12. 1. Caractérisation des deux esthétiques
Art baroque
Art classique
Maître Corbeau, sur un arbre perché, Tenait en son bec un fromage. Maître Renard, par l'odeur alléché, Lui tint à peu près ce langage : "Hé ! bonjour, Monsieur du Corbeau. Que vous êtes joli ! que vous me semblez beau ! Sans mentir, si votre ramage Se rapporte à votre plumage, Vous êtes le Phénix des hôtes de ces bois." A ces mots le Corbeau ne se sent pas de joie ; Et pour montrer sa belle voix, Il ouvre un large bec, laisse tomber sa proie. Le Renard s'en saisit, et dit : "Mon bon Monsieur, Apprenez que tout flatteur Vit aux dépens de celui qui l'écoute : Cette leçon vaut bien un fromage, sans doute. " Le Corbeau, honteux et confus, Jura, mais un peu tard, qu'on ne l'y prendrait plus.
13. 1. Caractérisation des deux esthétiques
Art baroque
Art classique
Jean de Sponde, Stances de la mort
Je m’ennuie de vivre, et mes tendres années,
Gémissant sous le faix de bien peu de journées,
Me trouvent au milieu de ma course cassé :
Si ce n’est pas du tout par défaut de courage,
Mais je prends, comme un port, à la fin de l’orage,
Dédain de l’avenir pour l’horreur du passé.
Malherbe
Consolation à M. du Périer
Ta douleur, du Périer, sera donc éternelle,
Et les tristes discours
Que te met en l’esprit l’amitié paternelle
L’augmenteront toujours ?
Le malheur de ta fille au tombeau descendue
Par un commun trépas,
Est-ce quelque dédale, où ta raison perdue
Ne se retrouve pas ?
Je sais de quels appas son enfance était pleine,
Et n’ai pas entrepris,
Injurieux ami, de soulager ta peine
Avecque son mépris.
Mais elle était du monde, où les plus belles choses
Ont le pire destin ;
Et rose elle a vécu ce que vivent les roses,
L’espace d’un matin.
14. 1. Caractérisation des deux esthétiques
Art baroque
Art classique
Quinault
Hier je servais un maître, aujourd’hui j’en suis un,
Hier j’étais en malheur, aujourd’hui dans la chance,
Hier je perdais Elise, aujourd’hui je fiance,
Hier j’attendais des maux, aujourd’hui des biens
…
Tout change enfin, Messieurs.
G. Durand, Stances à l’inconstance
Notre esprit n’est que vent, et comme un vent volage,
Ce qu’il nomme constance est un branle rétif ;
Ce qu’il pense aujourd’hui demain n’est qu’un ombrage,
Le Passé n’est plus rien, le futur un nuage,
Et ce qu’il tient présent il le sent fugitif.
Je peindrais volontiers mes légères pensées,
Mais déjà le pensant mon penser est changé,
Ce que je tiens m’échappe, et les choses passées,
Toujours par le présent se tiennent effacées,
Tant à ce changement mon esprit est rangé.
Boileau, Art poétique
Enfin Malherbe vint, et, le premier en France,
Fit sentir dans les vers une juste cadence,
D’un mot mis en sa place enseigna le pouvoir,
Et réduisit la muse aux règles du devoir.
Par ce sage écrivain, la langue réparée
N’offrit plus rien de rude à l’oreille épurée.[…]
Marchez donc sur ses pas ; aimez sa pureté,
Et de son tour heureux imitez la clarté.
Si le sens de vos vers tarde à se faire entendre,
Mon esprit aussitôt commence à se détendre,
Et, de vos vains discours prompt à se détacher,
Ne suit point un auteur qu’il faut toujours chercher.
Il est de certains esprits dont les sombres pensées
Sont d’un nuage épais toujours embarrassées ;
Le jour de la raison ne le saurait percer.
Avant donc que d’écrire, apprenez à penser.
Selon que notre idée est plus ou moins obscure,
L’expression la suit, ou moins nette, ou plus pure.
Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement,
Et les mots pour le dire arrivent aisément.
15. 1. Caractérisation des deux esthétiques
Art baroque
Art classique
Jean Rousset, historien du XXe s.
Cette époque qui a dit et cru, plus que tout autre, que le monde est un théâtre et la vie une comédie où il faut revêtir un rôle, était destinée à faire de la métaphore une réalité ; le théâtre déborde hors du théâtre, envahit le monde, le transforme en une scène animée par les machines, l’assujettit à ses propres lois de mobilité et de métamorphose. […]
Tout se meut ou s’envole, rien n’est stable, rien n’est plus ce qu’il prétend être, les frontières entre la réalité et le théâtre s’effacent dans un perpétuel échange d’illusions et la seule réalité qui demeure est le flot des apparences cédant à d’autres apparences, semblables à l’eau du fleuve dont les îles et les rochers sont plus fugitifs que l’eau même.
Paul Hazard, historien de la littérature du XXème
L’esprit classique, en sa force, aime la stabilité : il voudrait être la stabilité même. Après la Renaissance et la Réforme, grandes aventures, est venue l’époque du recueillement. […] L’ordre règne dans la vie : pourquoi tenter, en dehors du système clos qu’on a reconnu pour excellent, des expériences qui remettraient tout en cause ? On a peur de l’espace qui contient les surprises ; et on voudrait, s’il était possible, arrêter le temps. A Versailles, le visiteur a l’impression que les eaux elles- mêmes ne s’écoulent pas. […]
16. 1. Caractérisation des deux esthétiques
Art baroque
Art classique
Le Bernin,
Apollon et Daphné
17. 1. Caractérisation des deux esthétiques
Art baroque
Art classique
Ch. Le Brun, Chute des anges rebelles
Rubens, Chute des anges rebelles
18. 1. Caractérisation des deux esthétiques
Art baroque
Art classique
N. Poussin,
Bergers en Arcadie
19. 1. Caractérisation des deux esthétiques
Art baroque
Art classique
Georges de la Tour,
La Madeleine à la veilleuse
20. 1. Caractérisation des deux esthétiques
Art baroque
Art classique
Cl. Gellée dit Le Lorrain,
Vue de Carthage
avec Enée et Didon
21. 1. Caractérisation des deux esthétiques
Art baroque
Art classique
J.-B. Marino, Rimes, 1602
C’est une flèche, non une aiguille
Dont use à son ouvrage
Celle que j’adore, nouvelle Arachné d’amour:
Alors qu’elle orne et brode le beau lin,
Elle perce mon coeur, le point de mille traits.
Hélas! Ce beau fil rouge-sang
Que tire, coupe et noue,
Affine, tourne et tord
La belle main de l’aimée,
C’est le fil de ma vie.
22. 1. Caractérisation des deux esthétiques
Art baroque
Art classique
Le Caravage,
Tête de Méduse
23. 1. Caractérisation des deux esthétiques
Art baroque
Art classique
N. Poussin,
le Jugement de Salomon
24. 1. Caractérisation des deux esthétiques
Art baroque
Art classique
Le Bernin
Girardon
Jean Varin
25. 1. Caractérisation des deux esthétiques
Art baroque
Art classique
William SHAKESPEARE, Roméo et Juliette: sc.1
BENVOLIO. - Amoureux ? ROMÉO. - Éperdu... BENVOLIO. - D'amour ? ROMÉO. - Des dédains de celle que j'aime. BENVOLIO. - Hélas ! faut-il que l'amour si doux en apparence, soit si tyrannique et si cruel à l'épreuve ! ROMÉO. - Hélas ! faut-il que l'amour malgré le bandeau qui l'aveugle, trouve toujours, sans y voir, un chemin vers son but !... Où dînerons-nous ?... ô mon Dieu !... Quel était ce tapage ?... Mais non, ne me le dis pas, car je sais tout ! Ici on a beaucoup à faire avec la haine, mais plus encore avec l'amour... Amour ! ô tumultueux amour ! ô amoureuse haine ! ô tout, créé de rien ! ô lourde légèreté ! Vanité sérieuse ! Informe chaos de ravissantes visions ! Plume de plomb, lumineuse fumée, feu glacé, santé maladive ! Sommeil toujours éveillé qui n'est pas ce qu'il est ! Voilà l'amour que je sens et je n'y sens pas d'amour... Tu ris, n'est-ce pas ? BENVOLIO. - Non, cousin : je pleurerais plutôt. ROMÉO. - Bonne âme !... et de quoi ? BENVOLIO. - De voir ta bonne âme si accablée. ROMÉO. - Oui, tel est l'effet de la sympathie. La douleur ne pesait qu'à mon coeur, et tu veux l'étendre sous la pression de la tienne : cette affection que tu me montres ajoute une peine de plus à l'excès de mes peines. L'amour est une fumée de soupirs ; dégagé, c'est une flamme qui étincelle aux yeux des amants ; comprimé, c'est une mer qu'alimentent leurs larmes. Qu'est-ce encore ? La folle la plus raisonnable, une suffocante amertume, une vivifiante douceur !... Au revoir, mon cousin. (Il va pour sortir )
26. 1. Caractérisation des deux esthétiques
Art baroque
Art classique
Jean RACINE, Andromaque, IV, sc. 5 - PYRRHUS, HERMIONE
PYRRHUS
Vous ne m'attendiez pas, Madame ; et je vois bien
Que mon abord ici trouble votre entretien.
Je ne viens point, armé d'un indigne artifice,
D'un voile d'équité couvrir mon injustice ;
Il suffit que mon coeur me condamne tout bas ;
Et je soutiendrais mal ce que je ne crois pas.
J'épouse une Troyenne. Oui, Madame, et j'avoue
Que je vous ai promis la foi que je lui voue.
Un autre vous dirait que dans les champs troyens
Nos deux pères sans nous formèrent ces liens,
Et que, sans consulter ni mon choix ni le vôtre,
Nous fûmes sans amour engagés l'un à l'autre ;
Mais c'est assez pour moi que je me sois soumis.
Par mes ambassadeurs mon coeur vous fut promis ;
Loin de les révoquer, je voulus y souscrire.
Je vous vis avec eux arriver en Epire ;
Et quoique d'un autre oeil l'éclat victorieux
Eût déjà prévenu le pouvoir de vos yeux,
Je ne m'arrêtai point à cette ardeur nouvelle :
Je voulus m'obstiner à vous être fidèle,
Je vous reçus en reine ; et jusques à ce jour
J'ai cru que mes serments me tiendraient lieu d'amour.
Mais cet amour l'emporte ; et, par un coup funeste,
Andromaque m'arrache un coeur qu'elle déteste.
L'un par l'autre entraînés, nous courons à l'autel
Nous jurer, malgré nous, un amour immortel.
Après cela, Madame, éclatez contre un traître,
Qui l'est avec douleur, et qui pourtant veut l'être.
Pour moi, loin de contraindre un si juste courroux,
Il me soulagera peut-être autant que vous.
Donnez-moi tous les noms destinés aux parjures :
Je crains votre silence, et non pas vos injures
Et mon coeur, soulevant mille secrets témoins,
M'en dira d'autant plus que vous m'en direz moins.
27. 1. Caractérisation des deux esthétiques
Art baroque
Art classique
Ecole française,
Louis XIV tenant les sceaux
28. 1. Caractérisation des deux esthétiques
Art baroque
Art classique
Rembrandt, Anatomie du docteur Tulp
29. 1. Caractérisation des deux esthétiques
Art baroque
Art classique
Le Caravage,
Dionysos Narcisse
30. 1. Caractérisation des deux esthétiques
Art baroque
Art classique
CLINDOR
Quoi ! monsieur, vous rêvez ! et cette âme hautaine,
Après tant de beaux faits, semble être encore en peine !
N’êtes-vous point lassé d’abattre des guerriers ?
Et vous faut-il encor quelques nouveaux lauriers ?
MATAMORE
Il est vrai que je rêve, et ne saurais résoudre
Lequel je dois des deux le premier mettre en poudre,
Du grand sophi de Perse, ou bien du grand mogor.
CLINDOR
Eh ! de grâce, monsieur, laissez-les vivre encor.
Qu’ajouterait leur perte à votre renommée ?
D’ailleurs, quand auriez-vous rassemblé votre armée ?
MATAMORE
Mon armée ? Ah, poltron ! ah, traître ! pour leur mort
Mon courage invaincu contre les empereurs
N’arme que la moitié de ses moindres fureurs ;
D’un seul commandement que je fais aux trois Parques,
Je dépeuple l’État des plus heureux monarques ;
La foudre est mon canon, les Destins mes soldats :
Je couche d’un revers mille ennemis à bas.
D’un souffle je réduis leurs projets en fumée ;
Et tu m’oses parler cependant d’une armée !
Tu n’auras plus l’honneur de vois un second Mars ;
Je vais t’assassiner d’un seul de mes regards,
Veillaque : toutefois, je songe à ma maîtresse ;
Ce penser m’adoucit : Va, ma colère cesse,
Et ce petit archer qui dompte tous les dieux
Vient de chasser la mort qui logeait dans mes yeux.
Regarde, j’ai quitté cette effroyable mine
Qui massacre, détruit, brise, brûle, extermine ;
Et pensant au bel oeil qui tient ma liberté,
Je ne suis plus qu’amour, que grâce, que
Corneille, l’illusion comique
31. 1. Caractérisation des deux esthétiques
Art baroque
Art classique
Michel Eyquem de MONTAIGNE (sde ½ XVIe s.), Essais, II, i.
CEUX qui s'exerçent à contreroller les actions humaines, ne se trouvent en aucune partie si empeschez, qu'à les rapiesser et mettre à mesme lustre : car elles se contredisent communément de si estrange façon, qu'il semble impossible qu'elles soient parties de mesme boutique. Le jeune Marius se trouve tantost fils de Mars, tantost fils de Venus. Le Pape Boniface huictiesme, entra, dit-on, en sa charge comme un renard, s'y porta comme un lion, et mourut comme un chien. Et qui croiroit que ce fust Neron, cette vraye image de cruauté, comme on luy presentast à signer, suyvant le stile, la sentence d'un criminel condamné, qui eust respondu : Pleust à Dieu que je n'eusse jamais sceu escrire : tant le coeur luy serroit de condamner un homme à mort. Tout est si plein de tels exemples, voire chacun en peut tant fournir à soy-mesme, que je trouve estrange, de voir quelquefois des gens d'entendement, se mettre en peine d'assortir ces pieces : veu que l'irresolution me semble le plus commun et apparent vice de nostre nature ; tesmoing ce fameux verset de Publius le farseur,
Malum consilium est, quod mutari non potest.
Il y a quelque apparence de faire jugement d'un homme, par les plus communs traicts de sa vie ; mais veu la naturelle instabilité de nos moeurs et opinions, il m'a semblé souvent que les bons autheurs mesmes ont tort de s'opiniastrer à former de nous une constante et solide contexture. Ils choisissent un air universel, et suyvant cette image, vont rengeant et interpretant toutes les actions d'un personnage, et s'ils ne les peuvent assez tordre, les renvoyent à la dissimulation. Auguste leur
33. Boileau, chantre du classicisme
Premier extrait
Durant les premiers ans du Parnasse françois,
Le caprice tout seul faisait toutes les lois ;
[…]
Villon sut le premier, dans ces siècles grossiers,
Débrouiller l’art confus de nos vieux romanciers.
Marot bientôt après fit fleurir les ballades,
Tourna des triolets, rima des mascarades,
A des refrains réglés asservit les rondeaux,
Et montra pour rimer des chemins tout nouveaux.
Ronsard, qui le suivit, par une autre méthode,
Réglant tout, brouilla tout, fit un art à sa mode,
Et toutefois longtemps eut un heureux destin.
Mais sa muse, en français parlant grec et latin,
Vit dans l’âge suivant, par un retour grotesque
Tomber de ses grands mots le faste pédantesque.
Ce poète orgueilleux, trébuché de si haut,
Rendit plus retenus Desportes et Bertaut.
Enfin Malherbe vint, et, le premier en France,
Fit sentir dans les vers une juste cadence,
D’un mot mis en sa place enseigna le pouvoir,
Et réduisit la muse aux règles du devoir.
34. Boileau
Deuxième extrait
Quelque sujet qu’on traite, ou plaisant, ou sublime,
Que toujours le bon sens s’accorde avec la rime :
[…]
Au joug de la raison sans peine elle fléchit,
Et, loin de la gêner, la sert et s’enrichit,
Mais, lorsqu’on la néglige, elle devient rebelle ;
Et pour la rattraper le sens court après elle.
Aimez donc la raison : que toujours vos écrits
Empruntent d’elle seule et leur lustre et leur prix.
Tout doit tendre au bon sens…
La raison pour marcher n’a souvent qu’une voie.
Un auteur quelquefois, trop plein de son objet,
Jamais sans l’épuiser n’abandonne un sujet.
S’il rencontre un palais, il m’en dépeint la face ;
Il me promène après de terrasse en terrasse :
Ici s’offre un perron ; là règne un corridor ;
Là ce balcon s’enferme en un balustre d’or.
[…]
Je saute vingt feuillets pour en trouver la fin,
Et je me sauve à peine au travers du jardin.
Fuyez de ces auteurs l’abondance stérile,
Et ne vous chargez point d’un détail inutile.
Tout ce qu’on dit de trop est fade et rebutant :
L’esprit rassasié le rejette à l’instant.
Qui ne sait se borner ne sut jamais écrire.
[…]
Surtout qu’en vos écrits la langue révérée
Dans vos plus grands excès vous soit toujours sacrée,
En vain vous me frappez d’un son mélodieux,
Si le terme est impropre, ou le tour vicieux :
Mon esprit n’admet point un pompeux barbarisme,
Ni d’un vers ampoulé l’orgueilleux solécisme.
Sans la langue, en un mot, l’auteur le plus divin
Est toujours, quoi qu’il fasse, un méchant écrivain.
35. Boileau
Deuxième extrait
Quelque sujet qu’on traite, ou plaisant, ou sublime,
Que toujours le bon sens s’accorde avec la rime :
[…]
Au joug de la raison sans peine elle fléchit,
Et, loin de la gêner, la sert et s’enrichit,
Mais, lorsqu’on la néglige, elle devient rebelle ;
Et pour la rattraper le sens court après elle.
Aimez donc la raison : que toujours vos écrits
Empruntent d’elle seule et leur lustre et leur prix.
Tout doit tendre au bon sens…
La raison pour marcher n’a souvent qu’une voie.
Un auteur quelquefois, trop plein de son objet,
Jamais sans l’épuiser n’abandonne un sujet.
S’il rencontre un palais, il m’en dépeint la face ;
Il me promène après de terrasse en terrasse :
Ici s’offre un perron ; là règne un corridor ;
Là ce balcon s’enferme en un balustre d’or.
[…]
Je saute vingt feuillets pour en trouver la fin,
Et je me sauve à peine au travers du jardin.
Fuyez de ces auteurs l’abondance stérile,
Et ne vous chargez point d’un détail inutile.
Tout ce qu’on dit de trop est fade et rebutant :
L’esprit rassasié le rejette à l’instant.
Qui ne sait se borner ne sut jamais écrire.
[…]
Surtout qu’en vos écrits la langue révérée
Dans vos plus grands excès vous soit toujours sacrée,
En vain vous me frappez d’un son mélodieux,
Si le terme est impropre, ou le tour vicieux :
Mon esprit n’admet point un pompeux barbarisme,
Ni d’un vers ampoulé l’orgueilleux solécisme.
Sans la langue, en un mot, l’auteur le plus divin
Est toujours, quoi qu’il fasse, un méchant écrivain.