Chapitre 7 : Les processus de
socialisation et la construction des
identités sociales
« L’Homme est une créature d’habitudes,
non de raison ou d’instinct. »
John Dewey, cité par Bronislaw Malinowski dans « la
sexualité et sa répression dans les sociétés primitives »
A) Comment devient-on un être social ?
1) Qu’est-ce que la socialisation ?
Document 2 page 192 : la fabrication sociale de l’individu ?
1) Culture: façons de faire,
de penser et d’agir qui
sont situées
socialement. Un
ensemble de normes et
de valeurs propres à un
groupe.
2) Déf n°1 : « façon
dont la société forme
et transforme les
individus »
Déf n°2 : « ensemble
des processus par
lesquels l’individu
intériorise des façons
de faire, de penser et
d’être», intériorise
une culture
3) Comment ? Par qui ? Quoi ?
Comment ?:
exemple/imitation/répétition ;
sanctions positives (approbation, récompenses) ou négatives (cris, rires, punition, mise à
l’écart…);
Interactions dans lesquelles chacun prend conscience des attentes sociales d’autrui et
même temps exprime des attentes à l’égard d’autrui.
Remarque : ne pas confondre « socialisation et éducation » : l’éducation est un processus
délibéré chez ceux qui le mette en œuvre, la socialisation est largement non consciente.
Par qui ?:
la famille,
les pairs (les égaux= les amis)
des institutions spécialisées (L’Ecole, l’Armée, L’Eglise…)
Quoi ?:
la culture : ensemble de normes et de valeurs propres à un groupe social.
Valeurs : principes ou idéaux qui orientent l’action des individus (Ex: Courage, respect,
impartialité, autonomie, …)
Normes sociales: règle ou modèle de conduite propre à un groupe et dont la non observance
entraînes des sanctions, formelles ou informelles (Se lever tôt le matin (courage ?), ne pas
insulter son prochain sans motif (respect), traiter tous les élèves de la même
façon(impartialité)
2) L’opposition inné/acquis ou opposition nature/culture
Doc A : l’adaptation à l’environnement
La notion de culture est inhérente à la réflexion des sciences sociales. Elle leur est nécessaire en quelque sorte pour
penser l'unité de l'humanité dans la diversité autrement qu'en termes biologiques. Elle semble fournir la réponse la
plus satisfaisante à la question de la différence entre les peuples, la réponse « raciale » apparaissant de plus en plus
discréditée au fur et à mesure des avancées de la génétique des populations humaines. L'homme est
essentiellement un être de culture. Le long processus d'hominisation, commencé il y a plus ou moins quinze millions
d'années, a consisté fondamentalement à passer d'une adaptation génétique à l'environnement naturel à une
adaptation culturelle. Au cours de cette évolution, qui a abouti à Homo sapiens sapiens, le premier homme, s'est
opérée une formidable régression des instincts, « remplacés » progressivement par la culture, c'est-à-dire par cette
adaptation imaginée et contrôlée par l'homme qui se révèle beaucoup plus fonctionnelle que l'adaptation généti-
que, car beaucoup plus souple et plus facilement et rapidement transmissible. La culture permet à l'homme non
seulement de s'adapter à son milieu, mais aussi d'adapter celui-ci à lui-même, à ses besoins et à ses projets,
autrement dit, la culture rend possible la transformation de la nature. Si toutes les populations humaines possèdent
le même stock génétique, elles se différencient par leurs choix culturels, chacune inventant des solutions originales
aux problèmes qui se posent à elle.
Denys Cuche, la notion de culture dans les sciences sociales, La découverte 1996.
1) Quelles différence peut-on faire entre adaptation génétique et adaptation culturelle à
l’environnement ?
Adaptation génétique s’opère par mutation génétique, sélection sexuelle et sélection naturelle. Elle est
très lente et elle implique une transformation des espèces. Elle est très lente.
Adaptation culturelle s’opère par transmission de solutions efficaces. Elle est très rapide, mais elle
implique une régression des instincts et une longue période d’apprentissage à l’échelle des individus.
1. Pour C. Lévi-Strauss, la prohibition de l'inceste est-elle naturelle ou culturelle ?
2. Qu'est-ce qui expliquerait la prohibition de l'inceste ?
3. En quoi ce texte met-il en évidence l’intérêt de l’ethnologie ?
Culturelle: il s’agit d’une règle certes présent dans toutes les sociétés…
mais qui s’explique par les besoins de la société.
Tabou de l’inceste serait à l’origine une obligation de trouver un partenaire hors de la
famille pour tisser des liens avec d’autres familles et avoir davantage de gens sur qui
compter… Le respect de cette obligation favoriserait le développement de liens
coopératifs entre toutes les familles… et donnerait naissance à la société (c’est la règle
d’or de la société).
Culturelle: il s’agit d’une règle certes présent dans toutes les sociétés…
mais qui s’explique par les besoins de la société.
B) Les acteurs de la socialisation : entre concurrence et coopération :
Doc 1 page 194
1) Les attentes des différents acteurs ont tendance à se renforcer ce qui les rend
naturelles/ évidentes
Doc 4 page 195 : Concurrence ou coopération entre famille et Ecole?
Pas le temps, à faire à la maison pour Lundi 26/03
2) Habillement, loisirs, horaires de sorties…
1. Le père ne semble pas aimer le choix de sa
fille de poursuivre des études supérieures
qui ne mènent pas à un métier
manuel mais, dans le même temps, il finance
les études de sa fille, ce qui peut sembler
paradoxal.
2. L’auteure est partagée entre les normes et
valeurs de sa famille, valorisant le travail
manuel et dévalorisant la poursuite
d’études, et son goût pour la poursuite
d’études, les livres. Les valeurs portées par la
famille sont donc opposées à celles
véhiculées par l’école, ce qui place Anaïs
Mottet dans une situation inconfortable
3) Les valeurs de l’école et de la famille sont plus souvent similaires qu’opposées. Ainsi, la réussite
scolaire est le plus souvent valorisée par les familles. Les parents encouragent et valorisent la réussite
scolaire. Ils peuvent ainsi, par exemple, donner des récompenses pour des notes ou appréciations
favorables et sanctionner leurs enfants en cas de mauvais résultats.
Par ailleurs, les normes et les valeurs de la famille peuvent rejoindre celles de l’école. Par exemple,
des parents peuvent encourager leurs enfants à lire, à se rendre au musée, à faire du
sport, renforçant ainsi des attentes scolaires.
Page 195
C) La socialisation différentielle
1) Un stéréotype est une idée toute faite, une idée préconçue. C’est un cliché. L’illustration
dénonce le cliché selon lequel les femmes ne peuvent voyager sans emporter de multiples
bagages, qu’elles seraient incapables de choisir efficacement, rationnellement, qu’elles
seraient victimes de leurs coquetterie, ne mesureraient pas les contraintes en termes
d’argent… plus matérialistes?
2) Autre stéréotypes: femmes conduisent mal, n’aiment pas le foot, sont bavardes,
pleurent facilement… Pleurent facilement?
Compilation des réponses des élèves
Raisons Score total de la raison pour le groupe
à qui on a dit que c’était une fille
Score total de la raison pour le groupe à
qui on a dit que c’était une fille
La colère
La tristesse
La peur
Un caprice
Boris Cyrulnik est neurologue, psychiatre, mais aussi enseignant en éthologie*. Une [de ses]
expérience[s] consistait à projeter à deux groupes distincts d'étudiants un petit film montrant un bébé de
neuf mois en larmes et à les questionner sur l'origine de ce chagrin: colère, selon les étudiants à qui on
avait dit que le bébé était un petit homme ; peur, pour l'autre groupe à qui on avait certifié que le
nourrisson était une fille. D'autres chercheurs encore ont observé que les garçons étaient davantage
stimulés sur le plan moteur, manipulés avec plus de vigueur. Les pères, notamment, adorent faire sauter
en l'air leur petit garçon et jouent plus délicatement avec leurs filles. Ainsi s'amorce, en fonction du sexe
de l'enfant, un jeu d'attentes et de présupposés. Il ne s'arrêtera plus.
Source : « Comment on élève les filles », Le Point, 31 décembre 1992.
Doc Power point: Construction de la personnalité de l’enfant
Les parents socialisent différemment les garçons et les filles, bien qu’ils n’en aient pas
toujours conscience.
1. Les parents peuvent habiller leurs filles en rose ou en robe,
offrir des établis ou garages à leurs fils tandis qu’ils privilégient
les poupées et dînettes pour les filles. Les adultes ont tendance
à encourager le développement moteur des garçons et plutôt
les capacités langagières des filles. Les compliments sont aussi
différents pour les filles et les garçons, les adultes
encourageants plus souvent les filles à être sages et jolies,
tandis qu’ils valorisent les garçons costauds et contenant leurs
émotions.
2. Les enfants intériorisent le rôle social lié à leur genre grâce
aux encouragements ou au contraire réprobations de leur
entourage. Ils l’intériorisent aussi par imitation, en observant
les comportements des adultes et des pairs. C’est ainsi que
les enfants délaissent progressivement les attitudes,
comportements et jeux qui ne sont pas associés à leur genre.
3) Les différents agents de socialisation développent une action de socialisation différente pour
les filles et les garçons. Dès lors, ils contribuent à la construction de comportements, de goûts, de
manières de faire et de penser différents pour les filles et les garçons. Ces différences, construites
et acquises très tôt, sont alors perçues comme naturelles, innées. La socialisation sexuée crée
ainsi des différences mais participe aussi à la reproduction des inégalités hommes/femmes.
http://fr.slideshare.net/AuchanFacebook/catalogue-jouets-auchan-2012
Site pour lutter contre le sexisme dans les catalogues de jouets
Catalogue King Jouet
Suite C) : analyser des inégalités sociales par la socialisation différentielle
Distinction entre : différences, inégalités, injustices.
1) Les filles sont sous-représentées dans les CPGE par rapport aux garçons car elles sont seulement 42% alors
qu’elles devraient être 50%. C’est surtout vrai dans les CPGE scientifiques qui conduisent aux meilleures écoles
d’ingénieurs (c’est bien une inégalité, car c’est un désavantage).
Plus le niveau de diplôme la mère est bas, plus le risque d’avoir redoublé depuis le CP est élevé… Le risque
d’avoir redoublé est environ 3 fois plus élevé que si la mère a un diplôme du supérieur. C’est bien un inégalité car
c’est un désavantage.
2) Stéréotypes: les filles n’aiment pas les sciences, n’aiment pas la compétition, elles aiment bien lire… elles n’ont pas
la bosse des maths… Les filles ont tendance à se conformer à ces stéréotypes, quand elles le font elles reçoivent des
signaux positifs (ou moins de signaux négatifs que si elles étaient des garçons: on se résigne plus à ne pas être bonne
en maths quand on est une fille). Le fait que certaines filles excellent en maths prouve que tout cela n’a rien de
naturel!
Le goût pour la lecture, la curiosité pour les questions étudiées en classe, la confiance
dans les professeurs et dans l’Ecole… ne sont pas naturelles (cf texte doc 4 page 195);
Le fait que le rôle de la mère et de son diplôme semble si important peut s’expliquer par
le fait que ce sont les mères qui s’occupent plus des enfants à la maison et qu’elles
suivent le plus régulièrement leurs devoirs que les pères.
D) De la socialisation de l’enfant à celle de l’adulte: rupture ou continuité?
1) Socialisation primaire= celle qui se déroule
pendant l’enfance, « en premier »
Primaire dans le sens aussi « plus forte » car
certaines normes et valeurs intériorisées depuis
l’enfance apparaissent tellement comme des
évidences qu’elles ne pourront pas être remises en
cause par la socialisation secondaire.
Socialisation secondaire: socialisation qui se poursuit
à l’âge adulte et qui permet une reconstruction des
identités.
Elle ne “crée” ni ne "produit” ex nihilo un individu
social mais doit faire avec, d’une manière ou d’une
autre, les produits antérieurement incorporés au
cours de la socialisation primaire qui ont fait de
l’individu ce qu’il est devenu à partir de rien.
Page 198
2) Jusqu’où peut aller la reconstruction? La socialisation primaire est-elle dépassable?
3) En quoi la socialisation conjugale peut-elle s’inscrire dans une logique de continuité
avec la socialisation primaire ?
4) En quoi la socialisation conjugale peut-elle s’inscrire dans une logique de rupture avec
la socialisation primaire ?
La socialisation primaire prépare la vie de couple (jouer au papa et à la maman, imprégnation des rôles dans le couple
par l’exemple donné par les parents; la littérature, les contes, le cinéma ou les séries fournissent des stéréotypes, des
« costumes tout faits dans lesquels les individus peuvent se glisser…
De plus, le choix du conjoint s’opère de façon plus ou moins consciente POUR vers un partenaire ayant eu une
socialisation primaire assez proche de la notre et qui est donc compatible sociologiquement.
En cas de forte homogamie, le renforcement de la socialisation primaire par la socialisation conjugale est d’autant plus
forte.
Contre ex: demander au groupe de Carla/Lou/Maja
Si au contraire les deux partenaires viennent de groupes sociaux très différents, la rupture avec certains stéréotypes
intériorisés pendant la socialisation primaire s’impose pour permettre le maintien de la relation.
De même, la survenue d’évènements auxquels la socialisation primaire n’avait pas bien préparé entraîne une invention
de nouveaux rôles (chômage, forte mobilité sociale, nouvel environnement géographique…)
Toutefois, cette rupture ne remet jamais totalement en cause certaines façons d’être, de penser ou d’agir…
1) Bienveillance, discrétion, autorité, confiance en soi et en son jugement…
Nouveaux rapports aux corps, aux contacts physiques, à la nudité: normal de toucher, de voir des
corps … sans dégoût ni désir… il faut « désérotiser » les corps… pour les soigner … A compléter…
2) L’intériorisation de ces nouvelles normes se fait lors de la socialisation secondaire, par imitation des
médecins que l’étudiant fréquente mais pas seulement. Le groupe de pairs des jeunes étudiants en
médecine, les professeurs, les médias… fournissent des représentations du rôle de médecin,
représentation qui servent de référence aux jeunes étudiants en médecine.
3) Des étudiants (groupe d’appartenance) intériorisent des normes et des valeurs du groupe des médecins
(groupe de référence) par anticipation, car ils souhaitent en faire partie.
Conclusion: rupture ou continuité?
Souvent continuité… même si à l’âge adulte on peut apprendre à jouer de nouveaux
rôles sociaux, bien souvent, la socialisation primaire avait préparé le terrain… Ex:
socialisation anticipatrice (étudiants en médecine, stagiaires d’écoles de commerce…).
Les fondements de la personnalité et les valeurs les mieux intériorisées ne sont jamais
totalement remis en cause (Ex: tabou de l’inceste, rapport à la propreté…)
MAIS
Les situations de mobilité sociale (à travers les études ou la vie conjugale) conduisent
l’individu à être confronté à des systèmes de valeurs différents du sien, ce qui implique
qu’il doit choisir, se reconstruire son identité.
Dans certains cas, la vie adulte est l’occasion d’apprentissage de rôles radicalement
nouveau, en rupture avec ceux joués précédemment par l’individu.