Fiscalité du patrimoine - apport-cession : le "sursis" prend fin
1. PATRIMOINE
–
FISCALITÉ
Guillaume
ALLEGRE
–
Magistère
Droit,
Fiscalité,
Comptabilité.
28
mars
2013
L’APPORT-‐CESSION
:
LE
«
SURSIS
»
PREND
FINALEMENT
FIN…
2. Période
de
crise
oblige,
l’Etat
prend
l’argent
là
où
il
est
et
par
souci
de
justice
sociale,
taxe
davantage
les
contribuables
aisés
que
les
épargnants
modestes.
Il
est
des
contribuables
qui,
à
la
tête
d’une
importante
entreprise
familiale
exploitée
sous
forme
sociétaire,
pouvaient
jusqu’à
présent
optimiser
la
transmission
de
celle-‐ci
dans
le
cadre
de
montages
plus
ou
moins
complexes
mais
dont
certains
se
révélaient
très
avantageux.
L’un
de
ces
montages
est
l’apport-‐cession.
L'opération
d'apport-‐cession
consiste
pour
le
contribuable
à
apporter
les
titres
de
sa
société
d'exploitation
à
une
autre
société
qu'il
contrôle
(holding
la
plupart
du
temps)
ayant
opté
pour
l'impôt
sur
les
sociétés.
A
l'occasion
de
cet
apport,
le
contribuable
bénéficie
automatiquement
d'un
sursis
d'imposition
sur
la
plus-‐value
relative
aux
titres
apportés,
sursis
qui
ne
prend
fin
que
lorsque
le
contribuable
cède
les
titres
reçus
en
contrepartie
de
l'apport
(donc
les
titres
de
la
société
holding
en
général).
De
son
côté,
la
société
bénéficiaire
de
l'apport
cède
les
titres
qui
lui
ont
été
apportés
pour
un
prix
correspondant
à
leur
valeur
d'apport
et
ne
subit
donc
aucune
imposition
à
ce
titre.
Pour
les
apports
réalisés
depuis
le
14
novembre
dernier,
l'imposition
de
la
plus-‐value
d'apport
des
titres
peut
toujours
être
différée.
Le
report
d'imposition
tombe
toutefois
:
-‐ soit,
comme
auparavant,
lorsque
les
titres
reçus
en
contrepartie
de
l'apport
sont
cédés
par
le
contribuable,
-‐ soit,
et
il
s'agit
de
la
principale
nouveauté,
en
cas
de
cession,
par
la
société
bénéficiaire
de
l'apport,
dans
les
3
années
suivant
l'apport,
des
titres
qu'elle
a
reçus.
L'imposition
pouvant
cependant
être
évitée
si
la
société
réinvestit,
dans
les
2
ans
suivant
la
cession,
au
moins
50
%
du
produit
de
la
cession
dans
une
activité
économique.
2
3. I
–
L’apport-‐cession
de
titres
à
une
holding
:
optimisation
fiscale
sur
la
plus-‐
value.
A
titre
introductif,
rappelons
l’intérêt
de
recourir
à
l’apport-‐cession.
Antérieurement
à
la
loi
du
29
décembre
2012
(loi
de
finances
pour
2013),
le
but
de
l’exploitant
à
la
tête
de
l’activité
était
de
placer
la
plus-‐value
acquise
tout
au
long
de
l’exploitation
sous
le
régime
du
sursis
d’imposition
décrit
à
l’article
150-‐0
B
du
CGI.
Par
renvoi
aux
dispositions
de
l’article
150-‐0
A
I.
3.
du
même
code,
la
plus-‐value
réalisée
lorsqu’elle
porte
sur
la
cession
de
droits
détenus
directement
ou
indirectement
par
le
cédant
avec
son
conjoint,
leurs
ascendants
et
leurs
descendants
ainsi
que
leurs
frères
et
sœurs
dans
les
bénéfices
sociaux
d'une
société
soumise
à
l'impôt
sur
les
sociétés
ou
à
un
impôt
équivalent
et
ayant
son
siège
dans
un
Etat
membre
de
l'Union
européenne
ou
dans
un
autre
Etat
partie
à
l'accord
sur
l'Espace
économique
européen
ayant
conclu
avec
la
France
une
convention
d'assistance
administrative
en
vue
de
lutter
contre
la
fraude
et
l'évasion
fiscales,
lorsqu’ils
ont
dépassé
ensemble
25
%
de
ces
bénéfices
à
un
moment
quelconque
au
cours
des
cinq
dernières
années,
est
exonérée
si
tout
ou
partie
de
ces
droits
sociaux
n'est
pas
revendu
à
un
tiers
dans
un
délai
de
cinq
ans.
A
défaut,
la
plus-‐value
est
imposée
au
nom
du
premier
cédant
au
titre
de
l'année
de
la
revente
des
droits
au
tiers.
Dans
ce
cadre,
la
plus-‐value
qui
est
constatée
lors
de
l’échange
des
titres
entre
la
société
opérationnelle
et
la
holding
est
neutralisée.
Elle
constitue
une
opération
dite
«
intercalaire
»
et
n’est
donc
pas
prise
en
compte
au
titre
de
cette
année
pour
le
calcul
de
l’impôt
sur
le
revenu.
La
prise
en
compte
de
cette
plus-‐value
était
alors
différée
jusqu'à
la
cession
ultérieure
(mais
aussi
le
rachat,
le
remboursement
ou
l'annulation!)
des
titres
reçus
en
échange.
En
revanche,
la
cession
par
la
société
bénéficiaire
de
l'apport
des
titres
qui
lui
ont
été
apportés
n'est
pas
de
nature
à
mettre
fin
au
sursis
d'imposition
de
la
plus-‐value
d'échange.
C’est
également
sur
ce
point
que
le
régime
du
report
désormais
applicable
va
radicalement
changer
les
choses
comme
il
le
sera
prouvé
dans
des
développements
ultérieurs.
A)
Les
conditions
à
remplir
pour
mettre
en
place
l’apport-‐cession.
Concernant
l’apporteur,
celui-‐ci
peut
être
une
personne
physique
mais
cela
peut
également
être
une
personne
morale.
Toutefois
dans
ce
dernier
cas,
il
doit
exclusivement
s’agir
d’une
personne
morale
relevant
des
dispositions
de
l’article
8
du
CGI.
Autrement
dit,
cela
vise
les
sociétés
soumises
à
l’IR,
comme
par
exemple
les
associés
en
nom
d’une
SNC,
ou
encore
les
commandités
d’une
SCS
(les
commanditaires
eux,
sont
non
commerçants,
donc
ont
une
responsabilité
limitée
à
leurs
apports,
critère
3
4. d’assujettissement
à
l’IS
en
droit
français),
ou
encore
les
associés
connus
et
dont
la
responsabilité
est
illimitée
d’une
société
en
participation
ou
pire,
d’une
société
créée
de
fait
entre
deux
concubins
qui
n’avaient
pas
l’intention
de
s’associer,
ou
encore
et
plus
classiquement,
des
associés
d’une
société
civile
qu’elle
soit
de
moyens,
professionnelle,
immobilière.
Quoi
qu’il
en
soit,
l’apporteur
doit
impérativement
agir
dans
le
cadre
de
la
gestion
de
son
patrimoine
privé.
Cette
condition
semble
d’une
évidence
extrême.
Il
n’est
en
effet
pas
la
peine
de
préciser
que
lorsque
l’exploitant
apporteur
(et
notamment
s’il
agit
par
société)
agit
dans
le
cadre
de
son
activité
professionnelle,
la
plus-‐value
constatée
sera
soumise
aux
dispositions
prévues
en
la
matière…
Concernant
ensuite
la
société
qui
va
bénéficier
de
l’apport
autrement
dit
dans
notre
cas,
la
holding
bénéficiaire.
Le
texte
dispose
ici
qu’il
doit
s’agit
d’une
société
soumise
à
l’IS.
Peu
de
précisions
va-‐t-‐on
dire,
mais
l’Administration
s’est
empressée
d’apporter
quelques
précisions
en
la
matière.
D’une
part,
et
c’est
plutôt
une
précision
d’assouplissement,
la
société
peut
être
soumise
à
l’IS
de
plein
droit
ou
sur
option.
Ainsi,
il
peut
parfaitement
s’agir
d’une
société
de
personne
ayant
opté
pour
un
changement
de
régime
fiscal,
ainsi
par
exemple,
une
société
civile
qui
opterait
pour
l’IS.
Toutefois
ici,
on
remarque
le
caractère
obsolète
de
cette
précision,
puisque
si
en
théorie,
une
société
de
personnes
peut
opter
pour
l’IS,
quel
serait
l’intérêt
pour
l’exploitant
de
constituer
une
société
de
personnes
et
de
la
passer
à
l’IS
pour
réaliser
l’apport-‐cession
?
Quand
on
connaît
les
incidences
d’un
changement
de
régime
fiscal
à
savoir
l’imposition
immédiate
des
bénéfices
d’exploitation,
des
résultats
en
sursis
d’imposition,
des
profits
et
plus-‐values
latentes,
on
ne
peut
que
conseiller
aux
clients
d’éviter
d’avoir
à
réaliser
ce
genre
d’opérations
(les
associés
devant
en
outre,
s’acquitter
de
droits
d’enregistrement
–
droit
de
5%
sur
la
valeur
vénale
des
biens
au
jour
du
changement
de
régime,
avec
toutefois
une
option
sous
condition
de
conservation
des
titres
pendant
3
ans
par
les
associés,
pour
un
droit
forfaitaire
fixe
de
375
ou
500
€
selon
que
le
capital
social
de
la
société
de
personnes
est
au
jour
du
changement,
inférieur
ou
supérieur
à
225.000
€).
L’Administration
a
également
précisé
que
la
société
bénéficiaire
ne
devait
pas
être
exonérée
de
façon
permanente
par
une
disposition
particulière
de
l’IS.
La
société
bénéficiaire
peut
en
outre
avoir
son
siège
de
direction
en
France
ou
dans
un
Etat
étranger,
étant
toutefois
précisé
que
l’Etat
étranger
se
comprend
ici
comme
un
Etat
de
la
communauté
ou
un
Etat
avec
lequel
la
France
aurait
conclu
une
convention
fiscale
internationale
avec
clause
d’assistance
administrative.
Dans
ce
cas,
la
société
devra
être
soumise
à
un
impôt
équivalent
à
l’IS
en
France.
4
5. Concernant
les
conditions
de
l’apport
des
titres.
Celui-‐ci
peut
s’effectuer
au
bon
vouloir
de
l’exploitant
en
pleine
propriété,
usufruit
ou
nue-‐propriété.
L’Administration
admet
même
que
par
exemple,
la
holding
reçoive
l’usufruit
des
parts
de
la
société
opérationnelle
alors
que
la
société
opérationnelle
reçoit
la
nue
propriété
des
titres
de
la
holding.
Ici
encore,
l’optimisation
était
jusqu’au
1er
janvier
2013
très
intéressante.
L’économie
pouvait
être
conséquente.
Par
ailleurs,
l’apport
peut
se
réaliser
avec
ou
sans
soulte
(le
bénéfice
du
régime
de
sursis
d’imposition
s’appliquait
indifféremment
dans
les
deux
cas).
Mais
lorsque
l’échange
avait
lieu
avec
soulte,
il
y
avait
bien
lieu
de
vérifier
que
celle
ci
n’excédait
pas
10%
de
la
valeur
des
titres
remis
en
échange
par
la
holding.
Si
la
condition
est
remplie,
le
sursis
d’imposition
s’appliquait
sur
la
totalité
des
titres
reçus
en
échange,
mais
également
sur
la
soulte
(mais
évidemment,
lorsque
le
sursis
prenait
fin,
la
soulte
était
prise
en
compte
dans
le
calcul
de
la
plus-‐value
pour
l’imposition…).
B)
L’optimisation
proprement
dite.
L’opération
d’apport-‐cession
est
très
simple
à
comprendre,
elle
se
décompose
en
deux
phases
distinctes
mais
très
rapprochées
dans
le
temps.
D’abord,
l’apport
des
titres
de
la
société
dont
on
envisage
la
transmission
à
la
descendance.
Ensuite,
la
cession
de
ces
mêmes
titres
par
la
holding
bénéficiaire.
Concernant
l’apport
tout
d’abord.
En
général,
la
société
bénéficiaire
est
constituée
pour
l’occasion
lorsque
celui-‐ci
s’apprête
à
intervenir,
on
parle
alors
de
société
constituée
ad-‐
hoc.
Toutefois,
aucun
texte
de
loi
n’empêcherait
à
un
contribuable
exploitant
d’apporter
les
titres
de
la
société
opérationnelle
à
une
société
civile
qu’il
détient
depuis
plusieurs
années.
La
seule
exigence
on
l’a
vu,
est
que
la
société
bénéficiaire
soit
soumise
de
plein
droit
ou
à
l’IS
(d’où
ici
la
remarque
infra
qui
consistait
à
dire
qu’il
fallait
éviter
dans
ce
schéma
dans
le
cas
où
le
contribuable
possèderait
déjà
une
société
civile,
de
se
contenter
de
la
passer
à
l’IS…
le
coût
fiscal
serait
nettement
moins
élevé,
quitte
à
créer
une
société
soumise
à
l’IS
de
plein
droit,
plutôt
que
de
vouloir
à
tout
prix
ne
pas
s’acquitter
de
formalités
complémentaires
en
ne
constituant
pas
de
nouvelle
société).
Quelle
forme
conseiller
au
client
dans
le
cadre
de
ce
schéma
?
Peu
importe,
encore
une
fois,
la
bénéficiaire
doit
simplement
être
soumise
à
l’IS.
Toutefois
il
est
évident
que
«
la
mode
actuelle
»
conduit
à
créer
une
SAS
(et
à
fortiori,
une
SASU
serait
également
envisageable)
pour
sa
grande
liberté
statutaire.
Une
SCI
pourrait
également
très
bien
convenir,
on
notera
ici
que
lorsque
le
contribuable
constitue
une
SCI
et
opter
dès
la
constitution
pour
le
régime
fiscal
de
l’IS,
les
conséquences
d’un
changement
de
régime
fiscal
normalement
applicables
ne
le
seront
pas
ici,
aucun
coût
supplémentaire
ne
sera
donc
mis
à
sa
charge.
Ensuite,
la
société
ad-‐hoc
doit
céder
les
titres
qu’elle
reçoit
de
la
société
opérationnelle,
c’est
la
seconde
phase
du
schéma
fiscal.
5
6. A
cet
effet,
l’Administration
ni
la
loi
d’ailleurs,
n’imposent
un
délai
de
cession.
Toutefois,
c’est
la
pratique
et
le
bon
sens
qui
invitent
ici
le
maitre
à
bord
à
céder
les
titres
le
plus
rapidement
possible
pour
faire
jouer
au
maximum
le
mécanisme
du
sursis
d’imposition.
En
effet,
comment
se
déroule
l’opération
?
La
société
holding
reçoit
des
titres
d’une
valeur
X.
Deux
solutions
sont
envisageables.
Soit
la
holding
les
cède
à
très
brève
échéance,
ne
laissant
ainsi
pas
le
temps
aux
titres
de
prendre
de
la
valeur
(on
part
ici
de
l’hypothèse
selon
laquelle
la
société
opérationnelle
qui
se
trouve
derrière
a
une
activité
florissante
et
dont
la
valeur
des
titres
peut
rapidement
grimper).
Soit
la
société
holding
attend
et
ne
les
cèdes
que
quelques
années
après.
Quelles
conséquences
?
Tout
simplement
le
calcul
de
la
plus-‐value
puisque
celle-‐ci
se
calcule
par
définition
sur
la
différence
entre
le
prix
de
cession
et
le
prix
d’acquisition.
Par
conséquent
tout
l’intérêt
et
le
but
consiste
à
obtenir
un
valeur
de
d’acquisition
la
plus
proche
possible
de
la
valeur
de
cession
pour
que
la
différence
soit
égale
à
0.
Comme
la
valeur
d’acquisition
retenue
est
celle
mentionnée
dans
l’apport,
si
la
cession
intervient
quelques
jours
plus
tard,
le
prix
de
cession
est
identique
à
la
valeur
d’apport
et
la
plus-‐value
constatée
est
de
0.
La
cession
n’est
pas
imposée.
A
la
décharge
du
contribuable
qui
attendrait
quelques
mois
voire
quelques
années
avant
de
vendre
les
titres
de
la
holding,
on
peut
se
rassurer
en
invoquant
le
fait
que
la
holding
étant
soumise
à
l’IS,
la
société
opérationnelle
également
(en
général,
la
transmission
d’entreprise
porte
sur
des
sociétés
IS…)
le
de
taxation
préférentielle
des
plus-‐values
à
long
terme
sur
des
titres
de
participation
pouvant
alors
s’appliquer
(à
cet
effet,
dernière
modification
de
la
loi
de
finances
pour
2013
–
article
22
:
la
quote-‐part
de
frais
et
charges
à
réintégrer
n’est
plus
de
10
mais
12%
et
se
prend
sur
la
plus-‐value
brute,
non
plus
nette…).
Le
sursis
pouvait
alors
pleinement
jouer,
mais
il
fallait
bien
évidemment
en
arriver
à
un
moment
ou
à
un
autre
à
un
dénouement.
La
plus-‐value
ou
plus
précisément
son
imposition,
était
différée
jusqu’au
moment
où
les
titres
reçus
en
échange
par
la
holding
étaient
cédés
ou
annulés.
Dès
lors,
selon
quelles
modalités
calculer
la
plus-‐value
?
Le
prix
de
cession
ne
pose
pas
de
problème.
Le
prix
d’acquisition
retenu
quant
à
lui
était
celui
d’acquisition
des
titres
remis
en
échange
majoré,
ou
diminué
d’ailleurs,
du
montant
de
la
soulte
versée
ou
reçue
en
échange.
L’imposition
de
cette
plus-‐value
pouvait
également
bénéficier
de
mesures
d’assouplissement
comme
en
cas
de
départ
à
la
retraite
de
l’exploitant,
ou
encore
en
appliquant
tout
simplement
les
abattements
prévues
en
matière
de
durée
de
détention
des
titres.
6
7. Toutefois,
lorsque
les
titres
reçus
en
échange
n’étaient
pas
cédés
mais
étaient
transmis
par
voie
de
donation
ou
succession,
le
sursis
prenait
fin
sans
imposition
de
la
plus-‐value
réalisée.
Attention
toutefois,
évidemment
si
les
enfants
ou
héritiers
du
moins,
décident
de
vendre
les
titres
reçus
dans
le
cadre
de
la
succession,
la
plus-‐value
sera
imposée
et
calculée
par
différence
entre
le
prix
de
cession
et
le
prix
d’acquisition
étant
entendu
que
ce
dernier
sera
celui
mentionné
dans
la
déclaration
de
succession,
ou
dans
l’acte
de
donation
s’il
s’agit
d’une
donation.
II
–
L’apport-‐cession
:
comment
s’attirer
les
foudres
de
l’Administration
fiscale…
La
technique
de
l'apport-‐cession
permet,
nous
venons
de
le
voir,
au
chef
d'entreprise
qui
entend
céder
son
affaire
de
se
placer
sous
le
régime
du
sursis
d'imposition
à
raison
de
la
plus-‐value
d'apport,
et
à
la
société
bénéficiaire
de
disposer
à
son
actif,
après
la
vente
des
titres
apportés,
de
liquidités
qui
n'ont
pas
ou
n'ont
que
peu
subi
l'impôt
sur
les
sociétés.
Par
le
passé,
l'administration
fiscale
a
tenté
à
de
nombreuses
reprises
de
contester
ce
type
d'opérations,
lorsqu'elles
étaient
réalisées
sous
le
mécanisme
du
report
d'imposition
des
anciens
articles
92
B,
II
et
160,
I
ter
du
CGI
applicables
jusqu'au
1er
janvier
2000
(mécanisme
remplacé
depuis
cette
date
par
le
sursis,
encore
modifié
donc
depuis
le
1er
janvier
2013).
Pour
procéder
à
la
requalification
de
ces
opérations,
l'administration
a
successivement
invoqué
l'abus
de
droit
puis
la
fraude
à
la
loi.
Les
opérations
d’apports-‐cessions
de
titres
ont
fait
l’objet
de
nombres
décisions
de
jurisprudence
ces
dernières
années,
notamment
en
2010
lorsque
le
Conseil
d’Etat
a
eu
à
se
prononcer
dans
trois
affaires
différentes
–
CE,
8
octobre
2010
n°
301934
notamment.
La
question
principale
dans
ce
type
d’affaire
est
de
déterminer
dans
quelle
mesure
un
apport
de
titres
à
une
société
ouvrant
droit
au
report
ou
à
un
sursis
de
l'imposition
de
la
plus-‐value
réalisée
à
l'occasion
de
cet
apport
est
constitutif
d'un
abus
de
droit
lorsque
celui-‐ci
est
suivi
de
la
cession
des
titres
par
la
société.
Le
Conseil
d'Etat
avait
posé
le
principe
en
cas
d’apport-‐cession
que
deux
conditions
cumulatives
doivent
être
remplies
pour
qu'une
telle
opération
constitue
un
abus
de
droit.
Tout
d’abord,
l'opération
devait
permettre
l'appréhension
par
les
auteurs
de
l'apport
des
liquidités
dégagées
par
la
cession
réalisée
par
la
société
bénéficiaire.
En
pratique,
le
transfert
effectif
des
sommes
sur
le
compte
du
contribuable
n’est
pas
nécessaire,
il
suffit
simplement
que
l’appréhension
des
sommes
soit
possible
(cela
dépend
du
contrôle
exercé
sur
la
société
par
l'auteur
de
l'apport).
Il
est
bien
évident
que
si
X,
exploitant
de
l’activité
dont
la
transmission
a
été
effectuée,
détient
100%
du
capital
de
la
holding
bénéficiaire,
la
condition
sera
remplie.
7
8. Ensuite,
le
produit
de
la
cession
ne
doit
pas
avoir
été
réinvesti
dans
le
cadre
d’une
activité
économique.
Au
final,
il
en
ressort
que
dans
le
cas
d’opérations
d’apport-‐
cession,
les
contribuables
doivent
apporter
absolument
des
preuves
réelles
concernant
le
réinvestissement
du
produit
de
la
cession
dans
une
véritable
activité
économique
afin
d’éviter
toute
contestation
possible
de
l’administration
fiscale.
Il
est
également
à
noter
que
le
fait
que
l’apport
de
titres
bénéficient
d’un
report
ou
d’un
sursis
d’imposition
ne
fait
pas
obstacle
à
ce
que
l'administration
recoure
en
pratique
à
la
procédure
de
l'abus
de
droit
en
présence
d'une
opération
d'apport-‐cession
de
titres.
A)
Investissement
nécessaire
dans
une
activité
économique.
La
Haute
Juridiction
a
jugé
que
la
qualification
d’abus
de
droit
doit
être
écartée
s’il
ressort
de
l’ensemble
de
l’opération
que
la
société
bénéficiaire
de
l’apport
«
a,
conformément
à
son
objet,
effectivement
réinvesti
(le
produit
de
la
cession)
dans
une
activité
économique
».
A
l’inverse,
l’abus
de
droit
est
caractérisé
lorsqu’il
s’agit
d’un
montage
permettant
au
contribuable
de
disposer
effectivement
des
liquidités
obtenues
lors
de
la
vente
des
titres
tout
en
demeurant
détenteur
des
titres
de
la
société
reçus
en
échange
lors
de
l’apport.
En
d’autres
termes,
l’appréhension
par
le
contribuable
du
produit
de
cession
des
titres
caractérise
une
motivation
exclusivement
fiscale
et
contraire
aux
intentions
du
législateur
qui
a
instauré
le
régime
optionnel
du
placement
en
sursis
d’imposition.
Concernant
le
délai
du
réinvestissement
ensuite.
Le
réinvestissement
du
produit
de
la
cession
des
titres
dans
une
activité
économique
peut
ne
pas
être
effectué
de
façon
immédiate.
Dans
l’une
des
trois
affaires
soumises
au
Conseil,
l’acquisition
d’actifs
professionnels
(acquisition
de
participations
dans
deux
sociétés
étrangères)
en
remploi
des
liquidités
dégagées
lors
de
la
cession
des
titres
n’avait
eu
lieu
que
plusieurs
années
après
l’opération
d’apport-‐cession.
Le
Conseil
d’Etat
a
considéré
que
le
réinvestissement
du
produit
de
la
vente
des
titres
s’était
effectué
«
dans
le
délai
nécessaire
qu’impliquaient,
eu
égard
à
l’importance
et
à
la
nature
de
l’investissement
réalisé,
les
prises
de
contacts
et
les
démarches
préalables
requises
».
Il
convient
de
rappeler
que
les
délais
de
deux
ans
et
de
trois
ans
en
vue
de
procéder
à
ce
réinvestissement
avaient
déjà
été
acceptés
respectivement
par
la
Cour
administrative
d’appel
de
Lyon
et
la
Cour
administrative
d’appel
de
Douai,
considérant
qu’il
s’agissait
là
du
temps
nécessaire
au
contribuable
pour
mener
à
bien
son
nouveau
projet
professionnel.
B)
Qualification
possible
en
abus
de
droit
?
Dans
sa
rédaction
en
vigueur
jusqu'au
31
décembre
2008,
l’article
L.
64
du
Code
des
procedures
fiscales
relatif
à
l'abus
de
droit
disposait
que
:
«
ne
peuvent
être
opposés
à
8
9. l'administration
des
impôts
les
actes
qui
dissimulent
la
portée
véritable
d'un
contrat
ou
d'une
convention
à
l'aide
de
clauses
qui
donnent
ouverture
à
des
droits
d'enregistrement
ou
à
une
taxe
de
publicité
foncière
moins
élevés,
qui
déguisent
soit
une
réalisation,
soit
un
transfert
de
bénéfices
ou
de
revenus
ou
qui
permettent
d'éviter,
en
totalité
ou
en
partie,
le
paiement
des
taxes
sur
le
chiffre
d'affaires
correspondant
aux
opérations
effectuées
en
exécution
d'un
contrat
ou
d'une
convention
».
Amenée
à
se
prononcer
sur
des
opérations
qui
ne
pouvaient,
au
vu
de
ce
texte,
être
remises
en
cause
sur
le
fondement
de
l'abus
de
droit
car
ne
pouvant
être
considérées
comme
déguisant
ni
la
réalisation
ni
le
transfert
de
bénéfices
ou
de
revenus,
la
jurisprudence
a
toutefois
reconnu
à
l'administration,
sur
le
terrain
de
la
fraude
à
la
loi,
le
droit
d'écarter
comme
ne
lui
étant
pas
opposables
les
actes
passés
par
un
contribuable,
dès
lors
qu'elle
établit
que
ces
actes
ont
un
caractère
fictif
ou
que,
recherchant
le
bénéfice
d'une
application
littérale
des
textes
à
l'encontre
des
objectifs
poursuivis
par
leurs
auteurs,
ils
n'ont
pu
être
inspirés
par
aucun
motif
autre
que
celui
d'éluder
ou
d'atténuer
les
charges
fiscales
que
l'intéressé,
s'il
n'avait
pas
passé
ces
actes,
aurait
normalement
supportées
eu
égard
à
sa
situation
et
à
ses
activités
réelles
Même
si
le
Conseil
d'Etat,
dans
sa
grille
d'analyse
de
l'abus
de
droit
en
cas
d'opérations
d'apport-‐cession
ne
semble
attacher
aucune
importance
au
critère
du
délai
séparant
les
opérations
d'apport
et
de
cession
des
titres,
il
paraît
prudent
d'éviter
la
concomitance
et
d'anticiper
au
maximum
l'apport
à
la
société
amenée
à
céder
les
titres,
voire
d'utiliser
une
société
«
pivot
»
déjà
existante
pour
jouer
ce
rôle.
Pour
sécuriser
l'opération,
les
titres
pourraient
être
apportés
dès
la
décision
de
mise
en
vente
de
la
société
d'exploitation,
pour
une
valeur
d'apport
correspondant
à
l'évaluation
faite
de
la
société
en
vue
de
la
présentation
du
dossier
de
cession
à
de
potentiels
acquéreurs.
Dernièrement,
alors
que
le
dispositif
d’apport-‐cession
ouvrant
droit
au
sursis
était
encore
en
vigueur,
la
cour
administrative
d’appel
de
Lyon
dans
un
arrêt
du
28
juin
2012
avait
jugé
que
le
remploi
de
31%
des
sommes
du
produit
de
la
cession
excluait
automatiquement
l’abus
de
droit.
Le
comité
de
l'abus
de
droit
fiscal
est
revenu
en
2011
sur
sa
position
antérieure,
en
estimant
que
le
caractère
automatique
du
sursis
d'imposition
d'une
plus-‐value
d'échange
de
titres
ne
fait
pas
obstacle
à
l'application
de
la
procédure
de
l'abus
de
droit.
La
jurisprudence
n'a
pour
l'instant
guère
eu
l'occasion
de
se
prononcer
sur
les
opérations
réalisées
sous
le
régime
du
sursis.
Dans
un
sens
favorable
au
contribuable,
il
a
été
jugé
que
l'apport
d'actions
à
une
société
soumise
à
l'impôt
sur
les
sociétés
par
son
principal
actionnaire
sous
le
régime
du
sursis
d'imposition
suivi
de
leur
cession
par
celle-‐ci
à
une
autre
société
n'a
pas
eu
un
but
exclusivement
fiscal,
dès
lors
que
cet
apport
était
justifié
par
des
motifs
économiques
en
permettant
à
la
société
après
la
vente
des
titres
de
financer
la
réorientation
de
son
activité.
9
10. La
circonstance
que
l'apport
aurait
pu
être
réalisé
en
numéraire,
après
cession
directe
des
titres
par
l'actionnaire
principal
à
la
société
acquéreuse,
n'est
pas
de
nature
à
faire
regarder
l'apport
comme
constitutif
d'un
abus
de
droit.
Les
sanctions
applicables
en
cas
d'abus
de
droit
sont
lourdes
:
outre
l'application
de
l'intérêt
de
retard,
une
majoration
égale
à
80
%
des
droits
rappelés
est
mise
à
la
charge
du
contribuable
lorsqu'il
est
établi
que
celui-‐ci
a
été
le
principal
initiateur
ou
le
principal
bénéficiaire
des
actes
abusifs
(40
%
lorsque
cette
preuve
n'est
pas
apportée).
III
–
La
loi
de
finances
pour
2013.
Par
le
biais
de
l’article
18
de
ce
texte,
le
législateur
entend
expressément
encadrer
les
opérations
d'apport-‐cession
de
titres
(ce
qui
semble
limiter
l'intérêt
de
la
jurisprudence
relative
à
l'abus
de
droit
aux
apports
antérieurs
à
son
entrée
en
vigueur).
Il
exclut
ainsi
du
sursis
d'imposition
les
plus-‐values
d'apport
de
titres
à
des
sociétés
contrôlées
par
l'apporteur.
Ces
plus-‐values
sont
soumises
à
un
régime
de
report
d'imposition
automatique
régi
par
un
nouvel
article
150-‐0
B
ter
du
CGI.
Dans
le
régime
du
report
d'imposition,
l'échange
n'est
pas
considéré
comme
une
simple
opération
intercalaire
(contrairement
au
sursis).
La
plus-‐value
brute
en
report
est
donc
égale
à
la
différence
entre
le
prix
des
titres
reçus
par
le
contribuable
à
la
date
de
l'échange
et
le
prix
d'acquisition
des
titres
remis
à
l'échange.
Il
est
mis
fin
au
report
à
l'occasion
de
la
cession
à
titre
onéreux,
du
rachat,
du
remboursement
ou
de
l'annulation
des
titres
apportés
à
la
société
bénéficiaire
dans
un
délai
de
trois
ans
à
compter
de
l'apport,
sauf
si
cette
société
réinvestit
dans
un
délai
de
deux
ans
à
compter
de
la
cession
au
moins
50
%
du
produit
de
la
cession
dans
une
activité
économique.
Une
cession
intervenant
plus
de
trois
ans
après
l'apport
ne
met
donc
pas
fin
au
report,
que
la
société
bénéficiaire
de
l'apport
réinvestisse
ou
non
le
produit
de
la
cession
dans
une
activité
économique.
10