Proposée par Véronique Servat, enseignante d’Histoire Géographie, pour les élèves de Troisième et de Première. Cette séquence sous la forme de diaporamas, permet à partir de frises chronologiques et de nombreux documents de différentes natures (coupures de presse, photographies, extraits d’ouvrages historiques ou de déclarations politiques de l’époque) d’étudier les lieux, les acteurs et les enjeux de la guerre d’indépendance algérienne.
Fiche pédagogique "Guerre d’Algérie et immigration algérienne" 1954-1958
1. GUERRE D’ALGERIE ET IMMIGRATION ALGERIENNE : DE LA TOUSSAINT ROUGE A LA CHUTE DE LA IV° RÉPUBLIQUE.
EN ALGÉRIE EN FRANCE
1954
211 000 Algériens en métropole.
Mars : L’état d’urgence est instauré
dans les Aurès et la Grande Kabylie.
1955 Août : Départ des premiers appelés pour
1er Novembre : Toussaint Rouge l’Algérie.
Janvier-février : multiplications des règlements de
compte entre FLN et MNA.
Mars : Vote des pouvoirs spéciaux.
Mai : Embuscade de Palestro 1956
Octobre : création de la SONACOTRAL.
1957 : Ouverture en métropole des premiers camps d’assignation à résidence.
Janvier à septembre : Bataille Intensification des règlements de comptes entre FLN et MNA
d’Alger. Massu a tous les
pouvoirs pour liquider le FLN
1957
Juin : disparition du militant
communiste algérien Maurice
Audin.
13 mai 58 : Manifestation à Alger. Un Comité de Salut Public
réunissant des militaires est constitué. Le 15 mai, Le général 1er juin 1958 : Le Général de Gaulle est investi par l’Assemblée Nationale
1958
Salan membre du Comité fait acclamer de Gaulle par la foule et devient président du Conseil. Le PCF vote contre, ainsi qu’une parti
encore réunie. des socialistes et radicaux.
2. 1954 : Le temps de l’insurrection.
Pourquoi parle-t-on de « Toussaint rouge »?
Le 1er novembre 1954, jour de la Toussaint, le FLN (Front de Libération
Nationale) organisation inconnue jusqu’alors revendique plusieurs
attentats sur le sol algérien.
Quelles mesures correspondent à la situation d’état d’urgence?
Une du Parisien libéré le 2 novembre 1954
3. 1954-1955 : L’engagement.
Le point sur les appelés en Algérie :
A l’âge de 20 ans, tout jeune homme doit effectuer son service militaire, c’est alors un conscrit. La loi du 25
novembre 1950 fixe à 18 mois la durée de celui-ci. Mais, pour faire face aux besoins en hommes liés à la guerre,
sans cesse croissants, le gouvernement prolonge le maintien des conscrits appelés sous les drapeaux. Très
jeunes sont donc ces « appelés en Algérie » qui quittent la France à partir d’août 1955. Il seront 1,2 million dans
ce cas jusqu’en 61. Leur temps de présence sous les drapeaux selon les spécialités et grades peut varier de 24 à 33
mois. D’autres hommes s’engagent volontairement alors qu’ils ont déjà rempli leurs obligations militaires, ce sont
les réservistes.
MNA et FLN : deux partis politiques qui veulent mener l’Algérie à son indépendance.
Le MNA (Mouvement National Sur cette photo posent les 6 chefs
Algérien) s’appelle jusqu’en historiques du FLN (Front de Libération
1954 le Mouvement pour le Nationale), l’autre parti politique qui
Triomphe des Libertés lutte pour l’indépendance algérienne. Il
Démocratiques en Algérie est fondé en 1954 par des membres du
(MTLD). Fondé par Messali MTLD qui quittent alors le mouvement
Hadj (ci-contre), ce parti de M. Hadj, optant pour l’action directe.
politique milite pour Le FLN possède une branche armée
l’indépendance de l’Algérie . appelée l’ALN (Armée de Libération
Nationale).
Tout au long du conflit, les deux partis
Photographie de Messali Hadj
(à droite : les six chefs historiques du FLN en 1954) s’opposent pour avoir l’appui des civils
algériens qu’ils vivent en Algérie ou en
France. Cette opposition qui va parfois
jusqu’à la mort, tourne largement en la
faveur du FLN.
4. 1956-1957 : L’engrenage.
Pouvoirs spéciaux? Pour qui ? Pour quoi? Palestro: le massacre des appelés.
Le vote des pouvoirs spéciaux au gouvernement socialiste en place soutenu
par le Parti communiste français intensifie la présence militaire en Algérie et
étend l’état d’urgence à tout le territoire. La présence française en Algérie
s’accroit avec notamment l’envoi de rappelés du contingent qui débarquent
sur le territoire algérien en avril 1956.
Le 18 mai 1956, 17 jeunes appelés commandés par H. Arthur tombent dans
l’embuscade tendue par un groupe de combattants de l’ALN. Il n’y a qu’un seul
Visionner le reportage d’actualité sur la survivant. Les corps des appelés sont criblés de balles, mutilés. Dans l’opinion
situation en 1956. publique en France, l’émotion est vive. Le massacre issu de l’embuscade de
Palestro symbolise pour longtemps la sauvagerie des combattants algériens
aux yeux de la puissance coloniale.
Melouza : le massacre des messalistes. Maurice Audin : Arrêté, Torturé, Assassiné.
Maurice Audin (ci contre), 25 ans, est
assistant en mathématiques à l’université
d’Alger et militant au Parti Communiste
Algérien. Il est arrêté à son domicile le 11
juin 1957 par les parachutistes et emmené
au centre El Biar.
Sa femme ne le reverra jamais, l’armée lui dit
qu’il a disparu après s’être échappé.
Différentes enquêtes menées par Henri Alleg
et Pierre Vidal-Naquet notamment
conduisent à une tout autre conclusion.
Maurice Audin a été torturé puis assassiné
par strangulation des mains du colonel
Charbonnier.
Le 28 mai 1957 les habitants pro- MNA du village de Photographie de Maurice Audin.
Melouza sont massacrés par une unité de l’ALN. On A gauche : le massacre de Melouza (ECPAD)
déplore plus de 300 morts.
5. 1957 : la Bataille d’Alger.
La bataille d’Alger : les
parachutistes français de Massu et
Bigeard chassent le FLN de la
Casbah d’Alger.
L’automne 56 est marqué par une montée des violences en
particulier des attentats à Alger. Le gouvernement mandate le
général Massu et les parachutistes de Bigeard pour briser
l’organisation du FLN dans la capitale.
La vieille ville d’Alger, la Casbah est fouillée, surveillée, quadrillée.
Ses habitants sont contrôlés, arrêtés, torturés.
En septembre 57, Yacef Saadi, chef du FLN à Alger est pris. Cette
arrestation sonne la fin de la bataille et la défaite du FLN dans la
capitale.
Mais le FLN n’a pas perdu la guerre, il réoriente sa stratégie vers
l’extérieur, cherchant à interpeller l’opinion et la scène politique
internationale pour les rallier à sa cause.
6. Mai-juin 1958 : La République vacille, regards divergents sur les évènements.
Visionner le reportage d’actualité sur a situation à Alger en 1958.
« Réduire la rébellion de l’armée, la chute de la « Je suis de ceux qui dans cette assemblée ont Travailleurs et républicains, françaises,
IV° République et l’avènement du général de suivi le Général de Gaulle pendant la guerre et français,
Gaulle à l’ambition et aux intrigues du chef de la qui en conservent, je m’excuse de le dire, L’Assemblée Nationale vient d’être mise en
France libre serait donner à d’aussi grands quelques fiertés. Je suis de ceux, même s’ils demeure par le président de la République
changements une explication mesquine et fausse. n’ont pas toujours approuvé telles de ses d’avoir à désigner le général de Gaulle comme
Un peuple tout entier ne bouge pas en ses positions politiques, qui pensaient que le chef du gouvernement. Cette sommation
profondeurs par la chiquenaude d’un général de Gaulle pouvait peut-être un jour intolérable intervient au moment où la
commando.(…) prochain mettre au service de la patrie divisée majorité républicaine a manifesté par des
Ce n’est pas fantaisie du hasard si rarement et déchirée l’immense capital de prestige, de votes massifs et répétés son refus de
régime disparut avec autant de discrétion que gloire et de confiance dont il dispose (…). précipiter le pays dans des aventure et la
celui que la quasi unanimité des français porta Aux yeux de beaucoup de français, de Gaulle guerre civile et où, à travers toute la France,
joyeusement en terre en 1958. Pas de morts sur pouvait être l’artisan le meilleur de la s’affirme avec une puissance imposante la
les barricades, pas de président en exil, pas de réconciliation nationale. Nombreux sont ceux volonté de défense républicaine.
leader politique en prison, pas de coup de fusil qui se sont tournés vers le libérateur de la Au même instant, à Alger, le général factieux
tirés en l’air, pas de paroles historiques. Non, (…) patrie et lui ont demandé (…) de s’expliquer Massu, au nom des rebelles que de Gaulle n’a
rien qu’un président du conseil tombé de bonne sur le drame national qui nous accable (…). cessé de couvrir et d’encourager, se déclare
grâce dans le trou du souffleur. La IV° mourut A ces appels le Général de Gaulle n’a jamais prêt à porter celui-ci au pouvoir par la force
comme elle avait vécu : d’indifférence… » répondu. Mais voici qu’une sédition (1) a armée sur une décision de sa part.
éclaté à Alger, que des hommes civils ou Ni le Parlement, ni le pays n’acceptent ce
F. Mitterrand, Le Coup d’état permanent, 1965. militaires ont pris les graves décisions que double défi. (…)
vous savez (…). Et voici qu’aussitôt ils ont Par son unité, par sa détermination le peuple
obtenu ce que tant d’autres avaient attendu de France brisera le complot des généraux
en vain si longtemps : la voix du 18 Juin s’est factieux et des hommes de la guerre civile.
élevée de nouveau mais hélas ! Pour justifier
ou excuser leur comportement (…). L’Humanité, journal du Parti Communiste
Français. 30 mai 58.
P. Mendes France, Intervention à l’Assemblée
Nationale, 20 mai 58.
1 : sédition = révolte contre l’autorité légale.
7. L’immigration algérienne en France : aspects démographiques.
Une immigration antérieure à la guerre d’indépendance : Qui se poursuit après 1945 :
«Dans l’immédiat après-guerre, l’immigration reprend fortement. Sur la courte période allant
de 1947 à 1953, se concentrent 746 000 arrivées et 561 000 retours, soit un solde de 185 000
individus très majoritairement des hommes jeunes et célibataires.
Comme pour les décennies précédentes, il s’agit de migrations temporaires. Néanmoins, cette
migration tend à se sédentariser et à se diversifier puisque les Kabyles sont désormais rejoints
par des migrants d’Oran, de Constantine, des Aurès, de Tlemcen et même des territoires du
Sud. La région parisienne assoit son attractivité. »
P. Derder, Immigration algérienne et guerre d’indépendance, coéd. La
Documentation française-Cité nationale de l’histoire de l’immigration, 2012
C’est avec la Première guerre mondiale que débute l’immigration
algérienne avec l’enrôlement de soldats coloniaux algériens (photo ci
dessus) dans l’armée. C’est durant la guerre qu’est d’ailleurs construite à Et s’intensifie durant la guerre d’indépendance
Paris la toute 1ère mosquée, au jardin d’agronomie tropicale de Nogent sur algérienne :
Marne alors transformé en hôpital pour les soldats coloniaux blessés au
combat. (ci dessus). La France fera de nouveau appel aux soldats venus
de son empire, et d’Algérie pour le deuxième conflit mondial comme
l’évoque le film Indigènes de R. Bouchareb.
Ce roman, paru en 1967, évoque la relation
amoureuse entre une jeune bordelaise
venue à Paris et un ouvrier algérien
employé dans l’automobile pendant la
Visionner la bande annonce du guerre d’Algérie.
film Indigènes.
Voir une présentation du film
adapté du roman par son
réalisateur et l’actrice principale
du film.
P. Derder, idem, p. 21
8. L’immigration algérienne en France : aspects politiques.
L’immigration algérienne en France : Un soutien. L’immigration algérienne en France : une
organisation.
Sur les 250 000 algériens travaillant en France en 1958, on
estime à 60 milliards d’anciens francs l’envoi d’argent vers les Sur cette carte, on voit la façon dont le FLN organise sa
familles au pays ce qui représente la moitié des salaires de ces présence en France. Le territoire est séparé en 4 wilayas.
travailleurs immigrés. Le nombre de membres du FLN en France passe de 8000
Bon nombre de travailleurs investissent contraints ou forcés en 1956 à 15000 en 57.
une partie de leurs salaires en soutenant les deux principales A cette date
formations politiques (MNA et FLN) sous formes de cotisations -La wilaya n°1 compte 3500 adhérents.
et de dons financiers (impôt révolutionnaire. Les sommes ci -La wilaya n°2 compte 3900 adhérents.
dessous représente ce qui fut saisi de ses fons chaque année par -La wilaya n°3 compte 2500 adhérents.
la police e métropole. -La wilaya n°4 compte 1900 adhérents.
Peu de temps avant l’insurrection du 1er
Novembre, la Fédération de France des partisans
du MTLD appelle ses adhérents à soutenir leur
chef historique par l’envoi de lettres.
L’immigration algérienne en France est partie
prenante du conflit sur le plan politique. Elle doit
se positionner en faveur des partisans de M. Hadj
ou de ceux du FLN.
Source ina.fr
9. L’immigration algérienne en France : aspects politiques.
L’immigration algérienne en France : un enjeu.
Le tableau ci dessous (B. Stora, Les immigrés algériens en France, Témoin des tensions entre le MNA et le FLN, Chérif restitue dans cet
Hachette, 2009) décompte le bilan humain des affrontements entretien le climat dans la communauté des algériens de France
entre le MNA et le FLN en métropole durant la guerre pendant le conflit.
d’indépendance algérienne. On constate une recrudescence des
incidents violents mortels durant les années où l’engrenage de la « – Je travaillais à l’usine de 13 heures à 21 heures. Je ne prenais jamais
guerre s’enclenche sur l’autre rive de la Méditerranée le même chemin. Pas par là, par crainte des Arabes qui t’attendaient. Si
tu passais par ici, c’était la police...– Quels « Arabes » ? Ceux du
MNA ?– Oui, ceux du MNA. Les partisans de Messali. La journée, la
police faisait des contrôles dans les cafés FLN. Ils nous contrôlaient. Et
le soir, les messalistes venaient nous tirer dessus. Il valait mieux rester
dans les cafés français pour être tranquille. C’était la misère ici,
pendant les sept années de guerre. Il fallait échapper aux Arabes et aux
Français. Tu te protégeais d’un côté et ça venait de l’autre... En plus, à
l’époque, les CRS et la gendarmerie avaient carte blanche. Des gens ont
été tués, jetés dans le canal. Certains ont été tués dans les cafés.
D’autres en pleine rue ».
Extrait du documentaire de Leïla HABCHI et Benoît PRIN, Les Jardiniers
de la rue des Martyrs (d’abord présenté dans la région du Nord, il a été
aussi diffusé sur Arte le 10 février 2003)
Deux ouvrages qui abordent la question de
la guerre entre les Messalistes et le FLN.
Paru en 1986 (éd. Seuil), celui d’A. Haroun
envisage plutôt la question de l’intérieur
du FLN dont il est membre du comité
fédéral.
Paru en 2008 (éd. du Seuil), celui de L.
Belaïd envisage la question du point de
vue du MNA partant de l’expérience de
son père Salah, chef de zone dans le Nord
Pas de Calais.