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ÉÉDDUUCCAATTIIOONN
Ellen G. White
1
Avis au lecteur
Nous devons attirer l’attention du lecteur sur
deux points importants. Le premier concerne la
date de la première parution de l’ouvrage et le
second son caractère religieux. Expliquons-nous.
Les livres d’éducation et de psychologie
appliquée vieillissent vite. Cela tient à des modes et
au vocabulaire, mais aussi à l’augmentation rapide
des connaissances dans ce secteur jeune et en
pleine évolution des sciences humaines. Et
lorsqu’un livre atteint la décennie, à moins d’être
profondément remanié, il est généralement
dépassé. Dès lors, est-il décent de proposer au
lecteur de la fin du 20e siècle un livre écrit en
1903?
Les livres dont la vie excède—à notre époque—
trois générations d’hommes sont de deux types. Il y
a ceux que l’on consulte encore dans des
bibliothèques spécialisées, avec un intérêt
historique, pour savoir ce que l’on écrivait ou
2
pensait à tel moment précis de l’histoire des idées.
Et puis il y a ceux qui continuent d’être des livres
de chevet, d’imprimer leur empreinte dans la
pensée et la vie des gens. Ces livres-là ne datent
pas. Bien sûr, on peut repérer à tel ou tel petit
détail le lieu ou le temps de leur rédaction; mais
l’essentiel n’est pas là. Ils véhiculent des idées et
des vérités tellement fondamentales sur l’homme
qu’elles sont presque des principes éternels. Nous
croyons que le livre Education de Madame Ellen
White est de ceux-là. Il a, en effet, été traduit dans
de très nombreuses langues et continue à être, tout
autour du monde, un manuel de base pour des
milliers de parents, d’enseignants, de pasteurs,
d’animateurs. Il est en particulier l’expression de
la philosophie qui inspire l’un des systèmes
scolaires privés les plus étendus dans le monde,
celui mis sur pied par le mouvement adventiste.
L’ouvrage manquait, depuis plusieurs années, en
langue française. Cette nouvelle édition, qui est en
même temps une nouvelle traduction, devrait donc
combler une lacune et mettre à la portée de
beaucoup un texte sur lequel il vaut la peine de
réfléchir.
3
Pour l’auteur, l’éducation ne s’adresse pas à
l’intelligence seule. L’enfant, comme l’homme, est
un tout. Sa vie, pour être harmonieuse, doit être à
la fois corporelle, intellectuelle, affective, pratique
et sociale, mais aussi spirituelle. Ellen White refuse
une éducation au rabais, sans de nécessaires
disciplines et ayant pour objet un être incomplet.
Notre société est en train de mesurer les
conséquences tragiques d’une “éducation” (mais
peut-on la nommer ainsi?) qui a cru pouvoir faire
l’économie de la vie intérieure, de ses racines
profondes, de ses finalités supérieures. Voilà
pourquoi le lecteur ne sera pas surpris, quelles que
soient, par ailleurs, sa position ou ses convictions
personnelles, de voir la place que l’auteur laisse à
la Bible et à celui qu’elle révèle, Jésus-Christ,
l’Educateur par excellence. Cette éducation, qui
vise non seulement la vie terrestre, sans la négliger
aucunement, mais encore la vie éternelle, acquiert
alors tout son sens. Perspective vertigineuse qui
pourrait devenir angoissante par la responsabilité
qu’elle entraîne si, en traçant l’itinéraire, l’auteur
ne rappelait constamment les moyens mis à notre
4
disposition par Dieu pour y parvenir.
Dès lors la poésie ou la nature, le travail
manuel ou l’alimentation, l’étude de l’histoire ou
de la biologie, la manière de se vêtir ou de vivre le
jour du repos ne constituent plus une mosaïque
fragmentaire et insignifiante mais une vaste
fresque, signe et avant-goût du Royaume des
Cieux.
Le souhait très profond des éditeurs est que cet
ouvrage soit une contribution, modeste mais réelle,
à l’éducation permanente de l’homme intègre,
total, à son renouveau puissant.
Les éditeurs
5
Chapitre 1
Origine et but de la véritable
éducation
La connaissance des saints, c’est l’intelligence
(Proverbes 9:10). Accorde-toi donc avec Dieu (Job
22:21).
Nos idées en matière d’éducation sont trop
étroites, trop limitées. Il nous faut les élargir et
viser plus haut. La véritable éducation implique
bien plus que la poursuite de certaines études. Elle
implique bien plus qu’une préparation à la vie
présente. Elle intéresse l’être tout entier, et toute la
durée de l’existence qui s’offre à l’homme. C’est le
développement harmonieux des facultés physiques,
mentales et spirituelles. Elle prépare l’étudiant à la
joie du service qui sera le sien dans ce monde, et à
la joie plus grande encore du vaste service qui
l’attend dans le monde à venir.
La source de cette éducation est indiquée par
6
ces mots de l’Ecriture sainte, désignant le Dieu
infini: en lui “sont cachés tous les trésors de la
sagesse” (Colossiens 2:3). “A lui le conseil et
l’intelligence.” (Job 12:13)
Le monde a eu ses grands maîtres, des hommes
d’une immense intelligence, doués d’une capacité
de recherche considérable, des hommes dont les
paroles ont stimulé la réflexion et offert à l’esprit
de vastes étendues de savoir; ces hommes ont été
salués comme des guides et des bienfaiteurs de
l’humanité; mais il est un être qui leur est
supérieur. Aussi loin que remonte la mémoire
humaine, nous pouvons constater l’influence des
maîtres à penser des hommes; mais avant eux était
la Lumière. De même que la lune et les étoiles de
notre système solaire brillent parce qu’elles
réfléchissent la lumière du soleil, ainsi les grands
penseurs de ce monde, pour autant que leur
enseignement soit droit, réfléchissent les rayons du
Soleil de Justice. La moindre lueur de pensée, le
moindre éclair d’intelligence trouvent leur source
dans la Lumière du monde.
7
De nos jours, on parle beaucoup de la nature et
de l’importance d’une “éducation supérieure”. La
véritable “éducation supérieure” nous vient de
Celui en qui “résident la sagesse et la puissance”
(Job 12:13), et de la bouche de qui “sortent la
connaissance et la raison” (Proverbes 2:6).
C’est dans la connaissance de Dieu que
prennent leur source toute véritable science et toute
formation authentique. Dans quelque domaine que
ce soit, physique, mental, spirituel; où que nous
portions nos regards, en dehors du fléau du péché,
cette évidence s’impose. Quelle que soit notre ligne
de recherche, si nous souhaitons sincèrement
parvenir à la vérité, nous sommes mis en contact
avec l’intelligence invisible et toute-puissante qui
est à l’œuvre partout. L’esprit de l’homme est en
communion avec l’esprit de Dieu, le fini avec
l’infini. L’effet de cette communion sur le corps,
l’esprit et l’âme dépasse tout ce qu’on peut
concevoir.
C’est d’elle que naît l’éducation supérieure.
C’est à travers elle que Dieu veut assurer notre
8
formation. “Accorde-toi donc avec Dieu” (Job
22:21), voilà son message à l’humanité. Ces mots
posent les bases de la méthode selon laquelle le
père de notre race fut éduqué. Lorsque Adam se
trouvait dans l’Eden saint, dans toute la gloire de la
race humaine sans tache, c’est ainsi que Dieu
l’instruisait.
Si nous voulons embrasser le champ d’action
de l’éducation, nous devons considérer non
seulement la nature de l’homme et l’intention de
Dieu en le créant, mais aussi le bouleversement
qu’entraîna, pour la condition humaine, la
connaissance du mal, et le plan conçu par Dieu
pour éduquer l’homme selon son glorieux projet,
malgré cela.
Quand Adam sortit des mains de son Créateur,
il lui ressemblait, physiquement, mentalement et
spirituellement. “Dieu créa l’homme à son image”
(Genèse 1:27). Le dessein de Dieu était que plus
l’homme avancerait dans la vie, plus il lui
ressemblerait—mieux il refléterait la gloire du
Créateur. Toutes ses facultés pouvaient se
9
développer; leurs dimensions, leur vigueur étaient
destinées à croître sans limites. Des champs
d’études et de recherches immenses et merveilleux
s’offraient à elles. Les mystères de l’univers
visible—les “merveilles de celui dont la science est
parfaite” (Job 37:16)—invitaient l’homme à
l’étude. Cet homme dont le grand privilège était la
communion face à face, cœur à cœur, avec son
Créateur. S’il était resté fidèle à Dieu, tout cela lui
aurait appartenu pour toujours. A travers l’éternité,
il n’aurait cessé d’amasser des trésors constamment
renouvelés de connaissances, de découvrir de
nouvelles sources de bonheur, de se pénétrer de
plus en plus profondément de la sagesse, de la
puissance et de l’amour de Dieu. Il aurait de mieux
en mieux accompli son destin de créature: il aurait
de mieux en mieux reflété la gloire du Créateur.
Mais par sa désobéissance, tout fut perdu. A
cause du péché, la ressemblance de l’homme avec
Dieu s’estompa, jusqu’à disparaître presque
totalement. Les capacités physiques de l’homme
s’affaiblirent, ses facultés intellectuelles
s’amoindrirent, sa vision spirituelle se voila. Il était
10
devenu mortel. Cependant, sa race n’était pas
abandonnée au désespoir. Dans l’infini de son
amour et de sa miséricorde, Dieu avait conçu le
plan du salut et accordé à l’homme une seconde
chance. Restaurer en l’homme l’image de son
Créateur, le rendre à la perfection pour laquelle il
avait été créé, assurer le développement de son
corps, de sa pensée, de son âme, pour que le plan
divin de la création soit réalisé, devaient être
l’œuvre de la rédemption. C’est le but de
l’éducation, l’objet grandiose de la vie.
L’amour, qui est à l’origine de l’acte créateur et
rédempteur, doit être aussi à l’origine de la
véritable éducation. La loi que Dieu nous a donnée
pour diriger notre vie le manifeste de façon
éclatante. Le premier et le plus grand
commandement est: “Tu aimeras le Seigneur, ton
Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute
ta force, et de toute ta pensée.” (Luc 10:27)
L’aimer, Lui, l’infini, l’omniscient, de toute sa
force, de toute sa pensée, de tout son cœur,
implique que nous développions à l’extrême
chacune de nos facultés. Cela implique qu’en notre
11
être tout entier—le corps et la pensée, aussi bien
que l’âme—l’image de Dieu doit être restaurée.
Le second commandement est semblable au
premier: “Tu aimeras ton prochain comme toi-
même.” (Matthieu 22:39) La loi d’amour nous
demande de mettre au service de Dieu et de nos
semblables notre corps, notre pensée et notre âme.
Et ce service auquel nous nous consacrons, qui fait
de nous une bénédiction pour les autres, nous
apporte à nous-mêmes la plus grande des
bénédictions. Le don de soi sous-tend toute
véritable formation de l’être. C’est à travers le
service désintéressé qu’il nous est donné de
développer au mieux chacune de nos aptitudes.
C’est ainsi que nous participerons de plus en plus
pleinement à la nature divine. Nous sommes prêts
pour le royaume des cieux, car nous le recevons
dans notre cœur.
Dieu étant la source de tout véritable savoir, le
premier objectif de l’éducation est évidemment,
comme nous l’avons vu, d’appliquer nos esprits à
le connaître tel qu’il se révèle à nous. C’est par une
12
communion directe avec Dieu que s’instruisaient
Adam et Eve; ils apprirent à le connaître à travers
ses œuvres. Toute création était, dans sa perfection
initiale, expression de la pensée divine. La nature
offrait aux yeux d’Adam et Eve d’innombrables
exemples de la sagesse divine. Mais, par la
désobéissance, toute connaissance de Dieu par une
communion directe devint impossible à l’homme,
toute connaissance de Dieu à travers ses œuvres
mêmes lui devint difficile. La terre, abîmée,
souillée par le péché, ne reflétait plus que
faiblement la gloire du Créateur. Il est vrai que
Dieu nous propose toujours ses “leçons de choses”.
Sur chaque page du grand volume de la création,
on peut encore retrouver l’écriture du Seigneur. La
nature parle encore de son Créateur. Mais ces
témoignages sont incomplets, imparfaits. Et nous,
créatures déchues, aux facultés affaiblies, à la vue
courte, nous sommes incapables d’interpréter
correctement ce que nous percevons. Nous avons
besoin de la révélation plus complète que Dieu
donne de lui-même dans sa parole écrite.
Les saintes Ecritures sont le critère parfait de la
13
vérité; c’est pourquoi nous devrions fonder sur
elles tout notre système éducatif. Pour acquérir une
éducation digne de ce nom, nous devons connaître
Dieu le Créateur, et Christ le Rédempteur tels
qu’ils sont révélés dans la parole sacrée.
Tout être humain, créé à l’image de Dieu,
possède une puissance semblable à celle du
Créateur: le pouvoir personnel de penser et d’agir.
Les hommes qui développent ce pouvoir sont des
hommes prêts à assumer des responsabilités, des
chefs de file, capables d’influencer les autres. C’est
le rôle de la véritable éducation que de développer
ce pouvoir, d’apprendre aux jeunes à penser par
eux-mêmes, à ne pas se contenter d’être le miroir
de la pensée des autres. Que les étudiants, au lieu
de se borner à étudier ce qu’ont dit ou écrit les
hommes, se tournent vers les sources de la vérité,
vers les vastes espaces qu’offrent à leurs
recherches la nature et la révélation. Qu’ils se
mettent face à leur devoir, à leur destinée, et leur
pensée se déploiera et prendra de la vigueur. Ce ne
sont pas des mauviettes cultivées qui doivent sortir
de nos institutions, mais des hommes solides,
14
capables de penser et d’agir, des hommes qui
dominent les circonstances et non qui les subissent,
des hommes à l’esprit large, à la pensée claire, qui
ont le courage de leurs convictions.
Une telle éducation apporte plus qu’une
formation intellectuelle; plus qu’un entraînement
physique. Elle fortifie le caractère, de telle sorte
que jamais la vérité et l’honnêteté ne sont sacrifiées
aux désirs égoïstes ou aux ambitions terrestres. Elle
arme l’esprit contre le mal. Elle empêche le
développement de toute passion destructrice et
ainsi chaque mobile, chaque désir se conforme aux
grands principes du bien. A mesure que l’homme
s’imprègne de la perfection du caractère divin, son
esprit est renouvelé et son âme recréée à l’image de
Dieu.
Y a-t-il une éducation supérieure à celle-là? Y
en a-t-il une qui lui soit comparable?
“On ne peut donner, à sa place, de l’or pur,
Ni peser de l’argent pour l’acheter;
Elle n’entre pas en balance avec l’or d’Ophir,
15
Ni avec le précieux onyx, ni avec le saphir; Ni
l’or ni le verre ne peuvent lui être comparés,
On ne peut l’échanger pour un vase d’or fin.
Le corail et le cristal ne peuvent même pas être
évoqués;
Posséder la sagesse (vaut) plus que les perles.”
(Job 28:15-18)
L’idéal que Dieu propose à ses enfants dépasse
de beaucoup tout ce qu’ils peuvent imaginer de
meilleur. Le but à atteindre, c’est l’amour de
Dieu—la ressemblance avec Dieu. Devant
l’étudiant s’ouvre un chemin de progrès infini. Il a
une tâche à accomplir, un objectif à atteindre: tout
ce qui est bien, pur, noble. Il progressera aussi vite
et aussi loin que possible dans chacun des
domaines de la véritable connaissance. Mais il
orientera ses efforts vers des sujets aussi éloignés
des profits exclusivement égoïstes et terrestres que
les cieux sont éloignés de la terre.
Celui qui participe au projet divin, en faisant
connaître Dieu aux jeunes, en façonnant leur
caractère à l’image du sien, accomplit une œuvre
16
noble et élevée. Lorsqu’il suscite le désir
d’atteindre l’idéal divin, il propose une éducation
aussi élevée que les cieux et aussi vaste que
l’univers; une éducation qui ne peut être achevée
dans cette vie, mais qui se poursuivra dans la vie à
venir; une éducation qui permettra à l’élève de
quitter l’école préparatoire de la terre pour accéder
à l’échelon supérieur, à l’école d’en haut.
17
Chapitre 2
L’école d’Éden
Heureux l’homme qui a trouvé la sagesse
(Proverbes 3:13).
La méthode d’éducation établie au
commencement du monde devait servir de modèle
à l’homme à travers la suite des temps. Pour en
illustrer les principes, une école-pilote fut ouverte
en Eden, demeure de nos premiers parents. Le
jardin d’Eden était la salle de classe, la nature était
le manuel d’études, le Créateur lui-même le maître,
et les parents de la race humaine les élèves.
Créés pour être “l’image et la gloire de Dieu”
(1 Corinthiens 11:7), Adam et Eve avaient reçu des
dons à la mesure de leur haute destinée. Par leur
grâce et leur équilibre, leurs beaux traits réguliers,
leur visage rayonnant de santé, de joie et d’espoir,
ils ressemblaient de toute évidence à leur Créateur.
Mais cette ressemblance n’était pas seulement
18
physique. Chacune des facettes de leur esprit et de
leur âme reflétait la gloire de Dieu. Adam et Eve,
dotés de hautes qualités intellectuelles et
spirituelles, n’étaient qu’“un peu inférieur[s] aux
anges” (Hébreux 2:7); aussi pouvaient-ils non
seulement reconnaître les merveilles manifestes de
l’univers, mais aussi saisir les responsabilités et les
engagements moraux qui leur incombaient.
“L’Eternel Dieu planta un jardin en Eden, du
côté de l’Orient, et il y mit l’homme qu’il avait
formé. L’Eternel Dieu fit germer du sol toutes
sortes d’arbres d’aspect agréable et bons à manger,
ainsi que l’arbre de la vie au milieu du jardin.”
(Genèse 2:8, 9) C’était là, dans la splendeur de la
nature intacte, que nos premiers parents allaient
recevoir leur éducation.
Plein d’intérêt pour ses enfants, notre Père
céleste avait lui-même pris en main cette
éducation. Souvent, Adam et Eve recevaient la
visite des messagers divins, les saints anges, qui
leur apportaient conseils et instructions. Souvent,
alors qu’ils se promenaient dans le jardin à la
19
fraîcheur du jour, ils entendaient la voix de Dieu et
communiquaient avec lui face à face. Les desseins
de l’Eternel à leur égard étaient des “desseins de
paix et non de malheur” (Jérémie 29:11). Chacun
de ses projets visait leur plus grand bien.
A Adam et Eve avait été confié le soin du
jardin, “pour le cultiver et pour le garder” (Genèse
2:15). Quoique riches de tout ce que le possesseur
de l’univers pouvait leur accorder, ils ne devaient
pas rester inactifs. Une tâche utile leur avait été
confiée, véritable bénédiction, pour fortifier leur
corps, développer leur esprit, former leur caractère.
Le livre de la nature, qui leur prodiguait des
leçons vivantes, se révélait être un manuel
inépuisable et merveilleux. Sur chaque feuille de la
forêt, sur chaque rocher des montagnes, sur chaque
étoile scintillante, sur la terre, la mer, le ciel, était
écrit le nom de Dieu. Avec toutes les créatures,
animées ou inanimées, avec la feuille, la fleur et
l’arbre, le léviathan des mers, le grain de poussière
dansant au rayon de soleil, les habitants d’Eden
pouvaient s’entretenir; ils pouvaient demander à
20
chacun les secrets de sa vie. La gloire de Dieu dans
les cieux, les mondes innombrables aux révolutions
ordonnées, “les nuages [...] en équilibre” (Job
37:16), les mystères de la lumière et du son, du
jour et de la nuit,—tout s’offrait à l’étude des
élèves de la première école terrestre.
Le Créateur de toute chose permettait que leur
esprit accède aux lois et au fonctionnement de la
nature, aux grands principes de vérité qui régissent
l’univers spirituel. A la lumière de “la
connaissance de la gloire de Dieu” (2 Corinthiens
4:6), leurs facultés mentales et spirituelles se
déployaient et ils prenaient conscience des
immenses joies que leur procurait leur existence
sainte.
Sortant de la main du Créateur, non seulement
le jardin d’Eden, mais aussi la terre entière
éclataient d’une beauté infinie. Les taches du
péché, l’ombre de la mort ne défiguraient pas la
création. La gloire de Dieu “couvr[ait] les cieux et
sa louange rempliss[ait] la terre” (Habakuk 3:3).
“Ensemble les étoiles du matin éclataient en chants
21
de triomphe, et tous les fils de Dieu lançaient des
acclamations.” (Job 38:7) Ainsi la terre était
l’emblème parfait de Celui qui est “riche en
bienveillance et en fidélité” (Exode 34:6); c’était
un excellent sujet d’étude pour ceux qui avaient été
créés à son image. Dieu souhaitait que la terre
entière suivît l’exemple du jardin d’Eden, et que,
au fur et à mesure qu’elle s’agrandirait, la famille
humaine crée d’autres foyers, d’autres écoles
semblables à ceux qu’il lui avait donnés. Ainsi, au
fil du temps, la terre entière abonderait en foyers et
en écoles où l’on étudierait les paroles et les
œuvres de Dieu, et où les élèves pourraient de plus
en plus, de mieux en mieux, réfléter la lumière de
la connaissance de Dieu, à travers l’éternité.
22
Chapitre 3
La connaissance du bien et du
mal
Comme ils n’ont pas jugé bon d’avoir la
connaissance de Dieu, Dieu les a livrés à une
mentalité réprouvée (Romains 1:28).
Nos premiers parents, créés saints et purs,
n’étaient cependant pas hors d’atteinte du péché.
Dieu aurait pu les créer incapables de transgresser
ses commandements, mais leur caractère n’aurait
alors connu aucun développement; c’est par
contrainte et non par choix qu’ils auraient servi
Dieu. Aussi leur donna-t-il le pouvoir de choisir—
l’accepter pour maître ou le rejeter. Avant qu’ils
puissent recevoir dans leur plénitude les
bénédictions que le Seigneur désirait leur accorder,
il fallait que leur amour et leur fidélité soient
éprouvés.
Il y avait, dans le jardin d’Eden, “l’arbre de la
23
connaissance du bien et du mal [...] Et l’Eternel
Dieu donna ce commandement à l’homme: Tu
pourras manger de tous les arbres du jardin; mais tu
ne mangeras pas de l’arbre de la connaissance du
bien et du mal.” (Genèse 2:9, 16, 17) La volonté de
Dieu, c’était qu’Adam et Eve ne connaissent pas le
mal. La connaissance du bien leur avait été
accordée gratuitement; mais la connaissance du
mal—du péché et de ses conséquences, travail
épuisant, angoisse, déception et chagrin, souffrance
et mort—cela, l’amour le taisait.
Tandis que Dieu recherchait le bonheur de
l’homme, Satan travaillait à sa perte. Eve,
méprisant l’avertissement de Dieu à propos de
l’arbre défendu, s’aventura auprès de cet arbre et
rencontra là son ennemi. Satan, voyant que l’intérêt
et la curiosité de la femme étaient éveillés, entreprit
de contester la parole de Dieu, et de jeter le doute
sur sa sagesse et sa bonté. Et lorsque Eve rapporta
la défense de Dieu concernant l’arbre de la
connaissance: “Vous n’en mangerez pas et vous
n’y toucherez pas, sinon vous mourrez”, le
tentateur répondit: “Vous ne mourrez pas du tout!
24
Mais Dieu sait que le jour où vous en mangerez,
vos yeux s’ouvriront, et que vous serez comme des
dieux qui connaissent le bien et le mal.” (Genèse
3:3-5)
Satan voulait faire croire que la connaissance
du bien et du mal serait une bénédiction, et qu’en
empêchant Adam et Eve de prendre du fruit de
l’arbre, Dieu les privait d’un grand bien. Il insista
sur le fait que ce fruit leur avait été interdit parce
qu’il possédait la faculté merveilleuse de donner
sagesse et pouvoir, et que Dieu voulait ainsi les
empêcher d’atteindre un état supérieur et un plus
grand bonheur. Il déclara qu’il avait lui-même
mangé du fruit défendu, et avait de ce fait acquis le
pouvoir de parler; s’ils en mangeaient eux aussi,
leur existence serait d’un tout autre niveau, et leurs
connaissances plus vastes.
Lorsque Satan proclamait avoir retiré le plus
grand bien du fruit défendu, il se gardait bien de
laisser voir qu’il avait été banni du ciel pour cause
de désobéissance. Son mensonge était si bien
dissimulé sous un vernis de vérité qu’Eve, la tête
25
tournée par des flatteries et des tromperies, ne le
perçut pas. Elle convoitait ce que le Seigneur lui
avait interdit; elle se défiait de la sagesse de Dieu.
Elle rejetait la foi en lui, clé de toute connaissance.
Lorsque Eve vit “que l’arbre était bon à
manger, agréable à la vue et propre à donner du
discernement, elle prit de son fruit et en mangea”.
Il avait un goût flatteur, et tout en mangeant, Eve
crut sentir une force vivifiante la parcourir, et
s’imagina qu’elle accédait à un niveau d’existence
supérieur. Elle avait désobéi, elle tenta son mari,
“et il mangea” (Genèse 3:6).
“Vos yeux s’ouvriront”, avait dit leur ennemi;
“vous serez comme des dieux qui connaissent le
bien et le mal” (Genèse 3:5). Certes, leurs yeux
s’étaient ouverts; mais sur quel triste spectacle! Ce
qu’ils avaient conquis par leur désobéissance,
c’était de connaître le mal, et les malédictions du
péché. Le fruit lui-même n’était pas toxique, et le
péché n’était pas tant d’avoir succombé à la
convoitise. C’est le manque de confiance dans la
bonté de Dieu et dans sa parole, le rejet de son
26
autorité qui firent de nos premiers parents des
pécheurs et amenèrent le monde à connaître le mal.
C’est cela qui ouvrit la porte à toutes sortes de
mensonges et d’erreurs.
L’homme perdit tout en choisissant d’écouter
l’imposteur plutôt que celui qui est la Vérité et qui
seul possède l’intelligence. Le bien et le mal se
mêlèrent dans son esprit jusqu’à l’obscurcir et en
paralyser les facultés mentales et spirituelles. Il ne
fut plus à même d’apprécier les biens que Dieu lui
avait si généreusement accordés.
Adam et Eve avaient choisi de connaître le mal,
et si jamais ils voulaient recouvrer la place qu’ils
avaient perdue, ce devait être à travers les
conditions difficiles qu’ils s’étaient eux-mêmes
imposées. Ils n’habiteraient plus le jardin d’Eden,
qui, dans sa perfection, ne pouvait leur apporter les
enseignements dont ils avaient désormais
profondément besoin. Pleins d’une tristesse
inexprimable, ils dirent adieu à cet endroit
magnifique et partirent sur la terre que marquait la
malédiction du péché!
27
Dieu avait dit à Adam: “Parce que tu as écouté
la voix de ta femme et que tu as mangé de l’arbre
dont je t’avais défendu de manger, le sol sera
maudit à cause de toi; c’est avec peine que tu en
tireras ta nourriture tous les jours de ta vie, il te
produira des chardons et des broussailles, et tu
mangeras l’herbe de la campagne. C’est à la sueur
de ton visage que tu mangeras du pain, jusqu’à ce
que tu retournes dans le sol, d’où tu as été pris; car
tu es poussière, et tu retourneras à la poussière.”
(Genèse 3:17-19)
Quoique la terre fût souillée par le péché, la
nature demeurait le livre d’étude de l’homme. Un
livre qui ne pouvait plus présenter le bien
seulement; car le mal était partout présent,
marquant la terre, la mer, l’air de son empreinte
dégradante. Là où autrefois éclatait uniquement le
caractère de Dieu, la connaissance du bien, se
manifestait désormais aussi le caractère de Satan,
la connaissance du mal. La nature, qui reflétait
maintenant le bien et le mal, avertissait sans cesse
l’homme des conséquences du péché.
28
Les fleurs fanèrent, les feuilles tombèrent:
Adam et sa compagne assistaient aux premiers
signes de déchéance. Devant eux se dressait
l’implacable évidence: tout ce qui vit doit mourir.
L’air lui-même, dont dépendait leur vie, portait des
germes de mort.
Sans cesse revenait à leur esprit leur
domination perdue. Adam avait régné sur les
créatures inférieures et, aussi longtemps qu’il était
resté fidèle à Dieu, la nature entière avait reconnu
son autorité; mais par sa désobéissance, il perdit
cette domination. L’esprit de rébellion, auquel il
avait lui-même cédé le premier, se répandait à
travers toute la création animale. Ainsi la vie de
l’homme, mais aussi les bêtes, les arbres des forêts,
l’herbe des champs, l’air qu’il respirait, tout
répétait la triste leçon de la connaissance du mal.
Cependant l’homme n’était pas abandonné aux
conséquences du mal qu’il avait choisi. Dans la
condamnation prononcée contre Satan, il y avait
29
l’annonce de la rédemption. “Je mettrai inimitié
entre toi et la femme, avait dit Dieu, entre ta
descendance et sa descendance; celle-ci t’écrasera
la tête, et tu lui écraseras le talon.” (Genèse 3:15)
Cette condamnation, prononcée devant nos
premiers parents, était pour eux une promesse.
Avant d’entendre parler de broussailles et de
chardons, de dur labeur et de peine—leur part,
désormais—et de cette poussière à laquelle ils
devraient retourner, ils reçurent des paroles qui ne
pouvaient manquer de les remplir d’espoir. Tout ce
qui avait été perdu sous l’emprise de Satan pouvait
être retrouvé à travers le Christ.
Cette promesse, la nature nous la répète aussi.
Abîmée par le péché, elle n’en parle pas moins de
création, et aussi de rédemption. Si, par des signes
implacables de déclin, la terre témoigne de la
malédiction, elle porte cependant les marques
nombreuses et éclatantes d’un pouvoir de vie. Les
arbres ne perdent leurs feuilles que pour être parés
de nouveau; les fleurs fanent pour renaître
resplendissantes de beauté; le moindre acte
créateur nous affirme que nous pouvons être créés
30
de nouveau “dans une justice et une sainteté que
produit la vérité” (Éphésiens 4:24). Ainsi la nature,
qui nous fait précisément comprendre tout ce que
nous avons perdu, nous apporte en même temps un
message d’espoir.
Où que frappe le mal, la voix de notre Père
résonne; il invite ses enfants à ouvrir les yeux sur
les résultats du péché, leur demande de renoncer au
mal, les encourage à choisir le bien.
31
Chapitre 4
Rapports entre éducation et
rédemption
Faire resplendir la connaissance de la gloire de
Dieu sur la face de Christ (2 Corinthiens 4:6).
Par le péché, l’homme s’était séparé de Dieu.
Sans le plan de la rédemption, cette séparation
aurait été éternelle; nous aurions été pour toujours
plongés dans les ténèbres d’une nuit sans fin. Mais
grâce au sacrifice du Sauveur, nous pouvons à
nouveau communier avec Dieu. Nous ne pouvons
pas l’approcher en personne; dans notre péché nous
ne pouvons pas contempler sa face; mais nous
pouvons le contempler et communier avec lui en
Jésus, le Sauveur. La lumière de “la connaissance
de la gloire de Dieu” est révélée “sur la face de
Christ”. Dieu est “en Christ, réconciliant le monde
avec lui-même” (2 Corinthiens 4:6; 5:19).
“La Parole a été faite chair, et elle a habité
32
parmi nous, pleine de grâce et de vérité.” “Or elle
était la vie; et la vie était la lumière des hommes.”
(Jean 1:14; 1:4) La vie et la mort du Christ, prix de
notre rachat, ne sont pas seulement une promesse
de vie pour nous; pas seulement un moyen de nous
redonner accès aux trésors de la sagesse: elles nous
révèlent des dimensions de son caractère que les
saints habitants de l’Eden eux-mêmes ignoraient.
Tandis que le Christ ouvre le royaume des
cieux à l’homme, la vie qu’il nous donne ouvre le
cœur de l’homme au royaume des cieux. Le péché
ne nous sépare pas seulement de Dieu; il détruit
dans nos âmes le désir et la possibilité de le
connaître. La mission du Christ est de défaire ce
qu’a fait le mal. Aux facultés de l’âme, paralysées
par le péché, à l’intelligence obscurcie, à la volonté
pervertie, il peut redonner vigueur et puissance. Il
nous offre les richesses de l’univers et, grâce à lui,
le pouvoir de distinguer ces trésors et de nous en
emparer.
Le Christ est la “lumière qui éclaire tout
homme venant au monde” (Jean 1:9). Chaque être
33
humain reçoit la vie à travers le Christ; à travers lui
chaque âme reçoit un peu de la lumière divine. Au
fond de tout homme gisent des aspirations
intellectuelles, mais aussi spirituelles, un sens de la
justice, une aspiration vers le bien. Mais une
puissance contraire combat ces principes. Les
conséquences du premier péché—manger de
l’arbre de la connaissance du bien et du mal—sont
manifestes dans notre vie à tous. Il y a, dans la
nature de l’homme, une tendance au mal, une force
à laquelle il ne peut résister seul. Pour l’aider à la
repousser, à atteindre cet idéal qu’il reconnaît, au
fond de lui-même, comme seul valable, il n’y a
qu’une puissance: celle du Christ. Le plus grand
besoin de l’homme est de coopérer avec cette
puissance. Ne devons-nous pas considérer que cette
coopération est l’objectif suprême de tout effort
d’éducation?
Le maître digne de ce nom ne se satisfait pas
d’un travail de second ordre. Il ne se satisfait pas
de mener ses élèves à un niveau inférieur à celui
qu’ils pourraient atteindre. Il ne peut pas se
contenter de leur transmettre simplement des
34
connaissances techniques, qui feront d’eux des
comptables habiles, des artisans adroits, des
commerçants prospères—et c’est tout. Son
ambition, c’est de leur insuffler les principes de
vérité, obéissance, honneur, intégrité, pureté—des
principes leur permettant de devenir des forces qui
participeront effectivement à l’équilibre et à
l’élévation de la société. Il souhaite, par-dessus
tout, que ses élèves apprennent de la vie la grande
leçon de l’altruisme.
Lorsque l’âme rencontre le Christ, que
l’homme accepte d’être guidé par sa sagesse, d’être
fort de sa force, à chaque instant de sa vie, à
chaque battement de son cœur, ces principes
deviennent une force vivante, propre à forger le
caractère. L’élève qui réalise cette union a trouvé la
source de la sagesse; il lui est possible d’atteindre
ses idéaux les plus nobles, d’accéder à l’éducation
la plus haute, de s’engager enfin sur le chemin de
l’éternité.
Si l’on y réfléchit profondément, on comprend
qu’éducation et rédemption sont une seule et même
35
chose, car pour l’une comme pour l’autre,
“personne ne peut poser un autre fondement que
celui qui a été posé, savoir Jésus-Christ.” “Car il a
plu [à Dieu] de faire habiter en lui toute plénitude.”
(1 Corinthiens 3:11; Colossiens 1:19)
Malgré nos conditions de vie différentes des
conditions originelles, la véritable éducation est
toujours conforme au plan du Créateur, le plan de
l’école d’Eden. Adam et Eve, en communion avec
Dieu, étaient instruits par lui directement; quant à
nous, nous contemplons la lumière de la
connaissance de sa gloire sur la face du Christ.
Les grands principes d’éducation n’ont pas
changé. Ils sont “à toujours inébranlables”
(Psaumes 111:8) puisque ce sont les principes du
caractère de Dieu. L’effort fondamental, l’objectif
constant du maître devraient être d’aider l’élève à
les appréhender et à engager avec le Christ une
relation qui fera de ces principes une force de vie.
Le maître qui accepte cet objectif est réellement
un collaborateur du Christ, un ouvrier avec Dieu.
36
Chapitre 5
L’éducation d’Israël
L’Eternel seul le conduisait. Il l’entourait, il en
prenait soin, Il le gardait comme la prunelle de son
œil. (Deutéronome 32:12, 10).
Le système éducatif conçu en Eden reposait sur
la famille. Adam était “le fils de Dieu” (Luc 3:28)
et c’était le Très-Haut lui-même qui dispensait
l’instruction à ses enfants. Il y avait là dans le sens
le plus complet de l’expression une école de
famille.
Dans le plan divin d’éducation tel qu’il fut
adapté à la condition humaine après la chute, le
Christ représente le Père; c’est lui le maillon qui
relie les hommes à Dieu; c’est lui le grand
éducateur du genre humain. Et à son tour, il
demande aux hommes, aux femmes, de le
représenter: la famille devait être école, les parents
éducateurs.
37
L’éducation au sein de la famille prévalut au
temps des patriarches. C’est dans ces écoles
familiales que, grâce à Dieu, les conditions les plus
favorables au développement du caractère étaient
rassemblées. Ceux qui se laissaient diriger par Dieu
suivaient le mode de vie qu’il avait établi au
commencement de toutes choses. Ceux qui
s’éloignaient de lui s’étaient bâti des villes, et, s’y
rassemblant, s’enorgueillissaient de la
magnificence, du luxe et du vice qui font des villes
d’aujourd’hui la gloire du monde et sa malédiction.
Les hommes qui gardaient les principes divins
vivaient dans les champs et sur les collines. Ils
cultivaient le sol, paissaient les troupeaux, et dans
cette vie libre, indépendante, dure, mais propice à
l’étude et à la réflexion, ils s’instruisaient auprès de
Dieu et instruisaient leurs enfants de ses œuvres et
de ses voies.
Voilà la méthode d’éducation que Dieu désirait
donner à Israël. Mais, à la sortie d’Egypte, bien peu
d’Israélites étaient prêts à œuvrer avec lui à la
formation de leurs enfants. Les parents eux-mêmes
38
avaient besoin d’être instruits et disciplinés.
Victimes d’un esclavage qui avait toujours été leur
part, ils étaient ignorants, frustes, avilis même.
Leur connaissance de Dieu était mince, et bien
petite leur foi en lui. Leur esprit avait été obscurci
par de faux enseignements, et corrompu par un
long contact avec le paganisme. Dieu désirait
élever leur niveau moral, et cherchait pour cela à se
faire connaître à eux.
L’Eternel, tout au long de la longue errance des
Israélites dans le désert, lorsqu’ils allaient çà et là,
qu’ils étaient exposés à la faim, à la soif, à la
fatigue, menacés par des ennemis, par des païens,
et qu’il veillait lui-même sur eux, tentait de fortifier
leur foi en leur faisant connaître la puissance qui
agissait sans cesse pour leur bien. Après leur avoir
enseigné à s’en remettre à son amour, à sa
puissance, il voulait leur offrir pour modèle, à
travers sa loi, le caractère qu’il souhaitait leur voir
atteindre, par sa grâce.
Qu’elles étaient précieuses les leçons que reçut
Israël au pied du Sinaï! Ce fut une période de
39
préparation toute particulière pour l’entrée en
Canaan. Là, le projet divin trouvait un cadre
favorable. Au sommet du Sinaï, étendant son
ombre sur les tentes déployées dans la plaine,
s’était posée la colonne de nuée qui avait guidé les
enfants d’Israël durant leur voyage. La nuit, la
colonne de feu les assurait de la protection divine;
et lorsqu’ils dormaient, le pain du ciel descendait,
doucement, sur le camp. De tous côtés les
montagnes énormes, déchiquetées, se dressaient
dans leur solennelle magnificence, parlaient de
gloire et d’éternité. Là, l’homme se sentait faible et
ignorant devant Celui qui “a pesé les montagnes au
crochet, et les collines à la balance” (Ésaïe 40:12).
Là, en manifestant sa majesté, Dieu cherchait à ce
qu’Israël s’imprégnât de la sainteté de son
caractère et de ses commandements, et sentît les
dimensions du péché.
Mais le peuple était lent à comprendre.
Habitués comme ils l’avaient été en Egypte à
côtoyer des images palpables de la divinité, sous
les formes les plus viles, les enfants d’Israël
concevaient bien difficilement l’existence et le
40
caractère de l’Etre invisible. Par compassion envers
leur faiblesse, Dieu leur accorda un signe de sa
présence. “Ils me feront un sanctuaire, dit-il, et je
demeurerai au milieu d’eux.” (Exode 25:8)
Lors de la construction du sanctuaire, maison
de l’Eternel, Moïse reçut des instructions précises
pour que tout fût conforme au modèle céleste. Dieu
l’appela sur la montagne et lui révéla ce modèle, à
la ressemblance duquel furent faits le tabernacle et
tout ce qui s’y rapportait.
De même, Dieu révéla à Israël, le peuple au
milieu duquel il désirait habiter, son caractère
glorieux. Il lui en offrit un modèle sur la montagne,
lorsqu’il donna la loi du haut du Sinaï: il passa
alors devant Moïse et proclama: “L’Eternel,
l’Eternel, Dieu compatissant et qui fait grâce, lent à
la colère, riche en bienveillance et en fidélité.”
(Exode 34:6)
Mais les enfants d’Israël étaient incapables
d’accéder par leurs propres forces à ce caractère
idéal. La révélation faite au Sinaï pouvait
41
seulement les convaincre de leur misère et de leur
impuissance. Les sacrifices pratiqués dans
l’enceinte du sanctuaire leur réservaient une autre
leçon: celle du pardon des fautes, et du pouvoir
qu’a tout homme, à travers le Sauveur, de choisir
l’obéissance qui mène à la vie.
C’est à travers le Christ que devait s’accomplir
le plan de Dieu, dont le tabernacle était un
symbole—cet ouvrage magnifique, aux parois d’or
étincelant qui reflétaient, dans des lumières d’arc-
en-ciel, les rideaux brodés de chérubins; pénétré
des senteurs d’encens, avec ses prêtres vêtus de
blanc immaculé; et, dans le profond mystère du
lieu très saint, au-dessus du propitiatoire, entre les
anges courbés en adoration, la gloire du Dieu très
saint. Le Seigneur désirait que son peuple pût lire,
dans chaque détail, son intention pour l’âme
humaine. Bien plus tard, l’apôtre Paul, parlant sous
la direction du Saint-Esprit, soulignait cette même
intention: “Ne savez-vous pas que vous êtes le
temple de Dieu, et que l’Esprit de Dieu habite en
vous? Si quelqu’un détruit le temple de Dieu, Dieu
le détruira; car le temple de Dieu est saint, et c’est
42
ce que vous êtes.” (1 Corinthiens 3:16, 17)
Grands étaient le privilège, l’honneur accordés
à Israël de construire le sanctuaire; grande aussi
était sa responsabilité. Un édifice incomparable,
dont la construction requérait le matériel le plus
coûteux, les talents les plus fins, allait être élevé
dans le désert, par un peuple à peine sorti de
l’esclavage! Cela semblait pourtant impossible!
Mais l’architecte était là; il s’était engagé à
collaborer avec les ouvriers.
“L’Eternel parla à Moïse et dit: Vois: j’ai
appelé par son nom Betsaleel, fils d’Ouri, fils de
Hour, de la tribu de Juda. Je l’ai rempli de l’Esprit
de Dieu, de sagesse, d’intelligence et de
compétence pour toutes sortes d’ouvrages [...] Je
lui ai donné pour aide Oholiab, fils d’Ahisamak, de
la tribu de Dan. J’ai mis de la sagesse dans le cœur
de tous les gens habiles, pour qu’ils fassent tout ce
que je t’ai ordonné.” (Exode 31:1-3, 6).
Quelle extraordinaire école technique que celle
du Christ et de ses anges, dans le désert!
43
Tous devaient participer à la construction du
sanctuaire, et de ses accessoires. Il y avait là de
quoi faire travailler esprits et mains. Il fallait toutes
sortes de matériaux, et chacun était invité à prendre
part à la tâche, pour autant que son cœur l’y
poussait.
C’est ainsi qu’en travaillant, qu’en donnant, les
enfants d’Israël apprirent à collaborer avec Dieu, et
les uns avec les autres. D’autre part, ils devaient
bâtir ensemble un autre édifice, spirituel celui-là: le
temple de Dieu en eux-mêmes.
Depuis leur départ d’Egypte, ils avaient reçu
des leçons qui les avaient formés et disciplinés.
D’ailleurs, avant même qu’il quitte l’Egypte, le
peuple avait été réparti en groupes, dirigé par des
chefs; il s’agissait là d’une organisation temporaire,
qui fut achevée au Sinaï. L’ordre dont témoignait
avec tant d’évidence chaque ouvrage de Dieu se
retrouvait là, dans l’organisation des Hébreux.
Dieu était le centre de toute autorité et de tout
pouvoir. Moïse, qui le représentait, devait veiller
44
en son nom à l’application des lois. Puis venait le
Conseil des soixante-dix, ensuite les prêtres et les
princes, au-dessous d’eux les “chefs de mille, chefs
de cent, chefs de cinquante et chefs de dix”
(Nombres 11:16; Deutéronome 1:15), et, enfin, les
officiers destinés à des tâches particulières. Le
camp était distribué dans un ordre précis: au centre,
le tabernacle, demeure de l’Eternel; autour, les
tentes des prêtres et des lévites. Plus loin se
répartissaient celles de chaque tribu, chacune sous
sa bannière.
Des règlements d’hygiène minutieux furent mis
en vigueur, prescrits non seulement parce qu’ils
étaient nécessaires à la santé, mais parce qu’ils
étaient surtout la condition pour que le Dieu Saint
demeurât parmi le peuple. Par mandat divin, Moïse
déclara: “L’Eternel, ton Dieu, marche au milieu de
ton camp pour te protéger [...]; ton camp sera donc
saint.” (Deutéronome 23:14)
Aucune des façons de vivre des enfants d’Israël
n’échappait à l’éducation divine. Tout ce qui
concernait leur bien-être était l’objet de la
45
sollicitude de Dieu et intéressait sa loi. Il cherchait
leur plus grand bien, ne serait-ce que lorsqu’il les
nourrissait. La manne qu’il leur accordait dans le
désert était de qualité telle qu’elle devait fortifier
leur corps, leur intelligence, leur esprit. Quoique
tant d’entre eux se soient insurgés contre cette
alimentation restreinte, rêvant de retourner aux
jours où, disaient-ils, “nous étions assis près des
marmites de viande, [...] nous mangions du pain à
satiété” (Exode 16:3), le choix de Dieu éclatait
d’une sagesse indéniable: malgré les épreuves
d’une vie rude, personne, dans aucune tribu, n’était
faible.
Tout au long des marches des Hébreux, l’arche
renfermant les tables de la loi divine montra le
chemin. Lorsque la colonne de nuée descendait, ils
savaient qu’ils devaient s’arrêter là pour installer
leur campement. Tant que la nuée demeurait au-
dessus du tabernacle, ils demeuraient dans le camp.
Lorsqu’elle s’élevait, ils reprenaient leur marche.
L’arrêt aussi bien que le départ étaient ponctués
d’une invocation solennelle. “Quand l’arche
partait, Moïse disait: Lève-toi, Eternel! et que tes
46
ennemis soient dispersés! [...] Et quand on la
reposait, il disait: Reviens, Eternel, aux myriades
des milliers d’Israël.” (Nombres 10:35, 36)
Tandis que le peuple cheminait dans le désert,
le chant contribua à imprimer dans l’esprit de
chacun de nombreuses et précieuses leçons.
Lorsqu’elle avait été délivrée de l’armée de
Pharaon, la foule d’Israël avait uni ses voix en un
chant de triomphe. Bien loin dans le désert, et
jusqu’à la mer avait résonné le joyeux refrain, les
montagnes avaient retenti de louanges: “Chantez à
l’Eternel, car il a montré sa souveraineté” (Exode
15:21). Et pendant le voyage, ce chant était souvent
repris, pour réjouir les cœurs et vivifier la foi des
pèlerins. Les commandements donnés au Sinaï, qui
contenaient les promesses de la grâce de Dieu et
rappelaient tout ce qu’il avait fait pour délivrer son
peuple, étaient, à la demande divine, chantés, avec
accompagnement d’instruments; ainsi les enfants
d’Israël allaient, au rythme de leurs voix unies pour
louer Dieu.
Alors leurs pensées se détachaient des soucis et
47
des difficultés du chemin, leur esprit agité,
impatient, s’apaisait; les principes de vérité
s’ancraient dans leur mémoire et leur foi se
fortifiait. Chanter ensemble leur apprenait à agir en
ordre et en harmonie, et chacun se rapprochait par
là du Seigneur et des autres.
Moïse déclara, à propos de la façon dont Dieu
dirigea le peuple d’Israël pendant les quarante
années de l’errance dans le désert: “L’Eternel, ton
Dieu, t’éduque comme un homme éduque son fils
[...] afin de t’humilier et de t’éprouver, pour
reconnaître ce qu’il y avait dans ton cœur et si tu
observais ses commandements, oui ou non.”
(Deutéronome 8:5, 2)
“Il l’a trouvé dans un pays désert, dans un
chaos hurlant et aride; il l’entourait, il en prenait
soin, il le gardait comme la prunelle de son œil,
pareil à l’aigle qui éveille sa nichée, voltige sur ses
petits, déploie ses ailes, les prend, les porte sur ses
plumes. L’Eternel seul le conduisait. Et il n’y avait
avec lui aucun dieu étranger.” (Deutéronome
32:10-12)
48
“Car il se souvint de sa parole sainte et
d’Abraham, son serviteur. Il fit sortir son peuple
dans l’allégresse, ses élus au milieu des
acclamations. Il leur donna les terres des nations, et
du travail des peuples, ils possédèrent (le fruit),
afin d’observer ses prescriptions et de garder ses
lois.” (Psaumes 105:42-45)
Dieu accorda à Israël tous les moyens, tous les
privilèges qui lui permettraient de faire honneur à
son nom et d’être une bénédiction pour les nations
voisines. Si les Israélites marchaient dans le
chemin de l’obéissance, il leur promettait de leur
donner “sur toutes les nations qu’il a créées la
supériorité en gloire, en renom et en
magnificence”. “Tous les peuples de la terre
verront que le nom de l’Eternel est invoqué sur toi,
et ils te craindront.” “Les peuples, qui entendront
parler de toutes ces prescriptions [...] diront: Cette
grande nation ne peut être qu’un peuple sage et
intelligent!” (Deutéronome 26:19; 28:10; 4:6)
Les lois données à Israël contenaient des
49
directives très précises à propos de l’éducation. Sur
le Sinaï, Dieu s’était révélé à Moïse “compatissant
et qui fait grâce, lent à la colère, riche en
bienveillance et en fidélité” (Exode 34:6). Ces
principes, formulés dans sa loi, devaient être
enseignés aux enfants par les pères et les mères en
Israël, eux auxquels Moïse déclara, sous
l’inspiration divine: “Ces paroles que je te donne
aujourd’hui seront dans ton cœur. Tu les
inculqueras à tes fils et tu en parleras quand tu
seras dans ta maison, quand tu iras en voyage,
quand tu te coucheras et quand tu te lèveras.”
(Deutéronome 6:6, 7)
Ce n’est pas en théorie qu’il fallait enseigner
cela. Ceux qui veulent transmettre la vérité doivent
en mettre en pratique les principes. C’est
uniquement en faisant transparaître dans leur vie le
caractère de Dieu, sa droiture, sa noblesse et sa
générosité qu’ils peuvent avoir de l’influence sur
les autres.
La véritable éducation ne consiste pas à
enseigner de force un esprit qui n’est ni préparé ni
50
ouvert. Il faut d’abord éveiller les facultés
intellectuelles, susciter l’intérêt. La méthode divine
d’enseignement y pourvoyait. Lui qui créa l’esprit
et en établit les lois peut en assurer un
développement harmonieux. Dans le foyer comme
dans le sanctuaire, dans les choses de la nature
comme dans celles de l’art, dans le travail comme
dans les fêtes, dans les constructions sacrées et les
pierres commémoratives, par d’innombrables
moyens, rites et symboles, les leçons que Dieu
dispensait à Israël mettaient en lumière ses
principes et entretenaient le souvenir de ses œuvres
merveilleuses. Aussi, lorsque se posait une
question, la réponse qui y était donnée se gravait
dans les cœurs et les esprits.
Chaque détail de l’éducation du peuple élu
nous montre, de façon éclatante, qu’une vie centrée
sur Dieu est une vie de plénitude. Dieu offre de
quoi satisfaire tous les besoins qu’il inspire; il
cherche à développer chacune des facultés qu’il a
créées en l’homme.
Artisan de toute beauté, lui-même admirateur
51
du beau, le Créateur prit soin d’éveiller et de
satisfaire en ses enfants l’amour de la beauté. Il
leur accorda également tout ce qui permet la vie en
société, les relations bienveillantes et dévouées qui
savent si bien entretenir la solidarité, éclairer et
adoucir la vie.
Les fêtes d’Israël étaient un moyen éducatif
d’importance. Dans la vie quotidienne, la famille
tenait à la fois le rôle d’école et d’église, les
parents montraient la voie à suivre aussi bien dans
le domaine profane que religieux. Mais trois fois
par an, à des époques précises, les enfants d’Israël
se retrouvaient lors de grandes rencontres au cours
desquelles ils rendaient ensemble leur culte à Dieu.
C’est à Silo d’abord, à Jérusalem ensuite, que ces
rassemblements avaient lieu. Seuls les pères et les
fils étaient tenus d’y participer; mais personne ne
souhaitait s’en priver, et toute la maisonnée, dans
la mesure du possible, y prenait part; avec elle,
bénéficiant de son hospitalité, l’étranger, le lévite,
et le pauvre.
Le voyage à Jérusalem, à la façon simple des
52
patriarches, dans la grâce du printemps, l’éclat de
l’été, ou la plénitude de l’automne, avait un charme
immense. Chargés de dons de remerciements, ils
allaient, l’homme aux cheveux blancs et le jeune
enfant, rencontrer Dieu dans sa sainte demeure. En
chemin, on racontait une fois encore aux enfants
les expériences passées, les histoires que tous
aimaient tant, les vieillards aussi bien que les
jeunes. On chantait les cantiques qui avaient adouci
la longue marche dans le désert. On chantait les
commandements de Dieu, qui se gravaient ainsi
pour toujours dans la mémoire de nombreux
enfants, de nombreux jeunes gens, sous l’influence
bénie de la nature, dans ce climat d’amitié.
A Jérusalem, les cérémonies pascales—la
réunion de nuit avec les hommes aux reins ceints,
sandales aux pieds, bâton à la main; le repas pris en
hâte, l’agneau, le pain sans levain et les herbes
amères; enfin, dans le silence solennel, le récit de
l’histoire du sang répandu, de l’ange porteur de
mort et de la longue marche loin du pays de
servitude—ne pouvaient que frapper l’imagination
et émouvoir les cœurs.
53
La Fête des Tabernacles, ou fête des moissons,
avec ses offrandes de fruits et de récoltes, ses
cabanes de feuillage construites pour une semaine,
les réunions, les cérémonies solennelles du
souvenir, la généreuse hospitalité offerte aux
ouvriers de Dieu—les Lévites chargés du service
du sanctuaire—et à ses enfants, l’étranger et le
pauvre, tournait tous les esprits vers celui qui avait
“couronné l’année de ses biens”, et dont “les
sentiers ruisselaient de sève”, et les faisait déborder
de reconnaissance.
Les Israélites pieux consacraient à ces fêtes
religieuses un mois entier chaque année. C’était là
des moments libres de tout souci et de tout travail,
et presque entièrement voués à l’éducation.
En distribuant à son peuple l’héritage, Dieu
voulait lui enseigner, et enseigner, à travers lui, aux
générations à venir, des principes justes concernant
le droit de propriété de la terre. La terre de Canaan
fut répartie entre tous les Israélites, excepté les
54
Lévites, puisqu’ils étaient ministres du sanctuaire.
Quoique chacun fût libre, pour un temps, de
disposer de sa terre, personne ne pouvait vendre
définitivement l’héritage de ses enfants. Celui qui
vendait son domaine avait la possibilité de le
racheter n’importe quand; les dettes étaient remises
tous les sept ans, et tous les cinquante ans, lors de
l’année du jubilé, chaque terre revenait à son
propriétaire d’origine. Ainsi chaque famille était
assurée de son avoir et l’on évitait aussi bien une
trop grande richesse que trop de pauvreté.
Grâce à ce partage de la terre, Dieu assurait à
son peuple, comme il l’avait fait aux habitants de
l’Eden, l’ouvrage le plus favorable à son
épanouissement—la charge des plantes et des
animaux. Il avait prévu aussi, pour instruire ses
enfants, l’arrêt des travaux agricoles une année sur
sept: la terre restait alors en jachère et ce que les
champs produisaient d’eux-mêmes était abandonné
aux pauvres. Les Israélites avaient alors la
possibilité de se livrer davantage à l’étude, aux
relations sociales, à l’adoration, à la bienfaisance,
si souvent délaissées à cause des soucis et des
55
travaux quotidiens.
Si les principes divins concernant la répartition
des biens étaient mis en pratique aujourd’hui à
travers le monde, comme la condition humaine
serait différente! Le respect de ces principes aurait
permis d’éviter les terribles maux qui, au fil des
âges, naquirent de l’oppression qu’exercent les
riches sur les pauvres et de la haine que les pauvres
portent aux riches. Ces règles s’opposeraient
probablement à l’amoncellement de grandes
richesses, à l’ignorance et à l’avilissement de
dizaines de milliers d’hommes dont l’exploitation
sert à bâtir ces fortunes colossales. Elles aideraient
à apporter une solution pacifique aux problèmes, à
l’anarchie, aux carnages qui menacent de
submerger le monde.
La consécration à Dieu d’une dîme de tous les
revenus, du verger ou des moissons, des troupeaux,
ou encore du travail de l’intelligence ou des mains,
la consécration d’une seconde dîme pour soulager
les pauvres et pour d’autres œuvres de bienfaisance
permettaient aux enfants d’Israël de garder vivace à
56
l’esprit la vérité première que tout appartient à
Dieu, et qu’ils avaient là la possibilité
extraordinaire de transmettre les bénédictions
divines. Une telle éducation voulait tuer tout
égoïsme desséchant et épanouir des caractères
nobles et généreux.
Connaître Dieu, communier avec lui dans
l’étude et le travail, se forger un caractère à l’image
du sien, étaient la source, le moyen et le but de
l’éducation d’Israël—cette éducation que Dieu
avait donnée aux parents pour qu’ils en fassent à
leur tour bénéficier leurs enfants.
57
Chapitre 6
Les écoles de prophètes
Ils se sont tenus à tes pieds, il est ton porte-
parole (Deutéronome 33:3).
Partout où, en Israël, le plan divin d’éducation
fut réalisé, les résultats obtenus rendaient gloire à
son auteur. Mais, dans de nombreuses maisonnées,
le programme céleste n’était pas observé, et rares
étaient les caractères qui se formaient selon ses
directives.
Le plan de Dieu n’était suivi ni complètement
ni parfaitement. Par leur manque de confiance à
l’égard des instructions divines, leur mépris pour
elles, les Israélites se précipitaient dans des
tentations auxquelles peu d’entre eux étaient
capables de résister. Lorsqu’ils s’installèrent en
Canaan, “ils ne détruisirent pas les peuples que
l’Eternel leur avait indiqués. Ils se mêlèrent avec
les nations, et ils apprirent (à imiter) leurs œuvres.
58
Ils rendirent un culte à leurs idoles, qui furent pour
eux un piège.” (Psaumes 106:34-36) “Leur cœur
n’était pas fermement à lui (Dieu), et ils n’étaient
pas fidèles à son alliance. Mais lui, qui est
compatissant, faisait l’expiation de la faute et ne
détruisait pas; il multipliait (les occasions) de
retenir sa colère. [...] Il se souvenait qu’ils n’étaient
que chair; un souffle qui s’en va et qui ne revient
pas.” (Psaumes 78:37-39) Les pères et les mères en
Israël devenaient indifférents à leurs devoirs envers
Dieu, indifférents à leurs devoirs envers leurs
enfants. A cause de l’infidélité qui régnait à la
maison, des influences idolâtres qui venaient de
l’extérieur, nombreux étaient les jeunes Hébreux
qui recevaient une éducation bien éloignée de celle
que Dieu avait prévue pour eux. C’était aux mœurs
païennes qu’ils se conformaient.
Pour parer à ce mal grandissant, pour aider les
parents dans leur tâche éducative, Dieu suscita
d’autres moyens. De tout temps on avait salué les
prophètes comme des maîtres envoyés par Dieu. Le
prophète, dans le sens le plus élevé du mot, est
celui qui parle sous l’inspiration divine, qui
59
transmet au peuple les messages qu’il a lui-même
reçus de Dieu. Mais ce terme désignait aussi ceux
qui, sans être aussi directement inspirés, étaient
appelés à enseigner au peuple les œuvres et les
voies du Seigneur. Pour former ces maîtres,
Samuel organisa, selon l’ordre divin, les écoles de
prophètes.
Ces écoles devaient faire obstacle à la
propagation de la corruption, assurer l’équilibre
intellectuel et spirituel des jeunes, et favoriser le
développement de la nation en lui donnant des
chefs et des guides compétents, qui agiraient dans
le respect de Dieu. Dans ce but, Samuel rassembla
des jeunes gens pieux, intelligents et studieux. On
les appelait “fils des prophètes”. Tandis qu’ils
étudiaient la parole et les œuvres divines, la
puissance vivifiante de Dieu stimulait leur esprit et
leur âme, et ils recevaient la sagesse d’en haut. Les
maîtres ne se contentaient pas de connaître la vérité
divine, mais ils vivaient eux-mêmes en communion
avec Dieu, et avaient reçu une part toute
particulière de son Esprit. Leur savoir et leur piété
leur attiraient le respect et la confiance du peuple.
60
Au temps de Samuel, deux écoles de ce type
existaient—l’une à Rama, résidence du prophète,
l’autre à Kirjath-Jearim. Par la suite, d’autres furent
fondées.
Les élèves de ces écoles pourvoyaient à leur
propre subsistance par leur travail, soit en cultivant
le sol, soit en s’adonnant à quelque autre travail
manuel. En Israël, personne ne trouvait cela
surprenant ni dégradant; au contraire, on
considérait comme une faute de laisser grandir un
enfant dans l’ignorance d’un travail utile. Tous les
jeunes, que leurs parents fussent pauvres ou riches,
apprenaient un métier. Même s’ils étaient destinés
à assurer une charge sacrée, on jugeait essentiel
qu’ils connaissent les aspects pratiques de la vie,
pour être plus efficaces. Et beaucoup de maîtres
subvenaient à leurs propres besoins en travaillant
de leurs mains.
A l’école comme à la maison, l’enseignement
était essentiellement oral; mais les jeunes
apprenaient aussi à lire les textes hébreux, et les
rouleaux de parchemin de l’Ancien Testament
61
étaient à leur disposition. Les principaux sujets
d’étude de ces écoles étaient la loi de Dieu, avec
l’enseignement dispensé à Moïse, l’histoire sainte,
la musique sacrée et la poésie. L’histoire sainte
témoignait de l’action de l’Eternel. Les vérités de
base, que voulaient révéler les images des
cérémonies du sanctuaire, étaient étudiées, et par la
foi, on arrivait à saisir l’élément central du
système: l’Agneau de Dieu qui ôterait le péché du
monde. La plus grande piété régnait. Les élèves
n’apprenaient pas seulement qu’ils devaient prier,
mais comment prier, comment s’approcher de leur
Créateur, lui faire confiance, comprendre les
enseignements de son Esprit et y obéir. Du trésor
divin surgissaient, par l’intermédiaire de
l’intelligence sanctifiée, des choses anciennes et
des choses nouvelles, et l’Esprit de Dieu se révélait
à travers la prophétie et le chant sacré.
Il apparaît que ces écoles étaient un des moyens
les plus efficaces pour encourager cette droiture qui
“élève une nation” (Proverbes 14:34). Elles
contribuèrent très largement à jeter les bases de
cette extraordinaire prospérité qui marqua les
62
règnes de David et de Salomon.
Les principes enseignés dans les écoles de
prophètes étaient ceux qui formèrent le caractère de
David et dirigèrent sa vie. C’est la parole de Dieu
qui l’instruisait. “Par tes statuts, disait-il, je deviens
intelligent [...] J’incline mon cœur à pratiquer tes
prescriptions.” (Psaumes 119:104-112) C’est pour
cela que le Seigneur, lorsqu’il appela David, tout
jeune encore, à régner, dit qu’il était “un homme
selon [son] cœur” (Actes des Apôtres 13:22).
Nous pouvons également admirer, au début de
la vie de Salomon, les résultats de la méthode
d’éducation divine. Salomon jeune homme fit le
même choix que David. Plutôt que de demander à
Dieu des richesses terrestres, il préféra lui
demander un cœur sage et intelligent. Et le
Seigneur lui accorda non seulement ce qu’il
désirait, mais aussi ce qu’il ne recherchait pas: la
fortune et l’honneur. La puissance de son
intelligence, l’étendue de ses connaissances, la
gloire de son règne devinrent un sujet
d’émerveillement pour le monde.
63
Sous les règnes de David et de Salomon, Israël
atteignit le sommet de sa grandeur. La promesse
faite à Abraham, répétée à Moïse, était tenue: “Si
vous observez bien tous ces commandements que
je vous donne et si vous les mettez en pratique,
pour aimer l’Eternel, votre Dieu, pour marcher
dans toutes ses voies et pour vous attacher à lui,
l’Eternel dépossédera devant vous toutes ces
nations, et vous prendrez possession de nations
plus grandes et plus puissantes que vous. Tout lieu
que foulera la plante de votre pied sera à vous:
votre frontière s’étendra du désert au Liban, et du
fleuve de l’Euphrate jusqu’à la mer occidentale.
Nul ne tiendra contre vous.” (Deutéronome 11:22-
25)
Mais au cœur de l’abondance se tapit le danger.
Le péché que David commit dans son âge mûr,
quoiqu’il s’en fût sincèrement repenti et qu’il en
eût été rigoureusement puni, encouragea le peuple
à transgresser les commandements de Dieu. Et la
vie de Salomon, passée une aube si prometteuse,
fut assombrie par l’apostasie. Le désir d’accroître
64
sa puissance politique et sa gloire poussa le roi
d’Israël à s’allier aux nations païennes. L’argent de
Tarsis, l’or d’Ophir, il les obtint, mais au prix de
l’honnêteté, en transgressant les devoirs sacrés. Sa
foi fut ébranlée par ses relations avec des idolâtres,
ses mariages avec des femmes païennes. C’est ainsi
que les barrières dressées par Dieu pour le salut de
son peuple furent renversées; Salomon lui-même se
livra au culte des idoles. Sur le sommet du mont
des Oliviers, face au temple de Jéhovah, se
dressèrent d’immenses statues et des autels
destinés à rendre hommage aux divinités païennes.
En trahissant son allégeance à Dieu, Salomon
perdit le contrôle de lui-même. Son discernement
s’émoussa. La conscience, la délicatesse qui
avaient marqué le début de son règne disparurent.
L’orgueil, l’ambition, la prodigalité, la faiblesse,
engendrèrent la cruauté et l’exaction. Lui, le
souverain juste, compatissant, respectueux de Dieu,
devint tyrannique, despotique. Lui qui, lors de la
dédicace du temple, avait prié pour que son peuple
se donne à Dieu sans partage, le détournait
maintenant de Dieu. Salomon se déshonorait,
déshonorait Israël, déshonorait Dieu.
65
La nation, dont il avait été la fierté, marcha sur
ses pas. Plus tard le roi se repentit, mais le mal
qu’il avait semé portait ses fruits. La formation que
Dieu avait choisie pour les enfants d’Israël devait
les amener à être différents, dans leurs modes de
vie, des autres peuples. Ces différences, qui
auraient dû être ressenties comme un privilège et
une bénédiction, leur pesaient lourdement. La
simplicité et la retenue indispensables à un
développement en profondeur, ils cherchèrent à les
remplacer par le luxe et la mollesse des païens.
Leur ambition? être comme toutes les nations (1
Samuel 8:5). Le plan d’éducation divin fut
repoussé, la souveraineté de Dieu rejetée.
C’est ainsi qu’Israël commença sa chute: en
rejetant les voies de Dieu, en suivant les voies des
hommes. C’est ainsi que se poursuivit son déclin,
jusqu’à ce que le peuple juif devînt la proie de ces
mêmes nations qu’il avait voulu copier.
La nation d’Israël ne sut pas accepter les
bienfaits que Dieu souhaitait lui accorder. Elle ne
66
comprit pas l’objectif divin, et ne participa
nullement à sa réalisation. Mais bien que des
individus, des peuples, puissent ainsi s’écarter de
lui, Dieu garde, pour ceux qui s’en remettent à lui,
la même voie. “Tout ce que Dieu fait dure à
toujours.” (Ecclésiaste 3:14).
Quoique sa puissance se manifeste, à travers les
âges, de différentes façons, à divers degrés, selon
les besoins des hommes, l’œuvre de Dieu est la
même en tout temps. Le Maître est semblable à lui-
même. Son caractère et son plan sont immuables.
En lui “il n’y a ni changement, ni ombre de
variation” (Jacques 1:17).
C’est pour nous, pour notre instruction, que
furent enregistrées les expériences d’Israël. “Cela
leur est arrivé à titre d’exemple et fut écrit pour
nous avertir, nous pour qui la fin des siècles est
arrivée.” (1 Corinthiens 10:11) Pour nous, comme
pour l’Israël de jadis, la réussite de notre éducation
dépend de la fidélité avec laquelle nous suivons le
plan du Créateur. Si nous adhérons aux principes
de la parole de Dieu, nous recevrons des
67
bénédictions aussi grandes qu’auraient pu en
recevoir les Hébreux.
68
Chapitre 7
Vies d’hommes de Dieu
Le fruit du juste est un arbre de vie (Proverbes
11:30).
L’histoire sainte nous offre de nombreux
exemples de ce qu’engendre une éducation
authentique. Elle nous propose pour modèles
plusieurs hommes dont le caractère s’est forgé
selon la ligne divine; des hommes dont la vie fut
une bénédiction pour leur entourage, des hommes
qui étaient de véritables représentants de Dieu sur
terre. Parmi eux, Joseph et Daniel, puissants
hommes d’Etat; Moïse, le plus sage des
législateurs; Elisée, un des plus fidèles
réformateurs; et Paul, qui, si l’on excepte Celui qui
parla comme jamais homme n’a parlé, fut le maître
le plus célèbre que le monde ait connu.
Au début de leur vie, au moment précis où ils
quittaient l’adolescence pour entrer dans l’âge
69
adulte, Joseph et Daniel furent arrachés à leur
famille, à leur patrie, et emmenés, captifs, vers des
terres païennes. Joseph surtout fut soumis à toutes
sortes de tentations, de celles qui accompagnent les
revers de fortune. Dans la maison de son père,
c’était un enfant tendrement aimé; chez Potiphar, il
fut esclave, puis confident et ami; ensuite homme
d’affaires, instruit par l’étude, la réflexion, le
contact avec les hommes; après cela, dans les
prisons de Pharaon, injustement condamné, sans
espoir de jamais pouvoir se disculper, ni d’être, à
plus forte raison, libéré; enfin, appelé, dans un
moment de crise aiguë, à la tête de la nation.
Qu’est-ce qui lui permit, dans toutes ces
circonstances, de garder toute son intégrité?
Personne ne peut, sans risque, occuper une
position élevée. Comme la tempête laisse intacte la
fleur de la vallée et déracine l’arbre au sommet de
la montagne, ainsi les tentations féroces
n’effleurent même pas les petits de ce monde et
accablent ceux qui se tiennent aux premières
places, dans le succès et la gloire. Mais Joseph
résista à la prospérité comme à l’adversité. Sa
70
fidélité fut la même dans le palais des Pharaons que
dans sa cellule de prisonnier.
Enfant, Joseph avait appris à aimer et à
respecter Dieu. Bien souvent, sous la tente
paternelle, au creux des nuits syriennes, il avait
entendu raconter la vision nocturne de Béthel: celle
de l’échelle qui reliait la terre au ciel, des anges qui
montaient et descendaient, et de Celui qui, du haut
de son trône, s’était révélé à Jacob. Il avait entendu
raconter la lutte près du Jabbok, et comment Jacob,
renonçant à des fautes qui lui étaient chères, avait
été vainqueur et avait reçu le titre de prince de
Dieu.
Berger paissant les troupeaux de son père,
Joseph avait vécu une vie simple et pure, qui avait
contribué à son épanouissement physique et
mental. S’approchant de Dieu à travers la nature et
l’étude des vérités de base que son père lui avait
transmises comme un dépôt sacré, il avait acquis
un caractère fort et des principes solides.
Puis vint l’épreuve; et pendant ce terrible
71
voyage qui l’emmenait, loin de son foyer de
Canaan, vers l’esclavage qui devait être son lot en
Egypte, alors qu’il regardait une dernière fois les
collines qui cachaient les tentes sous lesquelles
s’abritait sa famille, Joseph se souvint du Dieu de
son père. Il se remémora les leçons de son enfance,
et il résolut au fond de lui-même de se montrer
fidèle—d’agir toujours en parfait sujet du roi des
cieux.
Etranger et esclave, plongé dans un milieu où
régnaient le vice, les tromperies d’un culte païen,
culte rendu plus séduisant encore par la richesse, la
culture, le luxe royaux, Joseph fut inébranlable. Il
avait appris à être fidèle à son devoir. La fidélité,
dans quelque situation que ce soit, de la plus
humble à la plus glorieuse, prépare au service
suprême.
Lorsqu’il fut appelé à la cour de Pharaon,
l’Egypte était la plus grande des nations. La
civilisation, les arts, les sciences y étaient
incomparables. Pendant une période d’extrême
difficulté, de grand danger, Joseph dut administrer
72
les affaires du royaume; et il le fit d’une façon telle
qu’il gagna la confiance du roi et du peuple.
Pharaon “lui donna la place de seigneur sur sa
maison et de maître de tout ce qu’il possédait, pour
contraindre à son gré ses ministres, et rendre sages
ses anciens” (Psaumes 105:21, 22).
Le secret de la vie de Joseph, la parole de Dieu
nous le livre. Jacob, lorsqu’il bénit ses enfants,
prononça sur son fils bien-aimé ces mots empreints
d’une puissance et d’une beauté divines:
Joseph est le rejeton d’un arbre fertile,
Le rejeton d’un arbre fertile près d’une source;
Les branches s’élèvent au-dessus de la
muraille.
Ils l’ont provoqué, ils ont tiré.
Les archers étaient ses adversaires.
Mais son arc est demeuré égal à lui-même,
Ses mains ont été fortifiées Par les mains du
Puissant de Jacob:
Il est ainsi devenu le berger, le rocher d’Israël.
Par le Dieu de ton père, qui sera ton secours;
Avec le Tout-Puissant, qui te bénira,
73
Des bénédictions du haut des cieux,
Des bénédictions du fond de l’abîme...
Les bénédictions de ton père l’emportent
Sur les bénédictions de ceux qui m’ont conçu,
Jusqu’à l’extrémité des collines étendues;
Qu’elles soient sur la tête de Joseph,
Sur le sommet de la tête du prince de ses frères!
(Genèse 49:22-26)
Sa fidélité à Dieu, sa foi en lui, l’Invisible,
étaient l’ancre de Joseph. C’était sa force.
“Ses mains ont été fortifiées
Par les mains du Puissant de Jacob.”
Daniel, ambassadeur de Dieu
A Babylone, Daniel et ses compagnons furent
apparemment plus favorisés par le sort dans leur
jeunesse que ne l’avait été Joseph au cours des
premières années de sa vie en Egypte; cependant,
leurs caractères furent mis à l’épreuve presque
aussi rigoureusement. Enlevés à la relative
simplicité de leurs maisons de Judée, ces jeunes
74
gens de sang royal furent transportés dans une ville
splendide, à la cour d’un roi des plus illustres; ils
furent choisis et destinés au service du roi. Dans
cette cour somptueuse et corrompue, les tentations
étaient fortes. Les adorateurs de Jéhovah étaient
prisonniers à Babylone; les vases de la maison de
Dieu avaient été déposés dans le temple des idoles
babyloniennes; le roi d’Israël lui-même était entre
les mains des Babyloniens; tout cela, clamaient les
vainqueurs, prouvait assez que leur religion et leurs
mœurs étaient bien supérieures à celles des
Hébreux. C’est dans ces circonstances, au milieu
des humiliations qu’Israël s’était attirées en
s’écartant des commandements divins, que Dieu
administra à Babylone la preuve éclatante de sa
toute-puissance, de la sainteté de sa loi, et des
résultats de l’obéissance; il fit cette démonstration
de la seule manière convenable, par l’intermédiaire
de ceux qui lui étaient fidèles.
Daniel et ses compagnons, à l’aube de leur
carrière, subirent une épreuve décisive. L’ordre de
les nourrir avec les mets de la table royale était
l’expression de la faveur du roi et de l’intérêt qu’il
75
leur portait. Mais une partie de cette nourriture
avait été consacrée aux idoles, et si les jeunes gens
acceptaient la faveur royale, on considérerait qu’ils
se joignaient au culte rendu aux faux dieux. Leur
fidélité à Jéhovah le leur interdisait. Ils ne
s’aventurèrent pas plus à exposer leur
épanouissement physique, intellectuel et spirituel
aux effets débilitants du luxe et de la débauche.
Daniel et ses compagnons avaient été
fidèlement instruits dans les principes de la parole
divine. Ils avaient appris à faire passer les besoins
spirituels avant les besoins terrestres, à rechercher
le bien authentique. Ils en reçurent la récompense.
Leurs habitudes de tempérance, le sentiment qu’ils
avaient d’être des représentants de Dieu, les
aidèrent à développer au mieux les ressources de
leur corps, de leur intelligence, de leur âme.
Lorsque, au bout des années de formation, les
candidats subirent l’examen final qui leur
permettait d’accéder aux places d’honneur de
l’Etat, “il ne s’en trouva aucun comme Daniel,
Hanania, Michaël et Azaria” (Daniel 1:19).
76
La cour de Babylone réunissait des
représentants de tous les pays, des hommes aux
talents exceptionnels, aux qualités nombreuses,
dotés d’une immense culture. Cependant aucun
d’eux n’égalait les prisonniers hébreux. Ceux-ci,
que ce fût sur le plan de la force et de la beauté, sur
celui de la vigueur intellectuelle et des
connaissances littéraires, étaient incomparables.
“Sur tous les sujets qui réclamaient de la sagesse et
de l’intelligence, et sur lesquels le roi les
interrogeait il les trouvait dix fois supérieurs à tous
les magiciens et astrologues qui étaient dans tout
son royaume.” (Daniel 1:20)
D’une fidélité à Dieu que rien n’ébranlait,
d’une maîtrise de soi sans faille, Daniel, par sa
dignité et par la considération qu’il témoignait aux
autres, gagna très vite “la faveur et la grâce” de
l’officier païen auquel il fut confié. Et il garda
toujours ces qualités. Rapidement, il devint premier
ministre. Plusieurs rois se succédèrent, l’empire
s’effondra, un royaume rival s’établit; sa sagesse,
sa perspicacité, sa délicatesse, sa courtoisie, sa
bonté naturelle, jointes au respect qu’il avait de ses
77
principes, étaient telles que ses ennemis eux-
mêmes étaient contraints de reconnaître qu’ils ne
pouvaient “trouver aucune occasion (de l’accuser),
ni aucune erreur, parce qu’il était fidèle” (Daniel
6:5).
Daniel était si bien attaché à Dieu de toute la
force de sa confiance que le don de l’Esprit lui fut
accordé. Les hommes l’honoraient en lui confiant
les responsabilités et les secrets du royaume, et
Dieu l’honorait en faisant de lui son ambassadeur
et en lui dévoilant les mystères de l’avenir. Les rois
païens, au contact de ce représentant du ciel, durent
confesser le Dieu de Daniel. “En vérité, déclara
Nebucadnetsar, votre Dieu est le Dieu des dieux et
le Seigneur des rois, et il révèle les mystères.”
(Daniel 2:47) Et Darius, lorsqu’il fit sa
proclamation “à tous les peuples, aux nations, aux
hommes de toutes langues qui habitaient sur toute
la terre”, exalta “le Dieu de Daniel”:
Car il est le Dieu vivant
Et il subsiste à jamais!
Son royaume ne sera jamais détruit...
78
C’est lui qui sauve et délivre,
Qui opère des signes et des prodiges
Dans les cieux et sur la terre.
(Daniel 6:27, 28)
Des hommes loyaux et intègres
Par leur sagesse et leur justice, par la pureté et
la générosité dont témoignait leur vie quotidienne,
par leur dévouement aux intérêts d’un peuple qui,
lui, était idolâtre, Joseph et Daniel se montrèrent
fidèles aux principes éducatifs de leur enfance,
fidèles à celui qu’ils représentaient. L’un comme
l’autre, en Egypte ou à Babylone, furent honorés
par la nation qu’ils servaient; à travers eux, un
peuple païen et du même coup tous les peuples qui
étaient en contact avec lui purent apprécier la bonté
et la bienveillance de Dieu, l’amour du Christ.
Quel destin que celui de ces nobles Hébreux!
Lorsqu’ils quittèrent le pays de leur enfance, ils
n’imaginaient certes pas le sort qui serait le leur.
Mais, fidèles et résolus, ils s’en remirent à Dieu
pour qu’il les dirige et atteigne, à travers eux, son
79
but.
Or Dieu désire que les formidables vérités qui
furent révélées à travers ces deux hommes soient
également révélées à travers la jeunesse et les
enfants d’aujourd’hui. L’histoire de Joseph et de
Daniel nous offre un exemple de ce qu’il veut faire
pour ceux qui mettent en lui leur confiance et
cherchent de tout leur cœur à accomplir sa volonté.
Ce dont le monde a le plus besoin, c’est
d’hommes, non pas des hommes qu’on achète et
qui se vendent, mais d’hommes profondément
loyaux et intègres, des hommes qui ne craignent
pas d’appeler le péché par son nom, des hommes
dont la conscience soit aussi fidèle à son devoir que
la boussole l’est au pôle, des hommes qui
défendraient la justice et la vérité même si
l’univers s’écroulait.
Ce n’est pas le hasard qui forge le caractère de
tels hommes; ce n’est pas non plus une grâce
particulière, des dons spéciaux accordés par la
Providence. Un noble caractère est le fruit d’une
80
discipline personnelle, de la soumission de la
nature inférieure à la nature supérieure—c’est le
moi qui se donne tout entier au service de l’amour
de Dieu et des hommes.
Les jeunes doivent se pénétrer de l’idée que
leurs talents ne sont pas leur propriété. Force,
temps, intelligence sont des trésors qui leur ont été
confiés. Ils appartiennent à Dieu, et chaque jeune
devrait décider d’en user de son mieux. Chacun est
une branche dont Dieu espère qu’elle portera des
fruits; un administrateur dont le capital doit
augmenter; une lumière pour éclairer la nuit du
monde.
Chaque jeune, chaque enfant, a une œuvre à
accomplir pour l’honneur de Dieu, et pour ennoblir
l’humanité.
Elisée, le serviteur fidèle dans les petites choses
Les années de jeunesse du prophète Elisée se
déroulèrent dans le calme de la campagne, sous la
direction de Dieu et de la nature, dans la discipline
81
d’un travail utile. Dans un temps d’apostasie
presque universelle, la maison de son père était de
celles qui n’avaient pas fléchi le genou devant
Baal. Dans cette maison, Dieu était honoré, et la
fidélité au devoir était une règle de vie quotidienne.
Fils d’un riche fermier, Elisée prit part aux
activités de son père. Il avait des aptitudes de
meneur d’hommes, mais il apprit cependant à
s’acquitter des tâches les plus ordinaires. Pour
diriger avec sagesse, il devait d’abord savoir obéir.
C’est en étant fidèle dans les petites choses qu’il se
préparait à des responsabilités plus grandes.
Aimable et doux, Elisée n’en était pas moins
énergique et ferme. Il aimait et respectait Dieu, et
dans l’humble routine du labeur quotidien, il
aiguisait sa volonté, affinait la noblesse de son
caractère, en grandissant dans la grâce et la
connaissance divines. En travaillant avec son père
aux tâches domestiques, il apprenait à travailler
avec Dieu.
L’appel prophétique lui fut adressé alors qu’il
82
labourait un champ avec les serviteurs de son père.
Lorsque Elie, cherchant, sous l’inspiration divine,
un successeur, jeta son manteau sur les épaules
d’Elisée, le jeune homme comprit cet appel et y
répondit. Il “suivit Elie, et fut à son service” (1
Rois 19:21). Au début, le travail requis n’était pas
exaltant: des tâches toutes banales encore
attendaient Elisée. Il nous est dit qu’il versait de
l’eau sur les mains d’Elie, son maître. Serviteur
attaché à la personne du prophète, il continuait à
être fidèle dans les petites choses et, avec une
résolution chaque jour plus grande, se consacrait à
la mission que Dieu lui avait confiée.
Dès le début de son appel, sa décision avait été
mise à l’épreuve. Comme il s’apprêtait à suivre
Elie, le prophète lui avait ordonné de retourner
chez lui. Elisée devait calculer la dépense—
accepterait-il ou repousserait-il l’appel? Mais il
comprit combien cette occasion était précieuse.
Pour rien au monde il n’aurait renoncé à devenir un
messager de Dieu, ni n’aurait négligé ce qu’il
considérait comme un privilège: travailler avec un
serviteur du Seigneur.
83
Le temps passa; l’enlèvement d’Elie était
proche; Elisée, lui, était prêt à succéder au
prophète. Et à nouveau, sa foi et sa détermination
furent éprouvées. Il accompagnait Elie dans ses
visites, tout en sachant ce qui devait bientôt se
produire; à chaque instant, son maître l’invitait à le
quitter: “Tu vas rester ici, car l’Eternel m’envoie
jusqu’à Béthel”. Mais en guidant la charrue, Elisée
avait appris à ne pas abandonner, à ne pas se
décourager, et maintenant qu’il s’était engagé dans
d’autres responsabilités, il ne s’en détournerait pas.
Chaque fois qu’Elie lui proposait de le quitter, il
répondait: “L’Eternel est vivant et ton âme est
vivante! je ne t’abandonnerai pas.” (2 Rois 2:2)
“Ils poursuivirent tous deux leur chemin. [...]
eux deux s’arrêtèrent au bord du Jourdain. Alors
Elie prit son manteau, le roula et en frappa les
eaux, qui se partagèrent çà et là, et ils passèrent
tous deux à sec. Lorsqu’ils eurent passé, Elie dit à
Elisée: Demande ce que tu veux que je fasse pour
toi, avant que je sois enlevé d’avec toi. Elisée
répondit: Qu’il y ait sur moi, je te prie, une double
84
part de ton esprit! Elie dit: Tu me demandes une
chose difficile. Mais si tu me vois pendant que je
serai enlevé d’auprès de toi, cela t’arrivera ainsi;
sinon, cela n’arrivera pas.
” Comme ils continuaient à marcher en parlant,
voici qu’un char de feu et que des chevaux de feu
les séparèrent l’un de l’autre. Alors Elie monta au
ciel dans un tourbillon. Elisée regardait et criait:
Mon père! Mon père! Char d’Israël et sa cavalerie!
Puis il ne le vit plus. Saisissant alors ses vêtements,
il les déchira en deux morceaux et ramassa le
manteau qu’Elie avait laissé tomber. Puis il
retourna et s’arrêta au bord du Jourdain; il prit le
manteau qu’Elie avait laissé tomber, il en frappa
les eaux et dit: Où est l’Eternel, le Dieu d’Elie? Lui
aussi, il frappa les eaux qui se partagèrent çà et là.
Elisée passa.
” Les fils des prophètes qui étaient vis-à-vis à
Jéricho le virent et dirent: L’esprit d’Elie repose
sur Elisée! Ils allèrent à sa rencontre et se
prosternèrent contre terre devant lui.” (2 Rois 2:6-
15)
85
Désormais Elisée remplaçait Elie. Celui qui
avait été fidèle dans les moindres choses se montra
fidèle aussi dans les grandes.
Elie, l’homme puissant, avait été entre les
mains de Dieu un instrument pour abattre des maux
immenses. L’idolâtrie à laquelle le peuple avait
succombé, entraîné par Achab et la reine païenne
Jézabel, avait été renversée. Les prophètes de Baal
avaient été tués.Le peuple d’Israël tout entier avait
été bouleversé et beaucoup recommençaient à
adorer Dieu. Il fallait que le successeur d’Elie soit
un homme patient et prudent, pour mener Israël
dans des chemins sûrs. C’est à cela que s’était
préparé Elisée, en confiant à Dieu sa propre
éducation.
Cette leçon est pour chacun de nous. Personne
ne peut savoir quel est le dessein de Dieu lorsqu’il
nous propose une discipline; mais tous nous
pouvons être sûrs que la fidélité dans les petites
choses démontre l’aptitude à assumer de plus
grandes responsabilités. Chaque action de notre vie
86
révèle notre caractère et seul celui qui se montre
dans les petites tâches “un ouvrier qui n’a pas à
rougir” (2 Timothée 2:15) se verra confier par Dieu
l’honneur de plus hautes charges.
Moïse ou la puissance de la foi
Moïse était plus jeune que Joseph et Daniel
lorsqu’il fut soustrait à la protection attentive de
son foyer; et pourtant les forces qui avaient
façonné leurs vies avaient déjà marqué la sienne de
leur empreinte. Il ne passa que douze ans dans sa
famille juive; mais pendant ces années furent
solidement posées les bases de sa grandeur, et c’est
quelqu’un que nous connaissons à peine qui y
contribua.
Yokébed était une femme, une esclave. Sa
condition était humble, son fardeau, lourd. Mais
jamais le monde ne reçut de plus grande
bénédiction à travers une femme qu’à travers elle,
si l’on excepte Marie de Nazareth. Sachant que son
fils serait bientôt enlevé à ses soins, remis à des
gens ignorants de Dieu, elle chercha avec d’autant
87
plus de ferveur à attacher son âme au Seigneur.
Elle s’efforça d’enraciner dans son cœur l’amour
de Dieu et la fidélité à son service. Elle y travailla
fidèlement: par la suite, aucune influence ne put
entraîner Moïse à renier les principes de vérité que
sa mère lui avait enseignés de toutes ses forces, par
sa vie même.
Le fils de Yokébed quitta l’humble demeure de
Gosen pour entrer dans le palais des pharaons, où
la fille du roi l’accueillit comme un enfant bien-
aimé. Dans les écoles d’Egypte, Moïse reçut
l’instruction civile et militaire la meilleure
possible. Très attachant, imposant, cultivé, d’allure
princière, chef militaire renommé, il devint la fierté
de la nation. Le roi d’Egypte était également prêtre;
et Moïse, qui refusait de participer au culte païen,
était néanmoins initié à tous les mystères de la
religion égyptienne. A cette époque l’Egypte était
toujours la nation la plus puissante, et sa
civilisation était des plus raffinées; Moïse, héritier
présomptif du trône, devait recevoir les honneurs
les plus grands du monde. Mais il y avait pour lui
une voie plus noble. Pour l’honneur de Dieu et la
88
délivrance de son peuple opprimé, Moïse sacrifia
les honneurs de l’Egypte. Alors, d’une façon toute
particulière, Dieu entreprit de le former.
Car Moïse n’était pas prêt encore pour la tâche
qui lui incombait. Il devait apprendre à dépendre de
Dieu. Il avait mal compris l’intention divine, et
espérait délivrer Israël par la force. Pour y
parvenir, il risqua tout, et échoua. Vaincu, déçu, il
s’enfuit et s’exila en terre étrangère.
Dans les déserts de Madian, Moïse passa
quarante années à garder les moutons. En
apparence, sa mission était remise à tout jamais; en
fait, il se préparait à l’accomplir. C’est dans la
maîtrise de soi qu’il trouverait la sagesse nécessaire
pour diriger une foule ignorante et indisciplinée.
En gardant les moutons et les jeunes agneaux, il
devait acquérir l’expérience qui ferait de lui le
berger fidèle et patient d’Israël. Pour représenter
Dieu, il devait se mettre à son école.
En Egypte, il avait été soumis à toutes sortes
d’influences—l’affection de sa mère adoptive, sa
89
propre position de petit-fils du roi, le luxe et le vice
aux mille attraits, une religion idolâtre, mais d’un
mysticisme raffiné et subtil—qui avaient marqué
son esprit et son caractère. Mais dans le
dépouillement du désert, tout s’effaça.
Dans la solitude des montagnes majestueuses,
Moïse était seul devant Dieu. Partout s’inscrivait le
nom du Créateur. Moïse sentait qu’il était en sa
présence, à l’ombre de sa toute-puissance. Là, il ne
pouvait plus avoir l’illusion de se suffire à lui-
même. En présence de l’être infini, il mesurait
combien l’homme est faible, impuissant, aveugle.
C’est là qu’il prit conscience de la réalité de la
présence divine, une conscience qui ne le quitta
pas, de toute sa longue vie épuisante et lourde de
responsabilités. Non seulement il entrevit, dans le
lointain, le Christ fait chair, mais il le vit
accompagnant les armées d’Israël dans tous leurs
voyages. Ainsi, même incompris et diffamé,
accablé de reproches et d’insultes, face au danger
et à la mort, “il tint ferme, comme voyant celui qui
est invisible” (Hébreux 11:27).
90
Moïse faisait plus que penser à Dieu: il le
voyait. Il avait sans cesse devant lui la vision de
Dieu, il gardait toujours les yeux sur sa face.
La foi de Moïse n’était pas incertaine; elle se
fortifiait de chaque réalité. Il croyait, il
reconnaissait que Dieu dirigeait sa vie personnelle,
dans les moindres détails. Pour avoir la force de
résister à la tentation, il se confiait à lui.
Il voulait accomplir de son mieux la tâche qui
lui avait été attribuée, et il se mettait entièrement
sous la dépendance de Dieu. Il sentait qu’il avait
besoin de l’aide divine, la demandait, la saisissait
par la foi, et, assuré de recevoir une force de vie,
allait de l’avant.
C’est ainsi que grandit l’expérience de Moïse,
pendant ces quarante années passées au désert. La
sagesse infinie ne jugea pas ces années trop
longues ni le prix d’un tel enrichissement trop
élevé.
91
Les enseignements, l’éducation donnés là
influencèrent non seulement l’histoire d’Israël,
mais tout ce qui a, depuis ce jour, contribué au
progrès de l’humanité. Le plus grand éloge décerné
à Moïse est ce témoignage de l’Esprit: “Il ne s’est
plus levé en Israël de prophète comme Moïse, que
l’Eternel connaissait face à face.” (Deutéronome
34:10)
Paul ou le service dans la joie
À la foi et à l’expérience des disciples de
Galilée qui avaient suivi Jésus s’ajoutèrent, pour
annoncer l’Evangile, l’énergie ardente et la
puissante intelligence d’un rabbin de Jérusalem.
Citoyen romain, né dans une ville païenne; juif non
seulement par son origine, mais par toute son
éducation, par l’amour qu’il portait à sa patrie, par
sa foi religieuse; élève des plus éminents rabbins à
Jérusalem, instruit dans la tradition et les lois de
ses pères, Paul de Tarse partageait au plus haut
degré l’orgueil et les préjugés de sa nation. Jeune
encore, il devint un membre estimé du sanhédrin.
On voyait en lui un homme plein d’avenir,
92
défenseur zélé de la foi des anciens.
Dans les écoles de théologie de Judée, la parole
de Dieu avait été délaissée au profit des
spéculations humaines; les interprétations et les
traditions rabbiniques l’avaient dépouillée de sa
force. Le désir de puissance, de domination, un
attachement jaloux à certains privilèges, le
fanatisme et un orgueil méprisant servaient aux
maîtres de règles.
Les rabbins se glorifiaient de leur supériorité
personnelle, non seulement sur les autres peuples,
mais encore sur la foule de leurs concitoyens. Ils
haïssaient farouchement leurs oppresseurs romains
et caressaient l’espoir que leur nation recouvrerait
par les armes son indépendance. Aussi détestaient-
ils et mettaient-ils à mort les disciples de Jésus,
dont le message de paix s’opposait aux projets nés
de leur ambition. Paul était un de leurs
représentants les plus acharnés et les plus
impitoyables.
Dans les écoles militaires d’Egypte, Moïse
93
avait appris à suivre la loi de la force, et cette loi
avait eu une telle emprise sur lui qu’il lui fallut
quarante années de silence et de communion avec
Dieu et la nature pour se préparer à diriger Israël
selon une règle d’amour. Paul devait apprendre la
même leçon.
Aux portes de Damas, la vision de Jésus
crucifié bouleversa sa vie. Le persécuteur devint
disciple, le maître devint élève. Les jours de
ténèbres et de solitude passés à Damas pesèrent
comme des années d’expérience. Sous la direction
du Christ, Paul étudia l’Ancien Testament, qu’il
gardait précieusement en mémoire. A lui aussi la
solitude au sein de la nature servit d’école. Il partit
pour le désert d’Arabie et là, s’adonna à l’étude des
Ecritures, s’instruisit auprès de Dieu. Il vida son
âme de tous les préjugés, de toutes les traditions
qui avaient façonné sa vie, pour la remplir à la
source de vérité.
Dès lors, sa vie fut guidée par le seul principe
du don de soi, par le ministère de l’amour. “Je me
dois, disait-il, aux Grecs et aux Barbares, aux
94
savants et aux ignorants.” “L’amour du Christ nous
étreint.” (Romains 1:14; 2 Corinthiens 5:14)
Paul, le plus grand des maîtres de cette terre,
assuma les tâches humbles aussi bien que les
responsabilités élevées. Il reconnaissait l’utilité du
travail des mains comme du travail de l’esprit, et il
vivait lui-même du produit de son artisanat.
Prêchant chaque jour dans les grandes villes, il
continuait d’exercer son métier de faiseur de tentes.
“Ces mains, dit-il en quittant les anciens d’Ephèse,
ont pourvu à mes besoins et à ceux de mes
compagnons.” (Actes des Apôtres 20:34)
Il possédait de grandes qualités intellectuelles
et sa vie témoigne d’une sagesse rare. Des
principes de première importance, que les plus
grands esprits de son époque ignoraient, sont
proclamés dans son enseignement et illustrés par sa
vie. Il avait cette extrême sagesse qui affine la
perspicacité, ouvre le cœur, met l’homme en
contact avec d’autres hommes et lui permet
d’éveiller ce qu’il y a en eux de meilleur et de les
inciter à vivre noblement.
95
Ecoutez ce qu’il dit aux païens de Lystre,
lorsqu’il veut les tourner vers Dieu tel qu’il se
révèle dans la nature, Dieu source de tout bien, qui
donne “du ciel les pluies et les saisons fertiles, en
[nous] comblant de nourriture et de bonheur dans
le cœur” (Actes des Apôtres 14:17).
Voyez-le dans la prison de Philippes: de son
corps douloureux s’élève, dans le silence de la nuit,
un chant de louange. Le tremblement de terre ouvre
les portes de la prison, et la voix de Paul retentit de
nouveau, pour réconforter le geôlier païen: “Ne te
fais aucun mal, nous sommes tous ici.” (Actes des
Apôtres 16:28) Chaque prisonnier est là en effet,
retenu par la présence d’un seul compagnon de
peine. Et le geôlier, convaincu de la valeur de cette
foi qui soutient Paul, demande où est le chemin du
salut et, avec toute sa famille, se joint à la troupe
persécutée des disciples du Christ.
Voyez Paul à Athènes devant l’Aréopage,
répondant à la science par la science, à la logique
par la logique, à la philosophie par la philosophie.
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Education

  • 2. Avis au lecteur Nous devons attirer l’attention du lecteur sur deux points importants. Le premier concerne la date de la première parution de l’ouvrage et le second son caractère religieux. Expliquons-nous. Les livres d’éducation et de psychologie appliquée vieillissent vite. Cela tient à des modes et au vocabulaire, mais aussi à l’augmentation rapide des connaissances dans ce secteur jeune et en pleine évolution des sciences humaines. Et lorsqu’un livre atteint la décennie, à moins d’être profondément remanié, il est généralement dépassé. Dès lors, est-il décent de proposer au lecteur de la fin du 20e siècle un livre écrit en 1903? Les livres dont la vie excède—à notre époque— trois générations d’hommes sont de deux types. Il y a ceux que l’on consulte encore dans des bibliothèques spécialisées, avec un intérêt historique, pour savoir ce que l’on écrivait ou 2
  • 3. pensait à tel moment précis de l’histoire des idées. Et puis il y a ceux qui continuent d’être des livres de chevet, d’imprimer leur empreinte dans la pensée et la vie des gens. Ces livres-là ne datent pas. Bien sûr, on peut repérer à tel ou tel petit détail le lieu ou le temps de leur rédaction; mais l’essentiel n’est pas là. Ils véhiculent des idées et des vérités tellement fondamentales sur l’homme qu’elles sont presque des principes éternels. Nous croyons que le livre Education de Madame Ellen White est de ceux-là. Il a, en effet, été traduit dans de très nombreuses langues et continue à être, tout autour du monde, un manuel de base pour des milliers de parents, d’enseignants, de pasteurs, d’animateurs. Il est en particulier l’expression de la philosophie qui inspire l’un des systèmes scolaires privés les plus étendus dans le monde, celui mis sur pied par le mouvement adventiste. L’ouvrage manquait, depuis plusieurs années, en langue française. Cette nouvelle édition, qui est en même temps une nouvelle traduction, devrait donc combler une lacune et mettre à la portée de beaucoup un texte sur lequel il vaut la peine de réfléchir. 3
  • 4. Pour l’auteur, l’éducation ne s’adresse pas à l’intelligence seule. L’enfant, comme l’homme, est un tout. Sa vie, pour être harmonieuse, doit être à la fois corporelle, intellectuelle, affective, pratique et sociale, mais aussi spirituelle. Ellen White refuse une éducation au rabais, sans de nécessaires disciplines et ayant pour objet un être incomplet. Notre société est en train de mesurer les conséquences tragiques d’une “éducation” (mais peut-on la nommer ainsi?) qui a cru pouvoir faire l’économie de la vie intérieure, de ses racines profondes, de ses finalités supérieures. Voilà pourquoi le lecteur ne sera pas surpris, quelles que soient, par ailleurs, sa position ou ses convictions personnelles, de voir la place que l’auteur laisse à la Bible et à celui qu’elle révèle, Jésus-Christ, l’Educateur par excellence. Cette éducation, qui vise non seulement la vie terrestre, sans la négliger aucunement, mais encore la vie éternelle, acquiert alors tout son sens. Perspective vertigineuse qui pourrait devenir angoissante par la responsabilité qu’elle entraîne si, en traçant l’itinéraire, l’auteur ne rappelait constamment les moyens mis à notre 4
  • 5. disposition par Dieu pour y parvenir. Dès lors la poésie ou la nature, le travail manuel ou l’alimentation, l’étude de l’histoire ou de la biologie, la manière de se vêtir ou de vivre le jour du repos ne constituent plus une mosaïque fragmentaire et insignifiante mais une vaste fresque, signe et avant-goût du Royaume des Cieux. Le souhait très profond des éditeurs est que cet ouvrage soit une contribution, modeste mais réelle, à l’éducation permanente de l’homme intègre, total, à son renouveau puissant. Les éditeurs 5
  • 6. Chapitre 1 Origine et but de la véritable éducation La connaissance des saints, c’est l’intelligence (Proverbes 9:10). Accorde-toi donc avec Dieu (Job 22:21). Nos idées en matière d’éducation sont trop étroites, trop limitées. Il nous faut les élargir et viser plus haut. La véritable éducation implique bien plus que la poursuite de certaines études. Elle implique bien plus qu’une préparation à la vie présente. Elle intéresse l’être tout entier, et toute la durée de l’existence qui s’offre à l’homme. C’est le développement harmonieux des facultés physiques, mentales et spirituelles. Elle prépare l’étudiant à la joie du service qui sera le sien dans ce monde, et à la joie plus grande encore du vaste service qui l’attend dans le monde à venir. La source de cette éducation est indiquée par 6
  • 7. ces mots de l’Ecriture sainte, désignant le Dieu infini: en lui “sont cachés tous les trésors de la sagesse” (Colossiens 2:3). “A lui le conseil et l’intelligence.” (Job 12:13) Le monde a eu ses grands maîtres, des hommes d’une immense intelligence, doués d’une capacité de recherche considérable, des hommes dont les paroles ont stimulé la réflexion et offert à l’esprit de vastes étendues de savoir; ces hommes ont été salués comme des guides et des bienfaiteurs de l’humanité; mais il est un être qui leur est supérieur. Aussi loin que remonte la mémoire humaine, nous pouvons constater l’influence des maîtres à penser des hommes; mais avant eux était la Lumière. De même que la lune et les étoiles de notre système solaire brillent parce qu’elles réfléchissent la lumière du soleil, ainsi les grands penseurs de ce monde, pour autant que leur enseignement soit droit, réfléchissent les rayons du Soleil de Justice. La moindre lueur de pensée, le moindre éclair d’intelligence trouvent leur source dans la Lumière du monde. 7
  • 8. De nos jours, on parle beaucoup de la nature et de l’importance d’une “éducation supérieure”. La véritable “éducation supérieure” nous vient de Celui en qui “résident la sagesse et la puissance” (Job 12:13), et de la bouche de qui “sortent la connaissance et la raison” (Proverbes 2:6). C’est dans la connaissance de Dieu que prennent leur source toute véritable science et toute formation authentique. Dans quelque domaine que ce soit, physique, mental, spirituel; où que nous portions nos regards, en dehors du fléau du péché, cette évidence s’impose. Quelle que soit notre ligne de recherche, si nous souhaitons sincèrement parvenir à la vérité, nous sommes mis en contact avec l’intelligence invisible et toute-puissante qui est à l’œuvre partout. L’esprit de l’homme est en communion avec l’esprit de Dieu, le fini avec l’infini. L’effet de cette communion sur le corps, l’esprit et l’âme dépasse tout ce qu’on peut concevoir. C’est d’elle que naît l’éducation supérieure. C’est à travers elle que Dieu veut assurer notre 8
  • 9. formation. “Accorde-toi donc avec Dieu” (Job 22:21), voilà son message à l’humanité. Ces mots posent les bases de la méthode selon laquelle le père de notre race fut éduqué. Lorsque Adam se trouvait dans l’Eden saint, dans toute la gloire de la race humaine sans tache, c’est ainsi que Dieu l’instruisait. Si nous voulons embrasser le champ d’action de l’éducation, nous devons considérer non seulement la nature de l’homme et l’intention de Dieu en le créant, mais aussi le bouleversement qu’entraîna, pour la condition humaine, la connaissance du mal, et le plan conçu par Dieu pour éduquer l’homme selon son glorieux projet, malgré cela. Quand Adam sortit des mains de son Créateur, il lui ressemblait, physiquement, mentalement et spirituellement. “Dieu créa l’homme à son image” (Genèse 1:27). Le dessein de Dieu était que plus l’homme avancerait dans la vie, plus il lui ressemblerait—mieux il refléterait la gloire du Créateur. Toutes ses facultés pouvaient se 9
  • 10. développer; leurs dimensions, leur vigueur étaient destinées à croître sans limites. Des champs d’études et de recherches immenses et merveilleux s’offraient à elles. Les mystères de l’univers visible—les “merveilles de celui dont la science est parfaite” (Job 37:16)—invitaient l’homme à l’étude. Cet homme dont le grand privilège était la communion face à face, cœur à cœur, avec son Créateur. S’il était resté fidèle à Dieu, tout cela lui aurait appartenu pour toujours. A travers l’éternité, il n’aurait cessé d’amasser des trésors constamment renouvelés de connaissances, de découvrir de nouvelles sources de bonheur, de se pénétrer de plus en plus profondément de la sagesse, de la puissance et de l’amour de Dieu. Il aurait de mieux en mieux accompli son destin de créature: il aurait de mieux en mieux reflété la gloire du Créateur. Mais par sa désobéissance, tout fut perdu. A cause du péché, la ressemblance de l’homme avec Dieu s’estompa, jusqu’à disparaître presque totalement. Les capacités physiques de l’homme s’affaiblirent, ses facultés intellectuelles s’amoindrirent, sa vision spirituelle se voila. Il était 10
  • 11. devenu mortel. Cependant, sa race n’était pas abandonnée au désespoir. Dans l’infini de son amour et de sa miséricorde, Dieu avait conçu le plan du salut et accordé à l’homme une seconde chance. Restaurer en l’homme l’image de son Créateur, le rendre à la perfection pour laquelle il avait été créé, assurer le développement de son corps, de sa pensée, de son âme, pour que le plan divin de la création soit réalisé, devaient être l’œuvre de la rédemption. C’est le but de l’éducation, l’objet grandiose de la vie. L’amour, qui est à l’origine de l’acte créateur et rédempteur, doit être aussi à l’origine de la véritable éducation. La loi que Dieu nous a donnée pour diriger notre vie le manifeste de façon éclatante. Le premier et le plus grand commandement est: “Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta force, et de toute ta pensée.” (Luc 10:27) L’aimer, Lui, l’infini, l’omniscient, de toute sa force, de toute sa pensée, de tout son cœur, implique que nous développions à l’extrême chacune de nos facultés. Cela implique qu’en notre 11
  • 12. être tout entier—le corps et la pensée, aussi bien que l’âme—l’image de Dieu doit être restaurée. Le second commandement est semblable au premier: “Tu aimeras ton prochain comme toi- même.” (Matthieu 22:39) La loi d’amour nous demande de mettre au service de Dieu et de nos semblables notre corps, notre pensée et notre âme. Et ce service auquel nous nous consacrons, qui fait de nous une bénédiction pour les autres, nous apporte à nous-mêmes la plus grande des bénédictions. Le don de soi sous-tend toute véritable formation de l’être. C’est à travers le service désintéressé qu’il nous est donné de développer au mieux chacune de nos aptitudes. C’est ainsi que nous participerons de plus en plus pleinement à la nature divine. Nous sommes prêts pour le royaume des cieux, car nous le recevons dans notre cœur. Dieu étant la source de tout véritable savoir, le premier objectif de l’éducation est évidemment, comme nous l’avons vu, d’appliquer nos esprits à le connaître tel qu’il se révèle à nous. C’est par une 12
  • 13. communion directe avec Dieu que s’instruisaient Adam et Eve; ils apprirent à le connaître à travers ses œuvres. Toute création était, dans sa perfection initiale, expression de la pensée divine. La nature offrait aux yeux d’Adam et Eve d’innombrables exemples de la sagesse divine. Mais, par la désobéissance, toute connaissance de Dieu par une communion directe devint impossible à l’homme, toute connaissance de Dieu à travers ses œuvres mêmes lui devint difficile. La terre, abîmée, souillée par le péché, ne reflétait plus que faiblement la gloire du Créateur. Il est vrai que Dieu nous propose toujours ses “leçons de choses”. Sur chaque page du grand volume de la création, on peut encore retrouver l’écriture du Seigneur. La nature parle encore de son Créateur. Mais ces témoignages sont incomplets, imparfaits. Et nous, créatures déchues, aux facultés affaiblies, à la vue courte, nous sommes incapables d’interpréter correctement ce que nous percevons. Nous avons besoin de la révélation plus complète que Dieu donne de lui-même dans sa parole écrite. Les saintes Ecritures sont le critère parfait de la 13
  • 14. vérité; c’est pourquoi nous devrions fonder sur elles tout notre système éducatif. Pour acquérir une éducation digne de ce nom, nous devons connaître Dieu le Créateur, et Christ le Rédempteur tels qu’ils sont révélés dans la parole sacrée. Tout être humain, créé à l’image de Dieu, possède une puissance semblable à celle du Créateur: le pouvoir personnel de penser et d’agir. Les hommes qui développent ce pouvoir sont des hommes prêts à assumer des responsabilités, des chefs de file, capables d’influencer les autres. C’est le rôle de la véritable éducation que de développer ce pouvoir, d’apprendre aux jeunes à penser par eux-mêmes, à ne pas se contenter d’être le miroir de la pensée des autres. Que les étudiants, au lieu de se borner à étudier ce qu’ont dit ou écrit les hommes, se tournent vers les sources de la vérité, vers les vastes espaces qu’offrent à leurs recherches la nature et la révélation. Qu’ils se mettent face à leur devoir, à leur destinée, et leur pensée se déploiera et prendra de la vigueur. Ce ne sont pas des mauviettes cultivées qui doivent sortir de nos institutions, mais des hommes solides, 14
  • 15. capables de penser et d’agir, des hommes qui dominent les circonstances et non qui les subissent, des hommes à l’esprit large, à la pensée claire, qui ont le courage de leurs convictions. Une telle éducation apporte plus qu’une formation intellectuelle; plus qu’un entraînement physique. Elle fortifie le caractère, de telle sorte que jamais la vérité et l’honnêteté ne sont sacrifiées aux désirs égoïstes ou aux ambitions terrestres. Elle arme l’esprit contre le mal. Elle empêche le développement de toute passion destructrice et ainsi chaque mobile, chaque désir se conforme aux grands principes du bien. A mesure que l’homme s’imprègne de la perfection du caractère divin, son esprit est renouvelé et son âme recréée à l’image de Dieu. Y a-t-il une éducation supérieure à celle-là? Y en a-t-il une qui lui soit comparable? “On ne peut donner, à sa place, de l’or pur, Ni peser de l’argent pour l’acheter; Elle n’entre pas en balance avec l’or d’Ophir, 15
  • 16. Ni avec le précieux onyx, ni avec le saphir; Ni l’or ni le verre ne peuvent lui être comparés, On ne peut l’échanger pour un vase d’or fin. Le corail et le cristal ne peuvent même pas être évoqués; Posséder la sagesse (vaut) plus que les perles.” (Job 28:15-18) L’idéal que Dieu propose à ses enfants dépasse de beaucoup tout ce qu’ils peuvent imaginer de meilleur. Le but à atteindre, c’est l’amour de Dieu—la ressemblance avec Dieu. Devant l’étudiant s’ouvre un chemin de progrès infini. Il a une tâche à accomplir, un objectif à atteindre: tout ce qui est bien, pur, noble. Il progressera aussi vite et aussi loin que possible dans chacun des domaines de la véritable connaissance. Mais il orientera ses efforts vers des sujets aussi éloignés des profits exclusivement égoïstes et terrestres que les cieux sont éloignés de la terre. Celui qui participe au projet divin, en faisant connaître Dieu aux jeunes, en façonnant leur caractère à l’image du sien, accomplit une œuvre 16
  • 17. noble et élevée. Lorsqu’il suscite le désir d’atteindre l’idéal divin, il propose une éducation aussi élevée que les cieux et aussi vaste que l’univers; une éducation qui ne peut être achevée dans cette vie, mais qui se poursuivra dans la vie à venir; une éducation qui permettra à l’élève de quitter l’école préparatoire de la terre pour accéder à l’échelon supérieur, à l’école d’en haut. 17
  • 18. Chapitre 2 L’école d’Éden Heureux l’homme qui a trouvé la sagesse (Proverbes 3:13). La méthode d’éducation établie au commencement du monde devait servir de modèle à l’homme à travers la suite des temps. Pour en illustrer les principes, une école-pilote fut ouverte en Eden, demeure de nos premiers parents. Le jardin d’Eden était la salle de classe, la nature était le manuel d’études, le Créateur lui-même le maître, et les parents de la race humaine les élèves. Créés pour être “l’image et la gloire de Dieu” (1 Corinthiens 11:7), Adam et Eve avaient reçu des dons à la mesure de leur haute destinée. Par leur grâce et leur équilibre, leurs beaux traits réguliers, leur visage rayonnant de santé, de joie et d’espoir, ils ressemblaient de toute évidence à leur Créateur. Mais cette ressemblance n’était pas seulement 18
  • 19. physique. Chacune des facettes de leur esprit et de leur âme reflétait la gloire de Dieu. Adam et Eve, dotés de hautes qualités intellectuelles et spirituelles, n’étaient qu’“un peu inférieur[s] aux anges” (Hébreux 2:7); aussi pouvaient-ils non seulement reconnaître les merveilles manifestes de l’univers, mais aussi saisir les responsabilités et les engagements moraux qui leur incombaient. “L’Eternel Dieu planta un jardin en Eden, du côté de l’Orient, et il y mit l’homme qu’il avait formé. L’Eternel Dieu fit germer du sol toutes sortes d’arbres d’aspect agréable et bons à manger, ainsi que l’arbre de la vie au milieu du jardin.” (Genèse 2:8, 9) C’était là, dans la splendeur de la nature intacte, que nos premiers parents allaient recevoir leur éducation. Plein d’intérêt pour ses enfants, notre Père céleste avait lui-même pris en main cette éducation. Souvent, Adam et Eve recevaient la visite des messagers divins, les saints anges, qui leur apportaient conseils et instructions. Souvent, alors qu’ils se promenaient dans le jardin à la 19
  • 20. fraîcheur du jour, ils entendaient la voix de Dieu et communiquaient avec lui face à face. Les desseins de l’Eternel à leur égard étaient des “desseins de paix et non de malheur” (Jérémie 29:11). Chacun de ses projets visait leur plus grand bien. A Adam et Eve avait été confié le soin du jardin, “pour le cultiver et pour le garder” (Genèse 2:15). Quoique riches de tout ce que le possesseur de l’univers pouvait leur accorder, ils ne devaient pas rester inactifs. Une tâche utile leur avait été confiée, véritable bénédiction, pour fortifier leur corps, développer leur esprit, former leur caractère. Le livre de la nature, qui leur prodiguait des leçons vivantes, se révélait être un manuel inépuisable et merveilleux. Sur chaque feuille de la forêt, sur chaque rocher des montagnes, sur chaque étoile scintillante, sur la terre, la mer, le ciel, était écrit le nom de Dieu. Avec toutes les créatures, animées ou inanimées, avec la feuille, la fleur et l’arbre, le léviathan des mers, le grain de poussière dansant au rayon de soleil, les habitants d’Eden pouvaient s’entretenir; ils pouvaient demander à 20
  • 21. chacun les secrets de sa vie. La gloire de Dieu dans les cieux, les mondes innombrables aux révolutions ordonnées, “les nuages [...] en équilibre” (Job 37:16), les mystères de la lumière et du son, du jour et de la nuit,—tout s’offrait à l’étude des élèves de la première école terrestre. Le Créateur de toute chose permettait que leur esprit accède aux lois et au fonctionnement de la nature, aux grands principes de vérité qui régissent l’univers spirituel. A la lumière de “la connaissance de la gloire de Dieu” (2 Corinthiens 4:6), leurs facultés mentales et spirituelles se déployaient et ils prenaient conscience des immenses joies que leur procurait leur existence sainte. Sortant de la main du Créateur, non seulement le jardin d’Eden, mais aussi la terre entière éclataient d’une beauté infinie. Les taches du péché, l’ombre de la mort ne défiguraient pas la création. La gloire de Dieu “couvr[ait] les cieux et sa louange rempliss[ait] la terre” (Habakuk 3:3). “Ensemble les étoiles du matin éclataient en chants 21
  • 22. de triomphe, et tous les fils de Dieu lançaient des acclamations.” (Job 38:7) Ainsi la terre était l’emblème parfait de Celui qui est “riche en bienveillance et en fidélité” (Exode 34:6); c’était un excellent sujet d’étude pour ceux qui avaient été créés à son image. Dieu souhaitait que la terre entière suivît l’exemple du jardin d’Eden, et que, au fur et à mesure qu’elle s’agrandirait, la famille humaine crée d’autres foyers, d’autres écoles semblables à ceux qu’il lui avait donnés. Ainsi, au fil du temps, la terre entière abonderait en foyers et en écoles où l’on étudierait les paroles et les œuvres de Dieu, et où les élèves pourraient de plus en plus, de mieux en mieux, réfléter la lumière de la connaissance de Dieu, à travers l’éternité. 22
  • 23. Chapitre 3 La connaissance du bien et du mal Comme ils n’ont pas jugé bon d’avoir la connaissance de Dieu, Dieu les a livrés à une mentalité réprouvée (Romains 1:28). Nos premiers parents, créés saints et purs, n’étaient cependant pas hors d’atteinte du péché. Dieu aurait pu les créer incapables de transgresser ses commandements, mais leur caractère n’aurait alors connu aucun développement; c’est par contrainte et non par choix qu’ils auraient servi Dieu. Aussi leur donna-t-il le pouvoir de choisir— l’accepter pour maître ou le rejeter. Avant qu’ils puissent recevoir dans leur plénitude les bénédictions que le Seigneur désirait leur accorder, il fallait que leur amour et leur fidélité soient éprouvés. Il y avait, dans le jardin d’Eden, “l’arbre de la 23
  • 24. connaissance du bien et du mal [...] Et l’Eternel Dieu donna ce commandement à l’homme: Tu pourras manger de tous les arbres du jardin; mais tu ne mangeras pas de l’arbre de la connaissance du bien et du mal.” (Genèse 2:9, 16, 17) La volonté de Dieu, c’était qu’Adam et Eve ne connaissent pas le mal. La connaissance du bien leur avait été accordée gratuitement; mais la connaissance du mal—du péché et de ses conséquences, travail épuisant, angoisse, déception et chagrin, souffrance et mort—cela, l’amour le taisait. Tandis que Dieu recherchait le bonheur de l’homme, Satan travaillait à sa perte. Eve, méprisant l’avertissement de Dieu à propos de l’arbre défendu, s’aventura auprès de cet arbre et rencontra là son ennemi. Satan, voyant que l’intérêt et la curiosité de la femme étaient éveillés, entreprit de contester la parole de Dieu, et de jeter le doute sur sa sagesse et sa bonté. Et lorsque Eve rapporta la défense de Dieu concernant l’arbre de la connaissance: “Vous n’en mangerez pas et vous n’y toucherez pas, sinon vous mourrez”, le tentateur répondit: “Vous ne mourrez pas du tout! 24
  • 25. Mais Dieu sait que le jour où vous en mangerez, vos yeux s’ouvriront, et que vous serez comme des dieux qui connaissent le bien et le mal.” (Genèse 3:3-5) Satan voulait faire croire que la connaissance du bien et du mal serait une bénédiction, et qu’en empêchant Adam et Eve de prendre du fruit de l’arbre, Dieu les privait d’un grand bien. Il insista sur le fait que ce fruit leur avait été interdit parce qu’il possédait la faculté merveilleuse de donner sagesse et pouvoir, et que Dieu voulait ainsi les empêcher d’atteindre un état supérieur et un plus grand bonheur. Il déclara qu’il avait lui-même mangé du fruit défendu, et avait de ce fait acquis le pouvoir de parler; s’ils en mangeaient eux aussi, leur existence serait d’un tout autre niveau, et leurs connaissances plus vastes. Lorsque Satan proclamait avoir retiré le plus grand bien du fruit défendu, il se gardait bien de laisser voir qu’il avait été banni du ciel pour cause de désobéissance. Son mensonge était si bien dissimulé sous un vernis de vérité qu’Eve, la tête 25
  • 26. tournée par des flatteries et des tromperies, ne le perçut pas. Elle convoitait ce que le Seigneur lui avait interdit; elle se défiait de la sagesse de Dieu. Elle rejetait la foi en lui, clé de toute connaissance. Lorsque Eve vit “que l’arbre était bon à manger, agréable à la vue et propre à donner du discernement, elle prit de son fruit et en mangea”. Il avait un goût flatteur, et tout en mangeant, Eve crut sentir une force vivifiante la parcourir, et s’imagina qu’elle accédait à un niveau d’existence supérieur. Elle avait désobéi, elle tenta son mari, “et il mangea” (Genèse 3:6). “Vos yeux s’ouvriront”, avait dit leur ennemi; “vous serez comme des dieux qui connaissent le bien et le mal” (Genèse 3:5). Certes, leurs yeux s’étaient ouverts; mais sur quel triste spectacle! Ce qu’ils avaient conquis par leur désobéissance, c’était de connaître le mal, et les malédictions du péché. Le fruit lui-même n’était pas toxique, et le péché n’était pas tant d’avoir succombé à la convoitise. C’est le manque de confiance dans la bonté de Dieu et dans sa parole, le rejet de son 26
  • 27. autorité qui firent de nos premiers parents des pécheurs et amenèrent le monde à connaître le mal. C’est cela qui ouvrit la porte à toutes sortes de mensonges et d’erreurs. L’homme perdit tout en choisissant d’écouter l’imposteur plutôt que celui qui est la Vérité et qui seul possède l’intelligence. Le bien et le mal se mêlèrent dans son esprit jusqu’à l’obscurcir et en paralyser les facultés mentales et spirituelles. Il ne fut plus à même d’apprécier les biens que Dieu lui avait si généreusement accordés. Adam et Eve avaient choisi de connaître le mal, et si jamais ils voulaient recouvrer la place qu’ils avaient perdue, ce devait être à travers les conditions difficiles qu’ils s’étaient eux-mêmes imposées. Ils n’habiteraient plus le jardin d’Eden, qui, dans sa perfection, ne pouvait leur apporter les enseignements dont ils avaient désormais profondément besoin. Pleins d’une tristesse inexprimable, ils dirent adieu à cet endroit magnifique et partirent sur la terre que marquait la malédiction du péché! 27
  • 28. Dieu avait dit à Adam: “Parce que tu as écouté la voix de ta femme et que tu as mangé de l’arbre dont je t’avais défendu de manger, le sol sera maudit à cause de toi; c’est avec peine que tu en tireras ta nourriture tous les jours de ta vie, il te produira des chardons et des broussailles, et tu mangeras l’herbe de la campagne. C’est à la sueur de ton visage que tu mangeras du pain, jusqu’à ce que tu retournes dans le sol, d’où tu as été pris; car tu es poussière, et tu retourneras à la poussière.” (Genèse 3:17-19) Quoique la terre fût souillée par le péché, la nature demeurait le livre d’étude de l’homme. Un livre qui ne pouvait plus présenter le bien seulement; car le mal était partout présent, marquant la terre, la mer, l’air de son empreinte dégradante. Là où autrefois éclatait uniquement le caractère de Dieu, la connaissance du bien, se manifestait désormais aussi le caractère de Satan, la connaissance du mal. La nature, qui reflétait maintenant le bien et le mal, avertissait sans cesse l’homme des conséquences du péché. 28
  • 29. Les fleurs fanèrent, les feuilles tombèrent: Adam et sa compagne assistaient aux premiers signes de déchéance. Devant eux se dressait l’implacable évidence: tout ce qui vit doit mourir. L’air lui-même, dont dépendait leur vie, portait des germes de mort. Sans cesse revenait à leur esprit leur domination perdue. Adam avait régné sur les créatures inférieures et, aussi longtemps qu’il était resté fidèle à Dieu, la nature entière avait reconnu son autorité; mais par sa désobéissance, il perdit cette domination. L’esprit de rébellion, auquel il avait lui-même cédé le premier, se répandait à travers toute la création animale. Ainsi la vie de l’homme, mais aussi les bêtes, les arbres des forêts, l’herbe des champs, l’air qu’il respirait, tout répétait la triste leçon de la connaissance du mal. Cependant l’homme n’était pas abandonné aux conséquences du mal qu’il avait choisi. Dans la condamnation prononcée contre Satan, il y avait 29
  • 30. l’annonce de la rédemption. “Je mettrai inimitié entre toi et la femme, avait dit Dieu, entre ta descendance et sa descendance; celle-ci t’écrasera la tête, et tu lui écraseras le talon.” (Genèse 3:15) Cette condamnation, prononcée devant nos premiers parents, était pour eux une promesse. Avant d’entendre parler de broussailles et de chardons, de dur labeur et de peine—leur part, désormais—et de cette poussière à laquelle ils devraient retourner, ils reçurent des paroles qui ne pouvaient manquer de les remplir d’espoir. Tout ce qui avait été perdu sous l’emprise de Satan pouvait être retrouvé à travers le Christ. Cette promesse, la nature nous la répète aussi. Abîmée par le péché, elle n’en parle pas moins de création, et aussi de rédemption. Si, par des signes implacables de déclin, la terre témoigne de la malédiction, elle porte cependant les marques nombreuses et éclatantes d’un pouvoir de vie. Les arbres ne perdent leurs feuilles que pour être parés de nouveau; les fleurs fanent pour renaître resplendissantes de beauté; le moindre acte créateur nous affirme que nous pouvons être créés 30
  • 31. de nouveau “dans une justice et une sainteté que produit la vérité” (Éphésiens 4:24). Ainsi la nature, qui nous fait précisément comprendre tout ce que nous avons perdu, nous apporte en même temps un message d’espoir. Où que frappe le mal, la voix de notre Père résonne; il invite ses enfants à ouvrir les yeux sur les résultats du péché, leur demande de renoncer au mal, les encourage à choisir le bien. 31
  • 32. Chapitre 4 Rapports entre éducation et rédemption Faire resplendir la connaissance de la gloire de Dieu sur la face de Christ (2 Corinthiens 4:6). Par le péché, l’homme s’était séparé de Dieu. Sans le plan de la rédemption, cette séparation aurait été éternelle; nous aurions été pour toujours plongés dans les ténèbres d’une nuit sans fin. Mais grâce au sacrifice du Sauveur, nous pouvons à nouveau communier avec Dieu. Nous ne pouvons pas l’approcher en personne; dans notre péché nous ne pouvons pas contempler sa face; mais nous pouvons le contempler et communier avec lui en Jésus, le Sauveur. La lumière de “la connaissance de la gloire de Dieu” est révélée “sur la face de Christ”. Dieu est “en Christ, réconciliant le monde avec lui-même” (2 Corinthiens 4:6; 5:19). “La Parole a été faite chair, et elle a habité 32
  • 33. parmi nous, pleine de grâce et de vérité.” “Or elle était la vie; et la vie était la lumière des hommes.” (Jean 1:14; 1:4) La vie et la mort du Christ, prix de notre rachat, ne sont pas seulement une promesse de vie pour nous; pas seulement un moyen de nous redonner accès aux trésors de la sagesse: elles nous révèlent des dimensions de son caractère que les saints habitants de l’Eden eux-mêmes ignoraient. Tandis que le Christ ouvre le royaume des cieux à l’homme, la vie qu’il nous donne ouvre le cœur de l’homme au royaume des cieux. Le péché ne nous sépare pas seulement de Dieu; il détruit dans nos âmes le désir et la possibilité de le connaître. La mission du Christ est de défaire ce qu’a fait le mal. Aux facultés de l’âme, paralysées par le péché, à l’intelligence obscurcie, à la volonté pervertie, il peut redonner vigueur et puissance. Il nous offre les richesses de l’univers et, grâce à lui, le pouvoir de distinguer ces trésors et de nous en emparer. Le Christ est la “lumière qui éclaire tout homme venant au monde” (Jean 1:9). Chaque être 33
  • 34. humain reçoit la vie à travers le Christ; à travers lui chaque âme reçoit un peu de la lumière divine. Au fond de tout homme gisent des aspirations intellectuelles, mais aussi spirituelles, un sens de la justice, une aspiration vers le bien. Mais une puissance contraire combat ces principes. Les conséquences du premier péché—manger de l’arbre de la connaissance du bien et du mal—sont manifestes dans notre vie à tous. Il y a, dans la nature de l’homme, une tendance au mal, une force à laquelle il ne peut résister seul. Pour l’aider à la repousser, à atteindre cet idéal qu’il reconnaît, au fond de lui-même, comme seul valable, il n’y a qu’une puissance: celle du Christ. Le plus grand besoin de l’homme est de coopérer avec cette puissance. Ne devons-nous pas considérer que cette coopération est l’objectif suprême de tout effort d’éducation? Le maître digne de ce nom ne se satisfait pas d’un travail de second ordre. Il ne se satisfait pas de mener ses élèves à un niveau inférieur à celui qu’ils pourraient atteindre. Il ne peut pas se contenter de leur transmettre simplement des 34
  • 35. connaissances techniques, qui feront d’eux des comptables habiles, des artisans adroits, des commerçants prospères—et c’est tout. Son ambition, c’est de leur insuffler les principes de vérité, obéissance, honneur, intégrité, pureté—des principes leur permettant de devenir des forces qui participeront effectivement à l’équilibre et à l’élévation de la société. Il souhaite, par-dessus tout, que ses élèves apprennent de la vie la grande leçon de l’altruisme. Lorsque l’âme rencontre le Christ, que l’homme accepte d’être guidé par sa sagesse, d’être fort de sa force, à chaque instant de sa vie, à chaque battement de son cœur, ces principes deviennent une force vivante, propre à forger le caractère. L’élève qui réalise cette union a trouvé la source de la sagesse; il lui est possible d’atteindre ses idéaux les plus nobles, d’accéder à l’éducation la plus haute, de s’engager enfin sur le chemin de l’éternité. Si l’on y réfléchit profondément, on comprend qu’éducation et rédemption sont une seule et même 35
  • 36. chose, car pour l’une comme pour l’autre, “personne ne peut poser un autre fondement que celui qui a été posé, savoir Jésus-Christ.” “Car il a plu [à Dieu] de faire habiter en lui toute plénitude.” (1 Corinthiens 3:11; Colossiens 1:19) Malgré nos conditions de vie différentes des conditions originelles, la véritable éducation est toujours conforme au plan du Créateur, le plan de l’école d’Eden. Adam et Eve, en communion avec Dieu, étaient instruits par lui directement; quant à nous, nous contemplons la lumière de la connaissance de sa gloire sur la face du Christ. Les grands principes d’éducation n’ont pas changé. Ils sont “à toujours inébranlables” (Psaumes 111:8) puisque ce sont les principes du caractère de Dieu. L’effort fondamental, l’objectif constant du maître devraient être d’aider l’élève à les appréhender et à engager avec le Christ une relation qui fera de ces principes une force de vie. Le maître qui accepte cet objectif est réellement un collaborateur du Christ, un ouvrier avec Dieu. 36
  • 37. Chapitre 5 L’éducation d’Israël L’Eternel seul le conduisait. Il l’entourait, il en prenait soin, Il le gardait comme la prunelle de son œil. (Deutéronome 32:12, 10). Le système éducatif conçu en Eden reposait sur la famille. Adam était “le fils de Dieu” (Luc 3:28) et c’était le Très-Haut lui-même qui dispensait l’instruction à ses enfants. Il y avait là dans le sens le plus complet de l’expression une école de famille. Dans le plan divin d’éducation tel qu’il fut adapté à la condition humaine après la chute, le Christ représente le Père; c’est lui le maillon qui relie les hommes à Dieu; c’est lui le grand éducateur du genre humain. Et à son tour, il demande aux hommes, aux femmes, de le représenter: la famille devait être école, les parents éducateurs. 37
  • 38. L’éducation au sein de la famille prévalut au temps des patriarches. C’est dans ces écoles familiales que, grâce à Dieu, les conditions les plus favorables au développement du caractère étaient rassemblées. Ceux qui se laissaient diriger par Dieu suivaient le mode de vie qu’il avait établi au commencement de toutes choses. Ceux qui s’éloignaient de lui s’étaient bâti des villes, et, s’y rassemblant, s’enorgueillissaient de la magnificence, du luxe et du vice qui font des villes d’aujourd’hui la gloire du monde et sa malédiction. Les hommes qui gardaient les principes divins vivaient dans les champs et sur les collines. Ils cultivaient le sol, paissaient les troupeaux, et dans cette vie libre, indépendante, dure, mais propice à l’étude et à la réflexion, ils s’instruisaient auprès de Dieu et instruisaient leurs enfants de ses œuvres et de ses voies. Voilà la méthode d’éducation que Dieu désirait donner à Israël. Mais, à la sortie d’Egypte, bien peu d’Israélites étaient prêts à œuvrer avec lui à la formation de leurs enfants. Les parents eux-mêmes 38
  • 39. avaient besoin d’être instruits et disciplinés. Victimes d’un esclavage qui avait toujours été leur part, ils étaient ignorants, frustes, avilis même. Leur connaissance de Dieu était mince, et bien petite leur foi en lui. Leur esprit avait été obscurci par de faux enseignements, et corrompu par un long contact avec le paganisme. Dieu désirait élever leur niveau moral, et cherchait pour cela à se faire connaître à eux. L’Eternel, tout au long de la longue errance des Israélites dans le désert, lorsqu’ils allaient çà et là, qu’ils étaient exposés à la faim, à la soif, à la fatigue, menacés par des ennemis, par des païens, et qu’il veillait lui-même sur eux, tentait de fortifier leur foi en leur faisant connaître la puissance qui agissait sans cesse pour leur bien. Après leur avoir enseigné à s’en remettre à son amour, à sa puissance, il voulait leur offrir pour modèle, à travers sa loi, le caractère qu’il souhaitait leur voir atteindre, par sa grâce. Qu’elles étaient précieuses les leçons que reçut Israël au pied du Sinaï! Ce fut une période de 39
  • 40. préparation toute particulière pour l’entrée en Canaan. Là, le projet divin trouvait un cadre favorable. Au sommet du Sinaï, étendant son ombre sur les tentes déployées dans la plaine, s’était posée la colonne de nuée qui avait guidé les enfants d’Israël durant leur voyage. La nuit, la colonne de feu les assurait de la protection divine; et lorsqu’ils dormaient, le pain du ciel descendait, doucement, sur le camp. De tous côtés les montagnes énormes, déchiquetées, se dressaient dans leur solennelle magnificence, parlaient de gloire et d’éternité. Là, l’homme se sentait faible et ignorant devant Celui qui “a pesé les montagnes au crochet, et les collines à la balance” (Ésaïe 40:12). Là, en manifestant sa majesté, Dieu cherchait à ce qu’Israël s’imprégnât de la sainteté de son caractère et de ses commandements, et sentît les dimensions du péché. Mais le peuple était lent à comprendre. Habitués comme ils l’avaient été en Egypte à côtoyer des images palpables de la divinité, sous les formes les plus viles, les enfants d’Israël concevaient bien difficilement l’existence et le 40
  • 41. caractère de l’Etre invisible. Par compassion envers leur faiblesse, Dieu leur accorda un signe de sa présence. “Ils me feront un sanctuaire, dit-il, et je demeurerai au milieu d’eux.” (Exode 25:8) Lors de la construction du sanctuaire, maison de l’Eternel, Moïse reçut des instructions précises pour que tout fût conforme au modèle céleste. Dieu l’appela sur la montagne et lui révéla ce modèle, à la ressemblance duquel furent faits le tabernacle et tout ce qui s’y rapportait. De même, Dieu révéla à Israël, le peuple au milieu duquel il désirait habiter, son caractère glorieux. Il lui en offrit un modèle sur la montagne, lorsqu’il donna la loi du haut du Sinaï: il passa alors devant Moïse et proclama: “L’Eternel, l’Eternel, Dieu compatissant et qui fait grâce, lent à la colère, riche en bienveillance et en fidélité.” (Exode 34:6) Mais les enfants d’Israël étaient incapables d’accéder par leurs propres forces à ce caractère idéal. La révélation faite au Sinaï pouvait 41
  • 42. seulement les convaincre de leur misère et de leur impuissance. Les sacrifices pratiqués dans l’enceinte du sanctuaire leur réservaient une autre leçon: celle du pardon des fautes, et du pouvoir qu’a tout homme, à travers le Sauveur, de choisir l’obéissance qui mène à la vie. C’est à travers le Christ que devait s’accomplir le plan de Dieu, dont le tabernacle était un symbole—cet ouvrage magnifique, aux parois d’or étincelant qui reflétaient, dans des lumières d’arc- en-ciel, les rideaux brodés de chérubins; pénétré des senteurs d’encens, avec ses prêtres vêtus de blanc immaculé; et, dans le profond mystère du lieu très saint, au-dessus du propitiatoire, entre les anges courbés en adoration, la gloire du Dieu très saint. Le Seigneur désirait que son peuple pût lire, dans chaque détail, son intention pour l’âme humaine. Bien plus tard, l’apôtre Paul, parlant sous la direction du Saint-Esprit, soulignait cette même intention: “Ne savez-vous pas que vous êtes le temple de Dieu, et que l’Esprit de Dieu habite en vous? Si quelqu’un détruit le temple de Dieu, Dieu le détruira; car le temple de Dieu est saint, et c’est 42
  • 43. ce que vous êtes.” (1 Corinthiens 3:16, 17) Grands étaient le privilège, l’honneur accordés à Israël de construire le sanctuaire; grande aussi était sa responsabilité. Un édifice incomparable, dont la construction requérait le matériel le plus coûteux, les talents les plus fins, allait être élevé dans le désert, par un peuple à peine sorti de l’esclavage! Cela semblait pourtant impossible! Mais l’architecte était là; il s’était engagé à collaborer avec les ouvriers. “L’Eternel parla à Moïse et dit: Vois: j’ai appelé par son nom Betsaleel, fils d’Ouri, fils de Hour, de la tribu de Juda. Je l’ai rempli de l’Esprit de Dieu, de sagesse, d’intelligence et de compétence pour toutes sortes d’ouvrages [...] Je lui ai donné pour aide Oholiab, fils d’Ahisamak, de la tribu de Dan. J’ai mis de la sagesse dans le cœur de tous les gens habiles, pour qu’ils fassent tout ce que je t’ai ordonné.” (Exode 31:1-3, 6). Quelle extraordinaire école technique que celle du Christ et de ses anges, dans le désert! 43
  • 44. Tous devaient participer à la construction du sanctuaire, et de ses accessoires. Il y avait là de quoi faire travailler esprits et mains. Il fallait toutes sortes de matériaux, et chacun était invité à prendre part à la tâche, pour autant que son cœur l’y poussait. C’est ainsi qu’en travaillant, qu’en donnant, les enfants d’Israël apprirent à collaborer avec Dieu, et les uns avec les autres. D’autre part, ils devaient bâtir ensemble un autre édifice, spirituel celui-là: le temple de Dieu en eux-mêmes. Depuis leur départ d’Egypte, ils avaient reçu des leçons qui les avaient formés et disciplinés. D’ailleurs, avant même qu’il quitte l’Egypte, le peuple avait été réparti en groupes, dirigé par des chefs; il s’agissait là d’une organisation temporaire, qui fut achevée au Sinaï. L’ordre dont témoignait avec tant d’évidence chaque ouvrage de Dieu se retrouvait là, dans l’organisation des Hébreux. Dieu était le centre de toute autorité et de tout pouvoir. Moïse, qui le représentait, devait veiller 44
  • 45. en son nom à l’application des lois. Puis venait le Conseil des soixante-dix, ensuite les prêtres et les princes, au-dessous d’eux les “chefs de mille, chefs de cent, chefs de cinquante et chefs de dix” (Nombres 11:16; Deutéronome 1:15), et, enfin, les officiers destinés à des tâches particulières. Le camp était distribué dans un ordre précis: au centre, le tabernacle, demeure de l’Eternel; autour, les tentes des prêtres et des lévites. Plus loin se répartissaient celles de chaque tribu, chacune sous sa bannière. Des règlements d’hygiène minutieux furent mis en vigueur, prescrits non seulement parce qu’ils étaient nécessaires à la santé, mais parce qu’ils étaient surtout la condition pour que le Dieu Saint demeurât parmi le peuple. Par mandat divin, Moïse déclara: “L’Eternel, ton Dieu, marche au milieu de ton camp pour te protéger [...]; ton camp sera donc saint.” (Deutéronome 23:14) Aucune des façons de vivre des enfants d’Israël n’échappait à l’éducation divine. Tout ce qui concernait leur bien-être était l’objet de la 45
  • 46. sollicitude de Dieu et intéressait sa loi. Il cherchait leur plus grand bien, ne serait-ce que lorsqu’il les nourrissait. La manne qu’il leur accordait dans le désert était de qualité telle qu’elle devait fortifier leur corps, leur intelligence, leur esprit. Quoique tant d’entre eux se soient insurgés contre cette alimentation restreinte, rêvant de retourner aux jours où, disaient-ils, “nous étions assis près des marmites de viande, [...] nous mangions du pain à satiété” (Exode 16:3), le choix de Dieu éclatait d’une sagesse indéniable: malgré les épreuves d’une vie rude, personne, dans aucune tribu, n’était faible. Tout au long des marches des Hébreux, l’arche renfermant les tables de la loi divine montra le chemin. Lorsque la colonne de nuée descendait, ils savaient qu’ils devaient s’arrêter là pour installer leur campement. Tant que la nuée demeurait au- dessus du tabernacle, ils demeuraient dans le camp. Lorsqu’elle s’élevait, ils reprenaient leur marche. L’arrêt aussi bien que le départ étaient ponctués d’une invocation solennelle. “Quand l’arche partait, Moïse disait: Lève-toi, Eternel! et que tes 46
  • 47. ennemis soient dispersés! [...] Et quand on la reposait, il disait: Reviens, Eternel, aux myriades des milliers d’Israël.” (Nombres 10:35, 36) Tandis que le peuple cheminait dans le désert, le chant contribua à imprimer dans l’esprit de chacun de nombreuses et précieuses leçons. Lorsqu’elle avait été délivrée de l’armée de Pharaon, la foule d’Israël avait uni ses voix en un chant de triomphe. Bien loin dans le désert, et jusqu’à la mer avait résonné le joyeux refrain, les montagnes avaient retenti de louanges: “Chantez à l’Eternel, car il a montré sa souveraineté” (Exode 15:21). Et pendant le voyage, ce chant était souvent repris, pour réjouir les cœurs et vivifier la foi des pèlerins. Les commandements donnés au Sinaï, qui contenaient les promesses de la grâce de Dieu et rappelaient tout ce qu’il avait fait pour délivrer son peuple, étaient, à la demande divine, chantés, avec accompagnement d’instruments; ainsi les enfants d’Israël allaient, au rythme de leurs voix unies pour louer Dieu. Alors leurs pensées se détachaient des soucis et 47
  • 48. des difficultés du chemin, leur esprit agité, impatient, s’apaisait; les principes de vérité s’ancraient dans leur mémoire et leur foi se fortifiait. Chanter ensemble leur apprenait à agir en ordre et en harmonie, et chacun se rapprochait par là du Seigneur et des autres. Moïse déclara, à propos de la façon dont Dieu dirigea le peuple d’Israël pendant les quarante années de l’errance dans le désert: “L’Eternel, ton Dieu, t’éduque comme un homme éduque son fils [...] afin de t’humilier et de t’éprouver, pour reconnaître ce qu’il y avait dans ton cœur et si tu observais ses commandements, oui ou non.” (Deutéronome 8:5, 2) “Il l’a trouvé dans un pays désert, dans un chaos hurlant et aride; il l’entourait, il en prenait soin, il le gardait comme la prunelle de son œil, pareil à l’aigle qui éveille sa nichée, voltige sur ses petits, déploie ses ailes, les prend, les porte sur ses plumes. L’Eternel seul le conduisait. Et il n’y avait avec lui aucun dieu étranger.” (Deutéronome 32:10-12) 48
  • 49. “Car il se souvint de sa parole sainte et d’Abraham, son serviteur. Il fit sortir son peuple dans l’allégresse, ses élus au milieu des acclamations. Il leur donna les terres des nations, et du travail des peuples, ils possédèrent (le fruit), afin d’observer ses prescriptions et de garder ses lois.” (Psaumes 105:42-45) Dieu accorda à Israël tous les moyens, tous les privilèges qui lui permettraient de faire honneur à son nom et d’être une bénédiction pour les nations voisines. Si les Israélites marchaient dans le chemin de l’obéissance, il leur promettait de leur donner “sur toutes les nations qu’il a créées la supériorité en gloire, en renom et en magnificence”. “Tous les peuples de la terre verront que le nom de l’Eternel est invoqué sur toi, et ils te craindront.” “Les peuples, qui entendront parler de toutes ces prescriptions [...] diront: Cette grande nation ne peut être qu’un peuple sage et intelligent!” (Deutéronome 26:19; 28:10; 4:6) Les lois données à Israël contenaient des 49
  • 50. directives très précises à propos de l’éducation. Sur le Sinaï, Dieu s’était révélé à Moïse “compatissant et qui fait grâce, lent à la colère, riche en bienveillance et en fidélité” (Exode 34:6). Ces principes, formulés dans sa loi, devaient être enseignés aux enfants par les pères et les mères en Israël, eux auxquels Moïse déclara, sous l’inspiration divine: “Ces paroles que je te donne aujourd’hui seront dans ton cœur. Tu les inculqueras à tes fils et tu en parleras quand tu seras dans ta maison, quand tu iras en voyage, quand tu te coucheras et quand tu te lèveras.” (Deutéronome 6:6, 7) Ce n’est pas en théorie qu’il fallait enseigner cela. Ceux qui veulent transmettre la vérité doivent en mettre en pratique les principes. C’est uniquement en faisant transparaître dans leur vie le caractère de Dieu, sa droiture, sa noblesse et sa générosité qu’ils peuvent avoir de l’influence sur les autres. La véritable éducation ne consiste pas à enseigner de force un esprit qui n’est ni préparé ni 50
  • 51. ouvert. Il faut d’abord éveiller les facultés intellectuelles, susciter l’intérêt. La méthode divine d’enseignement y pourvoyait. Lui qui créa l’esprit et en établit les lois peut en assurer un développement harmonieux. Dans le foyer comme dans le sanctuaire, dans les choses de la nature comme dans celles de l’art, dans le travail comme dans les fêtes, dans les constructions sacrées et les pierres commémoratives, par d’innombrables moyens, rites et symboles, les leçons que Dieu dispensait à Israël mettaient en lumière ses principes et entretenaient le souvenir de ses œuvres merveilleuses. Aussi, lorsque se posait une question, la réponse qui y était donnée se gravait dans les cœurs et les esprits. Chaque détail de l’éducation du peuple élu nous montre, de façon éclatante, qu’une vie centrée sur Dieu est une vie de plénitude. Dieu offre de quoi satisfaire tous les besoins qu’il inspire; il cherche à développer chacune des facultés qu’il a créées en l’homme. Artisan de toute beauté, lui-même admirateur 51
  • 52. du beau, le Créateur prit soin d’éveiller et de satisfaire en ses enfants l’amour de la beauté. Il leur accorda également tout ce qui permet la vie en société, les relations bienveillantes et dévouées qui savent si bien entretenir la solidarité, éclairer et adoucir la vie. Les fêtes d’Israël étaient un moyen éducatif d’importance. Dans la vie quotidienne, la famille tenait à la fois le rôle d’école et d’église, les parents montraient la voie à suivre aussi bien dans le domaine profane que religieux. Mais trois fois par an, à des époques précises, les enfants d’Israël se retrouvaient lors de grandes rencontres au cours desquelles ils rendaient ensemble leur culte à Dieu. C’est à Silo d’abord, à Jérusalem ensuite, que ces rassemblements avaient lieu. Seuls les pères et les fils étaient tenus d’y participer; mais personne ne souhaitait s’en priver, et toute la maisonnée, dans la mesure du possible, y prenait part; avec elle, bénéficiant de son hospitalité, l’étranger, le lévite, et le pauvre. Le voyage à Jérusalem, à la façon simple des 52
  • 53. patriarches, dans la grâce du printemps, l’éclat de l’été, ou la plénitude de l’automne, avait un charme immense. Chargés de dons de remerciements, ils allaient, l’homme aux cheveux blancs et le jeune enfant, rencontrer Dieu dans sa sainte demeure. En chemin, on racontait une fois encore aux enfants les expériences passées, les histoires que tous aimaient tant, les vieillards aussi bien que les jeunes. On chantait les cantiques qui avaient adouci la longue marche dans le désert. On chantait les commandements de Dieu, qui se gravaient ainsi pour toujours dans la mémoire de nombreux enfants, de nombreux jeunes gens, sous l’influence bénie de la nature, dans ce climat d’amitié. A Jérusalem, les cérémonies pascales—la réunion de nuit avec les hommes aux reins ceints, sandales aux pieds, bâton à la main; le repas pris en hâte, l’agneau, le pain sans levain et les herbes amères; enfin, dans le silence solennel, le récit de l’histoire du sang répandu, de l’ange porteur de mort et de la longue marche loin du pays de servitude—ne pouvaient que frapper l’imagination et émouvoir les cœurs. 53
  • 54. La Fête des Tabernacles, ou fête des moissons, avec ses offrandes de fruits et de récoltes, ses cabanes de feuillage construites pour une semaine, les réunions, les cérémonies solennelles du souvenir, la généreuse hospitalité offerte aux ouvriers de Dieu—les Lévites chargés du service du sanctuaire—et à ses enfants, l’étranger et le pauvre, tournait tous les esprits vers celui qui avait “couronné l’année de ses biens”, et dont “les sentiers ruisselaient de sève”, et les faisait déborder de reconnaissance. Les Israélites pieux consacraient à ces fêtes religieuses un mois entier chaque année. C’était là des moments libres de tout souci et de tout travail, et presque entièrement voués à l’éducation. En distribuant à son peuple l’héritage, Dieu voulait lui enseigner, et enseigner, à travers lui, aux générations à venir, des principes justes concernant le droit de propriété de la terre. La terre de Canaan fut répartie entre tous les Israélites, excepté les 54
  • 55. Lévites, puisqu’ils étaient ministres du sanctuaire. Quoique chacun fût libre, pour un temps, de disposer de sa terre, personne ne pouvait vendre définitivement l’héritage de ses enfants. Celui qui vendait son domaine avait la possibilité de le racheter n’importe quand; les dettes étaient remises tous les sept ans, et tous les cinquante ans, lors de l’année du jubilé, chaque terre revenait à son propriétaire d’origine. Ainsi chaque famille était assurée de son avoir et l’on évitait aussi bien une trop grande richesse que trop de pauvreté. Grâce à ce partage de la terre, Dieu assurait à son peuple, comme il l’avait fait aux habitants de l’Eden, l’ouvrage le plus favorable à son épanouissement—la charge des plantes et des animaux. Il avait prévu aussi, pour instruire ses enfants, l’arrêt des travaux agricoles une année sur sept: la terre restait alors en jachère et ce que les champs produisaient d’eux-mêmes était abandonné aux pauvres. Les Israélites avaient alors la possibilité de se livrer davantage à l’étude, aux relations sociales, à l’adoration, à la bienfaisance, si souvent délaissées à cause des soucis et des 55
  • 56. travaux quotidiens. Si les principes divins concernant la répartition des biens étaient mis en pratique aujourd’hui à travers le monde, comme la condition humaine serait différente! Le respect de ces principes aurait permis d’éviter les terribles maux qui, au fil des âges, naquirent de l’oppression qu’exercent les riches sur les pauvres et de la haine que les pauvres portent aux riches. Ces règles s’opposeraient probablement à l’amoncellement de grandes richesses, à l’ignorance et à l’avilissement de dizaines de milliers d’hommes dont l’exploitation sert à bâtir ces fortunes colossales. Elles aideraient à apporter une solution pacifique aux problèmes, à l’anarchie, aux carnages qui menacent de submerger le monde. La consécration à Dieu d’une dîme de tous les revenus, du verger ou des moissons, des troupeaux, ou encore du travail de l’intelligence ou des mains, la consécration d’une seconde dîme pour soulager les pauvres et pour d’autres œuvres de bienfaisance permettaient aux enfants d’Israël de garder vivace à 56
  • 57. l’esprit la vérité première que tout appartient à Dieu, et qu’ils avaient là la possibilité extraordinaire de transmettre les bénédictions divines. Une telle éducation voulait tuer tout égoïsme desséchant et épanouir des caractères nobles et généreux. Connaître Dieu, communier avec lui dans l’étude et le travail, se forger un caractère à l’image du sien, étaient la source, le moyen et le but de l’éducation d’Israël—cette éducation que Dieu avait donnée aux parents pour qu’ils en fassent à leur tour bénéficier leurs enfants. 57
  • 58. Chapitre 6 Les écoles de prophètes Ils se sont tenus à tes pieds, il est ton porte- parole (Deutéronome 33:3). Partout où, en Israël, le plan divin d’éducation fut réalisé, les résultats obtenus rendaient gloire à son auteur. Mais, dans de nombreuses maisonnées, le programme céleste n’était pas observé, et rares étaient les caractères qui se formaient selon ses directives. Le plan de Dieu n’était suivi ni complètement ni parfaitement. Par leur manque de confiance à l’égard des instructions divines, leur mépris pour elles, les Israélites se précipitaient dans des tentations auxquelles peu d’entre eux étaient capables de résister. Lorsqu’ils s’installèrent en Canaan, “ils ne détruisirent pas les peuples que l’Eternel leur avait indiqués. Ils se mêlèrent avec les nations, et ils apprirent (à imiter) leurs œuvres. 58
  • 59. Ils rendirent un culte à leurs idoles, qui furent pour eux un piège.” (Psaumes 106:34-36) “Leur cœur n’était pas fermement à lui (Dieu), et ils n’étaient pas fidèles à son alliance. Mais lui, qui est compatissant, faisait l’expiation de la faute et ne détruisait pas; il multipliait (les occasions) de retenir sa colère. [...] Il se souvenait qu’ils n’étaient que chair; un souffle qui s’en va et qui ne revient pas.” (Psaumes 78:37-39) Les pères et les mères en Israël devenaient indifférents à leurs devoirs envers Dieu, indifférents à leurs devoirs envers leurs enfants. A cause de l’infidélité qui régnait à la maison, des influences idolâtres qui venaient de l’extérieur, nombreux étaient les jeunes Hébreux qui recevaient une éducation bien éloignée de celle que Dieu avait prévue pour eux. C’était aux mœurs païennes qu’ils se conformaient. Pour parer à ce mal grandissant, pour aider les parents dans leur tâche éducative, Dieu suscita d’autres moyens. De tout temps on avait salué les prophètes comme des maîtres envoyés par Dieu. Le prophète, dans le sens le plus élevé du mot, est celui qui parle sous l’inspiration divine, qui 59
  • 60. transmet au peuple les messages qu’il a lui-même reçus de Dieu. Mais ce terme désignait aussi ceux qui, sans être aussi directement inspirés, étaient appelés à enseigner au peuple les œuvres et les voies du Seigneur. Pour former ces maîtres, Samuel organisa, selon l’ordre divin, les écoles de prophètes. Ces écoles devaient faire obstacle à la propagation de la corruption, assurer l’équilibre intellectuel et spirituel des jeunes, et favoriser le développement de la nation en lui donnant des chefs et des guides compétents, qui agiraient dans le respect de Dieu. Dans ce but, Samuel rassembla des jeunes gens pieux, intelligents et studieux. On les appelait “fils des prophètes”. Tandis qu’ils étudiaient la parole et les œuvres divines, la puissance vivifiante de Dieu stimulait leur esprit et leur âme, et ils recevaient la sagesse d’en haut. Les maîtres ne se contentaient pas de connaître la vérité divine, mais ils vivaient eux-mêmes en communion avec Dieu, et avaient reçu une part toute particulière de son Esprit. Leur savoir et leur piété leur attiraient le respect et la confiance du peuple. 60
  • 61. Au temps de Samuel, deux écoles de ce type existaient—l’une à Rama, résidence du prophète, l’autre à Kirjath-Jearim. Par la suite, d’autres furent fondées. Les élèves de ces écoles pourvoyaient à leur propre subsistance par leur travail, soit en cultivant le sol, soit en s’adonnant à quelque autre travail manuel. En Israël, personne ne trouvait cela surprenant ni dégradant; au contraire, on considérait comme une faute de laisser grandir un enfant dans l’ignorance d’un travail utile. Tous les jeunes, que leurs parents fussent pauvres ou riches, apprenaient un métier. Même s’ils étaient destinés à assurer une charge sacrée, on jugeait essentiel qu’ils connaissent les aspects pratiques de la vie, pour être plus efficaces. Et beaucoup de maîtres subvenaient à leurs propres besoins en travaillant de leurs mains. A l’école comme à la maison, l’enseignement était essentiellement oral; mais les jeunes apprenaient aussi à lire les textes hébreux, et les rouleaux de parchemin de l’Ancien Testament 61
  • 62. étaient à leur disposition. Les principaux sujets d’étude de ces écoles étaient la loi de Dieu, avec l’enseignement dispensé à Moïse, l’histoire sainte, la musique sacrée et la poésie. L’histoire sainte témoignait de l’action de l’Eternel. Les vérités de base, que voulaient révéler les images des cérémonies du sanctuaire, étaient étudiées, et par la foi, on arrivait à saisir l’élément central du système: l’Agneau de Dieu qui ôterait le péché du monde. La plus grande piété régnait. Les élèves n’apprenaient pas seulement qu’ils devaient prier, mais comment prier, comment s’approcher de leur Créateur, lui faire confiance, comprendre les enseignements de son Esprit et y obéir. Du trésor divin surgissaient, par l’intermédiaire de l’intelligence sanctifiée, des choses anciennes et des choses nouvelles, et l’Esprit de Dieu se révélait à travers la prophétie et le chant sacré. Il apparaît que ces écoles étaient un des moyens les plus efficaces pour encourager cette droiture qui “élève une nation” (Proverbes 14:34). Elles contribuèrent très largement à jeter les bases de cette extraordinaire prospérité qui marqua les 62
  • 63. règnes de David et de Salomon. Les principes enseignés dans les écoles de prophètes étaient ceux qui formèrent le caractère de David et dirigèrent sa vie. C’est la parole de Dieu qui l’instruisait. “Par tes statuts, disait-il, je deviens intelligent [...] J’incline mon cœur à pratiquer tes prescriptions.” (Psaumes 119:104-112) C’est pour cela que le Seigneur, lorsqu’il appela David, tout jeune encore, à régner, dit qu’il était “un homme selon [son] cœur” (Actes des Apôtres 13:22). Nous pouvons également admirer, au début de la vie de Salomon, les résultats de la méthode d’éducation divine. Salomon jeune homme fit le même choix que David. Plutôt que de demander à Dieu des richesses terrestres, il préféra lui demander un cœur sage et intelligent. Et le Seigneur lui accorda non seulement ce qu’il désirait, mais aussi ce qu’il ne recherchait pas: la fortune et l’honneur. La puissance de son intelligence, l’étendue de ses connaissances, la gloire de son règne devinrent un sujet d’émerveillement pour le monde. 63
  • 64. Sous les règnes de David et de Salomon, Israël atteignit le sommet de sa grandeur. La promesse faite à Abraham, répétée à Moïse, était tenue: “Si vous observez bien tous ces commandements que je vous donne et si vous les mettez en pratique, pour aimer l’Eternel, votre Dieu, pour marcher dans toutes ses voies et pour vous attacher à lui, l’Eternel dépossédera devant vous toutes ces nations, et vous prendrez possession de nations plus grandes et plus puissantes que vous. Tout lieu que foulera la plante de votre pied sera à vous: votre frontière s’étendra du désert au Liban, et du fleuve de l’Euphrate jusqu’à la mer occidentale. Nul ne tiendra contre vous.” (Deutéronome 11:22- 25) Mais au cœur de l’abondance se tapit le danger. Le péché que David commit dans son âge mûr, quoiqu’il s’en fût sincèrement repenti et qu’il en eût été rigoureusement puni, encouragea le peuple à transgresser les commandements de Dieu. Et la vie de Salomon, passée une aube si prometteuse, fut assombrie par l’apostasie. Le désir d’accroître 64
  • 65. sa puissance politique et sa gloire poussa le roi d’Israël à s’allier aux nations païennes. L’argent de Tarsis, l’or d’Ophir, il les obtint, mais au prix de l’honnêteté, en transgressant les devoirs sacrés. Sa foi fut ébranlée par ses relations avec des idolâtres, ses mariages avec des femmes païennes. C’est ainsi que les barrières dressées par Dieu pour le salut de son peuple furent renversées; Salomon lui-même se livra au culte des idoles. Sur le sommet du mont des Oliviers, face au temple de Jéhovah, se dressèrent d’immenses statues et des autels destinés à rendre hommage aux divinités païennes. En trahissant son allégeance à Dieu, Salomon perdit le contrôle de lui-même. Son discernement s’émoussa. La conscience, la délicatesse qui avaient marqué le début de son règne disparurent. L’orgueil, l’ambition, la prodigalité, la faiblesse, engendrèrent la cruauté et l’exaction. Lui, le souverain juste, compatissant, respectueux de Dieu, devint tyrannique, despotique. Lui qui, lors de la dédicace du temple, avait prié pour que son peuple se donne à Dieu sans partage, le détournait maintenant de Dieu. Salomon se déshonorait, déshonorait Israël, déshonorait Dieu. 65
  • 66. La nation, dont il avait été la fierté, marcha sur ses pas. Plus tard le roi se repentit, mais le mal qu’il avait semé portait ses fruits. La formation que Dieu avait choisie pour les enfants d’Israël devait les amener à être différents, dans leurs modes de vie, des autres peuples. Ces différences, qui auraient dû être ressenties comme un privilège et une bénédiction, leur pesaient lourdement. La simplicité et la retenue indispensables à un développement en profondeur, ils cherchèrent à les remplacer par le luxe et la mollesse des païens. Leur ambition? être comme toutes les nations (1 Samuel 8:5). Le plan d’éducation divin fut repoussé, la souveraineté de Dieu rejetée. C’est ainsi qu’Israël commença sa chute: en rejetant les voies de Dieu, en suivant les voies des hommes. C’est ainsi que se poursuivit son déclin, jusqu’à ce que le peuple juif devînt la proie de ces mêmes nations qu’il avait voulu copier. La nation d’Israël ne sut pas accepter les bienfaits que Dieu souhaitait lui accorder. Elle ne 66
  • 67. comprit pas l’objectif divin, et ne participa nullement à sa réalisation. Mais bien que des individus, des peuples, puissent ainsi s’écarter de lui, Dieu garde, pour ceux qui s’en remettent à lui, la même voie. “Tout ce que Dieu fait dure à toujours.” (Ecclésiaste 3:14). Quoique sa puissance se manifeste, à travers les âges, de différentes façons, à divers degrés, selon les besoins des hommes, l’œuvre de Dieu est la même en tout temps. Le Maître est semblable à lui- même. Son caractère et son plan sont immuables. En lui “il n’y a ni changement, ni ombre de variation” (Jacques 1:17). C’est pour nous, pour notre instruction, que furent enregistrées les expériences d’Israël. “Cela leur est arrivé à titre d’exemple et fut écrit pour nous avertir, nous pour qui la fin des siècles est arrivée.” (1 Corinthiens 10:11) Pour nous, comme pour l’Israël de jadis, la réussite de notre éducation dépend de la fidélité avec laquelle nous suivons le plan du Créateur. Si nous adhérons aux principes de la parole de Dieu, nous recevrons des 67
  • 68. bénédictions aussi grandes qu’auraient pu en recevoir les Hébreux. 68
  • 69. Chapitre 7 Vies d’hommes de Dieu Le fruit du juste est un arbre de vie (Proverbes 11:30). L’histoire sainte nous offre de nombreux exemples de ce qu’engendre une éducation authentique. Elle nous propose pour modèles plusieurs hommes dont le caractère s’est forgé selon la ligne divine; des hommes dont la vie fut une bénédiction pour leur entourage, des hommes qui étaient de véritables représentants de Dieu sur terre. Parmi eux, Joseph et Daniel, puissants hommes d’Etat; Moïse, le plus sage des législateurs; Elisée, un des plus fidèles réformateurs; et Paul, qui, si l’on excepte Celui qui parla comme jamais homme n’a parlé, fut le maître le plus célèbre que le monde ait connu. Au début de leur vie, au moment précis où ils quittaient l’adolescence pour entrer dans l’âge 69
  • 70. adulte, Joseph et Daniel furent arrachés à leur famille, à leur patrie, et emmenés, captifs, vers des terres païennes. Joseph surtout fut soumis à toutes sortes de tentations, de celles qui accompagnent les revers de fortune. Dans la maison de son père, c’était un enfant tendrement aimé; chez Potiphar, il fut esclave, puis confident et ami; ensuite homme d’affaires, instruit par l’étude, la réflexion, le contact avec les hommes; après cela, dans les prisons de Pharaon, injustement condamné, sans espoir de jamais pouvoir se disculper, ni d’être, à plus forte raison, libéré; enfin, appelé, dans un moment de crise aiguë, à la tête de la nation. Qu’est-ce qui lui permit, dans toutes ces circonstances, de garder toute son intégrité? Personne ne peut, sans risque, occuper une position élevée. Comme la tempête laisse intacte la fleur de la vallée et déracine l’arbre au sommet de la montagne, ainsi les tentations féroces n’effleurent même pas les petits de ce monde et accablent ceux qui se tiennent aux premières places, dans le succès et la gloire. Mais Joseph résista à la prospérité comme à l’adversité. Sa 70
  • 71. fidélité fut la même dans le palais des Pharaons que dans sa cellule de prisonnier. Enfant, Joseph avait appris à aimer et à respecter Dieu. Bien souvent, sous la tente paternelle, au creux des nuits syriennes, il avait entendu raconter la vision nocturne de Béthel: celle de l’échelle qui reliait la terre au ciel, des anges qui montaient et descendaient, et de Celui qui, du haut de son trône, s’était révélé à Jacob. Il avait entendu raconter la lutte près du Jabbok, et comment Jacob, renonçant à des fautes qui lui étaient chères, avait été vainqueur et avait reçu le titre de prince de Dieu. Berger paissant les troupeaux de son père, Joseph avait vécu une vie simple et pure, qui avait contribué à son épanouissement physique et mental. S’approchant de Dieu à travers la nature et l’étude des vérités de base que son père lui avait transmises comme un dépôt sacré, il avait acquis un caractère fort et des principes solides. Puis vint l’épreuve; et pendant ce terrible 71
  • 72. voyage qui l’emmenait, loin de son foyer de Canaan, vers l’esclavage qui devait être son lot en Egypte, alors qu’il regardait une dernière fois les collines qui cachaient les tentes sous lesquelles s’abritait sa famille, Joseph se souvint du Dieu de son père. Il se remémora les leçons de son enfance, et il résolut au fond de lui-même de se montrer fidèle—d’agir toujours en parfait sujet du roi des cieux. Etranger et esclave, plongé dans un milieu où régnaient le vice, les tromperies d’un culte païen, culte rendu plus séduisant encore par la richesse, la culture, le luxe royaux, Joseph fut inébranlable. Il avait appris à être fidèle à son devoir. La fidélité, dans quelque situation que ce soit, de la plus humble à la plus glorieuse, prépare au service suprême. Lorsqu’il fut appelé à la cour de Pharaon, l’Egypte était la plus grande des nations. La civilisation, les arts, les sciences y étaient incomparables. Pendant une période d’extrême difficulté, de grand danger, Joseph dut administrer 72
  • 73. les affaires du royaume; et il le fit d’une façon telle qu’il gagna la confiance du roi et du peuple. Pharaon “lui donna la place de seigneur sur sa maison et de maître de tout ce qu’il possédait, pour contraindre à son gré ses ministres, et rendre sages ses anciens” (Psaumes 105:21, 22). Le secret de la vie de Joseph, la parole de Dieu nous le livre. Jacob, lorsqu’il bénit ses enfants, prononça sur son fils bien-aimé ces mots empreints d’une puissance et d’une beauté divines: Joseph est le rejeton d’un arbre fertile, Le rejeton d’un arbre fertile près d’une source; Les branches s’élèvent au-dessus de la muraille. Ils l’ont provoqué, ils ont tiré. Les archers étaient ses adversaires. Mais son arc est demeuré égal à lui-même, Ses mains ont été fortifiées Par les mains du Puissant de Jacob: Il est ainsi devenu le berger, le rocher d’Israël. Par le Dieu de ton père, qui sera ton secours; Avec le Tout-Puissant, qui te bénira, 73
  • 74. Des bénédictions du haut des cieux, Des bénédictions du fond de l’abîme... Les bénédictions de ton père l’emportent Sur les bénédictions de ceux qui m’ont conçu, Jusqu’à l’extrémité des collines étendues; Qu’elles soient sur la tête de Joseph, Sur le sommet de la tête du prince de ses frères! (Genèse 49:22-26) Sa fidélité à Dieu, sa foi en lui, l’Invisible, étaient l’ancre de Joseph. C’était sa force. “Ses mains ont été fortifiées Par les mains du Puissant de Jacob.” Daniel, ambassadeur de Dieu A Babylone, Daniel et ses compagnons furent apparemment plus favorisés par le sort dans leur jeunesse que ne l’avait été Joseph au cours des premières années de sa vie en Egypte; cependant, leurs caractères furent mis à l’épreuve presque aussi rigoureusement. Enlevés à la relative simplicité de leurs maisons de Judée, ces jeunes 74
  • 75. gens de sang royal furent transportés dans une ville splendide, à la cour d’un roi des plus illustres; ils furent choisis et destinés au service du roi. Dans cette cour somptueuse et corrompue, les tentations étaient fortes. Les adorateurs de Jéhovah étaient prisonniers à Babylone; les vases de la maison de Dieu avaient été déposés dans le temple des idoles babyloniennes; le roi d’Israël lui-même était entre les mains des Babyloniens; tout cela, clamaient les vainqueurs, prouvait assez que leur religion et leurs mœurs étaient bien supérieures à celles des Hébreux. C’est dans ces circonstances, au milieu des humiliations qu’Israël s’était attirées en s’écartant des commandements divins, que Dieu administra à Babylone la preuve éclatante de sa toute-puissance, de la sainteté de sa loi, et des résultats de l’obéissance; il fit cette démonstration de la seule manière convenable, par l’intermédiaire de ceux qui lui étaient fidèles. Daniel et ses compagnons, à l’aube de leur carrière, subirent une épreuve décisive. L’ordre de les nourrir avec les mets de la table royale était l’expression de la faveur du roi et de l’intérêt qu’il 75
  • 76. leur portait. Mais une partie de cette nourriture avait été consacrée aux idoles, et si les jeunes gens acceptaient la faveur royale, on considérerait qu’ils se joignaient au culte rendu aux faux dieux. Leur fidélité à Jéhovah le leur interdisait. Ils ne s’aventurèrent pas plus à exposer leur épanouissement physique, intellectuel et spirituel aux effets débilitants du luxe et de la débauche. Daniel et ses compagnons avaient été fidèlement instruits dans les principes de la parole divine. Ils avaient appris à faire passer les besoins spirituels avant les besoins terrestres, à rechercher le bien authentique. Ils en reçurent la récompense. Leurs habitudes de tempérance, le sentiment qu’ils avaient d’être des représentants de Dieu, les aidèrent à développer au mieux les ressources de leur corps, de leur intelligence, de leur âme. Lorsque, au bout des années de formation, les candidats subirent l’examen final qui leur permettait d’accéder aux places d’honneur de l’Etat, “il ne s’en trouva aucun comme Daniel, Hanania, Michaël et Azaria” (Daniel 1:19). 76
  • 77. La cour de Babylone réunissait des représentants de tous les pays, des hommes aux talents exceptionnels, aux qualités nombreuses, dotés d’une immense culture. Cependant aucun d’eux n’égalait les prisonniers hébreux. Ceux-ci, que ce fût sur le plan de la force et de la beauté, sur celui de la vigueur intellectuelle et des connaissances littéraires, étaient incomparables. “Sur tous les sujets qui réclamaient de la sagesse et de l’intelligence, et sur lesquels le roi les interrogeait il les trouvait dix fois supérieurs à tous les magiciens et astrologues qui étaient dans tout son royaume.” (Daniel 1:20) D’une fidélité à Dieu que rien n’ébranlait, d’une maîtrise de soi sans faille, Daniel, par sa dignité et par la considération qu’il témoignait aux autres, gagna très vite “la faveur et la grâce” de l’officier païen auquel il fut confié. Et il garda toujours ces qualités. Rapidement, il devint premier ministre. Plusieurs rois se succédèrent, l’empire s’effondra, un royaume rival s’établit; sa sagesse, sa perspicacité, sa délicatesse, sa courtoisie, sa bonté naturelle, jointes au respect qu’il avait de ses 77
  • 78. principes, étaient telles que ses ennemis eux- mêmes étaient contraints de reconnaître qu’ils ne pouvaient “trouver aucune occasion (de l’accuser), ni aucune erreur, parce qu’il était fidèle” (Daniel 6:5). Daniel était si bien attaché à Dieu de toute la force de sa confiance que le don de l’Esprit lui fut accordé. Les hommes l’honoraient en lui confiant les responsabilités et les secrets du royaume, et Dieu l’honorait en faisant de lui son ambassadeur et en lui dévoilant les mystères de l’avenir. Les rois païens, au contact de ce représentant du ciel, durent confesser le Dieu de Daniel. “En vérité, déclara Nebucadnetsar, votre Dieu est le Dieu des dieux et le Seigneur des rois, et il révèle les mystères.” (Daniel 2:47) Et Darius, lorsqu’il fit sa proclamation “à tous les peuples, aux nations, aux hommes de toutes langues qui habitaient sur toute la terre”, exalta “le Dieu de Daniel”: Car il est le Dieu vivant Et il subsiste à jamais! Son royaume ne sera jamais détruit... 78
  • 79. C’est lui qui sauve et délivre, Qui opère des signes et des prodiges Dans les cieux et sur la terre. (Daniel 6:27, 28) Des hommes loyaux et intègres Par leur sagesse et leur justice, par la pureté et la générosité dont témoignait leur vie quotidienne, par leur dévouement aux intérêts d’un peuple qui, lui, était idolâtre, Joseph et Daniel se montrèrent fidèles aux principes éducatifs de leur enfance, fidèles à celui qu’ils représentaient. L’un comme l’autre, en Egypte ou à Babylone, furent honorés par la nation qu’ils servaient; à travers eux, un peuple païen et du même coup tous les peuples qui étaient en contact avec lui purent apprécier la bonté et la bienveillance de Dieu, l’amour du Christ. Quel destin que celui de ces nobles Hébreux! Lorsqu’ils quittèrent le pays de leur enfance, ils n’imaginaient certes pas le sort qui serait le leur. Mais, fidèles et résolus, ils s’en remirent à Dieu pour qu’il les dirige et atteigne, à travers eux, son 79
  • 80. but. Or Dieu désire que les formidables vérités qui furent révélées à travers ces deux hommes soient également révélées à travers la jeunesse et les enfants d’aujourd’hui. L’histoire de Joseph et de Daniel nous offre un exemple de ce qu’il veut faire pour ceux qui mettent en lui leur confiance et cherchent de tout leur cœur à accomplir sa volonté. Ce dont le monde a le plus besoin, c’est d’hommes, non pas des hommes qu’on achète et qui se vendent, mais d’hommes profondément loyaux et intègres, des hommes qui ne craignent pas d’appeler le péché par son nom, des hommes dont la conscience soit aussi fidèle à son devoir que la boussole l’est au pôle, des hommes qui défendraient la justice et la vérité même si l’univers s’écroulait. Ce n’est pas le hasard qui forge le caractère de tels hommes; ce n’est pas non plus une grâce particulière, des dons spéciaux accordés par la Providence. Un noble caractère est le fruit d’une 80
  • 81. discipline personnelle, de la soumission de la nature inférieure à la nature supérieure—c’est le moi qui se donne tout entier au service de l’amour de Dieu et des hommes. Les jeunes doivent se pénétrer de l’idée que leurs talents ne sont pas leur propriété. Force, temps, intelligence sont des trésors qui leur ont été confiés. Ils appartiennent à Dieu, et chaque jeune devrait décider d’en user de son mieux. Chacun est une branche dont Dieu espère qu’elle portera des fruits; un administrateur dont le capital doit augmenter; une lumière pour éclairer la nuit du monde. Chaque jeune, chaque enfant, a une œuvre à accomplir pour l’honneur de Dieu, et pour ennoblir l’humanité. Elisée, le serviteur fidèle dans les petites choses Les années de jeunesse du prophète Elisée se déroulèrent dans le calme de la campagne, sous la direction de Dieu et de la nature, dans la discipline 81
  • 82. d’un travail utile. Dans un temps d’apostasie presque universelle, la maison de son père était de celles qui n’avaient pas fléchi le genou devant Baal. Dans cette maison, Dieu était honoré, et la fidélité au devoir était une règle de vie quotidienne. Fils d’un riche fermier, Elisée prit part aux activités de son père. Il avait des aptitudes de meneur d’hommes, mais il apprit cependant à s’acquitter des tâches les plus ordinaires. Pour diriger avec sagesse, il devait d’abord savoir obéir. C’est en étant fidèle dans les petites choses qu’il se préparait à des responsabilités plus grandes. Aimable et doux, Elisée n’en était pas moins énergique et ferme. Il aimait et respectait Dieu, et dans l’humble routine du labeur quotidien, il aiguisait sa volonté, affinait la noblesse de son caractère, en grandissant dans la grâce et la connaissance divines. En travaillant avec son père aux tâches domestiques, il apprenait à travailler avec Dieu. L’appel prophétique lui fut adressé alors qu’il 82
  • 83. labourait un champ avec les serviteurs de son père. Lorsque Elie, cherchant, sous l’inspiration divine, un successeur, jeta son manteau sur les épaules d’Elisée, le jeune homme comprit cet appel et y répondit. Il “suivit Elie, et fut à son service” (1 Rois 19:21). Au début, le travail requis n’était pas exaltant: des tâches toutes banales encore attendaient Elisée. Il nous est dit qu’il versait de l’eau sur les mains d’Elie, son maître. Serviteur attaché à la personne du prophète, il continuait à être fidèle dans les petites choses et, avec une résolution chaque jour plus grande, se consacrait à la mission que Dieu lui avait confiée. Dès le début de son appel, sa décision avait été mise à l’épreuve. Comme il s’apprêtait à suivre Elie, le prophète lui avait ordonné de retourner chez lui. Elisée devait calculer la dépense— accepterait-il ou repousserait-il l’appel? Mais il comprit combien cette occasion était précieuse. Pour rien au monde il n’aurait renoncé à devenir un messager de Dieu, ni n’aurait négligé ce qu’il considérait comme un privilège: travailler avec un serviteur du Seigneur. 83
  • 84. Le temps passa; l’enlèvement d’Elie était proche; Elisée, lui, était prêt à succéder au prophète. Et à nouveau, sa foi et sa détermination furent éprouvées. Il accompagnait Elie dans ses visites, tout en sachant ce qui devait bientôt se produire; à chaque instant, son maître l’invitait à le quitter: “Tu vas rester ici, car l’Eternel m’envoie jusqu’à Béthel”. Mais en guidant la charrue, Elisée avait appris à ne pas abandonner, à ne pas se décourager, et maintenant qu’il s’était engagé dans d’autres responsabilités, il ne s’en détournerait pas. Chaque fois qu’Elie lui proposait de le quitter, il répondait: “L’Eternel est vivant et ton âme est vivante! je ne t’abandonnerai pas.” (2 Rois 2:2) “Ils poursuivirent tous deux leur chemin. [...] eux deux s’arrêtèrent au bord du Jourdain. Alors Elie prit son manteau, le roula et en frappa les eaux, qui se partagèrent çà et là, et ils passèrent tous deux à sec. Lorsqu’ils eurent passé, Elie dit à Elisée: Demande ce que tu veux que je fasse pour toi, avant que je sois enlevé d’avec toi. Elisée répondit: Qu’il y ait sur moi, je te prie, une double 84
  • 85. part de ton esprit! Elie dit: Tu me demandes une chose difficile. Mais si tu me vois pendant que je serai enlevé d’auprès de toi, cela t’arrivera ainsi; sinon, cela n’arrivera pas. ” Comme ils continuaient à marcher en parlant, voici qu’un char de feu et que des chevaux de feu les séparèrent l’un de l’autre. Alors Elie monta au ciel dans un tourbillon. Elisée regardait et criait: Mon père! Mon père! Char d’Israël et sa cavalerie! Puis il ne le vit plus. Saisissant alors ses vêtements, il les déchira en deux morceaux et ramassa le manteau qu’Elie avait laissé tomber. Puis il retourna et s’arrêta au bord du Jourdain; il prit le manteau qu’Elie avait laissé tomber, il en frappa les eaux et dit: Où est l’Eternel, le Dieu d’Elie? Lui aussi, il frappa les eaux qui se partagèrent çà et là. Elisée passa. ” Les fils des prophètes qui étaient vis-à-vis à Jéricho le virent et dirent: L’esprit d’Elie repose sur Elisée! Ils allèrent à sa rencontre et se prosternèrent contre terre devant lui.” (2 Rois 2:6- 15) 85
  • 86. Désormais Elisée remplaçait Elie. Celui qui avait été fidèle dans les moindres choses se montra fidèle aussi dans les grandes. Elie, l’homme puissant, avait été entre les mains de Dieu un instrument pour abattre des maux immenses. L’idolâtrie à laquelle le peuple avait succombé, entraîné par Achab et la reine païenne Jézabel, avait été renversée. Les prophètes de Baal avaient été tués.Le peuple d’Israël tout entier avait été bouleversé et beaucoup recommençaient à adorer Dieu. Il fallait que le successeur d’Elie soit un homme patient et prudent, pour mener Israël dans des chemins sûrs. C’est à cela que s’était préparé Elisée, en confiant à Dieu sa propre éducation. Cette leçon est pour chacun de nous. Personne ne peut savoir quel est le dessein de Dieu lorsqu’il nous propose une discipline; mais tous nous pouvons être sûrs que la fidélité dans les petites choses démontre l’aptitude à assumer de plus grandes responsabilités. Chaque action de notre vie 86
  • 87. révèle notre caractère et seul celui qui se montre dans les petites tâches “un ouvrier qui n’a pas à rougir” (2 Timothée 2:15) se verra confier par Dieu l’honneur de plus hautes charges. Moïse ou la puissance de la foi Moïse était plus jeune que Joseph et Daniel lorsqu’il fut soustrait à la protection attentive de son foyer; et pourtant les forces qui avaient façonné leurs vies avaient déjà marqué la sienne de leur empreinte. Il ne passa que douze ans dans sa famille juive; mais pendant ces années furent solidement posées les bases de sa grandeur, et c’est quelqu’un que nous connaissons à peine qui y contribua. Yokébed était une femme, une esclave. Sa condition était humble, son fardeau, lourd. Mais jamais le monde ne reçut de plus grande bénédiction à travers une femme qu’à travers elle, si l’on excepte Marie de Nazareth. Sachant que son fils serait bientôt enlevé à ses soins, remis à des gens ignorants de Dieu, elle chercha avec d’autant 87
  • 88. plus de ferveur à attacher son âme au Seigneur. Elle s’efforça d’enraciner dans son cœur l’amour de Dieu et la fidélité à son service. Elle y travailla fidèlement: par la suite, aucune influence ne put entraîner Moïse à renier les principes de vérité que sa mère lui avait enseignés de toutes ses forces, par sa vie même. Le fils de Yokébed quitta l’humble demeure de Gosen pour entrer dans le palais des pharaons, où la fille du roi l’accueillit comme un enfant bien- aimé. Dans les écoles d’Egypte, Moïse reçut l’instruction civile et militaire la meilleure possible. Très attachant, imposant, cultivé, d’allure princière, chef militaire renommé, il devint la fierté de la nation. Le roi d’Egypte était également prêtre; et Moïse, qui refusait de participer au culte païen, était néanmoins initié à tous les mystères de la religion égyptienne. A cette époque l’Egypte était toujours la nation la plus puissante, et sa civilisation était des plus raffinées; Moïse, héritier présomptif du trône, devait recevoir les honneurs les plus grands du monde. Mais il y avait pour lui une voie plus noble. Pour l’honneur de Dieu et la 88
  • 89. délivrance de son peuple opprimé, Moïse sacrifia les honneurs de l’Egypte. Alors, d’une façon toute particulière, Dieu entreprit de le former. Car Moïse n’était pas prêt encore pour la tâche qui lui incombait. Il devait apprendre à dépendre de Dieu. Il avait mal compris l’intention divine, et espérait délivrer Israël par la force. Pour y parvenir, il risqua tout, et échoua. Vaincu, déçu, il s’enfuit et s’exila en terre étrangère. Dans les déserts de Madian, Moïse passa quarante années à garder les moutons. En apparence, sa mission était remise à tout jamais; en fait, il se préparait à l’accomplir. C’est dans la maîtrise de soi qu’il trouverait la sagesse nécessaire pour diriger une foule ignorante et indisciplinée. En gardant les moutons et les jeunes agneaux, il devait acquérir l’expérience qui ferait de lui le berger fidèle et patient d’Israël. Pour représenter Dieu, il devait se mettre à son école. En Egypte, il avait été soumis à toutes sortes d’influences—l’affection de sa mère adoptive, sa 89
  • 90. propre position de petit-fils du roi, le luxe et le vice aux mille attraits, une religion idolâtre, mais d’un mysticisme raffiné et subtil—qui avaient marqué son esprit et son caractère. Mais dans le dépouillement du désert, tout s’effaça. Dans la solitude des montagnes majestueuses, Moïse était seul devant Dieu. Partout s’inscrivait le nom du Créateur. Moïse sentait qu’il était en sa présence, à l’ombre de sa toute-puissance. Là, il ne pouvait plus avoir l’illusion de se suffire à lui- même. En présence de l’être infini, il mesurait combien l’homme est faible, impuissant, aveugle. C’est là qu’il prit conscience de la réalité de la présence divine, une conscience qui ne le quitta pas, de toute sa longue vie épuisante et lourde de responsabilités. Non seulement il entrevit, dans le lointain, le Christ fait chair, mais il le vit accompagnant les armées d’Israël dans tous leurs voyages. Ainsi, même incompris et diffamé, accablé de reproches et d’insultes, face au danger et à la mort, “il tint ferme, comme voyant celui qui est invisible” (Hébreux 11:27). 90
  • 91. Moïse faisait plus que penser à Dieu: il le voyait. Il avait sans cesse devant lui la vision de Dieu, il gardait toujours les yeux sur sa face. La foi de Moïse n’était pas incertaine; elle se fortifiait de chaque réalité. Il croyait, il reconnaissait que Dieu dirigeait sa vie personnelle, dans les moindres détails. Pour avoir la force de résister à la tentation, il se confiait à lui. Il voulait accomplir de son mieux la tâche qui lui avait été attribuée, et il se mettait entièrement sous la dépendance de Dieu. Il sentait qu’il avait besoin de l’aide divine, la demandait, la saisissait par la foi, et, assuré de recevoir une force de vie, allait de l’avant. C’est ainsi que grandit l’expérience de Moïse, pendant ces quarante années passées au désert. La sagesse infinie ne jugea pas ces années trop longues ni le prix d’un tel enrichissement trop élevé. 91
  • 92. Les enseignements, l’éducation donnés là influencèrent non seulement l’histoire d’Israël, mais tout ce qui a, depuis ce jour, contribué au progrès de l’humanité. Le plus grand éloge décerné à Moïse est ce témoignage de l’Esprit: “Il ne s’est plus levé en Israël de prophète comme Moïse, que l’Eternel connaissait face à face.” (Deutéronome 34:10) Paul ou le service dans la joie À la foi et à l’expérience des disciples de Galilée qui avaient suivi Jésus s’ajoutèrent, pour annoncer l’Evangile, l’énergie ardente et la puissante intelligence d’un rabbin de Jérusalem. Citoyen romain, né dans une ville païenne; juif non seulement par son origine, mais par toute son éducation, par l’amour qu’il portait à sa patrie, par sa foi religieuse; élève des plus éminents rabbins à Jérusalem, instruit dans la tradition et les lois de ses pères, Paul de Tarse partageait au plus haut degré l’orgueil et les préjugés de sa nation. Jeune encore, il devint un membre estimé du sanhédrin. On voyait en lui un homme plein d’avenir, 92
  • 93. défenseur zélé de la foi des anciens. Dans les écoles de théologie de Judée, la parole de Dieu avait été délaissée au profit des spéculations humaines; les interprétations et les traditions rabbiniques l’avaient dépouillée de sa force. Le désir de puissance, de domination, un attachement jaloux à certains privilèges, le fanatisme et un orgueil méprisant servaient aux maîtres de règles. Les rabbins se glorifiaient de leur supériorité personnelle, non seulement sur les autres peuples, mais encore sur la foule de leurs concitoyens. Ils haïssaient farouchement leurs oppresseurs romains et caressaient l’espoir que leur nation recouvrerait par les armes son indépendance. Aussi détestaient- ils et mettaient-ils à mort les disciples de Jésus, dont le message de paix s’opposait aux projets nés de leur ambition. Paul était un de leurs représentants les plus acharnés et les plus impitoyables. Dans les écoles militaires d’Egypte, Moïse 93
  • 94. avait appris à suivre la loi de la force, et cette loi avait eu une telle emprise sur lui qu’il lui fallut quarante années de silence et de communion avec Dieu et la nature pour se préparer à diriger Israël selon une règle d’amour. Paul devait apprendre la même leçon. Aux portes de Damas, la vision de Jésus crucifié bouleversa sa vie. Le persécuteur devint disciple, le maître devint élève. Les jours de ténèbres et de solitude passés à Damas pesèrent comme des années d’expérience. Sous la direction du Christ, Paul étudia l’Ancien Testament, qu’il gardait précieusement en mémoire. A lui aussi la solitude au sein de la nature servit d’école. Il partit pour le désert d’Arabie et là, s’adonna à l’étude des Ecritures, s’instruisit auprès de Dieu. Il vida son âme de tous les préjugés, de toutes les traditions qui avaient façonné sa vie, pour la remplir à la source de vérité. Dès lors, sa vie fut guidée par le seul principe du don de soi, par le ministère de l’amour. “Je me dois, disait-il, aux Grecs et aux Barbares, aux 94
  • 95. savants et aux ignorants.” “L’amour du Christ nous étreint.” (Romains 1:14; 2 Corinthiens 5:14) Paul, le plus grand des maîtres de cette terre, assuma les tâches humbles aussi bien que les responsabilités élevées. Il reconnaissait l’utilité du travail des mains comme du travail de l’esprit, et il vivait lui-même du produit de son artisanat. Prêchant chaque jour dans les grandes villes, il continuait d’exercer son métier de faiseur de tentes. “Ces mains, dit-il en quittant les anciens d’Ephèse, ont pourvu à mes besoins et à ceux de mes compagnons.” (Actes des Apôtres 20:34) Il possédait de grandes qualités intellectuelles et sa vie témoigne d’une sagesse rare. Des principes de première importance, que les plus grands esprits de son époque ignoraient, sont proclamés dans son enseignement et illustrés par sa vie. Il avait cette extrême sagesse qui affine la perspicacité, ouvre le cœur, met l’homme en contact avec d’autres hommes et lui permet d’éveiller ce qu’il y a en eux de meilleur et de les inciter à vivre noblement. 95
  • 96. Ecoutez ce qu’il dit aux païens de Lystre, lorsqu’il veut les tourner vers Dieu tel qu’il se révèle dans la nature, Dieu source de tout bien, qui donne “du ciel les pluies et les saisons fertiles, en [nous] comblant de nourriture et de bonheur dans le cœur” (Actes des Apôtres 14:17). Voyez-le dans la prison de Philippes: de son corps douloureux s’élève, dans le silence de la nuit, un chant de louange. Le tremblement de terre ouvre les portes de la prison, et la voix de Paul retentit de nouveau, pour réconforter le geôlier païen: “Ne te fais aucun mal, nous sommes tous ici.” (Actes des Apôtres 16:28) Chaque prisonnier est là en effet, retenu par la présence d’un seul compagnon de peine. Et le geôlier, convaincu de la valeur de cette foi qui soutient Paul, demande où est le chemin du salut et, avec toute sa famille, se joint à la troupe persécutée des disciples du Christ. Voyez Paul à Athènes devant l’Aréopage, répondant à la science par la science, à la logique par la logique, à la philosophie par la philosophie. 96