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Portrait de Petre Metu, l'ancien international roumain atteint de la maladie de Charcot
- 1. 29/6/2015 Detaille Article
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ATTEINT DE LA MALADIE DE CHARCOT, L’ANCIEN INTERNATIONAL
ROUMAIN ET DEMI DE MÊLÉE MONTALBANAIS, PETRE MITU, SE BAT
COMME UN LION POUR SA FEMME ET SES DEUX FILS.
TOUJOURS DEBOUT !
Par Jérôme FREDON, jerome.fredon@midi
olympique.fr
Pour Petre Mitu, le bonheur, c’est simple comme un boire
un verre de vin rouge, manger un bon confit de canard
aux cèpes ou encore déguster une glace fraisecitron.
Des actes ordinaires voire insignifiants pour le commun
des mortels. Mais ô combien indispensables pour l’ancien
demi de mêlée international roumain de Montauban,
Tarbes ou encore Aurillac. Ces petits plaisirs si futiles en apparence lui rappellent combien il est
important de savourer pleinement chaque instant de l’existence. Ils l’aident à se sentir plus vivant
que jamais et lui donnent l’énergie de lutter contre la maladie.
Le temps d’une promenade ensoleillée dans les rues de Sarlat où il s’est prêté avec amusement
aux desiderata de notre photographe, Petre Mitu a retrouvé l’insouciance de son enfance. Sourire
radieux illuminant son visage, il était comme un gosse de 37 ans devant sa glace. Surtout, cette
escapade en famille dans le Périgord forme une parenthèse enchantée au beau milieu du
cauchemar qu’il vit depuis le 13 mai 2014. Date où sa vie lui a échappé. Un neurologue indélicat
lui a appris qu’il souffrait d’une sclérose latérale amyotrophique. Une maladie neurologique
incurable. Huit patients sur dix atteints de cette maladie meurent dans les trois à cinq ans suivant
le diagnostic.
« Le médecin s’est montré très cruel dans la manière dont il m’a annoncé que je souffrais de cette
maladie, confietil soudainement rattrapé par ses émotions enfouies, la voix toute chevrotante. Il
m’a annoncé de but en blanc que j’allais mourir. Dans de telles circonstances, cela ne t’immunise
pas de peser 110 ou 90 kg. J’ai pété les plombs. La tête dans les mains, je me suis effondré, en
larmes. J’ai hurlé toute ma colère en même temps que mes pleurs. Je n’avais pas autant pleuré
depuis mon enfance. J’étais tellement effondré que lors du trajet de retour je n’arrivais plus à
parler. Plus aucun mot ne pouvait sortir. Je n’avais envie que d’une seule chose c’était de pleurer
encore et encore. »
- 2. 29/6/2015 Detaille Article
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Connue sous le nom de maladie de Charcot, cette pathologie est un trouble dégénératif des
neurones contrôlant les activités musculaires volontaires telles que le langage, la déglutition, la
respiration et la marche. Elle conduit à une atrophie des muscles allant jusqu’à la paralysie des
membres, l’incapacité de parler, de se nourrir et respirer sans assistance.
Cette maladie touche normalement 4 à 8 personnes sur 100 000. Mais elle a déjà tué Tinus Linee
et affecte profondément Joost Van der Westhuizen. Deux membres du groupe des Springboks
dans les années 1990. L’ancien demi de mêlée n’est plus que l’ombre de l’incroyable chef de
meute de l’équipe sudafricaine qui avait terrassé les All Blacks au cours de la finale du Mondial
1995. En fauteuil roulant, il a perdu toute autonomie et a besoin d’une paille pour boire. Peutil
s’agir d’une simple coïncidence alors que certains membres de cette génération dorée ont
reconnu prendre des pilules avant leurs matchs ?
UNE CARRIÈRE JALONNÉE DE 10 KO
La question du dopage se pose forcément. Mais Petre Mitu l’écarte d’un revers de main. « C’est
exactement la première question que m’a posée le docteur à Limoges. À ma connaissance non.
Les seules piqûres que l’on m’a administrées, c’était pour le vaccin contre la grippe. J’ai pris des
compléments alimentaires pour récupérer plus vite. Mais rien d’interdit. Contrairement à d’autres,
je n’ai jamais accepté de prendre des cachets donnés par le médecin du club pour prendre ou
perdre du poids. Je ne fumais et ne buvais pas. Je ne sortais jamais en boîte après les matchs.
J’ai toujours eu une hygiène de vie irréprochable. »
Et avec la sélection roumaine ? « Quand j’étais en équipe junior, le docteur nous a donnés une ou
deux fois des comprimés pour le foie afin de récupérer plus vite. S’il nous avait réellement donné
un produit nocif, je ne serai pas le seul aujourd’hui à avoir contracté cette maladie. »
Mitu se pose néanmoins la question d’un lien entre les commotions subies au cours de sa carrière
et la maladie. « Des KO, j’ai dû en faire près de 10 tout au long de ma carrière, confessetil. À
l’époque, on ne prenait aucune précaution. Il n’y avait pas de protocole pour les commotions.
Quand tu prenais un coup, tu rentrais à nouveau. Il m’est arrivé à la fin d’un match de demander à
mes partenaires où je me trouvais et qui avait gagné car je ne me souvenais plus de rien. Le KO le
plus impressionnant que j’ai fait ? C’était pour un tournoi en France avec la Roumanie. Sur le
terrain, je courais partout mais sans savoir pourquoi. Après le match, je suis tombé dans les
pommes dans la douche. À ce jour, les spécialistes n’ont établi aucun lien entre les coups
accumulés à la tête et la maladie. En revanche, des études ont démontré qu’en cas de KO, les
neurones pouvaient être touchés voire endommagés. »
- 3. 29/6/2015 Detaille Article
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Mitu n’est plus ce demi de mêlée orgueilleux, ce roquet prêt à mordre les mollets de ses
adversaires à la moindre occasion. Il marche au ralenti, peine à se servir de ses mains. Tenir une
conversation lui coûte en concentration et en énergie. Au fur et à mesure de cet entretien, sa
diction va en déclinant. Il a du mal à retrouver ses mots.
« Je dois beaucoup me reposer car la maladie me pompe beaucoup d’énergie. J’ai besoin tous les
jours de faire des siestes de deux heures au minimum pour recharger la batterie. Pourtant je fais
mes nuits : de 23 heures jusqu’à 8 heures du matin. Je mange aussi deux fois plus qu’il ne faut.
Seulement, je n’ai pas pris le moindre kilo. Dans mon cas, je ne dois surtout pas perdre du poids.
Plus je m’affaiblis, plus la maladie progresse. »
LE MONDE DU RUGBY FAIT CORPS
Pour endiguer la progression de cette cochonnerie, Mitu suit un traitement à base de cellules
souches. Cette thérapie s’accompagne de la prise quotidienne de toutes sortes de compléments
alimentaires. 21 pastilles le matin auxquelles viennent s’ajouter 19 comprimés absorbés le soir.
L’ancien cornac de Montauban fait également beaucoup d’acupuncture. Il fait une demiheure de
marche tous les jours afin de maintenir ses jambes en activité.
« Aujourd’hui, j’ai encore de la chance, affirmetil. Je suis encore autonome. Je conduis toujours
et surtout, je me lave tout seul. Ce qui me fout le plus les boules, c’est de ne plus pouvoir faire du
sport avec mes enfants. Je ne peux plus les suivre. Personnellement, je ne me vois pas devenir
handicapé. Le jour où cela se produit, je ne pourrai pas revenir en arrière. C’est extrêmement
douloureux de vivre en permanence avec cette épée de Damoclès audessus de la tête. Quand je
pense où j’étais il y a cinq ans et où je suis maintenant, c’est dur. »
Pris de sanglots dans la voix, Mitu termine péniblement sa phrase. Silence pesant. Il a besoin d’un
grand verre d’eau pour recouvrer ses esprits. Son passé de sportif de haut niveau reprend alors le
dessus. Mitu a gardé cette incroyable rage de vaincre et cette vaillance à toute épreuve qui
l’animaient sur les terrains. Pour son ultime combat, il s’accroche à cette vie comme jadis aux
chevilles de ses adversaires. « Aujourd’hui, j’ai arrêté de me poser la question. « Pourquoi moi ? À
cause de quoi cette maladie s’est déclenchée ? » L’énergie qu’il me reste, je veux la mettre dans
ma fondation pour mieux dépister et lutter contre cette maladie. »
Ses anciens frères d’armes ne l’ont pas oublié. Le monde du rugby fait corps à ses côtés pour
l’aider à garder jusqu’au bout sa dignité d’homme. Le président de la Fédération roumaine, Hari
Dumitras et son prédécesseur, Alin Petrache ont organisé avec l’aide de Mathias Rolland et
Grégory Arganese une vente aux enchères de maillots. Les différentes générations
d’internationaux roumains ont organisé une collecte de fonds pour participer au financement de sa