Engagé dans l'élaboration d'un essai de traitement antirétroviral donné en prophylaxie pré-exposition (PrEP), le groupe interassociatif de lutte contre le sida TRT-5 (www.trt-5.org) a coordonné une consultation communautaire sur l'essai.
Les données issues de ce processus mené au printemps 2010 figurent dans ce rapport.
TRT-5 - Rapport consultation communautaire PrEP (final)
1. PROJET D'ESSAI DE TRAITEMENT ANTIRÉTROVIRAL EN
PROPHYLAXIE PRE-EXPOSITION
CHEZ DES HOMOSEXUELS MASCULINS
rapport de consultation communautaire
décembre 2010
5
5 GROUPE INTERASSOCIATIF
TRAITEMENTS & RECHERCHE THÉRAPEUTIQUE
GROUPE INTERASSOCIATIF
TRAITEMENTS & RECHERCHE THÉRAPEUTIQUE
2. 2 Résumé
4 Introduction
7 Contexte de la consultation communautaire
7 « Prophylaxie Pré-Exposition » (PrEP) : de quoi parle-t-on ?
7 Vers un essai franco-québécois de PrEP ? Résumé du projet, étapes de l'élaboration,
acteurs impliqués
8 Le groupe interassociatif TRT-5 et ce projet
9 Pourquoi consulter la communauté gay sur ce projet d'essai de PrEP ?
sommaire
11 Processus de mise en place de la consultation communautaire
13 Déroulement de la consultation communautaire
15 Le public
15 L'organisation et la mobilisation autour du projet
16 L'appréciation de la participation aux échanges
17 Synthèse des rencontres de consultation
17 Prévention en milieu gay et prophylaxie pré-exposition
19 La consultation communautaire et le rôle des associations
20 Perception et représentations de la PrEP
20 Sur le principe de la PrEP
21 Les risques pour la prévention
21 Questions et incertitudes
22 A qui s'adresse la PrEP ?
22 Quel accès et à quel coût ?
22 A qui profite la PrEP ?
22 Le projet d'essai
22 Le coût et le financement
23 Le design général de l'essai
25 La participation à l'essai
28 Les associations et le projet d'essai
31 Analyse, discussion et propositions
31 Le processus de consultation communautaire
33 Les participants à la consultation et la recherche en prévention biomédicale
35 Mener un essai de PrEP en France : dans quelles conditions ?
36 Perception de la PrEP comme outil : des représentations contradictoires
38 Information et communication sur la PrEP dans le contexte de l'essai
39 Annexes
39 Affiche d'annonce des réunions de consultation
40 Remerciements et déclaration d'intérêts
41 Élaboration du rapport : le matériau recueilli et son traitement
43 Lettre d'invitation à la réunion nationale du 13 février 2010
46 Consultation communautaire sur le projet d’essai de prophylaxie pré-exposition
49 Guide de la consultation communautaire
52 Questionnaire d'évaluation des rencontres de consultation par les participants
3. PROJET D'ESSAI DE TRAITEMENT ANTIRÉTROVIRAL EN
PROPHYLAXIE PRE-EXPOSITION
CHEZ DES HOMOSEXUELS MASCULINS
rapport de consultation communautaire
décembre 2010
4. Contexte données a été mis en place, afin de pouvoir
rendre compte le plus fidèlement possible des
En France, la dynamique de l'infection par le échanges tenus.
VIH chez les gays/HSH1 est forte, avec une inci-
dence annuelle de 1 %. Un essai de traitement Résultats
antirétroviral en prophylaxie pré-exposition
(PrEP) est en préparation en France et au Entre février et juillet 2010, plus de 400
Québec depuis le printemps 2009 ; sa phase personnes ont participé à cette consultation
pilote sera lancée en 2011. Il a pour objectif communautaire qui a été organisée, à titre
d'évaluer l'efficacité d'une stratégie de préven- principal, autour de 14 rencontres d'informa-
tion comprenant une combinaison médica- tion et de débat mises en place dans 10 villes ;
menteuse prise « à la demande » pour réduire en outre, des échanges se sont tenus via
le risque d'acquisition du VIH chez des homo- Internet. La moitié des participants est identi-
sexuels masculins. Le groupe interassociatif fiée comme issue « de la communauté
TRT-5 participe à l'élaboration de ce projet de VIH/sida », l'autre « des communautés gays/
recherche, position inédite pour lui. Pour LGBT ». 20 % des participants n'ont pas
mener à bien sa mission de représentation des déclaré d'affiliation associative (ou, du moins,
intérêts des sujets de la recherche, il a proposé collective). La plupart des réunions de consul-
résumé
la mise en place d'une consultation commu- tations a été mise sur pied par des collectifs
nautaire. Cette première étude menée en interassociatifs, le plus souvent composés
France sur une stratégie de prévention basée d'associations oeuvrant dans le champ du
sur le traitement antirétroviral soulève de nom- VIH/sida et de la santé sexuelle. La difficulté à
breuses questions quant à sa pertinence, son faire participer les associations identitaires
opportunité, sa mise en place ou sa faisabilité. LGBT a été rapportée dans la plupart des
régions. Plusieurs organisateurs font égale-
Objectifs ment part de la difficulté à mobiliser les gays
non affiliés à une structure associative. Une
Les essais sur des outils biomédicaux de pré- difficulté à s'exprimer sur ce sujet nouveau
vention doivent être élaborés dans un dans le cadre de relations interassociatives ou
contexte d'information et de concertation interprofessionnelles est rapportée, de même
avec les communautés concernées. Le pro- que la crainte des organisateurs d'être identi-
cessus de consultation communautaire avait fiés, en tant qu'acteurs de la mobilisation
pour objectifs d'informer sur le projet, de autour de l'essai, comme des acteurs de
permettre l'appropriation des enjeux, de faire recrutement pour l'essai. Les échanges tenus
émerger une parole collective, enfin de ont abordé les enjeux de la prévention du
recueillir les avis de personnes directement VIH/sida chez les hommes homosexuels, la
concernées et ceux d'organisations de lutte recherche sur des outils biomédicaux de pré-
contre le VIH/sida et gays/LGBT2. L'objectif vention, la place de la PrEP dans les stratégies
était de transmettre ces avis au groupe de prévention, enfin le projet d'essai (design,
d'élaboration de l'essai et au Directeur de conditions de mise en place, information,
l'ANRS3, organisme promoteur du projet, et communication, protection des participants…).
d'en fournir une restitution publique.
Conclusions
Méthode
Le public qui a répondu présent à notre invita-
Une trentaine d'acteurs associatifs de lutte tion, très majoritairement composé d'acteurs
contre le sida et gays/LGBT, plus éloignés du associatifs de la lutte contre le sida ou identi-
monde de la recherche que le sont les asso- taires gays/LGBT, ne correspond pas tout à fait
ciations de TRT-5, et identifiés comme des à celui que nous visions initialement. L'objectif
« leaders » locaux, ont été invités à s'engager que nous nous étions fixé (recueillir principa-
dans le processus. L'organisation de la consul- lement les paroles de personnes directement
tation a bénéficié de l'appui scientifique, concernées par le projet d'essai) n'a ainsi pas
technique, logistique du collectif TRT-5 et de été entièrement atteint, faisant de cet exercice
1. HSH : « hommes son groupe ad hoc PrEP, et du soutien finan- une consultation « associative » plus que
ayant des relations sex-
uelles avec d'autres
cier de l'ANRS. Des outils destinés à faciliter la « communautaire ». Les données recueillies
hommes ». conception et le déroulement des rencontres traduisent ainsi davantage les points de vue de
2. Lesbiennes, gays, de consultation ont été élaborés et proposés la communauté associative que ceux des
bi-e-s et trans.
aux acteurs (guide méthodologique et matériel gays/HSH séronégatifs qui s'exposent à des
3. Agence Nationale de
Recherches sur le sida d'information et de communication notam- risques d'acquisition du VIH ou ceux des parti-
et les hépatites virales. ment). Un dispositif harmonisé de recueil de cipants potentiels à l'essai. Cependant, la
2
5. consultation a permis d'ouvrir des espaces gays/LGBT sur des questions de prévention du
d'information et d'appropriation des enjeux VIH/sida, et encore davantage des individus
ainsi que d'échange et de débat entre acteurs sans affiliation associative.
associatifs, dans un contexte où ces espaces
sont jugés insuffisamment nombreux. Prochaines étapes
On ne peut déduire de ces remontées de posi- Dans la perspective de la mise en place de
tion majoritaire sur le projet d'essai de PrEP l'essai, on retiendra, notamment, les éléments
qui sera mené en France et au Québec, tant suivants :
sur son opportunité, sa pertinence ou son
adéquation aux besoins. En revanche, les Q information et communication sur l'essai :
réflexions des acteurs associatifs sont riches focaliser sur l'état de la recherche en matière
et apportent des éclairages essentiels sur leur d'outils biomédicaux de prévention, sur les
perception de la situation de la prévention chez résultats actuels des recherches sur la PrEP,
les gays et les HSH, l'usage d'antirétroviraux mais aussi sur les enjeux individuels de la
dans la prévention, l'articulation de la PrEP participation à l'essai ; distinguer une commu-
avec d'autres moyens de protection, l'éventuel nication d'information et une communication
impact de la PrEP sur les comportements de de recrutement ; créer les conditions les plus
prévention, la protection des futurs partici- favorables à une décision la plus éclairée pos-
pants à l'essai, la place des associations par sible quant à la participation à l'essai ; mettre
rapport à l'essai ou la participation des en place un dispositif fondé sur la pédagogie
communautés en matière de recherche en quant aux choix faits par les investigateurs sur
prévention. C'est pourquoi ce rapport nous son design, qui seront à expliciter et à justifier ;
semble dire beaucoup du contexte dans lequel Q assurer la transparence, à chaque étape du
cet essai est préparé et va être mené, et donc processus de mise en place de l'essai, sur les
des conditions auxquelles il peut être mené en intérêts et les stratégies des parties prenantes
France, de sa faisabilité et de son acceptabilité au projet (ANRS, chercheurs, associations…) ;
par les organisations qui défendent les inté-
Q impliquer davantage de représentants asso-
rêts de la population cible.
ciatifs, en particulier d'associations gays/
LGBT, dans le pilotage, l'élaboration, l'accom-
Leçons tirées
pagnement ou la mise en œuvre du projet d'es-
Il est possible de faire participer des associa- sai (participation au Comité de pilotage, à une
tions oeuvrant dans le champ de la prévention instance de participation associative à créer, au
du VIH/sida à une réflexion sur des enjeux de groupe de travail sur la communication, au
recherche, a fortiori quand ceux-ci ont un lien Comité indépendant…) ; prendre appui sur le
étroit avec des stratégies et politiques de pré- réseau des organisations mobilisées dans la
vention. Les acteurs rencontrés ont exprimé consultation communautaire pour construire
un fort intérêt pour la recherche menée en la participation associative à l'essai PrEP.
matière de prévention, en particulier sur les
outils biomédicaux de prévention. Ils manifes- Au-delà de cet essai, on peut retenir les quel-
tent également un fort besoin d'information ques éléments suivants :
dans ce domaine, notamment à travers
Q information sur les enjeux de la recherche en
l'inscription dans un réseau d'appropriation de
prévention : faire connaître aux associations de
ces sujets et d'échanges sur les stratégies.
lutte contre le sida et des groupes les plus
Dans un contexte français marqué par une
exposés les outils d'information existants ;
forte polarisation et une certaine conflictualité,
mettre en place des dispositifs d'information
ce besoin est renforcé par la conscience d'une
et de formation de ces acteurs ; imaginer des
reconfiguration des enjeux de prévention du
espaces d'appropriation des résultats de ce
VIH que peuvent apporter ces nouveaux outils
type de recherche ; créer des réseaux de dia-
potentiels. Les résultats de cette consultation
logue et d'échanges ;
communautaire confirment l'opportunité, la
pertinence et l'intérêt de telles démarches. La Q participation des groupes les plus exposés à
disponibilité de temps et de moyens pour la recherche aux politiques publiques en
mener un tel processus, la qualité de l'infor- matière de prévention : capitaliser sur le
mation dispensée et la transparence de processus mené pour envisager de le mettre à
positionnement des acteurs impliqués sont profit d'autres projets et imaginer d'autres
des conditions nécessaires. Cette consultation démarches de ce type ; impliquer des
confirme cependant la difficulté qui peut représentants dans la définition des priorités
exister à mobiliser des acteurs associatifs de la recherche en prévention. G
3
6. « La prévention est en constante évolution : capote, réduction des risques,
responsabilité, dépistage, traitements. Nous sommes à un tournant au niveau de
nos approches de la prévention. »
« Il n'y a jamais eu autant de débat autour d'un outil de prévention dans la
communauté, donc parler de la prévention grâce à cette consultation sur le projet
d'essai PrEP, c'est bien. Cela permet de recréer un espace de discussion, et c'est
tant mieux. »
« Il y a un an que j'ai entendu parler de cet essai. Au début, j'ai pensé “ils sont
fous !” et je me suis dit “ce sont 50 % des gens qui vont se contaminer”. Puis,
j'ai appris que des essais de ce type avaient déjà été menés en Afrique. L'idée a
fait son chemin. Si le counseling des participants à l'essai est bon, je me dis que,
finalement, ces 1800 personnes seront peut-être moins exposées qu'elles le
seraient “dans la vraie vie”. »
« Les présentations ont soulevé une question complexe et intéressante :
comment sera prise en compte la communication autour du projet et sa mise en
place, pour éviter une “vague d'inconscience” autour de l'idée qu'un traitement
protège de la contamination et autorise à prendre plus de risques qu'à l'heure
actuelle, notamment chez les générations “post années 80” ? »
L
a mise en exergue de ces citations tra- ce chantier de recherche en prévention
introduction
duit quelques-uns des enseignements biomédicale, surtout au sein du Comité
majeurs de la consultation commu- de pilotage de l'essai, position inédite pour lui
nautaire menée au printemps 2010 sur un à ce jour. En effet, l'implication de TRT-5
projet d'essai de traitement antirétroviral dans la recherche est habituellement de
administré en prophylaxie pré-exposition deux ordres : une participation à l'animation
orale (PrEP)1 « à la demande » chez des de la recherche, qui vise à promouvoir les
homosexuels masculins, consultation dont besoins des séropositifs dans le cadre des
le groupe interassociatif TRT-5 a coordonné projets de recherche, mais ne passe pas par
la mise en place.2 la participation directe à leur élaboration ; une
veille éthique, qui a pour objectif de s'assurer
Conscience que la prévention du VIH/sida est de la protection des intérêts et des droits des
en train de se reconfigurer et que cela participants aux recherches. Pourtant, l'im-
suppose de la réflexion et un engagement portance de l'enjeu et le caractère innovant du
renouvelé. Appréciation positive de la tenue de projet ont justifié l'engagement collectif des
débats publics sur la prévention, ses nouveaux associations formant le groupe TRT-5 dans
enjeux et les outils potentiels en cours d'éva- ce projet.3 Pour être en capacité de faire
luation. Difficile appréhension des enjeux de valoir les besoins et les intérêts des person-
la recherche sur des outils biomédicaux de nes concernées, TRT-5 a proposé de mettre
prévention, lesquels soulèvent des questions en place un dispositif d'information et de
complexes. Nécessité d'un dispositif d'infor- consultation de la communauté gay, dans le
mation et de communication sur l'essai à but de recueillir les avis, les remarques et les
destination des participants potentiels, mais commentaires des personnes concernées,
aussi de l'ensemble des gays. mais aussi issues d'organisations gays/LGBT.
Quand le groupe interassociatif TRT-5 a Consulter « la communauté gay » ou « les
accepté la proposition faite par des chercheurs communautés gays » au sujet d'un projet
de s'engager dans le travail sur le projet de recherche en prévention était un projet
d'essai, son champ d'action était encore ambitieux. A notre connaissance, une telle
limité aux traitements, à la recherche théra- démarche n'avait pas auparavant été entre-
peutique et à la prise en charge médicale du prise en France, la représentation des intérêts
VIH. Il n'était pas évident qu'un collectif des « sujets » de la recherche – en particulier
interassociatif de défense des intérêts des clinique – étant habituellement assurée par
personnes vivant avec le VIH s'engage dans des associations, réunies au sein du groupe
4
7. interassociatif TRT-5. Face au caractère L'objectif que nous nous étions fixé (recueillir
innovant du projet d'essai élaboré en France et principalement les paroles de personnes
au Québec, il nous semblait important d'élar- directement concernées par le projet d'essai)
gir le cercle des acteurs impliqués, aux n'a pas été entièrement atteint, faisant de
participants potentiels d'abord, à des associa- cet exercice une consultation « associative »
tions moins proches de la recherche, qu'elles plus que « communautaire ». Cet objectif
soient de lutte contre le VIH/sida ou identitai- était peut-être trop ambitieux. Ce rapport
res gays/LGBT ensuite. Cette démarche s'est ne dit ainsi pas tout des questions, besoins,
inscrite dans la continuité de la posture de envies, avis, attentes ou réticences des gays
TRT-5 en matière de recherche clinique, mais et HSH, ou même des associations de lutte
s'est déployée selon des modalités nouvelles, contre le VIH/sida ou gays/LGBT vis-à-vis de
en l'occurrence d'appel directement lancé à la conduite d'un essai de prophylaxie pré-
la population cible du projet d'essai à parta- exposition en France. En revanche, les
ger ses réflexions et donner son avis. réflexions des acteurs associatifs sont
riches et apportent des éclairages essen-
Au-delà des objectifs initialement fixés de tiels sur leur perception des enjeux de la
consultation sur le projet d'essai de PrEP, prévention chez les gays et les HSH, de
cette démarche a permis de mobiliser des l'usage d'antirétroviraux dans la prévention
associations françaises de lutte contre le ou les enjeux d'information et de participa-
VIH/sida et des associations gays/LGBT autour tion des communautés en matière de
d'un travail commun. Ce projet d'essai de recherche en prévention. C'est pourquoi ce 1. L'acronyme
« PrEP » est fondé sur
PrEP et la consultation proposée par TRT-5 ont rapport nous semble dire beaucoup des le vocabulaire anglais
été perçus par bon nombre d'acteurs conditions auxquelles un tel essai peut être « Pre Exposure
rencontrés comme une opportunité pour mené dans notre pays, c'est-à-dire de son Prophylaxis », qui se
traduit en français par
informer sur les recherches menées en acceptabilité par les organisations qui « Prophylaxie Pré-
prévention biomédicale et les potentiels nou- défendent les intérêts de la population Exposition ». Bien
qu'un acronyme fran-
veaux outils, mobiliser ou re-mobiliser des cible, et ainsi de sa faisabilité. Nous deman- cophone (« PPrE »)
organisations gays/LGBT et des hommes dons que ces paroles et réflexions soient soit proposé, notam-
ment par les acteurs
gays autour de la prévention du VIH. mis au service de l'élaboration du projet en canadiens de la lutte
cours, tant dans sa forme que dans sa mise contre le VIH/sida,
L'exercice de « consultation communautaire » en œuvre. nous conservons
l'acronyme anglo-
auquel nous nous sommes livrés a des limi- phone dans l'ensemble
tes. Liées, d'abord, aux conditions de son Alors que chercheurs et agences souhaitent du rapport, car c'est
celui-ci qui est désor-
déroulement : ce travail a été mené en paral- poursuivre et accroître leur engagement mais identifié par les
lèle au travail du Comité de pilotage de dans la recherche sur des outils biomédi- acteurs français.
L'expression « la
l'essai dans un échéancier mouvant, propre à caux de prévention, nous ne pouvons que PrEP » désignera les
un projet de recherche en gestation. Il a fallu rappeler avec force la nécessité d'associa- antirétroviraux
aller vite, pour suivre le rythme assez rapide tion et de participation des communautés donnés en PrEP orale.
du travail de ce groupe : la consultation concernées par ces outils à l'ensemble du 2. Au moment de la
tenue de cette consul-
s'est ainsi déroulée sur quelques mois processus de construction et de mise en tation communautaire,
seulement, dans des délais serrés. Il a par œuvre des recherches. Les communautés l'essai était à l'état de
projet. Depuis, l’ANRS
ailleurs fallu « apprendre en faisant », sans en question sont différentes de celles habi- a décidé du lancement
référence directe à un ou des modèle(s) tuellement impliquées dans la recherche de sa phase pilote en
2011. Voir encadré
pré-existant(s), même s'il existe une large clinique (ici des hommes gays séronégatifs « Evolution du
palette de formats possibles pour mener à au VIH). Un chantier est à ouvrir afin que les contexte depuis la
bien ce genre de démarche.4 L'exercice a recherches à venir soient menées dans l'in- consultation commu-
nautaire », page 10.
également été rendu difficile du fait que térêt des personnes concernées et au plus 3. Voir « Contexte de la
l'objectif était, au sein de rencontres d'une près de leurs besoins. G consultation commu-
durée limitée, de transmettre des informa- nautaire », page 5, et
l'encadré « TRT-5 et la
tions complexes, tout en recueillant des avis recherche en préven-
« informés ». Une autre limite importante tion biomédicale »,
page 7.
que l'on peut identifier concerne le public
4. Voir La prophylaxie
qui a répondu présent à notre invitation, pré-exposition (PPrE).
très majoritairement composé d'acteurs Trousse de mobilisa-
tion communautaire.
associatifs de la lutte contre le VIH/sida ou Société canadienne du
identitaires gays/LGBT. sida, avril 2010.
5
8. TRT-5 et la recherche en prévention biomédicale
Le domaine de « treatment as preven- dans le cadre de la prévention dite « posi-
tion » faisait partie, avant même qu'il soit tive ». Le rapport de recommandations
qualifié ainsi, du champ de travail de publié à l'issue de cette mission a recom-
TRT-5, à travers son implication sur la mandé l'élargissement du mandat de
prévention de la transmission mère- TRT-5 à la recherche en prévention, pour
enfant notamment. En l'espace de deux deux raisons : « les enjeux du traitement
ans, cependant, TRT-5 a plus directe- et de la prévention se rejoignent dans la
ment investi le champ de la recherche en recherche comme dans la prévention et le
prévention biomédicale. La première soin ; cet élargissement est indispensable
incursion du collectif sur ce terrain a con- à la construction et à la réalisation des
sisté en l'organisation, en mars 2009, du futurs essais de prévention notamment
1er Forum interassociatif sur la transmis- dans la PrEP ». Les deux experts ont con-
sion sexuelle du VIH. Le contexte des sidéré que le groupe interassociatif était
dernières années est marqué par un lieu pertinent de travail collectif sur les
l'inscription croissante des enjeux de la enjeux de la recherche.
lutte contre le VIH/sida dans un continuum
« prévention-dépistage-traitement- Au cours de l'année 2010, les associations
soins-prise en charge globale », ce qui membres de TRT-5 ont décidé de l'élar-
n'autorise plus à penser la lutte de gissement du mandat du collectif à la
manière compartimentée. Eu égard au recherche en prévention biomédicale,
foisonnement de données scientifiques domaine qui recouvre notamment la
issues des recherches en prévention, il dimension préventive de la recherche
était ainsi apparu pertinent à TRT-5 de clinique (entendue comme la prise en
mettre son expérience de travail sur les compte de la prévention dans la
données de recherche au service de la recherche), la recherche en prévention
communauté associative afin de lui offrir biomédicale (entendue comme la
un cadre collectif de compréhension et recherche sur les outils et méthodes bio-
de réflexion permettant le renforcement médicaux qui visent à réduire ou à éviter
de ses capacités dans le domaine de la la transmission) enfin, la « prévention
recherche en prévention. positive » (la dimension préventive du
travail sur la réussite thérapeutique et la
Quelques semaines après la tenue du qualité de vie, domaine dans lequel TRT-5
Forum, TRT-5 acceptait la sollicitation de est impliqué depuis longtemps, éventuel-
Jean-Michel Molina de participer au lement sans avoir qualifié ainsi son
Comité de pilotage du projet d'essai de engagement). Cet élargissement exclut, a
PrEP et constituait un groupe de travail priori, la participation directe à l'élabora-
spécifique à l'essai (groupe ad hoc), dont tion de projets de recherche – l'expérience
la composition dépasse le cadre de ses de l'essai de PrEP sera donc peut-être
associations membres. réellement inédite.
Quand France Lert et Gilles Pialoux ont
souhaité entendre TRT-5 dans le cadre
de la mission sur la prévention et la
réduction des risques liés au VIH qui leur
avait été confiée par le Directeur Général
de la Santé, le groupe a également
répondu positivement, notamment pour
faire valoir les enjeux de qualité des soins
6
9. CONTEXTE DE LA CONSULTATION COMMUNAUTAIRE
Le parti pris des rédacteurs a été de présenter ici le contexte de la consulta-
tion à travers la reproduction des documents de présentation qui ont été
adressés en guise d'invitation à la première rencontre nationale sur l'essai PrEP,
le 13 février 2010. Ils constituent ainsi l'essentiel du texte de ce chapitre. Ils ont
par la suite été publiés en ligne (www.trt-5.org/article257.html).
« Prophylaxie pré-exposition » (PrEP) : de expérience a déjà été menée avec succès
quoi parle-t-on ? chez des macaques. L'efficacité de cette
stratégie reste à démontrer chez l'homme.5
Le concept de prendre un médicament avant
une exposition à un agent infectieux pour s'en Des recherches sont menées dans ce but
protéger n'est pas une nouveauté. L'idée est depuis 2002, dans des contextes où le nombre
que le principe actif du médicament soit déjà de personnes touchées par le VIH est élevé ou
en circulation dans l'organisme si l'on y est dans des populations à haut risque d'infection
exposé. Les traitements contre le paludisme par le VIH (usagers de drogues par voie intra-
(antipaludéens), par exemple, relèvent de veineuse, hommes ayant des rapports 1. Médicaments utilisés
cette logique d'action. sexuels avec d'autres hommes et travailleur- pour traiter l'infection à
VIH. Le terme est
se-s du sexe). Trois de ces essais concernent abrégé en « ARV ».
Les antirétroviraux1 sont efficacement utilisés des gays/HSH aux Etats-Unis, en Afrique du 2. www.saez.ch/pdf_f/
dans la réduction de la transmission du VIH de Sud, au Brésil, en Equateur et au Pérou.6 2008/2008-05/2008-05-
089.pdf
la mère à l'enfant depuis 1994. Ils permettent 3. L'intérêt du traitement
également de réduire le risque de contamina- Actuellement, il n'y a pas d'essai de PrEP comme outil novateur
tion par le VIH chez des personnes qui ont été conduit en Europe. dans la lutte cotre
l'épidémie d'infections à
accidentellement exposées au virus, sous la VIH, 9 avril 2009 :
forme d'une prophylaxie orale « post-exposi- Vers un essai franco-québécois de « PrEP » ? www.cns.sante.fr/IMG/
pdf/Avis_sur_l_interet_
tion », également appelée PPE, traitement Résumé du projet, étapes de l'élaboration, du_traitement.pdf
post-exposition, TPE ou « traitement d'urgen- acteurs impliqués 4. Lert F., Pialoux G. et
ce ». Plus récemment, l'analyse d'un nombre al., Rapport au Directeur
Général de la Santé sur
important de données scientifiques portant Au printemps 2009, Jean-Michel Molina, la prévention et la réduc-
sur le rôle du traitement des personnes séro- Chef du service des malades infectieuses et tion des risques dans les
positives en matière de réduction des risques tropicales de l'hôpital Saint-Louis à Paris et groupes à haut risque
vis-à-vis du VIH et des
de transmission du VIH a fait émerger la Président de l'Action coordonnée 5 « Essais IST, 2009 : www.vih.org/
notion de « treatment as prevention », et clinique dans le VIH » de l'ANRS, a réuni un documents/rdrs_rap-
port_VL.pdf
l'intégration du traitement antirétroviral dans groupe de travail composé de médecins et de
5. Depuis la tenue de la
la gamme des moyens de prévention qu'il est chercheurs français et québécois, ainsi que consultation commu-
envisagé de « combiner » pour agir sur la de représentants de collectifs d'associations nautaire, les résultats
d'essais menés sur des
dynamique de l'épidémie. La manifestation de lutte contre le VIH/sida : le Groupe inter- ARV en PrEP ont été
publique la plus marquante de ce phénomène associatif TRT-5 et la Coalition des organis- publiés, qui montrent
que cet outil, utilisé
a été la publication, en janvier 2008, du « Swiss mes communautaires québécois de lutte localement ou par voie
statement », avis de la Commission fédérale contre le VIH/sida7. Ce Comité de pilotage a orale, peut être efficace.
suisse sur les problèmes liés au VIH/sida sur alors commencé à travailler à l'élaboration Voir encadré « Evolution
du contexte depuis la
le rôle préventif du traitement antirétroviral2. d'un protocole d'essai de PrEP. consultation commu-
La réflexion sur cet enjeu a trouvé une traduc- nautaire » page 10.
tion en France, à travers notamment un avis Ce projet d'essai a pour objectif d'évaluer 6. Pour plus d'informa-
tions, consultez le site de
suivi de recommandations du Conseil national l'effet protecteur qu'aurait l'administration AVAC-Global Advocacy
du sida3 ou le rapport dit « Lert/Pialoux »4. d'un traitement antirétroviral à des homo- for HIV Prevention (AIDS
Vaccine Advocacy
sexuels masculins séronégatifs exposés Coalition) :
Il reste à démontrer que donner des antiré- sexuellement à un risque d'acquisition du VIH. www.avac.org/ht/a/Get
troviraux à des séronégatifs avant un risque DocumentAction/i/3113
7. En abrégé, COCQ-Sida :
d'exposition au VIH puisse permettre de Par rapport aux essais déjà en cours dans le www.cocqsida.com
réduire le risque de contamination. C'est le monde, qui évaluent un traitement de pro- 8. Ce que l'on appelle
concept de prophylaxie pré-exposition. Cette phylaxie en prise quotidienne8, la stratégie une PrEP « continue ».
7
10. testée dans le projet d'essai franco-québécois Le projet commencerait par une phase de fai-
est spécifique, puisqu'il évaluerait la prise d'une sabilité dans quelques villes qui restent à
PrEP « intermittente à la demande », c'est-à- déterminer.
dire avant et après la période d'activité sexuelle.
L'ANRS devrait être l'organisme promoteur
Aux yeux de l'investigateur et du Comité de de cet essai, qui sera mené en France et au
pilotage de l'essai, cette stratégie alternative Québec à partir de 2011. Depuis septembre
aurait plusieurs intérêts. Quelques études9 2009, plusieurs versions successives du pro-
montrent en effet que l'activité sexuelle chez tocole ont été déposées auprès des instances
les homosexuels masculins est souvent plani- d'évaluation scientifique de l'agence.
fiée sur quelques jours dans la semaine, d'une
part. D'autre part, les données scientifiques Le groupe interassociatif TRT-5 et ce projet
issues des essais chez des macaques
9. a. Wimonsate W. et al., montrent que des prises intermittentes Le domaine d'action de TRT-5 est principa-
Successful start of a
preparatory HIV cohort « encadrant » l'exposition au VIH pourraient lement construit à partir d'une expérience
study among men who être efficaces. Enfin, la stratégie de PrEP conti- centrée sur les essais cliniques qui concer-
have sex with men
(MSM) in Bangkok, nue implique un certain nombre de contraintes nent des séropositifs. Notre collectif est,
Thailand : preliminary ou d'inconvénients, comme la tolérance du dans ce cadre, le principal interlocuteur
baseline, follow-up and
HIV incidence data, XVII
traitement, l'observance ou encore le coût, sus- associatif de l'ANRS. C'est vers lui que Jean-
International AIDS ceptibles de la rendre inutilisable en pratique. Michel Molina s'est tourné pour travailler sur
Conference, 3-8 août ce projet d'essai, du fait de :
2008, Mexico City
abstract MOACO 105 Le protocole de cette recherche prévoit de Q sa compétence en matière d'utilisation des
b. F. Van Griensen, Sex s'adresser à des hommes homosexuels adul- traitements antirétroviraux et d'élaboration
predictability, sex spac-
ing and the feasibility of tes, séronégatifs pour le VIH-1, exposés au de projets de recherche ;
intermittent pre-expo- risque d'infection du fait de pratiques sexuelles, Q l'intérêt de certaines de ses associations
sure chemoprophylaxie
(iPrEP) to prevent HIV
et ayant une activité sexuelle planifiée concen- membres pour la prévention.
infection among men trée sur quelques jours de la semaine.
who have sex with men TRT-5 a accepté la proposition de faire partie
(MSM) in Bangkok,
Thailand, XVII Pour montrer l'efficacité de la stratégie, l'essai du Comité de pilotage de l'essai, ce qui
International AIDS devrait recruter au moins 1 500 participants.10 constitue une expérience inédite.
Conference, 3-8 août
2008, Mexico City,
abstract LPPE 1164
c. Enquête menée en
2009 par l'Inserm et
AIDES auprès d'un
échantillon de 462 HSH
séronégatifs : plus de la Prévention de la transmission sexuelle du VIH chez les gays : où en est-on ?
moitié des personnes
interrogées planifiaient
plusieurs heures à
l'avance leurs rapports En France, alors que le nombre de nouvelles L'étude de nouvelles approches visant à
sexuels, qui étaient le contaminations par le VIH a globalement prévenir la transmission de l'infection par le
plus souvent les samedis diminué sur la période 2003 à 2008, il est VIH semble nécessaire tout en intégrant les
et dimanches ; de même,
plus de 40% étaient resté stable, voire a plutôt augmenté chez stratégies actuelles et leurs limites.
intéressées par la partici- les homosexuels masculins.11 En 2008, ils L'objectif est de renverser la tendance
pation à un essai de
PrEP.
représentaient presque la moitié (48 %) des de l'épidémie parmi les gays et HSH et de
10. Plusieurs chiffres
nouvelles contaminations. Sur la même donner à chacun plus de moyens pour évi-
seront cités dans ce rap- période, une augmentation du nombre des ter d'être infecté ou de transmettre le virus.
port selon les contextes autres Infections Sexuellement Transmis-
de leur énonciation. A ce
jour, la taille de l'échantil-
sibles (IST) chez les homosexuels témoi- De nouvelles stratégies et de nouveaux
lon n'est pas déterminée. gne de la persistance de comportements outils de prévention, dans une logique
11. Ce qu'on appelle sexuels à risque vis-à-vis du VIH. dite « combinée », existent ou sont actuel-
« l'incidence ». Voir l'esti- L'enquête Prévagay12, menée en 2009 à lement à l'étude : vaccins préventifs,
mation de l'incidence du
VIH en France en 2008 Paris, a montré que près d'un gay/HSH sur microbicides, traitement des personnes
par l'Institut de Veille cinq qui fréquentent les lieux communau- séropositives, traitement antirétroviral en
Sanitaire : taires de convivialité est séropositif au VIH. prophylaxie pré-exposition, stratégies
www.invs.sante.fr/presse
/2009/communiques/inci Ces contaminations surviennent alors que comportementales, en lien avec le préser-
dence_vih191109/inci- le niveau de connaissance des modes de vatif et l'incitation à la connaissance de
dence_vih.pdf
transmission du VIH et de la protection son statut sérologique à travers un dépis-
12. www.invs.sante.fr/
presse/2009/commu-
conférée par le préservatif est haut . tage régulier.
niques/resultats_enquete
_prevagay_171109/resul-
tats_prevagay.pdf Présentation du contexte de la prévention du VIH chez les gays, telle qu'adressée aux participant-e-s à la réunion du 13 février 2010.
8
11. Sur ce projet, comme sur les projets d'essais Pourquoi consulter la communauté gay sur
cliniques sur lesquels il travaille habituelle- ce projet d'essai « PrEP » ?
ment, TRT-5 cherche toujours à faire en sorte
que les recherches menées correspondent L'expérience des essais de prévention a mon-
aux besoins des personnes concernées et tré que l'information et la consultation était
que les intérêts et les droits des participants indispensable à leur élaboration et que sans
soient respectés. l'adhésion des communautés concernées et
des associations issues de ces communautés,
Afin de mener à bien son travail sur ce projet ce type de projet n'était pas réalisable et n'avait
d'essai de prévention, le TRT-5 a souhaité que peu de sens16. Ce projet d'essai, et plus
enrichir son expertise et a mis en place un largement la recherche de nouvelles stratégies
groupe ad hoc « Projet d'essai PrEP » en son préventives, posent nombre de questions sur
sein14, en lançant un appel au volontariat leur pertinence et leur opportunité, leur faisabil-
parmi les participants au 1er Forum interasso- ité, leur éventuelle mise en place ou les modal-
ciatif sur la transmission sexuelle du VIH15. Il ités de communication pour en expliquer les
rassemble des associations de lutte contre le enjeux et limites aux participants potentiels.
VIH/sida impliquées dans la prévention, L'intérêt de tels projets doit être discuté dans la
au-delà des associations membres de TRT-5 communauté gay pour savoir leurs objectifs et
(Action Santé Alternative, Coalition Plus, leur design répondent aux besoins des person-
Keep Smiling, Sidaction, SNEG). nes, tout en étant respectueux de leurs droits.
Ce groupe ad hoc s'est mis en place en juillet Afin que les besoins et intérêts des gays con-
2009 dans le but de poursuivre deux objectifs : cernés par ce projet d'essai soient représentés
Q faire valoir les intérêts, et les besoins et au mieux au sein de son Comité de pilotage,
défendre les droits des personnes concernées TRT-5 a élargi la composition de son groupe ad
par ce projet d'essai auprès des chercheurs ; hoc PrEP à des organisations gays et LGBT17.
Q organiser une consultation de la commu- C'est au sein de ce groupe ad hoc qu'est née
nauté gay sur le projet, sans a priori sur la l'idée de proposer l'organisation d'une consul-
pertinence de celui-ci. tation communautaire sur l'essai. G
Le travail du TRT-5 sur la recherche thérapeutique
Cinq associations (Act Up-Paris, Actions Le rôle des associations dans la recherche
Traitements, AIDES, ARCAT Sida, Vaincre clinique consiste ainsi en un travail de relais 14. Pour plus d'informa-
tions sur les groupes ad
le Sida) ont créé le groupe interassociatif vis-à-vis des personnes atteintes et en hoc ou thématiques de
TRT-5 en 1992 pour travailler en commun l'exercice d'une vigilance éthique perma- TRT-5, voir www.trt-
sur la recherche thérapeutique, dans un nente, sur le design des essais et les docu- 5.org/article125.html
contexte d'urgence médicale faute de trai- ments d'information et de consentement. 15. Voir l'encadré page 11.
tements suffisamment efficaces. 16. a. Considérations
Qu'attendons-nous de la recherche clini- éthiques relatives aux
essais de méthodes bio-
Pourquoi travailler sur la recherche ? Pour que ? Des avancées scientifiquement médicales de prévention
répondre aux questions des personnes validées qui aboutissent à une meilleure biomédicale. Documen-
vivant avec le VIH, pour y intégrer leurs tation d'orientation
prise en charge, mais pas à d'importe quel
ONUSIDA/OMS, ONUSI-
préoccupations et leurs besoins, et pour prix. Ainsi, la recherche doit être respec- DA/OMS, avril 2008 ;
favoriser une décision plus éclairée sur tueuse de l'éthique, c'est-à-dire qu'elle doit b. Guide des bonnes pra-
leur participation aux essais cliniques. tiques de participation
protéger les droits et l'intérêt des person- aux essais de méthodes
nes ; pour ce faire, la transparence est un biomédicales de préven-
Les essais cliniques ont été initialement, principe incontournable. La recherche doit tion du VIH.
dans le VIH/sida, le seul moyen d'accès aux avoir pour but ultime la mise en œuvre
ONUSIDA/AVAC, juin
2008 (nouvelle édition à
innovations thérapeutiques, dans un contexte d'une prise en charge optimale ; ce qui ne paraître prochainement).
où la distinction entre recherche et soin ne remet pas en cause la nécessité et l'auto- 17. La Fédération LGBT
pouvait pas être tranchée. Aujourd'hui, ces nomie de la recherche fondamentale. a effectivement été
essais demeurent le moyen de bénéficier représentée, là où la par-
ticipation du Centre LGBT
d'une prise en charge médicale innovante. Paris Île-de-France et de
l'Inter-LGBT n'a pas pu
se concrétiser.
9
12. Schéma du processus de consultation com-
munautaire élaboré, partant du promoteur
de l'essai et allant jusqu'aux personnes
composant la communauté des hommes
ayant des rapports sexuels avec d'autres
hommes. Ce schéma prévoyait d'élargir pro-
gressivement le cercle des personnes
impliquées dans la consultation jusqu'aux
personnes concernées par le projet de
recherche.
Évolution du contexte depuis la tenue de la consultation communautaire
Données scientifiques sur les PrEP18 sexuels des participants. Par ailleurs, ont
été également rapportés les résultats
Depuis l'été 2010, les résultats de deux d'une étude sponsorisée par les Centers
essais d'efficacité de PrEP ont été publiés. for Disease Control and Prevention (CDC)
L'essai CAPRISA 00419, qui évaluait en aux Etats-Unis qui a inclus 400 homo-
Afrique du Sud l'efficacité et la tolérance sexuels masculins23. Cette étude randomi-
d'un gel vaginal de tenofovir, a apporté pour sée contre placebo avait principalement
la première fois la démonstration de l'effica- pour but d'évaluer la tolérance d'une PrEP
cité de cette stratégie de PrEP. En effet, par tenofovir pris chaque jour. Au cours des
18. Pour plus de l'utilisation du gel de tenofovir appliqué dans deux années de cette étude, la tolérance
références, voir le
numéro spécial de la les 12 heures avant les rapports sexuels clinique et biologique du médicament s'est
revue Transcriptases avec une seconde dose appliquée dans les révélée tout à fait identique à celle du pla-
consacrée à la con- 12 heures après les rapports, a permis de cebo, en particulier en ce qui concerne la
férence internationale sur
le VIH/sida de Vienne : réduire de 39 % l'incidence de l'infection fonction rénale et hépatique.
www.vih.org/2010 par le VIH dans le groupe tenofovir par
1206/prophylaxie-pre-
exposition-vers-essais-
rapport au groupe placebo. L'efficacité du L'essai de PrEP au sein de l'ANRS
grande-ampleur-19871 gel de ténofovir était d'autant meilleure que
19. Abdool Karim Q, l'observance était élevée. Au cours de cette Le projet d'essai a été évalué par les instan-
Abdool Karim SS, étude, il a été observé une diminution du ces scientifiques de l'Agence, qui ont
Forhlich J, et al.
Effectiveness and safety
nombre de rapports sexuels et une aug- approuvé son financement par l'ANRS. Le
of tenofovir gel, an anti- mentation de l'utilisation du préservatif 23 novembre 2010, jour de la publication
retroviral microbicide, for dans les deux bras. L'essai iPrEx20, quant à des premiers résultats de l'essai iPrEx, le
the prevention of HIV-
infection in women. lui, a montré une réduction de 43.8 % du Directeur de l'ANRS a annoncé que la
Science 2010, 329:1168- risque d'acquisition du VIH chez des HSH phase pilote de l'essai débutera en 2011.
74. qui prenaient chaque jour par voie orale la Elle visera à recruter 500 personnes dans
20. Voir www.globali combinaison tenofovir-emtricitabine21 ou un trois villes (Paris, Lyon, Montréal) et aura
prex.com et
www.nejm.org/doi/full/10. placebo. Sponsorisée par le NIAID22, la Bill pour objectif de vérifier la faisabilité de
1056/NEJMoa1011205 et Melinda Gates Foundation et l'Université l'essai. Actuellement, l'ANRS ne dispose
21. Commercialisée de Californie, l'étude a été menée auprès pas des ressources financières nécessaires
sous le nom de
Truvada®.
de 2499 hommes dans six pays (Brésil, au financement de la phase définitive de
22. National Institute of
Equateur, Pérou, Afrique du Sud, l'essai. Celui-ci pourrait également être
Allergy and Infectious Thaïlande et Etats-Unis). Il a également mené en Suisse. L'Agence va engager dès
Diseases, équivalent été mis en évidence que la prise quotidien- le début de l'année 2011 un processus
états-unien de l'ANRS.
ne de la PrEP ne s'était pas accompagnée d'information des acteurs potentiellement
23. Voir www.cdc.gov/hiv/
prep/resources/fact-
d'une modification des comportements concernés par l'essai.
sheets/extended_PrEB-
safety-trial.htm
10
13. PROCESSUS DE MISE EN PLACE
DE LA CONSULTATION COMMUNAUTAIRE
Plusieurs espaces d'information et d'échan- Elle s'est déroulée en trois temps :
ges sur le projet d’essai ont été ouverts, dans Q un temps de présentation de TRT-5 et du
un but d'appropriation des enjeux de la groupe ad hoc PrEP, d'information sur la
recherche en prévention, en particulier celle recherche PrEP et le projet d'essai, de
menée sur la prophylaxie pré-exposition. Il présentation du projet de consultation com-
s'agissait de faire émerger une parole com- munautaire2 ;
munautaire sur ce projet d'essai, dans le but Q un temps d'appropriation et d'échange sur la
de la faire remonter auprès de l'investigateur recherche PrEP et le projet français, organisé
de l'essai, de son Comité de pilotage et de en quatre groupes assurant une répartition
l'ANRS, son promoteur. homogène des différents représentants entre
les groupes (association d'appartenance,
La première étape du processus a consisté régions géographiques) ;
en l'organisation d'une rencontre nationale Q un temps de restitution des groupes et de
réunissant des représentants d'associations discussion sur la consultation communautaire.
de lutte contre le VIH/sida ainsi que d'associa-
tions et de médias gays/LGBT. La liste des Si l'objectif était d'informer et d'échanger
organisations invitées avait été élaborée par le sur le projet et les enjeux de la recherche en
groupe ad hoc PrEP, afin d'inclure un repré- prévention, il s'agissait également de propo-
sentant de chacun des groupes d'acteurs ser aux associations d'être les organisatrices
potentiellement intéressés (associations de de réunions locales de consultation sur
lutte contre le VIH/sida, associations gays/ l'essai, qui se dérouleraient dans quelques
LGBT, médias gays) issus des principales grandes villes françaises dans les mois
villes de France. Ces acteurs ont été identifiés suivants. Ces réunions devaient permettre
sur la base de la connaissance du tissu asso- de rassembler les premiers concernés par
ciatif local des membres du groupe ad hoc. La l'essai (des gays/HSH séronégatifs) afin de
rencontre s'est tenue le 13 février 2010 à recueillir leur parole.
Paris, et a réuni 37 représentants issus de 14
régions1 de France, dont la moitié investis A la suite de cette rencontre, un guide
dans la lutte contre le VIH/sida et deux tiers méthodologique3 a été élaboré par le groupe
extérieurs à l'Île-de-France. ad hoc PrEP de TRT-5, afin de soutenir les
Forum sur la transmission du VIH : 1ère information sur le projet d’essai
Les 27 et 28 mars 2009, TRT-5 a organisé, à liées à la prévention. L'événement a
Paris, le 1er Forum interassociatif sur la rassemblé près d'une centaine de partici-
transmission sexuelle du VIH, rencontre pants issus de 24 villes de France métro- 1. Alsace, Aquitaine,
d'information et de formation destinée à politaine et de deux départements Bourgogne, Bretagne,
des acteurs associatifs de la lutte contre le d'Outre-mer, représentant 38 associa- Centre, Île-de-France,
Languedoc-Roussillon,
VIH/sida, avec le soutien de la Direction tions. Le Forum a été l'occasion pour Lorraine, Midi-Pyrénées,
Générale de la Santé et de l'ANRS. Jean-Michel Molina de présenter la Nord Pas-de-Calais,
L'objectif était de proposer un cadre réflexion qui venait de débuter sur l’essai Normandie, Provence
Alpes Côte d'azur, Pays
d'appropriation des enjeux de la recherche et les premiers éléments du projet. A cette de la Loire, Rhône-Alpes.
en prévention, dans le but de soutenir le date, TRT-5 n'avait pas été sollicité pour 2. L'ensemble des
renforcement de leurs capacités et de leur participer au Comité de pilotage de l'essai, documents présentés
lors de la réunion est
connaissance dans le domaine des ques- mais a proposé un premier recueil de disponible à l'adresse :
tions scientifiques et méthodologiques questions sur le projet. www.trt-5.org/arti-
cle257.html
3. Voir annexe 5, page 49.
11
14. représentants associatifs qui avaient sou- leur apporter conseil et appui technique. Un
haité engager un processus de consultation ou plusieurs membres du groupe ont parti-
dans leurs territoires d'action respectifs. cipé à chacune des rencontres locales.
Cet outil avait pour objectif de proposer aux
organisations impliquées un cadre de Le groupe s'est en particulier attaché à :
déroulement des réunions de la consulta- Q définir et garantir la mise en œuvre du
tion et de les guider dans la planification, cadre de déroulement des rencontres (pro-
l'animation ainsi que le recueil et la capita- duction d'un guide méthodologique, fourni-
lisation des échanges. Il était important, ture de supports visuels et de références
pour la qualité de l'analyse du processus et bibliographiques, conseil en matière de
du contenu de la consultation, que le cadre stratégie de communication, élaboration de
de déroulement des rencontres locales soit la méthodologie de recueil de données) ;
relativement homogène. Q mobiliser les responsables associatifs et
communautaires, à travers un lien avec le
Néanmoins, une part importante a été lais- tissu associatif local et/ou les commu-
sée à l'appréciation des organisateurs nautés gays/LGBT en région ;
locaux quant aux lieux, à la durée et à la Q assurer la présence aux réunions locales
forme des réunions de consultation, ainsi du plus grand nombre possible de ses
qu'en matière de diffusion de l'information membres ;
sur leur tenue, de mise en place d'espace Q collecter les données, les analyser, les
de convivialité ou de temps de préparation. synthétiser et en restituer le contenu.
A la demande d'acteurs locaux qui souhai- Le groupe interassociatif TRT-5 a assuré le
taient disposer d'un outil de communication pilotage global du processus. La coordination
destinée à faire connaître l'organisation de TRT-5 a, quant à elle, assuré l'animation
d'une réunion sur l'essai, un visuel a été et la coordination du groupe ad hoc, et fourni
réalisé par TRT-5 ; il a servi de support à la un soutien logistique et matériel aux organi-
réalisation d'une affiche et de flyers4. sateurs locaux. L'ANRS a attribué à TRT-5,
à sa demande, une enveloppe budgétaire
Le groupe ad hoc PrEP de TRT-5 s'est tenu à spécifique, qui lui a permis de coordonner
4. Voir en annexe. la disposition des organisateurs locaux, pour la mise en place de cette consultation. G
12
15. DÉROULEMENT DE LA CONSULTATION COMMUNAUTAIRE
Des associations de lutte contre le VIH/sida la PrEP. Trois espaces de consultation par
et identitaires gays/LGBT ont pris en main ce média ont été intégrés à l'analyse quali-
l'organisation de rencontres locales, qui ont tative :
eu lieu dans les villes de Bordeaux, Lille, Q les échanges, anonymisés, tenus sur une
Lyon, Marseille, Montpellier, Nantes, Nice, liste électronique d'échange interne à une
Paris, Strasbourg et Toulouse. organisation membre du groupe ad hoc ;
Q un temps de discussion en direct (dit
18 espaces de consultation communautaire « chat ») via le site web d'information
mis en place1. gay/LGBT Yagg.com, au cours duquel deux
Du 24 avril au 20 juillet 2010, 12 rencontres représentants de TRT-5 ont répondu aux
de consultation décentralisées se sont questions des internautes durant une
déroulées dans ces villes. Lors de chacune heure, et dont l'annonce a fait l'objet de très
d'entre elles, 1 à 3 membres du groupe ad nombreux commentaires ;
hoc PrEP étaient présents pour diffuser de Q un forum du site du magazine gay Têtu,
l'information sur la recherche menée sur la ouvert autour de l'annonce de la consulta-
PrEP et le projet d'essai et participer à tion communautaire.
l'animation des échanges.
Contrairement aux participants des réunions
10 rencontres se sont déroulées sous une de consultation communautaires, les inter-
forme « plénière », dans laquelle la présenta- nautes des sites publics (Yagg et Têtu) n'ont
tion principale était suivie d'un temps d'échan- pas disposé de la même information
ge unique avec l'ensemble des participants. concernant la PrEP et le projet d'essai, celle
5 ont pris la forme d'une session plénière sui- dispensée en première partie des réunions.
vie d'ateliers d'appropriation des enjeux, dans Cependant, ils ont bénéficié des informations
lesquels les participants étaient repartis en dispensées par les sites eux-mêmes ou des
groupe de 10 à 15 personnes, pour permettre réponses à leurs questions dans le cas du
de faciliter la prise de parole individuelle chat. L'analyse des interventions dans les
(11 groupes d'appropriation ont eu lieu). espaces de libre commentaire des internau-
tes laisse apparaître la place prépondérante
A l'occasion d'une rencontre de ses délégués prise dans les échanges par certains protago-
régionaux, l'Association SIS a organisé, le 30 nistes – 3 internautes représentent la moitié
mars, une réunion sur le principe de la des échanges – ce qui n'est pas le cas du chat
consultation communautaire. Elle s'est puisqu'il s'agit d'un système de questions-
déroulée en présence de deux membres du réponses modérées par un animateur. Cette
groupe ad hoc PrEP, qui ont assuré la pré- analyse fait aussi apparaître le glissement du
sentation des informations sur la PrEP et sur sujet de la discussion quand celle-ci n'est pas
le projet en discussion, ainsi que le recueil modérée (Têtu) tandis que le rappel du sujet
des interventions des participants. recadre les interventions (Yagg). Comparati-
vement, les échanges du chat, plus formels et
En marge de la consultation communautaire ne permettant pas la discussion, sont plus
coordonnée par TRT-5, d'autres initiatives de informatifs que de discussion.
présentation publique et de discussion du
projet ont été prises. A titre d'exemple, on Le recueil de la parole des personnes était 1. Les données présen-
peut citer la Réunion Publique d'Information l'un des objectifs centraux des consulta- tées, tant quantitatives
que dans la synthèse
(RéPI) consacrée à la présentation de l'essai, tions communautaires et la capitalisation a des échanges, compren-
organisée par Act Up-Paris le 16 décembre donc été pensée et organisée en amont des nent celles portant sur la
2009 à Paris. rencontres. Chacune des rencontres a fait rencontre du 13 février,
dans la mesure où elle a
l'objet d'une prise de note rigoureuse sur le donné lieu à de premiers
En outre, environ 70 personnes se sont expri- temps d'échanges et de discussion. Dans échanges sur l'essai, de
la même nature que
mées par le biais d'Internet, notamment à certains cas, les échanges ont pu être enre- ceux tenus lors des
l'occasion de temps de discussion dédiés à gistrés, avec l'accord des participants ; ils réunions de consultation.
13
16. Ville Durée Débat/
Date Organisateurs Lieu groupe Nbre
Local 3h00
13 fév. Paris TRT-5 5h30 4x1h30 37
associatif
Association SIS Local
30 mars Paris 1h35 0h50 10
(réunion interne) associatif
Commission Santé de la Domicile parti- 0h45 32
24 avril Lyon 4h00 (asso-
Lesbian and Gay Pride culier (jardin) 3x1h30 ciatifs)
Local
18 mai Lille AIDES 2h30 1h30 17
associatif
Local 28
31 mai Toulouse AIDES, SNEG, AJMS 3h00 2h00 (asso-
associatif ciatifs)
Commission Santé de la Salle 22
11 juin Lyon 3h00 2h00 (assoc.
Lesbian and Gay Pride municipale ou pas)
Salle 26
12 juin Toulouse AIDES, SNEG, AJMS 3h00 2h00 (assoc.
municipale ou pas)
AIDES, Association SIS, SNEG, Médiathèque
14 juin Nantes 3h00 1h15 25
Centre LGBT
Association SIS, Sidaction,
16 juin Paris Centre LGBT 3h00 1h25 20
SNEG, TRT-5
Action Santé Alternative, AIDES, Salle
19 juin Nice 3h30 2h00 20
SNEG, Association SIS municipale
Montpellier AIDES, SNEG Local 0h45
23 juin 3h30 33
associatif 2x0h45
23 juin Bordeaux AIDES Centre LGBT 2h30 1h30 12
4 juillet Strasbourg Association SIS, SNEG, Hôpital 4h00 1h30 27
COREVIH Alsace 2x1h00
Universités d’Été
20 juillet Marseille Keep Smiling, AIDES Euroméd. des 2h15 1h30 19
Homosexualités
Tableau 1. Caractéristiques des réunions de la consultation communautaire.
Date Media Internautes Messages Concentration des
messages
Yagg.com
7 mai - 12 mai 20 157 50% / 3 pers.
annonce du chat
Yagg.com
12 mai 30* 82 75% / 10 pers.
chat
15 juin - 17 juin Tetu.com 18 68 46% / 3 pers.
* 5 pseudonymes sont identiques à ceux des commentaires de l'annonce du chat.
Tableau 2. Caractéristiques des actions menées sur le web.
14
17. n'ont pas été retranscrits à ce jour et n'ont aux consultations. 20 personnes3 ont échangé
pas servi à la rédaction de ce rapport. Un des messages suite à l'annonce du chat de
compte-rendu a également été systématique- yagg.com, 30 personnes4 sont identifiées
ment rédigé par les membres du groupe ad comme ayant participé à celui-ci, dont 5
hoc qui avaient participé aux réunions. avaient déjà commenté l'annonce (leurs
L'objectif de ce document était davantage identifiants – « pseudos » – sont identiques).
d'apporter des précisions sur les conditions 18 personnes sont intervenues sur le forum
d'organisations de la consultation (organisa- de Têtu et 14 personnes sur la liste de diffusion
tions impliquées, travail en collaboration interne déjà mentionnée.
entre les structures, stratégies de mobilisa-
tion…), le profil des participants et leur Le public présent lors des rencontres de
ressenti des échanges. Pour croiser l'infor- consultation est composé pour moitié de
mation et les points de vue, un compte-rendu personnes directement impliquées dans la
aux objectifs similaires, mais élaboré du point lutte contre le VIH/sida (associations, insti-
de vue des organisateurs, a été produit suite à tutionnels, soignants et journalistes) et
un entretien téléphonique avec le principal pour moitié de personnes plutôt issues des
organisateur de la consultation sur la base communautés gays/LGBT (associations
d'une grille à questions ouvertes2. identitaires gays/LGBT, personnes se défi-
nissant comme gays et journalistes).
Pour chacune des rencontres, ces trois types
de documents ont servi de base à une analyse Parmi les participants dont l'appartenance est
thématique de contenu dont les résultats connue ou identifiable (n=215), 47 % déclarent
sont proposés dans le présent rapport. De participer aux réunions en tant que membre
plus, quelques informations sur le profil des d'une association issue de la lutte contre le
participants aux consultations ont systémati- VIH/sida, 21 % en tant que membre d'une asso-
quement été recueillies au début des consul- ciation identitaire gay/LGBT, 19 % des commu-
tations (appartenance à une organisation de nautés gays/LGBT5 elles-mêmes. 4 % sont des
lutte contre le VIH/sida ou gay/LGBT, façon journalistes issus de médias gays/LGBT ou de
dont l'information sur la consultation com- santé, 4 % sont des soignants, 3 % des institu-
munautaire a été obtenue). tionnels. 4 % ne se déclarent pas comme
appartenant à l'une de ces catégories. Ces
Le public chiffres fournissent quelques informations,
mais échouent à rendre compte de la multi-
Bien que tous les organisateurs aient mis en appartenance de nombreux participants (à la
place un système de recueil d'informations, fois engagés dans la lutte contre le VIH/sida,
les données collectées sur le profil des parti- membres d'associations gays/LGBT mais
cipants aux réunions proviennent de sources s'exprimant aussi lors des consultations par-
variables (retour direct des organisateurs, fois à titre simplement individuel sur leurs
questionnaires de satisfaction, listes d'émar- propres besoins de prévention). 2. Les sujets abordés
gement…). Ces différences ne permettent pas lors de cet entretien
téléphonique sont men-
d'estimer le nombre de personnes qui se L'affiliation des 63 personnes ayant exprimé tionnés dans le guide de
seraient déplacées plusieurs fois dans les un avis par le biais du forum internet et du la consultation commu-
nautaire (annexe 5,
deux villes où deux réunions ont eu lieu, ni de chat n'est que très rarement déclarée : 2 se page 49).
savoir dans quelle mesure les personnes disent non membres d'une association, 1 3. Dont deux animateurs
impliquées dans l'animation des débats (et ne membre d'une association de lutte contre le de yagg.com et les deux
membres de TRT-5 par-
devant théoriquement pas exprimer un avis) VIH/sida, 2 se déclarent séropositives. ticipant au chat.
ont été comptabilisées. Au-delà de données 4. Dont un modérateur
quantitatives sur les participants, le groupe ad L'organisation et la mobilisation autour du de yagg.com et les deux
membres de TRT-5
hoc a collecté auprès de chaque organisation, projet participant au chat.
en marge et après les réunions, des éléments 5. Sont comptés comme
relatifs à l'organisation et à la mobilisation La majeure partie (8) des réunions de consul- issus des communautés
les participants
lors du processus de consultation, ainsi qu'à tation a eu lieu dans des locaux associatifs et déclarant être « venu à
la satisfaction des participants et à l'apprécia- une proportion plus grande (11) a été précé- titre personnel », les
tion des organisateurs. dée et/ou suivie d'un moment de convivialité. représentants d'établis-
sements commerciaux
gays et ceux qui
Les contributions de 410 participants sont inté- Les consultations communautaires étaient se définissent comme
communautaires non-
grées à l'analyse. 328 personnes sont réperto- organisées en deux étapes : un temps affiliés à une structure
riées comme ayant participé physiquement d'information sur le projet, suivi d'un temps associative.
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18. d'échanges et de discussion permettant de L'appréciation de la participation aux
recueillir les avis et les questionnements échanges
des participants sur le projet et la stratégie
de PrEP de manière plus globale. En fonc- Les commentaires recueillis par les organi-
tion des lieux, un temps d'appropriation du sateurs qui avaient proposé aux participants
projet et de discussion en petits groupes a de remplir un questionnaire d'évaluation6
pu être organisé. expriment majoritairement que ces rencon-
tres ont été des espaces de discussion et
La plupart (9) des réunions de consultations d'échanges libres et qu'elles constituent une
a été mise sur pied par des collectifs inter- action novatrice. Ils encouragent à la pour-
associatifs, le plus souvent composés suite et au renouvellement de ce type de
d'associations oeuvrant dans le champ du démarche.
VIH/sida et de la santé sexuelle.
Les présentations des intervenants de TRT-5
La difficulté à faire participer les associa- et des organisateurs sont jugées claires, un
tions identitaires gays/LGBT a été rapportée peu longues par certains ou trop précises
dans la plupart des régions ; elle semble pour d'autres, mais globalement appréciées.
principalement corrélée au peu de temps Elles permettent une nécessaire « mise à
disponible pour mobiliser ces derniers au niveau des connaissances », qui permet
sujet de questions relatives à la lutte contre d'engager le dialogue par la suite.
le VIH/sida et à la santé sexuelle et/ou à une
insuffisance de diffusion de l'information sur Les groupes d'appropriation sont particulière-
la mise en place des réunions de consulta- ment appréciés comme favorisant l'expression
tion. On peut également faire l'hypothèse de tous. De même que le système de questions
que cette difficulté soit liée à l'intérêt sou- « post it » mis en place à certains endroits, qui
vent relatif que peuvent manifester ces permet aux participants de poser leurs ques-
associations pour les sujets de prévention tions sur des morceaux de papier sans devoir
du VIH/sida. prendre la parole en public.
Des difficultés dans le travail interassociatif Cependant, une difficulté à s'exprimer, dans
sont rapportées dans le récit de l'organisa- le cadre de relations interassociatives ou
tion de près d'un tiers des rencontres. Cette interprofessionnelles, sur ce sujet nouveau
situation semble avoir eu un impact sur la est rapportée, de même que la crainte des
participation d'acteurs du champ de la organisateurs d'être identifiés, en tant
santé à certaines rencontres, et ainsi sur la qu'acteurs de la mobilisation autour de
diversité des opinions et avis exprimés. l'essai, comme des acteurs de recrutement
pour l'essai. Il semble qu'une part assez
Plusieurs organisateurs font également importante des participants potentiels, qui
part de la difficulté à mobiliser les gays non avaient un avis plutôt défavorable sur les
affiliés à une structure associative, alors stratégies de réduction des risques sexuels
même que des campagnes d'affichage ont se soit abstenue de participer à ces échan-
été menées dans la communauté. Ils ges, ou de s'y exprimer. Cela soulève la
rapportent une difficulté à comprendre le question de la difficulté ressentie par une
message de l'affiche et/ou à l'interpréter, proportion importante des acteurs associa-
qui a pu participer à une moindre motivation tifs français de la lutte contre le VIH/sida à
du public des gays/HSH à se déplacer, adopter une posture de discussion sur des
l'accroche ayant pu être jugée trop « médi- stratégies de prévention partielle. G
calisée ». Il est également rapporté, par les
organisateurs des réunions de plusieurs
sites, que la distribution des invitations
dans des lieux de communautaires de
convivialité a été accueillie froidement par
des personnes se déclarant défavorables au
projet, et qui disaient ne pas souhaiter par-
ticiper à la consultation, tandis que l'accueil
6. Ce ne fut le cas
que pour deux des était plus favorable de la part de ceux qui se
rencontres. disaient intéressés par l'idée.
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19. SYNTHÈSE DES RENCONTRES DE CONSULTATION
Prévention en milieu gay et prophylaxie un autre suppose que la banalisation serait
pré-exposition utile « à l'entourage ») : on « vit avec » le
VIH, et le nombre de décès est perçu
Quelques points d'ordre généraux peuvent comme faible. Mais la peur reste associée
être retenus : un participant énonce que « le à la maladie, sinon à l'infection. A ce sujet,
sida est toujours là », qu'on « en a toujours un participant souligne que l'absence de
peur », un autre que « le sida ne se guérit vigilance quant aux modes de communica-
toujours pas ». Mais on entend aussi que tion sur la prévalence et l'incidence du VIH
« le sida est devenu une maladie chro- en population gay peut se révéler très dis-
nique », que l'on peut « vivre avec ». En criminante ou stigmatisante.
matière de prévention, la disponibilité des
préservatifs, notamment dans les lieux de Parallèlement, la vie sexuelle est perçue
rencontres sexuelles, est un élément comme plus intense et les prises de risque
souligné : elle relève, dit un participant, de fait plus nombreuses : une « demande
d'un important travail, elle est considérée de liberté », une faible acceptation des
comme un progrès considérable. Cela dit, interdictions, mais aussi un problème de
un autre exprime cette réserve : « la perception des risques sont associés à
prévention classique ne fonctionne plus » l'augmentation des comportements non
– deux citent des études françaises ou protégés. La situation est décrite de
américaines concluant sur l'augmentation manière contrastée selon un axe Île-de-
des rapports anaux sans préservatifs ou sur France / province : à Paris, la sexualité est
le moindre usage de préservatifs, et perçue comme très « accessible » quand en
plusieurs s'accordent sur l'augmentation province, elle est décrite comme relevant
des prises de risque. Au-delà de ce senti- d'une planification plus établie, du fait d'une
ment d'échec, deux types d'idées sont moindre densité de population. Quoi qu'il en
exprimées : celle de « relancer la préven- soit, le refus du préservatif est souligné
tion », y compris par un engagement comme un élément présent dans les con-
financier plus important, et celle d'un « tour- textes sexuels : un participant parle du
nant de la prévention », ou, à tout le moins, « blocage » de certains gays par rapport au
d'une évolution de cette dernière : « La préservatif, un autre dit que « on peut se
capote ne suffit plus, il faut d'autres faire jeter, dans certaines soirées, quand on
moyens » ; « La prévention est en constante propose un préservatif ».
évolution » ; « Il est important d'élargir
l'assiette des possibles en matière de réduc- Deux hypothèses pour l'avenir de la
tion des risques sexuels ». Plusieurs fois prévention sont ainsi avancées : l'utilité de
citée, la réduction des risques n'est jamais la relancer à travers la promotion et
étayée, ses composantes ou stratégies l'accroissement de la disponibilité des
jamais citées. Elle est associée à la person- préservatifs, ou la reconnaissance d'un
nalisation des stratégies, au « calcul du échec de ce mode exclusif de prévention et
risque », plus qu'à son élimination. la nécessité d'envisager « autre chose » et
d'investir dans la recherche pour élaborer
Le changement de perception du VIH/sida, des stratégies plus efficaces. Entendue de
du « danger », dit l'un des participants, asso- manière moins clivée, la prévention est
cié à l'infection, est entendu comme l'origine aussi déclinée selon différents outils :
d'un moindre usage des préservatifs. A ce préservatifs, dépistage, traitement. Un
sujet, des propos parfois contradictoires peu- participant précise qu'il entend la PrEP
vent être tenus. Entendu comme maladie comme « outil complémentaire à ce qui
chronique, le « sida » apparaît comme existe déjà », un autre souligne la complé-
« dédramatisé », mais non « banalisé » (l'un mentarité de l'outil au regard de l'existant,
dit : « la seule banalisation à faire est celle du un autre le présente comme « solution
préservatif, pas celle de la maladie », quand alternative » pour les « gays qui prennent
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