La fin de l’année 2018 a su réserver son lot de cadeaux empoisonnés concernant le climat et a été l’occasion de rappeler l’urgence des mesures à entreprendre pour limiter au maximum les effets du changement climatique. Deux rapports illustrent cet appel à l’action. Le premier d’entre eux est le rapport du GIEC du 8 octobre qui incite à une action immédiate pour limiter le réchauffement climatique à 1,5°C, limite au-delà de laquelle les risques encourus seront bien plus importants. Vient ensuite le rapport du WWF sur la biodiversité datant du 30 octobre qui présente un résultat alarmant, 60% des populations d’animaux sauvages ont disparu sur Terre en moins de 50 ans, en lien avec l’expansion des activités humaines sur les lieux de vie sauvage. Ainsi, l’urgence qu’il y a agir pour la préservation de l’environnement commence à faire écho dans le monde politique et certaines mesures, telles que la taxe sur les carburants ont été mises en place. Mais cette dernière, du fait d’un manque de considération de ses implications sociales, a rencontré le succès qu’on lui connaît en donnant naissance au mouvement des Gilets Jaunes. Enfin, dernière ombre au tableau de cette fin d’année, l’élection de Jair Bolsonaro au Brésil qui vient renforcer l’influence des climato-sceptiques à l’échelle mondiale.
C’est donc sur ces constats plutôt amers que l’année 2019 débute, ne laissant pas beaucoup de place à l’optimisme. Mais, c’est parfois dans ces moments qu’un sursaut se produit là où on ne l’attend pas. Ainsi le cri du cœur de la jeune suédoise Greta Thunberg lors de la COP 24 sera peut être entendu et permettra de faire de 2019 l’année « du changement, que ça vous plaise ou non ». Un premier pas dans cette direction a d’ailleurs pu être effectué lors de la COP 24 avec un accord de près de 200 pays sur les règles de mise en œuvre de l’accord de Paris.
Au menu de ce numéro de l’Inf’OSE, nous vous proposons de faire le point sur le démantèlement des centrales nucléaires en France ainsi que sur les interconnexions électriques du futur. D’autres articles traitant de la réglementation thermique du bâtiment, de la situation énergétique de Taïwan et de l’impact de la gratuité des transports en commun accompagneront votre lecture.
Nous vous souhaitons une bonne lecture et une année 2019 en apothé’OSE !
Lyes Ait Mekourta
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La fin de l’année 2018 a su réserver son lot de
cadeaux empoisonnés concernant le climat
et a été l’occasion de rappeler l’urgence des
mesures à entreprendre pour limiter au maximum
les effets du changement climatique. Deux rap-
ports illustrent cet appel à l’action. Le premier
d’entre eux est le rapport du GIEC du 8 octobre
qui incite à une action immédiate pour limiter
le réchauffement climatique à 1,5°C, limite
au-delà de laquelle les risques encourus seront
bien plus importants. Vient ensuite le rapport
du WWF sur la biodiversité datant du 30 octobre qui présente un résul-
tat alarmant, 60% des populations d’animaux sauvages ont disparu sur
Terre en moins de 50 ans, en lien avec l’expansion des activités humaines
sur les lieux de vie sauvage. Ainsi, l’urgence qu’il y a agir pour la préser-
vation de l’environnement commence à faire écho dans le monde poli-
tique et certaines mesures, telles que la taxe sur les carburants ont été
mises en place. Mais cette dernière, du fait d’un manque de considéra-
tion de ses implications sociales, a rencontré le succès qu’on lui connaît en
donnant naissance au mouvement des Gilets Jaunes. Enfin, dernière ombre
au tableau de cette fin d’année, l’élection de Jair Bolsonaro au Brésil qui
vient renforcer l’influence des climato-sceptiques à l’échelle mondiale.
C’est donc sur ces constats plutôt amers que l’année 2019 débute,
ne laissant pas beaucoup de place à l’optimisme. Mais, c’est parfois dans
ces moments qu’un sursaut se produit là où on ne l’attend pas. Ainsi le
cri du cœur de la jeune suédoise Greta Thunberg lors de la COP 24 sera
peut être entendu et permettra de faire de 2019 l’année « du change-
ment, que ça vous plaise ou non ». Un premier pas dans cette direc-
tion a d’ailleurs pu être effectué lors de la COP 24 avec un accord de
près de 200 pays sur les règles de mise en œuvre de l’accord de Paris.
Au menu de ce numéro de l’Inf ’OSE, nous vous proposons de faire
le point sur le démantèlement des centrales nucléaires en France ainsi que
sur les interconnexions électriques du futur. D’autres articles traitant de
la réglementation thermique du bâtiment, de la situation énergétique de
Taïwan et de l’impact de la gratuité des transports en commun accompag-
neront votre lecture.
Nous vous souhaitons une bonne lecture et une année 2019 en apothé’OSE !
Lyes AIT MEKOURTA
Toute reproduction, représentation, traduc-
tionouadaptation,qu’ellesoitintégraleoupar-
tielle, quel qu’en soit le procédé, le support ou
le média, est strictement interdite sans l’auto-
risation des auteurs sauf cas prévus par l’article
L. 122-5 du code de la propriété intellectuelle.
I N F ’ O S E | J a n v i e r 2 0 1 9
2
Coordinatrice - Catherine Auguet-Chadaj
Maquettiste - Antoine Jourdain de Muizon
Photos - Etudiants MS OSE
EDITOCONTACTS
10. En août 2015, la LTECV a
fixé les objec tifs ambi-
tieux de la France en termes
d e ré d u c t i o n d e co n s o m -
mation d ’énergie primaire
et d’émissions de CO2
. Des
objectifs par secteur ont été
définis, notamment dans celui
du résidentiel ter tiaire qui
représente à lui seul 45% [1]
de la consommation d’énergie
finale en France. Ainsi, l’état
a affiché deux objectifs : le
premier – rénover 500 000
logements par an afin de
r é d u i r e l a c o n s o m m a t i o n
d’énergie du parc immobilier
de 38% en 2025 par rapport à
2010, le second – un niveau
BBC Rénovation de 80 [kWh/
m²/an] pour l’ensemble du
parc en 2050.
La France compte 36,3 mil-
lions de logements [2] et 66%
[3] de ce parc a été construit
avant 1974 (date de la pre -
mière réglementation ther-
mique), ce sont ces bâtiments
qui sont qualifiés de passoire
thermique. L’Etat prend très
au sérieux la rénovation de
ces logements énergivores. En
effet, il propose de nombreux
dispositifs d’aide financière
ainsi que des solutions de
conseil et d’accompagnement
à la rénovation énergétique.
C e p e n d a n t , l ’o b j e c t i f d e
500 000 rénovations par an est
loin d’être atteint avec seule-
ment 90 000 rénovations [4]
en 2018.
Au-delà de ces objectifs de
réduction de consommation
du secteur résidentiel ter-
tiaire, la problématique de la
rénovation prend de plus en
plus une dimension sociale.
Sur les dix dernières années
la hausse moyenne du coût
de l’énergie a été de 4% par
an [5]. Ces augmentations
successives ont vu apparaî-
tre un nouveau mal social :
l a p r é c a r i t é é n e r g é t i q u e .
Un Français est en situation
d e p r é c a r i t é é n e r g é t i q u e
lorsqu’« il éprouve, dans son
logement, des difficultés par-
ticulières à disposer de la
fourniture d’énergie néces-
s a i re à l a s at i s f a c t i o n d e
ses besoins élémentaires en
raison de l’inadaptation de
ses ressources ou de ses con-
ditions d’habitat » (selon la loi
« Grenelle 2 » de 2010). L’INSEE
a estimé que 4,8 millions de
ménages étaient touchés par
la précarité énergétique en
2006, tandis qu’en 2013 ce
chiffre est passé à 5,6 mil-
lions, soit 1 ménage sur 5. En
plus des difficultés financières
que ces ménages ont pour
se chauffer, une étude réal-
isée en 2013 a montré qu’ils
étaient également plus sus-
ceptibles de développer cer-
tains problèmes de santé [6].
500 000 rénovations énergétiques
par an : un objectif atteignable ?
Impact sur la santé Migraine
Anxiété et
dépression
Bronchite
chronique
Sifflements
respiratoires
Exposé à la précarité
énerg.
48% 41% 22% x 4
Non exposé à la
précarité énerg.
32% 29% 10% x 1
Tableau 1: Evaluation de l’impact de la précarité énergétique
sur la santé dans l’Hérault, CREAI-ORSF Gefosat, 2013
I N F ’ O S E | J a n v i e r 2 0 1 9
10 500 000 RÉNOVATIONS ÉNERGÉTIQUES
11. Les impacts multiples de la
précarité énergétique ainsi
que le nombre croissant de
ménages touchés font que
l’institut négaWatt qualifie
ce phénomène de « bombe à
retardement sociale ». Si les
coûts de l’énergie continu-
ent de croitre à un r ythme
de 4% par an, les ménages
les plus modestes se retrou-
ve ro n t e n fe r m é s d a n s u n
cercle vicieux : facture éner-
gétique trop élevé, incapac-
ité d’investir pour la réduire,
hausse des factures du fait de
l’augmentation des coûts de
l’énergie. La rénovation éner-
gétique est donc bénéfique,
souhaitable et nécessaire, car
elle répond à de nombreux
enjeux : précarité énergétique,
création d’emplois localisés,
lutte contre le réchauffement
climatique, développement
de l’indépendance aux éner-
gies fossiles.
I l est donc nécessaire de
se demander quels sont les
freins actuels à la rénovation
et comment les supprimer
afin d’atteindre l’objectif de
500 000 rénovations annuelles.
Heureusement, les experts du
secteur se rejoignent sur plu-
sieurs éléments de réponse.
Un des freins les plus impor-
tants est la méconnaissance
que peuvent avoir les ménages
sur le sujet de la rénovation
et des aides financières dis-
ponibles à la réalisation de
leur projet. Tout d ’abord,
le baromètre annuel 2018
d e M o n ex p e r t- ré n ovat i o n -
énergie [7] montre que 77%
de l’opinion publique pense
que ces travaux sont compli-
qués à mettre en œuvre. Ce
chiffre atteint 80% chez les
personnes ayant déjà réalisé
des travaux. De plus, seule -
ment 41% des personnes inter-
rogées associent travaux de
« rénovation énergétique » à
« financement par les pouvoirs
publics » et 78% sont incapa-
bles de citer spontanément un
dispositif d’aide financière.
L’infor mation existe pour-
tant bel et bien et est facile
d’accès, cela traduit donc une
mauvaise communication de
la part des pouvoirs publics
sur le sujet de la rénovation
é n e r g é t i q u e . C e p e n d a n t ,
l ’A s s e m b l é e n a t i o n a l e a
voté le 23 novembre 2018 la
création d’un carnet numéri-
que de suivi et d’entretien du
logement pour tout nouveau
permis de construire déposé
après le 1er janvier 2019.
Les acteurs de la rénovation
militent pour que cet outil
soit bien plus qu’une simple
plateforme en ligne. Ce carnet
numérique devrait, in fine,
être un outil de communica-
tion pertinent pour atteindre
de façon plus large et plus
pertinente les ménages fran-
çais. Selon Philippe Pelletier,
Président du Plan Bâtiment
Durable, « décider enfin les
ménages à agir massivement
s u p p o s e q u’o n l e u r p a r l e
juste : santé, confort, écono-
mie de charges, valeur patri-
moniale… » [8].
Un autre vecteur important
pour opérer une réelle mas-
sification de la rénovation en
France serait de structurer
une offre de service cohérente
et locale, qui est aujourd’hui
manquante. Cela permettrait
ainsi de proposer à tous les
I N F ’ O S E | J a n v i e r 2 0 1 9
11500 000 RÉNOVATIONS ÉNERGÉTIQUESS
Décider enfin les ménages à
agir massivement suppose
qu’on leur parle juste : santé,
confort, économie de charges,
valeur patrimoniale…
Philippe Pelletier
13. Sources :
[1] « Mix énergétique de la France », avr. 2017.
[2] C. Arnold, « Le parc de logements en France au 1er janvier 2018 », févr. 2018.
[3] PACTE, « Analyse détaillée du parc résidentiel existant », juill. 2017.
[4] Energie Plus n°616, « Les collectivités démunies face aux objectifs de la rénovation énergétique des bâtiments », déc-2018.
[5] Institut négaWatt, « Résorber la précarité énergétique et rénover les passoires thermiques », juin 2018.
[6] CREAI-ORS Gefosat, « Etude sur les liens entre précarité énergétique et santé dans l’Hérault », 2013.
[7] « Baromètre Annuel ». [En ligne]. Disponible sur: https://monexpert-renovation-energie.fr/blog/blog/barometre2018-134.
[Consulté le: 15-janv-2019].
[8] P. Pelletier, « Rénovons nos bâtiments », EdEnmag n°5, déc-2018.
[9] « Enquête TREMI (Travaux de Rénovation Energétique des Maisons Individuelles) Campagne 2017 ». ADEME, oct-2018.
sensibles à la hausse des
coûts de l’énergie. Toutefois
un tel modèle économique
est encore difficile à mettre
en place à grande échelle, car
il suppose un changement en
profondeur des habitudes des
acteurs financiers.
Le chemin est donc encore
long si l’on souhaite atteindre
un parc de bâtiments rénové
au niveau BBC d’ici 2050.
Mais les idées pour opérer un
changement de paradigme
autour de la rénovation sont
nombreuses et poussées aussi
bien par l’Etat que par les pro-
fessionnels de la rénovation.
De plus, des expérimentions
ont déjà eu lieu concernant
la réalisation de rénovations
complètes, plutôt que par
partie, en utilisant le mode de
financement de « l’équilibre
e n t r é s o r e r i e » ( e x p é r i -
ence DORéMI). Les retours
d’expériences commencent
aujourd’hui à tomber, et ils
montrent que ce type de dis-
positif fonctionne très bien
: les objectifs d’équilibre en
trésorerie et d’amélioration
d e l a p e r f o r m a n c e
énergétique jusqu’au niveau
B B C R é n o v a t i o n o n t é t é
atteints. Ces changements de
méthodologie mettront du
temps pour être déployés sur
l’ensemble du territoire, mais
dès lors qu’ils le seront, la
massification de la rénovation
pourra débuter, et la France se
sera enfin donné les moyens
d’atteindre son objectif de
500 000 rénovations par an.
Tristan DELIZY
I N F ’ O S E | J a n v i e r 2 0 1 9
13SÉCURITÉ ÉNERGÉTIQUE À TAÏWAN
21. Sources :
[1] H. Briche et M. Huré, « Dunkerque, nouveau « laboratoire » de la gratuité des transports - Métropolitiques », mai 2017.
[2] C. Deluzarche, « Transport et CO2 : quelle part des émissions ? », 2017.
[3] O. Cats, T. Reimal, et Y. Susilo, « Public Transport Pricing Policy – Empirical Evidence from a Fare-Free Scheme in Tallinn,
Estonia », Transportation Research Record Journal of the Transportation Research Board, vol. 2415, p. 89‑96, janv. 2014.
[4] G. Carrez et al., « Rapport du Comité sur la faisabilité de la gratuité des transports en commun en Île de France leur finance-
ment et la politique de tarification », Ile de France, oct. 2018.
[5] Ursaf, « Versement Transport ». [En ligne]. Disponible sur: https://www.urssaf.fr/portail/home/taux-et-baremes/versement-
transport.html.
[6] S. Vincendon et Libération, « A Dunkerque, les transports gratuits, ça paye », 04-sept-2018.
[7] D. B. Hess, « Decrypting fare-free public transport in Tallinn, Estonia », Case Studies on Transport Policy, vol. 5, no 4, p.
690‑698, déc. 2017.
[8] O. Cats, Y. O. Susilo, et T. Reimal, « The prospects of fare-free public transport: evidence from Tallinn », Transportation, vol.
44, no 5, p. 1083‑1104, sept. 2017.
[9] D. STIF, DRIEL, et OMNIL, « Enquête Globale Transport », sept. 2012.
[10] « À Châteauroux, 16 ans de transports gratuits », 26-sept-2017.
[11] ADEME, « La gratuité totale des transports collectifs urbains : effets sur la frequentation et interets », PREDIT 3 / ADEME,
janv. 2007.
réconciliant les populations
avec les transports collectifs
et désengorgeant les centres
villes. Cependant, l’expansion
et la modernisation du réseau
d e t r a n s p o r t s s o n t t o u t
aussi importantes pour aug-
menter la part d’utilisateurs.
Néanmoins, dans des réseaux
p l u s i m p o r t a n t s c o m m e
à Marseille, où l’inser tion
d’Aubagne dans la commu-
nauté d’agglomération pose
la question de la gratuité,
ou à Paris, le budget semble
être trop important pour per-
mettre la gratuité tout en con-
servant un réseau adapté. De
plus, si l’on cherche unique-
ment à réduire les émissions
de CO2
, un investissement sur
le réseau afin de rendre les
transports plus accessibles à
tous et de réduire les temps
de transports afin d’être com-
pétitif avec la voiture serait
plus intéressant.
Juliette THOMAS
I N F ’ O S E | J a n v i e r 2 0 1 9
21GRATUITÉ DANS LES TRANSPORTS COLLECTIFS
23. d’électricité du réacteur.
Pour cela, il faut, dans un
premier temps, extraire le
combustible chaud et lour-
dement radioactif pour le
laisser reposer deux ans
dans une piscine de stock-
age temporaire, avant de
pouvoir le stocker défin-
i t i ve m e n t o u l ’e nvoye r
en usine de retraitement.
L’autre poste de travail
consiste dans la vidange
des circuits de la tranche
du réacteur. Cette étape
per mettrait, selon EDF,
d ’é v a c u e r 9 9 , 9 % d e l a
radioactivité du site.[2]
• La seconde est une étape
de démantèlement partiel.
C ’est la première étape
impliquant du génie civil.
On va, en effet, décon-
struire tous les bâtiments
ex tér ieurs au bâtiment
d u r é a c t e u r n u c l é a i r e.
Le réac teur est ensuite
confiné en vue de son
démantèlement.
• La dernière étape est celle
du démantèlement total.
Le réacteur est à son tour
démantelé en commen-
çant par ses échangeurs
de chaleur, puis son bloc
réacteur et enfin par la
structure entière de son
bâtiment.
À l’issu de la dernière étape,
le terrain doit être réhabil-
ité de sorte qu’il redevienne
exploitable après une période
de sur veillance, si cela est
jugé nécessaire. Le terrain
réhabilité sera toujours la
propriété d’EDF mais pourra
être revendu s’il n’y a plus de
risques.
Po u r o b t e n i r l e d r o i t d e
c o m m e n c e r d e s t r a v a u x
d e d é m a n t è l e m e n t t o t a l ,
l’autorité publique doit donner
un décret d’autorisation à
EDF. Il est signé après avis de
l’Agence de Sureté Nucléaire
(ASN). Ensuite, une enquête
publique est effectuée auprès
des riverains et des acteurs
concernés. Une fois l ’aval
de tous obtenu, les travaux
peuvent commencer sous la
surveillance de l’ASN via des
contrôles réguliers des chan-
tiers effectués à fréquences
aléatoires. EDF précise que le
choix du démantèlement est
immédiat après l’arrêt défini-
tif d’un réacteur. Ce choix
a pour objectif de profiter
directement des compétences
des équipes ayant exploité la
centrale à l’arrêt et de ne pas
laisser aux futures générations
un lourd poids économique
lié au démantèlement de cen-
trales construites par le passé.
Dans la réalité, bien que la
volonté du démantèlement
soit immédiate, il y a en
général une inertie de 5 à 7
ans.
L e d é m a n t è l e m e n t ,
financement.
L’ensemble des financements
liés au démantèlement des
réacteurs est pris en charge
par EDF. L’électricien fran-
çais est actuellement le seul
à p r o p o s e r u n e m é t h o d e
d’évaluation des coûts liés à
cette opération. Sa méthode
s e b a s e s u r l ’e x e r c i c e
Dampierre 2009, un devis
réalisé par EDF estimant le
coût de démantèlement des
quatre réacteurs à eau pres-
surisée de la centrale loiré -
taine de 900 MW. Le coût du
démantèlement des centrales
est ainsi calculé par extrapo-
lation de ce coût « générique »
à l’ensemble du parc. La cour
des comptes (CdC) dans son
rapport de janvier 2012 sur
« les coûts de la filière nuclé-
aire » ne semble pas infirmer
cette méthode mais précise
que « le montant des charges
tel que calculé dans l’exercice
DA09 ne peut être validé par la
Cour des comptes qui n’a pas
les compétences pour le faire »
[3]. Ainsi, elle indique que
l’estimation du montant des
charges pour le démantèle-
ment peut s’appuyer sur la
méthode Dampier re 2009,
mais qu’il serait souhaitable
d’avoir recours à des audits
I N F ’ O S E | J a n v i e r 2 0 1 9
23DÉMENTÈLEMENT NUCLÉAIRE
24. techniques par des cabinets
et des experts extérieurs pour
valider ladite méthode.
Pour financer ce coût, EDF
doit établir des provisions.
Elles correspondent à une
mesure de prévoyance qui vise
à comptabiliser aujourd’hui
l e s c h a rg e s f u t u re s. Po u r
cela, à partir de l’estimation
des coûts, l’entreprise his-
torique a recours à un taux
d’actualisation traduisant la
valeur actuelle du coût total
sur la durée en prenant en
compte le coût du temps. Ce
taux d’actualisation met en
jeu plusieurs paramètres :
l’inflation, le taux de rende-
ment des actifs sans risque,
le taux de rentabilité des
actifs placés à destination
du financement des charges
et tout autre facteur ayant
u n i m p a c t p o t e n t i e l s u r
l’évolution de ces provisions.
Ce financement faisait ainsi
l’objet en 2015 d’une provi-
sion de 2,4 Mds d’euros pour
les 9 réacteurs en cours de
démantèlement et de 11,4 Mds
d ’euros en valeur ac tuali-
sée pour l’ensemble des 58
réacteurs à eau pressurisée
du territoire français [2]. Ces
provisions font l’objet de deux
réserves : la sous-évaluation
des coûts des charges et le
choix du taux d’actualisation.
Sur le premier point, une
ex t ra p o l at i o n d u co û t d u
démantèlement du parc fran-
çais a été réalisée par la CdC
avec les méthodes utilisées par
six pays différents : la Suède,
la Belgique, le Japon, les Etats
U n i s , l a G r a n d e - B r e t a g n e
et l’Allemagne. Le montant
calculé par EDF est systéma-
tiquement inférieur aux coûts
calculés à partir des méthodes
étrangères, allant jusqu’à une
multiplication par un facteur
2 (Allemagne méthode E.ON,
Etats-Unis) voire 3 (Allemagne
méthode D.Little) des coûts
de ces charges[4].Plusieurs
facteurs peuvent d’expliquer
cette différence. D’abord, la
méthode DA09 se base sur
une estimation réalisée avant
l’évènement de Fukushima et
doit être réévaluée en tenant
compte des nouvelles normes
sécuritaires post-catastrophe.
D’autres arguments avancés
par EDF défendent ces résul-
tats. D’un côté l’opérateur
français mise sur l’effet de
série et la mutualisation des
tranches pour réduire les
coûts. L’effet de série est le
fait que l’expérience acquise
après démantèlement des pre-
mières installations devrait
permettre de gagner en effi-
cacité (technique, productiv-
ité) pour les prochains, ce qui
se traduit par une baisse des
coûts. Le second argument fait
l’hypothèse que sur les sites
où les réacteurs sont en cours
de démantèlement, d’autres
tranches seraient en fonc-
tionnement ou en construc-
tion ce qui pourrait mutualiser
les services entre production
et démantèlement et éviterait
de dupliquer certains coûts.
Ces arguments sont néan-
moins controversés. D’une
part, car l’effet de série n’est
possible qu’en cas d’échange
efficace entre l’exploitant et
ses sous-traitants. De plus, de
nombreux experts avancent
l’argument qu’une standardi-
sation du démantèlement du
parc n’est pas possible étant
donné que chaque réacteur
a subi des évolutions hété -
rogènes notamment du fait
des différents incidents qu’il
a connus [5].
D’autre par t, la mutualisa-
tion des coûts dépendrait en
partie d’un potentiel renou-
vellement du parc actuel ce
qui pourrait trancher avec les
objectifs fixés par la LTECV.
Plus récemment, le rapport
parlementaire du 1er février
2 0 1 7 s u r l a « Fa i s a b i l i t é
technique et financière du
démantèlement des instal-
lations nucléaires de base »
recommande à l’opérateur his-
torique français de revoir ses
I N F ’ O S E | J a n v i e r 2 0 1 9
24 DÉMENTÈLEMENT NUCLÉAIRE
26. Initialement, le découpage
de la cuve du réacteur était
prévu à l’horizon 2020-2030.
Ce découpage devait être
effectué dans une enceinte
remplie d’eau pour renfermer
la radioactivité de la cuve.
EDF a cependant annoncé
un repor t à l’horizon 2100
avançant le fait que la fais-
a b i l i t é t e c h n i q u e c o n c e r -
nant la découpe « sous-eau »
n’est pas acquise et qu’une
découpe « sous-air » serait
préférable. Ce changement
de stratégie, impliquant un
décalage de plusieurs décen-
nies, n’a pas été validé par
l’ASN. La mission parlemen-
taire du 1er février a ainsi
demandé à EDF d’accélérer ce
démantèlement mentionnant
que l’horizon 2100 n’est pas
acceptable. Elle conseille un
lancement d’appels d’offres
basé sur le prix et les délais.
EDF a récemment répondu
en s’associant à Véolia et en
acquérant la start-up Oreka
Solutions pour développer
des solutions de télé-opéra-
tion et de simulation 3D pour
le démantèlement nucléaire
de ses réacteurs UNGG.[9]
Le réacteur à eau lourde : Ce
réacteur est unique et est
situé à Brennilis. Il a été mis
en exploitation en 1967 et
arrêté en 1985. Il est en état
de démantèlement partiel. Le
travail n’est pas fini, il reste
encore le démantèlement du
bloc réacteur, l’assainissement
et la démolition des bâti-
ments puis la réhabilitation
du site. Ce réacteur a subi de
nombreuses phases d’arrêt et
de reprise de travaux dues à
des annulations de décrets
d’autorisation pour défauts
de procédure. De nombreuses
critiques pointent du doigt les
opérations interminables ainsi
que l’augmentation inces-
sante du coût de déconstruc-
tion. EDF a déposé une nou-
velle demande de démantèle-
ment complet en juillet 2018.
L’entreprise a annoncé qu’il
faudra 17 ans de travaux pour
réaliser le démantèlement
complet plus trois années
d’instruction du dossier suite
à la nouvelle demande.[10]
Le réacteur à neutrons rapides :
Ce réacteur « Superphénix »
est situé à Creys-Mépieu. Il a
été mis en service en 1986 et
arrêté en 1997. Il est unique
en France et embarquait un
système de refroidissement au
sodium. Des travaux de mise
hors ser vice définitive ont
été réalisés et le sodium a été
évacué de la cuve du réacteur.
L e s t r a v a u x d e d é c o u p -
age de la cu ve o nt co m -
mencé en 2018. S’en suivra
le démontage du générateur
de vapeur, la destruction des
bâtiments et l’assainissement
des terrains et l’ensemble sera
réhabilité à l’horizon 2030. Le
terrain restera propriété d’EDF
et sera dédié à la produc-
tion d’électricité (le phénix
re n a î t r a d e s e s c e n d re s ) .
Le ré a c t e u r à e a u p re s -
surisé : Ce réacteur est situé
à Chooz. Ce démantèlement
joue un rôle majeur pour EDF
car il représente la vitrine
des futures opérations de
d é m a n t è l e m e n t d u p a r c
nucléaire français. En effet, le
réacteur à eau pressurisée est
la technologie employée par
les 58 réacteurs nucléaires en
activité. Le réacteur Chooz 1
a été mis en service en 1967
et sa production a été stoppée
en 1991. Il a pour particularité
d’être construit au sein d’une
caverne rocheuse. Après un
démantèlement par tiel des
installations hors réacteur de
1999 à 2008, les équipes se
sont attaquées au démantèle-
ment des circuits nucléaires
du réacteur ( jusqu’en 2014).
Ac t u e l l e m e nt, l e s t rava u x
co n ce r n e nt l e d é m a ntè l e -
ment de la cuve du réacteur
qui sont programmés pour
durer encore trois ans [11].
En 2022, le site pourrait ainsi
être totalement réhabilité et
I N F ’ O S E | J a n v i e r 2 0 1 9
26 DÉMENTÈLEMENT NUCLÉAIRE
28. breuses incer titudes. Outre
les critiques émises par les
différentes instances nation-
ales quant aux financements
et réserves de provisions cal-
culées par EDF pour assurer le
démantèlement futur, la diffi-
culté que connaît l’opérateur
historique à mener à terme ses
projets actuels de démantèle-
ment n’aide pas à dégager un
sentiment d’optimisme pour
l’avenir. De plus, la question du
stockage reste un gros point
d’interrogation et devrait être
un poids lourd dans la note
finale à régler par EDF. Mais
l’avenir n’est pas aussi sombre
que l’on pourrait penser. Les
travaux de déconstruction du
réacteur Chooz A avancent à
un rythme satisfaisant et pour-
rait servir d’exemple pour les
futurs travaux de démantèle-
ment des 14 réacteurs à eau
pressurisée qui doivent con-
naître un arrêt définitif dans
les prochai nes décennies.
EDF sait d’ailleurs mainten-
ant grâce à ce projet qu’une
durée moyenne de 15 ans pour
le démantèlement de ce type
de réacteurs est atteignable
[11]. La prochaine centrale à
suivre l’exemple sera celle de
Fessenheim dont l’arrêt défini-
tif est prévu à l’horizon 2020.
A l’avenir, une ouverture à la
concurrence des travaux de
démantèlement pourrait appa-
raitre, s’inspirant du modèle
américain. Cette dernière per-
mettrait des études plus pré-
cises des travaux à effectuer
p o u r c h a q u e r é a c t e u r e t
permettrait à de nouveaux
acteurs d’entrer sur le marché.
L’exploitant pour rait ainsi
céder des réac teurs mis à
l’arrêt définitif à des entre-
prises extérieures s’engageant
à réaliser le démantèlement à
moindre coût dans des délais
plus courts toujours dans le
strict respect des règles de
sécurité. Ce modèle est pré-
conisé par le groupement par-
lementaire du 1er février.
La question du démantèle -
ment du parc français n’est
p a s e n c o r e r é s o l u e , d e s
g r a n d e s z o n e s d ’o m b r e
restent à éclairer. Le travail
des institutions françaises, de
l’exploitant et des potentiels
nouveaux acteurs du milieu
restent herculéens mais indis-
pensables pour assurer la
sureté nucléaire du pays. La
bonne réalisation d’un tel
chantier national reste tout à
fait probable, mais tout devra
être mis en œuvre pour éviter
que le démantèlement du parc
nucléaire n’agisse comme une
bombe à retardement pour les
générations futures.
Maxence TOULOT
Sources :
[1] « Macron-Objectif 2035 pour les 50% de nucléaire dans l’électricité », Boursorama, 27-nov-2018. [En ligne]. Disponible sur: https://www.boursorama.com/bourse/
actualites/macron-objectif-2035-pour-les-50-de-nucleaire-dans-l-electricite-3c2910b0c9d0b983eb77d922cce0fba5. [Consulté le: 26-déc-2018].
[2] Lionel Tran, « LA DÉCONSTRUCTION DES CENTRALES NUCLÉAIRES EDF », EDF, 2015.
[3] Cour des comptes, « Synthèse rapport thématique la filière électronucléaire », 2011.
[4] Bernard Laponche, et Association Global Chance, « LE COUT DU DEMANTELEMENT DES CENTRALES NUCLEAIRES », oct. 2016.
[5] Julien Aubert, Barbara Romagnan, « Faisabilité technique et financière du démantèlement des installations nucléaires de base », Commission du développement
durable et de l’aménagement du territoire, févr. 2017.
[6] « Nucléaire : EDF contraint de revoir à la hausse ses provisions pour démantèlement », Actu-Environnement. [En ligne]. Disponible sur: https://www.actu-envi-
ronnement.com/ae/news/nucleaire-demantelement-dechets-edf-taux-actualisation-provision-30389.php4. [Consulté le: 26-déc-2018].
[7] Arrêté du 29 décembre 2017 modifiant l’arrêté du 21 mars 2007 relatif à la sécurisation du financement des charges nucléaires. .
[8] « Nucléaire : EDF va devoir renforcer ses provisions ». [En ligne]. Disponible sur: https://www.lesechos.fr/11/01/2018/lesechos.fr/0301127689066_nucleaire---edf-
va-devoir-renforcer-ses-provisions.htm#formulaire_enrichi::bouton_facebook_inscription_article. [Consulté le: 27-déc-2018].
[9] « Démantèlement nucléaire : le coup double d’EDF », juin 2018.
[10] « La centrale nucléaire de Brennilis ne sera pas démantelée avant 2038 ». [En ligne]. Disponible sur: https://www.lesechos.fr/19/07/2018/lesechos.
fr/0302002977537_la-centrale-nucleaire-de-brennilis-ne-sera-pas-demantelee-avant-2038.htm. [Consulté le: 27-déc-2018].
[11] « Ardennes : Le démantèlement de la centrale de Chooz, un grand test avant Fessenheim », France 3 Grand Est. [En ligne]. Disponible sur: https://france3-regions.
francetvinfo.fr/grand-est/ardennes-demantelement-centrale-chooz-grand-test-fessenheim-1471831.html. [Consulté le: 28-déc-2018].
I N F ’ O S E | J a n v i e r 2 0 1 9
28 DÉMENTÈLEMENT NUCLÉAIRE
29. Le HVDC au cœur des interconnexions des
réseaux électriques du futur
Introduc tion
L’équilibre production con-
sommation est une con-
d i t i o n fo n d a m e nt a l e p o u r
le bon fonc tionnement et
l’exploitation du réseau élec-
trique. La perte d’une cen-
trale de production de 1,3GW
en France, se traduit par une
chute de la fréquence au
niveau national de 265mHz.
A p u i s s a n c e i d e n t i q u e à
l ’échelle européenne, une
per te d’ouvrage cause une
baisse de fréquence de 65mHz
[ 1 ] . C e t e xe m p l e m o n t r e
l’intérêt d’un réseau inter-
connecté de grande ampleur.
Au fil des années les pays
européens ont donc accru le
maillage et interconnecté les
réseaux électriques, réunis
en zones synchrones (ENTS-
O). Au quotidien ces inter-
co n n ex i o n s p e r m e t te nt l e
par tage des actifs de pro-
duction disponibles. Depuis
2017, chaque pays peut faire
b é n é f i c i e r s e s vo i s i n s d e
ses moyens en réglage de
fréquence notamment via le
marché d’ajustement. Cette
mutualisation de la réserve
permet, de par la concurrence
entre producteurs européens,
de réaliser des gains finan-
ciers pour les gestionnaires
d e r é s e a u x d e t r a n s p o r t
d’électricité (ou GRT ) en cas
d’aléa dans leur zone d’action.
A l’avenir, il serait possible de
renforcer la mutualisation des
ressources afin de répondre de
manière réactive, efficace, et
optimisée économiquement à
un besoin de rééquilibre.
Dans le cas d’une mutual-
isation des ressources, les
sources hydrauliques per-
mettent de mobiliser rap -
idement une grande quan-
tité d’énergie (10 minutes
environ) et fait de la Norvège
(98% de production hydrau-
lique) un acteur de production
majeur. Les barrages norvé -
giens jouent un rôle essentiel
sur le marché scandinave de
l’électricité Nordpool. Ils per-
mettent de faire face à la forte
irrégularité de la production
éolienne au Danemark. Les
centrales hydroélec triques
compensent les creux de pro-
duction éolienne grâce à plu-
sieurs câbles d’interconnexion
sous-marins. A l’inverse, le
Danemark envoie à la Norvège
ses excédents de production
en période de grands vents,
pendant lesquelles les bar-
rages norvégiens reconstitu-
ent leurs stocks. En 2015, la
Norvège et le Royaume -Uni
ont annoncé un accord pour
la pose du plus long câble
haute tension sous-marin du
monde : Nor thSea Network
(730km/1,4GW ), permettant
au Royaume-Uni (déficitaire
en produc tion) d’impor ter
de l’hydroélectricité norvé-
gienne. Les réseaux intercon-
nectés pallient les disparités
des moyens de production à
travers l’Europe et mutual-
isent les réserves d’énergie.
Le cas allemand est égale -
m e n t u n e i l l u s t r a t i o n d e
l ’i m p o r t a n c e d ’ u n r é s e a u
interconnecté, nécessaire à
l ’intégratio n des énergi es
renouvelables. En 2015, près
de 80T Wh d’éolien étaient
produits en Allemagne (leader
européen). S’ajoutent 38TWh
d’énergie solaire. La for te
capacité de production d’EnR
impose à l’Allemagne d’être
connectée à d’autres réseaux
pour éviter les problèmes
de variabilité de production.
I N F ’ O S E | J a n v i e r 2 0 1 9
29RÉSEAUX ÉLECTRIQUES DU FUTUR
30. Les interconnexions profi -
tent à la mise en commun
des marchés comme c’est le
cas en Europe. L’Allemagne a
besoin d’évacuer son surplus
d’énergie lorsque la produc-
tion est for te. A contrario,
la France vend de l’énergie
(majoritairement nucléaire) à
son voisin lorsque celui-ci n’est
pas en mesure d’en produire
suffisamment via ses EnR. Ces
cycles d’achats et de ventes
issus de la mise en commun
des marchés sont une des con-
séquences de l’interconnexion
des réseaux. L’intégration des
énergies renouvelables, avec
les engagements politiques et
la croissance que l’on connaît,
passe par une architecture
de réseau encore plus inter-
connecté et un renforcement
de la supervision au niveau
Européen de Co-réseaux.
1. Les avantages du HVDC
L’expansion et le développe-
ment du réseau nécessite la
mise en place de nouvelles
interconnexions. Les lignes
aériennes ne répondent plus
aux exigences d’acceptabilité
du grand public. Les lignes
souterraines engendrent des
courants capacitifs et obligent
la mise en place d’inductances
de compensation, provoquant
l’apparition de résonances
et de sur tensions lors de
manœuvres. Le High Voltage
Direc t Current (ou HVDC ),
soit des lignes de transport
d’électricité à courant continu,
s’affranchit de ces problèmes
e t p ré s e n te d e n o m b re u x
avantages.
1.1. Les avantages sur la
fréquence
Le réseau Européen est de par
ses interconnexions moins
sensibles aux aléas de con-
sommation. Néanmoins, une
variation de fréquence ou
l’apparition d’une surtension
va naturellement se propager
sur toute une poche de réseau
(pour la tension) ou sur toute
la zone (pour la fréquence). Les
interconnexions ont rendu le
réseau plus fort mais un risque
de cascade de fréquence ou
de tension à travers l’Europe
existe toujours. Les liaisons
HVDC à l’image de la liaison
France Angleterre coupent le
lien de synchronisme entre
deux pays et évitent la prop-
agation d ’une cascade de
fréquence.
1.2. Chute de tension
Un argument majeur en faveur
du HVDC n’est autre que son
rendement sur les longues dis-
tances. En alternatif les lignes
peuvent être modélisées par
un modèle en π. La longueur
d ’o n d e d u c o u r a n t c i rc u -
lant dans les câbles, donc la
fréquence du réseau et la lon-
gueur des lignes permet de
montrer l’influence des car-
actéristiques de la ligne sur
les chutes de tension. Ainsi, à
une fréquence de 50Hz (lon-
gueur de la liaison très supéri-
eure à la longueur d’onde), les
chutes de tension sont beau-
coup plus importantes que sur
une ligne HVDC. La longueur
maximale de la ligne dépend
grandement de la puissance et
du déphasage courant-tension
délivré en sortie [2].
Les modèles de lignes HVDC
convergent vers l’affirmation
d’une impédance élevée en
HVDC, d’où la présence de
faibles courants de ligne donc
de faibles chutes de tension [3].
Il est à noter que les lignes de
transport tendent à s’allonger
avec les interconnexions entre
pays afin d’acheminer les éner-
gies des installations offshore.
1.3. Contrôle des flux de
puissance
Dans un contexte de per te
de contrôle de la produc-
tion (due à l’intermittence
des EnR par exemple), il
e s t p r i m o r d i a l p o u r l e
I N F ’ O S E | J a n v i e r 2 0 1 9
30 RÉSEAUX ÉLECTRIQUES DU FUTUR
33. I N F ’ O S E | J a n v i e r 2 0 1 9
33RÉSEAUX ÉLECTRIQUES DU FUTUR
du travail à fournir pour opti-
miser ces réseaux. Au-delà des
limites de sécurité (besoin
de nouveaux disjoncteurs),
des questions de topologie
(radiale/maillée), des prob-
lèmes de découplage et des
limites physiques comme les
co m p o s a nt s é l e c t ro n i q u e s
utilisés actuellement, le HVDC
apporte des problèmes plus
complexes encore [6].
Ainsi en courant continu, les
inductances de filtrage des
conver tisseurs LCC ou les
capacités de filtrage des VSC
affectent l’inertie du système
[7]. Dans une situation cri-
tique, la constante d’inertie
peut descendre à 100 ms,
le système de régulation de
fréquence se doit alors d’être
réactif.
D e surcroît, les pilotages
en tension et en puissance
ne sont pas simples. Sur les
câbles DC, comme la chute de
tension est faible, il n’est pas
aisé de piloter la tension aux
deux extrémités d’une liaison
point à point car il faut garan-
tir un contrôle de puissance
de grande précision dans un
contexte de maître-esclave où
un convertisseur contrôle la
tension et un autre régule la
puissance de l’autre extrémité
de la ligne. Assurer le fonc-
tionnement du réseau alter-
natif est fondamental, les con-
vertisseurs sont donc à perfec-
tionner pour assurer le main-
tien d’une fréquence stable et
de tensions souhaitées [8].
Le HVDC fait également face
à des problèmes de coûts. La
conception d’une ligne alter-
native de 6GW aborde un coût
de 200M€ contre 500M€ pour
2GW en HVDC soit un rapport
de coûts de 7,5. Ainsi, la mise
en place de lignes de puis-
sances similaires se fait pour
des sommes bien plus impor-
tantes en HVDC qu’en alter-
natif. Ces lignes demandent
également des opérations de
maintenance et de remplace-
ment dues à la durée de vie
des calculateurs et du con-
trôle commande utilisés pour
les transits de puissance (10
ans de durée de vie soit 5 fois
moins que la durée de vie de
la ligne).
Conclusion
L e s é v o l u t i o n s l i é e s a u x
moyens de production et à la
consommation remettent en
question les réseaux de trans-
port d’électricité en Europe.
Une solution d’amélioration
d e s ré s e a u x d e t ra n s p o r t
propose une mise en place
de lignes HVDC pour amé -
liorer un réseau de plus en
plus connec té. Ces lignes
h a u te te n s i o n p e r m e t te nt
d’améliorer la stabilité du
réseau, de limiter les aléas
de fréquence et les chutes de
tension ainsi que d’assurer un
meilleur contrôle des flux de
puissance. Malheureusement,
le HVDC fait encore face à de
nombreux questionnements
quant à son utilisation. Non
dépourvu d’avantages attray-
ants, des verrous s’opposent
toujours à son exploitation
totale. Outre les questions
de sécurité ou de topolo -
gies, l’essentiel des doutes
s’orientent directement vers
les convertisseurs utilisés en
HVDC, leur architecture, les
composants qu’ils nécessitent
ou encore leur place dans les
réseaux HVDC.
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