Presentation given by Bernard Lacharme, Haut Comité pour le logement des personnes at a FEANTSA conference on "People who are homeless can be housed:
An insight into successful practices from across Europe", Cardiff, Wales, 2008
Housing First and Harm Reduction: Tools and Values
Il est possible de rendre le droit au logement opposable pour tous
1. Conférence FEANTSA – Cardiff 14-11-08
Atelier :
L’importance d’un droit au logement opposable
Argumentation contre l’affirmation :
« Il n’est pas possible de rendre le droit au logement
opposable pour tous. »
Bernard LACHARME
Secrétaire général
Haut comité pour le logement des personnes défavorisées
(France)
2. Ce qui n’est pas possible, c’est d’en rester à
un droit proclamé mais non effectif.
Le droit au logement est régulièrement réaffirmé dans des
textes nationaux et internationaux.
Malgré cela, et malgré l’énergie considérable déployée par
les acteurs sociaux, les situations les plus critiques de mal-
logement se sont développées.
Au-delà des mal-logés, cet échec est source d’inquiétude
dans l’ensemble de la population.
L’échec d’un droit proclamé met en cause la crédibilité des
institutions.
3. Ce qui n’est pas possible, c’est de mettre en
œuvre le droit au logement sans le rendre
opposable
Les dispositifs ciblés sur les personnes défavorisées ne
suffisent pas : le droit au logement doit être pris en compte
toutes les politiques (l’urbanisme, l’action foncière, la production de
logements sociaux, les politiques sociales et de santé, etc.).
Ces politiques relèvent de tous les niveaux de la puissance
publique ; la cohérence n’est pas spontanément assurée.
Non opposable, le droit au logement est un objectif qui se
heurte à la concurrence d’autres objectifs de l’action
publique (réduction des dépenses publiques, accession à la propriété et vente
des logements Hlm, politiques urbaines malthusiennes, protectionnisme
communal…)
Opposable, le droit au logement oblige la puissance
publique à adapter les moyens financiers et politiques aux
besoins.
4. Le droit au logement opposable doit être
possible, puisque aucun parlementaire n’a
voté contre la loi « DALO »…
Elle affirme la responsabilité de l’Etat.
1er janvier 2008, recours amiable auprès de commissions de
médiation pour :
1- les demandeurs de logement social ayant dépassé un délai
« anormalement long »
2- les demandeurs, de bonne foi, non logés ou très mal logés
3- les demandeurs d’hébergement.
1er décembre 2008, les catégories 2 et 3 peuvent faire recours
devant le juge si la décision favorable de la commission
n’est pas mise en œuvre.
1er janvier 2012, la catégorie 1 peut faire recours devant le
juge dans les mêmes conditions.
5. L’accès des ménages défavorisés à la
procédure de recours est possible, mais
suppose la mobilisation associative.
L’accès au recours suppose information et assistance.
La loi DALO les prévoit, mais elle n’accorde pas de moyens
spécifiques.
Le DALO conduit à réorienter une partie de l’énergie
militante associative vers une aide à l’accès au droit.
Le combat se mène aussi au sein des instances du recours
amiable (commissions de médiation) : il faut concilier
recherche du consensus et défense des défavorisés.
Le comité national de suivi exerce une vigilance
indispensable.
6. Le manque de logements abordables rend difficile
l’application du droit au logement opposable,
mais prouve aussi qu’on en a besoin.
Dans les ¾ des départements français, l’offre est suffisante.
Les difficultés sont concentrées en Ile de France et dans
quelques départements très urbanisés.
Le logement locatif social n’est pas la seule réponse
possible: il faut prévenir les expulsions, traiter l’habitat
indigne, conventionner des logements privés…
C’est faute de caractère contraignant du droit au logement
que les décisions relatives à la production de logements
abordables n’ont pas été prises.
7. Il est évidemment possible d’organiser la
responsabilité entre l’Etat et les
collectivités territoriales.
L’Etat ne peut pas tout : toute collectivité qui détient des
compétences qui ont un impact sur la capacité de répondre
aux besoins de logements devrait avoir des obligations.
Premier effet de la loi DALO, un projet de loi renforce les
documents de programmation intercommunaux (PLH) et
permet à l’Etat d’intervenir.
Ce projet de loi n’est pas adapté à l’Ile de France ; les
décisions restent à prendre mais les solutions existent : elles
ont été proposées par le comité de suivi et par des Etats
généraux du logement.
8. Il est évidemment possible de trouver les
moyens financiers nécessaires.
L’Etat et les collectivités prennent des mesures qui
augmentent le coût du logement (normes, exigences
environnementales, urbaines, architecturales, etc..) ; ils ont
le devoir de compenser leur incidence pour les plus pauvres.
Le logement rapporte à l’Etat plus qu’il ne lui coûte.
Les aides au logement peuvent être réorientées en faveur du
DALO. Exemple : dans le budget 2009 de la France, 10
milliards € d’aide fiscale sans contrepartie sociale pour 3
milliards avec contrepartie sociale.
9. La crise financière et économique est une
opportunité pour faire avancer le DALO.
Il n’est plus possible aux Gouvernements de nier les marges
de manœuvre dont ils disposent.
Le logement social est un élément majeur de l’économie :
activité du bâtiment, pouvoir d’achat, lutte contre les dérives
des marchés de l’immobilier et leurs conséquences.
Un combat idéologique est à mener :
La solidarité et la cohésion sociale constituent non seulement des
obligations morales, mais aussi des investissements économiques et
politiques.
Comme les dépenses d’éducation ou de soins, les dépenses sociales
de logement ne doivent pas être réduites en temps de crise. Elles
sont un amortisseur de la crise et peuvent contribuer à en sortir.
10. Conclusion : « Yes, we can ! »
Une loi ne résout pas tout, le droit au logement opposable
nécessite une mobilisation permanente des militants du droit
au logement.
Mais le « DALO » est un levier qui conduira l’Etat à rendre
les arbitrages nécessaires :
S’il est condamné, l’Etat sera contraint par le juge
d’affecter des moyens supplémentaires au logement
social.
La condamnation juridique entraîne une responsabilité
politique : celle du Gouvernement.