ECONOMIES POSITIVES/ DE QUOI PARLE T-ON?: Habiter le monde autrement pour une politique du commun (Rencontres #EcoPositivesBzh 2017 - Université Terre & Mer)
Michel Renault - Université de Rennes 1, PEKEA (Political and Ethical Knowledge on Economic Activities), FAIR (Forum pour d'Autres Indicateurs de Richesse).
Le terme « communs » fait écho au développement d’une multitude de pratiques qui matérialisent la nécessité d’un changement d’attitude vis à vis des rapports entretenus à la fois avec les « choses » et avec les autres, notamment face aux fractures qui déstructurent les sociétés. Les multiples inégalités sociales, économiques, environnementales… dessinent le portait de sociétés parcourues par des lignes de failles qui ne font que s’accroitre. Face à cela la résurgence du « commun » apparaît comme un espoir de réunification...
(Rencontres #EcoPositivesBzh 2017 - Université Terre & Mer)
www.terre-et-mer.eu
Le citoyen augmenté par les réseaux sociaux - Thierry Crouzet
Similar a ECONOMIES POSITIVES/ DE QUOI PARLE T-ON?: Habiter le monde autrement pour une politique du commun (Rencontres #EcoPositivesBzh 2017 - Université Terre & Mer)
Similar a ECONOMIES POSITIVES/ DE QUOI PARLE T-ON?: Habiter le monde autrement pour une politique du commun (Rencontres #EcoPositivesBzh 2017 - Université Terre & Mer) (20)
ECONOMIES POSITIVES/ DE QUOI PARLE T-ON?: Habiter le monde autrement pour une politique du commun (Rencontres #EcoPositivesBzh 2017 - Université Terre & Mer)
1. RENCONTRES DES
ECONOMIES POSITIVES
Michel RENAULT
Université de Rennes 1
PEKEA - Political and Ethical Knowledge on Economic Activities
FAIR - Forum pour d’Autres Indicateurs de Richesse
Les convivialistes
ECONOMIES POSITIVES: DE QUOI PARLE T-ON?
Habiter le monde autrement : pour une politique du commun
Rencontres #EcoPositivesBzh – Auray - 7-8 novembre 2017
2. Habiter le monde
autrement :
pour une politique du
commun
Michel RENAULT
Université de Rennes 1
PEKEA - Political and Ethical Knowledge on Economic Activities
FAIR - Forum pour d’Autres Indicateurs de Richesse
Les convivialistes
4. « Entreprise, service public, École, assurances sociales, État régalien,
démocratie représentative : chacune de ces institutions structure notre vie
collective, modèle les destins individuels, organise la solidarité. Si les
Français jugent le présent si sombre, et anticipent un avenir plus noir encore,
c’est qu’ils ont perdu confiance en elles. Ces institutions collectives, de statut
très divers mais toutes essentielles, sont aujourd’hui à la peine, incertaines de
leur rôle, et parfois en échec. Ce qui explique l’extrême pessimisme français,
c’est le doute sur la capacité de ces institutions à remplir le rôle qui leur est
assigné, à tenir leur promesse et en particulier à assurer la cohésion et à
garantir l’équité entre citoyens. »
Jean Pisani-Ferry, Lignes de faille Une société à réunifier, Rapport de
l’agence France Stratégie, 2016, Avant propos
« Quand la création de richesse ne dépendra plus du travail des
hommes, ceux-ci mourront de faim aux portes du paradis, à moins
de répondre par une nouvelle politique du revenu à la nouvelle
situation technique. »
Wassili Léontieff, 1942
5. « Voilà ce qui me persuade invinciblement que l'unique moyen de distribuer les biens
avec égalité, avec justice, et de constituer le bonheur du genre humain, c'est
l'abolition de la propriété. Tant que le droit de propriété sera le fondement de l'édifice
social, la classe la plus nombreuse et la plus estimable n'aura en partage que disette,
tourments et désespoir. »
Thomas More, Utopie, (1516)
Des inégalités qui se développent dans l’abondance
Des sociétés qui se fracturent
Des repères qui s’estompent
Des démocraties désenchantées
Des valeurs en question dans l’ère de l’égoïsme
Les « communs » comme espoir de réunification ?
6. Dans le champ politique: repenser les modalités de
gouvernement, passer à une démocratie participative ou
délibérative, redonner voix aux citoyens…
Dans le champ économique: privilégier la valeur d’usage à la
valeur d’échange, repenser ce qui compte, redéfinir la
propriété…
Dans le champ social: retrouver la convivialité, partager,
prendre soin des autres et de l’environnement…
Inventer d’autres façon d’habiter le monde: jardins partagés,
AMAP, nouveaux indicateurs de richesses, énergies citoyennes,
plateformes collaboratives, monnaies locales, Nuit Debout…
8. « L’homme n’a point créé la terre ; il a, il est vrai, un droit naturel à sa
possession, mais il n’a pas le droit de disposer, même du moindre lopin,
comme de sa propriété durable et perpétuelle. »
Thomas Paine, Justice agraire, 1797
Le commun mène à la tragédie: Garret Hardin
« La tragédie des communaux se présente ainsi. Imaginez un pâturage ouvert
à tous. On doit s'attendre à ce que chaque éleveur essaie de mettre autant de
bétail que possible sur le terrain commun. Un tel arrangement peut
fonctionner d'une manière raisonnablement satisfaisante pendant des siècles
parce que les guerres tribales, le braconnage et la maladie maintiennent le
nombre tant des hommes que des bêtes bien au-dessous de la capacité de
support de la terre. Finalement, cependant, vient le jour du jugement, c'est-
à-dire le jour où le but longtemps-désiré de la stabilité sociale devient une
réalité. À ce point, la logique inhérente des communaux génère
implacablement la tragédie ».
9. « La nature […] invite tous les hommes à s'entraider mutuellement, et à
partager en commun le joyeux festin de la vie. Ce précepte est juste et
raisonnable, il n'y a pas d'individu tellement placé au-dessus du genre humain
que la Providence ne doive prendre soin que de lui seul. La nature a donné la
même forme à tous ; elle les réchauffe tous de la même chaleur, elle les
embrasse tous du même amour ; ce qu'elle réprouve, c'est qu'on augmente
son bien-être en aggravant le malheur d'autrui. »
Thomas more, Utopie, 1516
Pour Hardin l’ « injustice est préférable à la ruine
totale », seule la privatisation et le marché peuvent
nous sauver !
…mais le « commun » a des ressources !
11. Les communs « renaissent » sur au moins deux plans:
-un plan « intellectuel » attesté par la floraison des ouvrages, articles etc.
qui leurs sont consacrés .
-un plan « sociétal » qui renvoie à une multitude d’initiatives, d’innovations
sociales, qui seraient susceptibles d’en matérialiser des incarnations.
« Les communs dessinent une vision très différente de l’épanouissement humain et de
l’éthique. Ils invitent les gens à inventer leurs propres styles d’émancipation, par eux-
mêmes et à l’endroit où ils sont. Le paradigme des communs n’a pas grand-chose à
voir avec l’étroitesse d’esprit de la politique politicienne, avec les idéologies rigides ou
avec les institutions centralisées éloignées du terrain. Il veut construire à neuf. »
David Bollier, La renaissance des communs, 2014
12. sur le plan intellectuel:
-travaux d’Elinor Ostrom: le commun n’est pas « tragédie »…
…Mais elle parle de « biens communs » ou de « ressources communes »
-repenser les communs au plan « politique »:
Pour Dardot et Laval (2010) les communs : « […] ne sont pas
nécessairement des biens au sens strict du terme, mais plutôt des systèmes
de règles régissant des actions collectives, des modes d’existence et
d’activité de communautés ».
13. Un commun est ce qu’on institue comme tel pour ensuite le
gérer « en commun ». Cela met la démocratie au premier plan.
Les inégalités ne sont pas qu’économiques et
environnementales ; elles concernent aussi la répartition du
pouvoir.
Le « retour du commun » doit donc être porteur d’une
réorganisation politique démocratique donnant voix à tous,
ce qu’on peut associer à la démocratie participative ou
délibérative
14. -Pour David Bollier, la renaissance des communs est aussi une résultante
d’interrogations sur ce qui compte pour nous : être plus riches ou être
heureux, vivre en bonne santé, prendre soin de soi et des autres, préserver
l’environnement…
« […]les communs sont porteurs de valeurs non mesurables, qualitatives
et particulières, qui échappent aux économistes et aux politiciens. Le plus
grand défi auquel nous sommes confrontés est de trouver de nouveaux
moyens de protéger l’intégrité des communs et la richesse que, parfois
de manière invisible, ceux-ci produisent. »
D. Bollier, La renaissance des communs, 2014
16. Privatiser c’est soustraire à autrui mais c’est aussi se soustraire à
autrui, se replier sur la sphère privée au détriment du « monde
commun »
Or:
« Commun a le sens de monde commun, d’un monde à habiter
ensemble, à cultiver avec le plus grand nombre de protagonistes »
Emilie Hache, Ce à quoi nous tenons. Pour une écologie pragmatique,
2011
17. Une société « conviviale » ?
« Ce qu’elles ont en commun, c’est la recherche d’un convivialisme, d’un art
de vivre ensemble (con-vivere) qui permette aux humains de prendre
soin les uns des autres et de la Nature, sans dénier la légitimité du conflit
mais en en faisant un facteur de dynamisme et de créativité. Un moyen de
conjurer la violence et les pulsions de mort. »
Manifeste convivialiste, Le bord de l’eau, 2013
18. Le seul ordre social légitime universalisable est celui qui s’inspire d’un principe de
commune humanité, de commune socialité, d’individuation, et d’opposition maîtrisée et
créatrice.
Principe de commune humanité : par delà les différences de couleur de peau, de
nationalité, de langue, de culture, de religion ou de richesse, de sexe ou d’orientation
sexuelle, il n’y a qu’une seule humanité, qui doit être respectée en la personne de chacun
de ses membres.
Principe de commune socialité : les êtres humains sont des êtres sociaux pour qui la
plus grande richesse est la richesse de leurs rapports sociaux.
Principe d’individuation : dans le respect de ces deux premiers principes, la politique
légitime est celle qui permet à chacun d’affirmer au mieux son individualité singulière en
devenir, en développant sa puissance d’être et d’agir sans nuire à celle des autres.
Principe d’opposition maîtrisée et créatrice : parce que chacun a vocation à manifester
son individualité singulière il est naturel que les humains puissent s’opposer. Mais il ne leur
est légitime de le faire qu’aussi longtemps que cela ne met pas en danger le cadre de
commune socialité qui rend cette rivalité féconde et non destructrice.
20. « Bien » revêt un sens matériel de chose ou service, mais
également un sens moral renvoyant au juste, au vrai au beau.
« Commun » renvoie à une liberté d’accès, d’usage, s’exerçant à
l’égard « choses » mais également à un « monde commun »
fondé sur la communication, le dialogue.
Le monde commun apparaît alors comme une narration collective
qui donne un sens à la condition humaine. C’est bien la
multiplicité de ces narrations, que l’univocité des modalités
dominantes d’évaluation tend à rendre commensurable en rabattant
le champ des valeurs sur celui de la valeur économique.
21. Cela oblige également à (re)définir ce qui compte, non au sens dominant lié à
la possibilité de quantifier et de mettre en nombre, mais au sens d’engagement
moral visant à préciser les contours d’une « vie bonne avec et pour autrui ».
Une telle perspective, loin d’exclure les autres, comme l’imposerait la tragédie
des communs, amène au contraire à leur faire de la place.
Les pratiques qui se développent pour réinstituer des communs essaient ainsi «
[…] de prendre en compte plus de personnes » (E. Hache, 2011) .
Une politique du commun doit apparaître comme un projet d’émancipation
mettant en capacité chacun, y compris les plus pauvres, de s’affranchir de la
sujétion imposée par l’ordre économique.
Ce projet demeure à élaborer et à faire partager.
23. RENCONTRES DES
ECONOMIES POSITIVES
Michel RENAULT
Université de Rennes 1
PEKEA - Political and Ethical Knowledge on Economic Activities
FAIR - Forum pour d’Autres Indicateurs de Richesse
Les convivialistes
ECONOMIES POSITIVES: DE QUOI PARLE T-ON?
Habiter le monde autrement : pour une politique du commun
Rencontres #EcoPositivesBzh – Auray - 7-8 novembre 2017