est en ce cas un pronom, qui, quoi, lequel, dont, où, soit schématiquement : [- prép N] [+ prép Qu-]2 Exemples en français parlé C’est sûrement elle à qui il pensait l’offrir (Cl89-90) Exemples en français écrit contemporain c’est certainement cela dont j’ai peur (Gide, d’après Togeby) Parce que c’est elle à qui Monica avait confié la Robe, qu’elle garda dans son appartement du Watergate à Washington (Presse 0508981) Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université Exemple en français écrit du XVe siècle Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université Ouy, Monseigneur, c’est Gervaise à qui je donnay ma main et ma foy (Le Jouvencel, ca.1461-6, DMF 1,224, communiqué par M. Rouquier) 1.3. Dans le troisième modèle, la préposition figure dans les deux emplacements : [+prép N] [+ prép Qu-] Exemples en français parlé c’est de ça dont j’ai parlé dans la dernière réunion où je suis allée (Beaumettes 7,8) c’est évidemment d’information dont nous allons parler (Charrier 61287) et c’est là où il y a la caserne (Poi 98, incendie 33,3) c’est à peu près à ce moment-là où moi je suis venu m’installer définitivement (Barrad 17,14) c’est là où vous vous rendez compte qu’en fait vous êtes rien (Poi98 Attentat 4,24) c’est là où justement il y avait beaucoup plus de dangers (Poi 98 Hold up 27,3) Exemples en français écrit contemporain ce n’est pas de pain, en effet, selon lui, dont les Indiens avaient besoin (Ionesco, d’après Togeby) 86
  • 6. Préposition à éclipses Exemple en français écrit du XVe siècle C’est à vous à qui je vendi six aulnes de drap, maître Pierre (Pathelin, DMF, p. 160, communiqué par M. Rouquier). Lorsque l’on rassemble des exemples pris aux différentes époques, on se convainc assez facilement que ces tournures existent sous leurs trois formes depuis le XVe siècle, qu’elles ont été toutes trois exploitées à l’époque classique (cf. Haase 1914, Fournier 1998), qu’elles existent encore aujourd’hui et qu’on ne peut pas les placer l’une derrière l’autre dans une perspective d’évolution historique, comme l’ont supposé de nombreux grammairiens. On peut considérer qu’il y a actuellement un supplétisme entre les deux grands types morphologiques : la réalisation [préposition + pronom] et la réalisation [absence de préposition + conjonction que]. La répartition peut être ainsi résumée : [(à) elle] [ à qui] [(à) cela] [ à quoi] [(de) cela] [ dont] [(à) celle-ci] [ à laquelle] [(à) cet endroit] [où] [où] Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université [à elle] [ - que] [à cela] [ - que] [de cela] [ - que] [à celle-ci] [ - que] [à cet endroit] [ - que] Les grammairiens qui se sont intéressés à la question ont souvent été obnubilés par le problème de la « partie du discours » (cf. Riegel et alii (1994 : 537), et se sont surtout attachés à définir la nature de l’élément qu. Ils ont été gênés d’avoir à accepter que cet élément doive être analysé, selon les cas, tantôt comme une conjonction que et tantôt comme un pronom relatif, qui, quoi, dont, où. Lorsque la concurrence est possible, l’usage de la conjonction leur paraît plus « pauvre », parce qu’elle ne fait ressortir aucun cas de « flexion ». Mais il était bien difficile d’analyser que comme un pronom dans des exemples comme : C’est là qu’il habitait C’est à ce moment qu’il est parti C’est ainsi que nous l’appelons Cela fait partie des cas que mentionne Dixon où la préposition disparaît devant les « measure phrases », He runs (for) three miles, She stood in the pouring rain twenty minutes (Dixon 1991 : 285). Cette omission de préposition correspondrait, selon lui, pour l’anglais, à un effet particulier de la focalisation portant sur des éléments aspectuels des 87
  • 7. Claire BLANCHE -BENVENISTE compléments. Mais l’analyse se prolonge pour les cas où, en français, le dispositif clivé permet des constructions sans préposition, qui seraient impossibles dans un dispositif direct : Elle y est *des années / Il y a des années qu’elle y est Je joue *la dernière fois / C’est la dernière fois que je joue Il était ouvert *deux ou trois mois / ça faisait deux ou trois mois qu’il était ouvert Une autre solution, qui est un peu un renoncement, consiste à voir ici une « grammaticalisation », difficile à analyser morphème par morphème. Une autre solution, qui suppose une sorte de « complémentarité » entre pronom et conjonction, consiste à considérer que, dans une même construction clivée ou restrictive, avec la même valeur syntaxique, deux réalisations morphologiques sont également possibles, l’une avec un pronom qui supporte une préposition et une autre avec une conjonction que qui renvoie la préposition devant le syntagme clivé. Il ne s’agirait pas d’une marque d’une différenciation fonctionnelle entre les tournures proprement relatives : dans un cas la préposition est conservée auprès de l’élément qu-, un touriste Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université à qui : C’est un touriste déjà assez blasé à qui on promet un dépaysement certain (Presse), et dans l’autre la préposition serait auprès de l’élément clivé, à un touriste que : C’est à un touriste déjà assez blasé qu’on promet un dépaysement certain. Il faudrait admettre que les deux coexistent sans aucune différence sémantique. 2. Les que-phrases incompatibles avec une préposition Je m’intéresse maintenant aux rencontres à prévoir entre une préposition et une « que-phrase ». Certains verbes ont un complément de valence qui se réalise par une préposition suivie d’un syntagme nominal ou d’un verbe à l’infinitif Je me souviens de cela Je me souviens de lui Je me souviens de l’arrivée de Jean Je me souviens d’avoir vu Jean arriver Lorsque cette valence complément comporte également une que-phrase, il est impossible de la faire précéder d’une préposition faible comme de, à, en : 88
  • 8. Préposition à éclipses Je me souviens de *que Jean est arrivé très tard Je me plains de*qu’il arrive si tard3 Deux solutions se présentent, l’une morphologiquement « riche » et l’autre « pauvre ». La « riche » consiste à étoffer le que en ce que : Je me souviens, je m’étonne, je me plains de ce que Jean arrive très tard Magali Rouquier (1988, 1990) a étudié le développement diachronique de cette tournure en ce que, qui semble s’être restreinte au cours de l’histoire. La solution « pauvre » consiste à faire tomber la préposition et à ne garder que le que : (Je me souviens, je m’étonne, je me plains) que Jean arrive si tard Les grammaires d’usage donnent des listes de verbes à solution riche, (aider à ce que, s’excuser, etc.) de ce que…. (tenir, se plaire , etc) à ce que…. d’autres à solution pauvre, Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université (avertir, avoir besoin, se désoler, s’indigner, se souvenir, etc.) que… et de ceux pour lesquels l’usage est hésitant : s’attendre à ce / que … – se rendre compte de ce / que… Les choix varient selon les usagers. Grevisse (1986) recommande je demande à ce qu’on m’oublie, là où l’usage le plus général semblerait plutôt être Je demande qu’on m’oublie. La tendance semble être, du reste, de choisir que, comme en témoigne cet exemple de sensibiliser, ordinairement construit avec à (sensibiliser à quelque chose), tel qu’il apparaît avec une que-phrase dans une conversation : Il faudrait sensibiliser les gens que le feu rouge c’est quand même dans le code de la route (Sardier 6,8) Le problème existe aussi dans les réalisations pseudo-clivées, par exemple pour être sûr, être conscient de (Cf. Roubaud 2000) : Ce dont je suis sûr, c’est de cela Ce dont je suis sûr, c’est d’avoir très bien compris Ce dont je suis sûr, c’est *de qu’il va pleuvoir La réalisation tend généralement vers que : Ce dont on est sûr, c’est que ces orages vont se déplacer (Roubaud 2000 : 409). 89
  • 9. Claire BLANCHE -BENVENISTE Ce dont les Américains sont conscients, c’est que Bill Clinton va aller piocher dans les poches de certains d’entre eux (Roubaud 2000 : 393) Dixon (1991) mentionne des phénomènes analogues en anglais. Il en fait même un argument privilégié pour poser l’existence d’une forme sous- jacente de la préposition : « Omission of a preposition before complementisers that, for or to. The preposition is retained before an NP or an Ing complement clause, but must be omitted before a complement clause introduced by that, for or to (and may optionally be omitted before a complement clause beginning in wh- : He boasted about his victory He boasted – that he had won They decided on John They decided – that John would be chosen It was decided that John would be chosen I was surprised by the fact that the plumber came I was surprised – that the plumber came » (Dixon 1991 : 66). Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université Pour lui, il existe en ce cas en anglais une préposition sous-jacente, parce Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université qu’elle peut réapparaître dans la même construction verbale, au passif : Everyone hoped (*for ) that England would win That England would win was hoped for by everyone (Dixon 1991 : 14). En français, comme on ne peut pas miser sur une « stranded » préposition de ce type, on peut vérifier qu’il y a une préposition en recourant à une dislocation, qui fait surgir, auprès de l’élément disloqué, un pronom clitique dont la forme n’est pas le, mais en : On en est sûr, que les orages vont se déplacer On se donnera donc le droit de poser également en français l’existence d’une préposition sous-jacente. 3. Rencontre entre deux prépositions appartenant à deux valences verbales distinctes La rencontre se produit lorsqu’un verbe qui construit un complément de valence avec une préposition admet, dans le même paradigme, une « interrogative indirecte », qui commence elle-même par une préposition. On construit très aisément se rendre compte de, avec un syntagme nominal, en gardant la préposition de : Te rends-tu compte de la situation ? 90
  • 10. Préposition à éclipses Avec une que-phrase, cette préposition se perd : Te rends-tu compte (*de) que c’est dangereux ? Avec des interrogatives indirectes qui commencent par ces interrogatifs comme comment, quel, non précédés de préposition, la tournure est possible : Ça dépendra de comment ça se passe (oral Répondeur 4,2) On peut s’interroger sur quelles étaient les circonstances quand le décrochage est intervenu (oral, Radio Informations 08/2000), Mais avec des interrogatives comme de qui il était question, de quoi j’ai l’air, à qui tu l’as confiée, avec qui je dois travailler, qui commencent elles- mêmes par une préposition, la décision est plus délicate. Les locuteurs peuvent-ils tolérer une suite de prépositions de+de, de+à, de+avec, comme il s’en produit dans les exemples suivants, à la jonction des deux grands constituants ? Te rends-tu compte de de qui il était question ? Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université Te rends-tu compte de de quoi j’ai l’air ? Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université Te rends-tu compte de à qui tu l’as confiée ? Te rends-tu compte de avec qui je dois travailler ? Les exemples sont rarement attestés; lorsqu’on sollicite des usagers, leurs réponses semblent diverses et peu fiables : « pas joli, mais pas impossible ». Meyer-Lübke allait jusqu’à dire que le français moderne serait « plutôt antipathique à la juxtaposition de prépositions » (T. III, p. 132, cité par Damourette et Pichon VII : 266). Les locuteurs acceptent à la rigueur les rencontres de de+à, de+avec, mais ils préfèrent nettement les solutions dans lesquelles la préposition valencielle « se perd » devant celle du terme interrogatif : [Te rends-tu compte ] [de qui il était question] ? [Te rends-tu compte ] [de quoi j’ai l’air] ? [Te rends-tu compte ] [où nous allons] ? [Te rends-tu compte ] [ à qui tu l’as confiée] ? [Te rends-tu compte ] [avec qui je dois travailler] ? C’est la situation que P. Le Goffic (1994) décrit comme celle de la « percontative pseudo-directe », qu’il illustre par un exemple : Réfléchissez ( ) dans quelle aventure vous vous embarquez ici (P. Le Goffic (1994 : 265). Dans les exemples oraux attestés, comment se comportent les verbes d’usage fréquent comme dépendre de, s’intéresser à, réfléchir à, s’interroger sur, 91
  • 11. Claire BLANCHE -BENVENISTE se renseigner sur ? Il semble qu’un certain nombre de combinaisons virtuellement possibles soient exclues de l’usage, à cause des difficultés de rencontre des prépositions. Comme on l’a vu, on peut effacer les prépositions valencielles comme de ou à, quand elles sont faibles. Mais, malgré l’exemple cité par Le Goffic, il est apparemment plus difficile d’effacer des prépositions plus « fortes » comme sur : *Je l’ai interrogé – de quoi il était question *Je l’ai interrogé – à qui il l’a confiée *Je l’ai interrogé – où nous allons *Je l’ai interrogé – avec qui je dois travailler Il est également difficile de conserver cette préposition devant l’autre préposition, appartenant à l’interrogative qui suit, car ces combinaisons paraissent toujours « bizarres » : Je l’ai interrogé sur de quoi il était question Je l’ai interrogé sur à qui il l’a confiée Je l’ai interrogé sur où nous allons Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université Je l’ai interrogé sur avec qui je dois travailler Le résultat est que l’on tombe là sur des « indicibles » de la langue. 4. Conclusion La conclusion est provisoire. Elle porte à la fois sur les données et sur l’analyse. Pour les données, d’abord. La « préposition à éclipse » n’a généralement pas reçu une bonne légitimation grammaticale, que ce soit chez les grammairiens classiques ou chez les linguistes contemporains. Ce n’est pas par hasard. Elle oblige à considérer deux situations désagréables. Dans l’une, on doit convenir qu’il y a des combinatoires syntaxiques virtuelles qu’on ne peut pas réaliser facilement. C’est le domaine des « indicibles ». Dans l’autre, on doit admettre qu’une seule et même « chose » syntaxique puisse se dire de trois façons différentes, sans qu’il soit possible d’installer sérieusement, entre les trois, des nuances de style, de contenu ou d’âge diachronique. Certains grammairiens du XVIIe dotés d’un peu d’humour avaient réfléchi à cette question avec plus de liberté qu’on ne le fait aujourd’hui. A l’époque où, pour standardiser la langue selon les consignes officielles, ils étaient sommés de se prononcer entre plusieurs usages, ils étaient bien convaincus que, s’ils devaient déclarer mauvais certains usages, c’était uniquement par conformisme, et que les formes officiellement écartées n’en continuaient pas moins à exister dans la langue. 92
  • 12. Préposition à éclipses De deux tournures, disait Andry de Boisregard, ils veulent toujours qu’il y en ait « une de mauvaise » : C’est un défaut ordinaire à nos grammairiens de s’imaginer que dès qu’une chose se dit de deux façons, il faut condamner l’une pour autoriser l’autre. Pourquoy ne pourront-elles pas estre toutes deux bonnes ? […] Il semble qu’il ne leur soit pas libre de les admettre toutes deux et qu’il faille necessairement qu’il y en ait une de mauvaise, en quoy ils se trompent fort » (Andry de Boisregard, 1689, Réflexions sur l’Usage présent de la Langue Française, p. 420). Pour l’analyse, la clef des embarras vient du statut grammatical à accorder à qu-. Les grammaires orientées vers les solutions morphologiques ont tendance à décider que deux constructions différentes se manifestent dans les clivées, selon qu’il s’agit d’un pronom relatif, qui supporte les prépositions : C’est vous à qui je veux en parler ou d’une conjonction, qui rejette la préposition : Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université C’est à vous que je veux en parler Berrendonner (1997), convaincu que ce sont des constructions distinctes, envisageait même que les locuteurs puissent s’y embrouiller en produisant des « hybrides », qui seraient les formes à double préposition, C’est à vous à qui je veux parler. Je ferais plutôt l’hypothèse qu’il s’agit, dans les trois cas cités, d’une seule et même structure syntaxique clivée, quelle que soit la réalisation morphologique qui en est donnée, soit par des pronoms qui supportent les prépositions, soit par une conjonction qui les refuse. La réalisation morphologique se situerait au niveau des réalisations et non au niveau de la structure syntaxique. C’était déjà la position qu’avaient adoptée Moreau (1971), Kayne (1975) et Tranel (1978) pour analyser les emplois non-prépositionnels du relatif, qui et que, où ils voyaient des manifestations d’une conjonction. Ces linguistes fondaient leurs analyses essentiellement sur les phénomènes de « relatives emboîtées ». Je proposerai d’étendre l’analyse aux emplois prépositionnels manifestés dans les tournures syntaxiques focalisantes que je viens de citer. Le pronom et la conjonction y ont une distribution réglée par le phénomène de la « préposition à éclipse » : préposition présente avec la réalisation de pronom; préposition absente avec la réalisation de conjonction. Cela reviendrait à dissocier, dans les deux cas, le niveau des structures syntaxiques et le niveau des réalisations morphologiques. 93
  • 13. Claire BLANCHE -BENVENISTE NOTES 1. J’ai déjà abordé une partie de cette question dans une communication faite au XXIIe Congrès de Linguistique et Philologie Romanes, à Bruxelles, en juillet 1998. J’essayais alors d’y englober des énoncés non-normatifs relevés en français parlé. Ici je ne retiendrai que des énoncés réputés normatifs. 2. Il est usuel de considérer que dont représente [de + que ] et que où représente [locatif + que]. 3. Damourette et Pichon en citent quelques exemples qu’ils auraient entendus oralement, et qui paraissent assez isolés, comme Il a joué à qu’il serait un horrible monstre (Damourette et Pichon VII, 257). Nous n’en avons pas rencontré dans les corpus de français parlé actuels. RÉFÉRENCES B ERRENDONNER A., 1997, Conférence EPHE, « Les hybridations ». BLANCHE-B ENVENISTE C., 1998, « Présence et absence de prépositions dans les clivées et les pseudo-clivées », in A. ENGLEBERT, M. PIERRARD, L. ROSIER, D. VAN Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université RAEMDONCK (éds) ; XXIIe Congrès de Linguistique et de Philologie Romanes, Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université (Bruxelles, 1998), Tübingen, Niemeyer, vol. VI, p. 55-65. B LANCHE-BENVENISTE C., DEULOFEU, J., STEFANINI, J. et VAN DEN EYNDE , K., 1997, L’Approche pronominale et son application au français. Paris, SELAF. DAMOURETTE J. et PICHON E., 1911-1940, Des mots à la pensée. Essai de Grammaire française. Paris, d’Artrey. DIXON R.M.W., 1991, A New Approach to English Grammar on Semantic Principles. Oxford, Clarendon Press. FOURNIER N., 1998, Grammaire du français classique. Paris, Belin (Collection SUP). HAASE A., 1914, Syntaxe française du XVII e siècle. Paris, Delagrave. HADERMANN P., 1993, Étude morphosyntaxique du mot « où ». Louvain-la-Neuve, Duculot (Collection « Champs Linguistiques »). JONES M.A., 1996, A Grammar of Modern French. Cambridge University Press. KAYNE R., 1974-1975, « French relative QUE », Recherches Linguistiques 2-3, p. 40-61 ; 27-92. LE GOFFIC P., 1994, Grammaire de la phrase française. Paris, Hachette. MARTINON Ph., 1927, Comment on parle en français. Paris, Larousse. MEYER-L ÜBKE W., 1890-1902, Grammaire des Langues Romanes (traduction française), 4 volumes, Paris, Welter. MOREAU M.-L., 1971, « L’homme que je crois qui est venu. QUI, QUE, relatifs et conjonctions », Langue française 11, p. 77-90. MULLER Cl., 1992, « Remarques sur la jonction qu- du français dans les interrogatives et les relatives », in TASMOWSKI et ZRIBI-HERTZ (éds.), Hommage à Nicolas Ruwet. De la musique à la linguistique, Numéro spécial de Communication et Cognition, p. 398-409. R IEGEL M., PELLAT J.C. et RIOUL R., 1994, Grammaire méthodique du français. 94
  • 14. Préposition à éclipses Paris, PUF. ROUBAUD M.-N., 2000, Les constructions pseudo-clivées en français contemporain. Paris, Champion (Collection « Les Français parlés, textes et études »). ROUQUIER M., 1988, Les ce-que phrases en ancien français. Thèse, Paris-VII. ROUQUIER M., 1990, « Le terme ce que régissant une complétive en ancien français », Revue Romane, 25, p. 48-72. SCAPPINI S., Thèse en cours sur les constructions clivées en français contemporain. Université de Provence. SEIJIDO M., Thèse en cours sur le « remarqueur » Andry de Boisregard, Université de Provence. TRANEL B., 1978, « On the elision of i in French qui », Studies in French Linguistics, 1, p. 53-75. WAILLY de, 1803, Principes généraux et particuliers de la langue française. Paris, H. Barbou. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h27. © De Boeck Université 95