SlideShare una empresa de Scribd logo
1 de 3
Descargar para leer sin conexión
Cow-boys contre chemin de fer ou que savez-vous vraiment de lʼhistoire de lʼinformatique ?




Chapitre 11 - Naissance et de la croissance dʼInternet



(NDA : une partie de lʼhistoire ci-dessous a été assemblée à partir de nombreux extraits
collectés à http://www.volle.com/travaux/internet.htm et dʼautres origines puis modifiés
plus ou moins en profondeur)

Lʼhistoire de lʼInternet repose grandement, surtout dans ses premiers temps, sur les efforts
de la DARPA (qui sʼappelait dʼabord ARPA… En 1972, LʼARPA est renommée DARPA
pour Defense Advanced Research Projects Agency mais le nom ARPANET pour le réseau
est resté le même). Cʼest grâce à son financement que ce développement dʼun réseau hé-
térogène a pu être imaginé et voir le jour. Car, jusque-là, informatique et télécom vivait
chacun de son côté, presque en sʼignorant complètement. Bien entendu, les mainframes
étaient accédés par des terminaux (dʼabord de type télétype puis des écrans plus ou
moins programmables) dès le début des années soixante mais cʼétait à chaque fois dans
un contexte totalement propriétaire  : la liaison entre un ordinateur et ses terminaux était
spécifique à ce système et ne pouvait être utilisée avec dʼautres matériels. En clair, pas
question dʼutiliser le même terminal pour accéder à deux ordinateurs de constructeurs dif-
férents (et même, bien souvent, pour des systèmes dʼune même origine mais de gammes
différentes  !). Cette situation absurde aurait pu durer longtemps si Robert Taylor nʼavait
décidé dʼy mettre fin au début des années soixante.

En 1963, Bob Taylor rencontre Licklider, qui devint son mentor. Licklider avait écrit un arti-
cle fondateur en 1960, prévoyant de nouveaux moyens plus puissants pour utiliser les or-
dinateurs et lʼarticle a grandement influencé Taylor. Un second document, publié en 1968
par Licklider et Taylor, énonce lʼavenir de ce quʼInternet est en effet devenu. Intitulé "Lʼor-
dinateur comme dispositif de communication", il commence ainsi  : "Dans quelques an-
nées, les hommes seront capables de communiquer plus efficacement grâce à une ma-
chine quʼen face à face."… Prédiction qui sʼest avérée vraie dans bien des cas (à ceci
près que cela a pris quelques décennies et non quelques années) !

Le bureau de Robert Taylor à lʼIPTO (en 1962, lʼARPA créé en son sein lʼIPTO pour Infor-
mation Processing Techniques Office) était connecté via trois terminaux différents à des
ordinateurs situés à Boston, Berkeley et Santa Monica. Chaque terminal avait sa propre
procédure de connexion et ses propres commandes : lʼutilité dʼune rationalisation sautait
aux yeux. Par ailleurs, en lʼabsence dʼun réseau, chaque centre de recherche qui contrac-
tait avec lʼARPA devait acheter et exploiter son propre ordinateur. Il semblait souhaitable
de pouvoir partager les ressources dʼune même machine entre plusieurs centres.  Mais
comment faire, alors que chaque ordinateur utilisait un système dʼexploitation et des lan-
gages adaptés à ses caractéristiques physiques particulières et ne pouvait communiquer –
et encore, seulement en mode maître-esclave ! – quʼavec ses propres équipements péri-
phériques ?

Les applications communicantes, comme la messagerie (Les premiers systèmes de mes-
sagerie électronique ont vu le jour en 1965 et servaient de moyen de communication entre
utilisateurs dʼordinateurs à exploitation partagée. Lʼun de ces systèmes a été mis en place
au Massachusetts Institute of Technology), restaient limitées aux personnes qui utilisaient
un même système.  Il fallait adapter les ordinateurs à la communication entre égaux et
cʼétait donc un vaste chantier qui sʼouvrait pour les pionniers… Du côté de lʼIPTO, cʼest à
Lawrence Roberts quʼon confie le projet visant à créer un réseau permettant de faire
communiquer les ordinateurs de différentes origines.



                                                        Page 142 - Troisième partie : lʼère du réseau
Cow-boys contre chemin de fer ou que savez-vous vraiment de lʼhistoire de lʼinformatique ?

Une expérience avait été réalisée en 1965 par le psychologue Tom Marrill qui, sous lʼin-
fluence de Licklider, avait proposé à lʼARPA de faire communiquer via une liaison full-du-
plex à quatre fils deux ordinateurs de type différent situés lʼun à Lincoln, lʼautre à Santa
Monica. À cette occasion Marrill mit au point une procédure qui permet de grouper les ca-
ractères dans un message, de les envoyer sur la ligne, de vérifier si le message est arrivé,
enfin de le retransmettre sʼil nʼy a pas eu dʼaccusé de réception. Pour désigner cette pro-
cédure, il retint le mot "protocole". Mais comment faire communiquer non pas deux ordina-
teurs, mais un réseau de plusieurs ordinateurs ?

Sʼil fallait définir un protocole pour chaque couple dʼordinateurs, on serait vite confronté à
une complexité croissante. Cʼest pour faire face à ce "mur de la complexité" que Wes
Clark proposa de concevoir un petit ordinateur spécialisé, lʼIMP (Interface Message Pro-
cessor), qui seul serait directement connecté en réseau et interfacé avec chaque ordina-
teur  : le problème était ainsi ramené à un niveau de complexité linéaire. Le réseau des
IMP fut baptisé "sous-réseau" (subnetwork) pour le distinguer du réseau des ordinateurs
eux-mêmes. Restaient à régler les problèmes propres au sous-réseau : éviter quʼun même
paquet ne soit renvoyé sans fin dʼun IMP à lʼautre, éviter que des paquets ne soient per-
dus en raison du débordement dʼune mémoire (buffer) etc.

Le grand mérite des pionniers est dʼavoir fait confiance au principe de la commutation de
paquets alors que lʼorthodoxie en matière de télécoms reposait totalement sur la commu-
tation de circuits à cette époque (lʼaffrontement entre les deux principes allait se poursui-
vre encore longtemps…). Larry Roberts, ayant découvert les travaux de Davies et Baran à
une réunion de lʼACM à la fin de 1967, introduisit la commutation de paquets dans lʼappel
dʼoffres quʼil lança pour lʼIMP en juillet 1968.

La commutation de paquets, lʼinvention décisive

La commutation de paquets a été inventée séparément par Paul Baran, un américain,
(1926-) et Donald Davies (1924-2000), un Britannique.
Baran avait étudié la vulnérabilité du réseau à une attaque nucléaire, question cruciale
pour les militaires dans la période de guerre froide des années soixante. Il avait découvert
que lʼon pouvait obtenir une robustesse élevée avec un réseau maillé comportant une re-
dondance relativement faible (il faut relier chaque nœud au réseau par trois ou quatre
liens au lieu dʼun seul, et équiper chaque nœud dʼune table de routage adaptative). Les
travaux de Baran sont à lʼorigine de la réputation selon laquelle Internet aurait été conçu
pour répondre à des besoins militaires.

Tous les opérateurs de télécom en général et AT & T en particulier étaient hostiles aux
idées de Baran. Il faut se rappeler quʼà cette époque (début des années soixante) les
commutateurs du réseau téléphonique étaient électromécaniques, la commutation élec-
tronique ne devant intervenir que dans les années 70 ; le circuit établi entre deux interlo-
cuteurs avait donc une continuité et une réalité physiques en quelque sorte palpables. Les
ordinateurs relevaient dʼun autre univers technique que celui des télécoms. "Ils se compor-
taient comme sʼils savaient tout et que ceux qui nʼappartenaient pas au Bell System ne
savaient rien", dira Baran. "Quelquʼun dʼextérieur ne pouvait pas comprendre la complexité
de leur système. Et voilà quʼun idiot sʼamène : il ne comprend visiblement pas comment le
système fonctionne et il prétend que les choses sont simples  !" En dʼautres termes, un
cow-boy osait trouver une route différente et plus efficace que celle utilisée par les com-
pagnies de chemins de fer depuis des décennies !

Sans minimiser les apports de Baran et Davies, il faut aussi mentionner Leonard Klein-
rock, professeur à lʼUCLA, qui a fourni les bases théoriques pour les réseaux de paquets
en 1962. Il récidiva dans les années 1970, pour le routage hiérarchique, des concepts qui
ont été le fondement de lʼInternet tel quʼon le connaît aujourdʼhui. Dans lʼappel dʼoffres de
Larry Roberts, le sous-réseau devait transférer les bits de façon fiable dʼun IMP à lʼautre ;
le temps de transit moyen à travers le sous-réseau ne devait pas dépasser la seconde et il
devait pouvoir fonctionner de façon autonome, indépendamment des ordinateurs quʼil re-
liait. Roberts consulta 140 entreprises mais les constructeurs traditionnels repoussèrent

Page 143 - Troisième partie : lʼère du réseau
Cow-boys contre chemin de fer ou que savez-vous vraiment de lʼhistoire de lʼinformatique ?

lʼappel dʼoffres qui était trop en opposition avec la "pensée conventionnelle" en matière de
télécoms de Lʼépoque : IBM et Control Data répondirent quʼil était impossible de construire
un tel réseau car il coûterait trop cher.

Dédaigné par les grands constructeurs, BBN remporte le marché !

Finalement cʼest BBN (Bolt Beranek and Newman), une petite entreprise de consultants
de Cambridge, qui sera retenue le 8 septembre 1968. BBN reçut la commande au début
de 1969. Sa solution pour un IMP sʼappuyait sur le mini-ordinateur DDP-516 d'Honeywell
(12 Ko de Ram, 450 kg et la taille dʼun réfrigérateur). Chaque site équipé dʼun IMP devra
produire lui-même, selon les spécifications fournies par BBN, lʼinterface entre lʼIMP et son
ou ses ordinateurs (on pouvait raccorder jusquʼà quatre ordinateurs à un même IMP). La
mission des IMP étant seulement dʼassurer le transport fiable des bits, les ordinateurs de-
vront régler deux à deux leurs problèmes de connexion et de transfert des fichiers.

Pour configurer son IMP, BBN préféra le logiciel : une solution matérielle, concrétisée par
le câblage, aurait rendu plus rapide lʼexécution des tâches simples mais elle aurait été
plus difficile à modifier par la suite. En septembre 1969, BBN installe le premier IMP à
lʼUCLA et le premier ordinateur (XDS SIGMA 7) y est connecté. Un ordinateur (XDS 940)
de lʼéquipe de Douglas C. Engelbart de la Stanford Research Institute est alors relié via
une liaison à 50 kbits/s. Les premières données sont échangées entre ces machines. Peu
après, un ordinateur (IBM 360/75) situé lʼuniversité de Santa Barbara et un autre (DEC
PDP-10) situé à lʼuniversité de lʼUtah à Salt Lake City sont raccordés. Le réseau ARPA-
NET initial constitué de quatre ordinateurs est alors en fonctionnement fin 1969.
Lors dʼune interview, le professeur Kleinrock (Un Network Measurement Center avait été
mis en place à lʼUCLA, sous la direction de Leonard Kleinrock, spécialiste de la modélisa-
tion et de la simulation des réseaux qui avait ainsi lʼoccasion de tester ses théories en
vraie grandeur) raconta la première expérience réalisée avec ce réseau : se connecter à
lʼordinateur de la SRI depuis celui de lʼUCLA en tapant LOGIN :

Nous avons appelé les gens de SRI par téléphone.
Nous avons alors tapé L puis demandé au téléphone "Vous voyez le L ?"
La réponse vint alors : "Oui, nous voyons le L"
Nous avons alors tapé O puis redemandé au téléphone "Vous voyez le O ?"
"Oui, nous voyons le O"
Nous avons alors tapé G et tout le système a crashé !
En mars 1970, le premier circuit transcontinental est installé vers BBN qui sera le cin-
quième nœud du réseau. Cela permettra à BBN dʼassurer depuis Cambridge la supervi-
sion du réseau (télémaintenance, télédistribution des mises à jour par réplication et dis-
sémination). Des indicateurs de qualité étant produits automatiquement par les IMP, BBN
pouvait ainsi détecter les pannes du réseau dʼAT&T avant les agents dʼAT&T eux-mêmes,
ce que ceux-ci auront un peu de mal à accepter. Lors de lʼété 70, le réseau sʼétend au
MIT, à RAND, SDC et Harvard. Par la suite le réseau sʼenrichit dʼun nœud par mois. BBN
utilisera pour les IMP un Honeywell 316 à partir de 1971, machine plus légère que le 516
et à partir de laquelle est mis au point un TIP (Terminal IMP) qui permet de connecter des
terminaux au réseau (un TIP peut servir jusquʼà 63 terminaux). En 1971, le réseau relie 19
ordinateurs et trois TIP. Pour le désigner, lʼexpression Arpanet, ou Net tout court, apparaît
en août 1972.

Comme toute nouveauté technique, la mise en place des réseaux dʼordinateurs a rencon-
tré des difficultés imprévues. Le premier IMP livré par Honeywell ne fonctionnait pas et les
ingénieurs de BBN ont dû le recâbler à la main. Par la suite, Honeywell sʼest, de façon
persistante, refusé à obéir aux spécifications définies par BBN. Le matériel souffrait de
pannes aléatoires, dʼinterruptions asynchrones difficiles à corriger. Pour lʼARPA, 3  % de
temps de panne était inacceptable, alors quʼun fonctionnement normal pendant 97 % du
temps semblait être une performance élevée pour Honeywell. Cette anecdote est significa-
tive de lʼincapacité des acteurs traditionnels à admettre lʼapport de lʼinnovation, à sortir de
lʼornière de leurs habitudes. AT&T a refusé dʼutiliser son réseau de télécoms pour trans-
porter des données au moment de lʼappel dʼoffres initial. Elle récidivera en 1971 en refu-

                                                        Page 144 - Troisième partie : lʼère du réseau

Más contenido relacionado

La actualidad más candente

10 personnages importants et pourtant peu connus de l'histoire de l'informatique
10 personnages importants et pourtant peu connus de l'histoire de l'informatique10 personnages importants et pourtant peu connus de l'histoire de l'informatique
10 personnages importants et pourtant peu connus de l'histoire de l'informatiqueAlain Lefebvre
 
Pl news letter_sept10
Pl news letter_sept10Pl news letter_sept10
Pl news letter_sept10robertpluss
 
Grappe d'innovation des TIC
Grappe d'innovation des TICGrappe d'innovation des TIC
Grappe d'innovation des TICBoris Adam
 
TD Grappes d'innovation
TD Grappes d'innovationTD Grappes d'innovation
TD Grappes d'innovationBoris Adam
 
Histoire d’internet et du web : d’Arpanet au web sémantique
Histoire d’internet et du web : d’Arpanet au web sémantiqueHistoire d’internet et du web : d’Arpanet au web sémantique
Histoire d’internet et du web : d’Arpanet au web sémantiqueURFIST de Rennes
 
Presentation Michel Riguidel L'Internet du futur Telecom Valley
Presentation Michel Riguidel L'Internet du futur Telecom ValleyPresentation Michel Riguidel L'Internet du futur Telecom Valley
Presentation Michel Riguidel L'Internet du futur Telecom ValleyTelecomValley
 
Histoire et anthropologie de l'internet, 1ère partie
Histoire et anthropologie de l'internet, 1ère partieHistoire et anthropologie de l'internet, 1ère partie
Histoire et anthropologie de l'internet, 1ère partieAlexandre Serres
 
Ce que nous apprend l'histoire de l'informatique
Ce que nous apprend l'histoire de l'informatiqueCe que nous apprend l'histoire de l'informatique
Ce que nous apprend l'histoire de l'informatiqueAlain Lefebvre
 
Mythes et légendes de l'Open source et des Logiciels Libres
Mythes et légendes de l'Open source et des Logiciels LibresMythes et légendes de l'Open source et des Logiciels Libres
Mythes et légendes de l'Open source et des Logiciels LibresStefano Amekoudi
 

La actualidad más candente (15)

10 personnages importants et pourtant peu connus de l'histoire de l'informatique
10 personnages importants et pourtant peu connus de l'histoire de l'informatique10 personnages importants et pourtant peu connus de l'histoire de l'informatique
10 personnages importants et pourtant peu connus de l'histoire de l'informatique
 
Pl news letter_sept10
Pl news letter_sept10Pl news letter_sept10
Pl news letter_sept10
 
Grappe d'innovation des TIC
Grappe d'innovation des TICGrappe d'innovation des TIC
Grappe d'innovation des TIC
 
TD Grappes d'innovation
TD Grappes d'innovationTD Grappes d'innovation
TD Grappes d'innovation
 
Histoire d’internet et du web : d’Arpanet au web sémantique
Histoire d’internet et du web : d’Arpanet au web sémantiqueHistoire d’internet et du web : d’Arpanet au web sémantique
Histoire d’internet et du web : d’Arpanet au web sémantique
 
Chap6 extrait
Chap6 extraitChap6 extrait
Chap6 extrait
 
Presentation Michel Riguidel L'Internet du futur Telecom Valley
Presentation Michel Riguidel L'Internet du futur Telecom ValleyPresentation Michel Riguidel L'Internet du futur Telecom Valley
Presentation Michel Riguidel L'Internet du futur Telecom Valley
 
Administration97
Administration97Administration97
Administration97
 
Histoire et anthropologie de l'internet, 1ère partie
Histoire et anthropologie de l'internet, 1ère partieHistoire et anthropologie de l'internet, 1ère partie
Histoire et anthropologie de l'internet, 1ère partie
 
Chap14 extrait
Chap14 extraitChap14 extrait
Chap14 extrait
 
Chap18 extrait
Chap18 extraitChap18 extrait
Chap18 extrait
 
Cybermondialisation
CybermondialisationCybermondialisation
Cybermondialisation
 
Chap1 extrait
Chap1 extraitChap1 extrait
Chap1 extrait
 
Ce que nous apprend l'histoire de l'informatique
Ce que nous apprend l'histoire de l'informatiqueCe que nous apprend l'histoire de l'informatique
Ce que nous apprend l'histoire de l'informatique
 
Mythes et légendes de l'Open source et des Logiciels Libres
Mythes et légendes de l'Open source et des Logiciels LibresMythes et légendes de l'Open source et des Logiciels Libres
Mythes et légendes de l'Open source et des Logiciels Libres
 

Destacado

ExpoELE 2008 - Comunidades y redes de aprendizaje
ExpoELE 2008 - Comunidades y redes de aprendizajeExpoELE 2008 - Comunidades y redes de aprendizaje
ExpoELE 2008 - Comunidades y redes de aprendizajeEsperanza Román
 
IV Encuentro de Telecentros Perú - Presentación Rural Telecom
IV Encuentro de Telecentros Perú - Presentación Rural TelecomIV Encuentro de Telecentros Perú - Presentación Rural Telecom
IV Encuentro de Telecentros Perú - Presentación Rural TelecomEiko Kawamura
 
Instrumento Detector Del Bajo Nivel De Granos En
Instrumento Detector Del Bajo Nivel De Granos EnInstrumento Detector Del Bajo Nivel De Granos En
Instrumento Detector Del Bajo Nivel De Granos Envincenzocaschetto
 
Communique de-presse-defis-alimentation-seniors
Communique de-presse-defis-alimentation-seniorsCommunique de-presse-defis-alimentation-seniors
Communique de-presse-defis-alimentation-seniorsFondation Louis Bonduelle
 
Presentation Taller Completa
Presentation Taller CompletaPresentation Taller Completa
Presentation Taller Completadarioha
 
Rapport 2011 de la CDSP du Vaucluse
Rapport 2011 de la CDSP du VaucluseRapport 2011 de la CDSP du Vaucluse
Rapport 2011 de la CDSP du VaucluseCCDH75
 
Equipament i
Equipament iEquipament i
Equipament iphidalg2
 
La Sistenatizacioncomo Proceso
La Sistenatizacioncomo ProcesoLa Sistenatizacioncomo Proceso
La Sistenatizacioncomo Procesoguest91ce4f
 
Site du Musée de la danse - Brief créa
Site du Musée de la danse - Brief créaSite du Musée de la danse - Brief créa
Site du Musée de la danse - Brief créaAgence LunaWeb
 
Le sport et la musique
Le sport et la musiqueLe sport et la musique
Le sport et la musiqueAllison Albino
 
Mecenat KangouRoux_formation_du_24_avril_2012
Mecenat KangouRoux_formation_du_24_avril_2012Mecenat KangouRoux_formation_du_24_avril_2012
Mecenat KangouRoux_formation_du_24_avril_2012KangouRoux
 
PresentacióN1 Caro Lau
PresentacióN1 Caro LauPresentacióN1 Caro Lau
PresentacióN1 Caro Laucarolau
 
El Corazón Del Dinero
El Corazón Del DineroEl Corazón Del Dinero
El Corazón Del Dineroelorri
 
Presentació Roses
Presentació RosesPresentació Roses
Presentació Rosesphidalg2
 
Rapport 2010 CDHP d'Ille et Vilaine
Rapport 2010 CDHP d'Ille et VilaineRapport 2010 CDHP d'Ille et Vilaine
Rapport 2010 CDHP d'Ille et VilaineCCDH75
 

Destacado (20)

ExpoELE 2008 - Comunidades y redes de aprendizaje
ExpoELE 2008 - Comunidades y redes de aprendizajeExpoELE 2008 - Comunidades y redes de aprendizaje
ExpoELE 2008 - Comunidades y redes de aprendizaje
 
IV Encuentro de Telecentros Perú - Presentación Rural Telecom
IV Encuentro de Telecentros Perú - Presentación Rural TelecomIV Encuentro de Telecentros Perú - Presentación Rural Telecom
IV Encuentro de Telecentros Perú - Presentación Rural Telecom
 
Instrumento Detector Del Bajo Nivel De Granos En
Instrumento Detector Del Bajo Nivel De Granos EnInstrumento Detector Del Bajo Nivel De Granos En
Instrumento Detector Del Bajo Nivel De Granos En
 
Communique de-presse-defis-alimentation-seniors
Communique de-presse-defis-alimentation-seniorsCommunique de-presse-defis-alimentation-seniors
Communique de-presse-defis-alimentation-seniors
 
Presentation Taller Completa
Presentation Taller CompletaPresentation Taller Completa
Presentation Taller Completa
 
Saintgeorges
SaintgeorgesSaintgeorges
Saintgeorges
 
Rapport 2011 de la CDSP du Vaucluse
Rapport 2011 de la CDSP du VaucluseRapport 2011 de la CDSP du Vaucluse
Rapport 2011 de la CDSP du Vaucluse
 
Equipament i
Equipament iEquipament i
Equipament i
 
La Sistenatizacioncomo Proceso
La Sistenatizacioncomo ProcesoLa Sistenatizacioncomo Proceso
La Sistenatizacioncomo Proceso
 
Test
TestTest
Test
 
Site du Musée de la danse - Brief créa
Site du Musée de la danse - Brief créaSite du Musée de la danse - Brief créa
Site du Musée de la danse - Brief créa
 
Le sport et la musique
Le sport et la musiqueLe sport et la musique
Le sport et la musique
 
Mecenat KangouRoux_formation_du_24_avril_2012
Mecenat KangouRoux_formation_du_24_avril_2012Mecenat KangouRoux_formation_du_24_avril_2012
Mecenat KangouRoux_formation_du_24_avril_2012
 
PresentacióN1 Caro Lau
PresentacióN1 Caro LauPresentacióN1 Caro Lau
PresentacióN1 Caro Lau
 
Diaporama
DiaporamaDiaporama
Diaporama
 
Franta splendide - vu
Franta   splendide - vuFranta   splendide - vu
Franta splendide - vu
 
Hojasdelavida
HojasdelavidaHojasdelavida
Hojasdelavida
 
El Corazón Del Dinero
El Corazón Del DineroEl Corazón Del Dinero
El Corazón Del Dinero
 
Presentació Roses
Presentació RosesPresentació Roses
Presentació Roses
 
Rapport 2010 CDHP d'Ille et Vilaine
Rapport 2010 CDHP d'Ille et VilaineRapport 2010 CDHP d'Ille et Vilaine
Rapport 2010 CDHP d'Ille et Vilaine
 

Similar a Chap11 extrait

Linux_history.pdf
Linux_history.pdfLinux_history.pdf
Linux_history.pdfjaweb1
 
L'ÉVOLUTION DE LA PLUS GRANDE INVENTION DE L'HUMANITÉ, L'ORDINATEUR, ET SON A...
L'ÉVOLUTION DE LA PLUS GRANDE INVENTION DE L'HUMANITÉ, L'ORDINATEUR, ET SON A...L'ÉVOLUTION DE LA PLUS GRANDE INVENTION DE L'HUMANITÉ, L'ORDINATEUR, ET SON A...
L'ÉVOLUTION DE LA PLUS GRANDE INVENTION DE L'HUMANITÉ, L'ORDINATEUR, ET SON A...Faga1939
 
history of internet.docx by amel
history of internet.docx by amelhistory of internet.docx by amel
history of internet.docx by amelAmelMegeullati
 
2016_Huguet_l1ICC11 séquence 8 Internet
2016_Huguet_l1ICC11 séquence 8 Internet2016_Huguet_l1ICC11 séquence 8 Internet
2016_Huguet_l1ICC11 séquence 8 InternetFrançois Huguet
 
Les réseaux (des ordis et des hommes part.2)
Les réseaux (des ordis et des hommes part.2)Les réseaux (des ordis et des hommes part.2)
Les réseaux (des ordis et des hommes part.2)Vincent Mabillot
 
Support De Cours - Reseaux avec et sans fil
Support De Cours - Reseaux avec et sans filSupport De Cours - Reseaux avec et sans fil
Support De Cours - Reseaux avec et sans filTunisie collège
 
Internet galactique -- Cafe Numerique
Internet galactique -- Cafe NumeriqueInternet galactique -- Cafe Numerique
Internet galactique -- Cafe NumeriqueCarlos González
 
Historique de l'informatique et d'Internet
Historique de l'informatique et d'InternetHistorique de l'informatique et d'Internet
Historique de l'informatique et d'InternetD1clic
 
"Law Is Code" : comment la propriété intellectuelle menace l'architecture ouv...
"Law Is Code" : comment la propriété intellectuelle menace l'architecture ouv..."Law Is Code" : comment la propriété intellectuelle menace l'architecture ouv...
"Law Is Code" : comment la propriété intellectuelle menace l'architecture ouv...Calimaq S.I.Lex
 
Introduction aux activités du W3C (Janvier 2008)
Introduction aux activités du W3C (Janvier 2008)Introduction aux activités du W3C (Janvier 2008)
Introduction aux activités du W3C (Janvier 2008)Fabien Gandon
 
cours_archi_2006-20071 (1).ppt
cours_archi_2006-20071 (1).pptcours_archi_2006-20071 (1).ppt
cours_archi_2006-20071 (1).pptZeinabMhanna2
 
1 naissanceordinateur
1 naissanceordinateur1 naissanceordinateur
1 naissanceordinateurMouna Maya
 
Fonctionnement du réseau
Fonctionnement du réseauFonctionnement du réseau
Fonctionnement du réseaumelaniegenovese
 

Similar a Chap11 extrait (20)

Linux_history.pdf
Linux_history.pdfLinux_history.pdf
Linux_history.pdf
 
L'ÉVOLUTION DE LA PLUS GRANDE INVENTION DE L'HUMANITÉ, L'ORDINATEUR, ET SON A...
L'ÉVOLUTION DE LA PLUS GRANDE INVENTION DE L'HUMANITÉ, L'ORDINATEUR, ET SON A...L'ÉVOLUTION DE LA PLUS GRANDE INVENTION DE L'HUMANITÉ, L'ORDINATEUR, ET SON A...
L'ÉVOLUTION DE LA PLUS GRANDE INVENTION DE L'HUMANITÉ, L'ORDINATEUR, ET SON A...
 
history of internet.docx by amel
history of internet.docx by amelhistory of internet.docx by amel
history of internet.docx by amel
 
2016_Huguet_l1ICC11 séquence 8 Internet
2016_Huguet_l1ICC11 séquence 8 Internet2016_Huguet_l1ICC11 séquence 8 Internet
2016_Huguet_l1ICC11 séquence 8 Internet
 
Les réseaux (des ordis et des hommes part.2)
Les réseaux (des ordis et des hommes part.2)Les réseaux (des ordis et des hommes part.2)
Les réseaux (des ordis et des hommes part.2)
 
Support De Cours - Reseaux avec et sans fil
Support De Cours - Reseaux avec et sans filSupport De Cours - Reseaux avec et sans fil
Support De Cours - Reseaux avec et sans fil
 
Origines web
Origines webOrigines web
Origines web
 
Internet galactique -- Cafe Numerique
Internet galactique -- Cafe NumeriqueInternet galactique -- Cafe Numerique
Internet galactique -- Cafe Numerique
 
1er cours
1er cours1er cours
1er cours
 
Histoire d'internet
Histoire d'internet Histoire d'internet
Histoire d'internet
 
Historique de l'informatique et d'Internet
Historique de l'informatique et d'InternetHistorique de l'informatique et d'Internet
Historique de l'informatique et d'Internet
 
"Law Is Code" : comment la propriété intellectuelle menace l'architecture ouv...
"Law Is Code" : comment la propriété intellectuelle menace l'architecture ouv..."Law Is Code" : comment la propriété intellectuelle menace l'architecture ouv...
"Law Is Code" : comment la propriété intellectuelle menace l'architecture ouv...
 
Introduction aux activités du W3C (Janvier 2008)
Introduction aux activités du W3C (Janvier 2008)Introduction aux activités du W3C (Janvier 2008)
Introduction aux activités du W3C (Janvier 2008)
 
cours_archi_2006-20071 (1).ppt
cours_archi_2006-20071 (1).pptcours_archi_2006-20071 (1).ppt
cours_archi_2006-20071 (1).ppt
 
1 naissanceordinateur
1 naissanceordinateur1 naissanceordinateur
1 naissanceordinateur
 
Fonctionnement du réseau
Fonctionnement du réseauFonctionnement du réseau
Fonctionnement du réseau
 
Culture web dc 2016
Culture web dc 2016Culture web dc 2016
Culture web dc 2016
 
Internet initiation module 01 - 2011
Internet initiation module 01 - 2011Internet initiation module 01 - 2011
Internet initiation module 01 - 2011
 
Initiation à Internet
Initiation à InternetInitiation à Internet
Initiation à Internet
 
cours-reseaux-p1.pdf
cours-reseaux-p1.pdfcours-reseaux-p1.pdf
cours-reseaux-p1.pdf
 

Más de Alain Lefebvre (13)

Chap17 extrait
Chap17 extraitChap17 extrait
Chap17 extrait
 
Chap16 extrait
Chap16 extraitChap16 extrait
Chap16 extrait
 
Chap15 extrait
Chap15 extraitChap15 extrait
Chap15 extrait
 
Chap10 extrait
Chap10 extraitChap10 extrait
Chap10 extrait
 
Chap9 extrait
Chap9 extraitChap9 extrait
Chap9 extrait
 
Chap8 extrait
Chap8 extraitChap8 extrait
Chap8 extrait
 
Chap7 extrait
Chap7 extraitChap7 extrait
Chap7 extrait
 
Chap5 extrait
Chap5 extraitChap5 extrait
Chap5 extrait
 
Chap4 extrait
Chap4 extraitChap4 extrait
Chap4 extrait
 
Chap3 extrait
Chap3 extraitChap3 extrait
Chap3 extrait
 
Chap2 extrait
Chap2 extraitChap2 extrait
Chap2 extrait
 
Conclusions extrait
Conclusions extraitConclusions extrait
Conclusions extrait
 
Histoire de l'informatique
Histoire de l'informatiqueHistoire de l'informatique
Histoire de l'informatique
 

Chap11 extrait

  • 1. Cow-boys contre chemin de fer ou que savez-vous vraiment de lʼhistoire de lʼinformatique ? Chapitre 11 - Naissance et de la croissance dʼInternet (NDA : une partie de lʼhistoire ci-dessous a été assemblée à partir de nombreux extraits collectés à http://www.volle.com/travaux/internet.htm et dʼautres origines puis modifiés plus ou moins en profondeur) Lʼhistoire de lʼInternet repose grandement, surtout dans ses premiers temps, sur les efforts de la DARPA (qui sʼappelait dʼabord ARPA… En 1972, LʼARPA est renommée DARPA pour Defense Advanced Research Projects Agency mais le nom ARPANET pour le réseau est resté le même). Cʼest grâce à son financement que ce développement dʼun réseau hé- térogène a pu être imaginé et voir le jour. Car, jusque-là, informatique et télécom vivait chacun de son côté, presque en sʼignorant complètement. Bien entendu, les mainframes étaient accédés par des terminaux (dʼabord de type télétype puis des écrans plus ou moins programmables) dès le début des années soixante mais cʼétait à chaque fois dans un contexte totalement propriétaire  : la liaison entre un ordinateur et ses terminaux était spécifique à ce système et ne pouvait être utilisée avec dʼautres matériels. En clair, pas question dʼutiliser le même terminal pour accéder à deux ordinateurs de constructeurs dif- férents (et même, bien souvent, pour des systèmes dʼune même origine mais de gammes différentes  !). Cette situation absurde aurait pu durer longtemps si Robert Taylor nʼavait décidé dʼy mettre fin au début des années soixante. En 1963, Bob Taylor rencontre Licklider, qui devint son mentor. Licklider avait écrit un arti- cle fondateur en 1960, prévoyant de nouveaux moyens plus puissants pour utiliser les or- dinateurs et lʼarticle a grandement influencé Taylor. Un second document, publié en 1968 par Licklider et Taylor, énonce lʼavenir de ce quʼInternet est en effet devenu. Intitulé "Lʼor- dinateur comme dispositif de communication", il commence ainsi  : "Dans quelques an- nées, les hommes seront capables de communiquer plus efficacement grâce à une ma- chine quʼen face à face."… Prédiction qui sʼest avérée vraie dans bien des cas (à ceci près que cela a pris quelques décennies et non quelques années) ! Le bureau de Robert Taylor à lʼIPTO (en 1962, lʼARPA créé en son sein lʼIPTO pour Infor- mation Processing Techniques Office) était connecté via trois terminaux différents à des ordinateurs situés à Boston, Berkeley et Santa Monica. Chaque terminal avait sa propre procédure de connexion et ses propres commandes : lʼutilité dʼune rationalisation sautait aux yeux. Par ailleurs, en lʼabsence dʼun réseau, chaque centre de recherche qui contrac- tait avec lʼARPA devait acheter et exploiter son propre ordinateur. Il semblait souhaitable de pouvoir partager les ressources dʼune même machine entre plusieurs centres.  Mais comment faire, alors que chaque ordinateur utilisait un système dʼexploitation et des lan- gages adaptés à ses caractéristiques physiques particulières et ne pouvait communiquer – et encore, seulement en mode maître-esclave ! – quʼavec ses propres équipements péri- phériques ? Les applications communicantes, comme la messagerie (Les premiers systèmes de mes- sagerie électronique ont vu le jour en 1965 et servaient de moyen de communication entre utilisateurs dʼordinateurs à exploitation partagée. Lʼun de ces systèmes a été mis en place au Massachusetts Institute of Technology), restaient limitées aux personnes qui utilisaient un même système.  Il fallait adapter les ordinateurs à la communication entre égaux et cʼétait donc un vaste chantier qui sʼouvrait pour les pionniers… Du côté de lʼIPTO, cʼest à Lawrence Roberts quʼon confie le projet visant à créer un réseau permettant de faire communiquer les ordinateurs de différentes origines. Page 142 - Troisième partie : lʼère du réseau
  • 2. Cow-boys contre chemin de fer ou que savez-vous vraiment de lʼhistoire de lʼinformatique ? Une expérience avait été réalisée en 1965 par le psychologue Tom Marrill qui, sous lʼin- fluence de Licklider, avait proposé à lʼARPA de faire communiquer via une liaison full-du- plex à quatre fils deux ordinateurs de type différent situés lʼun à Lincoln, lʼautre à Santa Monica. À cette occasion Marrill mit au point une procédure qui permet de grouper les ca- ractères dans un message, de les envoyer sur la ligne, de vérifier si le message est arrivé, enfin de le retransmettre sʼil nʼy a pas eu dʼaccusé de réception. Pour désigner cette pro- cédure, il retint le mot "protocole". Mais comment faire communiquer non pas deux ordina- teurs, mais un réseau de plusieurs ordinateurs ? Sʼil fallait définir un protocole pour chaque couple dʼordinateurs, on serait vite confronté à une complexité croissante. Cʼest pour faire face à ce "mur de la complexité" que Wes Clark proposa de concevoir un petit ordinateur spécialisé, lʼIMP (Interface Message Pro- cessor), qui seul serait directement connecté en réseau et interfacé avec chaque ordina- teur  : le problème était ainsi ramené à un niveau de complexité linéaire. Le réseau des IMP fut baptisé "sous-réseau" (subnetwork) pour le distinguer du réseau des ordinateurs eux-mêmes. Restaient à régler les problèmes propres au sous-réseau : éviter quʼun même paquet ne soit renvoyé sans fin dʼun IMP à lʼautre, éviter que des paquets ne soient per- dus en raison du débordement dʼune mémoire (buffer) etc. Le grand mérite des pionniers est dʼavoir fait confiance au principe de la commutation de paquets alors que lʼorthodoxie en matière de télécoms reposait totalement sur la commu- tation de circuits à cette époque (lʼaffrontement entre les deux principes allait se poursui- vre encore longtemps…). Larry Roberts, ayant découvert les travaux de Davies et Baran à une réunion de lʼACM à la fin de 1967, introduisit la commutation de paquets dans lʼappel dʼoffres quʼil lança pour lʼIMP en juillet 1968. La commutation de paquets, lʼinvention décisive La commutation de paquets a été inventée séparément par Paul Baran, un américain, (1926-) et Donald Davies (1924-2000), un Britannique. Baran avait étudié la vulnérabilité du réseau à une attaque nucléaire, question cruciale pour les militaires dans la période de guerre froide des années soixante. Il avait découvert que lʼon pouvait obtenir une robustesse élevée avec un réseau maillé comportant une re- dondance relativement faible (il faut relier chaque nœud au réseau par trois ou quatre liens au lieu dʼun seul, et équiper chaque nœud dʼune table de routage adaptative). Les travaux de Baran sont à lʼorigine de la réputation selon laquelle Internet aurait été conçu pour répondre à des besoins militaires. Tous les opérateurs de télécom en général et AT & T en particulier étaient hostiles aux idées de Baran. Il faut se rappeler quʼà cette époque (début des années soixante) les commutateurs du réseau téléphonique étaient électromécaniques, la commutation élec- tronique ne devant intervenir que dans les années 70 ; le circuit établi entre deux interlo- cuteurs avait donc une continuité et une réalité physiques en quelque sorte palpables. Les ordinateurs relevaient dʼun autre univers technique que celui des télécoms. "Ils se compor- taient comme sʼils savaient tout et que ceux qui nʼappartenaient pas au Bell System ne savaient rien", dira Baran. "Quelquʼun dʼextérieur ne pouvait pas comprendre la complexité de leur système. Et voilà quʼun idiot sʼamène : il ne comprend visiblement pas comment le système fonctionne et il prétend que les choses sont simples  !" En dʼautres termes, un cow-boy osait trouver une route différente et plus efficace que celle utilisée par les com- pagnies de chemins de fer depuis des décennies ! Sans minimiser les apports de Baran et Davies, il faut aussi mentionner Leonard Klein- rock, professeur à lʼUCLA, qui a fourni les bases théoriques pour les réseaux de paquets en 1962. Il récidiva dans les années 1970, pour le routage hiérarchique, des concepts qui ont été le fondement de lʼInternet tel quʼon le connaît aujourdʼhui. Dans lʼappel dʼoffres de Larry Roberts, le sous-réseau devait transférer les bits de façon fiable dʼun IMP à lʼautre ; le temps de transit moyen à travers le sous-réseau ne devait pas dépasser la seconde et il devait pouvoir fonctionner de façon autonome, indépendamment des ordinateurs quʼil re- liait. Roberts consulta 140 entreprises mais les constructeurs traditionnels repoussèrent Page 143 - Troisième partie : lʼère du réseau
  • 3. Cow-boys contre chemin de fer ou que savez-vous vraiment de lʼhistoire de lʼinformatique ? lʼappel dʼoffres qui était trop en opposition avec la "pensée conventionnelle" en matière de télécoms de Lʼépoque : IBM et Control Data répondirent quʼil était impossible de construire un tel réseau car il coûterait trop cher. Dédaigné par les grands constructeurs, BBN remporte le marché ! Finalement cʼest BBN (Bolt Beranek and Newman), une petite entreprise de consultants de Cambridge, qui sera retenue le 8 septembre 1968. BBN reçut la commande au début de 1969. Sa solution pour un IMP sʼappuyait sur le mini-ordinateur DDP-516 d'Honeywell (12 Ko de Ram, 450 kg et la taille dʼun réfrigérateur). Chaque site équipé dʼun IMP devra produire lui-même, selon les spécifications fournies par BBN, lʼinterface entre lʼIMP et son ou ses ordinateurs (on pouvait raccorder jusquʼà quatre ordinateurs à un même IMP). La mission des IMP étant seulement dʼassurer le transport fiable des bits, les ordinateurs de- vront régler deux à deux leurs problèmes de connexion et de transfert des fichiers. Pour configurer son IMP, BBN préféra le logiciel : une solution matérielle, concrétisée par le câblage, aurait rendu plus rapide lʼexécution des tâches simples mais elle aurait été plus difficile à modifier par la suite. En septembre 1969, BBN installe le premier IMP à lʼUCLA et le premier ordinateur (XDS SIGMA 7) y est connecté. Un ordinateur (XDS 940) de lʼéquipe de Douglas C. Engelbart de la Stanford Research Institute est alors relié via une liaison à 50 kbits/s. Les premières données sont échangées entre ces machines. Peu après, un ordinateur (IBM 360/75) situé lʼuniversité de Santa Barbara et un autre (DEC PDP-10) situé à lʼuniversité de lʼUtah à Salt Lake City sont raccordés. Le réseau ARPA- NET initial constitué de quatre ordinateurs est alors en fonctionnement fin 1969. Lors dʼune interview, le professeur Kleinrock (Un Network Measurement Center avait été mis en place à lʼUCLA, sous la direction de Leonard Kleinrock, spécialiste de la modélisa- tion et de la simulation des réseaux qui avait ainsi lʼoccasion de tester ses théories en vraie grandeur) raconta la première expérience réalisée avec ce réseau : se connecter à lʼordinateur de la SRI depuis celui de lʼUCLA en tapant LOGIN : Nous avons appelé les gens de SRI par téléphone. Nous avons alors tapé L puis demandé au téléphone "Vous voyez le L ?" La réponse vint alors : "Oui, nous voyons le L" Nous avons alors tapé O puis redemandé au téléphone "Vous voyez le O ?" "Oui, nous voyons le O" Nous avons alors tapé G et tout le système a crashé ! En mars 1970, le premier circuit transcontinental est installé vers BBN qui sera le cin- quième nœud du réseau. Cela permettra à BBN dʼassurer depuis Cambridge la supervi- sion du réseau (télémaintenance, télédistribution des mises à jour par réplication et dis- sémination). Des indicateurs de qualité étant produits automatiquement par les IMP, BBN pouvait ainsi détecter les pannes du réseau dʼAT&T avant les agents dʼAT&T eux-mêmes, ce que ceux-ci auront un peu de mal à accepter. Lors de lʼété 70, le réseau sʼétend au MIT, à RAND, SDC et Harvard. Par la suite le réseau sʼenrichit dʼun nœud par mois. BBN utilisera pour les IMP un Honeywell 316 à partir de 1971, machine plus légère que le 516 et à partir de laquelle est mis au point un TIP (Terminal IMP) qui permet de connecter des terminaux au réseau (un TIP peut servir jusquʼà 63 terminaux). En 1971, le réseau relie 19 ordinateurs et trois TIP. Pour le désigner, lʼexpression Arpanet, ou Net tout court, apparaît en août 1972. Comme toute nouveauté technique, la mise en place des réseaux dʼordinateurs a rencon- tré des difficultés imprévues. Le premier IMP livré par Honeywell ne fonctionnait pas et les ingénieurs de BBN ont dû le recâbler à la main. Par la suite, Honeywell sʼest, de façon persistante, refusé à obéir aux spécifications définies par BBN. Le matériel souffrait de pannes aléatoires, dʼinterruptions asynchrones difficiles à corriger. Pour lʼARPA, 3  % de temps de panne était inacceptable, alors quʼun fonctionnement normal pendant 97 % du temps semblait être une performance élevée pour Honeywell. Cette anecdote est significa- tive de lʼincapacité des acteurs traditionnels à admettre lʼapport de lʼinnovation, à sortir de lʼornière de leurs habitudes. AT&T a refusé dʼutiliser son réseau de télécoms pour trans- porter des données au moment de lʼappel dʼoffres initial. Elle récidivera en 1971 en refu- Page 144 - Troisième partie : lʼère du réseau