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Conduite pratique devant une anomalie de la croissance
- 1. 8-0595
Conduite pratique devant une anomalie
de la croissance
R. Brauner
Les courbes d’évolution de la taille et de l’indice de corpulence sont les documents-clés qui permettent
de savoir si un enfant donné a une croissance anormale. La petite taille est le plus souvent (> 70 % des
cas) de type constitutionnel. Les pathologies endocriniennes représentent moins de 10 % des étiologies,
mais elles sont importantes à reconnaître car elles conduisent à un traitement spécifique. Le déficit en
hormone de croissance (GH) peut être secondaire à une lésion (kyste, tumeur) ou à une irradiation
de la région hypothalamohypophysaire, ou être idiopathique. Un déficit en GH conduit à rechercher
systématiquement par une imagerie par résonance magnétique (IRM) une lésion de cette région. Le
diagnostic de déficit idiopathique en GH est difficile et souvent fait par excès. Le retard de croissance à
début intra-utérin est la cause de 10 % des petites tailles. Le caryotype sanguin standard doit être quasi
systématique chez une fille ayant une petite taille inexpliquée à la recherche d’un syndrome de Turner. Le
retard pubertaire est responsable d’un retard à l’accélération de la vitesse de croissance staturale. Ceci
explique que le motif de consultation soit souvent la petite taille. Chez le garcon, il s’agit le plus souvent
¸
(> 80 % des cas) d’un retard pubertaire simple. La grande taille est, elle aussi, le plus souvent (> 90 %
des cas) de type constitutionnel.
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Mots-clés : Croissance ; Déficit en hormone de croissance ; Facteurs de croissance ; Grande taille ;
Hormone de croissance ; Puberté ; Retard pubertaire ; Retard de croissance ; Syndrome de Turner
Plan surveillance d’un enfant. Il permet de rassurer l’enfant et sa famille
sur l’évolution de son corps et surtout de dépister une anomalie.
■ Introduction 1
■ Croissance et puberté normales 1
Croissance normale 1
Puberté normale 2 Croissance et puberté normales
Âge osseux 2
■
Croissance normale
Diagnostic d’une anomalie de la croissance 2
■ Retard de croissance et/ou vitesse de croissance inférieure La croissance peut être divisée en quatre phases, en fonction
à la norme 3 de la vitesse de croissance et de l’influence prépondérante d’un
Quelle est la cause de la petite taille ? 3 facteur de croissance donné (Tableau 1). Une croissance normale
Traitement 7 nécessite un système endocrinien et un squelette normaux. Elle
est contrôlée par des facteurs génétiques. Elle est liée à l’état
■ Grande taille et/ou vitesse de croissance supérieure à la norme 7
nutritionnel. Elle peut être ralentie par certaines anomalies de
Quelle est la cause de la grande taille ? 7
l’environnement.
Taille adulte 8
Les facteurs endocriniens de la croissance post-natale sont
Indications et moyens thérapeutiques 8
l’hormone de croissance (growth hormone [GH]), les hormones
thyroïdiennes et, à la puberté, l’estradiol chez la fille et la tes-
tostérone chez le garcon. La GH agit par l’intermédiaire d’un
¸
facteur de croissance fabriqué par le foie : insulin-like growth factor 1
(IGF1).
Introduction Les facteurs génétiques interviennent sur le niveau de taille
et sur l’âge au démarrage de la puberté. La taille cible, ou
Le suivi de l’évolution de la taille, du poids et du périmètre taille génétique, est la taille adulte que devrait avoir l’enfant si
crânien, et du développement pubertaire est un élément-clé de la n’intervenaient que les facteurs génétiques.
EMC - Traité de Médecine Akos 1
Volume 7 > n◦ 3 > juillet 2012
http://dx.doi.org/10.1016/S1634-6939(12)56932-2
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- 2. 8-0595 Conduite pratique devant une anomalie de la croissance
Tableau 1. des tubes séminifères sous l’effet de l’augmentation de la sécrétion
Phases de la croissance post-natale. hypophysaire de follicle stimulating hormone (FSH). Les testicules
De la naissance à Vitesse de croissance très rapide : prépubères mesurent autour de 2 × 1 cm et des dimensions tes-
2-3 ans - 1re année : 24 cm ticulaires supérieures à 3 × 2 cm indiquent une stimulation. La
- 2e année : 11 cm sécrétion de testostérone contribue avec les hormones surré-
- 3e année : 8 cm naliennes (essentiellement sulfate de déhydroépiandrostérone
Diminution de l’influence des facteurs [DHAS]) au développement de la pilosité sexuelle. Elle induit une
intra-utérins au profit des facteurs augmentation des dimensions de la verge, des érections et une
génétiques → changements possibles de mue de la voix. Chez le garcon, il est fréquent d’observer au cours
¸
couloir de croissance de la puberté un développement des seins, appelé gynécomastie.
Celle-ci est parfois douloureuse et/ou unilatérale. Elle est le plus
Phase prépubère Vitesse de croissance stable 5-6 cm/an avec
souvent ralentissement prépubertaire
souvent transitoire.
La vitesse de croissance staturale s’accélère à la puberté : le gain
Phase pubertaire Développement des caractères sexuels annuel en taille passe de 5 cm avant la puberté à 9 cm durant le pic
secondaires de croissance pubertaire. L’âge moyen à la survenue de ce pic est
Accélération de la vitesse de croissance de 12 ans chez la fille et de 14 ans chez le garcon [2, 3] . Le nombre
¸
staturale qui passe de 5 à 9 cm/an : total moyen de centimètres pris entre la première menstruation
- pic à 12 ans fille/14 ans garcon
¸ et la taille adulte est de 7 cm lorsque la première menstruation
- gain total moyen 24 cm fille/27 cm garcon
¸
survient à 13 ans.
Indicateurs de fin de Gain statural < 2 cm/an
croissance Âge osseux > 15 ans fille/16 ans garcon
¸
Test de Risser si nécessaire
Âge osseux
L’âge osseux correspond pour un individu à l’âge réel de la
majorité des individus de son sexe qui ont la même maturation
squelettique. Pour déterminer l’âge osseux, la méthode la plus
Taille cible (cm) = taille père (cm) + taille mère (cm) + 13 si utilisée est celle de Greulich et Pyle [6] . Elle utilise la radiogra-
garcon -13 si fille/2
¸ phie de la main et du poignet gauches de face (un seul cliché).
La taille doit être mesurée avec soin par une personne entraî- L’apparition de l’os sésamoïde du pouce est un repère commode
née à le faire et avec un matériel fiable. Le résultat de la mesure car elle est en général contemporaine du démarrage pubertaire ;
est inscrit sur le carnet de santé, et reporté sur la courbe, ce elle correspond à un âge osseux de 11 ans chez la fille et de
qui permet de suivre l’évolution de la croissance. Parallèlement 13 ans chez le garcon. L’âge osseux permet d’approcher la frac-
¸
sont évalués le périmètre crânien (rapporté aux normes pour tion de sa taille adulte qu’un enfant a déjà prise, et donc sa
l’âge), le poids (rapporté à la taille), et le stade pubertaire (cf potentialité de croissance résiduelle jusqu’à la taille adulte. La
infra). L’indice de corpulence [1] (body mass index) est le rapport prédiction de taille adulte se calcule, pour un enfant donné,
poids (kg)/taille (m)2 . à partir de sa taille et de son âge osseux [7] . Cependant, il y
La taille moyenne adulte est de 162 cm chez la fille et de 175 cm a une marge d’erreur entre la taille prédite et la taille adulte.
chez le garcon. Le niveau de taille est exprimé en déviations stan-
¸ Cette marge est d’autant plus grande que l’enfant est plus jeune
dards (DS) [2] ou en percentiles. Un percentile donné est la limite et que la différence entre les âges chronologique et osseux est
en dessous de laquelle se trouve le pourcentage correspondant grande. Il est inutile, en règle générale, de redemander des âges
de la population normale (par exemple 3 % des enfants ont une osseux sauf s’ils sont nécessaires pour prendre des décisions
taille en dessous du 3e percentile). Les tailles de 95 % des enfants thérapeutiques.
bien portants sont entre –2 DS (proche du 3e percentile) et +2 DS
(proche du 97e percentile). Cela correspond à une taille adulte
comprise entre 151 et 174 cm chez les filles et entre 163 et 187 cm Diagnostic d’une anomalie
chez les garcons.
¸
de la croissance
Puberté normale Pris isolément, le niveau de taille ne permet pas de conclure
quant au caractère normal ou non de la croissance. Il est essen-
La puberté est la période de transition entre l’enfance et l’état tiel de préciser la vitesse de croissance pour savoir si le niveau
adulte [3] . Elle s’exprime sur le plan clinique par un développe- de taille résulte d’une croissance régulière ou s’il est secondaire à
ment des caractères sexuels et par une accélération de la vitesse un changement de couloir de croissance. Les courbes d’évolution
de croissance en taille. Elle conduit à l’acquisition des fonctions de la taille et de l’indice de corpulence sont les documents-clés
de reproduction. qui permettent de savoir si un enfant donné a une croissance
Le développement pubertaire est secondaire aux sécrétions anormale.
d’estradiol par les ovaires ou de testostérone par les testi- Les éléments qui font rechercher une anomalie sont :
cules. Ceci constitue la « gonadarche ». Les surrénales participent • un niveau de taille situé en dehors des limites de –2 et de +2 DS ;
au développement de la pilosité sexuelle. Ceci constitue plus l’écart à la moyenne est grand, plus forte est la probabilité
l’« adrénarche ». de trouver une anomalie ;
Les caractères sexuels se développent dans 95 % des cas entre • une différence importante (> 1,5 DS) entre la taille de l’enfant
8 et 13 ans (moyenne 11 ans) chez la fille et entre 9 et 14 ans et sa taille génétique (cf. supra), exprimées toutes les deux en
(moyenne 12,5 ans) chez le garcon. Les stades du développe-
¸ DS [8] ;
ment pubertaire sont cotés de 1 à 5 selon la classification de • surtout une vitesse de croissance anormale pour l’âge, ce qui
Marshall et Tanner [4, 5] . Le stade 1 correspond à l’absence de déve- conduit à un changement de couloir de croissance.
loppement pubertaire et le stade 5 au développement complet Dans les petites tailles, l’évolution du poids et de l’indice de
adulte. corpulence est à analyser parallèlement à l’évolution de la taille
Chez la fille, le signe qui indique le démarrage pubertaire pour répondre aux questions suivantes :
est le développement des seins (souvent unilatéral au début), • le ralentissement statural s’accompagne-t-il d’un arrêt de la
accompagné ou suivi de l’apparition d’une pilosité pubienne. prise de poids ou au contraire de la constitution d’un surpoids ;
L’intervalle moyen entre le début du développement des seins • le ralentissement statural précède-t-il ou au contraire succède-
et l’apparition des premières règles est de 2 ans. Celles-ci sur- t-il à la modification de l’évolution du poids ?
viennent en moyenne à 13 ans. Chez le garcon, le signe qui
¸ En effet, lorsqu’un ralentissement de la prise de poids précède le
indique le démarrage pubertaire est l’augmentation du volume ralentissement de la croissance en taille, cela indique que le ralen-
des testicules. Cette augmentation témoigne du développement tissement statural est probablement secondaire à l’insuffisance de
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- 3. Conduite pratique devant une anomalie de la croissance 8-0595
prise pondérale et oriente plutôt vers un problème nutritionnel. Tableau 3.
À l’inverse, lorsque le ralentissement statural s’accompagne d’une Causes des petites tailles.
prise de poids excessive, cela oriente vers une hypothyroïdie, un Petite taille constitutionnelle
hypercorticisme ou une lésion intracrânienne de type craniopha-
ryngiome. Pathologie connue
Syndromes et maladies osseuses constitutionnelles
Anomalie chromosomique autosomique
Affection chronique décompensée
“ Point important Corticothérapie continue et prolongée
Pathologie endocrinienne
Déficit en hormone de croissance
La courbe de croissance est le document-clé. Hypothyroïdie
Les éléments qui font rechercher une anomalie sont : Syndrome de Turner
• niveau de taille en dehors de –2 et + 2 DS ; Retard pubertaire
• différence importante (> 1,5 DS) entre la taille de Excès de corticostéroïdes
l’enfant et sa taille cible en DS ; Autres causes
• surtout une vitesse de croissance anormale pour l’âge Retard de croissance à début intra-utérin
ce qui induit un changement de couloir de croissance. Trouble psycho-socio-affectif
Il convient d’analyser parallèlement l’évolution du poids et Maladie cœliaque
Pathologie inflammatoire intestinale
de l’indice de corpulence.
Pathologie rénale
Insuffisance nutritionnelle
Retard de croissance Tableau 4.
Recherche de l’étiologie d’une petite taille.
et/ou vitesse de croissance
Étape 1
inférieure à la norme Radiographie de la main et du poignet gauches de face (un cliché)
IGF1, créatinine, VS, anticorps antitransglutaminases, ± NFS
Un enfant vu pour petite taille conduit à se poser les questions
suivantes (Tableau 2) : Étape 2
• la croissance est-elle anormale (cf. supra) ? Évaluation de la sécrétion de GH sous stimulation
• en cas d’anomalie, quelle en est la cause ?
• quelles sont les possibilités de traitement ? Autres
Fille : caryotype standard
Si prise pondérale excessive : T4 (non T3 ), TSH, cortisolurie 24 h
Quelle est la cause de la petite taille ? Taille < –3 DS inexpliquée : radiographies du bassin de face, rachis
lombosacré, avant-bras
(Tableaux 3, 4) IRM hypothalamo-hypophysaire si vitesse de croissance inférieure à
la norme avec pic GH < 10-15 ng/ml et/ou signes fonctionnels ou
Petite taille constitutionnelle
physiques associés
La petite taille est le plus souvent (> 70 % des cas) consti-
tutionnelle, appelée aussi génétique, essentielle ou familiale. IGF1 : insulin-like growth factor 1 ; VS : vitesse de sédimentation ; NFS : numération
formule sanguine ; GH : growth hormone ; TSH : thyroid stimulating hormone ; IRM :
L’indication à demander des examens complémentaires à la imagerie par résonance magnétique.
recherche d’une pathologie dépend du contexte. Le plus souvent,
le diagnostic est facile à faire sur les arguments suivants :
• la vitesse de croissance est normale pour l’âge (Fig. 1) ;
• le niveau de taille est concordant avec la taille cible calculée à Il suffit alors de faire doser le taux plasmatique du facteur
partir des tailles des parents ; de croissance IGF1. S’il est normal pour l’âge, cela consti-
• il n’y a pas de signe fonctionnel ; tue un argument contre une pathologie. L’indication à faire
• l’examen clinique est normal. une évaluation pour exclure une pathologie peut venir des
éléments suivants : importance du déficit statural, doute dans
l’esprit de la famille ou du médecin traitant sur l’existence d’une
Tableau 2. pathologie.
Conduite du diagnostic devant un enfant de petite taille. Les maladies osseuses constitutionnelles sont parfois de
Questions diagnostic assez facile sur les radiographies osseuses. Cepen-
La croissance est-elle anormale ? dant, ces anomalies peuvent être mineures, notamment dans
En cas d’anomalie, quelle en est la cause ? l’hypochondroplasie ou la dyschondrostéose, reconnues seule-
Quelles sont les possibilités de traitement ? ment par des spécialistes. Elles doivent être recherchées
systématiquement lorsque le déficit statural est important et qu’il
Informations nécessaires existe des antécédents de petite taille familiale. Leur recherche se
Tailles et âges pubertaires des parents et de la fratrie fait par des radiographies osseuses ciblées (rachis lombosacré face
Terme, poids et taille à la naissance et profil, bassin de face, avant-bras et poignet gauche de face et de
Pathologie et/ou corticothérapie chroniques profil). La mise en évidence d’anomalies de gènes à leur origine
Troubles fonctionnels : diarrhée, vomissement, anorexie, polyurie est à ses débuts.
et/ou céphalée
Apports alimentaires
Contexte psycho-socio-affectif
Pathologie connue
Examen clinique
Dans certains cas, la cause de la petite taille est facile à établir
car l’enfant a une pathologie qui ralentit la vitesse de croissance
Taille, périmètre crânien, développement pubertaire à comparer à
ou qui s’accompagne d’une petite taille. L’indication à demander
l’âge
des examens complémentaires à la recherche d’une pathologie
Poids et indice de corpulence
associée, en particulier d’un déficit en GH, est fonction d’une part
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- 4. 8-0595 Conduite pratique devant une anomalie de la croissance
TC
X
X
X
X S2
X
Hormone de croissance
Figure 1. Courbes de croissance staturale et pondérale d’une fille suivie Figure 2. Courbes de croissance staturale et pondérale d’une fille vue
pour petite taille constitutionnelle. La survenue d’une puberté avancée pour déficit congénital en hormone de croissance. Le traitement substitutif
(S2) risque de réduire le potentiel de croissance. Cependant le traitement permet de retrouver le couloir de croissance génétique.
freinateur de la puberté semble inefficace pour préserver le potentiel de
croissance dans cette situation.
• la constatation d’un déficit en GH conduit à rechercher
d’autres déficits hypophysaires et à demander une imagerie
du niveau de taille de l’enfant comparé à celui qu’entraîne habi- par résonance magnétique (IRM), pour chercher une cause à ce
tuellement sa pathologie initiale, et d’autre part de la possibilité déficit ;
d’associations. • l’association d’hypoglycémies à un micropénis (longueur de
la verge < 3 cm), en particulier chez un nouveau-né, est très
évocatrice du diagnostic de déficit congénital en GH et impose
Pathologie endocrinienne d’effectuer en urgence une IRM cérébrale à la recherche d’une
malformation hypothalamohypophysaire (cf. infra) qui permet
Déficit en hormone de croissance (Fig. 2) un diagnostic rapide [9] ;
Le diagnostic de déficit en GH est facile à faire chez un enfant • le gain de taille obtenu avec des doses standards de GH chez les
qui a un ralentissement de sa vitesse de croissance staturale après patients ayant un déficit transitoire en GH est médiocre, infé-
une lésion ou une irradiation de la région hypothalamohypophy- rieur à celui obtenu chez ceux ayant un déficit permanent [10] ;
saire. La lésion la plus fréquente est le craniopharyngiome. En • le traitement par GH est astreignant et coûteux ;
l’absence de lésion ou d’irradiation, le diagnostic de déficit en GH • il y a une interrogation sur le risque à long terme à augmenter
est difficile. Cependant, ce diagnostic reste important à faire mal- au-dessus de la norme les facteurs de croissance.
gré l’augmentation de la disponibilité en GH, et ce pour les raisons La mesure du taux sanguin de GH n’est pas informative. Le
suivantes : diagnostic de déficit en GH est fait sur l’insuffisance ou l’absence
• il y a une urgence thérapeutique en cas d’hypoglycémie surtout d’augmentation des taux plasmatiques de GH en réponse à une
chez le nouveau-né [9] , de déficits associés (en cortisol ou en stimulation. Les stimuli les plus couramment employés sont
thyroxine), ou si le déficit en GH révèle une tumeur ; l’arginine, le glucagon et l’hypoglycémie insulinique contrôlée.
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- 5. Conduite pratique devant une anomalie de la croissance 8-0595
TC
S2 R1
T4
T4L = 1 ml/l
TSH = 800mm/l
T4
A B
Figure 3. Courbes de croissance staturale et pondérale d’une fille vue pour retard de croissance (A). Ralentissement majeur de la vitesse de croissance à partir
de l’âge de 5,5 ans, contrastant avec une prise pondérale majeure comme le montre la courbe d’indice de corpulence (B). Ceci est dû à une hypothyroïdie
par thyroïdite. Le traitement substitutif par la thyroxine (T4 ) a permis un rattrapage statural et la normalisation de l’indice de corpulence.
On parle de déficit en GH lorsque le pic de GH sous stimula- petite et tige pituitaire interrompue [11] . Cet aspect apporte une
tion est inférieur à 20 mU/l ou 10 ng/ml (= g/l). Il est nécessaire confirmation anatomique au diagnostic de déficit permanent
de confirmer le déficit par une deuxième évaluation de la sécré- en GH.
tion de GH. En effet, un certain nombre d’enfants ayant une
capacité normale à sécréter de la GH ne répondent pas à une Hypothyroïdie (Fig. 3)
première, voire à une deuxième stimulation. Cela est particuliè- La spécificité de l’effet des hormones thyroïdiennes chez
rement le cas des enfants qui ont un surpoids et des garcons qui
¸ l’enfant, par rapport à l’adulte, est qu’elles sont néces-
sont âgés de 10 à 13 ans ou qui ont un retard pubertaire (RP). saires au développement du système nerveux durant les
Ainsi, 30 % à 80 % des déficits idiopathiques en GH diagnosti- 2 premières années de vie et à la croissance. L’hypothyroïdie
qués dans l’enfance ont un pic de GH normal à l’âge adulte. Le peut être d’origine centrale (hypothalamohypophysaire) ou
taux d’IGF1 est effondré en cas de déficit idiopathique en GH périphérique (thyroïdienne), congénitale ou acquise. Le taux
et constitue un excellent marqueur du diagnostic. La recherche plasmatique de thyroid stimulating hormone (TSH) est normal
d’un déficit en GH se fera probablement dans l’avenir par la ou bas dans les formes centrales et augmenté dans les formes
mesure de la concentration plasmatique d’IGF1, suivie d’une périphériques.
IRM, la place des tests de stimulation de la sécrétion de GH Le pronostic de l’hypothyroïdie congénitale périphérique a été
devenant plus limitée. En effet, l’IRM de la région hypotha- transformé par le dépistage néonatal systématique, celui-ci est fait
lamohypophysaire montre chez plus de la moitié des patients sur le taux de TSH mesuré sur le papier « Guthrie » ; ce taux est
qui ont un déficit permanent « idiopathique » en GH un aspect augmenté. Le dépistage systématique permet, en France, de traiter
dit d’interruption de la tige pituitaire dont les composantes les enfants avant le 10e jour de vie. Cependant, il ne permet pas
sont les suivantes : posthypophyse ectopique, antéhypophyse de dépister l’hypothyroïdie congénitale d’origine centrale.
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- 6. 8-0595 Conduite pratique devant une anomalie de la croissance
Tableau 5. La conduite du diagnostic se fait en quatre étapes.
Syndrome de Turner : circonstances de diagnostic (1/2 500 nouveau-nés S’agit-il d’une absence de puberté ou y a-t-il des signes de
de sexe féminin). démarrage pubertaire ? Le plus souvent à la première consul-
Caryotype demandé pour tation pour RP, il y a un développement des seins chez la fille
ou une augmentation du volume des testicules chez le garcon. ¸
In utero Âge avancé de la mère Ceci indique que l’axe hypothalamo-hypophyso-gonadique est
Antécédents de pathologie obstétricale probablement normal. Le développement de la pilosité sexuelle
Anomalies à l’échographie fœtale (croissance, cou, est moins informatif car il est en partie dû à l’augmentation des
cœur) androgènes surrénaliens.
En période Lymphœdème des extrémités S’agit-il d’un RP pathologique ou simple ? Chez le garcon, ¸
néonatale il s’agit dans 80 % des cas d’un RP simple. Les éléments en faveur
Dans l’enfance Petite taille de ce diagnostic sont : l’existence de RP dans la famille, l’absence
Particularités morphologiques de signe fonctionnel, une prise de poids et un examen clinique
À l’âge pubertaire Absence de développement des seins normaux et la présence de signes de début de puberté. Quelques
Aménorrhée primaire examens complémentaires peuvent être nécessaires car le diag-
nostic de RP simple est un diagnostic d’élimination. Chez la fille,
À l’âge adulte Stérilité
il s’agit dans 70 % des cas d’un RP pathologique, en particulier dû
À tout âge Cardiopathie à un syndrome de Turner.
En cas de RP pathologique, est-il d’origine hypothalamo-
hypophysaire ou gonadique ? Chez le garcon, des antécédents
¸
L’hypothyroïdie acquise est le plus souvent due à une thyroï- d’ectopie testiculaire et de micropénis sont en faveur d’un déficit
dite. Le ralentissement de la vitesse de croissance staturale est le congénital en gonadotrophines.
plus souvent associé à une prise pondérale excessive et à d’autres Le taux plasmatique de FSH est normal ou bas dans les ano-
signes cliniques d’hypothyroïdie (constipation, diminution des malies hypothalamohypophysaires et dans le RP simple. Il est
performances scolaires et goitre en cas de thyroïdite). Le diag- au contraire augmenté (> 9 UI/l) dans les anomalies gonadiques.
nostic d’hypothyroïdie est fait sur le taux bas de thyroxine (T4 ) Cependant, cette augmentation n’apparaît que lorsque l’âge
plasmatique. Le dosage de T3 , forme active de la T4 , n’est pas infor- osseux a dépassé 11 à 12 ans chez la fille et 13 à 14 ans chez
matif chez l’enfant. Le diagnostic de thyroïdite est fait sur le taux le garcon. Si le taux plasmatique de FSH est normal ou bas, la
¸
élevé d’anticorps antithyroïdiens (antiperoxydase, antimicroso- réponse des gonadotrophines (FSH et luteinising hormone [LH]) à
miaux). l’injection de luteinizing hormone-releasing hormone (LHRH, test)
Syndrome de Turner est typiquement discriminante : en cas de déficit en gonadotro-
Sa prévalence est de 1/2 500 nouveau-nés de sexe féminin phines, leurs taux n’augmentent pas ; en cas de RP simple, ils
(Tableau 5). Il résulte d’une absence partielle ou complète d’un augmentent.
chromosome X. Les deux signes majeurs sont une petite taille et La petite taille est-elle due uniquement au RP ? En cas
une dysgénésie gonadique [12, 13] . de RP, l’accélération de la vitesse de croissance est retardée, ce
La taille adulte moyenne des filles qui ont un syndrome de Tur- qui induit un changement de couloir de croissance (Fig. 4).
ner est de 143 cm. La dysgénésie gonadique est responsable de Cela pose la question de ne pas méconnaître une pathologie
l’absence de développement spontané de la puberté (80 % des cas) qui serait responsable du RP et du changement de couloir de
et de la stérilité. Cependant, des grossesses sont possibles dans 2 % croissance.
des cas. Les autres signes sont inconstants : Excès de corticostéroïdes
• particularités morphologiques dont la plus fréquente est le cou Il peut être iatrogène ou d’origine endogène. Le syndrome de
court, voire palmé (pterygium colli), avec implantation basse Cushing est caractérisé par une hypersécrétion de cortisol. Il est
des cheveux ; rare chez l’enfant. Les principaux signes sont : ralentissement
• malformations cardiaques (en particulier coarctation de l’aorte) de la vitesse de croissance staturale, prise pondérale excessive,
et rénales (rein en « fer à cheval ») ; douleurs dorsales secondaires à l’ostéoporose et vergetures. Le
• otites fréquentes, déficit de l’audition. diagnostic d’hypercorticisme est suspecté sur l’augmentation de
Les anomalies thyroïdiennes (thyroïdite) ou de la tolérance la cortisolurie des 24 heures. Par ailleurs, l’administration prolon-
glucidique (diabète sucré) sont plus fréquentes chez les filles gée de doses pharmacologiques de corticoïdes ralentit la vitesse
ayant un syndrome de Turner que dans la population générale. de croissance staturale. L’arrêt du traitement n’est pas toujours
L’intelligence et l’adaptation à la vie d’adulte sont le plus souvent suivi d’un rattrapage statural. Afin de limiter l’effet des corticoïdes
normales. sur la croissance, il est souhaitable de réduire la dose au mini-
Parmi les anomalies observées dans le syndrome de Turner, mum nécessaire ; ceci est aussi valable pour les formes inhalées ou
celles qui constituent réellement un problème sont la petite taille cutanées.
et la stérilité. Étant donné que la sécrétion de GH est normale,
l’efficacité du traitement par GH à augmenter la taille adulte Autres causes
est variable et ses facteurs ne sont pas connus (gain moyen
autour de 7 cm). Le traitement substitutif par estrogènes, puis Retard de croissance à début intra-utérin
par estroprogestatifs, permet une croissance pubertaire normale, Il est défini par un poids et/ou une taille de naissance inférieurs
un développement des seins, puis la survenue de menstruations. à –2 DS pour l’âge gestationnel, calculé en semaines à partir de
Les modalités de ce traitement sont bien codifiées. Les parents la date de survenue des dernières règles [14] . Contrairement aux
ont besoin d’entendre que les organes génitaux sont normaux, prématurés ayant un poids de naissance normal pour leur âge
permettant une vie sexuelle normale et que le développement gestationnel qui ont le plus souvent un rattrapage statural, envi-
pubertaire se fera normalement spontanément ou grâce à un ron 20 % des enfants qui ont un retard de croissance intra-utérin
traitement. Le don d’ovocytes pour fécondation in vitro peut per- (RCIU) n’ont pas de rattrapage statural. Celui-ci, lorsqu’il a lieu,
mettre des grossesses. se produit tôt, en règle générale avant l’âge de 1 an. Le RCIU
Retard pubertaire est la cause de 10 % des petites tailles. Le traitement par GH est
possible lorsque la taille reste inférieure à −3 DS après l’âge de
Le RP est défini par l’absence de développement des carac-
4 ans.
tères sexuels au-delà de l’âge de 13 ans chez la fille [12, 13] et de
14 ans chez le garcon. On distingue le RP pathologique du RP
¸ Retard de croissance par trouble psycho-socio-affectif
non pathologique ou simple, c’est-à-dire suivi d’un développe- Les difficultés relationnelles avec l’entourage sont souvent
ment pubertaire spontané complet. Le RP pathologique peut être difficiles à mettre en évidence. Le critère de diagnostic est
d’origine centrale (hypothalamohypophysaire) ou périphérique l’accélération de croissance lorsque le patient est totalement
(gonadique). séparé de son milieu familial.
6 EMC - Traité de Médecine Akos
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- 7. Conduite pratique devant une anomalie de la croissance 8-0595
Nutrition, sport
Les enfants ayant une petite taille constitutionnelle ou un RP
simple sont souvent maigres. Leur taux d’IGF1 sont corrélés avec
leur indice de corpulence et leur vitesse de croissance. Ces don-
nées suggèrent qu’une optimisation de leur apport alimentaire
pourrait augmenter leur potentiel de croissance. Ceci est d’autant
plus important qu’il n’y a actuellement pas de traitement dont
l’efficacité à augmenter la taille adulte ait été démontrée.
La pratique intensive du sport (plus de 10 heures par semaine)
peut être responsable d’un retard de croissance ou de puberté, ou
d’une insuffisance de progression de la puberté. Le sport intervient
alors par plusieurs facteurs : mécaniques, stress, mais surtout insuf-
fisance d’apport calorique par comparaison avec l’effort fourni.
Des conseils diététiques adaptés peuvent optimiser la croissance
et le développement de la puberté.
P2
Traitement
Il dépend de l’étiologie de la petite taille. Les règles du traite-
ment par GH sont détaillées dans le Journal officiel. Le traitement
par GH est pris en charge par la caisse primaire d’assurance mala-
die si la petite taille est due à un déficit en GH, à un syndrome de
Turner, à une insuffisance rénale chronique ou à un RCIU.
Dans l’hypothyroïdie, le traitement substitutif permet le rattra-
page statural.
Lorsque le RP est secondaire à une anomalie de l’axe
hypothalamo-hypophyso-gonadique, il est une indication à un
traitement substitutif. Le traitement est débuté vers l’âge de
12 ans chez la fille et 13 ans chez le garcon, en tenant compte
¸
de la demande de l’adolescent. Les objectifs de ce traitement
sont d’induire un gain statural pubertaire, un développement des
caractères sexuels secondaires, puis une activité sexuelle adulte
normaux, puis si possible une fertilité. Dans le RP simple du
garcon, la petite taille et l’absence de développement des carac-
¸
tères sexuels sont souvent mal tolérés sur le plan psychologique
après l’âge de 15 ans. Ceci est encore plus marqué lorsque le RP
survient chez un garcon qui a une petite taille constitutionnelle. Il
¸
a été montré que, à condition d’être utilisé selon un schéma défini,
le traitement par la testostérone n’induit pas de progression exces-
sive de la maturation osseuse et donc pas de réduction de la taille
adulte.
Un apport nutritionnel, en particulier de laitages, et un apport
de vitamine D (100 000 unités par voie orale, tous les 3 mois,
environ 4 à 6 fois au total) sont nécessaires durant la croissance
pubertaire.
Figure 4. Courbes de croissance staturale et pondérale d’un garcon ¸
Grande taille et/ou vitesse
vu pour retard de croissance. Le changement de couloir de croissance de croissance supérieure
staturale entre 11,9 et 15 ans est dû à une non-accélération par absence
de puberté. L’évolution pondérale est normale. La survenue d’une puberté à la norme
(P2) a permis un rattrapage statural.
La grande taille est définie par un niveau de taille au-dessus de
+2 DS, soit 174 cm chez la fille et 187 cm chez le garcon. Une accé-
¸
L’anorexie mentale se voit le plus souvent chez les filles, après lération de la vitesse de croissance, qui conduit à un changement
le début de leur puberté. L’amaigrissement et l’aménorrhée sont de couloir de croissance, doit faire rechercher une pathologie, et
alors au premier plan. ce quel que soit le niveau de taille.
À côté de ces deux situations où les difficultés psychoaffectives Un enfant vu pour grande taille conduit à se poser les questions
ont un rôle majeur dans le déficit statural, il y a des situations suivantes (Tableau 6) : quelle est la cause de la grande taille ? En cas
où l’environnement a un rôle moins net. Il agit par réduction de de grande taille constitutionnelle, quelle sera la taille adulte et y
l’apport nutritionnel, difficultés sociales familiales et/ou difficul- a-t-il une indication à un traitement pour réduire la taille adulte et,
tés psychologiques. dans ce cas, quels sont l’efficacité et les risques d’effets secondaires
de ce traitement. Il est en règle facile de trouver l’étiologie de la
grande taille. En revanche, la capacité des traitements à réduire
Autres la taille adulte et le risque de leurs effets secondaires sont mal
Un certain nombre de syndromes s’accompagnent d’un déficit précisés.
statural associé à des anomalies morphologiques et souvent à un
RCIU (syndromes de Noonan, de Silver-Russell, etc.).
Certaines pathologies peuvent s’exprimer par un déficit statural Quelle est la cause de la grande taille ?
isolé : maladie cœliaque recherchée par le dosage du taux plas-
matique des anticorps antitransglutaminases, maladie de Crohn Grande taille constitutionnelle
par la mesure de la vitesse de sédimentation, néphropathie par la Elle est aussi appelée génétique, essentielle ou familiale (> 90 %
mesure de la créatinine et la recherche de protéinurie. des cas). Les éléments en faveur du diagnostic de grande taille
EMC - Traité de Médecine Akos 7
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- 8. 8-0595 Conduite pratique devant une anomalie de la croissance
Tableau 6. Le syndrome de Marfan comporte des anomalies cardiovascu-
Conduite du diagnostic devant un enfant de grande taille. laires et une luxation du cristallin.
Questions Le syndrome de Wiedeman-Beckwith comporte un hyperinsu-
linisme ; il se manifeste souvent par des hypoglycémies néona-
Quelle est la cause de la grande taille ?
tales.
En cas de grande taille constitutionnelle :
- quelle sera la taille adulte ?
- y a-t-il une indication à un traitement et quels sont l’efficacité et les Taille adulte
risques de celui-ci ?
Informations nécessaires La taille adulte peut être prédite dès 7-8 ans à partir de la taille
réelle de l’enfant et de son âge osseux (cf. supra).
Tailles et âges pubertaires des parents et de la fratrie
Développement psychomoteur
Courbes de croissance de la taille et du périmètre crânien Indications et moyens thérapeutiques
Examen clinique
Il semble que le niveau de taille adulte au-dessus duquel
Morphologie surviennent les difficultés psychologiques se situe autour de
Fréquence cardiaque et tension artérielle
180 cm chez la fille et de 195 cm chez le garcon. Les difficul-
¸
Développement des caractères sexuels
tés d’indications thérapeutiques viennent d’abord du fait que
lorsqu’on fait une prédiction de taille adulte à l’âge de 11 ans
chez une fille, la marge d’erreur est de 5 cm. Or ceci repré-
sente la réduction moyenne de taille obtenue avec les stéroïdes
constitutionnelle sont l’existence de grandes tailles dans la famille sexuels.
et l’absence d’anomalie à l’examen clinique : absence de dysmor- Nous n’abordons pas les réductions de taille par les moyens
phie, de retard psychomoteur, de macrocrânie, de tachycardie, chirurgicaux car leur indication est actuellement exceptionnelle
d’hypertension artérielle et de développement prématuré des et leur efficacité non encore analysée. Les produits utilisés sont
caractères sexuels. la somatostatine (freinateur de la sécrétion de GH) et les sté-
roïdes sexuels. L’utilisation de ces derniers vient de l’observation
Grande taille par pathologie endocrinienne que dans les pubertés précoces, la sécrétion prématurée de sté-
roïdes sexuels accélère la maturation osseuse, ce qui induit une
La grande taille s’accompagne le plus souvent d’une vitesse de
réduction de la durée de la croissance. Le traitement consiste
croissance supérieure à la norme pour l’âge, d’une avance de l’âge
soit à déclencher la puberté plus tôt, soit à accélérer la pro-
osseux et d’anomalies à l’examen clinique. Le traitement spéci-
gression de la puberté et donc de la maturation osseuse. Les
fique de cette pathologie normalise la vitesse de croissance.
produits utilisés sont les estroprogestatifs chez les filles et la
Hyperthyroïdie testostérone chez le garcon. Les doses utilisées sont de niveau
¸
L’accélération de la vitesse de croissance est due à substitutif ou élevées. Du fait du risque non évalué de ces trai-
l’augmentation de la sécrétion d’hormones thyroïdiennes. tements dans le jeune âge, il nous semble que leur utilisation
L’hyperthyroïdie est le plus souvent due à une maladie de doit être réservée aux enfants qui ont une prédiction de taille
Basedow. Les anticorps dirigés contre le récepteur de la TSH adulte très grande et mal supportée sur le plan psychologique.
stimulent la synthèse d’hormones thyroïdiennes. Ceci est res- Leur prescription doit être limitée aux médecins habitués à
ponsable de tachycardie, d’hypertension artérielle et d’un goître. le faire.
Les taux plasmatiques sont augmentés pour T4 et diminués
pour TSH. L’échographie permet de vérifier le caractère assez
homogène du goître et d’exclure un nodule ; dans ces cas, la Références
scintigraphie n’est pas indiquée. Les antithyroïdiens sont en règle
efficaces. [1] Rolland-Cachera MF, Cole TJ, Sempé M, Tichet J, Rossignol C, Char-
Puberté précoce raud A. Body mass index variations: centiles from birth to 87 years.
Eur J Clin Nutr 1991;45:13–21.
La puberté précoce est définie par le développement des carac- [2] Sempé M, Pédron G, Roy-Pernot MP. Auxologie méthode et séquences.
tères sexuels avant l’âge de 8 ans chez la fille et de 9-10 ans Paris: Laboratoires Théraplix; 1979.
chez le garcon [13, 15] . L’accélération de la vitesse de croissance
¸ [3] Brauner R. Puberté normale. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris),
est due à la sécrétion prématurée ou anormale d’estrogènes ou Pédiatrie, 4-002-F-65, 2006.
d’androgènes. Cette sécrétion peut être d’origine centrale (sti- [4] Marshall WA, Tanner JM. Variations in the pattern of pubertal changes
mulation hypothalamo-hypophyso-gonadique) ou périphérique in girls. Arch Dis Child 1969;44:291–303.
(surrénalienne ou gonadique). Dans la puberté précoce centrale [5] Marshall WA, Tanner JM. Variations in the pattern of pubertal changes
des filles, comme dans la puberté normale, l’accélération de la in boys. Arch Dis Child 1970;45:13–23.
vitesse de croissance précède le développement des seins dans [6] Greulich WW, Pyle SI. Radiographic atlas of skeletal development
environ un tiers des cas. La présence d’un développement des of the hand and the wrist. Stanford: Stanford University Press;
seins chez la fille ou d’une augmentation des dimensions des 1959.
testicules chez le garcon sont en faveur d’une origine centrale.
¸ [7] Bayley N, Pinneau SR. Tables for predicting adult height from skeletal
age: revised for use with the Greulich-Pyle hand standards. J Pediatr
Hypersécrétion d’hormone de croissance 1952;40:423–41.
Elle est exceptionnelle chez l’enfant. Elle est due à un adénome [8] Gascoin-Lachambre G, Brauner R, Duche L, Chalumeau M. Pituitary
de l’hypophyse. Les taux plasmatiques de GH et d’IGFI sont aug- stalk interruption syndrome: diagnostic delay and sensitivity of the
mentés. auxological criteria of the Growth Hormone Research Society. PLoS
One 2011;6:e16367.
Grande taille par pathologie non endocrinienne [9] Brauner R. Problèmes endocriniens et anomalies des organes
génitaux. Pediatr Prat Matern Med Ther Pediatr 2006;(n◦ 5-6):
La grande taille fait partie d’un syndrome malformatif. 367-73.
Le syndrome de Klinefelter survient chez un nouveau-né garcon
¸ [10] Louvel M, Marcu M, Trivin C, Souberbielle JC, Brauner R. Diag-
sur 1 000. Il associe de manière constante 1 à 3 chromosomes nosis of growth hormone (GH) deficiency: comparison of pituitary
X supplémentaires et une insuffisance de la spermatogenèse. La stalk interruption syndrome and transient GH deficiency. BMC Pediatr
taille finale est en moyenne 7 cm au-dessus de la taille cible. 2009;9:29.
Le syndrome de Sotos ou gigantisme cérébral associe de grandes [11] Argyropoulou M, Pérignon F, Brauner R, Brunelle F. Magnetic reso-
mensurations à la naissance, une macrocrânie avec dysmorphie et nance imaging in the diagnosis of growth hormone deficiency. J Pediatr
un retard psychomoteur. 1992;120:886–91.
8 EMC - Traité de Médecine Akos
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- 9. Conduite pratique devant une anomalie de la croissance 8-0595
[12] Brauner R. Retard pubertaire. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), [14] Leroy B, Lefort F. À propos du poids et de la taille des nouveau-nés à
Gynécologie, 801-A-50, 2007. la naissance. Rev Fr Gynecol 1971;66:391–6.
[13] Brauner R. Puberté pathologique. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), [15] Prété G, Couto-Silva AC, Trivin C, Brauner R. Idiopathic central pre-
Pédiatrie, 4-107-B-15, 2006. cocious puberty in girls: presentation factors. BMC Pediatr 2008;8:27.
R. Brauner, Professeur des Universités, praticien hospitalier.
Université Paris Descartes et Unité d’endocrinologie et troubles de la croissance, Fondation Ophtalmologique Adolphe de Rothschild, 25-29, rue Manin,
75940 Paris cedex 19, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Brauner R. Conduite pratique devant une anomalie de la croissance. EMC - Traité de Médecine Akos
2012;7(3):1-9 [Article 8-0595].
Disponibles sur www.em-consulte.com
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- 10. Cet article comporte également le contenu multimédia suivant, accessible en ligne sur em-consulte.com et
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