Présentation des différents types d'arthrodèse de la colonne vertébrale lombaire, les indications thérapeutiques, les principes techniques, la balance bénéfices/risques
2. Définition d’une arthrodèse
intervertébrale
• Arthrodèse : blocage dèse du mouvement d’une
articulation arthro
• En chirurgie du rachis, blocage entre au moins 2
vertèbres
• Historiquement :
– Albee FH (1911) Transplantation of a portion of the
tibia into the spine for Pott’s disease. Apreliminary
report. JAMA 57:885–886
– Hibbs R (1911) An operation for progressive spinal
deformities. N Y Med J 93:1013–1016
3. E
F ID IG
RD&G
Les mouvements se créent entre les vertèbres, au sein de chaque unité
fonctionnelle ou segment mobile rachidien, autour des centres instantanés de
rotation
Ces mouvements sont souvent composés (ex : une inclinaison latérale nécessite une
rotation homolatérale)
Plan sagittal
flexion/extension
Plan frontal
inclinaisons Dte/G
Plan axial
rotation Dte/G
Les mouvements fondamentaux d’un segment mobile rachidien
4. La greffe osseuse
• Un challenge : créer de l’os là où il n’y en a
normalement pas
• Via la mise en place de fragments osseux ou
d’un substitut entre 2 vertèbres
• Historiquement, sans instrumentation (taux
de pseudarthrose élevé)
• Instrumentée : mise en place de matériel de
fixation en pont entre deux vertèbres
5. Instrumentation
(ex : vis pédiculaires et tiges)
Greffe osseuse
intervertébrale
Stabilisation primaire
Stabilisation secondaire
Facilite la prise de greffe osseuse
Diminue les contraintes sur le matériel
Synergie entre greffe osseuse et instrumentation
8. Aspect radiographique
Contrôle 1.5 ans PTLIF L4-L5 (spondylolisthésis dégénératif)
Contrôle 6 mois ALIF en stand alone
(lombalgie discogénique)
Hyperdensité moulée contre les plateaux vertébraux
9. • Os autologue : os spongieux du patient,
ostéopromoteur et matrice
ostéoconductive
• Os hétérologue : os spongieux sec (ex :
prélevé lors de PTH) ostéoconducteur
• Substitut osseux :
– Ostéoconducteur : souvent un matériau
céramique (frittage de minéraux non
métalliques ex : hydroxyapatite et
phosphate tricalcique) ou sous forme de
pâte
– Ostéoinducteur : BMP
Os spongieux ou subtistut
10. Pourquoi bloquer des vertèbres?
Indications mécaniques à réaliser une
arthrodèse
• Réduire une déformation : sagittale, frontale ou
les deux
• Stabiliser une instabilité pré-opératoire évidente
• Stabiliser une instabilité pré-opératoire discutable
mais majorée par un geste de recalibrage
volontairement large (arthrectomie)
• Bloquer une articulation douloureuse
11. Réduire une déformation : sagittale, frontale ou les deux
Scoliose lombaire dégénérative, patient antérieurement opéré (recalibrages), dans le
plan frontal disclocations fermées vers la gauche L5-S1 et L4-L5 et ouverte vers la
gauche L3-L4
12. Stabiliser une instabilité pré-opératoire évidente
Contre-indication à une ALIF L5-S1,
temps postérieur unique
d’arthrodèse L4-S1
circonférentielle
13. Arthrodèse L5-S1 en 2
temps, antérieur puis
postérieur pour stabilisation
d’un spondylolisthésis L5-S1
sur lyse isthmique bilatérale
de L5
14. Stabiliser une instabilité pré-opératoire discutable mais majorée par un geste de
recalibrage volontairement large (arthrectomie)
Kyste arthrosynovial calcifié
L4-L5 droit contre un massif
articulaire très remanié :
-TDM : apophysomégalie
-IRM : disparition du
cartilage articulaire,
épanchement
16. La recherche de la lordose
• Pourquoi : tenir compte de l’équilibre sagittal
de la colonne vertébrale
• Comment « (re)lordoser » :
– Positionnement per-opératoire du patient
– Libération postérieure/discale
– Instrumentation : vis, tiges, cages intersomatiques
– Ostéotomies : arthrectomies, transpédiculaires si
cyphose fixée
– Abord antérieur pour L5-S1
17. L’équilibre sagittal Les courbures rachidiennes sont imposées
par la morphologie pelvienne et dans une
certaine mesure crânio-cervicale
Le Singe a un bassin horizontal et propulseur.
L’Homme a un bassin vertical et porteur.
Chez l’Homme : le trou occipital
avance de même que l’articulation
C0-C1 pour assurer le maintien du
regard à l’horizontale et l’alignement
du cordon médullaire ; son
orientation sagittale est horizontale
et de 45° chez le Singe.
18. Si un Singe se met debout, il sollicite une importante rétroversion du bassin
(verticalisation) et un important flessum de genou pour tenter de garder « le dos
droit ».
Le centre de gravité
passe par le polygone
de sustentation : le
Singe de tombe pas.
Sa colonne vertébrale
n’est pas dans une
situation d’équilibre :
travail musculaire
important.
19. Plus le Singe va se verticaliser, plus les segments [rachis lombaire droit] – [médiatrice
du plateau sacré] – [fémurs] vont être alignés, plus le travail musculaire sera
important mais plus grand sera son risque de chute (alignement précaire des
segments et dépassement du polygone de sustentation).
20. Plus le Singe va se verticaliser, plus les segments [rachis lombaire droit] – [médiatrice
du plateau sacré] – [fémurs] vont être alignés, plus le travail musculaire sera
important mais plus grand sera son risque de chute (alignement précaire des
segments et dépassement du polygone de sustentation).
45°
Et le Singe aura du mal à
regarder devant lui du fait
de l’orientation du trou
occipital, une antéflexion
de la tête entraînerait une
plicature du cordon
médullaire
21. L’Homme debout a un bassin « ouvert » grâce par une incidence pelvienne plus élevée.
Ceci lui permet d’avoir spontanément une antéversion du bassin vers l’avant avec une
lordose lombaire compensatrice.
IP
IP
22. A moins d’avoir la vertèbre sus-
jacente à la lordose lombaire
(souvent T12) cunéiforme, la colonne
vertébrale droite jusqu’au crâne
aboutirait à une position du regard
peu efficace pour la déambulation
25. Partir du bassin pour expliquer les courbures rachidiennes est une démonstration,
on peut aussi partir de la charnière crânio-vertébrale.
Suivant ce raisonnement, l’importance de l’incidence pelvienne impose une
courbure lombaire et donc une cyphose thoracique et donc une lordose cervicale,
le but étant
d’avoir une colonne vertébrale équilibrée
avec peu ou pas de mécanismes de compensation,
26. Les courbures rachidiennes permettent à l’Homme de se tenir debout et de
marcher
La déformation de la colonne vertébrale ainsi que l’énergie dissipée en chaleur,
essentiellement par les disques, permet d’amortir les chocs lors de la locomotion
De plus, pour une même colonne avec les
mêmes propriétés mécaniques, sans ou
avec courbures : pour une même charge
appliquée au sommet, la colonne avec
courbures se déforme 150 fois plus
27. Les paramètres pelviens
Incidence pelvienne : fixe
Pelvic Incidence PI
Version pelvienne
Pelvic Tilt PT
Pente sacrée
Sacral Slope SS
PSVPIP
28. Corrélation statistique entre les paramètres pelviens et les courbures rachidiennes
Diagramme de Mme DUVAL-BEAUPERE
Le rôle de chef d’orchestre de l’IP se
retrouve dans des échantillons de
patients asymtpomatiques
29. Type 1 et 2 : faible incidence
pelvienne
1> apex bas en L5
2> apex plus haut en L3
Type 3 : IP env 45°
Type 4 : hyperlordose
Ce constat a amené à classer les profils de dos en 4 types (ROUSSOULY)
31. La lecture des clichés
téléradiographiques chez ce patient
montrent un rachis en situation
d’équilibre mais avec un manque de
lordose lombaire théorique – mesurée
à 12°.
Il a donc des mécanismes de
compensation : rétroversion du bassin.
A posteriori, le fait de relordoser le
niveau L5-S1 a montré que la
compensation se faisait aussi dans le
disque L4-L5 (sursollicité),
l’arthrodèse L4-L5 peut participer à le
protéger.
32. Combien de niveaux arthrodéser?
• Le ou les plus responsables de la
symptomatologie douloureuse
– radiculaire
– lombaire
• Mais pas forcément tous…
– intérêt à laisser le plus longtemps le plus de niveaux
mobiles
– les bras de leviers sur les niveaux adjacents
augmentent avec le nombre de niveaux arthrodésés
– descendre sur le sacrum
• peut justifier un temps antérieur pour L5-S1
• peut nécessiter de réaliser une fixation S1-S2 ou S1-iliaque si
l’extrémité supérieure du montage est au-dessus de L4
33. Instrumentation
• Vis : pédiculaires, rarement facettaires
• Tiges : une de chaque côté, parfois 2 paires
(rare)
• Cages : une ou deux entre les plateaux
vertébraux
34. A
P
Antérieure seule : arthrodèse intersomatique
(PLIF ou TLIF vs ALIF/OLIF/XLIF possiblement en « stand alone »)
Postérieure seule : arthrodèse postérolatérale par vis pédiculaires et tiges
A + P : arthrodèse circonférentielle
Différents types d’instrumentation
36. D : Rce à l’arrachement et influence de D/d
d : Rce fracture de fatigue
Pas : peut être doublé au contact pédiculaire
pour augmenter le couple d’insertion
Les implants Vis pédiculaires
Matériau fréquemment utilisé = Titane
➢ Biocompatible : résiste aux fluides organiques +
enzymes
➢ Rce mécanique
➢ Avec élasticité plus proche du module de Young de l’os
que l’acier inox par exemple > favorise dans une
certaine mesure le remodelage osseux pour éviter la
création d’une cavité de résorption autour de la vis
(stress shielding, ex ci-contre pédicule droit)
38. Les implants
bouchon
tige
Montage en cadre = 2 vis par vertèbres et 2 tiges postérieures souvent en
Titane ; la résistance de la tige à la déformation dépend du matériau et du
diamètre
Solidarisation de la tige
dans la tête de vis (vis tulipe)
vis
Solidarisation tige + vis polyaxiale
39. Le complexe vis + tiges doit
être suffisamment rigide
pour stabiliser le segment
mobile rachidien arthrodésé
mais suffisamment élastique,
dans une certaine mesure,
pour assurer la stimulation
osseuse, son remodelage et
la constitution de la greffe
(application de loi de Wolff)
40. Vis pédiculaire
polyaxiale
la tête de vis
dispose de degrés
d’angulation
Vis pédiculaire
monoaxiale
Les implants
L’utilisation supplémentaire de cages intersomatiques, en
coin entre les corps vertébraux, va faciliter la restitution
de la lordose, surtout avec l’utilisation de vis polyaxiales
Effet du type de vis sur la restitution de la lordose
41. Les vis monoaxiales sont très utiles en traumatologie pour la réduction des
fractures
En pathologie dégénérative, l’os recevant les vis pédiculaire peut être plus fragile
et donc expose à plus de risques d’arrachement des vis sur une restitution de la
lordose qui ne reposerait que sur celles-ci
Pr Y.P. CHARLES, Pr J.P. STEIB
42. Les forces de compression passent
par le complexe disque-corps
vertébral pour 80% et les
zygapophyses pour 20%
L’utilisation de cages
intersomatiques crée une console
antérieure et diminue les
contraintes sur les vis et tiges,
évite leur débricolage et donc
favorise le maintien de la lordose
restituée en per-opératoire
Donc 1°) peu de réduction avec les vis polyaxiales seules + 2°) contraintes
antérieures fortes sur la colonne vertébrale > intérêts mécaniques à la mise en
place de cages d’arthrodèse intersomatiques
43. Les implants Mise en place des vis pédiculaires selon la
technique free hand
45. Les implants Cages intersomatiques ; leur design dépend de la voie d’abord par
laquelle elles sont positionnées. Le matériau fréquemment utilisé : PEEK
(polyétheréthercétone) ou Titane
Principe :
- un pourtour qui prend appui contre les plateaux vertébraux (la cage permet de
restaurer de la hauteur intersomatique et généralement de la lordose, de la
maintenir et diminue les contraintes sur le matériel postérieur vis + tiges)
- Une partie centrale creuse qui reçoit les fragments d’os spongieux qui viendront en
contact avec les plateaux vertébraux pour créer une greffe
Cage insérée par voie postérieure Cage insérée par voie antérieure avec
système d’ancrage
50. Intérêt de l’angio-TDM abdomino-pelvienne pré-opératoire pour
visualiser l’anatomie artério-veineuse
Fenêtre vasculaire artérielle
Fenêtre vasculaire veineuse
51. Consignes mécaniques post-
opératoires
• Restrictions pour favoriser le repos du rachis et
permettre la prise de greffe (les sollicitations mécaniques
seront toujours suffisantes pour assurer la loi de Wolff) :
– Antéflexion du tronc
– Rotation axiale du rachis
– Port de charges et surtout bras tendus
– Les trajets en voiture
• Favoriser :
– La marche
– L’économie du dos pour protéger les niveaux
adjacents
52. Les règles d’hygiène lombaire
Limiter la position assise post-opératoire
Plier les jambes et non le dos
54. Syndrome du niveau adjacent :
déstabilisation
Pseudarthrose
des vis pédiculaires et/ou cages
55. Patiente opérée il y a plusieurs années d’une arthrodèse
avec manifestement une laminectomie
Syndrome adjacent à une arthrodèse L4-L5, cyphose chez
une patiente ayant une grande IP
56. Temps antérieur premier (OLIF)
centré sur L3-L4
Puis temps postérieur (vis,
crochets de rappel en L2 et
tiges)
La récupération de la lordose sur L3-L4 chez ce patient ne justifie pas
forcément la réalisation d’une ostéotomie de L4 lors du temps postérieur
Stratégie chirurgicale réalisée
59. Conflit postérieur de hanche avec rétroversion
pelvienne chez un porteur de PTH
https://www.maitrise-orthopedique.com/articles/peut-on-ne-pas-greffer-les-
instrumentations-rachidiennes-en-pathologie-lombaire-degenerative-509
60. Conclusion
• L’arthrodèse n’est pas une finalité en soi mais une solution
dont les avantages et inconvénients doivent être évalués
• La colonne vertébrale un organe central, « pilier »
mécaniquement sollicité en permanence
• D’où la nécessité d’économiser les niveaux adjacents