Présentation dans le cadre du forum de la SFSHP durant les JDP 2014.
Une des présentations portait sur la représentation du vampirisme et la lycanthropie au cinema ainsi que les possibles explications médicales à la lueur des connaissances passées et actuelles, qui ont possiblement influencés ces mythes.
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2. Le vampire
• Créature folklorique, qui
suivant différents folklores et
selon la superstition la plus
courante, se nourrit du sang
des vivants afin d’en tirer sa
force vitale
• La croyance est ancienne et
ubiquitaire
• Europe centrale (début du
XVIIIème siècle) +++
• Revue des causes médicales qui
ont pu influencer les croyances
des vampires et les hystéries
collectives
Albert Penot, 1890
3.
4. Le vampirisme européen
• En 1061, selon l’évêque de Cahors, le
corps d’un chevalier mort excommunié
et enterré sans cérémonie, retrouvé à
cinq reprises hors de sa tombe (Collin
de Plancy Dictionnaire infernal, 1818)
• Cas d’empalements et de crémations de
cadavres suspects de vampirisme (De
magis Curialum, Walter Map, 1193 ;
l’Historia Regis Anglicarum, William de
Newburgh, 1196)
• XIVè siècle: épidémies de peste en
Europe de l’Est
5. Le vampirisme européen
• Découverte du squelette d’une femme
parmi les corps de victimes de la peste
de 1576, à Venise
– Considérée comme un « vampire »
– Brique coincée volontairement entre ses
mâchoires, censée l’empêcher de sucer le
sang de ses victime
• XVIIIe siècle: siècle d’or du vampirisme
• 22 traités et articles de « vampirologie »
en 1735
• Scepticisme médicale et philosophique
(Voltaire...)
• Littérature romantique du XIXe +++
– John Polidori; Bram Stocker
Nuzzolese E, et al. Forensic approach to an archaeo-logical casework of ‘‘vampire’’ skeletal remains in Venice:odontological and anthropological prospectus. J
Forensic Sci 2010;55:1634—7.
6.
7. Le portrait-type du vampirisme
• Homme, originaire d’une zone rurale pauvre et reculée
• Exerce son activité principalement la nuit, mais il peut aussi
apparaître de jour.
• Il se nourrit du sang des vivants afin d’en extraire une force vitale.
• Capacité de se transformer en animal (chien, chat, loup. . .) ou de
devenir invisible
• Repos dans un tombeau
– Conservation de l’apparence externe et de retard de putréfaction
• Pulsions sexuelles
• Une personne peut devenir un vampire de différentes facons,
– si elle est attaquée par un vampire,
– si elle consomme de la chair d’un animal tué par un vampire ou si elle
décède de la peste, de la rage ou d’une autre épidémie.
– Un cadavre peut devenir un vampire lorsqu’il voit son reflet dans un miroir
ou si un chien, un chat ou une chauve-souris marche sur le corps avant
l’inhumation
• Pieu dans le coeur, Crucifix, ail, lumière
8. Les vampires et les cimetières
• Mendiants dans les cimetières et les caveaux
• Exhumations de corps
– Chien, loups; corps mal enterrés
• Inhumation précoce
• Ignorance du cycle de decomposition du
corps après la mort
– Adipocire (« graisse des cimetières »)
– Saponification
– maintient l’apparence du corps
– Environment + sujets
corpulents
– Connu depuis le XVIIè siècle
– Se développe parfois en qq jours
– Odeur d’amoniaque sur l’adipocire fraiche
(détection par les chiens)
Wiertz A. L'inhumation précipitée (1854)
C. Lee (1958)
9. La rage
• Liens évoqués dès la 1ère partie du XVIIIe siècle
– épidémies en Hongrie
• Comportements vampiriques
– atteinte rabique du système limbique
• Perte d’appétit, fatigue, anxiété, troubles du sommeil, inversion du cycle
nycthéméral,
• Hypersensibilité à l’air, à l’eau, incapacité à déglutir, photophobie,
spasmes musculaires à la moindre stimulation (air, eau, bruit, odeur,... à la
vue d’un miroir ?)
• Morsure animale
– douleur au site de la morsure
– cicatrise lentement
• Sexualité
– Morsure contaminante lors des rapports
– Hypersexualité
Gómez-Alonso J. Rabies: a possible explanation for the vampire legend. Neurology 1998;51:856—9.
Heick A. Prince Dracula, rabies, and the vampire legend. Ann Intern Med 1992;117:172—3.
Théodoridès J. Origin of the myth of vampirism. J R Soc Med1998;91:114.
Carmilla (Le Fanu, 1871)
Dracula (F. Coppola, 19..)
10. La rage des chiroptères
• Les chauves-souris sont insectivores ou
frugivores
• Seules quelques rares espèces de
chauves-souris appartenant à la sous-
famille des Desmodontinae sont
hématophages
– Petite taille
– Amérique du Sud (Brésil, Argentine, Chili. . .).
– hématophages par nécessité quand leur
nourriture habituelle vient à manquer durant
les saisons froides.
• Ces animaux lèchent le sang de leur
proie après leur avoir faire une entaille
indolore.
• Urbanisation excessive et insalubrité
expliquent les morsures humaines
exposent alors le sujet à la rage et non à
une exsanguination mortelle 1999
11. La porphyrie
• David Dolphin, biochimiste canadien (1985)
• Porphyrie érythropoïétique congénitale (maladie de Günther)
• Photosensibilité
– comportement d’adaptation et vie nocturne
• Troubles de la dentition (érythrodontie)
– mais pas de développement exagéré des canines
• Maladie mutilante
• Désir insatiable de sang, au point d’ingérer du sang humain,
même au sein de leur propre famille !
• Traitement par saignées
• L’ail pourrait induire la production de porphyrines et donc contribuer à de
possibles crises, expliquant l’aversion pour l’ail des vampires.
• « Vampire disease »
12. ”Historical” scarring porphyria (Hausmann 1923)
Severe cutaneous hepatic porphyria with facial lesions and mutilation of the hands
(Goldberg & Rimington 1962)
Nosferatu, 1922 et 1979
13. La porphyrie
• Mais...
• Les patients porphyriques n’ont aucune compulsion à la
consommation de sang
• La consommation de sang ne corrige en rien leur trouble
métabolique
• La porphyrie érythropoïétique congénitale est extrêmement
rare par rapport à la popularité du mythe.
• Le caractère « bien portant » des vampires s’oppose à l’état
clinique du patient porphyrique
14. La pellagre
• Hypothèse suggérée en 1997
• Pellagre: les « 4 D » : dermatose - diarrhées - démence - décès
• Photosensibilité
• Halitose
• Démence
• Mais
– Diarrhée chronique
– Décès !
Hampl JS, Hampl 3rd WS. Pellagra and the origin of a myth:evidence from European literature and folklore. J R Soc Med 1997;90:636—9.
15. Le vampirisme: une maladie psychiatrique
• Le vampirisme et l’auto-vampirisme sont des phénomènes extrêmement
rares en psychiatrie
• Forme de perversion sexuelle où le déviant assouvit ses pulsions par la
consommation du sang de ses victimes, en les blessant ou en les tuant
(XIXe et début du XXe siècle)
• Intrication de plusieurs troubles : vampirisme, vandalisme de sépultures,
exhumation et mutilation de corps, nécrophilie, sadisme, zoophilie,
cannibalisme et meurtre
• Faits divers +++
Le vampirisme d’après Prins (1985)
• Le vampirisme complet: ingestion de sang, nécrophilie, sadisme, hémolagnie
(envie de sang)
• Le vampirisme sans ingestion de sang: obtenir une satisfaction sexuelle en
touchant ou en ayant des rapports sexuels avec un cadavre
• le vampirisme sans implication de la mort
• l’auto-vampirisme qui comprend les saignements induits ou volontaires avec
ingestion du sang et l’auto-hémofétichisme.
16. La Lycanthropie
• Les loups-garous sont des créatures folkloriques, souvent associées aux vampires, mais
représentées comme des êtres humains ayant la capacité de se transformer en loup,
volontairement ou sous l’emprise d’un sortilège ou d’une malédiction (notamment par la
morsure d’un autre loup-garou), rodant la nuit et attaquant des hommes ou des animaux
à la recherche de chair fraiche.
• La lycanthropie est mentionnée dans la Grèce Antique et dans la Bible.
– le roi Lycaon d’Arcadie transformé en loup par Zeus
– Nabuchodonosor (Daniel 4 ;29-31)
• Le loup-garou est présent dans le folklore européen du Moyen-Age.
• Comme pour le vampirisme, certaines maladies auraient pu influencer ces croyances.
17. Les caractéristiques du loup-garou
• Un trouble des phanères avec une hyperpilosité et/ou un
faciès lupique ou de cyanidés
Lon Chaney Jr dans The Wolfman (1941)
• Une vie nocturne et
l’évitement des rayons du
soleil
• Des troubles des
comportements avec
possible agressions d’autres
individus
• Allergie à l’argent
19. La rage
• Morsure animale
• Anxiété
• Troubles du sommeil et inversion
du cycle nychtéméral
• Spasmes des muscles faciaux
David Naughton dans An american Werewolf in London (1981)
Benicio Del Toro dans The Wolfman (2010)
20. La porphyrie
• Illis (Guy’s hospital de Londres, 1694)
• Dans l’antiquité, différents médecins (Oribase, Marcellus de Sydia, ou Paul d’Egine), décrivaient les
individus affectés par la lycanthropie comme des individus pâles, aux yeux creux, la langue sèche,
sans larmes, errant la nuit dans les cimetières, les jambes marquées de cicatrices dues aux chutes
itératives, et restant reclus chez eux le jour. Le traitement de ces personnes comprenait, entre
autres, des saignées jusqu’à évanouissement.
• Au XVIe siècle,transformations en loup « incomplètes », notamment affectant essentiellement les
mains et les dents (Bodin Jean, de la démonomanie de sorciers, 1580).
• Lancre (1613) rapporte des cas familiaux, avec une prédominance de cas chez les hommes.
• Wolfhesius de l’université de Leipzig (Wolfhesius JF, de Lycanthropis, 1591) décrit un homme
ressemblant à une bête avec de nombreuses cicatrices au visage.
• Boguet, un juge français, qui brulera plus de 600 sorciers et loups-garous au XVIe siècle, décrit les
loups garous comme ayant la peau pâle, de nombreuses excoriations, qu’il attribue aux attaques
contre les humains ou au fait de vivre avec des loups.
• Dans les Antilles néerlandaises, les loups-garous sont décrits notamment comme ayant les lèvres et
les dents rouges.
Illis L. On porphyria and the aetiology of werwolves. Proc R Soc Med. 1964 ;57:23-26.
22. La lycanthropie clinique (« Insania Zoothropica ») et autres
troubles psychiatriques
• Dès le IVe siècle, trouble psychiatrique comme une forme de mélancolie ou de
manie.
• Le délire comprend la métamorphose elle-même ou simplement les
comportements ou des sentiments de transformation sans la transformation
physique
• S’intègre le plus souvent dans un trouble psychiatrique
– trouble bipolaire, troubles affectifs, dépression majeure, schizophrenie...
– Parfois cause organique (drogue, lésion cérébrale, épilepsie...)
• Tableau clinique transitoire et de courte durée
• Comportements (aboiements, grognements, hurlements, rampements),
parfois agressifs
• Le spectre du bestiaire est étendu : animal sauvage (loup, tigre, éléphant,
crocodile, oiseau,...), domestique (chat, chien, gerbil, agneau, vache), reptile
(serpent), insecte (mouche, abeille...)
• La transformation en loup-garou n’est pas stricto sensu de la lycanthropie
clinique
– une créature imaginaire et non un animal « réel »
– Les premiers cas de lycanthropie clinique rapportés concernaient bien des patients pensant se
transformer en loup-garou
Garlipp P, et al. Lycanthropy--psychopathological and psychodynamical aspects. Acta Psychiatr Scand. 2004;109:19-22.
23. La lycanthropie clinique (« Insania Zoothropica »)
• Facteur déclenchant : stress majeur sur la vie du patient +++
– Diagnostic d’une maladie, maladie chez un membre de la famille, rapports et
conflits sexuels.
• Mécanisme de défense psychotique à des conflits internes
inconscients, symbolisé par le choix de l’animal et l’expérience
émotionnelle qui l’accompagne
• Le choix de l’animal est lié au fond culturel ou religieux du patient.
• L’image du loup -garou est cependant maintenu par la littérature,
les séries et les films.
• Selon Khalil et coll, sur 43 cas récents de lycanthropie, seuls 7
avaient attrait au loup.
• Traitement: électroconvulsivothérapie, antidépresseurs ou anti-
psychotiques
Bou Khalil R, et al. Lycanthropy as a culture-bound syndrome: a case report and review of the literature. J Psychiatr Pract. 2012;18:51-4.
Notas del editor
La légende du vampire puise ses origines dans des traditions mythologiques anciennes et diverses, elle se retrouve dans toutes sortes de cultures à travers le monde. Malgré la description de créatures vampiriques dans les civilisations anciennes, le folklore tel que nous le connaissons aujourd’hui provients de l’Europe central du début du XVIIIème siècle
Varie selon les cultures, les époques, et les lieux, ou l’influence des livres et des films.
en France Antoine Léger dans les années 1820 (viol, meurtre, cannibalisme,vampirisme), le sergent Bertrand dans les années 1847—1849 (le « vampire de Montparnasse ») ; en Allemagne, Peter Kurten (le « Vampire de Düsseldorf ») et Fritz Haarman (le « vampire de Hanovre ») ; aux États-Unis, Albert Fish (cannibalisme) et enfin en Grande-Bretagne, John Haigh (le « acid-bath murderer »).