Plus de 7 millions d'utilisateurs sur Cousera en moins de 2 ans d'activité, 2.5 millions d'étudiants sur EdX...la révolution des MOOCS (Massive Open Online Courses), enseignement accessible à tous, est en cours. Et pourtant, un "business modèle" stable reste à inventer. Une note de synthèse de TLLX revenant sur les modes de financement actuels des MOOCS et les pistes de développement.
MOOConomie: comment financer le contenu de la révolution edtech ?
1. TLLX The Lifelong Learning Experience est une société de conseil, de recherche et d’investissement
pour compte propre. Informations : www.TLLX.info p. 1
Paris, le 29/06/2014
TLLX The Lifelong Learning Experience
Ce que nous savons ! Note de synthèse
MOOConomie : comment financer
le contenu de la révolution edtech ?
Les MOOC (pour Massive Online Open Courses) sont des cours en ligne ouverts à
tous. Le terme MOOC est né en 2008, mais l’accélération du phénomène date de 2012
et ce avec des volumes d’inscription dépassant toutes les prévisions. La plateforme
Coursera, leader en nombre d’étudiants, annonce ainsi 7 millions d’inscrits en avril
2014.
Le principe d’ouverture à tous a laissé entendre la gratuité des dits MOOCS. Est-ce
possible ? Quel modèle de financement pour ces formations destinées au plus grand
nombre ? Comment des entités à vocation clairement commerciale comptent-elles
offrir une rentabilité à leurs actionnaires ?
Les ressources initiales : comment financer des plateformes de MOOCS ?
Les trois dernières années ont vu un engouement inégalé de la part du monde du
capital risque pour ce qui, qu’on l’accepte ou non, s’appelait il y a peu la formation à
distance puis e-learning. Les principales plateformes de formation ont bénéficié de
tours de tables de tout premier plan. Prenons les chiffres publics des grands acteurs
américains :
Coursera (créé en avril 2012) a levé un total de 65 millions de dollars auprès de capital-
risqueurs
Harvard et MIT ont investi conjointement 60 millions de dollars dans la création d’edX
(créé en mai 2012).
Udacity (créé en juin 2011) a levé 23 millions de dollars auprès de capital-risqueurs
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Udemy, bien qu’il s’agisse d’une place de marché plus que d‘un pur provider de
MOOC, a obtenu 48 millions de dollars de capitaux-risqueurs.
Nous plaçons à part Khan Academy, qui a nettement agi comme catalyseur du
mouvement MOOC, financé principalement par des fondations (Bill and Melinda
Gates, Ann and John Doerr, O’Sullivan, Carlos Slim Foundation, Google…)
En France, la plateforme France Université Numérique prévue par loi du 22 juillet 2013
dispose d’un budget de 12 millions d’euros.
Toutes ces levées de fonds ont un but : financer des programmes dont le coût de
production est significatif.
Combien coûte la production d’un MOOC ?
Les chiffres annoncés sont extrêmement variables. Il faut dire que le qualificatif MOOC
concerne aussi des productions particulièrement médiocres, massivement présentes
en ligne, gratuites certes mais au contenu pédagogique de faible valeur. Un MOOC
n’est pas un professeur filmé…tous les professionnels du secteur le savent.
Les producteurs de MOOC connaissent la problématique de la réalisation d’un
programme. Il nécessite la présence de professeurs, d’ingénieurs pédagogiques, de
programmateurs, de designers et un travail en équipe en mode projet. La création d’un
environnement adapté, la production de ressources vidéo, la conception de tests et
d’animations ainsi que la mise en place d’une interactivité avec les élèves au travers
chats et forums sont autant de briques exigeant un travail de fond et consommant des
ressources financières significatives.
De fait, les informations que nous avons collectées en ligne et auprès de
concepteurs/producteurs placent la plage de coût de production entre 50 000 et
250000 dollars. Ne produit pas un MOOC crédible qui veut.
De la gratuité totale
Lorsqu’un programme d’ « undergraduate » américain coûte plus de 40 000 dollars
par an à l’élève, il est facile de considérer le MOOC comme opération promotionnelle
destinée à offrir une vitrine à l’Université. Il est toutefois aisé de comprendre que la
production d’un programme de MOOC de bon niveau rend rapidement la « note salée »
pour l’université. De fait, toutes les universités, même les plus prestigieuses, sont en
recherche de solutions pour générer du cash pour financer le développement de leur
MOOCS. Le temps du tout gratuit semble révolu.
Ces universités cherchent le juste équilibre entre l’envie de s’illustrer par la modernité
des MOOCS proposés et le risque cannibalisation de leurs programmes « vache à
lait ».
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La Harvard Business School refusait ainsi jusqu’à peu de lancer des MOOCS
contrairement à Virginia, Wharton ou Stanford, selon le principe : « nous faisons de la
classe inversée depuis 100 ans par le modèle de l’étude de cas ». HBS vient pourtant
de lancer le programme en ligne CORe( pour Credential Of Readiness) : la mise en
ligne de trois cours de business fondamentaux pour les undergraduates ou les jeunes
diplômés. Le programme sera facturé 1500 dollars.
Faire payer les certificats
La première source de « monétisation » utilisée par les plateformes de MOOCS a été
la facturation des certificats sanctionnant la réussite d’un programme. L’idée est d’offrir
le cours gratuitement mais de faire payer une attestation de réussite du programme
en ligne.
Coursera annonçait à mi 2013, après un an d’exercice, 1 million de dollars de CA
réalisés avec 25000 étudiants ayant terminé leur programme et payé leur certificat sur
4,7 millions d’inscrits.
Seuls 7% des élèves terminant un MOOC, le modèle du paiement du certificat peut
être challengé.
Faire payer les cours
Nous avons suivi l’excellent « how to build a startup » de Steve Blank sur Udacity en
février 2014 et bénéficié de la gratuité du cours et du certificat.
Udacity facture depuis avril 2014 ses certificats et une visite sur le site affiche
clairement un « business model » en plein pivot avec certaines ressources gratuites
mais une offre standard de formation facturée 149 dollars par mois.
Faire payer les universités et si le modèle ultime était iTunes ?
Le modèle proposé par edX génère une partie de son chiffre d’affaires au travers des
partenariats avec les universités.
Ainsi, edX propose deux solutions aux providers de cours :
Dans le premier cas, le chiffre d’affaires est répartit d’égal à égal entre le concepteur
du cours et la plateforme, edX percevant les 50000 premiers dollars de chiffre
d’affaires.
Dans le deuxième cas, edX offre une assistance de production et charge 250 000
dollars à l’université. L’université perçoit ensuite 70% des revenus générés.
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On retrouve ainsi un « business model » proche des plateformes musicales ou
d’applications.
Produire moins cher tout en restant efficace
En 2013 est apparu à l’Université de Berkeley le concept de SPOCS pour Small Private
Online Courses. Il s’agit de solutions impliquant directement les professeurs et dédiées
à un établissement. On parle alors de solutions « blended », qui intègrent formation
online et présentiel. Les résultats de ces expériences, encore récentes, sont
particulièrement encourageants. Elles confirment notre conviction première : les
MOOCS ne remplacent pas les professeurs, ils sont un outil de plus dans leur boîte à
outils pédagogiques.
La difficulté à tenir l’attention des élèves jusqu’à l’échéance des programmes tout en
maintenant les coûts a mené à la création de programmes courts appelés
MOOCLETS…le monde des MOOCS ne cesse déjà de se réinventer !
De la place pour la publicité ?
Les ressources publicitaires, rejetées souvent par les établissements universitaires
pour la « pollution visuelle » et le mélange des genres qu’elles supposent, présentent
un inconvénient majeur : concurrence des supports oblige, il faut un nombre de pages
vues particulièrement élevé pour générer un chiffre d’affaires significatif.
Ceci étant dit, les élèves des MOOCS ont deux qualités : on les trouve dans des
catégories de type CSP+ et ils sont particulièrement sensibles aux messages…des
grandes universités et organismes de formation. Des éléments qui pourraient
rapprocher annonceurs et producteurs de MOOCS.
Exploiter les données
La richesse des données en provenance des utilisateurs, parcours, réussite…laisse
envisager l’exploitation et la monétisation de données notamment auprès de
recruteurs.
Dans un monde dorénavant drivé par le « Big Data », comment ne pas avoir la
tentation de proposer à un recruteur les profils des meilleurs élèves réussissant
particulièrement brillamment leur parcours dans un MOOC de programmation par
exemple ?
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La formation professionnelle, la nouvelle frontière des MOOCS ?
Dans la presse abondante dorénavant consacrée aux MOOCS, les besoins des
entreprises sont très peu abordés.
Or les entreprises ont des budgets de formation très significatifs et ont ce besoin
d’apporter une formation continue à leurs collaborateurs, parfois dans des conditions
ou le présentiel est difficile à mettre en œuvre.
Coursera et Udacity ont clairement pris une orientation vers le monde des entreprises
avec des succès marqués dans le domaine de la programmation pour Udacity, et ce
auprès d’acteurs de premier plan comme Facebook ou Google.
Les entreprises peuvent aussi utiliser la vague des MOOCS pour séduire leurs clients,
Bank of America a ainsi développé un programme de formation à la finance
personnelle avec la Khan Academy. En France, le groupe Orange travaille
actuellement sur un projet de MOOCs destinés à ses clients.
Le domaine des possibles semble sans limites. Ainsi, la plateforme Udacity vient de
créer avec l’université Georgia Tech un programme diplômant dont les frais de
scolarité s’élèveront à 6600 USD par élève. Le programme est financé à hauteur de 2
millions de dollars par AT&T qui compte bien y trouver de futures recrues.
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Pour conclure : nous sommes au début d’une belle révolution
De l’aveu des praticiens que nous avons rencontrés, notamment lors de SXSWedu à
Austin en mars dernier (UT at Austin, Stanford, Northeastern University, Apollo
group…), aucun modèle économique durable n’est encore sorti du lot. Pour reprendre
une expression bien connue du monde des startups, le modèle doit encore savoir
pivoter.
Il est sûr qu’un contenu de qualité présente un coût significatif et que des
développements au budget inférieur à 50000 dollars ne sont pas crédibles.
Il convient aussi de réaffirmer que les MOOCS ne se substituerons pas aux
professeurs d’écoles, d’universités ou aux formateurs d’entreprises mais sont un outil
supplémentaire permettant d’accélérer la transmission des savoirs.
Les acteurs du monde francophone doivent réagir ! N’oublions pas que la pratique de
la langue française connait une très forte croissance notamment grâce à nos amis
africains. Un public jeune ayant soif (et droit) d’apprendre s’offre à nous !
La production de MOOCs francophone ne doit selon nous pas relever d’une offre
unique définie par l’Etat. Des partenariats public-privé, incluant le dynamisme des
startups et toute la qualité des ressources pédagogiques du monde de l’éducation sont
à inventer.
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Quant à la formation continue, elle a tout à gagner des atouts que présentent les
MOOCS, le meilleur y est encore à venir…
Nous sommes ravis de participer avec vous à cette révolution !
Stéphane Toullieux
Fondateur
TLLX The Lifelong Learning Experience
Qui sommes-nous ?
TLLX The Lifelong Learning Experience est une société de conseil, de recherche et
d’investissement pour compte propre. Stéphane Toullieux est co-fondateur de Madeve
Productions, éditeur du MOOC pour enfants Madeuxiemeecole.com. Il est actionnaire
de la plateforme Diplomeo.
Pour tout contact : stoullieux@tllx.info
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Le titre Mooconomie est librement inspiré et traduit du titre Mooconomics utilisé lors d’un atelier de SXSWedu 2014, en
présence d’intervenants d’UT Austin et Stanford.
Cet article a été rédigé à partir des meilleures sources en notre possession.
Articles et livres de référence :
New Coursera chief stresses the ‘wow’ factor of huge audience for free online courses - Washington post 23.06.2014
OnlineEducationStartupCourseraRaises$43MillionWSJ10.07.2013
Udacity Raises $15 Million as Money Pours into Online Education - Bloomberg25.10.2012
Lancée, France Université Numérique reste à financer, L’Usine Nouvelle 03.10.2013
UDACITY'S SEBASTIAN THRUN, GODFATHER OF FREE ONLINE EDUCATION, CHANGES COURSE FastCompany12.2013
Coursera hits $1M in revenue through verified certificates12.09.2013
How edX Plans to Earn, and Share, Revenue From Its Free Online Courses, Chronicle for higher education 21.02.2013
OnlineLearningMarketplaceUdemyRaises$32MToScaleUpInternationallyTechcrunch08.05.2014
HowMOOCsAreTrainingTomorrow'sWorkforce- Inc,3.09.2013
In conversation with: Sebastian Thrun, CEO, Udacity- Fortune 10.04.2014
The One World Schoolhouse : Education Reimagined, Salman Khan
Conférences et colloques récents: SXSWedu Austin Texas mars 2014- Frenc touch de l’education mai 2014 -Colloque
Education et Nouvelles technologies Université Paris Dauphine, EM Normandie, Medialab juin 2014
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