Présentation Erwan Le Morhedec rupture de relations commerciales
1. La rupture des relations commerciales
- Neuilly Lab -
3 février 2012
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2. Article L.442-6-I 5° du Code de commerce
« I.- Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout
producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : (…)
5° De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit
tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis
déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels.
Lorsque la relation commerciale porte sur la fourniture de produits sous marque de distributeur, la durée
minimale de préavis est double de celle qui serait applicable si le produit n'était pas fourni sous marque de
distributeur (….).
Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution
par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure ».
Cette disposition ne fait pas obstacle à la faculté de rompre
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3. Plan de la présentation
1. A quelles relations s’applique l’article L.442-6.I.5° du Code de
commerce ?
2. Quels sont les faits ou comportements qui caractérisent une rupture ?
3. Comment évaluer le préavis à accorder ?
4. Peut-on gagner en sécurité et prévisibilité ?
5. La faculté résiduelle de rompre les relations commerciales sans
préavis (ou avec un préavis écourté)
6. L’intervention de la DGCCRF ou du Président de l’Autorité de la
concurrence
7. L’indemnisation du préjudice subi du fait de la rupture brutale
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4. 1. L’article L.442-6.I.5° du Code de commerce est-il applicable dans votre cas ?
(presque) toute
relation étant
Il s’applique à tous considérée comme
secteurs… commerciale…
… même en … et établie.
l’absence de contrat
écrit,
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5. L’article L.442-6.I.5° du code de commerce s’applique à tout secteur d’activité
• Première affirmation dans l’affaire Auchan c. PBC , dans le cadre d’un marché de prestations de services de
sécurité : « Les termes mêmes de la loi ne permettent pas – dans la généralité de l’expression –
d’instaurer des réserves ou des exceptions selon tel type de marché ou de contrat. » (Douai 15 mars 2001,
Auchan c. PBC; confirmé par Cass. com. 23 avril 2003, Auchan c. PBC)
• Applications récentes hors des relations de distribution :
Réalisation graphique d’un magazine professionnel (Paris, 19 février 2009, ART c. Le Losange);
Edition d’un magazine (Paris, 15 janvier 2009, Mediasica c. Bayard Presse);
Réalisation de travaux dans le bâtiment (Cass. Com. 16 décembre 2008, Les Ateliers d’Origine c. Bouygues Bâtiment
International)
Location d’une maison d’exposition sur le domaine public aéroportuaire (Lyon, 15 mars 2007, Maisons et
Tradition c. Village Rhônalpin )
Prestations de lobbying (Paris, 3 juin 2009, Aluminium c. GDF)
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6. L’article L.442-6.I. 5° s’applique même en l’absence de contrat écrit
• La rupture brutale appréhende une réalité économique et s’applique indifféremment à toutes
les « relations commerciales », qu’elles soient contractuellement encadrées ou non.
« La loi a entendu viser une situation de fait correspondant à des relations d’affaires stables,
suivies et anciennes, sans égard au cadre juridique que les parties ont pu lui donner »
(Nancy, 10 mars 2004, Sovab c. Metareg)
L’article L.442-6.I.5° s’applique « quelle que soit la nature des relations commerciales,
qu’elles soient pré-contractuelles, contractuelles ou post-contractuelles » (Dijon, 15 novembre
2007, Carré Blanc c. Christine Juban)
« L’article L. 442-6.I.5 a vocation à régler toutes les relations d’affaires, qu’elles relèvent
d’une convention ou se soient nouées de façon informelle » (Angers, 1er juillet 2008, Mad Edition c.
Michelet)
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7. La relation commerciale : un critère d’interprétation particulièrement souple
• Seule la qualité de l’auteur de la rupture (visée par le texte) entre en ligne de compte
« L’article L.442-6 I.5° du code de commerce [n’est] pas applicable » à une rupture provoquée
par une association ( Paris, 15 janvier 2009, Mediasica c. Bayard Presse)
« L’article L.442-6.I. 5° du code de commerce (…) peut être mis en œuvre quel que soit le statut
juridique de la victime du comportement incriminé » (Cas d’une association, Le Clown est roi, et sous
réserve du paracommercialisme, Cass. Com., 6 février 2007)
« Considérant [qu’un particulier] qui exerçait une activité, sinon commerciale, du moins
économique, entretenait des relations d’affaires » (Paris, 29 février 2008, Durand de Rozière c. SARL d’édition
de la Famille éducatrice)
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8. • Les exceptions à la nature « économique » de la relation sont limitées : cas des prestations
libérales (médecins : Cass. Com., 23 octobre 2007; notaires : Cass. Com. , 22 janvier 2009; architectes : Cass. Com. 16 décembre
2008)
• Un élargissement important et significatif : l’exemple de l’application à des mutuelles.
Alors que l’article L.322-26-1 du code des assurances prévoit que « les sociétés d’assurance mutuelles
ont un objet non commercial », la Cour de cassation se réfère au champ d’application du livre IV, en
visant l’article L. 410-1 du code de commerce (Cass. com, 14 septembre 2010, AC Carosserie Argentat c. Macif), soit
:
« toutes les activités de production, de distribution et de service, y compris celles qui sont le fait
de personnes publiques, notamment dans le cadre de conventions de délégation de service public »
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9. La relation commerciale concernée est-elle « établie »?
• Le caractère établi de la relation : un critère généralement rempli
Même une relation brève : ainsi d’une relation de 10 mois (ix-en-Provence, 28 mai 2004, Sud Communications
et service c. Crédit Agricole PA) ou de 18 mois (Caen, 1er décembre 2011, ABL c. Nordy).
Et même une seule commande : La prise d’une commande suffit à caractériser des relations
commerciales établies » et l’absence de livraison des 2/3 de la commande, une rupture (Paris, 17
octobre 2008, Diesel c. Agathe – décision contestable – cf, à l’inverse Versailles, 10 janvier 2012, Faurecia) !
« La notion de « relation commerciale établie » vise une situation
contractuelle née de la pratique instaurée entre les parties entretenant
des relations d’affaires stables, suivies et anciennes, quelles que soient
leurs formes, et peut donc se matérialiser dans la conclusion, successive et
sans interruption dans le temps, de différents contrats » (Paris, 13 septembre
2007, Presse Paris Services c. Jean-Claude Paulin, Caen, 1er décembre 2011, ABL c. Nordy).
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10. • Quelques hypothèses de relations non « établies » :
Cas d’une relation brève, non formalisée contractuellement, cette absence de formalisation
étant à l’origine de la rupture ( Lyon, 18 septembre 2003, Auto Soleil c. Auto Stadium)
Absence d’assurance sur la stabilité des relations : arrêt d’appel annulé, la Cour d’appel n’ayant
pas recherché si « eu égard à la nature de leur prestation (…) les sociétés Planète Prod et Presse
Planète pouvaient légitimement s’attendre à la stabilité de leur relation avec la société France
2 » ( Cass. Com. 18 mai 2010, France 2 et France Télévision c. Planète Prod et Presse Planète)
Des prestations de gardiennage sur un site, « par essence, temporaires » , ne permettent pas de
caractériser des relations commerciales établies (Montpellier, 8 décembre 2009, FDI Développement c. SPAG
Développement)
« Le fait que les relations d’affaires se sont concrétisées dans le cadre de
contrats à durée déterminée expirant de plein droit à leur terme [rendait la
co-contractante] consciente que sa position était susceptible d’être remise en
cause à chaque fois »… ne permet pas d’éluder l’application de l’article L.442 6
I 5° ( Lyon, 8 octobre 2009, EGMEIRA c. Toray )
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11. La mise en concurrence systématique des partenaires
- Le simple fait que la victime de la rupture ait été informée de sa mise en concurrence « n’est pas de
nature à retirer à la rupture des relations son caractère brutal et à autoriser les sociétés Maeva à
s’affranchir de devoir donner un préavis » ( Versailles, 26 avril 2001, Maeva c. Diffusion Graphique)
- Mais la mise en concurrence peut, sous certaines conditions, être un obstacle à l’établissement de
la relation dans la mesure où elle « prive les relations commerciales de toute permanence garantie
et les place dans une situation de précarité certaine » ( Versailles, 18 septembre 2008, ESGII c. Monoprix; Paris, 18
juin 2009, Algos Networks c. Nextiarone France)
Condition de systématicité
Condition d’effectivité
- Le fait de « procéder par consultation de ses fournisseurs auxquels [est adressé] un cahier des
charges, rend sans pertinence la notion de relation commerciale établie » ( Versailles, 10 janvier 2012,
Faurecia c. Corima Technologies) )
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12. Il n’est pas possible d’exclure contractuellement l’application de l’article L. 442-6. I. 5°
• L’article L.442-6.I. 5° du code de commerce est d’ordre public
« Il ne peut être fait obstacle aux dispositions d’ordre public de l’article L.442-6.I. 5° du code de
commerce par des clauses permettant une rupture sans préavis » (Cass. Com, 25 septembre 2007, Beaumont
Automobiles c. Brousse)
• L’article L.442-6.I. 5° du code de commerce relève de la responsabilité délictuelle
« La responsabilité pour brusque rupture d’une relation commerciale établie, fondée sur [l’article L.442-
6.I 5°], est de nature délictuelle » ( Aix-en-Provence, 23 octobre 2008, CCP. c. Derka Automobiles)
Une solution longtemps discutée mais désormais consacrée par plusieurs décisions concordantes de la Cour de
cassation (Cass. Com, 6 février 2007, 10 janvier 2009, 15 septembre 2009, 13 octobre 2009, 11 mai 2010)
Les dispositions contractuelles de droit applicable et d’attribution de juridiction ainsi que
les clauses d’aménagement de la rupture (préavis, définition contractuelle de la faute
grave pour l’exclusion du préavis, calcul du préjudice lié à la rupture) sont ineffectives.
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13. 2. Quels sont les faits ou comportements qui caractérisent une rupture ?
Le cas général : la rupture Les modifications
totale, la décision de substantielles de la
rompre relation commerciale
La rupture partielle
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14. 4. La faculté résiduelle de rompre les relations commerciales sans préavis (ou avec un
préavis écourté)
Les inexécutions contractuelles de la
victime
La force majeure et
l’impact des circonstances économiques
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15. 6. Comment évaluer le préjudice subi / invoqué ?
Le gain manqué La faute de la victime
Les autres postes
d’indemnisation
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17. Domaines d’intervention :
Contentieux commercial général,
Contrats commerciaux,
Concurrence déloyale,
Droit de la concurrence,
Droit de la vente et de la distribution,
Droit de l’Internet.
Quelques dates :
• Création de LM – a (2011)
• Bersay & Associés (2008-2011)
• Meffre & Grall (2003 – 2008)
• De Pardieu Brocas Maffei & Leygonie (2001 – 2002).
Erwan Le Morhedec Publications :
Avocat à la Cour • L’indemnisation de la rupture brutale de relations commerciales établies, La Semaine Juridique,
Septembre 2011
• L’alcool interdit d’Internet, Les Echos, 7 mars 2008;
•
LM - a
Marché public : “poison pill” à la crèche, Les Echos, 6 juillet 2006;
• Liens sponsorisés : faire valoir ses droits, La Revue des marques, Avril 2006;
50, avenue de la • Marchés Publics et concurrence : liberté, égalité, transparence, Revue Lamy Droit des Affaires,
Grande-Armée octobre 2004, n°75;
75017 Paris • Panorama des décisions récentes du Conseil de la concurrence en matière de marchés publics,
Les Petites affiches, mai 2002, n° 87-88, p. 4-11.
(tel.) 01 56 67 09 56
(fax) 01 56 67 09 25 Interventions
• Cercle de la Fédération Française des Spiritueux, 13 octobre 2010 : » Volet alcool de la loi HPST :
quel bilan un an après ? »;
lemorhedec@lm-a.fr • Cercle de la Fédération Française des Spiritueux, 21 mai 2008 : « La législation en matière de
http://www.lm-a.fr publicité pour les boissons alcoolisées » ;
• Formations en entreprise relatives à la rupture des contrats, à l’imposition de pénalités dans un
rapport commercial, aux pratiques restrictives de concurrence...