21. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
Chapitre l
Amalgame, propagande
et rumeur
~
"Si von, <onhaitn vou< <Mban-a,,,, d'nn wlMgn, on d'nn ron"j
rent, laissez entend1"e qu'il appartient à une secte, de préférence .
apocalyptique.. ." a. La Lande) 7
Les groupes de pression constitués pour lutter contre certains mou-
vements spirituels ou religieux n'hésitent pas à utiliser tout ce qu'ils
dénoncent chez autrui : propagation de rumeurs, délation, listes
noires, police secrète (puisque l'ADFI se targue officiellement de col-
laborer avec les renseignements généraux), amalgames, dérision des
croyances, etc.
Ces groupes de pression sont de véritables fabriques de rumeurs.
Comment peut-il en être autrement puisqu'ils refusent tout
contact avec les personnes ou les groupes qu'ils mettent en cause?
Ils collectent les témoignages très souvent déformés sous le coup
de l'émotion de parents apeurés, ou leurs simples interrogations,
ou les témoignages d'une poignée d'anciens adeptes qui le plus
souvent cherchent à régler des comptes avec le groupe qu'ils vien-
7. LeP";II!, 19 septembre 1998.
23
22. LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES
nent de quitter, pas toujours, d'ailleurs, pour des raisons avouables.
Ils collectent les articles qu'une presse plus intéressée par la contro-
verse que par la recherche de la vérité publie sur les groupes
qu'elles ont dans le collimateur, sans admettre le biais qu'ils intro-
duisent en alimentant les journalistes. Ainsi, une rumeur colportée
par ces groupes de pression deviendra une vérité pour ces associa-
tions à partir du moment où un journaliste l'aura publiée après
avoir été en contact avec l'une de ces associations.
La littérature même produite par ces associations est une véritable
invitation à la délation sur la base de rumeurs. Dans une brochure
intitulée "Les sectes" 9, les ADFI diffusent, par exemple, une liste
de symptômes "d'appartenance sectaire" (voir planche 2, page 92).
Parmi ceux-ci figurent "la modification du comportement, de la tenlte
vestimentaire, du vocabulaire, des œntres d'Ùltérêt, la multiplication des
réunions en semaine, le week-end, les déplacements en France Olt à l'étran-
ger, les nombreux appels téléphoniques, le courrier abondant (. . .J". Bref,
toute personne s'enflammant pour une cause nouvelle à laquelle
elle décidera de consacrer du temps et de l'argent pourra, sur la
base de cette liste, être suspectée. Quand on connaît la vigueur du
tissu associatif et du bénévolat en France, on voit les risques de
dérapage qu'un tel texte peut créer.
Par ailleurs, les ADFI reconnaissent travailler en étroite collabora-
tion avec les renseignements généraux qu'elles jugent "essentiels
dans leur action" 9 (voir planche 3, page 93). Quand on sait que
cette police auxiliaire gère des fichiers nominatifs dans lesquels
sont indiquées les convictions politiques, philosophiques et reli-
gieuses des intéressés et que, parmi leurs méthodes d'information,
figure la constitution de notes anonymes, les fameux "blancs", on
8. "Les sectes". Association pour la défense des familles ct de l'individu. Brochure non datée.
9. Note de la direction départementale des interventions sociales du déparrcmem de Loire-Atlantique en
date du 3 février 1989.
24
23. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
ne peut que craindre le pire sur cette "étroite collaboration" au
regard des libertés fondamentales et notamment du respect de la
vie privée. Une anecdote illustrera cette connivence. Un chef d'en-
treprise dont le principal collaborateur avait été mis en cause par
l'ADFI alla voir cette association, dans le but de protéger son
entreprise contre la propagation de fausses allégations déstabili-
santes pour cette dernière. La présidente de l'UNADFI le reçut
dans son bureau en compagnie d'un prêtre catholique, le père
Trouslard. Quel ne fut pas son étonnement lorsque ce dernier lui
présenta les photographies de plusieurs manifestations auxquelles
avait participé son collaborateur! D'où avaient pu provenir ces
photographies sinon des RG qui sont systématiquement informés
lors du dépôt des déclarations de manifestation ?
DÉRISION DES CROYANCES 1
Les groupes de pression tels que l'ADFI et le CCMM 10 prétendent
toujours refuser de juger les croyances pour ne dénoncer que les
faits. Pourtant, leurs écrits regorgent de jugements péremptoires
sur les croyances des groupes qu'ils attaquent. Voici quelques
extraits du bulletin de liaison des ADFI :
modèles éthiques et intellectuels douteux proposés par ces mouvements. " 11
fi •••
"... indigence d'un message merzJeilleux et peu élaboré dissimulé derrière une
phraséologie pompeuse faite de concepts à la mode. Absence de rigueur et flou
de la pensée, simplisme des condllsim/s." 12
"C'est de la science-fiction. Le songe d'lm foll. Ces gem se croient sllr Ime
autre planète." 13
"Une doctrine qui cache son imignifiance sous lm flot de néologismes altJJi
creux qlle prétentieux." 14
10. Centre contre les manipulations mentales, association créée en 1981 par l'écrivain Roger Ikor, vice-
présidcm de l'Union rationaliste.
Il. UNADFI. BIII/" n'O.
Il. UNADFI. BIII/" n'13.
13. UNADFI. Blllk, n'lI.
14. UN AD FI. Bldl" n'18.
25
24. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
" ... à partir d'lin mélange confils de science-fiction et de pratiques psycha-
nalytiques, le tout enrichi d'ocCltltisme et d'lin fatras d'alliances secrètes. JJ 15
"Ces éluCltbrations religieuses et Illédicales ... " 1(,
"Un délire ÙlS1üpassable ... " 17
De tels jugements n'empêchèrent pas la présidente de l'UNADFI
de déclarer en 1994 : ''l'UNADFI s'est toujours interdit, dam son
action, de juger des idéologies, philosophies, doctrines ... " 18
Même rengaine du côté d'Alain Vivien, ancien président du
CCMM. Dans un même article, il annonce "nous nom interdiso1lS
absolulllent de porter tin jugement sllr les mm/ictions, réelles 011 Sltpposées"
mais écrit plus loin à propos du fondateur d'un mouvement reli-
gieux qu'il déteste: "VOltS pOllvez l'interroger tant sur la cltlture du petit
pois que sltr les OVNI, /'éducation, la défeme, etc. Il est omniscient pour
être omnipotent. Som lin verbiage scientifique, le "maître" diffme une pen-
sée propre à duper des individm faibles 011 en recherche." 19
Dans le chapitre suivant, nous verrons que ces groupes de pression
sont en fait imprégnés d'une idéologie matérialiste antireligieuse qui
assimile les croyances et pratiques religieuses à des pathologies. 20
Le danger d'un glissement du combat mené par ces groupes de
pression vers une attaque des religions a été perçu par plusieurs
personnalités religieuses lors des débats ayant conduit au vote de
la loi About-Picard. Ainsi le pasteur Jean-Arnold de Clermont,
président de la Fédération protestante de France, déclarait, en juin
15. UNADFI. Bulles n036.
16. UNADFI. B"II" n036.
17. UNADFI. B"II,s n036.
18. Lt:' Afrwdt1 des Dé/MfJ, juillet-août 1994.
19. Conférence d'Alain Vivien publiée dans ]a revue de: l'association 11 Nouveaux droîts de l'homme ",
20. I.è docteur Badichc, psychiatre cr ami du fondateur de l'AD FI, assimilait l'adhésion à une idéologie
religîcuse à une psychose passionnelle.
26
25. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
2000 : liEn réalité, derrière la lutte coJttre les sectes, c'est l'ensemble des
courants religieux qui doit se sentir menacé." JI
DÉLATION
Nous sommes en démocratie et les libertés fondamentales sont, en
principe, protégées, mais les activistes des groupes de pression
"anti-sectes" sont toujours prompts pour faire pression sur les
libraires afin de faire retirer de la vente des livres qui "sentent le
soufre", faire pression sur des propriétaires de salles pour empêcher
la tenue d'une conférence ou d'une exposition, dénoncer l'apparte-
nance d'une personne à un mouvement "sectaire", etc.
Ainsi, en janvier 1992, apprenant qu'un mouvement religieux
qu'elle avait dans le collimateur organisait une conférence dans un
hôtel de Nantes, l'ADFl envoyait une lettre au directeur de l'hôtel
avec ces propos: "Peut-être ignorez-lious que VOltS allez affaire à une asso-
ciation qui pourrait nuire à llotre image de marqlle. (. .. ) Nom nolIS
sommes fait lm del10ir de 1I0US donner cette information pour que 1I0US pui.f-
siez prendre les décisions les meillettres concernant lIotre commerce" 22 (voir
planche 4, page 94). Ce qui n'empêchait pas un représentant local
de l'ADFI, un mois plus tard, de déclarer en réponse à la question
"les sectes trouvent pourtant des lieux d'accueil pour leurs confé-
rences ?" : liOn est en démocratie. Tollt le monde a heurmsement le droit
de IOller une salle pOlir y mener des actillités. " 23
Récemment, un journal niçois mentionnait ainsi l'intervention de
l'ADFI : ''L'ADFl a coJttacté le syndicat des hôteliers qui, en possession
des deux rapports parlementaires sllr les sectes en France, a alerté ses adbé-
rents. Depuis, l'Aston et le Reldisson ont refltsé de 10ller leurs salles à des
moullements répertoriés comme sectaires. " 24
21. La Croix 22 juin 200ft
1
22. Lettre d'ADFl Names il Otdînn, datée du 23 janvier 1992.
23. "Des sectes et: des hommes" LI N(}/It'i;/k Rf1J11/;/Ùf!1t' cl" Cenlre-(Jm:st, 13 février 1992.
24. "Dix-huit mOuvements sectaires implantés dans la ville", Nicf-At.TtÙ/, 18 septembre 2001.
27
26. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
Cette utilisation des rapports parlementaires à des fins discrimina-
toires est d'ailleurs parfaitement illégale.
INCITATION INDIRECTE À LA VIOLENCE 1
Le plus grave dans cette entreprise de délation fut la circulation de
listes noires répertoriant des personnes, des chercheurs dits "favo-
rables aux sectes", des entreprises privées ou des associations pré-
sentées comme "filiales de sectes" simplement parce qu'un de leurs
dirigeants appartenaient à un mouvement jugé hors normes. En
1991, le CCMM alla même jusqu'à publier dans une brochure inti-
tulée "les sectes" une liste "d'entreprises privées 1Itilisant marqltes dépo-
sées et techniq1les de Dianétiqlte et Scientologie et/o1l ayant p01lr dJefs des
scientologms confirmés" (voir planche 5, page 95) !
Au lendemain d'un attentat à la bombe contre les locaux de
l'Eglise de l'Unification, Le Figaro, au lieu de dénoncer cet acte
odieux en termes virulents, donnait en pâture aux lecteurs dans un
article intitulé "L'inquiétante prolifération des sectes" une liste
d'entreprises, d'écoles, de cabinets privés dont le seul tort était
d'avoir parmi leurs dirigeants des membres de nouveaux mouve-
ments spirituels ou religieux!
Ce genre de délation peut entraîner des actes malveillants drama-
tiques. Depuis l'apparition de ces campagnes il y eut pas moins de
huit attentats à la bombe contre des mouvements désignés à la
vindicte publique par des organisations telles que l'ADFI ou le
CCMM. Le dernier en date valut d'ailleurs à son auteur une
condamnation étrangement clémente à deux mois de prison ferme
alors que la bombe qui, heureusement, n'avait pas explosé était,
selon les artificiers, faite pour tuer.
Une autre affaire est intéressante à signaler car elle montre les
moyens douteux qu'un dirigeant de l'ADFI peut employer lors-
qu'il se croit tout permis. En juillet 1998, un couple de sciento-
logues recevait un fax portant l'entête de "l'Ordre des templiers"
28
27. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
et contenant des menaces de destruction totale (voir planche 6,
page 96). Le couple porta plainte et une enquête permit de retra-
cer l'origine du fax: il avait été envoyé par le fondateur de l'ADFl
d'Angers, Yves Damon ! L'affaire est en cours.
MANIPULATION DE L'INFORMATION 1
Le principal ressort de la manipulation de l'information - et par ce
biais, de l'opinion publique - est la technique bien connue de
l'amalgame qui, à force de répétitions, crée dans le public une faus-
se représentation mentale des mouvements spirituels et religieux.
Par ailleurs, la dramatisation, par les émotions qu'elle entraîne,
empêche le raisonnement rationnel, ce qui aggrave encore l'amal-
game.
Prenons par exemple le cas, combien douloureux, du suicide.
Récemment, un enfant de onze ans s'est suicidé dans un établisse-
ment laïque de Lyon: cela n'a entraîné que quelques lignes dans la
presse. Le 21 juin 2001, un enfant de quatorze ans se suicidait dans
un village d'enfants dirigé par une association scoute indépendan-
te et une communauté religieuse catholique traditionaliste accu-
sées d'être une "secte" : cela fit la une des journaux locaux et des
télévisions nationales. Il est d'ailleurs troublant de constater que
dans ce cas précis, le suicide de l'adolescent a eu lieu après que la
famille de son père eut contacté l'ADFl. 25
Le suicide est la seconde cause de mortalité chez les jeunes de 15 à
25 ans. Il y a en France 8000 suicides par an, soit un taux de 0,13
suicide pour 1000 habitants. Si on appliquait ce taux aux 500 000
Français accusés de faire partie de "sectes", on devrait constater
qu'il se produit chaque année dans ces mouvements au moins 65
suicides par an ! On en est loin, même avec le drame du Vercors.
25. Suicide du jeune R. au village d'enfants de Rhumont, Je 21 juin 2001.
29
28. LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES
Les sociologues des religions qui essaient d'étudier scientifique-
ment les nouveaux mouvements spirituels et religieux ont des
conclusions qui vont à l'opposé des affirmations péremptoires pro-
pagées par les associations qui luttent contre ces mouvements.
U ne autre ficelle de la manipulation de l'information consiste à
tronquer cette information. Toute nouvelle qui pourrait entraîner
un mouvement de sympathie à l'égard des nouveaux mouvements
spirituels et religieux: actions des bénévoles, témoignages positifs,
témoignages de soutien, etc., est soigneusement passée sous silen-
ce et fait l'objet d'une censure quasi systématique. Tout journalis-
te tentant de faire son travail objectivement sera accusé de "servir
la soupe aux sectes" ou de se livrer à du "prosélytisme". Comme
avec l'amalgame, c'est ainsi que l'on fausse les représentations
mentales du public concernant ces mouvements.
Nous le verrons dans le chapitre suivant: l'ADFI et le CCMM uti-
lisent un langage stéréotypé, empreint d'une idéologie matérialis-
te antireligieuse. L'utilisation de stéréotypes pour influencer les
personnes allant consulter ce type d'associations a été confirmée
par une enquête sociologique réalisé par le "Centre d'étude sur les
nouvelles religions" (CESNUR) auprès des partants de la Nouvelle
Acropole, un mouvement étiqueté comme "secte". Le sociologue a
d'abord constaté que ces partants, dans leur grande majorité,
n'avaient rien à reprocher au groupe qu'ils avaient quitté et qu'ils
restaient en bons termes avec lui, ce qui, bien sûr, va à l'encontre
des idées reçues. Interrogés sur la description de leur vécu dans le
groupe, ils employaient des termes très divers. Les quelques par-
tants en mauvais termes avec le groupe avaient été, pour la plupart
d'entre eux, en COntact avec l'ADFl et dans ce dernier cas ils
employaient curieusement les mêmes termes pour décrire leur
vécu! 2(j
16. Erude sur les partants de la Nouvelle Acropole, par Ivlassimo Jrucovigne, Ctsnur.
30
29. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES f
Parfois, les propos frisent carrément la paranoïa, comme ceux que
tint la présidente de l'UNADFI à l'antenne en 1997, lors d'une
émission consacrée à l'association "Le Patriarche": "Mais savez-vOlIS
qui est-ce qui détient la plupart du patrimoine français, déjà ait point de
Vile immobilier ? Ce ne sont que les sectes. Qtti est capable actml/emellt
d'acheter ces châteaux et ces manoirs? Eh bien ce sont les adeptes qui sont
des otages et qui sont les esclaves de ces gOltrolts et qui fo1lt tOlite la main
d'œttvre et qui retapent ces châteallx, donc c'est la même chose." 27
DESTRUCTION DES FAMILLES r
A cause des techniques décrites précédemment, la personne venue
se renseigner dans une des associations telles que l'ADFlou le
CCMM repart complètement affolée et souvent incapable de rai-
sonner. Ces associations ont beau jeu de faire mine de vouloir ras-
surer, tempérer et dédramatiser, alors même qu'elles viennent de
faire tout le contraire; c'est l'incendiaire qui crie "au feu !" et qui
se déguise en pompier faisant semblant d'éteindre l'incendie qu'il
vient d'allumer. Un exemple illustrera ce propos. Nous avons
volontairement changé les prénoms.
Robert, membre actif d'un mouvement religieux, annonce son
mariage avec Véronique à ses beaux-parents. Ces derniers SOnt très
heureux mais le beau-frère de Robert, alerté sur les convictions
religieuses de Robert que ce dernier ne cache d'ailleurs pas (convic-
tions partagées aussi par sa future épouse) décide de mener sa
"propre" enquête. Robert ne se doute de rien et tout heureux à
l'idée d'une belle cérémonie de mariage, il envoie ses invitations à
toute sa belle famille. Quelle n'est pas sa surprise de constater
qu'au dernier moment la moitié de sa belle famille se décomman-
de et refuse d'assister à la cérémonie et au banquet! Après enquê-
te, il s'avère que tous les membres de sa belle famille ont reçu de
la part du beau-frère une documentation estampillée du tampon
27. Emission "Le droit de savoir" surit.' thème: "SeCtes: pièges ct magot". TF1, 16 juin 1997.
31
30. LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES
de l'ADFI et du CCMM. Parmi les documents, figure notamment
un article de presse mensonger mettant en cause Robert, dont le
journaliste avait été condamné quelques années auparavant pour
diffamation (bien sÜr aucune mention de cette condamnation ne
figurait dans le dossier). Ainsi, la documentation venant de ces
associations contenait des informations nominatives, fausses qui
plus est, qui étaient communiquées à un membre de la famille
pour exacerber un conflit qui, sans cette intervention, aurait cer-
tainement pu être résolu. Peut-on encore parler de "défense de la
famille" ?
On ne compte plus les cas de divorce oÙ l'intervention d'une asso-
ciation "anti-secte" dans la procédure judiciaire a eu des résultats
désastreux comme le refus d'accorder la garde ou même le droit de
visite des enfants à l'un des deux époux lorsqu'il était accusé d'ap-
partenance à un nouveau mouvement religieux ou spirituel.
Pourtant la Cour européenne des droits de l'homme a clairement
condamné ce genre de pratiques discriminatoires. 28
Les rumeurs colportées par des organisations telles que l'ADFI ou
le CCMM peuvent détruire des réputations et parfois des Vies,
comme nous allons le voir.
1 LE CAS DE BERNARD LE14PERT
Bernard Lempert est psychothérapeute, spécialiste de la maltrai-
tance d'enfants. Il a fondé une petite association, l'Arbre au milieu.
En 1996, il constata avec stupeur que cette association faisait par-
tie d'une liste noire de groupes religieux ou spirituels désignés à la
vindicte publique dans un rapport parlementaire dit "rapport
28. Arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme en dace du 23 juin 1993, affaire Hoffmann
c/Autriche. Extrait de l'arrêt: "Considérer qu'un groupe minoritaire sera automatiquement marginalisé
d'un point de vue social méconnaît le principe même d'une société démocratique pluraliste (. .. ).
Nonobstant tout argument contraire possible, on ne saurait tolérer une distiocrion fondée pour l'essen-
tiel par des considérations de religions."
32
31. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
Gest-Guyard". Parmi les personnes à l'origine de cette accusation
de "secte" figurait la fondatrice d'une antenne locale de l'ADFI.
Bernard Lempert avait soigné une jeune femme gravement ano-
rexique qui était la fille de la fondatrice de l'ADFI Finistère. A la
suite de ce traitement, la jeune femme avait préféré s'installer à
Aix-en-Provence pour fuir une mère omniprésente. La mère était
persuadée que c'était le "gourou" Lempert qui avait enlevé sa fille.
Bien que le rapporteur de la commission parlementaire sur les
"sectes" reconnût son erreur, et qu'un jugement du tribunal de
Rennes rendu en octobre 1998 blanchît Bernard Lempert, la
rumeur continua à courir et à jeter l'opprobre sur l'Arbre au milieu
et sur son fondateur. Aujourd'hui encore, on continue à lui refuser
sa participation à des colloques sur l'enfance maltraitée malgré la
solide réputation qu'il a établie dans ce domaine auprès des assis-
tantes sociales, des avocats et des magistrats. Le journal Libération
qui révéla toute l'affaire fut l'objet d'une plainte en diffamation
déposée par la présidente de l'UNADFI le 29 juin 1998. 29 Mais
trois jours avant l'audience, l'UNADFI renonça à poursuivre le
journal. 30
LE CAS D'ANDRÉ POULIN
Depuis 1996, un brillant économiste genevois, André Poulin, est
accusé, sans la moindre preuve, d'être un des dirigeants de rOTS.
Bien que son principal accusateur, Robert Sévenier, ait été
condamné dès 1997 pour diffamation, la rumeur continua de cou-
rir après cette date. Janine Tavernier, présidente de l'UNADFI,
prit pour argent comptant cette rumeur sans fondement répandue
par Robert Sévenier. Le 23 mai 1997, elle écrivit qu'André Poulin,
29, "Deux ans pour éteindre le bûche.·r", par Franck Johannes, Libb':llÙm, 24-25 octObre 1998.
Voir aussi: "Enfanrs : silence, On maltraicc", de Gilbert Charles, L'E:jweJJ. 26 août 1999.
30. LibératioJ1. 5 octObre 1999.
33
32. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
"né à Genève, habitant Onex maintenant, a bien été membre de
rOTS". Sur une simple dénonciation! Jacques Guyard, rapporteur
de la commission d'enquête parlementaire sur le phénomène sec-
taire, reprit lui aussi la rumeur. Le 15 mai 1998 il mit nommément
en cause cet économiste ainsi que son père, dans une lettre adres-
sée à Lionel Jospin, laissant même entendre qu'André Poulin avait
des liens avec un marchand d'armes libyenY Plus tard, Janine
Tavernier reconnaîtra son erreur. Mais trop tard, rien n'arrêtera la
rumeur, d'autant plus que Robert Sévenier pourra utiliser mainte-
nant les écrits de Janine Tavernier. André Poulin, qui a dû aban-
donner la plupart de ses mandats pour se défendre, a été victime
de deux alertes cardiaques. Pour lui, le calvaire continue.
LE CAS DE LA FAMILLE
A 6 heures du matin, le 9 JUIn 1993, deux communautés d'un
groupe chrétien appelé "La Famille", l'une à Lyon et l'autre à Aix-
en-Provence, firent l'objet d'une descente inattendue et violente de
policiers armés. Quatre-vingts enfants furent littéralement arra-
chés à leurs parents et enfermés dans des institutions pendant 51
jours dans l'isolement et la terreur.
Tous les membres adultes des deux communautés furent détenus
par la police en garde à vue pendant 48 heures. On les interrogea,
parfois sans ménagement, on leur mentit, on les menaça de vio-
lence physique et on leur dit qu'ils ne reverraient jamais leurs
enfants. Une fois les parents libérés, on les empêcha de voir leurs
enfants, ou même de leur parler. On ne leur permit pas de leur
envoyer des affaires personnelles, même pas une brosse à dent ou
un ours en peluche.
31. Lettre de]. Guyard à LJospin du 15 mai 1998, reproduire dans le magazine L'll/m/ft, en date du
1er juille, 1998.
34
33. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
Finalement, après une séparation forcée de sept semaines, les
enfants purent retrouver leurs parents le 29 juillet. La forte indi-
gnation manifestée dans le monde entier par ces traitements bru-
taux incita les juges à libérer les enfants, dont un grand nombre
étaient désorientés et en état de choc suite à cette épreuve.
Une plainte en justice de l'ADFI pour mauvais traitement d'en-
fants était à l'origine de cette descente matinale qui déchira des
familles et causa des traumatismes indélébiles à de nombreux
enfants innocents et à leurs parents. Outre le fait que rien, pendant
la garde des enfants et des parents, ne permit de mettre en évi-
dence le moindre mauvais traitement, l'instruction se poursuivit
pendant des années. En janvier 1999, faute de preuves, le juge
d'instruction décida qu'il n'y avait pas matière à poursuivre. L'AD-
FI, dans son acharnement aveugle, fit malgré tout appel de cette
décision, mais cet appel fut rejeté le 24 février 2000.
A l'étranger, ce sont de semblables accusations colportées par des
associations telles que le CAN qui ont été à l'origine de descentes
de police similaires contre d'autres communautés de La Famille.
Rien ne permit jamais de mettre en évidence le moindre mauvais
traitement d'enfants dans ces communautés.
A la suite de ces opérations injustes, l'expert en religion]. Gordon
Melton dira: "Les enjânts et les jeunes de La Famille ont véritablement
été victimes de malltiaÙ traitements maÙ c'est le Cult Awareness NetUJork
(CAN) et son éqttivalent /rançaÙ lADF! qui sont directement respon-
sables de ces mauvais traitements et de cette soltffrcmce.
11
1LE CAS DU DOCTEUR JULLIEN 1
Le 6 mars 2000, le docteur Yves ]ullien, marié et père de quatre
enfants, mit fin à ses jours. Selon son épouse cet acte avait été
déclenché par une rumeur persistante attachée au centre qu'il avait
35
34. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
créé au château de l'Isle-sur-Serein pour accueillir des toxicomanes
et des personnes atteintes de troubles psychiques graves. Cette
rumeur faisait de son centre une "secte" et de lui un "gourou".
Pourtant, patients, infirmiers et médecins qui le côtoyaient étaient
unanimes: les accusations portées contre Yves Jullien et son asso-
ciation étaient totalement infondées et le docteur Jullien était irré-
prochable. Parmi ceux qui ont colporté cette rumeur et lui ont
donné crédit, on trouve l'antenne ADFI de l'Yonne qui confirmait
par lettre que trois responsables du centre créé par le docteur
Jullien étaient membres d'une "secte" (voir planche 7, page 97) et
l'UNADFI dont la présidente admettra en public avoir confirmé
par téléphone qu'un des dirigeants de ce centre avait séjourné en
Inde et connaissait le gourou Saï Baba 32 • En fait, le beau-père du
docteur Jullien était indien et l'épouse du docteur avait rencontré
Saï Baba dans les années soixante-dix! Là encore, les excuses faites
sur un plateau de télévision par la présidente de l'UNADFI ne
répareront pas les vies brisées.
LE SUICIDE D'UN JEUNE SCOUT 1
Le 21 juin dernier, un enfant de quatorze ans se suicida dans une
école dirigée par une association scoute indépendante et une com-
munauté religieuse catholique traditionaliste accusées d'être une
"secte". Cet enfant, dont les parents étaient séparés, s'était ouvert
de certains problèmes dans son école auprès de la famille de son
père qui avait ensuite contacté l'ADFI et déposé une plainte en
justice. Devant la proportion que prit soudain cette affaire, l'enfant
fut probablement très troublé. Il adressa un courrier à la famille de
son père pour dire que désormais tout allait bien. Son suicide inter-
vint peu de temps après.
32. Déclararion de Janine Tavernier lors de l'émission li Vic privée, vie publique Il de Mireille Dumas.
Diffusion France 2, 21 mars 2001.
36
35. LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES
Chapitre II
Une idéologie de l'exclusion
"Une fois encore, satls recul ni rete1llte, les groupes anti-sectes,
qu'ils soient laïques ou religieux, tramposent dam l'Hexagone un
discours psychiat1"ique forgé aux Etats-Unis dam les années
soixante-dix. Limitant leur action au lobbyÙlg parleme11taire, au
forcing médiatique et à la guérilla judiciaire, ces nouveaux croisés
ambitio1lne11t d'imposer un contrôle social sur des problèmes qui
relèvent de la vie personnelle et familiale." (Thierry Pfister)33
L'idéologie d'exclusion véhiculée par les groupes de pression lut-
tant contre certains mouvements religieux prend racine dans une
conception matérialiste de l'homme associant toute pratique reli-
gieuse intense à une pathologie.
Dans le milieu des années soixante-dix, a été mis en place dans plu~
sieurs pays un véritable réseau d'associations chargées de jeter le dis-
crédit sur tous les groupes religieux en dehors des grandes religions
classiques et d'organiser à leur sujet de véritables campagnes de dés-
information. Jean Hadot, professeur à l'Université libre de Bruxelles,
a appelé fort justement ce lobby "la secte des adversaires des sectes".)4
.33. "Lenn; ouverte aux gardiens du mensonge 1 Je Thierry Pfisrer, Albin Michel, 1998.
. 4. "Lettre ouverte à la secte des adversaires des sectes", de Anne MmdIi, Labor, 1997, page 73.
3
37
36. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
Aux Etats-Unis, le premier groupe organisé de lutte contre les
nouveaux mouvements religieux fut le "Citizens Freedom
Foundation" (CFF - la Fondation pour la liberté des citoyens)
fondé en 1973 par un militaire à la retraite, William Rambur, et
un autodidacte, Theodore Patrick. l5 Peu de temps après, des psy-
chiatres antireligieux, dont le docteur John Clark, fondèrent un
groupe "d'experts" pour soutenir les actions du CFF ou de groupes
similaires. Le docteur Clark était un athée convaincu. Dans la
revue The American Atheist, il écrivit en mai 1977 un essai contre la
religion dans lequel il s'exprimait en ces termes: "La religion c'est
de la politique, et toujours, la politiqm la plltS autoritaire et la plus réac-
tiolllzaire."
LA "DÉPROGRAMMATION", UNE ACTIVITÉ ILLÉGALE 1
U ne des actions immédiates du CFF fut la mise au point et la pro-
motion d'une méthode baptisée "déprogrammation" ("deprogram-
ming" en anglais). Il s'agissait d'une pratique illégale consistant à
enlever un membre d'un groupe religieux ou philosophique contre
son gré et à tenter de lui faire abandonner ses croyances au moyen
de techniques psychiatriques ou par la force. Les fondements
même de la "déprogrammation" sont simplistes: le mental serait
une sorte de bande magnétique sur lequel s'imprime un program-
me modelant le comportement de l'individu; ce programme pour-
rait être effacé et la bande magnétique réimprimée afin de modi-
fier le comportement et les valeurs d'une personne ; les nouveaux
mouvements religieux imprimeraient dans la tête d'une personne
un mauvais programme ; les "déprogrammeurs" seraient là pour
effacer cette "erreur de programmation" à l'aide d'un traitement,
et le remplacer par un programme acceptable (à 15 000 dollars la
tentative, bien sûr).'"
35 . 36, lJ Ler our childrcn go", Je Tcd Patrick et Tbm Dulack, Ballaminc' Book, 1977,
New )(j,-/z TimfJ, du 2 septcmbre 1974
38
37. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
L'enlèvement de la victime posait un grave problème mais Ted
Patrick était persuadé que, s'il obtenait la coopération des parents
tout au long du processus, des charges ne pourraient guère être
retenues contre les auteurs de cet enlèvement. En accord avec des
parents apeurés, Ted Patrick expérimenta cette technique sur
divers membres de groupes religieux en les enfermant contre leur
gré, en ridiculisant leurs croyances et en se servant du désarroi de
leurs parents pour créer chez eux un sentiment de culpabilité afin
qu'ils abandonnent leur groupe. On ne compte plus les scandales
liés à la "déprogrammation" car l'usage de la violence était fré-
quent. Ted Patrick fut condamné plusieurs fois à des peines de pri-
son ferme aux Etats-Unis.
Devant le tollé de protestations que cette pratique entraîna, le CFF
dÙt déclarer officiellement qu'il était contre la détention d'une per-
sonne contre son gré. Le CFF, qui fut rebaptisé plus tard CAN
(Cult Awareness Network - Réseau de surveillance des "sectes"),
continua néanmoins à soutenir la pratique d'une "déprogramma-
tion volontaire" (une pratique de consultation psychiatrique ou
psychologique au cours de laquelle l'adepte est soi-disant libre de
partir à tout moment). En 1991, on trouvait par exemple dans le
conseil d'administration de CAN le Dr Paul Martin, directeur du
centre Wellspring spécialisé dans le traitement d'anciens adeptes.
Le programme de ce centre est édifiant: dans le paragraphe consa-
cré au programme de "réhabilitation", on lit qu'il s'agit de corriger
les "pensées tordues" ("distorted thinking"). A la rubrique "usage
du téléphone", il est précisé que les patients n'ont pas le droit de
téléphoner à l'extérieur! Les appels d'urgence ne peuvent être faits
que par le personnel soignant. En janvier 1991, une jeune hôtesse
de l'air membre d'un groupe chrétien fut retenue à Wellspring
contre son gré, à la demande de sa mère, et dut y subir des traite-
ments qu'elle estima dégradants. Après s'être échappé par la ruse
avec l'aide de son mari, elle porta plainte.
39
38. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
Les preuves montrant les liens entre le CAN et la pratique de la
déprogrammation forcée, même après la récusation officielle de
cette technique par le CAN, sont accablantes. Plusieurs dépro-
grammeurs ont témoigné sous serment être entrés en contact avec
les parents de leurs victimes grâce au CAN. En 1993, un dépro-
grammeur notoire, Galen Kelly, fut condamné pour enlèvement et
séquestration et passa plus d'un an en prison avant de bénéficier
d'une libération conditionnelle. Or Galen Kelly avait été le direc-
teur de la sécurité lors du rassemblement national du CAN en
1991. En 1992, il devait aussi tenir ce poste mais son arrestation
l'en empêcha. Le coup de grâce vint en 1995 lorsque la justice
américaine statua que le CAN était partiellement responsable de
la "déprogrammation" du jeune Jason Scott, membre d'un groupe
pentecôtiste. Le CAN fut condamné à verser une amende d'un
million de dollars au plaignant, ce qui entraîna la faillite de cette
association (voir planche 8, page 98) 37. Il est intéressant de noter
que le "déprogrammeur" de Scott, Rick Ross, un individu douteux
au passé judiciaire chargé, était celui qui, en tant qu'expert "anti-
secte" "conseilla" le Bureau de contrôle des alcools, tabacs et armes
à feu (ATF) tout au long du siège de Waco qui se solda, comme on
le sait, par une énorme bavure: un assaut désastreux et la mort des
86 membres de la communauté.
VERS UNE LÉGISLATION D'EXCEPTION
En 1979, fut créée une autre association, étroitement liée au CFF,
appelée ''American Family Foundation" (AFF - Fondation de la fa-
mille américaine) sous l'impulsion du psychologue américain
Georges Swope et du psychiatre John Clark. Dans les statuts de
cette association, les buts apparaissaient clairement : "... La
Fondation supportera les recherches psychiatriques et médico-légales dans les
37. Tribunal fédéral des Erats-UnÎs, district de WashingtOn Ouest. Cas nO C94-79C Jugement du 3 o([obre
1995.
40
39. LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES
zones de modificettion dit comportement et fera connaître ces informatio1lS au
public." L'AFF était une sorte de bras séculier du CFF plus spécia-
lement chargé d'influencer les législateurs afin gue des lois soient
promulguées contre les nouveaux mouvements religieux. 38
Les associations "anti-sectes" américaines militèrent en faveur de
nouvelles législations permettant aux professionnels de la santé
mentale de "traiter" les membres de nouveaux mouvements reli-
gieux. Richard Delgado, l'avocat conseil du CFF, les psychiatres
Clark et West .39 tentèrent par exemple de faire adopter dans divers
états américains une telle proposition de loi. Cette proposition pré-
voyait gue "toute personne gui a fait l'objet de persuasion coerci-
tive de la part d'une secte" puisse être mise sous une tutelle pro-
visoire par décision d'un juge sur demande d'un parent, d'un ami,
d'un conjoint, etc. Le tribunal pouvait demander gue l'adepte soit
examiné par un psychiatre ou un psychologue diplômé. L'ordre de
mise sous tutelle devait inclure un programme approuvé par le tri-
bunal destiné à faire gue l'adepte revienne à la raison au terme de
sa période de tutelle:o
Cette proposition de loi fut rejetée aux Etats-Unis, comme d'autres
tentatives similaires.
Le député français Alain Vivien s'en inspira néanmoins. Dans un
rapport au gouvernement sur les "sectes" publié en 1985, il tenta
d'adapter ce projet américain dans sa proposition numéro 6. Ceci
entraîna un tollé de protestations dont celle du président de la
Fédération protestante de France. 41
38. Incorporation papecs - American Farnîly Founciarit)n, 1979.
39. Le psychiatre Louis ]tJlyon X'est est connu pour avoir causé la mort de l'éléphant Tusko, en 1962, au
zoo d'Oklahoma, en lui administrant une trop forte dose de LSD lors d'une expérience Ct pour avoir
publié des érudt.·s particulièrement racistes.
40. Senate BilI 8421 - Assembly Bill 10555.2 mars 1982.
41. Rapport: Les senes en France, J'Alain Vivien, Documentation française, 1985.
DécIMation du pasreur Maury, président de la Fédération protestante de France, cérémonie de la Com~
mémoration de la révocation dt' l'édit dt, Nances, 11 octObre 1985.
41
40. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
Dans un article publié dans l'Arizona Law Relliew}ollrJlal, Richard
Delgado se vantait du "soutien du gouvernement français en la
personne de M. Alain Vivien" sur sa "loi anti-sectes" ! 42
UN MOUVEMENT COORDONNÉ DANS PLUSIEURS PAYS,
VÉHICULANT LES THÈSES
DES PSYCHIATRES ANTIRELIGIEUX
Curieusement, des avatars du CFF apparurent au même moment
dans plusieurs pays d'Europe et au Canada. Il semble donc qu'il y
ait eu une certaine coordination car rien, dans l'actualité, ne justi-
fiait une telle simultanéité. En Allemagne et au Danemark, Haack
et Aagard fondèrent leurs propres mouvements, suivis de près par
les Français Guy et Claire Champollion qui fondèrent à Rennes
l'Association pour la défense de la famille et de l'individu (ADFI),
les Anglais, sous la conduite de Daphne Vane, les Canadiens, sous
la conduite de Mac Pherson. Tous ces mouvements opéraient sur
les mêmes bases : utiliser des avocats et des hommes politiques
pour faire passer leurs messages et tenter de modifier la législation
en vigueur, véhiculer les thèses de psychiatres antireligieux qui
assimilent l'appartenance à une "secte" à une maladie mentale,
notamment celles de Clark, de West et de Singer.
L'ADFI a régulièrement promu ces thèses et notamment celles de
John Clark (voir planche 9, page 99). Dans une étude de Clark,
distribuée et commentée par l'ADFI, il est par exemple écrit: "Il
faltt dire tOllt d'abord qlle s'il)' a lme schizophrénie évidente et classiqlle
chez la plttpart des cOllllertÙ, lellr état mental ne réagit pas allx médica-
ments anti-psychotiqlles Olt à tOlites les tmtres formes de traitement normallx
dam ces cas-là. Ce n'est pas par ces méthodes qlle le psychologlle petit réta-
blir lm processlls de pensées l1017Jlaies (sic) et ceci d'alitant pills qlle d'après
42. il1"izond Lm; rez'itU'.!oIl17lûl, 1986.
42
41. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
les lois qui sont actttellement en lligllem; on ne pellt garder slt/fisamment
longtemps lm contrôle physiqtte POlir appliquer des thérapies de confronta-
tion. C'est-à-dire 1I1le thérapie qlli pourrait avoir lm certain sllccès, pOlir
rétablir la personnalité d'origine, par exemple comme cela a étéfait avec les
anâellS prisonniers de gtterre de Corée. Les médicaments anti-psychotiqlles
sont toujollrs actifs pOlir les callses aiglliiJ, mais ils n'ont aUClme influence
sllr les changements mentallx de ces personnes.
La méthode qlle l'on appelle maintenant le déprogramming obtient généra-
leme1lt, si elle est bien faite, !!Il succès relativeme1lt rapide, mais actuelle-
ment et pour des raisotlJ juridiqttes, il est impossible de recommander cette
thérctpie. "45
Le bulletin d'information de l'AFF communiquait régulièrement
des nouvelles des organisations "anti-sectes" étrangères, telles que
FAIR (Family Action Information and Rescue) en Angleterre,
Elterninitiative en Allemagne, l'ADFI en France. L'ADFI y était
même désignée comme étant une "organisation de ressources
outre- Atlantique" .+1
En 1978, l'ADFI engagea une attachée de presse permanente du
nom d'Alexandra Schmidt. A. Schmidt, de nationalité américaine,
était une étudiante en sociologie, spécialiste des "sectes en URSS".
Elle devint rapidement la tête de pont des associations américaines
en Europe.'i5
Alexandra Schmidt tenta de mettre sur pied, en collaboration avec
le psychiatre Antoine Lazarus, un centre d'étude et de documenta-
tion qui serait devenu, s'il avait réellement vu le jour, un labora-
toire de recherche largement subventionné par l'Etat. Ce projet,
appelé "CEDOS", faisait suite à une directive du psychiatre Clark
43. Etude du Dr Clark. Document Adfî, 1978.
44. "Amcrican Farnily Foundati(jn- Research ànd education about destructive cultism", AFF, 1987.
!~5. Curriculum Vitae, Alexandra Schmidt, annc:.:xé au projet CEDQS, 1981.
43
42. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
qui demandait la création "d'une étroite coopération internationa-
le sous la forme d'une association qui pourrait être un lieu de
recherches inter-spécialisé, et de traitement de données". Cette
directive de Clark était jointe en annexe au projet de création du
CEDOS. 4<> Le soudain départ d'A. Schmidt de l'ADFI mit fin à ce
projet.
A cette époque, A. Schmidt venait d'être inculpée suite à l'enlève-
ment et à la séquestration, en 1982, de la jeune membre de l'Eglise
de l'Unification, Claire Chateau (voir planche 10, page 100)'17. La
tentative de "déprogrammation" fut infructueuse et Claire
Chateau ne renia pas sa foi. Elle décida par la suite de retirer sa
plainte en justice afin de ne pas mettre en cause ses parents qui
avaient fait appel aux déprogrammeurs.
Selon plusieurs témoignages, d'autres enlèvements du même type
eurent lieu en France. A la fin des années soixante-dix, plusieurs
jeunes adultes appartenant à de nouveaux mouvements religieux
furent kidnappés et détenus contre leur gré, en France et en Suisse.
Pour renforcer les liens entre les associations "anti-sectes" de divers
pays, dont l'ADFI, et les psychiatres, plusieurs réunions donnant
une tribune à ces psychiatres et réunissant ces associations eurent
lieu: Paris, en 1980, Bonn, en 1981, Arlington, en 1982. Suite à
ce dernier colloque, Claire Champollion commentera en ces termes
la "déprogrammation" dans le bulletin de l'ADFI : "Notre respect de
la loi, il fallt l'avoller, n'est somient qm la peur dtt gendarme. Les circons-
tances et les mentalités sont différentes attx Etats-Unis, oit chaClln est pills
habitllé à p/'endre avant tOllt ses responsabilités, quitte à en sllpporter les
conséqltences. "48
11
46. Projet de crêation d'un Centre J'étude et de documentation sur les organisations sectaires ", 1981.
47. LiMrali01J. 8 mars 1982.
0
4.8. Bill/es, n 4.
44
43. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
Il y eut aussi la réunion de Barcelone, en 1987, à laquelle assistaient
les psychiatres Louis West et John Clark, la psychologue Margaret
Singer et l'ADFI. A cette réunion, Louis West déclara: "En tant que
médecin, je me sem attelé à une gmrre contre une maladie. L'augmentation
du taux de personnes prises par les sectes depuis vingt am permet de classer
cette maladie comme lme épidémie sur laqmlle on devrait orienter le travail
de la santé publique.!! 49 A propos de cette "épidémie", le docteur
West avait déclaré deux ans auparavant : "De toute évidence, le plus
grand des facteurs perpétuant cette épidémie est le protectionnisme de la
liberté: la liberté de religion, la liberté de parole, la liberté de réunion, la
protection des citoyens contre l'ingérence du gouvernement".50 Comme on
le voit, ces psychiatres qui influencèrent les associations "anti-
sectes" françaises n'étaient pas de farouches défenseurs des libertés
fondamentales.
Les conclusions de la réunion de Barcelone allèrent dans le sens de
la médicalisation du phénomène des "sectes" : "Nécessité de l'étude du
mécanisme législatifqui pe1771ettra aux parents qui ont lm enfant dam lme
serte de l'en faire sortir pendant lme période déterminée pour le faire exa-
miner et éventuellement soig1Je1: (. .. ) Impliquer l'administration pOlir
qu'elle comidère que les divers dysfonrtioJZ11ements psyrhologiques que pré-
sente lm individu qui se trouve dans une secte font partie dll domaine de la
santé mentale et que par amséqmilt son traitemellt devrait être assimilé
dam la nomenclature de la santé publique aux traitements des effets de la
dépendance (alcool) drogue).!! 51
Un bulletin du CAN de juin 1990 mentionnait qu'une réunion
internationale des groupes d'éducation sur les "sectes" avait eu lieu
à Paris en avril et qu'elle était organisée par l'American Family
49. BII/!<S, n"!7.
50. Dr Louis Jolyon West. Conférence du 28 octobre 1983. Cicizen's Preedom Foundaeion.
51. BIIII", nO!7.
45
44. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
Foundation (AFF) et l'Union Nationale des Associations de
Défense des Familles et de l'Individu (UNADFI) (voir planche 11,
page 1Ol). Le président de l'AFF, M. Herbert Rosale et la prési-
dente de l'UNADFI de l'époque, Mme Lasserre, co-présidaient
cette réunion. Dans le bulletin il était indiqué que la conférence
s'était intéressée à la création d'un organisme permettant de
découvrir des domaines où une coopération entre les organisations
serait possible. 52 A l'époque Margaret Singer était membre consul-
tatif du conseil d'administration de CAN.
L'ADFI trouva même le moyen de prendre la défense du CAN
après sa condamnation par la justice américaine, parlant à son pro-
pos de "collègues américains".5) Drôles de collègues en effet,
impliqués dans des affaires d'enlèvement et de séquestration et for-
tement condamnés par la justice...
L'ADFI eut également des liens étroits avec des psychiatres fran-
çais véhiculant les mêmes thèses que leurs collègues américains,
assimilant les membres des nouveaux mouvements religieux à des
malades mentaux. Ainsi une lettre de l'ADFI de 1979 faisait état
d'une collaboration avec la psychiatre Jacqueline Renaud. 54 Pour
cette dernière l'engagement dans ces mouvements était dû à la
présence dans le cerveau de zones "archaïques" où la raison ne
pénétrait pas ! 55
Pendant plusieurs années, la psychiatre Sophie BeaI fut chargée du
suivi des anciens adeptes à l'ADFI. Au cours d'un entretien elle
résuma d'une formule lapidaire toute la complexité de l'engage-
52, Cult Awarencss Network News, Juin 1990,
53. BlllleJ 0°52, page 18.
54, Lerm: circulaire de l'ADFI, 12 janvier 1979,
55. "L'empire des sectes. Des zones du cerveau Où la raison ne pénètre pas". Jacqueline Renaud. Saàlü.'
Et Ilje, janvier 1979,
56. Fd/Ni/k AJilgaz;'/{, Mai 1989
46
45. LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES
ment dans les nouveaux mouvements religieux: "Un membre d'tlne
secte n'est pas tlne personne authentique, c'est lm personnage fabriqtlé qtli
vit dam lm état de comâence altérée. 1.' 56
Bien sûr, ce que l'ADFI omit de révéler dans ses publications est
que toutes ces thèses psychiatriques assimilant l'adepte à un mala-
de mental étaient largement contestées par la plupart des scienti-
fiques œuvrant dans ce domaine. Le Dr Clark, par exemple, si sou-
vent cité par l'ADFI, fut l'objet d'un blâme de son conseil de
l'ordre pour avoir établi un diagnostic de maladie mentale sur la
seule base des convictions religieuses du patient. Ce diagnostic se
révéla infondé. 57 La psychologue Margaret Singer, citée plus haut,
fut officiellement désavouée par son ordre professionnel en 1987. 58
LA CRÉATION DU CCMM
Un homologue de l'ADFI, le Centre contre les manipulations
mentales (CCMM), fut fondé en 1981 par l'écrivain Roger Ikor,
vice-président de l'Union rationaliste, après le suicide de son fils.
Bien que l'écrivain soit décédé depuis, son nom continue de figu-
rer sur le papier à en-tête du CCMM. Or, les écrits de Roger Ikor
dans les Cahiers rationalistes font froid dans le dos. 59 Car cet écrivain
n'hésitait pas à y tourner en dérision les grandes religions avec un
"sens de l'humour" fort douteux:
'Ji l'origine de totltes les sectes, VOltS trouverez cette demi-douzaine-là qui
d'ailleurs sont quelqttefois /lne douzaine pleine, si llO/lS voyez ce que je lletlX
dire. (...) Nmffois ml' dix, VOltS avez comme Père Fondateur /In bonhom-
me qui s'avance sur le devatzt de la scène et proclame avec conviction: 'Moi,
57. Etat du Massachusetts. Board of Regîstrarion and Discipline in Medicine. Lettre du 16.01,1980.
58. En mai 1987. J'Amerkan Psychological Association (APA) reîeta un rapport sur les "méthodes indi-
rectes et trompeuses de persuasion Ct de contrôle" soumis par .M. Singer au motif que "d'une façon géné
H
raIe, le cappon manque de la rigueur scientifique et de l'approche critique équilibrée nécessaires pOUf
bénéficier de l'imprimatut de l'APA.''
59. Lt.'S Cahiers ra/Ùmalisfl'J. Décembre 1980.
47
46. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
je suis le fils de Dieu. J'ai reçu la Rézlélation.' En somme, Dieu lui a parlé
de derrière tm pilier; Olt dam une grotte, Ott près de ses motttom. Variantes
possibles, all lieu d'être le fils de Diett, il en est le Messie. Oll, att minÎtlltttn,
le prophète. De toute faço11 , il est couplé par fil direct au Seigneur qui Ilti
dicte le message à tra1lJmettre. De vous à moi, sm' tous ces points, on trolt-
tlerait d'il/ustres précédents, Mahomet, le Christ, Moise .. .N'ayez crainte,
nom y reviendrons."
Quant aux solutions à adopter pour chasser "l'irrationnel", Roger
Ikor n'y allait pas par quatre chemins: "Si nous nolts écotttiom, nom
mettrions tm terme à toutes ces billevesées, celles des sectes, mais amsi celtes
des grandes religions. (. .. ) On peut difficilement demander à la loi de
trancher d'litt COttp toutes les têtes de l'hydre ,. ce serait POttl'tant la sellte
manière d'empêcher qu'tme settle repomse. "
La nouvelle loi "About-Picard" poussée par Alain Vivien et ses exé-
cutants -le CCMM et l'ADFI - a justement été conçue pour tran-
cher d'un coup toutes les têtes de l'hydre! Il faut dire qu'Alain
Vivien, avant d'exploiter l'appareil de l'Etat au travers de la MILS,
pour tenter de détruire les nouvelles formes de spiritualité, était le
président du CCMM. Son épouse occupe aujourd'hui au CCMM
un poste de direction rémunéré.
Continuons avec les propos du fondateur du CCMM, qui suent une
haine pathologique: "II faut cogner, détmire ces sectes qui pullllient sllr
notre pourriture. Quand stt/fisamment de gem iront mettre les locaux des
sectes à sac, ils remueront sans dottte (ndlr : les pouvoirs publics). " 60
"On ira f .. la m... dam ces antres de mort que sont les sectes. Flanquer en
l'air les restaurants macrobiotiques, les centres Krishna et autres. A ce
moment là, les pOIlt/oirs publics y prêteront peut-être plus d'attention. " 6]
60. Le Matin, 26 janvier 1981.
61. L'UniJi, 5 février 198 L
48
47. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
Le CCMM voue une haine farouche à de nombreux mouvements
religieux même si ces mouvements sont parfaitement acceptés
dans plusieurs grandes démocraties. De son côté la Chine, aujour-
d'hui, persécute l'organisation Falun Gong qu'elle qualifie de
"secte destructrice". Falun Gong est un mouvement d'inspiration
bouddhiste qui prône l'exercice d'une pratique pourtant ancestra-
le en Chine, le Qi Gong, ou régulation de l'énergie vitale, mais qui
a l'immense tort d'avoir fait de nombreux émules parmi les cadres
du Parti communiste. Les positions du CCMM plaisent suffisam-
ment aux autorités chinoises pour que ces dernières aient cru bon
d'inviter l'association française à participer à un colloque sur les
"sectes destructrices", organisé à Pékin les 9 et 10 novembre 2000.
La délégation française, outre trois membres du CCMM dont
l'épouse d'Alain Vivien, comportait aussi Alain Vivien, président
de la MILS, présent officiellement à titre "d'observateur ". Mais
que pouvait bien observer Alain Vivien? La féroce répression chi-
noise de Falun Gong qui a conduit à l'interpellation de 35 000
adeptes, à la mort en détention d'une centaine d'entre eux, à l'in-
ternement psychiatrique de certains adeptes notoires refusant
d'abjurer leur foi? Officiellement, avec ce colloque, il s'agissait
pour les autorités chinoises de confronter leur expérience de la
"lutte anti-sectes"avec celle d'autres pays. Le bulletin du CCMM,
Regards, daté de décembre 2000, soulignait d'ailleurs que "les repré-
sentants français invités au symposillm ont reçu lm accueil chaleureux et
fait l'objet d'une écoute partimlièrement attentive" (voir planche 12,
page 102). Le même bulletin reproduisait aussi, sanS le moindre
commentaire critique, la prose officielle chinoise contre Falun
Gong.
Il faut croire que cette écoute "attentive" des méthodes françaises
n'a pas inspiré la Chine dans le sens d'une plus grande modération:
en décembre de la même année, les principaux responsables en
49
48. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
Chine de l'organisation Falun Gong étaient condamnés à dix-huit
ans de ptison sur la seule base de leur appartenance au mouvement !
La répression chinoise ne concernait d'ailleurs pas que Falun Gong.
Le 13 décembre, une dépêche de l'AFP indiquait que les autorités
chinoises avaient fermé et, dans certains cas, fait dynamiter,
quelque 450 édifices religieux construits "illégalement" dans l'est
de la Chine. Il s'agissait d'églises catholiques et protestantes, ainsi
que de temples bouddhistes et taoïstes.
Par un curieux effet du hasard, on apprenait la création, après ce
colloque, d'une association "anti-secte" chinoise dont le program-
me ressemble à s'y méprendre à celui des associations françaises
financées par les pouvoirs publics. Association fondée notamment
par He Zuoxiu, le père de la bombe atomique chinoise. Une délé-
gation de cette association s'est empressée fin décembre de rendre
visite à son homologue française ... le CCMM. Selon le magazine
L'Express, cette délégation aurait même été reçue par la MILS. 62
62. "Secte Falungong: Pékin voit rouge", par Anne Loussouarn, L'Exprt'JJ, 24 mai 2001.
50
49. LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES
Cha pitre III
Des dirigeants ou des membres
plusieurs fois condamnés
"Quelques parlemetltaires de toutes origitles, au prix de grossiers
amalgames, dressetlt la liste des coupables dam des cOllditiotls qui
IJaudraietlt au moitldre Jollimlaire les fôudres de la dix-septième
chCl1Jlbre. Chamn pO/wallt emuite brandir ce docu11letlt, la chasse
aux sorcières s'orgatlise, révélant chez les traqueurs des comporte-
ments aumoim altSsi sectaires que parmi le gibier." Thierry Pfister'3
Derrière la façade respectable que présentent à des journalistes pas
très curieuxù4 les groupes de pression qui luttent contre les nou-
velles religions, pointent de biens sordides affaires. En voici
quelques exemples.
LES ÉPOUX DORYSSE
Le 28 juillet 1992, sous les yeux horrifiés des passants, Roger
Dorysse tira plusieurs coups de carabine sur son beau-fils, Jean-
Richard Miguères. Après avoir rechargé son fusil, le meurtrier
revint achever froidement sa victime. Les époux Dorysse étaient
63. "Lertre ouverte aux gardiens du mensonge", Thierry Pfister, Albin Michel, 1998.
64. !t)Îr par exemple l'article intitulé "Janine Tavernier. Uoc mamie COntre les sencs". LI:' Po/m.
IÔ novembre 1996.
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50. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
membres de l'ADFI. Le gendre, Jean-Richard Miguères, était le
fondateur du Ceirus, Centre européen d'initiation à la recherche
ufologique à caractère scientifique. Il donnait souvent des confé-
rences où il faisait salle comble. Son association était étiquetée
comme "secte UFO" (sic) par l'ADFI.
Roger Dorysse fut arrêté par la police et incarcéré. Le 25 janvier
1995, il fut jugé coupable de meurtre avec préméditation et
condamné à 6 ans de réclusion.
Deux jours après le drame, un article paru dans Le Figaro Lyon
chargea entièrement la victime au lieu de condamner l'assassin.
Son sous-titre était même d'un humour douteux : "Cette fois les
extraterrestres n'ont rien pit faire. Le président d'ltne association d'ltfologie
est mort mardi à la Croix-Roltsse, abattit par son beait-père. " Cet article
citait largement l'ADFI pour expliquer que le Ceirus avait bien les
caractéristiques d'une secte! Dans cet article la journaliste expli-
quait que "les Dorysse avaient appris à connaître les activités sltspectes de
Jean Migttères lorsqlt'ils étaient en relation avec l'Association de défense des
familles et de l'individtt" (voir planches 13 et 14, pages 103 et 104). 6S
Un autre article, publié dans Le Figaro Lyon avait la même tonali-
té et chargeait entièrement la victime. Le journaliste citait les pro-
pos de membres de l'ADFI qui ridiculisaient ses croyances: "1/prê-
chait l'existence d'atttres vies et d'atttres existences. 1/ se disait habité par
SN'obe, le chefsttprême des a/'mées intergalactiqltes." 66 Loin de condam-
ner fermement l'assassin, le journaliste concluait simplement son
article en expliquant l'assassinat comme le geste d'un grand-père
"désespéré par la récente union de sa fille" et qui, sachant que sa
petite-fille allait quitter la France "a eu peur et s'est fait justice".
Drôle de justice! Le 1" août 1992, Lyon Figaro récidivait en don-
nant la parole à Mme Dorysse : "C'est lm cri d'alarme qtte je vettx lan-
cer attjottrd'hui, Si mon mari en est arrivé là, c'est que pers01l11e n'a bottgé
65. Au nom de j'enfant, pa, Nathalie Blanc. Le Figa,.o Lyon. 30 juillet 1992.
66. Le nouvel âge des senes, par Christine Mérigor. Le Progrès. 31 juilJcr 1992.
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51. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
le petit doigt avallt.. "II faltt maintenallt qlte l'on colltinlte notre combat.
"
Mon mari regrette bien slÎr son geste. Mais il est totalement soltlagé et
serein. Il a fait çà dam llll seltl bltt, saltver notre petite-fille des griffes de
ce dangereltx personnage." Et le journaliste d'enchaîner dans un hal-
lucinant renversement où l'assassin devient la victime: "Depltis pllts
d"llle année, les Dorysse sont cort/rolltés à llll phénomène de société de plllS
en plllS fréqltellt : les sectes. ,. 67 Extraordinaires complaisances pour un
assassinat commis de sang-froid.
LES SŒURS BOUVIER DE CACHARD 1
Les sœurs Bouvier de Cachard étaient membres de l'ADFI. L'une
d'elles accepta même d'envoyer un témoignage écrit en faveur de
cette association. En 1991, elles prétendirent que leur fille et nièce,
Anne-Catherine, une brillante normalienne, était membre d'une
"secte". Alors, sous prétexte de la soustraire à une emprise malé-
fique, elles décidèrent, en août 1991, d'enlever et de séquestrer la
jeune fille, avec la bénédiction du vicaire général de Verdun. Anne-
Catherine fut conduite de force dans un hôpital psychiatrique où
on lui injecta des neuroleptiques puissants. Son fiancé, qui entre
temps avait porté plainte, réussit à faire libérer sa compagne. La
mère, la tante et le prêtre furent mis en examen pour enlèvement
et séquestration. Cette procédure fut ensuite annulée pour les kid-
nappeurs suite à un vice de procédure incroyable : le réquisitoire
du procureur de la République n'était pas signé!
En fait, Anne-Catherine n'était membre d'aucune "secte" comme
une enquête approfondie de la justice le révélera. Selon les dires de
la jeune fille, la mère et la tante ne supportaient pas qu'elle puisse
vivre sa vie de femme loin d'elles avec un homme qui ne leur
convenait pas.
67. Le plaidoyer d'une grand-mère, par Nathalie Blanc. Le Figaro Lyon. 1er août 1992.
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52. LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES
Mais pendant des années les deux sœurs s'acharneront à répandre
leurs affabulations. Elles iront même jusqu'à créer une association
au nom accrocheur, "Secticide", dans laquelle elles purent donner
libre cours à leurs penchants liberticides.
L'AFFAIRE DU CHÂTEAU DU MAGNET 1
Les occupants d'un château berrichon situé à Mers-sur-Indre, le
Château du Magnet, avaient su transformer ce château et son parc
de 65 hectares en pôle touristique majeur, en reconstituant dans
son enceinte la vie quotidienne du Moyen Age. Un restaurant pro-
posait aux visiteurs des mets cuisinés selon les recettes de l'époque ;
des animateurs en costume d'époque offraient de nombreuses acti-
vités : tir à l'arc, calligraphie, tournois de chevalerie, arts courtois,
arts martiaux... Cette animation originale qui avait bénéficié d'ar-
ticles très élogieux dans la presse locale et nationalé 8 attirait chaque
année une dizaine de milliers de visiteurs. Soudain, en 1991, des
rumeurs se mirent à circuler dans le pays accusant les animateurs
d'avoir constitué une "secte". On vit même Janine Tavernier faire le
déplacement à Châteauroux, accompagnée de l'abbé Jacques
Trouslard et d'un responsable d'antenne locale de l'ADFI, le doc-
teur Richard, pour dénoncer les activités du Château du Magnet. 69
Cette croisade eut des effets désastreux pour l'activité touristique.
En 1992, le château ne comptait plus que deux mille visiteurs. Les
habitants du château contre-attaquèrent et décidèrent de porter
plainte contre l'ADFI. Le tribunal de grande instance de Paris
condamna l'ADFI à payer aux propriétaires du château un franc à
titre de dommages-intérêts et enjoignit l'ADFI de retirer du dos-
sier relatif au Château du Magnet des passages litigieux. 70
68, Voir par exemple l'article: ., Ils vivent comme au Moyen Age ", Fl'iI1Uff-Soir, 28 mai 1991.
69. ,.;Magner : saura-t-on un jour ?" L:I N()md/( RfjJuhliqlh" 29 seprcmbre 1992,
70. Jugement du tribunal de grande instance de Paris, 1re chambre, 1re section, du 27 mai 1991.
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53. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
Par ailleurs, dans un autre procès, Mme Tavernier, présidente de
l'UNADFI, ainsi qu'une journaliste, furent condamnées à verser à
chaque plaignant du Magnet la somme de 5000 francs à titre de
dommages-intérêts. La cour d'appel de Paris confirma ce jugement
(voir planche 15, page 105).71
LE JUGEMENT DE DOUAI 1
La présidente de l'ADFI Lille, Mme Ovigneur, avait tenu à l'an-
tenne d'une radio de Racquinghem des propos rudes contre les
Témoins de Jéhovah, traitant leurs dix dirigeants internationaux
de "dealers", "proxénètes" et "d'esclavagistes". Les Témoins avaient
décidé de réagir et de porter l'affaire devant un tribunal. En pre-
mière instance Mme Ovigneur fut relaxée mais la cour d'appel de
Douai la condamna au civil - l'action pénale étant forclose - aux
dépens des actions civiles et à verser un franc de dommages et inté-
rêts pour diffamation à chacun des dix dirigeants 72 (voir planche
16, page 106). Interrogée par La Voix dll Nord après sa condam-
nation, Mme Ovigneur non seulement ne regrettait pas ses propos
mais encore elle faisait part de son étonnement: 'Je me demande si
dans ce pays nOlis avons encore la liberté de nOlis exprimer oralement, Il 73
L'AFFAIRE PAUWELS 1
L'éditorialiste Louis Pauwels avait écrit un article intitulé "Sectes:
l'esprit d'inquisition. La liberté de croire, de se réunir et de tenter
de convaincre alltYlli fait partie des droits fondamentallx", publié le
24 octobre 1996 par Le Figaro, Dans cet article, le journaliste
dénonçait une "gllerre contre les sectes" qui "réveille l'esprit d'inquisition
et s'apparente dans bien des cas aux procès en sorcellerie Ott la rtlmellr tenait
71. Arrêt de la cour d'appel de Paris du 5 janviet 1994.
72. Arrêt du 15 janvier 1997 de la (Our d'appel de Douai,
73. LI vbixd/l Nord, 16 janviet 1997.
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54. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
lieN de prmve." Mise en cause dans cet article, l'UNADFI avait
décidé de porter plainte pour diffamation. Le tribunal de grande
instance de Paris débouta l'UNADFI de cette demande. Le juge-
ment comporte la mise en garde suivante : "En définitive, l'article
incriminé traduit, de la part du journaliste, une mise en garde contre les
excès pouvant porter atteinte à la liberté de pensée et d'expmsion, aimi
qU'fOl appel à la tolérance dans la légalité" (voir planche 17, page
107).74
L'AFFAIRE MONTJOIE 1
L'ADFI est parfois au sein de bien curieuses alliances. Ainsi, en
octobre 1993, avait lieu au Mans le procès de six éducateurs d'une
association d'aide à l'enfance, l'association Montjoie. L'objet de
l'inculpation était la non-dénonciation d'un viol de mineur. Un
jeune homme de dix-huit ans avait, en décembre 1992, violé un
jeune garçon de sept ans placé dans la même famille d'accueil. Le
psychiatre et les éducateurs chargés du suivi des deux enfants
n'avaient pas jugé bon de prévenir la justice. Alertés par la famille
d'accueil, les éducateurs avaient replacé le jeune homme dans une
autre famille. Ils ne s'étaient pas préoccupés du suivi médical de la
victime. L'agresseur avait avoué avoir commis un précédent viol
deux ans et demi auparavant, alors qu'il était déjà suivi par un des
éducateurs, et là aussi les faits n'avaient pas été dénoncés à la jus-
tice. Au procès, la présidente de l'UNADFI, Janine Tavernier, vint
témoigner en faveur d'un des inculpés! Un comité de soutien aux
inculpés du Mans se constitua même avec, parmi ses membres,
l'antenne locale ADFI Sarthe (voir planche 18, page 108). En juillet
1994, la cour d'appel d'Angers condamna à de lourdes peines de
prison avec sursis et d'amendes les six salariés de l'association
Montjoie pour non-dénonciation de viol et non-assistance à per-
74. Jugement du tribunal de grande instance de Paris, 17e chambre, cn date du 12 septembre 1997.
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55. LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES
sonne en danger. Dans ses attendus, la cour d'appel se montra
extrêmement sévère avec les prévenus, estimant que les faits qui
leur étaient reprochés étaient "caractérisés" et qu'ils devaient
"valoir à leurs auteurs une application sévère de la loi pénale". la
cour estima que les salariés de l'association s'étaient "montrés sou-
cieux de minimiser, voire de dissimuler les faits" alors qu'ils
auraient dû en informer immédiatement le juge pour enfants. 75
75. "Le silence condamné <:n appel." La NOllrdÜ RljJ/lbliqllè dit Cm/re Omsl. 13 et 14 juillet 1994.
57
56.
57. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
Chapitre IV
Un financement sur fonds publics
~ C"" ",m<ll. dMU aax "mim bl"ijiÛ d" ",bÛdo de l'Eh" d,
l:'eptùm, dit JI1lttÎen JallJ réjlexÙm deJ médiaJ. " (Ll1l1Ù PalllueÙ)'''
' 'j
les associations telles que l'ADFI ou le CCMM sont largement
financées par les pouvoirs publics, administrations centrales ou col-
lectivités territoriales, et ceci est très étonnant dans un pays laïque
dont la Constitution garantit la neutralité religieuse, compte tenu
du fait que ces associations délivrent au public une information
partisane. les demandes de subvention de ces associations font
apparaître que l'information du public et des journalistes repré-
sente l'essentiel de leur activité. Or cette information ne pem être
objective puisque ces associations indiquent que leur rôle est de
lutter contre les "sectes".
Ces financements publics sont très superIeurs au montant des
donations que ces associations recouvrent de leurs membres, ce qui
contribue d'ailleurs à relativiser la portée du "problème des sectes"
car une véritable cause nationale n'a aucun mal à trouver des finan-
cements privés. l'association "Solidarité Enfants Sida", par
exemple, n'est financée qu'à hauteur de 15% par des fonds publics.
76. LfFigilro. 24 octobre 1996.
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58. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
Pour l'UNADFI, les ADFI et le CCMM, la proportion s'inverse et
c'est la part de fonds privés qui est minoritaire! Ainsi, l'UNADFI
a reçu en 2000 un montant de subventions de l'Etat français s'éle-
vant à 2 325 000 F alors que les dons privés, supposés provenir du
soutien populaire, s'élevaient à 19 884 F (voir planche 19, page
109). Les familles et les individus que l'UNADFI est censée aider
ne semblent pas très disposés à financer ses activités l Une associa-
tion reconnue d'utilité publique devrait pourtant disposer de fonds
importants provenant du public concerné par sa cause. L'examen
attentif des comptes montre que l'UNADFI et les ADFI vivent au
crochet de l'Etat et des collectivités publiques et que, sans leur sou-
tien financier, elles ne survivraient pas une semaine.
Dans le même temps, le bilan 2000 de l'UNADFI fait apparaître
des placements financiers très importants, sous forme de SICAV.
Parmi les recettes de l'année 2000, les produits financiers s'élèvent
à 107 906 F. Pour la même année, la rémunération du personnel
de l'UNADFI a coûté la coquette somme de 1 757 853 F alors que
le nombre de permanents s'élevait à 9 personnes à temps plein et
une personne à mi-temps, soit presque 190000 F par personne. On
gagne bien sa vie dans cette association, aux frais du contribuable.
Le CCMM n'est pas en reste. On apprenait récemment par la pres-
se que la directrice administrative du CCMM, qui n'est autre que
l'épouse d'Alain Vivien, président de la MILS, serait allée négocier
directement à Matignon l'octroi d'une subvention de 4,5 millions
de francs pour l'achat d'un nouveau siège du CCMM. La somme
lui aurait été allouée en février 2001, sur la ligne budgétaire de la
"défense des droits de l'homme".77
Dans d'autres pays le financement public de ce type d'associations
a été jugé illégal. Le tribunal administratif fédéral allemand décida,
77. "Sectes. Les pourfendeurs se déchirent", par ChristOphe Ddoire. Le Paim, 19 octobre 2001.
60
59. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
par un jugement rendu le 27 mars 1992, qu'en l'absence de bien-
fondé juridique, le gouvernement fédéral ne pouvait plus soutenir
avec le budget de l'Etat une association qui combattait les "nou-
velles religions" et "nouvelles sectes". Dans un jugement pronon-
cé parallèlement et pour les mêmes raisons, le tribunal adminis-
tratif fédéral déclara illicite le soutien financier accordé par la Ville
d'Essen à une association agissant sur un plan local contre les "nou-
velles religions" ou "nouvelles sectes".
Au Québec, le pendant de l'ADFI, l'association "INFO-SECTE"
s'est vu refuser un financement du ministère de la Santé et des
Services sociaux. Les raisons invoquées sont édifiantes: "I/n'est pas
dam le mandat du ministère de la Santé et deJ Services sociaux de s'impli-
quer dam 1111 secteur oÙ la liberté religiettse et ses différentes pratiques sollt
mises en came. 78 . La même année en France, le ministère des
JJ _
Affaires sociales accordait à l'UNADFI une subvention de 250 000 F
(voir planches 20 et 21, pages 110 et Ill) !
78. Gouvernement du Québec. Ministère de la Santé ct des Services sociaux. Lenre du 24 octObre 1991
au directeur d'Info-secre.
61
60.
61. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
Chapitre V
Vies détruites, fa mi lles et
CIl" CI,
carneres rUlnees
"Il se développe, SOIiS cOllvert de llitte contre les sectes, lm climat de
méfiance à l'égard de tous les mouvemel1ts religiellx, qui pOllrrait
confil1er à mie véritable hystérie, et menacer les grandes libertés et
la laïcité qlti sllppose le plllralisme et la liberté de cot/science et
d'opinion." (Alain Boyer)?"
Pour enquêter sur les conséquences de la chasse aux sorcières qui
sévit en France contre les nouvelles formes de spiritualité et de reli-
giosité, une commission d'experts s'est réunie le 3 mars 2000 à
Paris. Cette journée était organisée par différentes minorités spiri-
tuelles avec la participation de l'Omnium des Libertés, une asso-
ciation loi 1901 constituée pour défendre la liberté de conscience
au lendemain de la publication du premier rapport parlementaire,
en 1996, mettant 172 groupes religieux ou spirituels à l'index.
La commission était constituée par :
-le révérend L'heureux du Conseil national des Eglises chrétiennes
à New York,
- Irving Sarnoff, président de l'ONG "Les Amis des Nations
unies", vétéran de la défense des droits de l'homme aux Etats-Unis,
79, RifO>7lIe. 23 juin 1999.
63
62. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
- Joël Labruyère, président de l'association "Omnium des Libertés",
- Gabrielle Yonan, sociologue allemande,
- le pasteur Hostetter, premier pasteur de l'Eglise protestante libé-
rale de Belgique,
- Philippe Gast, docteur en droit.
Plusieurs dizaines de personnes venues de différentes régions de
France ont témoigné de la discrimination dont elles ont été vic-
times du fait de leurs croyances ou de leurs idées (voir planche 22,
page 112).
Face à l'affluence des témoignages de membres de près d'une qua-
rantaine de minorités spirituelles, parmi lesquelles : Sukio
Mahikari, l'Eglise universelle du Royaume de Dieu, l'Eglise de
Scientologie, La Famille, Hare Krishna, Galaeteus, La Maison de
Jean, l'Eglise de l'Unification, Horus, l'Ordre d'Avallon, le Temple
initiatique, l'Eglise raëlienne, Energie et Créativité, etc. , il a été
décidé de rendre cette commission d'enquête permanente et itiné-
rante de façon à recueillir des témoignages dans les principales
villes de France.
Les personnes faisant l'objet de discrimination se sont fédérées en
une Coordination des associatiollS et partimliers pOlIr la liberté de
C01ZSczence. Cette Coordination a été créée avec l'appui des experts
présents.
La commission d'enquête permanente s'est ensuite rendue à
Marseille, le 29 mars, à Lille, le 19 avril, à Lyon, le 28 avril, à
Rennes, le 17 mai, à Bruxelles, le 26 mai, à Auxerre, le 10 juin, et
à Tours, le 29 juin.
Les récits qui suivent sont extraits des 150 témoignages recueillis
lors des audiences.
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63. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
1. Orthophoniste et naturopathe, il est dénoncé comme "gou_
rou". Dans une petite vine de province, cela ne pardonne pas.
PB. naturopathe de formation exerçant dans le Sud-Ouest a été
l'objet d'une campagne médiatique qui a eu pour résultat de lui
faire perdre son emploi.
"Je viens témoigner pour un ami, P.B., qui habite dans le Sud-
Ouest et qui ne peur être présent aujourd'hui. Naturopathe de for-
mation depuis seize ans à Bayonne, il pratique l'iridologie, l'aro-
mathérapie et le traitement par les huiles essentielles.
Orthophoniste depuis huit ans, il pratique aussi le Radja Yoga des
Brahma Kumaris.
Dès 96, l'ADFI a mené, dans le Sud-Ouest, une campagne d'in-
formation dans les écoles primaires et secondaires ainsi que dans les
universités sur le danger que représentent toutes les minorités spi-
rituelles qu'ils qualifient de "sectes" et dont les Brahma Kumaris
font partie. Sur Radio-France Pays Basque, PB. présentait bénévo-
lement depuis plus d'un an et demi des émissions sur la naturopa-
thie. L'ADFI a prétendu que PB. était le gourou de la "secte" des
Brahma Kumaris. Suite à ces pressions, la direction de la radio lui
a interdit de continuer ses émissions.
PB. exerçait sa profession d'orthophoniste à Saint-Palais, petite
ville de quinze cents habitants, juste à côté de Bayonne où il était
connu de tous les habitants. En 1997, une réunion de l'ADFI
dénonçait les activités des "sectes" en général en France et ils Ont
consacré plus de la moitié de cette réunion à PB. Cela a représen-
té un énorme choc pour ses amis et tous les gens qui le connais-
saient dans cette ville. Ensuite, en 1998, un article est paru dans le
journal Suc/-Ouest qui mettait les Brahma Kumaris en première
ligne. L'article parlait de PB. sans citer précisément son nom, mais
avec suffisamment de détails pour qu'on puisse le reconnaître.
Suite à cela, il a perdu 60 % de sa clientèle.
Il a reçu de nombreux appels téléphoniques anonymes, des
menaces, des moqueries, même de nuit. Ensuite on lui a demandé
de quitter le bureau d'une association qui organisait des confé-
65
64. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
rences, l'Université d'études libres. On le tenait pour responsable
de la perte des adhérents, des cotisations, du public, vu la suspi-
cion qui régnait sur son appartenance à une "secte". On lui a
demandé de quitter cette association.
Dernier épisode, P.B. était visiteur de prison depuis huit ans à titre
de naturopathe. Le directeur du service régional pénitentiaire de
Bordeaux lui a retiré son agrément parce qu'il était membre d'un
"mouvement à caractère sectaire"."
2. Il Ya eu une perquisition dans les locaux avec des interroga-
toires systématiques de notre entourage et de membres assez
proches. Les policiers ont essayé de faire passer ces personnes
pour des victimes, et quand les gens refusaient d'avouer ou de
reconnaître des choses qui n'existaient pas, alors, ils devenaient
complices de nos agissements. La technique est simple: soit vic-
times, soit complices...
Claude; 'j'étais, à l'époque, un des responsables de la Maison de
Jean, une école de recherche et de réflexion spirituelle. J'étais éga-
1ement gérant d'une SARL. J'étais bénévole pour ces deux activi-
tés. Par ailleurs, j'avais un travail rémunéré puisque j'étais cadre de
direction dans un organisme de formation.
Avec une amie assez proche, qui n'a jamais été membre de l'asso-
ciation, nous avons eu un conflit qui serait trop long à expliquer
ici. Comme nous étions une association spirituelle, elle a trouvé
malin de nous accuser d'être une "secte" pour nous nuire au maxi-
mum. Pour assouvir sa vengeance, elle est allée voir l'ADFI, la pré-
fecture du département ainsi que quelques-unes de nos relations
avec la volonté d'étouffer notre mouvement.
Les attaques en correctionnelle et au civil ont commencé contre le
président du mouvement, sans aucun résultat. Nous avons essayé
de prendre contact avec l'ADFI pour savoir ce qu'on pouvait nous
reprocher, mais chaque fois il y a eu refus de dialogue.
Nos ennemis sont donc passés à la vitesse supérieure en nous
dénonçant à la préfecture sur un ensemble d'opérations complète-
66
65. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
ment inventées, mais qui a suffi à déclencher une enquête. Un
beau matin, la police a débarqué dans nos locaux en perquisition-
nant aussi nos domiciles privés. J'ai été interpellé sur mon lieu de
travail pour 48 heures de garde à vue. Je rappelle que j'étais cadre
de direction. Ensuite, nous avons été amenés au palais de Justice à
Paris où nous avons passé la nuit en cellule, avec des cafards et
autres bestioles !
Pendant ce temps-là, il y a eu une perquisition dans les locaux avec
des interrogatoires systématiques de notre entourage et de
membres assez proches. Les policiers ont essayé de faire passer ces
personnes pour des victimes, et quand les gens refusaient d'avouer
ou de reconnaître des choses qui n'existaient pas, alors ils deve-
naient complices de nos agissements. La technique est simple: soit
victimes, soit complices ...
Les comptes des dirigeants de l'association et de la SARL Ont été
bloqués, ce qui a conduit au licenciement des personnes salariées.
Pendant la perquisition, la police a récupéré des factures adressées
à nos clients. Elle a communiqué ces pièces à nos détracteurs qui
Ont contacté nos clients pour leur dire que nous étions une "secte".
Sans la communication par la police de ces pièces à des personnes
extérieures, nous n'aurions pas eu les dommages que nous avons
subis. Ensuite nous avons eu un contrôle fiscal sur l'ensemble des
personnes physiques et des personnes morales.
Quand la police a vu que rien ne bougeait dans l'entreprise où je
travaillais, ils sont venus à quatre inspecteurs -le grand jeu - pour
interroger mon employeur et savoir si je ne faisais pas de prosély-
tisme dans l'entreprise. Mon employeur a tenu bon pendant un
mois et quand la police a su que je n'étais toujours pas parti, ils ont
menacé le directeur d'un scandale. La police a tout fait pour que je
sois licencié. Donc, etlectivement, je me suis retrouvé au chômage
avec une carrière brisée puisque je suis un autodidacte et que j'avais
grandi professionnellement dans l'entreprise, où j'étais arrivé à un
poste correspondant au numéro trois.
J'ai dû vendre un appartement dont je ne pouvais plus payer les
67
66. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
échéances. J'ai recherché du travail après, sans en trouver, la po-
lice s'arrangeant aussi pour faire connaître ce qu'on me reprochait.
En 95, dans nos locaux, se déclencha un incendie d'origine indé-
terminée. L'assurance avait accepté de régler le sinistre sans pro-
blème jusqu'à la parution du rapport parlementaire de 96 où nous
étions cités. Suite à cela, la compagnie d'assurance a refusé de
régler l'incendie et a porté plainte contre X. Cela a donné lieu à
une nouvelle perquisition, dans nos nouveaux locaux, avec encore
des gardes à vue, pour un incendie dans lequel nous n'avions rien
à voir. Enfin ça s'est soldé par un non-lieu, mais aujourd'hui encore
nous sommes toujours en procès avec la compagnie d'assurance
pour être réglés et le seul motif est: "C'est une secte, ils ont mis le
feu à leurs locaux." En ce qui concerne les médias, nous avons eu
droit à toutes les recettes et calomnies utilisées contre les minorités
spirituelles. Une chaîne comme CANAL+ nous a traînés dans la
boue sans que nous puissions rien faire. Nous sommes actuellement
en procès pour diffamation, faux et usage de faux contre FR 3."
3. 1E1l1I tôl1l1lt IQIll.le formatell.lrs, si 1l1IOII.IS vOll!loD1ls travailler IP0II.III' de
graD1ldes orga1l1lisathms ell!rolPéeomes Oll! fraD1lçaises IQIll!i (mt lu le
ralPlP0rt "ILes sectes et l'argell1lt", je dois aller demander à l'ADIFll:
11.I111I certificat de bOIl'II1l1IE! COD1ldll.lite.
Christian: "En tant que psychosociologue, je dirige un organisme
de formation depuis une quinzaine d'années. Mon premier "tort"
est d'enseigner différentes disciplines psychologiques, notamment
la PNL - programmation neurolinguistique - dont on a dit, ici et
là, depuis plusieurs années, que c'était une "secte". Dans les sémi-
naires que je peux animer dans de grandes entreprises et des admi-
nistrations, je parle assez régulièrement et très librement de spiri-
tualité. Je n'ai jamais appartenu à aucune organisation spirituelle,
religieuse, ou mystique.
En 1994, j'ai lancé un mouvement politique qui a présenté une
liste aux élections européennes, pour défendre notamment la liber-
té de conscience et les libertés thérapeutiques.
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Il faut croire que tout cela a dû agacer un certain nombre de gens
au pouvoir qui ont réussi à faire passer ma société de formation
pour une filiale de la Scientologie, dans le rapport parlementaire de
juin 1999 intitulé "Les sectes et l'argent". Et cela alors même que
je n'ai jamais eu une quelconque relation avec la Scientologie.
En 1996, mon entreprise était Horissante avec un peu plus de six
millions de francs de chiffre d'affaires. Aujourd'hui, nous avons un
peu de mal à faire la moitié de ce chiffre d'affaires parce que, pour
obtenir la même clientèle, je dois faire à peu près trois fois plus
d'efforts pour faire face aux suspicions et aux questions. J'ai perdu
plusieurs marchés depuis quelques mois avec un certain nombre de
mes clients ou futurs clients.
Un de mes associés est allé demander à Mme Janine Tavernier un
certificat de "bonne secte" - pour avoir le droit de travailler. Celle-
ci lui a dit: 'lIh, ne me demandez pas de papier. .. " Nous en sommes là,
aujourd'hui. En tant que formateurs, si nous voulons travailler
pour de grandes organisations européennes ou françaises qui ont lu
le rapport "Les sectes et l'argent", je dois aller demander à l'ADFI
un certificat de bonne conduite !"
4. IUJD1I mari jaloux avait des problèmes avec sa femme quaD1lt au
travail de développemeD1lt persoD1lD"llel que suivait SOI'll épouse avec
D1lotre collaboratrice. liIIous D1l0US sommes dOD1lc retrOllDvés fichés à
l'AillA et étiquetés "secte". Les rel1lseigl'llemeD1lts généraux OD1lt
été impliqués daD1ls l'affaire, et ils D1I0US diseD1lt qu'il D1l'y a que ça
COD1ltre D"Ilous.
Marie: 'Je suis présidente de l'association Espace Manuel à Aix-en-
Provence. Notre équipe associative anime un centre de développe-
ment personnel et artistique qui propose diverses activités, que ce
soit en groupe ou à titre individuel: danse créative, relaxation, etc.
Nous organisons également des conférences. Nous avons démarré
en septembre 92 sous le nom "Association Energie et Création Aix-
Lubéron". On a été très surpris de découvrir le 18 juillet 96, dans
le journal L'Express, que nous étions assimilés à une "secte". Et cela
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68. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
à cause d'une procédure de divorce. Un mari jaloux avait des pro-
blèmes avec sa femme quant au travail de développement person-
nel que suivait son épouse avec notre collaboratrice. Il a utilisé le
fait que cette personne faisait un travail de développement per-
sonnel en groupe pour se venger et apporter de l'eau au moulin de
son divorce. Il a donc déposé une plainte à Besançon en 1995.
Nous nous sommes donc retrouvés fichés à l'ADFI et étiquetés
"secte". Les renseignements généraux ont été impliqués dans l'af-
faire. On a eu des contacts avec eux et ils nous disent qu'il n'y a
que ça contre nous comme élément.
A partir de ce moment-là, nous avons été considérés comme des
pestiférés et des bannis par les autorités locales d'Aix-en-Provence.
Donc en septembre 97 nous avons créé une autre association qui
s'appelle Espace Manuel, avec des statuts différents, plus proches
de nos activités et de la situation du moment. De 96 à 99, l'Office
du tourisme de la ville d'Aix a refusé de diffuser nos documents.
Ensuite, en septembre 97, la maison des associations qui organise
ASSAGORA, la foire des associations à Aix, a refusé notre partici-
pation. Elle a donné notre place à une autre association et, depuis,
nous n'avons plus notre place à ASSAGORA. Actuellement, nos
documents sont toujours refusés systématiquement dans toutes les
Maisons des jeunes et de la culture, et les établissements reliés à la
ville d'Aix-en-Provence. On a eu un problème aussi au salon
"Millepertuis et Sarriette" à Puyricard, en février 2000, parce que
ce salon était relié à la municipalité de Puyricard, et comme nous
étions une "secte", nous n'avions donc pas notre place au salon.
Finalement, ils ont accepté. Il y a eu aussi l'association "Graine de
vie" qui a eu du mal à avoir une subvention de la ville d'Aix parce
que justement cette association travaillait avec l'Espace Manuel.
On a été refusés au salon "Artemisia" à Marseille, en novembre 99.
Donc, depuis janvier 96, nous entendons toujours des propos dif-
famatoires qui concernent notre association et notre travail.
Depuis 96, nous n'avons eu aucun contact avec les autorités poli-
tiques ou administratives de la ville d'Aix. Personne n'est venu se
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69. 1 LA NOUVELLE CHASSE AUX SORCIÈRES 1
renseigner ou dialoguer avec nous. Par contre, j'ai appris tout
récemment que nos conférences étaient surveillées par les services
municipaux concernés."
5. Je me SlUIis présel1'ilté à ph.lsielUlrs reprises dev<Ill1'ilt ['AIOfl[ qllJJl
m'acclUlse d'lIJJl1'ile chose biel1'il p<llrticldière, c'est de l1'ile pas penser
comme tout [e mOl1'ilde. Un jOlUlr alUl té[éphol1'ile, [a présidente de
['AIOfl[ die l!.iUe m'a demandé: "Dites-moi un peu, queUe est votre
position pCllr mpport à Dieu ou à Jésus 'l'"
Thierry: "Le 22 janvier 1996, au lendemain de mon anniversaire,
un de mes amis m'a dit: "Til as tilt, tll es dans La Voix du Nord. Dans
la liste parlementaire sllr les "sectes", il y a l'Institllt de psychanimie."
Psychanimie est un néologisme signifiant psychologie de l'âme.
Cette association fonctionnait sur le territoire français et travaillait
avec les pays francophones comme la Belgique, le Zaïre, etc. J'ai
toujours été élu membre du bureau. S'il y avait eu un problème
quelconque dans cette association, j'aurais été effectivement aux
premières loges. Je n'ai donc jamais eu de plaintes, d'enquêtes, de
malversation quelconque. Aucun de nos étudiants et étudiantes ne
se sont plaints de nos activités.
Ma première réaction a été de croire à une erreur. Aussitôt j'ai pris
le téléphone pour appeler, entre autres, M. Gest, le président de la
commission. J'ai mis six mois pour avoir un rendez-vous au minis-
tère de l'Intérieur où j'ai rencontré le général Morin et M. Guerrier
de Dumas, responsable de l'Observatoire des sectes, l'ancêtre de la
MILS. Je leur ai dit: "Messieurs, c'est à VOltS de me dire pourquoi je mis
sur cette liste! I!n 'y a rien contre moi." Ils m'ont dit: "I! y a petIt-être
errem; monsiem; on va rectifier ça. " En rentrant, je leur ai écrit que je
prenais note qu'ils allaient rectifier cette situation. Tous les deux
m'ont écrit: "Nous n'avons jamais dit ça. Nous étions là simplement pour
VOtlS écouter." J'ai alors compris qu'il ne fallait plus se défendre mais
attaquer, d'autant plus que, évidemment, je n'étais pas le seul pré-
sident d'association qui n'avait rien à faire sur cette liste. Il y a
quelque temps j'ai demandé à la CNIL - Commission nationale
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